Dossier thématique
Dossier thématique
140
La Lettre du Psychiatre - Vol. III - n° 7 - juillet-août 2007
un matériel cohérent et signifi catif comme le contenu d’un
livre ou d’articles de journaux. L’objectif était d’augmenter
les opérations de compréhension et de structuration des
informations. Le genre littéraire ayant servi de support à cet
apprentissage est celui de la nouvelle (7), qui off re l’avantage
d’être relativement concis. Nous avons déterminé un certain
nombre d’informations signifi antes par chapitre, de manière
à réaliser une grille d’analyse et de cotation du rappel fourni
par le patient.
Par ailleurs, alors que nous ne développerons pas cet aspect dans
le présent article, nous avons également proposé des exercices
de mémoire de travail à ce patient afi n de lui apprendre des stra-
tégies à appliquer dans les situations de la vie quotidienne telles
que les conversations ou encore l’écoute du journal télévisé.
Lignes de base avant remédiation
On désigne par “lignes de base” la (ou les) mesure(s) que prend
le thérapeute au seuil, à mi parcours et au terme d’une remédia-
tion afi n de mettre en évidence les diff érences qu’il y a entre les
performances et les capacités du sujet, entre l’avant et l’après
intervention. Il s’agit généralement d’exercices succincts de
contrôle qui sont appliqués de façon strictement identique dans
leur structure, mais qui portent sur des contenus évidemment
diff érents, pour éviter d’éventuels eff ets test-retest.
Dans le cadre de notre étude, un prétest a été administré avant
de commencer le travail de remédiation proprement dit, afi n de
disposer de mesures de base auxquelles se référer (avant toute
mise en place de stratégie). Au cours de ce prétest, WL a été
invité à lire un court article et à en restituer ensuite le plus d’in-
formations possibles. En outre, la première partie de la nouvelle
étudiée a également tenu lieu de ligne de base. Ces premières
mesures nous ont permis d’identifi er le nombre moyen d’infor-
mations signifi antes restituées spontanément par le patient en
dehors de toute stratégie. La ligne de base post-test a consisté
à inviter WL à lire une autre nouvelle d’une longueur et d’une
diffi culté équivalentes à celles de la première.
Remédiation cognitive
La remédiation cognitive portait sur l’utilisation d’une macro-
structure appliquée à la lecture d’une nouvelle littéraire. Les
lignes de base utilisées dans ce cadre consistaient en :
❱
des textes organisés, c’est-à-dire structurellement proches
des nouvelles littéraires : il s’agissait d’articles relativement brefs
(type article de journal) et de la première partie de la nouvelle
étudiée. Ces textes organisés représentent ce que l’on appelle des
lignes de base spécifi ques, c’est-à-dire qu’elles correspondent
aux aspects qui seront directement travaillés tout au long de
la remédiation ;
❱
du matériel non organisé, c’est-à-dire structurellement très
distinct des nouvelles littéraires. Des listes de 15 mots abstraits
ont ainsi fait l’objet d’un apprentissage en 5 essais consécutifs. Ce
matériel non organisé représente ce que l’on appelle des lignes de
bases non spécifi ques, c’est-à-dire qu’il correspond aux aspects
qui ne seront pas traités pendant la remédiation, mais auxquels
la procédure entraînée est néanmoins applicable.
Au cours de ce travail, et une fois l’utilisation de cette macro-
structure bien intégrée, WL a progressivement été invité à se
distancier du support papier, afi n de ne pas créer une dépen-
dance qui serait un frein à une application systématisée de la
méthodologie en l’absence de support physique. Dans ce cadre,
il est passé du rappel avec la macrostructure sous les yeux à la
réalisation du rappel à l’aide d’une représentation mentale de
la macrostructure.
Le patient a, en outre, été incité à synthétiser l’information sous
forme de mots-clés, afi n d’organiser le matériel et de s’approprier
l’information avec son propre vocabulaire, ce qui facilitera le
rappel ultérieur. Les facteurs clés de cette stratégie de facilitation
reposent sur l’organisation explicite de l’information et une
progression étape par étape.
L’intervention s’est déroulée au rythme de trois séances hebdo-
madaires, à raison de 1 h 30 par séance. Le tout s’est échelonné
sur trois mois.
Évaluation postremédiation
L’évaluation postremédiation a consisté en un bilan cognitif, des
lignes de base cognitives spécifi ques en rapport avec les objectifs
ciblés, des lignes de base non spécifi ques et plusieurs question-
naires d’auto-évaluation. La comparaison des bilans cognitifs
réalisés en phases pré- et postremédiation a mis en évidence
une normalisation des performances dans les tâches de mémoire
épisodique verbale, avec notamment une normalisation de la
quasi-totalité des scores au sous-test Mémoire Logique (8). On
relève en outre une amélioration de la planifi cation, assortie d’une
progression plus discrète de la fl exibilité et de l’attention divisée.
De même, les performances de WL sont globalement meilleures
dans les épreuves attentionnelles, ce qui se traduit par une diminu-
tion des erreurs après la remédiation cognitive. Quant aux lignes
de base cognitives spécifi ques, elles témoignent également des
progrès de WL, alors que les lignes de base non spécifi ques, elles,
ne bougent pas : à l’issue de la remédiation, elles sont équivalentes
à ce qu’elles étaient avant de commencer ce travail. Enfi n, en ce
qui concerne la mémorisation d’un texte organisé, WL rappelle
En matière de remédiation cognitive, la macrostructure fait partie des méthodes de
facilitation et fait appel à une technique d’apprentissage actif.
Pouvant être quali ée de véritable trame de lecture, la macrostructure permet au
sujet de se servir d’un schéma général pour repérer les éléments pertinents d’un
texte, les comprendre, les organiser chronologiquement et logiquement, et identi er
les liens pouvant exister entre les di érentes informations.
Il s’agit en fait d’un support papier (feuille format A4) comportant di érents espaces
ou rubriques, tels que le titre de la nouvelle, le contexte général (quand et où
se déroule l’intrigue), l’identi cation des personnages principaux, les actions, le
dénouement de l’histoire. Ce support permet incidemment de distinguer l’essentiel
de l’accessoire, ce qui, en retour, permet de prioriser l’information et, par conséquent,
de réduire le nombre d’informations à stocker.
En outre, l’utilisation d’une macrostructure permet de systématiser la méthodo-
logie.
Encadré 2.
Macrostructure.