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Séances 3 et 4 : Modèle simplifié keynésien et politiques économiques :
les multiplicateurs keynésiens
Objectifs des séances :
- Expliquer l’architecture du modèle proposé par Keynes
- Expliquer l’équilibre entre l’offre et la demande globale
- Expliquer le principe du multiplicateur keynésien
1. Le « Diagramme à 45 degrés » : l’équilibre entre l’offre globale et la demande
globale en termes réels
La construction du diagramme à 45 degrés reprend l’ensemble des concepts qui ont été
abordés précédemment : la loi psychologique fondamentale, la fonction de consommation
keynésienne, la fonction d’épargne considérée comme la partie du revenu qui n’est pas
consommée. Il intègre également la fonction d’investissement et le rôle de à l’Etat lorsqu’il
s’agit pour celui-ci d’engager des politiques budgétaires et/ou fiscales. On notera comme
précédemment :
- C = cYd +C0 : la fonction de consommation.
- Yd =Y – T : le revenu disponible avec T = tY , où t représente la pression fiscale telle
que le niveau des taxes perçu.
- I =I(i) : la fonction d’investissement.
- G : les dépenses de l’Etat.
On peut en déduire la valeur de la fonction d’épargne comme la différence entre le
revenu et la consommation :
S = Y - C => S = (1-c + ct )Y - C0
Pour simplifier on suppose que l’investissement est « autonome » autrement dit qu’il
correspond à un niveau d’investissement donné de manière exogène sans que pour l’instant on
explique le comportement des investisseurs :
I = I0
Le comportement des entrepreneurs keynésiens en matière d’investissement sera abordé
aux séances 5 et 6..
1.1 Définition analytique de l’équilibre macroéconomique entre l’offre et la demande
globale
La demande globale correspond, en tant qu’équation de définition, à la somme des
dépenses de consommation finales des ménages, des consommations intermédiaires émanant
des entreprises, lesquelles correspondent à leurs investissements, et enfin des dépenses de
l’Etat. On notera :
D = C+ I + G (1)
1
L’offre globale, correspond au revenu national, elle se répartit par définition entre la
consommation des ménages, l’épargne des ménages ou des entreprises et les taxes perçues par
l’Etat. On notera :
Y =C+ S +T
(2)
A l’équilibre, l’offre égalise la demande globale et on vérifie que Y = D. En d’autres
termes à partir des équations (1) et (2) on peut déduire que :
Y = (D = C+ I + G) => C + S + T = C + I + G
Soit encore si l’on suppose que le budget de l’Etat est équilibré, c’est à dire que le montant des
taxes perçues est égal aux dépenses engagées :
I=SY=D
L’équilibre tel qu’il vient d’être défini peut être représenté graphiquement. Cette
représentation correspond à une construction que la « vulgate » keynésienne qualifie de
« Diagramme à 45 degrés ».
1. 2 Equilibre macroéconomique et « Diagramme à 45 degrés »
Afin d’expliciter la logique que recouvre le diagramme à 45 degrés, on peut procéder
en deux étapes. On montrera premièrement comme s’établit un équilibre entre l’offre et la
demande globale. Deuxièmement on indiquera comment l’on passe d’une situation d’équilibre
entre la demande globale et l’offre globale à une autre position d’équilibre après augmentation
de l’investissement.
Première étape. Positionnons sur un même graphique les fonctions de consommation
et d’épargne. On représente en abscisses le revenu national, Y, qui s’interprète comme l’offre
globale c’est à dire le niveau de ce qui est produit globalement dans l’économie. On ne tient
pas compte pour le moment du montant des taxes ou de la pression fiscale. En ordonnées on
indique le niveau de la demande globale que l’on notera D. La demande globale est équivalente,
par définition, à la somme de l’investissement, de la consommation et des dépenses de l’Etat.
En d’autres termes :
D=C+I+G
On indique également sur ce même axe, le montant de l’épargne S. L’objectif est de
montrer quelles sont les situations vérifiant que l’offre globale est égale à la demande globale.
Il s’agit de situations qui vérifient que :
Y = (D = C + I + G)
Notre objectif est également d’expliquer la signification économique de cette égalité.
De manière complémentaire le « Diagramme à 45 degrés » permet de comprendre la
signification des états de l’économique où l’égalité précédente n’est pas vérifiée. Si l’on
considère, à des fins de simplification, que durant cette première étape l’investissement est nul,
on obtient la représentation graphique donnée par le schéma suivant.
2
45°
D, C, I, S
C = cY + Co
Point A : D = Y
Point A’ : I = S = 0
S = (1-c) Y – C0
C
Y
-C
Schéma 1
Diagramme à 45 degrés I = S = 0
On constate que le point A correspond à une première égalité entre l’offre globale et la
demande globale. Il matérialise une situation où la fonction de demande globale, ici réduite à
la consommation finale, coupe la droite à 45 degrés En ce point on vérifie effectivement que:
Y = (D = C)
Le point A’ vérifie simultanément que l’épargne est nulle et égale, par définition dans cette
situation simplifiée, à un investissement supposé nul. Autrement dit on vérifie que :
I=S=0
Deuxième étape. On admettra qu’à partir de la situation précédente une vague
d’investissement autonome d’un montant I0 est engagée.
On peut alors montrer comment un nouvel équilibre s’établit.
3
Schéma 2
Diagramme à 45 degrés avec I = I0
Sur le graphique ci-dessus, le point B correspond à un nouvel état de l’économie où
l’offre globale est égale la demande globale. Simultanément au point B’ on vérifie également
que l’épargne est égale à l’investissement.
L’ensemble des points situés sur la première bissectrice constitue des équilibres entre
l’offre et la demande globale ce qui justifie que le diagramme soit connu dans la littérature
économique sous l’intitulé de « Diagramme à 45 degrés ».
Cette présentation permet de rendre compte de l’équilibre en termes réels entre offre et
demande globale et simultanément de l’égalité entre l’épargne et l’investissement. Elle explique
également la manière dont se propagent dans l’économie des flux d’investissements sur le
revenu national au travers de ce que les économistes keynésiens appellent le multiplicateur
d’investissement.
Ce principe est à la base des mécanismes qui sous tendent les politiques économiques
de relance de l’activité économique et de réduction du chômage.
2. Le principe du multiplicateur d’investissement keynésien
La logique keynésienne, appliquée à la sphère de l’économie réelle comme nous l’avons
indiqué suppose que l’offre globale s’ajuste à la demande globale envisagée ex ante par les
entrepreneurs keynésiens. Il s’agit d’une application de ce que Keynes appelle au chapitre III
de la Théorie générale le « principe de la demande effective » au sens où, du côté de l’offre, les
entrepreneurs keynésiens anticipent ce que sera le niveau de la demande émanant de la
consommation des ménages et des investissements intermédiaires des entreprises. Ces
entrepreneurs fixent, en fonction de ces anticipations sur la demande auxquelles ils veulent
4
répondre, ce que devrait être le niveau de la production globale (offre globale). Si l’on raisonne
à partir d’une situation d’équilibre, le problème consiste, d’une part, à déterminer le niveau
d’investissement nécessaire pour couvrir ce niveau de demande anticipée et, d’autre part, à
comprendre comment se rétablit l’équilibre entre la demande globale qui a augmenté du
montant de l’investissement engagé et l’offre globale. En d’autres termes, si l’on envisage, à la
suite des développements proposés par Keynes au chapitre X de la « Théorie générale de
l’emploi de l’intérêt et de la monnaie » consacré au principe du multiplicateur, une
augmentation arbitraire d’un montant I de l’investissement, celle-ci vient déséquilibrer le
marché des biens et services du côté de la demande globale ex ante alors que l’offre globale n’a
pas varié. Le principe du multiplicateur permet de comprendre comment se propage cette vague
d’investissement sur l’offre globale, sur la consommation et sur l’épargne jusqu’à ce que
l’équilibre puisse se rétablir entre l’offre globale et la demande globale. Pour comprendre cette
évolution il convient au préalable de rendre compte des principes qui régissent les effets
multiplicateurs.
2. 1 L’expression analytique du multiplicateur d’investissement
On suppose une situation d’équilibre entre l’offre et la demande globale en début de période
telle que :
Y = cY - ctY+ C0+ I + G
(3)
Y -cY + ctY = C0 + I + G
(4)
Si une vague d’investissement ∆𝐼 est engagée l’équation précédente sera perturbée de la
manière suivante, si l’on veut conserver l’égalité entre l’offre et la demande globale :
Y + DY - cY - cDY + ctY + ctDY = C0 + I + DI +G (5)
En effectuant (5) moins (4) et après avoir factorisé par rapport à ∆𝑌 on obtient :
Y(1cct)I
Soit : DY =
DI
(1- c + ct)
(6)
Si on ne tient pas compte des taxes ou de la pression fiscale l’équation précédente prend
la valeur suivante :
DI
DY =
(7)
(1- c)
Cette relation est généralement notée : DY = kI DI dans laquelle ki est appelé
1
.
1- c
La relation précédente signifie que la variation du revenu à l’équilibre est ki fois
proportionnelle à la variation initiale de l’investissement.
Exemple : si l’on suppose que c = 0,8 (ce qui est une valeur proche de la PmC en France), la
valeur du multiplicateur est de 5. En d’autres termes si l’investissement augmente de 1000
unités monétaires le revenu national augmentera de 5000 unités monétaires.
multiplicateur d’investissement keynésien et prend la valeur
5
Il est possible d’expliciter les mécanismes précédents à partir du diagramme à 45 degrés afin
d’illustrer la manière dont se propage une vague d’investissement dans l’économie et comment
se rétablit l’équilibre entre l’épargne et l’investissement mais aussi entre l’offre globale et la
demande globale.
2. 2 Multiplicateur d’investissement et « Diagramme à 45 degrés »
Il est possible de reprendre le schéma précédent afin d’illustrer la propagation d’une
vague unique d’investissement sur l’offre et la demande globale afin de retrouver la valeur du
multiplicateur d’investissement.
Sur le schéma 2, les traits fléchés en noir représentent horizontalement les variations
successives du revenu national de sorte que l’on vérifie l’égalité :
n
Y kI .
i
i 1
Schéma 3
Effets d’une variation de l’investissement sur la demande globale
Le principe du multiplicateur permet d’apprécier les éléments théoriques qui fondent les
politiques de relance de l’activité économique par dépenses de l’Etat ou réduction des taxes en
situation de sous emploi. Outre le multiplicateur précédent trois autres peuvent être mis en
évidence pour monter l’effet d’une politique i) le multiplicateur de dépenses publiques ii) le
multiplicateur de réduction des taxes, iii) le multiplicateur de budget équilibré sur le niveau du
revenu national et le niveau de l’emploi.
6
3. Multiplicateurs et politiques de relance de l’activité économique
Nous aborderons successivement le multiplicateur budgétaire, le multiplicateur fiscal et
le multiplicateur de budget équilibré.
3.1 Le multiplicateur budgétaire
La valeur du multiplicateur de dépenses budgétaires peut être établie en comparant
comme précédemment deux situations d’équilibre où la première est perturbée par une variation
de G.
Supposons comme précédemment qu’en t0 à l’équilibre on vérifie:
Y - cY + ctY = C0+ I+ G
(8)
Si l’on suppose que l’Etat engage des dépenses pour un montant de ∆𝐺, l’équation précédente
s’écrit de la manière suivante si l’on tient compte des perturbations à droite et à gauche :
Y + DY - cY - cDY + ctY + ctDY = C0 + I +G + DG (9)
En faisant (9) moins (8), on obtient :
DY - cDY + ctDY = DG (10)
Après avoir factorisé par rapport à Y on obtient : DY =
DG
1
, d 'où kG =
(1- c + ct)
(1- c + ct)
Si comme précédemment on ne tient pas compte des taxes le multiplicateur de dépenses
1
budgétaires est alors égal à : kG =
(1- c)
3.2 Le multiplicateur fiscal
Nous indiquons ici quels sont les effets d’une réduction du niveau des taxes sur le revenu
national. Partons de la situation d’équilibre initiale t0 suivante : (on suppose à des fins de
simplification que tY = T) :
Y - cY = -cT + C0+ I+ G (11)
Si l’Etat engage une politique de réduction des taxes de −∆𝑇 l’équilibre est perturbé et
en t1 prend la forme suivante :
Y + DY - cY - cDY = -cT - cDT +C0 + I +G + DG (12)
En faisant (12) moins (11) on obtient:
Y(1c)cT
Dans ce cas le multiplicateur fiscal prend la valeur suivante que l’on note en valeur
absolue pour indiquer qu’il s’agit d’une variation positive du revenu national c’est à dire d’une
augmentation du PIB.
7
DY =
-c
DT
1- c
(13)
3.3 Le multiplicateur de budget équilibré et le théorème Haavelmo
Par rapport aux cas précédents il peut être supposé que les dépenses engagées par l’Etat
sous forme de dépenses budgétaires ou de réductions d’impôts seront couvertes une fois
l’équilibre rétabli au sens où le revenu national ayant augmenté la masse d’impôts perceptible
augmentera également afin de couvrir les dites dépenses. Pour autant le discours des
responsables politiques souligne souvent la nécessité d’équilibrer le budget de la nation entre
dépenses et recettes fiscales. Cette condition d’équilibre est réalisée par le multiplicateur de
budget équilibré dont nous allons établir la valeur.
Supposons que l’Etat engage une politique de relance de l’activité économique en
augmentant les dépenses d’un montant G équivalente à une augmentation de la masse des
impôts T . En t0, avant que cette politique de soit engagée l’équilibre entre l’offre et la
demande globale prend la forme de l’équations suivante : Y -cY =-cT + C0+ I+ G (14)
L’augmentation des dépenses publiques et des impôts vient perturber l’équilibre de sorte qu’on
obtient un nouvel équilibre:
Y + DY - cY - cDY = -cT - cDT +C0 + I +G + DG (15)
Comme précédemment en soustrayant les équations (15) de (14) on obtient :
Y cY cT cG
Si l’on suppose que T G et que l’on remplace T par G après factorisation on obtient :
Y(1c)(1c)G
Soit Y 
(1c)
G
(1c)
En d’autres termes la valeur du multiplicateur de budget équilibré vaut 1 de sorte qu’une
augmentation des dépenses de l’Etat, entièrement financée par l’impôt, induit une augmentation
strictement proportionnelle du revenu national. Ce résultat est connu dans la littérature
économique sous l’intitulé de théorème d’Haavelmo.
On remarque pour conclure qu’en ce qui concerne l’efficacité économique, les
politiques de relance le sont d’autant plus que la valeur du multiplicateur est forte. On vérifie
que les politiques de dépenses budgétaires sont plus efficaces que les politiques de réduction
des taxes, elles-mêmes plus efficaces que les politiques de budget équilibré.
On constate en effet que :
(1c) c

 1
(1c) '1c) (1c)
Pour autant les mécanismes qui régissent les principes des divers multiplicateurs tout
autant que l’équilibre réel entre offre et demande globale par ajustement de la première à la
8
seconde passent sous silence le rôle des acteurs ou des agents qui en sont les vecteurs et
particulièrement celui tenu par les entrepreneurs dans ce type d’analyse. Cette problématique
est abordée par Keynes au travers de l’exposé qu’il propose du « principe de la demande
effective ».
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