Traitement médical de la pancréatite - chronique Medical

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Traitement médical de la pancréatite chronique
Medical treatment of chronic pancreatitis
E. Gelsi, X. Hébuterne*
P O I N T S
F O R T S
LIMITER LA PROGRESSION DE LA MALADIE
P O I N T S
F O R T S
La PC correspond à une destruction progressive du parenchyme
p a n c r é atique ex o c rine et endocri n e. Cette destruction entra î n e
une fibrose, associée à des calcifications et des anomalies canalaires. Le premier traitement de la PC est étiologique. Malheureusement, celui-ci n’est pas toujours facile, ou est parfois même
inexistant. L’intoxication alcoolique chronique est responsable
de la PC dans plus de 80 % des cas : l’arrêt immédiat et définitif de l’alcool est la première condition pour tout traitement efficace d’une PC. C’est un objectif ambitieux qui n’est pas facile à
obtenir et qui nécessite une prise en charge par une équipe spécialisée et un suivi à long terme, tant médical que psychologique.
Les autres étiologies, plus rares, doivent être éliminées systématiquement avant d’incriminer le facteur alcoolique.
– Il est maintenant bien établi que le pancreas divisum est une
cause de PC. Il n’existe pas de traitement médical spécifi q u e,
mais une ap p ro che endoscopique ou ch i ru rgicale est parfo i s
nécessaire.
– Une pancréatite chronique peut survenir en amont d’un obstacle le plus souvent d’origine néoplasique. Il peut s’agir d’un
adénocarcinome canalaire, d’une tumeur mucineuse intracanalaire ou, exceptionnellement, d’une tumeur neuroendocrine. Le
traitement sera celui du cancer.
– La pancréatite auto-immune est une affection rare qui fait l’objet d’un article spécifique dans ce numéro. Le traitement repose
sur la corticothérapie, qui entraîne, en général, une amélioration
spectaculaire.
– Les autres causes de PC, plus ra res (héréditaire s , radiques, i d i opathiques, tropicales, hy p e rp a rat hy roïdie) n’ont pas de traitement
spécifique.
L’arrêt définitif de l’alcool est un prérequis au cours du
traitement de la pancréatite chronique (PC) alcoolique.
Les extraits pancréatiques sont efficaces pour limiter les
conséquences de l’insuffisance pancréatique exocrine. Leur
efficacité pour limiter la douleur n’est pas totalement démontrée, mais elle est possible.
Le diabète nécessite le plus souvent une prise en charge
spécialisée.
Le re c o u rsaux antalgiques majeurs est parfois nécessaire.
Les régimes restrictifs doivent être bannis, car ils aggravent la dénu t rition. L’alimentation doit être normo- ou hy p e rénergétique, n o rmolipidique et souvent hyperprotéique.
L’efficacité des analogues de la somat o s t atine pour le tra itement de la douleur n’est pas démontrée.
Le recours à l’alimentation artificielle est parfois nécess a i repour traiter la dénu t rition. La nu t rition entérale doit être
préférée à la nutrition parentérale.
n l’absence de traitement spécifi q u e, le traitement
médical de la pancréatite ch ronique (PC) est avant tout
symptomatique. Les principaux objectifs du traitement médical sont les suivants :
– limiter la progression de la maladie,
– traiter l’insuffisance pancréatique exocrine et endocrine,
– traiter la douleur,
– traiter la dénutrition,
– traiter les complications.
E
* Fédération d’hépato-gastroentérologie et de nutrition clinique, hôpital de
l’Archet 2, Nice.
200
TRAITER L’INSUFFISANCE PANCRÉATIQUE
EXOCRINE ET ENDOCRINE
Insuffisance exocrine
Un pancréas sain sécrète plus d’enzymes qu’il n’est nécessaire en
situation physiologique. Aussi, les signes de malabsorption n’apparaîtront que pour une réduction de plus de 80 % de la sécrétion enzymatique normale. Le signe clinique de malabsorption le plus clas-
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s i q u e,même s’il est souvent tard i f,est la stéat o rr h é e,qui touche 30 %
des patients qui souffrent de PC. Une prise en charge nutritionnelle
adaptée est le traitement de première intention de l’insuffisance pancréatique exocrine, le plus souvent complétée par l’apport d’extraits pancréatiques. La prise en charge nutritionnelle est exposée plus
loin dans le chapitre “Traiter la dénutrition” de cet article.
Le but du traitement par les extraits pancréatiques est de diminuer
les diarrhées et la stéatorrhée afin d’obtenir un gain de poids et
l’amélioration de la qualité de vie du patient. Les extraits pancréatiques doivent être libérés dans le duodénum au moment du repas
pour une réelle efficacité. La quantité minimale requise est de
30 000 UI de lipase et de 10 000 UI de trypsine durant les quatre
h e u res qui suivent le repas, ce qui correspond à 5 à 10 % de la sécrétion pancréatique physiologique (1, 2). Il existe plusieurs extraits
p a n c r é atiques commercialisés (tableau I), qui diff è rent par leur
présentation galénique et leur dosage, mais ils sont tous d’origine
porcine, ce qui justifie une AMM très limitée (mucoviscidose, PC
documentée). En effe t , le risque de transmission d’agents infe ctieux ne peut pas être totalement ex cl u , même si aucun cas de tra n smission n’a été rapporté avec un important recul.
Les enzymes pancréatiques peuvent être dégradées par l’acidité gastrique. Seules 35 % de la trypsine et 17 % des lipases arrivent dans
le duodénum dans les fo rmes non ga s t rorésistantes ( 1 ). De plus, dans
la PC, la sécrétion de bicarbonate est insuffisante, entraînant un pH
duodénal anormalement acide en postprandial tardif. Pour toutes ces
raisons, il est important d’utiliser des formes gastrorésistantes (préparations enrobées d’un polymère résistant à un pH < 5) (3, 4) et de
les associer systématiquement à la prise d’un traitement antiacide (5,
6). On peut aussi proposer l’utilisation de microsphères encapsulées
qui se délitent à un pH > 6. Plus de 60 % de la lipase comprise dans
les microsphères passe alors la barrière de l’estomac (7), et l’administration de 20 000 à 30 000 UI de lipase par repas suffit à réduire
de manière marquante la stéat o rrhée. Les ex t raits pancréatiques
recommandés sont donc les microgra nules ga s t rorésistants en gélules
à une posologie adaptée. L’utilisation de lipases bactériennes est à
l’étude, mais reste pour l’instant du domaine de l’expérimentation.
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Si le patient ne répond pas efficacement au traitement malgré une
posologie adaptée et l’association à un traitement antiacide, il
faut rechercher d’autres causes de stéatorrhée, et notamment éliminer une pullulation microbienne. Un traitement antimicrobien
peut, dans ces cas-là, ê t re associé aux ex t raits pancréatiques.
Insuffisance endocrine
Le diabète touche 30 à 50 % des malades porteurs de PC et apparaît généralement après 20 ans d’évolution de la maladie. De
nombreux malades vont devenir insulinore q u é rants. Une prise en
ch a rge spécialisée du diabète est le plus souvent nécessaire.
TRAITER LA DOULEUR
La douleur dans la PC est un phénomène complexe et multifactoriel dont les mécanismes ne sont pas encore tous élucidés. Elle
apparaît dans les premières années d’évolution de la maladie et
régresse ensuite pour laisser place à l’insuffisance endo- et exocrine. L’hyperpression canalaire est le plus souvent secondaire à
des phénomènes de sténose et d’obstruction des canaux panc r é atiques par des calcifi c ations. La décompression canalaire
endoscopique a fait l’objet de nombreuses études et est abordée
dans ce même numéro (article de J. Sahel et L. Heyries, p. 205).
L’inflammation et la fi b rose peuvent atteindre la glande et les
fibres nerveuses. Les phénomènes locaux de nécrose tissulaire
pancréatique et péripancréatique entraînent une dégénérescence
des fibres nerveuses et modifient aussi le largage et la recapture
des neuromédiateurs, ce qui peut être une cause importante de
douleur ( 8 ). L’ i s chémie tissulaire conduit à l’accumulation de
radicaux libres et de métabolites acides, médiée notamment par
l’augmentation du cytochrome p 450 (9, 10). Ce caractère mul-
Tableau I. Les différents types d’extraits pancréatiques et leur présentation galénique.
Spécialité pharmaceutique
Titulaire de l’autorisation
de mise sur le marché
Alipase® 7 500 UI, microgranules
gastro résistants en gélule
Janssen Cilag S.A.
Creon® 12 000 UI, microgranules
gastrorésistants en gélule
Solvay Pharma
Creon® 25 000 UI, microgranules
gastrorésistants en gélule
Solvay Pharma
Eurobiol® 25 000 UI, microgranules
gastrorésistants en gélule
Pfizer
Eurobiol® 900 mg, poudre orale
en sachet dose
Pfizer
Eurobiol® 4,5 g, poudre
orale en flacon
Pfizer
Licrease®, gélule
Laboratoires Laphal
Fi g u re. Ap p ro che systématique du traitement d’une douleur d’allure
pancréatique.
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tifactoriel rend difficile l’approche scientifique du problème et
explique le nombre réduit d’études contrôlées qui évaluent de
manière précise la douleur et la qualité de vie de ces malades.
Pour une bonne prise en charge de la douleur, il est nécessaire,
dans un premier temps, d’évaluer le caractère, la durée et l’ancienneté de ce symptôme, ainsi que son retentissement sur la qualité de vie du patient. L’utilisation des questionnaires et des
échelles visuelles analogiques de qualité de vie peut être utile.
L’examen clinique et l’interrogatoire doivent être complets afin
d’éliminer les douleurs d’ori gine ex t rapancréatique. Une
ap p ro che systématique du traitement d’une douleur d’allure pancréatique est proposée dans la figure, p. 201.
Nutrition
L’arrêt de l’alcool dans les PC d’origine alcoolique, même s’il ne
supprime pas toujours les crises douloureuses, en diminue la fréquence et l’intensité (11). L’utilisation de triglycérides à chaînes
moyennes (TCM) et de peptides hydrolysés dans une étude récente
a montré une certaine efficacité dans la réduction des douleurs postprandiales en diminuant la sécrétion de cholécystokinine plasmatique (CCK), enzyme qui stimule le pancréas exocrine et qui est
impliquée dans les douleurs de PC (12). On peut cependant regretter le faible effectif de la population étudiée, et surtout la mauvaise
tolérance du produit, puisque 9 patients sur 17 n’ont pu ingérer les
trois échantillons par jour. L’utilisation régulière au long cours des
TCM dans les douleurs de PC semble peu réalisable en pratique
courante. Il faut évidemment éviter un régime restrictif, qui pourrait avoir une certaine efficacité sur la douleur mais qui favoriserait la surve nue d’une dénu t rition ou aggrave rait une dénu t ri t i o n
préexistante. Dans certains cas, lorsque les douleurs entraînent une
restriction alimentaire sévère, le recours à une alimentation artificielle peut être nécessaire pour mettre le pancréas au repos.
Extraits pancréatiques
L’efficacité des extraits pancréatiques dans les douleurs de PC
est un concept séduisant qui ne fait cependant pas l’unanimité.
Les extraits pancréatiques induisent un rétrocontrôle négatif sur
la sécrétion pancréatique en inhibant la ch o l é cystikinine plasm atique (CCK). Il a été démontré que la try p s i n e, la chy m otrypsine et l’élastase présentes dans le duodénum proximal inhibent la sécrétion de CCK, ce qui entraîne un rétrocontrôle négat i f
sur la sécrétion pancréatique (13).
En s’appuyant sur cette théorie, plusieurs études ont montré une
e fficacité des ex t raits pancréatiques dans le traitement des douleurs
pancréatiques (14-17). Po u rt a n t , dans le même temps, d’autres
études mettaient en évidence, au contraire, une absence d’efficacité, en particulier une méta-analyse publiée en 1997, qui s’appuyait
sur six études et 189 malades ( 1 8 ). Une des ex p l i c ations à ces résultats négatifs viendrait de la forme galénique des extraits pancréatiques utilisés. En effet, les extraits pancréatiques gastrorésistants
délivrent les protéases dans le duodénum distal alors que le feedback dépend d’une libération proximale, que l’on retrouve dans les
extraits pancréatiques non gastrorésistants (19). On peut reprocher
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à cette méta-analyse une hétérogénéité importante : PC d’étiologies différentes, évaluation différente de la douleur, extraits pancréatiques de forme galénique diff é re n t e. Ce travail ne permet donc
pas d’exclure les extraits pancréatiques de l’arsenal thérapeutique
des douleurs post-PC. Des travaux rigoureux précisant les formes
et les indications exactes sont nécessaires.
Antalgiques
L’ u t i l i s ationd’antalgiques est très souvent nécessaire dans la PC :
paracétamol, dextropropoxyphène, tramadol, opiacés. Le risque,
dans une population particulièrement exposée, est la dépendance
aux antalgiques narcotiques. Cela ne doit cependant pas empêcher le praticien d’utiliser les morphiniques quand l’intensité de
la douleur le justifie. Certaines précautions doivent être prises :
augmenter les antalgiques par paliers (20), suivre régulièrement
le patient et son traitement et avoir un médecin coordonnateur
afin d’éviter les prescriptions répétées par différents praticiens.
À noter, l’évaluation dans cette indication de nouveaux ago n i s t e s
des récep t e u rs opioïdes qui présenteraient peu d’effets secondaires, notamment neurologiques (21).
Antiacides
Dans les PC, il existe une augmentation de l’acidité duodénale
et un risque de formation ulcéreuse. L’administration de traitements antiacides diminue ce risque et les douleurs liées à ces
pathologies ulcéreuses.
Somatostatine
La somatostatine et ses analogues, notamment l’octréotide, ont été
utilisés dans le traitement des douleurs de PC. Le mécanisme d’action serait associé à une inhibition de la CCK qui entraîne une diminution de la sécrétion pancréatique par rétrocontrôle négat i f.
Quelques études ont évalué l’action de l’octréotide sur les douleurs
de PC, avec des résultats discordants. Dans une étude en double
aveugle chez dix malades, l’octréotide administré à la posologie de
100 µg x 3/j a été comparé au placebo sur une période de 3 jours.
La sécrétion pancréatique était fo rtement inhibée, mais l’octréotide n’apportait aucun bénéfice sur la douleur. On peut cependant
regretter la courte durée du traitement et le fa i ble effectif ( 2 2 ).Dans
un autre travail, publié sous la forme de résumé et portant sur six
malades, les auteurs suggèrent l’efficacité de ce traitement (23). En
l’état actuel des connaissances, les analogues de la somatostatine
ne doivent être utilisés qu’en dernier re c o u rspour des malades chez
qui les autres traitements sont insuffisants ou contre-indiqués.
Antioxydants
Le stress ox y d atif est un des mécanismes à l’ori gine de l’inflammation des PC. Il était donc licite d’étudier l’action d’agents
a n t i oxydants. Plusieurs études se sont intéressées à l’action
d’agents antioxydants dans les PC et ont utilisé des “cocktails”
associant de la vitamine E, de la vitamine C, de la méthionine,
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du sélénium et du ß-carotène avec des résultats significatifs sur
l’amélioration de la douleur (24-26). Les effectifs de ces études
n’étaient pas toujours importants et l’évaluation des rechutes ou
des crises douloureuses était parfois sommaire.
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malades dans l’impossibilité de regagner du poids. Ainsi, la prise
en charge nutritionnelle est étroitement liée au facteur qui altère
l’état nutritionnel à un moment donné de la maladie.
Régime alimentaire au cours de la PC
Bloc coeliaque et sympathectomie
Les fibres nociceptives pancréatiques sont conduites par l’intermédiaire du plexus cœliaque. En cas de non-réponse aux traitements antalgiques classiques, on peut avoir recours au bloc
cœliaque ou à la sympathectomie. Le bloc chimique du plexus
cœliaque se fait de manière percutanée par injection de 25 ml
d’alcool à 50 % de chaque côté du plexus. On peut précéder le
geste d’un bloc anesthésique réalisé un jour avant et ayant valeur
de test thérapeutique. Ce geste peut se pratiquer sous contrôle
tomodensitométrique ou échoendoscopique (27). La réponse
immédiate est satisfaisante, mais les rechutes sont fréquentes. La
s p l a n chnicectomie est pratiquée par les ch i ru rgiens et peut se pratiquer sous thoracoscopie. Même si ces techniques ont leur place
dans certaines indications très précises, elles ne doivent pas être
utilisées en pre m i è re intention et semblent être plus efficaces dans
les douleurs associées aux cancers du pancréas (28). La limite de
la neurolyse cœliaque dans la PC est surtout due à une récidive
douloureuse, fréquente après le sixième mois.
Même s’il n’est pas démontré que l’arrêt de l’alcool permet de
retarder la survenue du diabète ou de diminuer la malabsorption,
l’obtention d’un sevrage est indispensable et permet de diminuer
les besoins énergétiques. L’objectif du régime “d’épargne pancréatique” est d’apporter des protéines et des glucides en quantités suffisantes pour maintenir le poids corp o rel et de limiter
l’apport en graisses en fonction de la tolérance clinique. En pratique, quand il existe une dénutrition favorisée par des poussées
répétées, on peut recommander un régime hy p e r é n e rgétique
(3 000 Kcal/j), normolipidique, enri chi en protéines (environ
1,8 g/kg/j) et en glucides (env i ron 400 g/j). Une supplémentat i o n
multivitaminée est indispensable en cas de stéatorrhée et quand
la consommation d’alcool n’est pas stoppée. L’administration
orale de vitamines B1, B6, PP et d’acide folique doit aussi être
envisagée (tableau III). La prise d’extraits pancréatiques associée au régime alimentaire limite la malabsorption protéique et
lipidique et contribue au traitement de la dénutrition.
Tableau III. Supplémentation vitaminique chez un malade non sevré
porteur d’une PC alcoolique.
Autres traitements
Vitamine A
10 à 50 000 UI per os par jour
Certains traitements comme les antidépresseurs tricycliques ou
les inhibiteurs de la re c ap t u re de la sérotonine ont été utilisés
dans les douleurs d’origine viscérale. Leur action dans les douleurs de PC reste encore à évaluer.
Vitamine D
Une injection i.m. de 600 000 UI par an
Vitamine E
30 UI per os par jour
Vitamine B12
1000 µg par mois i.m.
Vitamines hydrosolubles
Acide folique
TRAITER LA DÉNUTRITION
La dénutrition est fréquente au cours des pancréatites chroniques
évoluées. Elle est rarement un motif de consultation ou d’hospitalisation, mais constitue un problème pour le praticien, qui doit
a l o rs en déterminer l’ori gine pour adapter son traitement. Au
cours de la PC alcoolique, la dénu t rition est multifactorielle
(tableau II), liée à une succession d’événements qui placent les
Tableau II. Facteurs favo risant la dénu t rition au cours de la pancréatite chronique alcoolique.
Alcoolisme et tabagisme
Conditions sociales précaires
Douleurs postprandiales
Stéatorrhée
Diabète
Anorexie
Altération des fonctions intestinales
Hospitalisations, interventions chirurgicales
Hypermétabolisme (pancréatite, alcool, tabac)
Vitamine PP
Vitamine B1- B6
Supplémentation multivitaminique
15 mg per os par jour
1 g per os par jour
250 mg per os par jour
Assistance nutritive
Il n’existe actuellement pas de consensus pour préciser la place
et le moment d’une assistance nutritive dans la PC. La discussion repose sur la gravité des épisodes aigus et la longueur prévisible du jeûne ou de la restriction alimentaire. En phase stabl e,
une dénutrition patente et surtout l’impossibilité pour le malade
de s’alimenter ou de regagner du poids constituent des indications logiques. De même, l’intérêt d’une renutrition n’est pas
discutable quand une intervention chirurgicale est env i s ag é e.
Les modalités du support nutritionnel (oral, entéral ou parentéral) dépendent plus de la fonctionnalité du tube digestif que du
risque théorique d’infection accrue des cat h é t e rs centraux en
cas de nu t rition parentérale. En l’absence de dénu t rition très
sévère, une supplémentation nu t ritionnelle par voie orale (SNO)
doit toujours être tentée. La grande majorité des SNO sont pris
en charge à domicile dans le cadre de la LPPR (ancien TIPS).
Pris à distance des repas, les SNO permettent une augmentation des apports énergétique et protéique d’environ 500 Kcal/j
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et 40 g/j, respectivement. Quand une nu t rition entérale est entrep ri s e, l’instillation de mélanges poly m é riques en site jéjunal
doit théoriquement être favorisée en raison d’une moindre stimulation des sécrétions pancréatiques. En pratique, en cas de
PC évoluée stable, la nutrition entérale intragastrique est parfaitement bien tolérée. En cas de dénutrition ch ronique et en
l ’ absence de récupération d’ingesta sat i s fa i s a n t s , la nu t ri t i o n
entérale peut être poursuivie à domicile à l’aide d’une gastrostomie percutanée endoscopique ou d’une jéjunostomie. Les
m é l a n ges semi-élémentaires n’ap p o rtent aucun bénéfice supp l é m e n t a i re chez l’insuffisant pancréat i q u e, et la plupart des
mélanges polymériques apportent 20 à 50 % des lipides sous la
forme de TCM.
La nu t rition pare n t é rale n’a pratiquement pas d’indication au
cours de la PC, puisque le jéjunum est habituellement sain. Plus
risquée que la nutrition entérale, elle ne doit être proposée qu’en
cas d’échec de celle-ci.
TRAITER LES COMPLICATIONS
La prise en charge médicale des complications liées à la PC est
très limitée. Les pseudokystes sont le plus souvent drainés par
voie endoscopique, radiologique ou chirurgicale. Dans certains
cas cep e n d a n t , la somat o s t atine et ses dérivés ont un intérêt, a s s ociés à l’assistance nu t ritive, de même que dans les fistules et
ascites pancréatiques (29, 30).
Dans les PC, la formation d’ulcères duodénaux est secondaire à
la diminution de la sécrétion de bicarbonates entraînant une augm e n t ation de l’acidité duodénale. Le traitement sera médicamenteux par l’utilisation d’antiacides.
Le traitement des compressions biliaires et duodénales est endoscopique ou chirurgical. Il faut cependant signaler l’efficacité de
la somatostatine dans la réduction des dystrophies kystiques sur
pancréas aberrant (31).
CONCLUSION
La prise en charge médicale des PC est un problème complexe
qui n’a que peu évolué ces dern i è res années. L’absence de population homogène et d’étude de grande échelle en est en partie
re s p o n s abl e.Il est très important de bien évaluer chaque patient,
notamment en prenant en compte sa qualité de vie. Le traitement sera en quelque sorte à adapter “à la carte” en l’absence
de consensus réel et à associer le plus souvent à une prise en
charge endoscopique, radiologique et parfois chirurgicale. Une
discussion multidisciplinaire de chaque cas est certainement
souhaitable.
Mots-clés : Pancréas - Pancréatite chronique - Alcool - Douleur
- Nutrition.
Keywords: Pancreas - Chronic pancreatitis - Alcohol - Pain
- Nutrition.
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La Lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 4-5 - vol. VII - juillet-octobre 2004
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