
La lettre d’Oriade Noviale - Mars 2017
A l’occasion de la récente actualisation du rapport du SPILF(1) de décembre
2015, les biologistes du groupe Oriade Noviale ont interrogé le Docteur Pierre
BATAILLER Praticien hygiéniste RIPIN - CHU Grenoble - Alpes, pour repréciser
les particularités du diagnostic et de la prise en charge de l’infection urinaire
(IU) chez le sujet âgé.
Il faut savoir que la prévalence locale sur une journée en 2016 des IU chez le sujet âgé
en institution est de 1.1% (résultat obtenu sur les 42 EHPAD participant au sein de
l’EMH* de Grenoble - RIPIN). * Equipe Mobile d’Hygiène à destination des EHPAD.
De plus, la difficulté de la prise en charge de ces IU est liée à une double
problématique :
L'infection urinaire est très fréquente mais les symptômes à cet âge sont
souvent frustres et atypiques, donc peu discriminants (syndrome
confusionnel, perte d’autonomie, chutes, décompensation d’une
comorbidité...).
D’autre part, le patient exprime peu ses symptômes et l’on observera
uniquement des signes indirects comme une incontinence d'apparition
récente, une agitation, une asthénie, une anorexie...
La présence de bactéries dans les urines recouvre des entités cliniques très
diverses qui relèvent d’une prise en charge radicalement différente selon
qu’il s’agit soit d’une simple colonisation urinaire elle-aussi très fréquente
(plus de 50% des femmes de plus de 80 ans en EHPAD et 30% en
communauté), soit d’une cystite aiguë non compliquée, soit de situations à
risque comme la pyélonéphrite, la prostatite, voire une infection compliquant
une uropathie.
Il convient donc d’adapter sa stratégie avec précision afin d’éviter 2 écueils :
Le premier serait de traiter des colonisations, ce qui contribue à augmenter
l’émergence de souches multi-résistantes et à induire des coûts de
traitements inutiles et provoquer parfois des effets indésirables pour les
patients.
Le deuxième serait de prendre en charge tardivement de réelles infections
qui justifient une adaptation thérapeutique précise grâce à l’antibiogramme.
Physiologiquement l’appareil urinaire est pauvre en cellules immunocompétentes et
l’augmentation de l’incidence de l'IU avec l'âge s’explique par des troubles de la
motricité vésicale avec comme corollaire la stase vésicale. L’existence de comorbidité
(comme le diabète, l’insuffisance rénale ou la baisse des défenses immunitaires), la
diminution de l’autonomie fonctionnelle , la déshydratation, le défaut d'hygiène
favorisent également les IU.
De plus chez la femme ménopausée la carence en œstrogène modifie la flore vaginale
provoquant la disparition des lactobacilles et une alcalisation du pH favorisant ainsi la
colonisation des urines par des souches uropathogènes.
D’autre part l’infection sur sonde à demeure est souvent asymptomatique et fréquente
(quasiment 100 % des patients après 30 jours de sondage).
Dr P. Batailler,
quelles sont les
particularités
justifiant une
prise en charge
spécifique de
l’infection
urinaire chez le
sujet âgé ?