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Le système lymphatique
Dr Jean EL CHEIKH
Unité de Transplantation et Thérapie Cellulaire
Département d'Hématologie
Institut Paoli-Calmettes
Vous connaissez certainement le système sanguin. Plus
rares sont les personnes qui savent à quoi ressemble le
système lymphatique et qui en connaissent le
fonctionnement.
Le système lymphatique est constitué de vaisseaux et
de tissus lymphoïdes (ganglions et autres organes).
Les vaisseaux lymphatiques sont des canaux remplis
d’un liquide incolore (la lymphe) en provenance des
tissus. La lymphe transporte les déchets produits par
l'organisme. On trouve également des globules blancs
dans la lymphe. Par l'intermédiaire de canaux de
diamètre de plus en plus important, ce liquide tissulaire
rejoint finalement la circulation sanguine. Avant que la
lymphe ne parvienne dans le sang, elle traverse au
moins un ganglion lymphatique.
Les ganglions lymphatiques sont les stations d’épuration
du système lymphatique: ils rendent inoffensifs les
agents pathogènes, notamment les bactéries et les virus.
En outre, ils filtrent les déchets présents dans la lymphe.
Les ganglions lymphatiques se trouvent en divers
endroits du corps:
par exemple dans le cou (A), au niveau des aisselles (B),
le long de la trachée (C), à proximité des poumons (D),
près de l'intestin et derrière la cavité abdominale (E),
dans la région du bassin (F) et au niveau de l’aine (G).
Outre les ganglions lymphatiques, du tissu lymphoïde
est également présent dans d’autres organes,
notamment au niveau de l'arrière-gorge (pharynx),
des voies respiratoires, de la rate, de la paroi
intestinale et de la moelle osseuse.
Dans le tissu lymphoïde, on trouve un certain type de
globules blancs, appelés lymphocytes.
Les lymphocytes sont produits dans la moelle osseuse,
les ganglions lymphatiques et la rate (1). Ils circulent
dans la lymphe et dans le sang. Ils jouent un rôle
important dans la lutte contre les microbes et dans la
production de substances de défense.
La maladie de Hodgkin
DEFINITION
La maladie de Hodgkin est une forme de cancer du
système lymphatique.
Elle est anatomo-pathologique : Lymphome malin qui se
distingue des autres lymphomes
appelés non-hodgkiniens (LNH) par la présence de
grandes cellules à noyau polylobés et multinucléolés (les
cellules de Sternberg ou cellules de Reed-Sternberg) ou
des ses variantes cytologiques.
Le terme anglais est Hodgkin's disease ou Hodgkin's
lymphoma
HISTORIQUE
Description clinique en 1832 par Thomas Hodgkin qui l'a
reconnu comme étant une atteinte primitivement ganglionnaire
par opposition aux atteintes ganglionnaires secondaires aux
infections ou aux cancers. Les descriptions anatomopathologiques datent de 40 ans plus tard (Langhans puis
Sternberg et Reed).
La maladie de Hodgkin est actuellement incluse dans la
classification des syndromes lymphoprolifératifs (cf.
tableau I du chapitre "Lymphomes non hodgkiniens").
Ceci explique la tendance actuelle à l'appeler lymphome de
Hodgkin.
EPIDEMIOLOGIE
Incidence
- Aux USA : 41000 nouveaux cas de LNH par an, 7400
nouveaux cas de MH par an
- Environ 3 nouveaux cas de MH par an pour 100 000
habitants.
- Larges variations géographiques (0,5 à 4 pour 100 000)
- Diminution progressive de l'incidence (- 12 % aux USA
entre 1973 et 1991)
- Prédominance masculine (ratio de 1,4 : 1)
- Quelques cas familiaux
Distribution bimodale en fonction de l'âge
- Age médian : 27 ans
- Pic pour adolescents et adultes jeunes (15 à 35 ans)
- Pic pour sujets plus âgés (> 50 ans)
- Cette distribution bimodale tend à s'estomper
progressivement
Facteurs de risque associés
Facteur infectieux
- EBV (Virus d'Epstein-Barr) : Des antécédents de mononucléose
infectieuse augmentent le risque d'apparition de 2 à 13 fois. Le génome
d'EBV est retrouvé dans 20 à 80 % des cellules de Sternberg avec une
fréquence maximale pour les sujets jeunes, les sous-types à cellularité mixte
et les cas familiaux. La relation de cause à effet entre EBV et MH reste
cependant encore difficile à affirmer formellement.
- HHV-6 (Human Herpesvirus-6) : Ce virus a été isolé initialement chez des
patients immunodéprimés ou atteints de syndrome lymphoprolifératif. Il est
par ailleurs responsable de l'exanthème subit. La relation de cause à effet est
incertaine.
- VIH (Virus de l'Immunodéficience Humaine) : Le risque de MH est majoré
de 5 à 8 fois chez les sujets positifs pour le VIH. Au cours du sida, l'incidence
des LNH est supérieure à celle des MH
Facteurs environnementaux
Quelques hypothèses mais aucun argument formel
Prédisposition génétique
Les facteurs génétiques existent certainement mais sont
insuffisants isolément :
- Existence de cas familiaux (environ 1 % des cas )
- Risque nettement augmenté mais néanmoins très
inconstant (< 5 %) pour les jumeaux homozygotes
ASPECTS ANATOMO-PATHOLOGIQUES
La MH se caractérise par la prolifération de cellules d'origine lymphoïde
évoluant vers des
cellules géantes polyploïdes exprimant un phénotype de cellules activées.
Ces cellules tumorales (dont l'aspect typique est la cellule de ReedSternberg), souvent peu nombreuses, déclenchent des réactions tissulaires
et cellulaires.
Les variantes de ces réactions immunitaires et inflammatoires permettent de
définir plusieurs types histologiques (classification de l'OMS, voir tableau I
du chapitre "Lymphomes non hodgkinien") :
- Lymphome de Hodgkin nodulaire à prédominance lymphocytaire : Les
cellules tumorales sont peu nombreuses au sein d'une population cellulaire
réactionnelle abondante. Historiquement appelé paragranulome nodulaire
(de Popema et Lennert), cette entité est en fait un lymphome B. Cette entité
est rare (< 20 % des MH). L'atteinte est en général localisée et de petit
volume.
Lymphome de Hodgkin classique divisé en quatre variantes
:
lymphome de Hodgkin classique à sclérose nodulaire : associe une
structure nodulaire, de larges bandes de fibrose et un aspect particulier des
cellules tumorales dites cellules lacunaires (cytoplasme fragile se rétractant à
la fixation)
lymphome de Hodgkin classique à cellularité mixte : les cellules
tumorales sont plus nombreuses et la quantité de lymphocytes diminue alors
qu'augmentent les polynucléaires neutrophiles et éosinophiles. Il existe une
fibrose intercellulaire produite par des fibroblastes hypertrophiques
lymphome de Hodgkin classique à déplétion lymphocytaire : les
cellules tumorales sont nombreuses, la fibrose est d'intensité variable
lymphome de Hodgkin classique riche en lymphocytes : les cellules
tumorales sont rares sur un fond diffus de cellules lymphocytaires
Immunohistochimie
Les cellules tumorales expriment les marqueurs d'activation dont :
- CD 30 (Ki-1) qui appartient à la superfamille des récepteurs au tumor
necrosis factor (TNF)
- CD 25 (récepteur à l'IL-2)
- CD 71 (récepteur à la transferrine)
- HLA-DR
- CD 15 (Leu-M1) exprimé de façon inconstante sur les cellules de Sternberg
mais aussi retrouvé sur de nombreuses cellules normales dont les
polynucléaires.
Quelquefois les cellules tumorales expriment des marqueurs B (CD 20 positif
dans environ 30 % des cas). L'antigène leucocytaire commun (CD 45) est
absent ce qui est inattendu.
Cytogénétique
Bien que de multiples anomalies du caryotype des cellules tumorales aient
été observées aucune ne semble vraiment spécifique.
ASPECTS CLINIQUES
Histoire naturelle
L'atteinte initialement ganglionnaire unifocale se propage par voie
lymphatique aux territoires adjacents avant de disséminer éventuellement
par voie hématogène à des organes non lymphoïdes.
Par ordre de fréquence, l'atteinte anatomique primitive est d'abord
intrathoracique puis cervicale puis inguino-crurale puis lombaire ou axillaire.
A partir des territoires intrathoraciques ou cervicaux, l'extension se fait vers les
creux sus -claviculaires et les aisselles ; à partir des territoires sousdiaphragmatiques, elle se fait vers les creux sus-claviculaires principalement
gauche en respectant habituellement le médiastin. A partir d'un creux axillaire
l'extension se fait vers le creux sus-claviculaire homolatéral.
Les lésions viscérales peuvent résulter d'une dissémination hématogène
mais aussi d'une extension par contiguïté à partir d'une zone
ganglionnaire.
Selon le mécanisme d'extension viscérale, le pronostic en est
fondamentalement différent (ceci explique les classification en stade IE ou IIE si
l'atteinte résulte d'un envahissement de contiguïté).
Mode de découverte
L'un des aspects les plus fréquents est la découverte d'une
adénopathie chez un adulte jeune lors d'un examen médical systématique
ou par le patient lui-même. La localisation ganglionnaire la plus fréquente est
alors cervicale ou sus-claviculaire, moins souvent axillaire et rarement
inguinale. La découverte d'une masse médiastinale antérieure sur un thorax
de routine n'est pas inhabituelle.
Le deuxième mode de révélation fréquent est l'apparition de symptômes dont
aucun n'est spécifique mais dont la persistance ou leur association doit faire
évoquer cette hypothèse diagnostique :
- asthénie
- fièvre surtout vespérale, quelquefois entrecoupée de quelques jours
d'apyrexie
- hypersudation nocturne
- perte de poids (> 10 % du poids dans les 6 derniers mois)
- prurit qui peut précéder les autres signes de plusieurs semaines
-signes en rapport avec une masse médiastinale
(douleurs, dyspnée, syndrome cave supérieur)
- douleurs dans les sites occupés par les adénopathies en
particulier à la phase de début de la maladie ; le déclenchement
de ces douleurs par l'ingestion d'alcool est une particularité rare
mais utile à connaître La présence de l'un au moins de ces
symptômes que sont la fièvre, l'hypersudation et
l'amaigrissement définit la notion de signes cliniques
d'évolutivité (signes généraux).
INFILTRATION LEUCEMIQUE
LYMPHOADENOPATHIE
Leucemie- sous type
a cellule T:
radiographie du
thorax
Examen clinique
L'examen clinique mettra en évidence les localisations de la maladie.
Les ganglions lymphatiques restent le site privilégié de l'atteinte. Les
adénopathies sont plutôt fermes et peuvent être volumineuses, devenant
confluantes et formant de grosses masses tumorales.
Les principales aires concernées sont le cou, les creux axillaires, le
médiastin antérieur et la région lombo-aortique. La rate est souvent
envahie (environ 40 % des cas).
L'atteinte médiastinale peut mener à un syndrome cave supérieur.
L'extension peut se faire vers la plèvre, le péricarde, le poumon et la paroi
thoracique.
Rate, poumon, moelle osseuse, foie et os sont les sites extraganglionnaires les plus fréquemment envahis.
BILAN PARACLINIQUE
Biologie
- Hémogramme : souvent normal, mais sont possibles hyperleucocytose, anémie,
hyperplaquettose, éosinophilie, lymphopénie. Les cytopénies sont rares et sont le
plus souvent consécutives à un envahissement médullaire sévère ou plus
rarement à des atteintes auto-immunes.
- Bilan biologique standard incluant un bilan hépatique et rénal ainsi que le
dosage de l'albumine (dont la baisse semble être un facteur pronostic
défavorable) tests hépatiques et
- Recherche d'un éventuel syndrome inflammatoire (VS augmentée,
hyperleucocytose, hyperplaquettose, CRP, hyperfibrinogénémie, hyper,
alpha2globulinémie, baisse du fer sérique)
- Dosage des LDH dont l'augmentation, plus rare que dans les LNH, est le témoin
d'une grande évolutivité.
- Une augmentation des phosphatases alcalines oriente si elle est importante vers
une atteinte hépatique
- Envahissement de la moelle osseuse (rare en phase initiale de la maladie) à
rechercher par biopsie systématique et non pas par simple médullogramme
- Sérologie HIV
Imagerie
- L'exploration du thorax et de l'abdomen par radiographie thoracique
standard et scanner thoraco-abdominal est indispensable quelle que soit
la présentation clinique initiale.
- L'échographie abdominale peut être utile notamment pour un suivi
rapproché ou en cas de lésions nodulaires hépatiques. Sa sensibilité est
cependant inférieure à celle du scanner pour les adénopathies abdominales et
l'échographie ne dispense donc pas du scanner.
- L'échographie cervicale est une méthode simple et fiable pour la mesure et
le précis des adénopathies à l'étage cervical. Le scanner cervical est
également un bon examen pour bien apprécier l'atteinte ganglionnaire
cervicale. Un examen ORL spécialisé s'impose lorsque existent des
localisations cervicales hautes ou spinales.
- La lymphographie bi-pédieuse n'est plus utilisée : examen long, invasif et
guère plus informatif que le scanner.
- L'intérêt de l'IRM dans la détection de localisations médullaires est
controversé :sensibilité de 100 % comparativement à la biopsie mais spécificité
insuffisante responsable de faux positifs.
- La scintigraphie au gallium ne présente guère d'intérêt dans le cadre du bilan
initial mais peut être utile dans le bilan de réévaluation pour distinguer masse
médiastinale résiduelle fibreuse non tumorale (ne fixant pas le traceur) et
persistance de tissu tumoral actif fixant le gallium.
- La tomographie d'émission de positrons (PET scan) après administration
de fluorodéoxyglucose marqué au 18F, traceur indiquant une augmentation non
spécifique du métabolisme cellulaire, semble être un examen de grande valeur.
Sa place se situe idéalement dans le bilan initial et dans le bilan de
réévaluation.
Autres investigations
Elles découlent du tableau clinique :
- Scintigraphie osseuse si point d'appel clinique
- Biopsie hépatique si point d'appel clinique ou biologique
- Endoscopies digestives et ponction lombaire ne sont pas utiles
(rareté de telles localisations)
CLASSIFICATION
L'extension est classée en 4 stades selon la classification d'Ann Arbor :
- Stade I : atteinte d'une seule région ganglionnaire ou d'une seule structure
lymphocytaire (rate, thymus, anneau de Waldeyer)
- Stade II : atteinte de 2 ou plusieurs régions ganglionnaires situés du même
côté du diaphragme. Le médiastin supérieur, moyen et inférieur est considéré
comme une seule région mais les hiles pulmonaires sont considérés
indépendamment du médiastin.
- Stade III : atteinte de ganglion ou de structures lymphocytaires de part et
d'autre du diaphragme. Ce stade est subdivisé en stade III1 (atteinte sous
diaphragmatique limitée à la rate, aux ganglions du hile splénique, coeliaques
ou du tronc porte) et en stade III2 (atteinte des régions lombo-aortiques,
iliaques ou mésentériques s'associant ou non à l'envahissement des structures
du stade III1).
- Stade IV : Atteinte d'un viscère (non contiguë à une atteinte ganglionnaire,
voir la définition du "E") ou de plusieurs viscères
Eléments complémentaires de la classification
A : absence de signes cliniques d'évolutivité (fièvre, hypersudation ou
amaigrissement)
B : présence de signes cliniques d'évolutivité
E : envahissement d'un seul viscère par contiguïté à une atteinte
ganglionnaire
X : volumineuse masse tumorale définie par :
- une masse ganglionnaire supérieure à 10 cm
- ou une masse médiastinale de diamètre égal ou supérieur au tiers du
diamètre transverse thoracique au niveau du disque intervertébral D5-D6 sur
un cliché thoracique debout.
Remarque : la classification a été adaptée aux lymphomes non hodgkiniens
avec quelques modifications (voir tableau III du chapitre "Lymphomes non
hodgkiniens")
Selon une base de données internationale portant sur 14 000
patients, la répartition est la suivante :
- Stade I : 21 %
- Stade II : 43 %,
- Stade III : 23 %
- Stade IV : 13 %.
Les symptômes B sont plus fréquents dans les stades avancés : 8 %
dans les stades I, 23 % dans les stades II, 37 % dans les stades III, 68
% dans les stades IV (sur 2421 malades de Stanford).
PRONOSTIC
Survie à 10 ans tous stades confondus (série de Stanford) :
- 69 % pour les patients traités entre 1960 et 1968 (survie sans rechute de
51 %)
- 84 % pour les patients traités entre 1969 et 1980 (survie sans rechute de
67 %)
- 92 % pour les patients traités entre 1981 et 1993 (survie sans
rechute de 79 %)
Les principaux facteurs de mauvais pronostiques sont :
- Stade avancé de la maladie
- Présence de signes généraux
- Gros volume tumoral
- Nombre élevé de viscères atteints dans les stades IV
- Atteinte de la moelle osseuse
- Age (supérieur à 40, 45 ou 50 ans selon les études)
- Sexe masculin
- Atteinte inguinale
- LDH élevées
- Anémie
Avec les traitements actuels le type histologique semble peu influencer
la survie.
LES MOYENS THERAPEUTIQUES
La radiothérapie
Historiquement la radiothérapie a été utilisée dès 1902 mais les rechutes
étaient nombreuses dans les territoires irradiés et adjacents. Les progrès sont
venus de la mise en oeuvre d'irradiations segmentaires traitants en même
temps toutes les aires soit au-dessus soit au dessous du diaphragme.
En sus-diaphragmatique, l'irradiation en mantelet inclut dans sa forme
complète les deux régions cervico-sus-claviculaires, les deux régions axillaires,
le médiastin et les hiles pulmonaires. Le mantelet peut être modulé : extension
à l'anneau de Waldeyer (atteinte rare dans la MH), suppression du médiastin,
inclusion d'un volume pulmonaire adjacent en cas d'envahissement du poumon
par contiguïté, protection partielle du médiastin inférieur (cœur et péricarde), ...
En sous-diaphragmatique, l'irradiation dite en Y renversé vise la région
lombaire, les chaînes iliaques et inguinales. Il est habituel d'y associer une
barre splénique concernant la rate et le hile splénique. L'irradiation peut être
limitée à la barre verticale du Y et à la loge splénique, épargnant ainsi les
ovaires et la moelle hématopoïétique du bassin.
La polychimiothérapie
Le protocole MOPP associant mechloréthamine (Caryolysine), Oncovin,
procarbazine (Natulan) et prednisone date de 1964. Administré de façon
cyclique sur 6 mois, il a permis des taux de rémissions complète de 80 %. La
toxicité importante (hématotoxicité, intolérance digestive, stérilité et risque
leucémogène) a fait rechercher des alternatives : COPP (remplacement de la
Caryolysine par du cyclophosphamide (Endoxan), ABVD (Adriamycine,
bléomycine, Velbé, Déticène), alternance MOPP et ABVD ou hybride
MOPP/ABV.
Les résultats obtenus avec l'ABVD sont égaux ou supérieurs à ceux du MOPP
avec une moindre toxicité à long terme. De fait les standards actuels sont
l'ABVD, l'alternance MOPPABVD ou l'hybride MOPP/ABV. Le MOPP exclusif
est déconseillé.
Des protocoles plus intenses, allant jusqu'à des conditionnements lourds avec
autogreffe de moelle osseuse, ont été proposés pour les formes de mauvais
pronostic et les rechutes.
La splénectomie
Longtemps proposée de façon quasi-systématique (excepté
pour les stades IV d'emblée)
dans un but essentiellement d'évaluation de la maladie à
l'étage abdominal, elle n'a plus de raison d'être.
Le scanner permet d'assurer une évaluation fiable des
localisations sous diaphragmatiques.
LES STRATEGIES THERAPEUTIQUES
Stade I et II
Formes favorables
L'irradiation en mantelet seul est insuffisante (en l'absence de laparotomie
exploratrice affirmant formellement la négativité à l'étage abdominale). Par
contre, les essais ont montré une équivalence d'efficacité entre irradiation
lymphoïde subtotale (sus et sousdiaphragmatique) et l'association radiochimiothérapie. L'analyse des complications à long terme fera préférer
l'association d'un nombre limité de cycles de chimiothérapie (3 cycles) et d'une
irradiation limitée en volume (territoires initiaux envahis) et en dose.
Formes défavorables (atteinte sous diaphragmatique, signes généraux,
grosse masse tumorale)
L'association chimiothérapie (3 à 6 cycles) plus radiothérapie segmentaire (sus
ou sousdiaphragmatique selon la localisation) est recommandée.
Stade III A
L'association chimiothérapie (3 à 6 cycles) plus radiothérapie sus et sousdiaphragmatique doit être préférée.
Stade III B et IV
La chimiothérapie (6 à 8 cures) est l'élément dominant mais la
radiothérapie garde une place pour la prévention des rechutes
ganglionnaires en particulier si la rémission a été longue à obtenir sous
chimiothérapie (plus de 3 cycles) ou s'il s'agissait de grosses masses
tumorales.
Chez l'enfant
La tendance est de limiter la radiothérapie (en indication, en champ et en
dose) compte tenu de ses répercussions sur la croissance notamment.
Evaluation de la réponse au traitement
L'obtention d'une rémission complète est l'objectif thérapeutique.
La réponse au traitement sera évaluée sur les données cliniques
(disparition des signes généraux et des adénopathies) et d'imagerie.
En cas d'atteinte initiale très volumineuse médiastinale ou abdominale,
la persistance d'une anomalie tomodensitométrique pose le problème
de la nature évolutive ou fibreuse de la lésion résiduelle.
La scintigraphie au gallium ou mieux le PET scan peuvent alors aider à
faire la distinction. En cas de doute persistant, la ponction sous
scanner ou un abord chirurgical direct s'impose pour affirmer la
rémission complète ou non.
Après arrêt thérapeutique la surveillance ultérieure se fera tous les 2 à
3 mois pendant 2 anspuis tous les 4 à 6 mois pendant 5 ans, puis tous
les ans compte tenu de complications tardives possibles.
Complications du traitement
Aux effets classiques immédiat de la chimiothérapie et de la radiothérapie
s'ajoutent des complications tardives
- Infections : il persiste une lymphopénie durant plusieurs années (en
particulier après irradiation des aires ganglionnaires) associée à une baisse
des fonctions des lymphocytes restant. Une éventuelle splénectomie (ou
l'irradiation splénique) est également un grand facteur de risque infectieux
(pneumocoque en particulier imposant une vaccination systématique avant
l'intervention).
- Insuffisance thyroïdienne : d'installation progressive, elle est extrêmement
fréquente après irradiation cervicale (incidence cumulée de 50 % à 20 ans dans
la série de Stanford). Sa recherche doit être systématique par un dosage de
la TSH, une à deux fois par an.
Complications cardio-vasculaires tardives :
péricardite post-radique
insuffisance coronarienne pouvant aller jusqu'à un infarctus
du myocarde (incidence cumulée d'IDM de 5 % à 15 ans) après
radiothérapie médiastinale (action favorisante de
l'athérosclérose par la radiothérapie)
myocardiopathie toxique à l'adriamycine rare dans la MH car
les doses cumulées restent habituellement modérées.
Cancers secondaires :
le taux d'incidence cumulée de leucémies et myélodysplasies
secondaires peut atteindre 10 % à 10 ans dans certaines séries.
Il est plus élevé pour les patients traités par chimiothérapie seule
ou par association chimiothérapie + radiothérapie que pour les
patients traités par radiothérapie seule.
Le risque est dépendant des doses de chimiothérapie
administrées et des agents utilisés.
Des lymphomes non hodgkiniens et d'autres cancers secondaires
(pour lesquels la radiothérapie est certainement en cause : sein,
thyroïde, os, mélanome, poumon, ...) ont été observés avec une
fréquence accrue.
Troubles de la croissance : consécutifs à une radiothérapie dans le
jeune âge, ils peuvent être responsables de séquelles importantes
(cyphose, thorax étroit, ...)
- Stérilité : les conséquences sur la fonction reproductrice dépendent
de l'âge, du sexe, de l'état pubertaire, des cytostatiques et des doses
utilisés. Plus de quatre cycles de MOPP administrés avant la puberté
entraînent de façon constante une stérilité chez le garçon. Le risque
lié à la chimio est moindre chez la femme. La radiothérapie pelvienne
augmente le risque en particulier chez la femme. Une congélation de
sperme doit être proposé aux adolescents et adultes jeunes. Le rôle
protecteur des analogues de la LHRH chez la femme est encore
controversé.
- fibrose pulmonaire : secondaire à la radiothérapie elle reste limité au
champ d'irradiation. Elle apparaît 1 à 6 mois après la radiothérapie et
peut être symptomatique (fièvre, toux, dyspnée).
LYMPHOMES NON-HODGKINIENS
DEFINITION
Les lymphomes non hodgkiniens (LNH) représentent un groupe
hétérogène de proliférations malignes du système lymphoïde dont le
point de départ est extramédullaire.
Cette hétérogénéité se traduit par des présentations cliniques,
anatomopathologiques, immunologiques et cytogénétiques variées et, de ce
fait, par un pronostic très différent d'une forme à l'autre.
Le terme anglais est "non-Hodgkin's lymphoma".
Les lymphomes font partie des syndromes lymphoprolifératifs au même titre
que la leucémie lymphocytaire chronique, la leucémie lymphoblastique aiguë,
le myélome multiple et la maladie de Hodgkin (pour complément d'information
voir le tableau I).
EPIDEMIOLOGIE
Incidence
- augmente de façon régulière avec l'âge
- est plus fréquente chez l'homme que chez la femme (sexe ratio d'environ
2:1)
- chez l'enfant les LNH représentent 10 % de l'ensemble des cancers et se
situent ainsi en 3ème place derrière les leucémies aiguës et les tumeurs
cérébrales.
- les LNH les plus agressifs se rencontrent davantage chez l'enfant et l'adulte
jeune.
- en France, le nombre de nouveaux cas de LNH est estimé entre 3000 et
8000 par an.
- l'augmentation de l'incidence constatée depuis quelques années n'est
expliquée que partiellement par l'association de certains lymphomes à des
états d'immunosuppression sévères (SIDA et transplantation d'organe).
Facteurs de risque associés
Facteurs infectieux
-Virus d'Epstein-Barr (EBV) : Le virus est retrouvé dans 95 % des lymphomes
de Burkitt endémiques africains et dans 15 % des formes non endémiques. Il
est également associé aux LNH des immunodéprimés (présence dans 50 à 70
% des lymphomes après transplantation d'organe ou au cours du SIDA). Les
LNH liés à l'EBV sont le plus souvent des lymphomes B. Il peut être détecté
dans le tissu tumoral par immunomarquage par l'anticorps anti LMP-1 (antigène
de latence membranaire de l'EBV) ou l'anticorps anti-EBNA-2 (antigène
nucléaire de l'EBV).
-- HTLV-1 (Human T lymphoma/leukemia virus) : Le HTLV-1 est associé à la
leucémie/lymphome de l'adulte à cellules T survenant avec prédilection dans le
sudouest du Japon, aux Caraïbes, en Afrique noire et en Amérique Centrale.
Un à 5 % des sujets séropositifs pour le HLTV-1 développent une
leucémie/lymphome de l'adulte à cellules T
- VIH (virus de l'immunodéficience humaine) : L'incidence des LNH est
augmentée chez les sujets VIH +. Le déficit de l'immunité à médiation cellulaire
réduit les capacités d'immunosurveillance des cellules infectées par l'EBV ce
qui favorise l'apparition de lymphoproliférations.
- Hépatite C : Les hépatites chroniques à virus C peuvent se compliquer de
cryoglobulinémie et de lymphomes B de faible malignité. Une association avec
des lymphomes primitifs du foie a également été suggérée.
- HHV-6 (Human Herpes Virus 6) : Le HHV-6 est un virus lymphotrope. Il a été
isolé chez des patients porteurs de lymphoproliférations variées mais la relation
de cause à effet reste incertaine.
- HHV-8 (Human Herpes Virus 8) : Certains lymphomes de présentation clinique
très particulière (atteintes des séreuses) ont été associés au HHV-8, le plus
souvent au cours du SIDA. Il s'agit probablement d'une co-infection avec l'EBV et
le mécanisme reste inconnu. Le HHV-8, encore appelé KSHV (Kaposi sarcomaassociated herpes virus) est également associé au sarcome de Kaposi.
- Helicobacter pylori : Le lien entre Helicobacter pylori et lymphome gastrique d
MALT (mucosa-associated lymphoid tissue) est maintenant établi au même titre
qu'avec la maladie ulcéreuse. La bactérie est détectée dans 90 % des cas de
lymphome gastrique du MALT sur coupes tissulaires. En l'absence
d'envahissement ganglionnaire, l'antibiothérapie plus oméprazole (inhibiteur de
pompe à proton) peut faire régresser le lymphome.
Facteurs immunologiques
Les déficits immunitaires congénitaux ou acquis s'accompagnent d'une
incidence accrue de lymphomes :
- Déficits congénitaux : ataxie-télangiectasie, syndrome de Wiskott-Aldrich.
- Déficits acquis
SIDA : incidence des lymphomes estimée à 5 à 10 % des cas de SIDA. Cette
incidence augmente avec la prolongation de la survie. Les lymphomes du SIDA
sont caractérisés par leur phénotype B, leur agressivité clinique (les types
histologiques les plus fréquents sont les lymphomes de Burkitt et les
lymphomes diffus à grandes cellules), leurs localisations extra-ganglionnaires
(grande fréquence des lymphomes primitifs du cerveau, atteintes digestives et
médullaires). L'apparition d'un lymphome chez un sujet séropositif pour le virus
de l'immunodéficience humaine fait passer le patient au stade de SIDA.
Transplantations d'organe : incidence maximale dans les transplantations
coeurpoumon et lorsque sont utilisés des protocoles d'immunosuppression
forte comme ceux incluant les anticorps monoclonaux anti-lymphocytaires.
- Maladies dysimmunitaires
Certaines s'accompagnent d'une incidence plus élevée de LNH :
Syndrome de Gougerot-Sjögren : incidence 40 fois > à la normale (lymphome
à cellules B).
Thyroïdite de Hashimoto : principal terrain de survenue des lymphomes
thyroïdiens.
Polyarthrite rhumatoïde, lupus érythémateux disséminé, sclérodermie,
sarcoïdose et maladie coeliaque sont également associés à un risque accru de
LNH.
Toxiques de l'environnement
Des toxiques de l'environnement ont été accusés de favoriser le
développement de LNH : benzène, solvants organiques, dioxine, herbicides
contenant des acides phénoxyacétiques.
Le relation de cause à effet est cependant difficile à affirmer de façon formelle.
ANATOMIE PATHOLOGIQUE
Histologie
La classification actuelle des hémopathies lymphoïdes appelée WHO (World
Health Organisation = OMS Organisation Mondiale de la Santé) a été proposée
en 1994 et complétée en 1997 (Tableau I).
Cette classification est très complexe mais discrimine bien les différentes
entités. Elle sépare totalement les syndromes lymphoprolifératifs selon leur
phénotype immunologique B ou T et inclut l'ensemble des syndromes
lymphoprolifératifs dont plusieurs n'étaient pas pris en compte dans les
classifications précédentes (leucémies de la lignée lymphocytaire, leucémie à
tricholeucocytes, myélome, maladie de Hodgkin). Elle a également le mérite
d'individualiser clairement certaines entités fréquentes mais non prises en
compte antérieurement [exemple : lymphome du manteau, lymphomes du
MALT (mucosaassociated lymphoid tissue)]. Cette classification repose sur la
morphologie mais aussi sur l'immunophénotypage, la cytogénétique et la
biologie moléculaire.
Immunophénotypage
C'est un examen essentiel pour le diagnostic précis de la
lymphoprolifération. Les leucocytes portent des antigènes de membrane
différents selon leur lignée d'origine et leur degré de maturation. La
reconnaissance de ces antigènes par l'utilisation d'anticorps monoclonaux
permet une identification précise des cellules impliquées.
Les anticorps reconnaissant le même antigène sont regroupés en CD (cluster
of différenciation = classe de différenciation). Par extension, la définition de CD
s'étend à l'antigène leucocytaire reconnu. Il s'agit d'un domaine complexe : plus
de 200 CD ont été reconnu, certains étant formés de plusieurs protéines
(exemple le CD1 formé de 5 protéines appelées CD1a, CD1b, etc…). Ces
antigènes leucocytaires sont des protéines qui ont été regroupés en plusieurs
familles (superfamille des immunoglobulines, superfamille des récepteurs aux
cytokines, superfamille des intégrines, …). Les principaux CD utiles dans la
classification des lymphomes apparaissent au Tableau II.
La surexpression des onco-protéines (exemples : bcl-2 dans les lymphomes
folliculaires, cycline D1 dans les lymphomes du manteau) peut être mise en
évidence en biologie moléculaire ou sur coupes par des anticorps et apporte
une aide précieuse au diagnostic.
Cytogénétique et biologie moléculaire
Des anomalies cytogénétiques sont retrouvées dans plus de 90% des LNH.
Les modifications cytogénétiques impliquent presque toujours un gène des
immunoglobulines dans les lymphomes B ou un gène des récepteurs des
cellules T dans les lymphomes T.
Deux d'entre-elles méritent, de par leur fréquence particulière, d'être
développées ici :
Translocation réciproque t (8 ; 14) ou plus rarement t (8 ; 22) ou t (8 ; 2)
dans les lymphomes de Burkitt. Ces translocations font voisiner l'oncogène cmyc situé sur le bras long du chromosome 8 et soit le gène des chaînes
lourdes d'immunoglobulines (chromosome 14) soit le gène des chaînes
légères lambda (chromosome 22) ou kappa (chromosome 2).
Translocation t (14 ; 18) dans plus de 80 % des lymphomes folliculaires à
petites cellules clivées mais aussi dans certains cas de lymphomes
folliculaires mixtes ou à grandes cellules. Cette translocation juxtapose
l'oncogène bcl-2 provenant du chromosome 18 et le gène des chaînes
lourdes d'immunoglobulines.
L'étude du réarrangement des gènes d'immunoglobulines dans les
lymphomes B et des gènes des récepteurs T dans les lymphomes T,
techniques réservées à des laboratoiresspécialisés, peut permettre de
confirmer le caractère clonal d'une prolifération.
La biologie moléculaire peut également détecter des anomalies
chromosomiques lorsque les séquences nucléotidiques réarrangées
sont bien caractérisées sur le plan moléculaire (translocation t(2 ;5)
des lymphomes anaplasiques, translocation t(11 ; 14) des lymphomes
du manteau,
translocation t(14 ; 18) des lymphomes folliculaires). La biologie
moléculaire permet enfin de détecter, après traitement, une maladie
résiduelle minime échappant aux méthodes d'investigations
morphologiques ou immunologiques conventionnelles.
DIAGNOSTIC ET BILAN D'EXTENSION
Présentation clinique La présentation clinique peut être très variable :
- Habituellement le diagnostic est posé suite à la découverte
d'adénopathies qui peuvent siéger dans toutes les aires ganglionnaires avec
cependant une prédominance au niveau cervical et axillaire. Les
adénopathies sont souvent multiples et quelquefois très volumineuses.
- Les atteintes extra-ganglionnaires sont fréquentes et peuvent
concerner tous les tissus avec une prédilection particulière pour la
moelle osseuse, la rate, le tube digestif, la sphère ORL, la peau, le
poumon, le foie, la plèvre, l'os, les reins, le système nerveux central. Les
localisations préférentielles extra-ganglionnaires sont dépendantes du type
histologique du LNH. Ainsi les atteintes médullaires sont particulièrement
fréquentes, dès le diagnostic initial, dans les lymphomes B de faible malignité
(lymphome à petits lymphocytes, lymphomes folliculaires, lymphome
lymphoplasmocytoïde) et dans les lymphome de haute malignité (lymphome
lymphoblastique ou lymphome de Burkitt). Les atteintes du système nerveux
central se rencontrent plus volontiers dans les lymphomes de haute malignité
(lymphome lymphoblastique, lymphome de Burkitt). Les localisations
abdominales sont essentiellement associées à des lymphomes B.
L'évolutivité de la maladie est également très variable. Ceci a conduit
historiquement à une
séparation clinique en trois groupes :
- les lymphomes de faible malignité (exemples : lymphome à petits
lymphocytes, lymphomes folliculaires, lymphome lymphoplasmocytoïde)
caractérisés par une évolution lente mais aussi par une moindre sensibilité
aux traitements.
- les lymphomes de haute malignité (lymphome lymphoblastique ou
lymphome de Burkitt) caractérisés par une évolution très agressive avec une
forte mortalité précoce mais aussi une grande chimiosensibilité. Les principes
thérapeutiques sont identiques à ceux des leucémies aiguës. Il s'agit de
réelles urgences thérapeutiques.
- les lymphomes de malignité intermédiaires (exemple : lymphome à
grandes cellules B) qui se situent entre les deux groupes précédents en
terme de génie évolutif. Ils gardent une bonne chimiosensibilité et ont de ce
fait le meilleur pronostic à long terme.
Bilan d'extension
Un bilan d'extension complet devra toujours être mené rapidement. Il
permet une évaluation exacte de l'ensemble des atteintes et donc une
détermination des facteurs pronostiques et un choix raisonné de la stratégie
thérapeutique. Ces examens serviront également de référence pour
l'appréciation de la réponse au traitement.
Le bilan d'extension comprendra au minimum :
- Biopsie d'une adénopathie ou d'un tissu envahi (indispensable pour poser
le diagnostic). Les investigations devront être complètes et inclure les études
morphologiques, immunophénotypique, cytogénétiques et moléculaires. Il est
toujours préférable que la biopsie soit faite dans un centre hospitalier capable
d'assurer l'ensemble des prestations biologiques.
- Hémogramme à la recherche de signes évoquant une atteinte médullaire
(excès de lymphocytes ou cellules lymphoïdes anormales, cytopénie,
myélémie)
- Biopsie de moelle osseuse (le médullogramme seul est insuffisant)
- Phénotypage des lymphocytes et biologie moléculaire au niveau
sanguin et médullaire selon le type histologique du lymphome
- Radiographie du thorax
- Echographie abdominale
- Tomodensitométrie thoracique et abdominale
- Examen ORL
- Ponction lombaire (uniquement lorsque la probabilité d'envahissement est
réelle : LNH de malignité intermédiaire et élevée).
- Selon le contexte, d'autres examens pourront être utiles : endoscopie
digestive, scintigraphie osseuse, biopsie hépatique, ....
D'autres examens compléteront le bilan :
- Bilan hépatique et rénal
- Dosage de l'uricémie augmenté dans les formes à prolifération rapide
- Dosage de la calcémie pouvant être augmentée en particulier lorsqu'il existe une
atteinte osseuse
- LDH (lactate deshydrogénases) et bêta-2 microglobuline sériques qui sont le reflet
de la prolifération et de la masse tumorale et qui ont une valeur pronostique
indépendante des autres facteurs.
- Recherche d'une immunoglobuline monoclonale, en particulier dans les
lymphomes de faible malignité
- Recherche d'une séropositivité pour le VIH, l'hépatite C (et le HTLV-1 dans les
LNH T)
-Evaluation de la fonction cardiaque si le traitement prévu inclut une anthracycline
-- La tomographie d'émission de positrons (PET) semble être un examen de grande
valeur, en particulier pour le suivi de masses résiduelles après traitement.
Il est essentiel est de connaître parfaitement l'extension initiale la maladie. De cette
connaissance dépendra le choix du traitement et l'appréciation précise de la réponse à
ce traitement. La classification en stade la plus utilisée dans les LNH de l'adulte est
celled'Ann Arbor développée pour la maladie de Hodgkin (Tableau III).
FACTEURS PRONOSTIQUES
Les facteurs de mauvais pronostic ont été définis pour les lymphomes
nodulaires d'une part et pour les lymphomes de malignité intermédiaire
ou élevée d'autre part (Tableau IV).
De façon générale, quel que soit le type histologique,
l'augmentation des LDH, l'augmentation de la bêta-2
microglobuline, un âge > 60 ans, une forte atteinte de l'état général
et une atteinte extra-ganglionnaire diffuse ou multiple sont des
facteurs indiscutables de mauvais pronostic
PRINCIPES THERAPEUTIQUES
L'approche thérapeutique est fondamentalement différente pour les
lymphomes de faible malignité et les lymphomes de malignité intermédiaire
et élevée.
Lymphomes de faible malignité
Les exemples type sont le lymphome à petits lymphocytes, les lymphomes
folliculaires ou la maladie de Waldenstrom.
Ils sont caractérisés par une évolutivité faible et une médiane de
survie longue. Ce sont préférentiellement des lymphomes du sujet âgé.
Dix à 40% de ces lymphomes vont se transformer avec le temps (médiane
de 4 à 5 ans) en forme histologique plus agressive (perte du caractère
folliculaire et/ou augmentation du contingent de grandes cellules). La
transformation se caractérise par une progression rapide de la maladie et
la médiane de survie est alors inférieure à 1 an.
Selon le stade et l'évolutivité de la maladie le traitement pourra être :
-Abstention thérapeutique dans les formes disséminées mais indolentes de
lymphomes à petits lymphocytes ou nodulaires à petites cellules clivées. Cette
attitude n'est légitime que chez le sujet âgé ou présentant des pathologies
intercurrentes pouvant influencer négativement la tolérance à une
chimiothérapie. Le traitement chimiothérapique ne sera introduit que lorsque
apparaîtront le lymphome franchement. Dans ces conditions la médiane de
survie est élevée (supérieure à 10 ans) et le traitement n'est entrepris qu'avec
un intervalle de 3 ans chez plus de la moitié des patients.
- Radiothérapie des territoires ganglionnaires atteints dans les formes
localisées (stade I et II). Ces formes sont peu fréquentes dans les lymphomes
de faible malignité et ne concernent que 10 à 20% des patients. Selon les
études, la survie en rémission à 10 ans est comprise entre 50 et 80%. L'intérêt
de l'adjonction d'une chimiothérapie à la radiothérapie est controversé.
- Monochimiothérapie orale continue sous forme de chlorambucil
(Chloraminophène®)ou de cyclophosphamide (Endoxan®) dans les stades III
et IV en l'absence de facteurs de mauvais pronostic. Le taux de rémission
complète obtenu est très variable selon les études (de 13 à 65%) mais la
médiane de survie reste élevée (voisine de 8 ans).
- Polychimiothérapie intraveineuse de type CVP (cyclophosphamide =
Endoxan, vincristine = Oncovin, prednisone) ou dérivée du miniCHVP (CVP +
doxorubicine = Adriamycine à dose faible) lorsque existent un ou plusieurs
facteurs de mauvais pronostic. Le taux de rémission complète est plus élevé
qu'avec la monochimiothérapie.
- Interféron alpha (Roferon® ; Introna®) d'efficacité indiscutable, en
association avec la chimiothérapie (miniCHVP), dans les lymphomes
folliculaires. Il fait maintenant partie de l'arsenal thérapeutique de première
intention dans les formes disséminées avec facteurs de mauvais pronostic.
-Dans les formes les plus agressives ou lors de rechutes, une chimiothérapie
plus lourde éventuellement suivies d'une intensification avec greffe de
cellules souches périphériques peut être discutée chez les sujets les plus
jeunes.
-- Une immunothérapie par un anticorps monoclonal anti-CD20 (rituximab) est
possible dans les lymphomes folliculaires (qui sont de phénotype B et portent
l'antigène CD20). L'efficacité est réelle mais semble plus grande en association
avec une chimiothérapie (de type CHOP : cyclophosphamide = Endoxan,
doxorubincine = Adriamycine, vincristine = Oncovin, prednisone). Son coût est
extrêmement élevé.
Des études sont en cours avec un anticorps anti-CD20 couplé à un isotope
radioactif pour renforcer l'action par une irradiation au sein même du tissu
lymphomateux.
Lymphomes de malignité intermédiaire et élevée
Les exemples type sont les lymphomes à grandes cellules B les lymphomes de
Burkitt et les lymphomes lymphoblastiques.
Dans ces types histologiques, l'obtention d'une rémission complète est le
pré-requis indispensable pour espérer une survie prolongée. Une
chimiothérapie intensive est donc indispensable. Trois générations de
protocoles ont été utilisées successivement :
- Les protocoles de première génération (de type CHOP) datent du début des années
70 et permettaient d'obtenir un taux de rémission complète proche de 60% dans les
lymphomes diffus à grandes cellules. Les rechutes restaient cependant fréquentes et la
survie à 2 ans n'excédait pas 50%.
- Les protocoles de seconde génération (exemple : mBACOD utilisant les mêmes
drogues que le CHOP plus de la bléomycine et du methotrexate) ont porté le taux de
rémission à environ 70%.
- Les protocoles de troisième génération [exemple : ACVBP (Tableau VI)] appliqués
depuis les années 80, permettent d'atteindre 80% de rémission complète. Ces
protocoles plus intensifs réduisent le taux de rechute et la survie à 2 ans est proche de
70%. Un plateau de survie en première rémission est obtenu à 5 ans et l'intérêt de ces
traitements n'en devient que plus évident avec l'allongement du recul.
Dans les formes avec plusieurs facteurs de mauvais pronostic, la tendance actuelle est
d'intensifier encore la chimiothérapie en particulier en augmentant les posologies des
cytostatiques et en maintenant des intercures courts. Ceci n'est possible qu'avec
l'utilisation de facteurs de croissance hématopoïétique. Une autre approche est la
réalisation précoce, dès la rémission complète obtenue, d'une intensification suivie
d'une greffe autologue de cellules souches hématopoïétiques. L'intérêt de ces greffes
est validé dans les formes les plus agressives.
L'anticorps monoclonal anti-CD20 (rituximab = Mabthera), associé à la
chimiothérapie, améliore le taux de réponse et la survie dans les lymphomes B
à grandes cellules de l'adulte et représente un progrès majeur dans la prise en
charge thérapeutique de ces patients. Son coût est extrêmement élevé.
Le traitement des rechutes est basé sur l'utilisation d'association de drogues
non utilisées en première intention (ifosfamide, étoposide, mitoxantrone,
cytarabine à haute dose,...). Ces traitements de rattrapage seront complétés
par une intensification avec autogreffe de moelle osseuse ou de cellules
souches périphériques pour les patients de moins de 60 ans restant
chimiosensibles.
Les lymphomes lymphoblastiques et les lymphomes de Burkitt sont
traités comme des leucémies aiguës.
Lymphomes de l'enfant
Il s'agit pratiquement toujours de formes agressives : lymphomes de
Burkitt (35 à 45%), lymphomes lymphoblastiques (25 à 35%),
lymphomes diffus à grandes cellules B (15 à 25%). Les traitements
sont intenses et soutenus, proches des protocoles de leucémies
aiguës de l'enfant et donnent d'excellents résultats avec des
rémissions de longue durée dans plus de 70% des cas.
Lymphomes au cours du SIDA
Leur traitement est également basé sur la chimiothérapie intensive
mais il faut tenir compte du risque infectieux accru du fait de
l'immunodéficience. Ce risque accru justifie le recours systématique
aux facteurs de croissance hématopoïétique. L'anticorps
monoclonal anti CD 20 semble intéressant dans les formes B.
Conduite à tenir devant des
adénopathies superficielles
Adénopathies (2):
Interrogatoire
• Age
• Activité professionnelle et loisirs
• Animaux
• FR infection VIH
• Séjour en zone d ’endémie parasitaire
• ATCD
• Traitement et habitus
• Signes généraux (AEG, fièvre, sueurs,
prurit)
• Mode de début , évolution
Adénopathies (3):
Examen clinique
• Palpation des aires ganglionnaires : être
systématique et efficace!
• Caractéristiques des adénopathies: taille,
isolées ou groupées, consistance,
sensibilité, mobilité, caractère compressif
• Examen complet : aires de drainage, foie,
rate
Adénopathies (4)
Territoire de drainage
• Aires cervicales : face et cuir chevelu,
sphère ORL, thyroïde
• Aires susclaviculaires: médiastin, viscères
sous diaphragmatiques
• Aires axillaires: membres supérieurs,
paroi thoraciques, glandes mammaires
• Aires inguinales et rétrocrurales : MI,
OGE, marge anale
DEFINITION :
∗ Adénopathie (ADP) = Hypertrophie pathologique d’un ganglion
lymphatique.
∗ Cette hypertrophie est due :
− à la prolifération lymphocytaire réactionnelle à une stimulation
antigénique soit locorégionale, soit générale.
− à l’accumulation de cellules pathologiques filtrées par le
ganglion, associée alors à l’hypertrophie lymphoïde réactionnelle.
− à la prolifération tumorale primitive du tissu lymphoïde
(lymphome)
L’architecture normale du ganglion montre des follicules contenant des lymphocytes B,
et une « zone T » inter folliculaire.
Le ganglion est limité par une capsule.
En cas de prolifération tumorale, cette architecture peut être totalement
remaniée.
• SITUATIONS CLINIQUES :
􀂃 ADP aiguë isolée : satellite d’une pathologie infectieuse + + +
􀂃 PolyADP bénignes : contexte infectieux évocateur (MNI,
rubéole, toxoplasmose) Elles peuvent aussi révéler une LAL chez
l’enfant ! .
􀂃 ADP isolée chronique sans point d’appel évident : nécessité
de la recherche méthodique d’une pathologie dans le territoire de
drainage (infection, tumeur).
􀂃 PolyADP chroniques : si bilan infectieux et LLC négatif →
Biopsie ganglionnaire chirurgicale
􀂃 ADP profondes : médiastinales (éliminer une sarcoïdose, une
tumeur bronchique) ou rétro péritonéales (éliminer une tumeur
testiculaire ou gynécologique). Si bilan négatif → Biopsie
ganglionnaire chirurgicale
ETIOLOGIES :
♦ ADP localisées :
 Cause locorégionale évidente
 Pas de cause évidente : - bilan topographique
orienté
- biopsie exérèse ganglionnaire.
♦ ADP disséminées :
 Cause générale facilement dépistée (MNI, rub, toxo,
VIH, Σ, LLC, LA)
 Pas de cause générale : biopsie ganglionnaire (x1,
x2 si nécessaire)
1) HEMOPATHIES MALIGNES Maladie de Hodgkin,
LMNH, LLC, Leucémies aigues tumorales, LMC
2) METASTASES GANGLIONNAIRES DE TUMEURS
SOLIDES
3) DIVERS ,Infection par le VIH, Tuberculose ganglionnaire,
Sarcoïdose, Autres infections (tularémie, brucellose, syphilis).
Adénopathies (5)
Questions à se poser
• Est ce bien un ganglion lymphatique?
• Atteinte localisée ou généralisée?
• Pathologie suspectée : maligne ou
bénigne?
• Atteinte primitive ou secondaire?
Adénopathies (6)
Diagnostic différentiel
• Dans tout les territoires: neurinomes, fibrome, lipome
• Territoire cervical: glande salivaire, kyste du tractus thyréoglosse,
lymphangiome kystique, kystes branchiaux, dermoïde, grenouillette
sushyoïdienne, anévrysme du glomus carotidien, laryngocèle, tumeur
thyroïdienne ou musculaire, abcès, côte cervicale.
• Territoire axillaire: hidroadénite
• Territoire inguinal: hidrosadénite, abcès froid, hernie, kyste du
cordon, anévrysme
Adénopathies (7)
Adénopathies uniques ou groupées
• Aiguë +s. Inflammatoires : infection
• Cervicale chronique : amygdale,tuberculose
• Volumineuse, dure, indolore, fixée, adhérente,
infiltrante: malignité+++
• Adénopathie cervicale d ’autant plus suspecte
que bas située
Adénopathies (8)
Polyadénopathies
• Contexte aigu et fébrile/ jeune
– MNI, VIH, toxo, CMV
– Rubéole : occipital++
• + fièvre subaiguë : brucellose, syphilis secondaire, trypanosomiase
• Pas de fièvre
– VIH, dermatose prurigineuse, maladie systémique (! SGS)
– Sd lymphoprolifératifs
– Localisation de leucémie myéloïdes
– Métastases de carcinome
Polyadénopathies (9)
Tableau particulier
• SMG: atteinte généralisée : virus, mycobactéries,
lupus, sarcoïdose, syndrome lymphoprolifératifs
• Adénopathies épitrochléennes : sarcoïdose, syphilis
• Occipitale : MNI, rubéole, syphilis
Adénopathies (10)
Paraclinique
• Toute adénopathie > 1-2 mois : biopsie chirurgicale: anapath,
bactério
• Cytoponction : ne doit pas retarder ou faire surseoir à la
biopsie+++
• Bilan minimum si pas de cause locale:
– NFS, VS, EPS, CRP
– Transa
– Sérologies : toxo, VIH, MNI, Syphilis
– IDR
– RP
Dr Jean EL CHEIKH
Unité de Transplantation et Thérapie Cellulaire
Département d'Hématologie
Institut Paoli-Calmettes
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