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Le Courrier de l’Arcol (1), n° 2, juin 1999
5-méthyl-THF. Il est apporté à l’organisme
par l’alimentation, sous la forme d’acide
folique rapidement réduit en THF. Le
5-méthyl-THF est recyclé en permanence
sous l’action de l’enzyme méthylène-
tétrahydrofolate-réductase (MTHFR), qui
exerce donc une action indirecte mais déter-
minante dans la reméthylation de l’homo-
cystéine.
Mécanismes
des hyperhomocystéinémies
L’exposé des voies de métabolisme de l’ho-
mocystéine et de la méthionine permet de
déduire que les hyperhomocys-
téinémies sont liées à des
troubles affectant soit la trans-
sulfuration, soit la reméthyla-
tion. En effet, les augmenta-
tions d’apport ou de production
de méthionine ne sont pas
capables d’induire par elles-
mêmes une hyperhomocys-
téinémie, hormis lors d’une
charge massive, utilisée au
cours de tests diagnostiques, à
des concentrations très supé-
rieures aux apports alimen-
taires.
Les causes des hyperhomocys-
téinémies sont soit d’origine
génétique, soit d’origine envi-
ronnementale.
Les causes génétiques
•
Le déficit en cystathionine
synthase représente le déficit
enzymatique classique condui-
sant à l’homocystinurie. Sa
prévalence est de 1/200 000, et
sa transmission autosomique
récessive. Plus de trente mu-
tations différentes de la cysta-
thionine synthase ont été identi-
fiées. Les formes homozygotes
conduisent à l’homocystinurie
typique, avec hyperhomocystéi-
némie et hyperméthioninémie.
Les signes cliniques associent
des troubles neurologiques et
oculaires, des anomalies sque-
lettiques et des signes d’athéro-
sclérose précoce. Les formes
hétérozygotes, présentes dans
moins de 1 % de la population générale,
s’accompagnent rarement d’hyperhomocys-
téinémie (2 ,5).
•
Les enzymes du cycle de méthylation peu-
vent également être affectées. Leur atteinte
peut entraîner, plus rarement que dans le cas
précédent, d’authentiques homocystinuries.
Plus souvent, elles sont associées à des
hyperhomocystéinémies modérées.
Les principales anomalies génétiques de
cette voie touchent le gène de la MTHFR.
Dans les formes sévères, rares, l’homocys-
téine est augmentée dans le plasma et l’urine,
la méthionine plasmatique est diminuée, et
divers troubles, notamment neurologiques
et cardiovasculaires, sont notés. L’activité
résiduelle MTHFR est faible, et différentes
mutations responsables de ces tableaux ont
été identifiées (6).
Par ailleurs, un polymorphisme génétique
courant de ce gène a été identifié : la substi-
tution C ➝T du nucléotide 677, qui conduit
à l’incorporation d’une valine à la place
d’une alanine dans la protéine (7). Cette
modification crée un site de clivage Hinf I,
qui permet sa mise en évidence après ampli-
fication de l’ADN par PCR. La mutation
s’accompagne d’une diminution de l’activité
et d’une augmentation de la thermolabilité de
l’enzyme codée. Il s’agit d’une mutation fré-
quente dans les populations occidentales :
environ 12 % d’homozygotes et 40 à 45 %
d’hétérozygotes (8). D’autres mutations du
gène de la MTHFR, associées à des déficits
modérés de l’activité enzymatique et d’éven-
tuel intérêt clinique, ont été décrites (9).
En pratique courante, la mutation C677T est
la mutation le plus souvent recherchée. Son
association avec les pathologies athéro-
thrombotiques est toujours discutée (10).
•
Enfin, des maladies génétiques rares du
métabolisme de la vitamine B12 peuvent
être responsables d’hyperhomocystéinémie.
Elles s’accompagnent d’anémie mégaloblas-
tique, de troubles neurologiques, et parfois
de manifestations thromboemboliques (2).
Les causes environnementales
Trois facteurs vitaminiques sont, comme on
l’a décrit plus haut, impliqués dans le méta-
bolisme de l’homocystéine :
–la vitamine B12, cofacteur de la méthio-
nine synthase,
–l’acide folique, précurseur direct du THF,
– la vitamine B6, cofacteur des réactions de
transsulfuration.
Les deux premiers facteurs interviennent
dans la voie de reméthylation de l’homocys-
téine.
Les carences en ces facteurs, principalement
dues à une insuffisance de leur apport alimen-
taire, sont directement responsables d’hyper-
homocystéinémie, généralement modérée.
Les carences en acide folique, et à un moindre
degré en vitamine B12, sont le plus souvent
associées à l’hyperhomocystéinémie.
D’autres causes environnementales, impli-
quant à divers degrés ces métabolismes ou
influant sur le métabolisme rénal de
l’homocystéine, sont à l’origine d’hyper-
homocystéinémies (2) :insuffisance rénale,
cancer, maladies diverses comme le psoria-
sis, traitements médicamenteux (métho-
trexate, anticonvulsivants, NO).
Mise
au point
H3C–S–CH
2–CH
2–CH–COOH Méthionine
NH2
HS – CH2–CH
2–CH–COOH Homocystéine
NH2
HS – CH2–CH–COOH Cystéine
NH2
CH2–CH
2–CH–COOH
Homocystine
S NH2
S
CH2–CH
2–CH–COOH
NH2
CH2–CH
2–CH–COOH
Disulfure mixte
S NH2homocystéine-cystéine
S
CH2–CH–COOH
NH2
CH2–CH
2–CH–COOH
Homocystéine
S NH2liée à une protéine
S
Protéine
Figure 1. Structure des acides aminés impliqués dans le
métabolisme de l’homocystéine et des différentes formes
de l’homocystéine dans l’organisme.