Cours 5 : Méiose – Fécondation – Cycle biologique – Anomalies chromosomiques Partie 3 : Les anomalies chromosomiques Rappel : organisation des chromosomes : - Le centromère, parfois appelé constriction primaire, divise le chromosome en 2 régions, le bras court p et le bras long q. - Les télomères sont les extrémités terminales des chromosomes au niveau des bras courts et des bras longs. - Les constrictions secondaires sont présentes sur les chromosomes acrocentriques (type de chromosomes dont le centromère se situe à l'extrémité du bras q) - Les satellites qui se présentent sous forme de sphères de taille variable sont situés à l’extrémité du bras court des chromosomes acrocentriques. - Les chromosomes médiocentriques ont un centromère situé au milieu du chromosome. - Les chromosomes métacentriques et submétacentriques ont un centromère légèrement décalé vers l’une des extrémités du chromosome, ce qui donne 2 bras de longueur presque égale. - Les chromosomes télocentriques ou subtélocentriques ont un bras court très petit. - Les chromosomes acrocentriques ont un centromère qui semble se situer pratiquement à une extrémité et possèdent des satellites. (ex : chromosomes 13, 14, 15, 21, 22). Les anomalies chromosomiques regroupent toutes les anomalies de nombre ou de structure d’un (ou plusieurs) chromosome(s) dans un génome. Les anomalies (ou aberrations) chromosomiques peuvent s'observer de manière constitutionnelle (elles sont alors présentes dès la naissance) soit de manière acquise au cours de processus malins (ils ne sont observés alors qu'au niveau des cellules tumorales). Elles résultent d'un accident survenant soit au cours de la méiose, soit au cours d'une mitose. Elles peuvent impliquer un ou plusieurs chromosomes. On reconnaît par ailleurs les anomalies dites homogènes (quand toutes les cellules examinées portent l'anomalie, en lien avec une anomalie de ségrégation des chromosomes à la méiose) et les anomalies en mosaïque quand une fraction seulement des cellules est anormale (sont le résultat d'un évènement post-zygotique donc après la fécondation, il s’agit d’erreur de ségrégation des chromosomes lors d'une mitose chez un embryon à caryotype normal ou de la correction spontanée d'une anomalie). Leurs conséquences sont variables en fonction du remaniement considéré. En règle générale, les remaniements dits équilibrés (c'est-à-dire sans perte ni gain de matériel génétique) n'ont habituellement pas de conséquence pour le sujet porteur alors que les remaniements déséquilibrés se traduisent par des manifestations cliniques d'autant plus graves que la perte ou le gain de matériel est plus important. I Anomalie de nombre = nombre de chromosomes anormal La non-disjonction conduit à l’aneuploïdie La non-disjonction des chromosomes correspond à l'absence de séparation des chromosomes homologues en anaphase de méiose 1 ou à la non-disjonction des chromatides sœurs en méiose 2. Principe de la non-disjonction en 1ère et 2ème division de méiose Cette anomalie de fonctionnement crée soit des gamètes avec un chromosome surnuméraire (trisomie), soit des chromosomes absents (monosomie). Ce sont des cellules avec une anomalie du nombre de chromosomes appelées cellules aneuploïdes. On dit que la non-disjonction conduit à l’aneuploïdie. La plupart des anomalies ne permettent pas le développement de l'embryon et donne lieu à des avortements spontanés. Ces anomalies sont fréquentes (6 à 25%), elles concernent toutes les paires de chromosomes et les monosomies sont statistiquement aussi fréquentes que les trisomies. Quelques anomalies permettent de mener à terme une grossesse : Une trisomie correspond à la présence d’un chromosome supplémentaire. Le nombre de chromosomes est donc de 47 et non plus de 46. Tous les chromosomes peuvent être impliqués, mais seulement trois trisomies autosomiques sont viables à l’état homogène dans l’espèce humaine : ● Trisomie 21 (Syndrome de Down) : 47, XX ou 47, XY ● Trisomie 13 (Syndrome de Patau) : 47, XX ou 47, XY ● Trisomie 18 (Syndrome d'Edwards) : 47, XX ou 47, XY D’autres trisomies peuvent être observées en mosaïque, pour le 8 ou le 9 par exemple. Le gain d’un chromosome peut également concerner les gonosomes : ● Trisomie X (Syndrome Triple X) : 47, XXX ● Le syndrome de Klinefelter : L'individu possède deux chromosomes X et un chromosome Y (XXY) : 47, XXY ● Le Syndrome de Jacob : l'individu possède un chromosome Y en double exemplaire, et un chromosome X (XYY) : 47, XYY • Le syndrome de Klinefelter Cytogénétique : - Dans 85 % des cas, l'anomalie est homogène : 47, XXY dans toutes les cellules. - Autres cas sont des mosaïques 47, XXY/46,XY ou 47XXY/46XX • • • Fréquence : 1/1.000 garçons (mosaïques comprises) - Pas de rôle de l'âge parental Clinique : Signes principaux : - Atrophie testiculaire - Gynécomastie - Stérilité - Pas de dysmorphie importante Diagnostic posé : - à la puberté le plus souvent - parfois pour stérilité - rarement à la naissance, rarement chez le jeune enfant (parfois pour malformation non spécifique des • organes génitaux externes). Phénotype : - Atrophie testiculaire : constante - testicules petits, mous contraste ; avec scrotum de taille et de pigmentation normale. - Verge le plus souvent normale, parfois hypoplasique - Gynécomastie : n'est pas constante (1/3 à 1/4 des cas) ; apparaît vers 12-13 ans, volume modéré, au début asymétrique. - Autres anomalies des caractères sexuels secondaires : pilosité rare, répartition gynoïde des graisses - Stérilité : azoospermie pratiquement constante. - Morphologie du sujet : variable. Soit sujets longilignes, avec membres longs, soit sujets de morphologie masculine normale (sujets parfois même de petite taille) - Développement intellectuel normal dans la majorité des cas ; cependant certains sujets peuvent présenter des difficultés scolaires et d'inadaptation sociale ou des troubles psychotiques. Caryotype 47, XXY Le syndrome de Down (trisomie 21) La trisomie 21 est la plus fréquente des anomalies de répartition des chromosomes. Elle est associée à une série de signes cliniques constituant le syndrome de Down. Le cas le plus courant est une mauvaise répartition du chromosome 21 lors de la méiose 1 entraînant un gamète possédant 2 chromosomes 21 au lieu de deux. Par la suite, si ce gamète effectue la fécondation, l'individu en résultant possèdera donc 3 chromosomes 21 au lieu de deux dans son caryotype. On parle de trisomie libre. D’autres cas de trisomie 21 consistent en une translocation d'un fragment de chromosome 21 sur le chromosome 14. On parle alors de trisomie 21 par translocation (par opposition à la trisomie 21 libre où le chromosome surnuméraire est libre). Il se peut également qu'il y ait une erreur lors la première mitose de la cellule œuf. Ainsi, un des deux chromosomes 21 ne se sépare pas lors de l'anaphase et va en entier dans une des deux cellules filles, causant des divisions entraînant des cellules à 3 chromosomes 21. Un individu trisomique 21 peut donc présenter trois chromosomes 21 distincts ou seulement deux chromosomes 21 libre et une partie de chromosome 21 fusionnée avec le chromosome 14 ou avec un autre chromosome 21 (ici on dit translocation robertsonienne). Cytogénétique : - 95% des cas d'une trisomie libre (Chromosome 21 surnuméraire avec formule 47,XX,+21 ou 47,XY). - autres cas : trisomie 21 par translocation, le chromosome 21 surnuméraire étant transloqué sur un autre chromosome acrocentrique, 14 le plus souvent. Fréquence : 1 pour 700 naissances vivantes ; le risque augmente en fonction de l'âge maternel. Diagnostic : - diagnostic prénatal : étude du caryotype foetal - chez le nouveau-né sur l'association Hypotonie (faible tonus musculaire) + dysmorphie Clinique : .Dysmorphie : - Tête petite, arrondie, faciès rond, profil plat - Fentes palpébrales obliques en haut et en dehors - Oreilles petites - Bouche petite avec protrusion de la langue - Petites taches pigmentées en périphérie de l'iris - Mains avec doigts courts - Cou court, excès de peau nucale… .Malformations associées fréquentes : - cardio-vasculaires (dans 50% des cas) - digestives .Encéphalopathie se traduisant par un déficit mental d'intensité variable : le QI se situe autour de 50 à l'âge de 5 ans et décroît ensuite le plus souvent. Difficultés d'acquisition du langage et encore plus de la lecture et de l'écriture. Caryotype 47, XY Caryotype 47, XX Le syndrome de Turner (monosomie X0) Une monosomie correspond à la perte d’un chromosome. Le nombre de chromosome est donc de 45. Aucune monosomie autosomique constitutionnelle n’est viable (élimination dès les premiers stades de la vie embryonnaire). Pour ce qui concerne les chromosomes sexuels, la monosomie X est responsable du syndrome de Turner, il s’agit de la seule monosomie homogène viable dans l’espèce humaine. Caryotype d’un individu atteint du syndrome de Turner • • Fréquence : 1/5 000 filles à la naissance (cependant, fréquence beaucoup plus élevée à la conception). Pas de rôle de l'âge parental Formes génétiques : - 55 % des cas formule 45 X. (Pas de corpuscule de Barr : test de Barr -), le chromosome X présent est d'origine maternelle dans 76 % des cas. - 45 % des cas restants sont des variantes de nombre ou de structures mosaïques : 46, XX/45,X • Diagnostic posé : - soit à la naissance ou chez le nourrisson : syndrome de Bonnevie-Ulrich Petite taille (45-47 cm) ou même hypotrophie Lymphoedéme du dos, des mains et des pieds Excès de peau sur la nuque - soit chez la petite fille - soit chez l'adolescente • Clinique : - Signes principaux : Petite taille (1 m 50), Impubérisme, Agénésie ovarienne - Dysmorphie prononcée, généralement évocatrice, avec nombreux signes cependant rarement tous présents chez un même sujet. - Dysmorphie cranio-faciale : fentes palpébrales obliques en bas et en dehors, commissures labiales, oreilles basses... - Implantation basse des cheveux thorax large en bouclier, mamelons hypoplasiques, écartés. Organes génitaux : Externes : restent infantiles, Internes : utérus hypoplasique, gonades atrophiques Aménorrhée, pilosité pubienne réduite, axillaire absente, développement mammaire réduit ou absent. - Malformations viscérales, squelettiques, sensorielles… - Développement psychomoteur : extrêmement variable : soit retard mental léger, soit QI normal - Caractères et maladies liés au sexe : Daltonisme, Hémophilie Myopathie...Se retrouvent avec la même • fréquence que dans le sexe masculin. Reproduction : Possibilité de grossesse qui reste cependant exceptionnelles: Polyploïdie La polyploïdie est caractérisée par un organisme qui possède plus de deux ensembles complets de chromosomes. La situation peut être causée par la fécondation d'un gamète anormal suite à une non-disjonction, par l'absence de la méiose II, ou encore, par l'absence de la division d'un zygote lors de la première mitose. Elles correspondent à un nombre anormal de lots haploïdes entiers. Normalement chaque individu est constitué d’un lot haploïde maternel (n) et d’un lot haploïde paternel (n) soit 2n. Chez l’homme ont été décrit des : ● triploïdie (3n) (cas le plus fréquent) : 69 chromosomes avec caryotype : 69, XXX ; 69, XXY et 69, XYY. ● tétraploïdie (4n) : 92 chromosomes Caryotype triploïde (FCS = fausses couches spontanées) Concernant les triploïdies on distingue les triploïdies avec deux lots haploïdes d’origine maternelle des triploïdies avec deux lots haploïdes d’origine paternelle. Les polyploidies homogènes sont habituellement létales, mais peuvent être viables en mosaïque. Cause des polyploïdies : - Double fécondation : 2spz(n)+1ovt(n)=1zgt (3n) Présence de gamète diploïde : 1spz (2n)+ 1 ovt (n) = 1 zgt (3n) ou 1spz (n) + 1 ovt (2n) = 1 zgt (3n) (spz = spermatozoïde, ovt = ovocyte, zgt = zygote) II- Anomalie de structure = structure des chromosomes anormale Les anomalies de structure sont toutes modifications de la structure d’un chromosome. Elles sont réparties en plusieurs catégories. Elles peuvent provoquer des pathologies diverses et concerner d’un individu à un autre, des chromosomes différents. a- La délétion La délétion est produite lorsqu’une partie d’un chromosome s’est détaché suite à une cassure en un ou deux points, entraînant ainsi la perte d’un ou plusieurs gènes. Si la perte est importante, il peut s’agir d’une situation létale (mortelle). La délétion (perte d’un segment chromosomique) peut être qualifiée de délétion terminale (= perte d’une extrémité d’un chromosome, des parties les plus distales) ou de délétion interstitielle (= perte d’un segment interne). délétion terminale délétion interstitielle b- La duplication La duplication est produite (souvent lors de l’enjambement de la méiose) lorsqu’un segment d’un chromosome s’insère sur une autre chromatide sœur, formant ainsi un segment supplémentaire. Le gamète portant une duplication mène possiblement à la formation d’un zygote non viable. c- L’inversion L'inversion est produite lorsqu'un segment de chromosome se détache et se réinsère à l'envers. L'inversion ne cause généralement pas de perte de matériel génétique et l'équilibre n'est pas nécessairement affecté. Toutefois, si un gène s'exprime selon son emplacement précis sur un chromosome, certaines conséquences peuvent alors s'en suivre. L’inversion (cassure d’un segment chromosomique suivie d’une rotation de 180° et recollement) peut être qualifiée d’inversion paracentrique (inversion en dehors du centromère) ou d’inversion péricentrique (inversion incluant le centromère). inversion péricentrique inversion paracentrique d- Isochromosome Un isochromosome correspond à un chromosome avec deux bras identiques. Cette anomalie est due à une ségrégation anormale des chromatides. e- Chromosome en anneau Le chromosome en anneau correspond à la soudure des deux extrémités d’un chromosome formant un chromosome circulaire. Cela est dû à un crossing-over impliquant les extrémités d’un même chromosome. La formation de ce chromosome est toujours accompagnée d’une délétion. f- L’insertion Les insertions se traduisent par le transfert d'un segment intercalaire à l'intérieur d'un autre bras chromosomique. g- La translocation La translocation est le résultat d'un segment d'un chromosome qui se détache et qui se rattache à un autre chromosome non homologue. Lors de la méiose, les gamètes produits peuvent alors présenter des délétions ou des duplications et possiblement mener à la formation de zygotes non viables. Les translocations (échange ou transfert de segments chromosomiques entre deux chromosomes non homologues) peuvent être qualifiées de translocation réciproque (échange de segments chromosomiques dans les deux sens, voir au dessus) ou de translocation robertsonienne (ou fusion centrique). Si la translocation n’entraîne pas de perte de matériel chromosomique et donc de gènes, elle est qualifiée d’équilibrée, dans le cas contraire, on la qualifie de déséquilibrée. Translocation robertsonienne : anomalie de structure caractérisée par la fusion de deux chromosomes acrocentriques (type de chromosomes dont le centromère se situe à l'extrémité du bras q (ou bras long), le bras court est très petit et se présente sous la forme d'une masse condensée appelée satellite ; celle-ci est rattachée au chromosome par une zone de constriction secondaire) par recombinaison non-réciproque entre deux chromosomes homologues ou non homologues. (Les chromosomes impliqués dans les translocations robertsoniennes sont les chromosomes acrocentriques 13, 14, 15, 21 et 22). Mécanisme de formation d’une translocation robertsonienne entre un chromosome 13 et un chromosome 14