CURRICULUM Forum Med Suisse No43 23 octobre 2002 1021
Introduction
L’état confusionnel aigu – aussi dénommé dé-
lire (selon ICD-10) – représente un syndrome
neuropsychiatrique difficilement saisissable
avec un début brusque et des manifestations
cliniques fluctuantes. On est souvent confronté
à ce problème dans les institutions médicali-
sées. Son incidence élevée en milieu hospitalier
(5–15%) [1] est d’une grande importance du
point de vue de la morbidité, de la mortalité et
de la durée d’hospitalisation des patients [2].
On le rencontre le plus fréquemment chez les
patients âgés qui souffrent déjà de troubles
cognitifs [3]. Les symptômes les plus marqués
peuvent être des troubles de l’orientation gé-
nérale, de l’attention, de la mémoire, de l’habi-
leté à planifier ou organiser. Les autres at-
teintes, telles que les troubles du rythme veille-
sommeil, les troubles cognitifs, la labilité de
l’humeur, les troubles de la perception ou les
difficultés dans les activités de la vie quoti-
dienne ne jouent qu’un rôle secondaire pour le
diagnostic, mais sont en revanche essentielles
pour l’identification et le traitement de l’état
confusionnel. Selon le symptôme, cet état peut
être confondu avec d’autres pathologies, telles
que la démence, les labilités affectives ou les
psychoses fonctionnelles [4]. Le diagnostic dif-
férentiel de ces différents états est parfois diffi-
cile. Le mini-mental-status (MMS) peut être un
instrument utile pour apprécier la dimension
cognitive et identifier une démence [5].
Le but de cet aperçu est de fournir une aide
pour reconnaître rapidement ce syndrome de
manière compétente, surtout en période post-
opératoire, et pour engager les mesures pré-
ventives et thérapeutiques adéquates. Ceci en
se rappelant qu’une intervention spécifique au
niveau des facteurs de risque, au sens d’une
prévention primaire, constitue une des straté-
gies de traitement les plus efficaces [2].
Identification
Comme déjà mentionné, le caractère aigu à
subaigu de sa manifestation (en quelques heu-
res, parfois jusqu’à quelques jours) est typique
de cet état, avec parfois une évolution très fluc-
tuante. Le patient «fourrage», dit des choses in-
cohérentes, voit parfois des animaux ou des
gens, tire sur les tubulures, veut se lever et il est
la plupart du temps désorienté dans le temps et
l’espace. La symptomatologie est typiquement
fluctuante, en sorte que même si le personnel
soignant avertit précocement le médecin, celui-
ci arrive parfois au chevet d’un malade mo-
mentanément asymptomatique, d’où le risque
classique d’un diagnostic et d’un traitement
tardifs, qui à leur tour sont associés à un «out-
come» aggravé [6]. L’identification rapide et la
prise en charge dans de telles situations peu-
vent être améliorés par la mise sur pied de pro-
grammes spécifiques de formation pour les
médecins et le personnel soignant. L’emploi
d’outils diagnostiques auxiliaires tels que des
méthodes de dépistage et tests de routine
standardisés (assessment) sont ici incontourna-
bles [2].
Facteurs de risque
En présence de facteurs de risques tels qu’âge
avancé, traitement avec de nombreux médica-
ments, comorbidités complexes, troubles so-
matiques ou psychiques, on observe une inci-
dence nettement plus élevée d’états confusion-
nels aigus [7]. Il existe un rapport net entre l’in-
cidence des états confusionnels aigus post-opé-
ratoires et certaines maladies neurologiques et
psychiatriques présentes avant l’opération.
Les principaux éléments pour la mise en évi-
dence de facteurs de risque sont listés ci-des-
sous:
–Age: >70 ans
–Anamnèse: maladie psychiatrique; antécé-
dent d’état confusionnel; dépendance médi-
camenteuse (surtout barbituriques, benzo-
diazépines), aux drogues ou à l’alcool; plus
de 3 médicaments; troubles extrapyrami-
daux; épilepsie
–Status: trouble auditif ou visuel significatif;
diminution des facultés cognitives; mauvais
état de nutrition; patient fortement diminué
physiquement; stress; isolement social
–Laboratoire: valeurs significativement pa-
thologiques pour Na, K, glucose; quotient
urée/créatinine élevé (mesure de déshydra-
tation)
–Genre d’opération: chirurgie cardiaque et/
ou aortique; chirurgie thoracique extracar-
diaque; chirurgie orthopédique (p.ex. pro-
thèse totale de hanche); opération d’urgence
–Péri- et post-opératoire: hypotension; hypo-
xémie; sevrages (barbituriques, benzodiazé-
pines, alcool); médicaments anticholiner-
Etats confusionnels aigus
Z. Stangaa, F. F. Immerb, P. Allemannc, A. S. Immer-Bansid, E. Rohrbachc, C. Hagib, V. Eigenmannb
aKlinik für Allgemeine
Innere Medizin, Inselspital, Bern
bKlinik für Herz- und
Gefässchirurgie, Inselspital,
Bern
cPsychiatrische Universitäts-
poliklinik, Inselspital, Bern
dInstitut für Anästhesiologie,
Inselspital, Bern
Correspondance:
Dr Zeno Stanga
Oberarzt für Innere Medizin und
Klinische Ernährung
Inselspital
CH-3010 Bern