1 Dr BOGGIO La génétique 14 2.2 S1 Cycles de la vie et grandes fonctions IFSI Dijon - Promotion COLLIERE 2014-2015 Les chromosomes sont constitués d’ADN. Les gènes sont des segments d’ADN. Ils renferment des recettes, des plans pour la synthèse des protéines. Une grande partie des protéines sont des enzymes. Ces enzymes dirigent les synthèses de presque toutes les molécules de l’organisme. Par l’intermédiaire des enzymes, les gènes s’expriment dans la couleur des yeux, le sexe du sujet, son groupe sanguin, la proportion des différents types de fibres musculaires… La génétique est la science de l’hérédité. L’ensemble des gènes constitue le génome (humain). Il a été récemment déchiffré : la séquence des trois milliards des bases de l’ADN (code génétique) humain est connue. La fonction de plusieurs milliers de gènes est connue. Espoir thérapeutique. Notions de base. L’être humain possède deux jeux de chromosomes, un provenant de chaque parent (figure 16.4) La plupart des cellules de l’organisme renferment ce double jeu de chromosomes. On les dit diploïdes et le nombre des chromosomes est représenté par 2n. Chez l’homme : 2 n = 46. Les cellules diploïdes contiennent 23 paires de chromosomes dits chromosomes homologues. Chaque paire est constituée d’un chromosome paternel et d’un chromosome maternel. Les deux chromosomes d’une même paire sont semblables. Ils portent des gènes qui codent pour les mêmes traits mais pas nécessairement pour la même expression de ces traits. Exemple : des gènes homologues (situés au même endroit sur les chromosomes homologues) déterminent l’expression des taches de rousseur. Le gène porté par le chromosome paternel peut coder pour la présence 10/08/2012 1 2 d’un grand nombre de taches de rousseur, alors que le gène porté par le chromosome maternel peut coder pour leur absence. Les gamètes, cellules sexuelles, renferment seulement 23 chromosomes soit un nombre haploïde dit n une seul chromosome de chaque paire de chromosomes homologues Quand le gamète mâle et le gamète femelle s’unissent (fécondation), l’œuf (= zygote) est diploïde. La formation des gamètes chez l’homme et la femme, fait intervenir une étape essentielle, une division cellulaire particulière, la méiose. Dans la division cellulaire classique (mitose), les chromosomes répliqués sont distribués également aux deux cellules filles (celles qui sont issues de la division). Chacune des cellules filles reçoit un jeu de chromosomes strictement identique à celui de la cellule qui s'est divisée (la cellule mère). Chaque cellule issue fille reçoit donc les deux chromosomes homologues d’une même paire. La méiose comporte deux divisions cellulaires successives qui produisent quatre cellules filles. Chacune de ces cellules filles possède la moitié des chromosomes de la cellule ordinaire, un de chaque paire de chromosomes homologues. La méiose réduit donc le nombre de chromosomes de moitié : de 2n à n. Figure 17.1 La première division de la méiose est appelée méiose I La seconde division de la méiose est appelée méiose II. Méiose I Rappel de la mitose : Avant la mitose, tous les chromosomes sont répliqués (pendant la fin de l’interphase). Les copies identiques restent unies sous forme de chromatides-soeurs unies par un centromère. Les centromères se divisent et les chromatides se séparent pour migrer chacune vers un pôle de la cellule. Chaque cellule-fille 10/08/2012 2 3 hérite donc d’une copie de chaque chromosome. Dans la méiose I, les chromosomes se répliquent. Mais les chromosomes répliqués de la même paire se cherchent, se trouvent et s’apparient sur toute leur longueur. Ils s’accolent en plusieurs points comme une boutonnière. Ce phénomène est la synapsis. Il conduit à la formation de tétrades (deux chromosomes répliqués de la même paire et appariés). La synapsis permet l’enjambement ou crossing-over 17.4 L’enjambement est le croisement d’une chromatide maternelle et d’une chromatide paternelle. L’enjambement permet l’échange de matériel génétique, entre les chromosomes paternel et maternel. Il autorise donc un certain brassage du matériel génétique. Retour 17.1 Pendant la méiose I, les tétrades s’alignent au hasard à l'équateur du fuseau mitotique, On peut donc trouver des chromosomes maternels et paternels de chaque côté de la plaque (le schéma 17.1 ne le montre malheureusement pas !) Puis les chromosomes homologues d’une même paire migrent chacun vers un pôle, mais les chromatides d’un même chromosome ne se séparent pas. La méiose I est dite division réductionnelle de la méiose, puisque les cellules filles sont haploïdes. (Les chromatides-sœurs unies par le centromère sont un seul chromosome déjà répliqué). Méiose II. C’est ‘équivalent d’une mitose sauf que les chromosomes ne se répliquent pas à la fin de l’interphase puisqu’ils le sont déjà ! répliqués. Les chromatides se répartissent entre les deux cellules- filles. La méiose II est dite division équationnelle de la méiose. Résultat : quatre cellules haploïdes, chacune possédant une seule copie de chaque molécule d’ADN La méiose a donc deux effets. Elle divise le nombre des chromosomes par 2. Elle crée des variations génétiques. Le vocabulaire de la génétique 10/08/2012 3 4 46 chromosomes, 23 paires ; Une des paires est constituée des chromosomes dits sexuels (X et Y) parce qu’ils déterminent le sexe génétique de l’individu XX = féminin XY = masculin Les 44 chromosomes des 22 autres paires sont les autosomes. Ils guident l’expression des autres traits. Le caryotype est l’ensemble des chromosomes d’une cellule diploïde (17.2) C’est un examen effectué par les laboratoires de cytogénétique. Les chromosomes homologues sont classés selon leur taille, la position de leur centromère, la longueur des « bras » de part et d’autre du centromère, les motifs des bandes claires et sombres qu’ils portent. Un caryotype peut mettre en évidence une anomalie du nombre ou de la structure des chromosomes. Le génome est l’ensemble du matériel génétique. Il est constitué de l’ensemble des molécules d’ADN, organisé en deux ensembles d’instructions génétiques, un qui provient de la mère, un qui provient du père. Le génome est constitué de 25 000 gènes, inégalement répartis sur les chromosomes. Chaque gène est une séquence d’ADN qui donne les instructions nécessaires à la synthèse d’une protéine. Un gène a un emplacement précis appelé locus sur un chromosome. Exemple le gène qui détermine le groupe sanguin ABO a le locus 9q34 : il occupe la quatrième bande de la région 3 du bras long (q) du chromosome 9. Allèles Les chromosomes étant appariés, les gènes le sont aussi. C’est en réalité une paire de gènes (et non un gène comme dit précédemment) qui donne les instructions pour la synthèse d’une protéine conduisant à un trait particulier. Les gènes appariés qui occupent le même locus de chromosomes homologues sont appelés allèles. Ils peuvent être exactement identiques ou présenter des variantes discrètes dans la séquence des bases. Dans le premier cas les deux allèles codent pour la même expression d’un trait, 10/08/2012 4 5 dans le second cas pour des expressions différentes. Lorsque les deux allèles qui déterminent un trait sont identiques, la personne est dite homozygote pour ce trait. Lorsqu’ils sont différents, elle est dite hétérozygote. Parfois un allèle masque ou supprime l’expression de l’autre. On dit qu’il est dominant. L’autre est récessif. L’allèle dominant est représenté par une majuscule, le récessif par une minuscule. Les allèles dominants s’expriment, qu’il y en ait ou deux. La combinaison AA ou Aa exprime le trait comme il est prévu par l’allèle A. Les allèles récessifs ne s’expriment que s’ils sont en double exemplaire : aa. Les traits dominants ne s’expriment pas nécessairement plus souvent que les traits récessifs car tout dépend de l’abondance relative de chaque allèle dans la population. La combinaison aa pour un gène donné peut être beaucoup plus fréquente que les combinaisons AA ou Aa. Le patrimoine génétique d’une personne est son génotype. La façon dont il se manifeste est son phénotype. Exemple : la couleur des yeux fait partie du phénotype. Elle est déterminée par le génotype. Les sources sexuelles des variations génétiques A l’exception des jumeaux vrais, le génotype de chaque humain est différent de celui des autres. Les humains diffèrent les uns des autres par 3000 gènes. Cette variabilité résulte de deux phénomènes : les deux premiers ont lieu lors de la formation des gamètes : (1) la ségrégation indépendante des chromosomes homologues, (2) l’enjambement des chromosomes homologues, (1) la ségrégation indépendante des chromosomes 17.3 Toutes les paires de chromosomes homologues entrent en synapsis (s’accolent) pendant la méiose I. Le synapsis se produit au cours de la formation des spermatozoïdes, les gamètes mâles (= spermatogenèse) 10/08/2012 5 6 et au cours de la formation des gamètes femelles, les ovules (= ovogenèse). L’orientation des tétrades dans l'équateur du fuseau mitotique de la méiose I se fait au hasard. Les chromosomes provenant du père et de la mère sont distribués au hasard dans les cellules filles. Donc les deux allèles qui déterminaient chez le père (et chez la mère) un trait donné sont séparés (= ségrégation). Pour 2n = 6 le nombre des combinaisons de gamètes possibles est déjà de 8. Avec 2n = 46, il est de 223, soit 8,5 millions. Il y a une chance sur 8,5 millions que les chromosomes de deux spermatozoïdes du même père soit identique. Idem pour les ovules. La probabilité que deux enfants non jumeaux, issus des mêmes parents aient le même génotype est donc quasi nul. (2) l’enjambement des chromosomes homologues et les recombinaisons génétiques. Les gènes d’un même chromosome sont dits « liés » puisqu’ils sont physiquement attachés les uns aux autres et transmis en bloc à la cellule fille au cours de la mitose. Mais au cours de la méiose, les chromosomes peuvent échanger des segments de gènes grâce à l’enjambement. Deux chromatides non sœurs s’entrecroisent, se fracturent puis se ressoudent en ayant échangé quelques gènes. Certains gènes du chromosome paternel se retrouvent sur le chromosome maternel. Et inversement. L’enjambement aboutit à la formation de « chromosomes recombinants ». Dans l’exemple (fantaisiste) de la figure 17.4 : les gènes qui codent pour la couleur des cheveux et des yeux sont liés. Le chromosome paternel renferme les allèles qui codent pour les cheveux blonds et les yeux bleus, alors que les allèles maternels codent pour les cheveux bruns et les yeux marrons. Ces allèles sont dits liés. Le croisement se trouve entre les deux allèles liés. En raison de l’enjambement, deux des quatre chromatides de la tétrade 10/08/2012 6 7 ont des allèles mélangés. Au cours de la synapsis, les chromatides accolées peuvent subir plusieurs enjambements. Les enjambements entraînent alors la recombinaison d’un grand nombre de gènes, et pas seulement de deux comme dans l’exemple. Plus le chromosome est long, plus il peut subir d’enjambements. Plus les gènes sont éloignés, plus ils peuvent subir des recombinaisons. A l’inverse, deux gènes très rapprochés peuvent ne jamais être recombinés et se transmettre toujours en bloc. Si les 23 tétrades subissent des enjambements, le nombre des recombinaisons est quasi infini. En définitive un individu hérite la moitié de ses gènes de chaque parent mais il n’hérite pas exactement du quart des gènes de ses grands-parents en raison des recombinaisons qui se sont produits lors de la formation des gamètes (ceux des parents) dont il est issu. Les types de transmission héréditaire Le plus souvent un trait phénotypique est déterminé par l’interaction de plusieurs gènes. La transmission héréditaire du trait est alors polygénique. C’est le cas pour la prédisposition à certaines maladies. Seuls quelques traits phénotypiques sont attribuables à une seule paire de gènes. L’hérédité est alors dite monofactorielle. Elle est alors plus facile à décrypter. Hérédité dominante-récessive. Figure 17.5 Exemple. L’allèle L est dominant et détermine le phénotype « lobe des oreilles libres ». L’allèle l est récessif et détermine le phénotype « lobe des oreilles fixé ». Ici les deux parents sont hétérozygotes pour ce trait. Ils ont le génotype Ll et le phénotype « lobe libre ». La moitié des gamètes paternels portent l’allèle L et l’autre moitié l’allèle l. Idem pour la mère. La probabilité que l’enfant ait le génotype ll 10/08/2012 7 8 et donc le phénotype « lobe lié » est de 25%. La probabilité qu’un enfant ait le lobe libre est de 75%. A chaque enfant, la probabilité est la même. Le résultat ne dépend pas de l’enfant précédent ! Il s’agit d’événements statistiques indépendants. Si ces parents ont 100 enfants, environ 75% d’entre eux auront les lobes libres. S’ils n’ont que deux enfants, la probabilité que ces enfants aient tous les deux les lobes liés est de 1/16 (¼ x ¼). Les traits dominants. Les sujets atteints ont un génotype de type Zz ou ZZ Lobe des oreilles libres Capacité de rouler sa langue en U Taches de rousseur Fossettes aux joues Capacité de percevoir le PTC, substance chimique amère contenue dans les choux. Quelques maladies : Achondroplasie (nanisme avec des os très courts), Chorée de Huntington (démence apparaissant vers 40 ans). Comme le génotype homozygote dominant est mortel chez le fœtus, tous les patients sont hétérozygotes et le risque pour un enfant d’un parent atteint d’avoir la maladie (et que ses enfants l’aient) est de 50%. Les traits récessifs Les sujets atteints ont un génotype de type zz : le trait s’exprime. Albinisme : absence de pigmentation de la peau Mucoviscidose ou fibrose kystique du pancréas Les hétérozygotes Zz ne sont pas atteints par la maladie. Mais ils transmettent l’allèle z à la moitié de leurs enfants. Si celui-ci reçoit un autre allèle z de l’autre parent (également hétérozygote), il exprime la maladie. La dominance incomplète ou codominance 10/08/2012 8 9 Elle est fréquent chez les plantes et chez les animaux, beaucoup moins chez l’homme. Le phénotype de l’hétérozygote (Zz) est intermédiaire entre les phénotypes des homozygotes (ZZ et zz). Exemples fleur rouge, fleur blanche, fleur rose. Un exemple chez l’Homme. La drépanocytose, très répandue en Afrique, maladie causée par la substitution d’un acide aminé à la place d’un autre dans l’hémoglobine. Le sujet homozygote zz fait une maladie sévère. Le sujet hétérozygote Zz est en bonne santé mais il a de temps en temps des accès de maladie. Curieusement le sujet hétérozygote résiste mieux au paludisme (maladie parasitaire) que le sujet homozygote ZZ pour l’allèle normal. La transmission par allèles multiples Chaque individu reçoit deux allèles d’un même gène. Mais pour certains gènes il existe plus de deux allèles possibles. C’est le cas pour le système de groupe sanguin ABO. Trois allèles sont possibles IA, IB et i. IA et IB sont codominants, i est récessif. Les génotypes IA i et IA IA donnent un groupe sanguin (phénotype) A Le génotype IB i et IB IB donnent un groupe sanguin (phénotype) B Le génotype IA IB donne un groupe sanguin (phénotype) AB Le génotype ii donne un groupe sanguin (phénotype) O L’hérédité liée au sexe Les traits héréditaires déterminés par des gènes localisés sur les chromosomes sexuels sont dits liés au sexe. Les chromosomes sexuels X et Y ne sont que partiellement homologues. Le chromosome Y est beaucoup plus petit. N.B. Le chromosome Y porte les gènes qui déterminent le sexe masculin. Le chromosome X porte beaucoup plus de gènes que le chromosome Y. Conséquence : un grand nombre de gènes du chromosome X sont absents sur le chromosome Y. 10/08/2012 9 10 Un gène qu’on trouve uniquement sur le chromosome X est dit lié au chromosome X, ou lié à l’X. Exemples d’hérédité liée à l’X : gènes en cause dans le daltonisme ou dans l’hémophilie. Lorsqu’un homme reçoit un allèle récessif lié au chromosome X, l’expression de ce gène n’est jamais masquée par un autre gène, car il ne possède pas d’allèle correspondant sur le chromosome Y. Le gène récessif s’exprime donc toujours même s’il est seul. Par contre, les femmes doivent recevoir 2 allèles récessifs liés au chromosome X pour que la maladie s’exprime. Donc très peu de femmes présentent des maladies liées au chromosome X. Transmission de la maladie Père malade Xh Y (h = gène de l'hémophile). Mère non conductrice XX Aucun enfant malade. Toutes les filles pourront transmettre l’allèle de l’hémophilie. Père XY. Mère conductrice Xh X. Risque de 50% pour les garçons d’être malades. Risque de 50% pour les filles d’être conductrices. L’hérédité polygénique Un grand nombre de phénotypes dépendent de l’action conjointe de plusieurs gènes. L’hérédité polygénique produit des variations phénotypiques continues ou qualitatives. Exemple : la couleur de la peau dépend de l’action de trois gènes ayant chacun deux allèles : A,a ; B,b ; C,c A, B et C codent pour des pigments cutanés foncés. Le génotype AABBCC donne une peau très foncée ; aabbcc, une peau très claire. L’union d’individus hétérozygotes pour ces gènes peut donner des enfants de très grande variété d’intensité de pigmentation. Fig 17.6 Idem pour la taille. Idem pour la couleur de l’iris (contrairement à l’hypothèse ancienne) Idem pour la prédisposition aux maladies. Les facteurs environnementaux et l’expression génique 10/08/2012 10 11 La génétique n’explique pas tout. D’ailleurs les cellules d’un même individu ont les mêmes gènes mais ont des fonctions différentes. Leurs gènes n’agissent pas de la même façon selon le type de cellule. Cette modification des gènes et/ou de leur fonctionnement constitue l’épigénétique. L’épigénétique est le troisième phénomène qui explique la variabilité des enfants de mêmes parents (les deux premiers étaient la ségrégation des chromosomes homologues et la conséquence des enjambements). De même les vrais jumeaux ne sont pas identiques en tous points. La taille d’une enfant dépend en partie de la taille de ses parents mais le potentiel génétique peut ne pas s’exprimer totalement, par exemple si l’enfant souffre de malnutrition ou s’il est porteur d’une anomalie hormonale (due éventuellement à d’autres gènes) qui altère sa croissance. Le domaine de l’épigénétique est en plein développement. Il reste plein de mystères. Certaines des modifications épigénétiques peuvent se transmettre à la génération suivante… Des phénomènes survenant pendant la grossesse peuvent modifier l’expression ultérieure des gènes… 10/08/2012 11