Prévention environnementale et comportementale au bloc opératoire

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Prévention des Infections
du Site Opératoire
P.-Y. Donnio
[email protected]
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
Bactériologie-Hygiène Hospitalière, CHU de Rennes
Centre de Coordination de Lutte contre les Infections Nosocomiales - Ouest

1
INSERM U1230 ; Université de Rennes 1
Épidémiologie générale des ISO
 Concerne 2 à 5% des interventions
 15% de toutes les infections associées aux soins
 Incidence variable selon le type de chirurgie : de 1% (PTH) à 20%
(chir. colorectale)
 Infection à bactérie multirésistante associée à un pronostic
défavorable
2
Coûts des ISO
 Lee et al. J Bone Joint Surg Am 2006 : ISO prédicateur de mortalité chez le sujet âgé en chir.
orthopédique [OR : 3,8 (IC 95% : 1,5-9,7)]
 Coût financier estimé d’une infection sur PTH = £6626 [UK]
3
Asepsie
 Mise en œuvre des moyens permettant de maintenir un organisme vivant
ou un milieu inerte exempt de microorganismes
 S’appuie sur :
 Antisepsie
 Désinfection
 Stérilisation
« Au lieu de s’ingénier à tuer les microbes dans les plaies,
ne serait-il pas plus raisonnable de ne pas en introduire ?»
Louis Pasteur, Compte Rendu de l’Académie des Sciences, 28 avril 1878
4
5
Asepsie progressive et croissante au sein du
bloc opératoire
• But = réduire au maximum la contamination microbienne de la plaie opératoire
Zone 0
Zone 1
Zone 2
Zone 3
Zone 4
Zone 5
Incision
Équipe
opératoire
Salles
d’opérations
Préparation
chirurgiens
Bureau
PC
Extérieur
du bloc
Table à
instruments
Circulation
Préanesthésie
Arsenal
stérile
6
Quelle stratégie de prévention des ISO ?
7
Une stratégie centrée sur le patient
 Nécessité de combiner différentes approches :
o Prévention clinique
o Prévention environnementale
o Prévention comportementale
o Prévention épidémiologique
D’après G. Birgand, PhD Thesis 2014
https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01067988
8
Une stratégie centrée sur le patient
 Patient
 Prévention clinique
 Prévention environnementale
 Prévention comportementale
 Prévention épidémiologique
9
Une stratégie centrée sur le patient
 Nécessité de combiner différentes approches :
o Prévention clinique :
o Décontamination staphylocoque doré, antibioprophylaxie, antisepsie…
o Prévention environnementale :
o Instruments et dispositifs médicaux, traitement de l’air, bionettoyage, …
o Prévention comportementale :
o Hygiène des mains, tenues, entrées-sorties …
o Prévention épidémiologique :
o Recueil des facteurs de risques, surveillance des ISO …
10
Physiopathologie et voies de contamination
 Principalement contamination peropératoire par la flore
endogène du patient :
o Flore des muqueuses en cas de chirurgie contaminé ou propre-
contaminée
o Flore cutanée pour chirurgie propre
 Secondairement : flore exogène
 Personnel soignant (mains)
 Matériel inerte
 Air du bloc opératoire
11
Microbiologie des ISO
 Enquête Nationale de Prévalence (ENP) 2012
 Chirurgie orthopédique / réseaux de surveillance
Réseau de surveillance
% infections par espèce
bactérienne
KISS 2005-2009
S. aureus : 38
Enterococcus : 13
Staph. Coag. Nég. : 16
NHS 2012
S. aureus : 42
Entérobactéries : 19
Staph. Coag. Nég. : 24
NHSN 2009-2010
S. aureus : 47
Staph. Coag. Nég. : 14
Birgand, PhD 2014
12
Voies de contamination et méthodes
de prévention
 Flore endogène :
o Flore des muqueuses
o Flore cutanée
 Flore exogène :
o Personnel soignant
o Matériel inerte
o Air du bloc opératoire
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 Prévention clinique :

o Antibioprophylaxie
o Antisepsie
o Décontamination S. aureus
 Prévention environnementale et
comportemetale :

o Tenue, hygiène des mains, comportement
o Stérilisation, désinfection, bionettoyage
o Traitement de l’air
Une stratégie centrée sur le patient
 Nécessité de combiner différentes approches :
o Prévention clinique :
o Décontamination staphylocoque doré, antibioprophylaxie, antisepsie…
o Prévention environnementale :
o Instruments et dispositifs médicaux, traitement de l’air, bionettoyage, …
o Prévention comportementale :
o Hygiène des mains, tenues, entrées-sorties …
o Prévention épidémiologique :
o Recueil des facteurs de risques, surveillance des ISO …
14
Quelle place pour la prévention
environnementale dans les
programmes de prévention ?
15
Programmes de prévention récents (1)
 USA : Scenic Project 1970-1976  57%

60% des ISO peuvent être prévenues
 Surgical Infections Prevention [SIP] 2002 ; centré sur l’antibioprophylaxie :
 Administration < 1 heure avant l’incision
 Choix de la molécule et de la dose = guidelines
 Arrêt dans les 24 heures
 Surgical Care Improvment Project [SCIP] 2003 ; 5 objectifs
 Prévention ISO, thromboses, complications cardiaques et respiratoires (PAVM)
 ISO :
 Antibioprophylaxie : mêmes mesures que SIP
 + méthodes de dépilation
 Maintien d’une glycémie peropératoire normale en chir. cardiaque
 Prévention de l’hypothermie en chir. colique
 Healthcare-Acquired Infection Prevention [HAIP] 2009
 Objectif  25% des ISO
16
 Mise en œuvre du SCIP dans 95% des établissements
Programmes de prévention récents (2)
 France :
 Pas d’objectifs chiffrés dans le programme 2015 (PROPIAS)
 Indicateur d’action, public : surveillance des ISO
 2004 ; Conférence de consensus sur la préparation de l’opéré (SFHH)
 Dépilation avant le passage au bloc
 Antisepsie en 4 temps systématique
 2013 ; Gestion préopératoire du risque infectieux (SF2H), focus sur 2 aspects
 Préparation cutanée : suppression de la détersion systématique
 Décontamination portage S. aureus
 2016 ; Antisepsie de la peau saine avant un geste invasif chez l’adulte (SF2H)
17
Place de la stérilisation et de la
désinfection
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Classification des dispositifs médicaux et du
traitement associé (Spaulding, 1957)
 Dispositifs critiques
 Introduits dans le système vasculaire ou dans une cavité ou tissu stérile quelle que soit la voie d’abord.
 semi-critiques
 En contact avec muqueuse ou peau lésée superficiellement
 non critiques
 En contact avec la peau intacte du patient ou sans contact avec le patient
19
Classe
Niveau de risque
Niveau de traitement
Critique
Haut
• Usage unique ou
• Stérilisation ou
• Désinfection de haut niveau
Semi-critique
Moyen
• Désinfection de niveau
intermédiaire
Non critique
Bas
• Désinfection de bas niveau
Principes généraux
 Phases de pré-désinfection et de lavage obligatoires
o « On ne stérilise ou ne désinfecte bien que ce qui est propre »
 Lavage : manuel ou automatique
 Phase de traitement proprement dit
 Méthode adaptée à l’objectif fixé:
o Stérilisation : vapeur d’eau, plasma H2O2
o Désinfection de haut niveau si stérilisation impossible : acide peracétique,
glutaraldéhyde
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•
DM CRITIQUE
STÉRILISABLE
Détergent (± enzymatique)
DM SEMI-CRITIQUE,
DM CRITIQUE NON STÉRILISABLE
•
•
Acide peracétique
Glutaraldéhyde
•
•
•
•
•
21
Eau du réseau
Eau maîtrisée
Eau stérile
Vapeur d’eau
Plasma H202
D’après Association Française de Stérilisation 2010
Place du bionettoyage
22
Contamination des surfaces
 Formation de biofilms
 Communautés microbiennes possibles
Relargage
Maturation
Fixation
Dépôt
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Formation de
micro-colonies
Bionettoyage
 Association : action détergente + action désinfectante 
usage de détergent-désinfectant en solution pour casser les
biofilms
 Désinfection de bas niveau
 Niveaux progressifs de bionettoyage au bloc opératoire :
24
Place du traitement d’air
25
Prévenir la bio-contamination de l’environnement
 Aéro-contamination : particules inertes non viables
 Aéro-bio-contamination : particules viables
 Particules viables = particules donnant naissance à colonies (pnc), composées d’un ou plusieurs
microorganismes ou leur servant de vecteur
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Émission de particules par l’organisme humain
 Nature des particules émises :
 Squames cutanées
 Particules issues des sécrétions respiratoires
 Particules piégées par la peau, les cheveux : poussières, pollens, spores, ….
Grains de pollen (  10µm)
sur un cheveu (  100µm)
27
Contamination des plaies par l’air ?
 Tammelin et al. ICHE 2001; chirurgie cardiaque
o 19/65 patients (29%) avec plaie sternale contaminée à Staphylococcus aureus en
fin d’intervention
o Nombre moyen de bactéries : de 2 UFC/cm² chez les femmes à 7 UFC/cm²
chez les hommes
o Comparaison moléculaire : 2 patients avec souches identiques à celles isolées
de l’air du bloc opératoire  probabilité +++ contamination aérienne
o Risque réel mais fréquence faible
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Charge particulaire de l’air et ISO
Lidwell OM. Air, antibiotics and sepsis in replacement joints
Journal of Hospital Infections 1988 11S: 18-40
 La qualité de l’air au bloc opératoire serait un des
facteurs de risques de survenue d’infection du site
opératoire
 % d’ISO en chirurgie orthopédique corrélé à la
charge en particules de l’air du bloc opératoire
pendant l’intervention
 Difficulté d’interprétation entre rôle de
l’antibioprophylaxie et traitement de l’air :
 Intérêt de l’antibioprophylaxie +++
 Supplément de gain de réduction par le traitement de
l’air
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Maîtrise de l’aéro-bio-contamination en secteur protégé
 Principes généraux
 Traitement de l’air recyclé + apport d’air neuf extérieur avec
épuration progressive des particules par passages successifs sur
filtres de plus en plus efficaces
 Admission de l’air sous forme de flux


unidirectionnel (« laminaire »)
ou pluridirectionnel
 Extraction active de l’air ayant circulé dans la pièce : bas ou haut
débit
 Selon la destination de l’équipement  surpression
ou dépression par rapport à l’extérieur
 Surpression


blocs opératoires
Secteurs de greffes médullaires
 Dépression

30
Laboratoires de niveau sécurité 3 (L3 ou P3)
Traitement de l’air par CTA
 Moyens structurels :
 Gradient de pression
 Cascade de filtration
 Taux de renouvellement horaire
 Exemple ISO 7 : > 15 vol / h
 Régime d’écoulement
 Flux unidirectionnel
 Flux pluridirectionnel
31
La maîtrise de l’air au bloc opératoire
 Classes particulaires utilisées dans les établissements de santé
32
La maîtrise de l’air au bloc opératoire

Qualité de l’air au BO = norme AFNOR NF S 90-351

Précise les concentrations maximales de particules de tailles comprises entre 0,5 et 5 µm

Exigence maximale = zone 4 de classe particulaire ISO5 (chirurgie orthopédique)
CTA = Centrale de Traitement d’Air
Zone risque 2
33
Zone risque 3
Zone risque 4
Évolution des systèmes laminaires
 Flux laminaire, haute vitesse, consommation W+++ :
 Tente de Charnley (1962)
 300 vol/h
 Cellule de Weber (1965)
 700 vol/h
 Plafond d’Allender
 Rideaux d’air
 Système Joubert et variants (flux laminaire) :
 basse vitesse (80 vol/h)
 consommation W moyenne
34
Plafond soufflant type Allender
35
Évolution de la réglementation :
Norme NF S 90-351 2013
 Classe d’empoussièrement : nombre de particules par m3
 Cinétique de décontamination : temps (mn) de traitement nécessaire pour éliminer 90%
des particules présentes CP = 5 : élimination de 90% des particules en 5 mn et de
99,9% en 3x5 minutes
 Classe de propreté microbiologique : nombre de particules viables (microorganismes)
par m3
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Intérêt du flux laminaire ISO5 en chirurgie
orthopédique prothétique ?
 Revue avec méta-anlayse de 2012
 En défaveur du flux laminaire
 Hanche OR : 1,7 ; IC95 1,2-2,4
 Genou OR : 1,36 ; IC95 : 1,06-1,74
Genou
Hanche
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 Méta-analyse selon modèle MTC (mixed treatment combinaison)
 12 études ; 123788 PTH
 9 stratégies de prévention différentes : ± antibioprophylaxie systémique ± flux laminaire ± ciment
antibiotique
 Stratégie de référence : antibioprophylaxie + flux laminaire + ciment antibiotique : pas d’évidence
pour une diminution du risque d’ISO vs antibioprophylaxie + pas de flux laminaire + ciment
antibiotique : OR 1,96 [IC 0,52-5,37]
 Suggère que
 Base de la prévention = antibioprophylaxie + traitement d’air conventionnel
 + d’infections avec flux laminaire. Rôle de l’hypothermie ?
38
Intérêt du flux laminaire ISO5 en chirurgie orthopédique prothétique
?
 Norme NF S 90-351 (2013):
 Niveau ISO 5 pour chirurgie prothétique articulaire ; ISO 7 pour autres interventions
 Recommandations françaises SF2H 2010 :
 Recommandations OMS 2016 :
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Contrôles de l’air au BO
 Hors qualification
 Hors présence humaine
 Mesure de la charge particulaire (aéro-contamination,
empoussièrement) : résultat immédiat
 Mesure de l’aéro-bio-contamination (résultat différé) :
 Recherche de microorganismes (bactéries et/ou fungi) par
 Culture (prélèvement par impaction)
 PCR
 Pas de corrélation stricte entre aéro-contamination et aéro-
bio-contamination
40
Fréquence des contrôle de charge particulaire et d’aérobiocontamination
41
Niveaux cibles
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Scaphandre opératoire
 Travaux de Charnley :
 Proposé si opérateurs interposés entre flux d’air et
plaie opératoire
 Pas de preuves formelles concernant :
 La réduction de l’aérobiocontamination
 La réduction d’incidence des ISO
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 Relationship between the risk of deep infection and intraoperative use of laminar
airflow systems and body exhaust suits
 8,288 total knee replacements performed in 256 hospitals.
 90-day cumulative incidence of deep infection requiring subsequent operation =
0.34% (n = 28 ).
 RR = 1.57 (CI 95%, 0.75-3.31) for laminar airflow systems and 0.75 (CI 95%,
0.34-1.62) for body exhaust suits.
 Risk not statistically associated with use of either method, but infections were rare.
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Une stratégie centrée sur le patient
 Nécessité de combiner différentes approches :
o Prévention clinique, centrée sur le patient :
o Décontamination staphylocoque doré, antibioprophylaxie, antisepsie…
o Prévention environnementale :
o Instruments et dispositifs médicaux, traitement de l’air, bionettoyage, …
o Prévention comportementale :
o Hygiène des mains, tenues, entrées-sorties …
o Prévention épidémiologique :
o Recueil des facteurs de risques, surveillance des ISO …
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Entrées-sorties
 Congrès SF2H, 2016
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 Objectif : recherche d’une corrélation entre bruit et survenue d’une ISO
 Échantillon : 64 chirurgies de hernies ; 5 ISO superficielles
 Méthode : mesure du bruit en salle toutes les 10 mn ; comparaison ISO / non-ISO
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Conclusion
 Prévention environnementale : avancées majeures au XXème siècle ; au
second plan dans les programmes récents
 Place importante du bionettoyage et de la stérilisation/désinfection des
dispositifs médicaux
 En chir. ortho. débat autour du traitement de l’air en chir. prothétique ;
position tranchée de l’OMS fin 2016. A suivre …
 Intérêt des approches comportementales
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