
Journal Identification = JPC Article Identification = 0299 Date: April 9, 2015 Time: 3:55 pm
16 J Pharm Clin, vol. 34 n◦1, mars 2015
J. Vallée, B. Trombert-Paviot
Dès 1972, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS)
a défini les effets indésirables des médicaments (EIM)
comme «des réactions nocives et non voulues, se
produisant aux posologies normalement utilisées chez
l’homme pour la prophylaxie, le diagnostic ou le trai-
tement d’une maladie ou la modification d’une fonction
physiologique »[1]. Cette définition inclut, en 2000, les
réactions résultant d’un mésusage d’un produit de santé
(usage abusif, erreurs médicamenteuses...), un syndrome
de sevrage lors de son arrêt, et toute réaction nuisible pou-
vant découler d’une mauvaise qualité du produit de santé
[1-3].
La pharmacovigilance constitue l’ensemble des tech-
niques d’identification, d’évaluation et de prévention du
risque – potentiel ou avéré – d’effets indésirables lié
aux médicaments ou produits de santé. Elle s’attache
notamment à évaluer les facteurs évitables du risque
médicamenteux [2]. Les Centres Régionaux de Phar-
macovigilance (CRPV) contrôlés par l’Agence Nationale
de Sécurité du Médicament (ANSM), supervisée par
l’EMA (European Medecines Agency) visent à assurer
la sécurité du médicament dès son Autorisation de
Mise sur le Marché (AMM), Autorisation Temporaire
d’Utilisation (ATU) et tout au long de sa commercialisation
[2].
En 2007, l’étude nationale EMIR [4], a montré qu’en
France, les EIM étaient responsables de 3,6 % des
hospitalisations, évitables dans un cas sur deux. Les médi-
caments mis en cause étaient ceux du système nerveux
central (26 %), cardiovasculaires (21,6 %), antinéopla-
siques et immunomodulateurs (16,8 %) [5]. Dans l’étude
régionale EVISA [6], les médicaments les plus incrimi-
nés étaient les anticoagulants (fluindione, principalement)
puis ceux à visée neurologique, essentiellement les neu-
roleptiques), et les antihypertenseurs (essentiellement les
diurétiques). 23 % des événements indésirables respon-
sables d’hospitalisation étaient directement générés par
les patients ou leur entourage.
En 2009, l’étude EICLAT [7] a montré que les médecins
généralistes (MG) prescrivaient en moyenne 4 médi-
caments par ordonnance. Sur les 8 382 ordonnances
analysées, l’ordonnance moyenne contenait 194 risques
d’EIM dont 166 (85 %) étaient fréquents et/ou graves ;
l’activité habituelle de consultation semblait incompa-
tible avec une information complète des patients sur les
EIM.
Depuis 2002, la loi Kouchner [8] a imposé d’informer
au préalable le patient ayant la capacité de consentir
des bienfaits et risques de toute intervention thérapeu-
tique pour en obtenir le «consentement éclairé ». Les
articles 34-35 du Code de Déontologie Médicale prévoient
l’information du patient sur les EIM [9]. Pourtant, l’étude
de Kalpana [10], a montré que les patients restaient à la
recherche d’une information globale sur les effets géné-
raux des médicaments qui leur ont été prescrits, mais
également d’une information spécifique sur les EIM pos-
sibles.
Pour diminuer la proportion d’EIM évitables, et en rai-
son de la sous déclaration des EIM, malgré son obligation
par les professionnels de santé aux CRPV, l’ANSM a mis
en place en 2011 la possibilité pour les patients et asso-
ciations de patients de déclarer, directement au CRPV, un
évènement indésirable lié à un produit de santé.
Notre étude avait pour but d’explorer les moyens
d’information des patients sur les EIM, l’information rete-
nue sur les EIM au décours d’une consultation chez un
médecin généraliste, encore peu analysés dans la littéra-
ture, et la connaissance qu’ont les patients sur le dispositif
d’auto-déclaration.
Méthode
L’enquête descriptive a été réalisée auprès des patients
au décours d’une consultation en cabinet de médecine
générale dans le département de l’Hérault (France) du
15/05/2013 au 07/07/2013 au moyen d’un questionnaire
administré par un unique enquêteur1, médecin généra-
liste remplac¸ant. Tous les patients âgés de plus de 18 ans
ayant la capacité de répondre au questionnaire, ayant ou
non rec¸u une prescription médicamenteuse à la fin de
la consultation, étaient inclus. Ceux de moins de 18 ans,
ou plus âgés qui ne pouvaient pas répondre au question-
naire en raison de troubles cognitifs, d’illettrisme, ou ne
comprenant pas le franc¸ais, étaient exclus.
Un échantillonnage stratifié de 467 patients issus de
8 cabinets de médecins généralistes (MG) différents a
été réalisé. Le premier niveau était un tirage au sort des
communes de l’Hérault selon le nombre d’habitants :
>100 000 habitants (agglomération urbaine), 10 000 à
100 000 (9 communes urbaines), 3 000 à 10 000 (60
communes semi-rurales), <3 000 (273 communes
rurales). Le deuxième était un tirage au sort de 2 cabinets
de MG dans chaque classe de communes en utilisant
l’annuaire «pages jaunes », un nouveau tirage au sort
étant effectué en cas de refus de participer. Le troisième
niveau était la sélection des 50 premiers patients répon-
dant aux critères d’inclusion, le suivant étant sollicité en
cas de refus.
Les participants ont répondu sous couvert d’anonymat
à un questionnaire testé auprès de personnes de
l’entourage de l’enquêteur qui n’appartenaient pas au
milieu médical et ajusté pour faciliter sa compréhension.
Les données recueillies ont été saisies en temps réel sur
ordinateur par l’intermédiaire du logiciel ETHNOS. Les
logiciels SPHINX et SPSS ont été utilisés pour l’analyse
1Etienne Paul, Faculté de médecine de Saint-Étienne.
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