Insuffisance respiratoire chronique Pauline Vermersch Interne de pneumologie – CHU Toulouse Mars 2015 Rappel physiologique • Respiration = transport de l’oxygène depuis l’air atmosphérique jusqu’à la cellule • Chaîne fonctionnelle : • Commande ventilatoire • Commande ventilatoire centrale • Muscles respiratoires • Système ventilatoire • Échanges air-sang : l’hématose • Autres fonctions de l’appareil respiratoire : • Élimination du CO2 • Équilibre acido-basique (avec le rein) Rappel physiologique Le système ventilatoire Rappel physiologique Le système ventilatoire Rappel physiologique La commande ventilatoire • Le centre respiratoire est situé dans le cerveau. • Activité cyclique alternant inspiration et expiration. • Permet de commander les muscles respiratoires (par l’intermédiaire des noyaux moteurs médullaires). Rappel physiologique Les muscles respiratoires • INSPIRATION = phénomène actif • • • • Contraction des muscles inspiratoires Augmentation de volume de la cage thoracique Diminution de la pression intra-thoracique Entrée de l’air • EXPIRATION = phénomène passif (sauf expiration forcée) • Relâchement des muscles inspiratoires • Rejet de l’air à l’extérieur Rappel physiologique Les muscles respiratoires • Les muscles inspiratoires sont prédominants (diaphragme +++) car ils sont mis en jeu en inspiration comme en expiration • Muscles expiratoires : uniquement en expiration forcée Rappel physiologique Echanges air-sang : l’hématose • Échanges gazeux au travers de la membrane alvéolo-capillaire en fonction d’un gradient de pression partielle Définition • L’IRC se définit par l’incapacité de l’appareil respiratoire à assurer les échanges gazeux : oxygénation et élimination du gaz carbonique. • Elle est toujours secondaire à une autre maladie qu’il faut diagnostiquer et traiter. • IRC : pO2 < 70 mmHg Mécanismes de l’hypoxémie 1- Inadéquation ventilation/perfusion - effet shunt - shunt vrai 2- Hypoventilation alvéolaire - hypoventilation alvéolaire pure - effet espace mort 3- Atteinte de la surface d’échange alvéolo-capillaire Mécanismes de l’hypoxémie Inadéquation ventilation/perfusion • Effet shunt : perfusion normale mais mauvaise ventilation Mécanismes de l’hypoxémie Inadéquation ventilation/perfusion • Shunt vrai : communication anatomique vasculaire droitegauche ou unités pulmonaires perfusées mais non ventilées Mécanismes de l’hypoxémie Hypoventilation alvéolaire • Hypoxémie + Hypercapnie • Hypoventilation alvéolaire pure : maladies neuro-musculaires • Effet espace mort : unités ventilées mais moins perfusées Mécanismes de l’hypoxémie Atteinte de la surface d’échange alvéolo-capillaire • Augmentation de l’épaisseur de la membrane (PID) • Réduction du lit vasculaire (HTAP, emphysème) • Destruction alvéolaire (emphysème) Mécanismes de l’hypercapnie • La PaCO2 dépend : • De la ventilation alvéolaire • De la production de CO2 • L’hypercapnie est en règle liée à une hypoventilation alvéolaire Physiopathologie • Conséquences physiopathologiques de l’hypoxémie chronique : • Polyglobulie • Rétention hydro-sodée • Hypertension artérielle secondaire à l’hypoxémie, pouvant aboutir à l’insuffisance cardiaque droite • Conséquences de l’hypercapnie chronique : • Augmentation des bicarbonates à l’état stable grâce à la compensation rénale Étiologies de l’IRC • Classification proposée : selon le siège de l’atteinte • On distingue les IRC par • Atteinte de l’échangeur pulmonaire • Atteinte de la pompe ventilatoire ou de la commande centrale • Atteinte de la vascularisation pulmonaire Étiologies de l’IRC Atteinte de l’échangeur pulmonaire De loin la 1ère cause d’IRC ! • Pathologies touchant préférentiellement les voies aériennes • BPCO = broncho-pneumopathie chronique obstructive • Dilatation de bronches, mucoviscidose • Bronchiolites • Affection de la région alvéolaire • Pneumopathies interstitielles diffuses La PaCO2 reste longtemps normale ou diminuée du fait d’une hyperventilation réflexe, la pompe ventilatoire n’étant pas atteinte. Pour corriger l’hypoxémie : oxygénothérapie. Étiologies de l’IRC Atteinte de la pompe ventilatoire ou de la commande centrale • Pompe ventilatoire : paroi thoracique, côtes, muscles respiratoires, commande neuro-musculaire • Principal mécanisme de l’hypoxémie : hypoventilation alvéolaire. • L’hypercapnie est donc précoce dans l’évolution de la maladie. Pour corriger l’hypoxémie : ventilation mécanique (qui se substitue à la pompe défaillante). Étiologies de l’IRC Atteinte de la pompe ventilatoire ou de la commande centrale Différents mécanismes parfois associés : • commande ventilatoire : AVC • Pathologies neuro-musculaires : • Lésions spinales, • Myopathies, • Sclérose latérale amyotrophique • Augmentation de la charge imposée par la paroi thoracique • Déformation thoracique • Obésité morbide Étiologies de l’IRC Atteinte de la vascularisation pulmonaire • Hypertension artérielle pulmonaire • Primitive • Secondaire : hypoxémie chronique, cardiopathie, maladie thrombo-embolique, shunt droit-gauche… Étiologies de l’IRC Autre classification : selon les EFR • Insuffisance respiratoire restrictive : IRC avec diminution de la compliance thoraco-pulmonaire • Pathologie neuro-musculaire (ex: SLA) • Pathologie pulmonaire (ex: fibrose pulmonaire) • Pathologie ostéo-articulaire (ex: scoliose) • Insuffisance respiratoire obstructive : IRC avec obstruction bronchique • BPCO • Asthme • Mucoviscidose • Insuffisance respiratoire mixte • Sarcoïdose, séquelles de tuberculose… Étiologies de l’IRC : la BPCO • Cause la plus fréquente d’IRC • Atteinte de l’échangeur pulmonaire • Définition : maladie respiratoire chronique entrainant une obstruction permanente et chronique des voies aériennes = trouble ventilatoire obstructif • Elle inclut : • Bronchite chronique : toux chronique productive, au moins 3 mois par an, depuis 2 années consécutives, sans autre cause de toux chronique • Emphysème : augmentation permanente du volume des espaces aériens distaux avec destruction des parois alvéolaires Étiologies de l’IRC : la BPCO Étiologies de l’IRC : la BPCO Histoire naturelle • Bronchite chronique : • Inflammation chronique des bronches par rapport à une irritation aérienne chronique • Inflammation à l’origine de remaniements tissulaires bronchiques • Apparition d’un trouble ventilatoire obstructif • Lié à la majoration des remaniements bronchiques • Remaniements fibreux irréversibles des voies aériennes se compliquant de destruction des espaces aériens distaux • Déclin de la fonction respiratoire • Évolution marquée par des exacerbations • IRC : hypoxémie chronique puis hypoventilation alvéolaire (hypercapnie) Diagnostic de l’IRC Clinique : symptômes • Symptômes de l’IRC proprement dite • DYSPNEE = signe quasi constant • D’abord à l’effort puis au repos • Très variable d’un patient à l’autre pour un même degré d’atteinte respiratoire • Apprécier le retentissement sur les activités de la vie quotidienne • Symptômes en rapport avec la pathologie causale • Toux et expectoration dans la bronchite chronique, • Toux sèche dans la fibrose pulmonaire… Diagnostic de l’IRC Signes cliniques • CYANOSE Diagnostic de l’IRC Signes cliniques • Hippocratisme digital • Évocateur de fibrose pulmonaire par exemple Diagnostic de l’IRC Signes cliniques Signes cliniques en faveur de certaines étiologies • Distension thoracique : diamètre antéro-postérieur du thorax (« thorax en tonneau »), en faveur d’un emphysème Diagnostic de l’IRC Signes cliniques Signes cliniques d’hypercapnie en cas de décompensation aiguë : • • • • • Sueurs Larmoiement Érythème cutané Hypertension artérielle Confusion, somnolence (jusqu’au coma hypercapnique) Diagnostic de l’IRC Signes cliniques Signes d’insuffisance cardiaque droite possibles à un stade évolué de l’IRC : • • • • Turgescence jugulaire Hépatomégalie Œdème des membres inférieurs Reflux hépato-jugulaire Diagnostic de l’IRC Signes cliniques Signes pouvant être associés à une pathologie chronique : • • • • Dénutrition Amyotrophie Syndrome dépressif Isolement social Diagnostic positif de l’IRC : Gazométrie • Valeurs normales • • • • pH : 7,35 – 7,45 (pH<7,35 = acidose ; pH>7,45 = alcalose) pO2 ≥ 80 mmHg pCO2 : 35 – 45 mmHg HCO3- : 23 – 26 mmol/l • 2 systèmes tampons pour maintenir un pH normal : • Le REIN régule les bicarbonates • Le POUMON régule le gaz carbonique • IRC = pO2 < 70 mmHg (+/- hypercapnie) • Gaz du sang effectués en état stable Diagnostic étiologique de l’IRC Examens complémentaires Épreuves fonctionnelles respiratoires • Spirométrie – pléthysmographie • Trouble ventilatoire obstructif : obstruction bronchique avec rapport VEMS/CVF < 70 % • Trouble ventilatoire restrictif : diminution harmonieuse de tous les volumes pulmonaires avec CPT < 80 % • Trouble ventilatoire mixte • Test au CO : mesure de perméabilité de la membrane alvéolocapillaire Diagnostic étiologique de l’IRC Examens complémentaires Épreuves fonctionnelles respiratoires • Pléthysmographie : mesure des volumes respiratoires statiques Diagnostic étiologique de l’IRC Examens complémentaires Épreuves fonctionnelles respiratoires • Spirométrie : mesure des volumes respiratoires mobilisables Diagnostic étiologique de l’IRC Examens complémentaires Imagerie • Radiographie thoracique • Scanner thoracique Diagnostic étiologique de l’IRC Examens complémentaires Imagerie Diagnostic étiologique de l’IRC Examens complémentaires • NFS : recherche de polyglobulie • ECG : signes de distension des cavités cardiaques droites • Test de marche de 6 minutes et épreuve d’effort cardio-respiratoire : évaluation pronostique et retentissement de l’IRC • Échographie cardiaque : recherche d’HTAP, d’une éventuelle insuffisance cardiaque gauche associée, retentissement de l’IRC sur le cœur droit Complications • Insuffisance respiratoire aiguë • Événement intercurrent décompensant la pathologie chronique : infection, embolie pulmonaire, pneumothorax… • Insuffisance cardiaque, essentiellement droite • Dénutrition • Syndrome dépressif Traitement de l’IRC 1. Traitement de la maladie causale Ex: BPCO : sevrage tabagique, bronchodilatateurs inhalés… L’IRC étant l’évolution de nombreuses maladies, le traitement de la maladie causale est fondamental. Traitement de l’IRC 2. Arrêt du tabagisme Impératif quelle que soit la cause d’IRC. Traitement de l’IRC 3. Vaccinations - Vaccination anti-grippale annuelle - Vaccination anti-pneumococcique Traitement de l’IRC 4. Réhabilitation respiratoire Approche globale et multidisciplinaire qui comprend : - Optimisation du traitement médicamenteux - Aide au sevrage tabagique - Kinésithérapie respiratoire de drainage bronchique - Prise en charge psycho-sociale - Éducation thérapeutique - Prise en charge nutritionnelle Prise en charge en ambulatoire ou dans des centres spécialisés. Traitement de l’IRC 5. Oxygénothérapie de longue durée (OLD) Correction de l’hypoxémie. Indication de l’OLD reposant sur : - 2 mesures gaz du sang, - réalisés au repos, - en air ambiant, - en état stable, - à au moins 2 semaines d’intervalle Traitement de l’IRC 5. Oxygénothérapie de longue durée (OLD) • Dans la BPCO si : • pO2 < 55 mmHg • Ou pO2 entre 55 et 60 mmHg AVEC des signes cliniques d’hypoxie tissulaire : HTAP – insuffisance cardiaque droite – polyglobulie – désaturation nocturne. • Dans les autres causes d’IRC (PID, mucoviscidose, HTAP…) • pO2 < 60 mmHg • L’association à une ventilation assistée peut être nécessaire Traitement de l’IRC 5. Oxygénothérapie de longue durée (OLD) - Oxygène gazeux ou liquide - Poste fixe et dispositif de déambulation Traitement de l’IRC 6. Ventilation non invasive Correction de l’hypoventilation alvéolaire, en se substituant aux muscles respiratoires. Hypoventilation alvéolaire : IRC avec hypoxémie + hypercapnie Instauration en milieu hospitalier. Traitement de l’IRC 6. Ventilation non invasive Traitement de l’IRC 6. Ventilation non invasive IRC hypercapnique possible dans : - Syndrome obésité-hypoventilation - Maladies pulmonaires obstructives (BPCO, DDB, Muco…) - Pathologies neuro-musculaires (sclérose latérale amyotrophique, myopathies, paralysie diaphragmatique, sclérose en plaque…) - Syndromes ventilatoires restrictifs (déformation thoracique ou restriction parenchymateuse) - Hypoventilation alvéolaire centrale acquise (tumeurs, AVC…) ou congénitale (syndrome d’Ondine)