Le développement psychologique II: de 3 ans à l’adolescence Pr Antoine Guedeney & Dr Ludivine Dubois Module Psychologie P1 2008 Propriété de la Faculté de Médecine Paris 7- Denis Diderot 1 Les âges de la vie •3 - 6 ans • 6 - 12 ans • 12 - 18 ans 2 Le développement cognitif selon Piaget Finalité : adaptation de l’individu à son environnement Deux concepts : l’assimilation : incorporation de données du milieu à la structure de l’individu l’accommodation : modifications de la structure de l’individu en fonction des nouvelles données du milieu 3 Le développement cognitif selon Piaget Notion de stades constance de l’ordre de succession des acquisitions caractère intégratif des stades stade = structure d’ensemble distinction entre processus de formation et formes d’équilibre final Les facteurs de développement mental maturation nerveuse, l’expérience acquise dans l’action effectuée sur les objets,les interactions et les transmissions sociales. l’équilibration, le plus important pour Piaget. 4 Le développement cognitif selon Piaget Stade sensori-moteur (0-2 ans) Intelligence sans pensée ou sans représentation, sans langage, sans concept. Elle est pratique et fait intervenir la perception, les attitudes et les mouvements sans évocation symbolique. A partir des simples exercices réflexes, l’enfant commence à mettre en relation objets et actes, distinguant les moyens des fins, en se rendant compte des résultats obtenus et en agissant de façon intentionnelle. 5 Le développement cognitif selon Piaget Stade sensori-moteur (0-2 ans) Au départ : pas de permanence de l’univers, ni du temps, ni de causalité extérieure aux actions propres. Vers 8 mois : permanence de l’objet Vers 2 ans : notion d’espace et de temps (avant/après) et de causalité Naissance de la conscience de soi et du monde autour 6 3 - 6 ans • Stade préopératoire du développement cognitif • Stade du complexe d’oedipe • Acquisition de la théorie de l’esprit • Partenariat corrigé et attachement 7 Le développement cognitif selon Piaget • Période préopératoire, où domine la représentation symbolique. e • 1 apparition de la représentation qui consiste à élaborer en pensée des images à partir des objets du monde réel mais qui ne sont pas immédiatement présents aux sens • Pensée préopératoire et prélogique: – animisme : choses conçus comme animées – finalisme : action définie par son résultat – réalisme : pensées considérées comme des 8 objets Le développement cognitif selon Piaget • Pensée intuitive: concentration sur l’apparence des choses et absence de raisonnement logique • Raisonnement intuitif: représentation des perceptions et des actions, mais sans les coordonner par des opérations logiques 9 Expérience de Piaget • On présente à l’enfant 2 boules de pâte à modeler de même taille • On transforme, sous les yeux de l’enfant, une boule en galette puis en boudin; l’autre boule sert de témoin • On demande à l’enfant s’il y a la « même chose » dans les boules transformées • 2 types de réponses 10 Expérience de Piaget (2) –Un enfant répondra qu’il y en a moins dans la galette car elle est plus mince que la boule et plus dans le boudin car il est plus long –Un autre répondra exactement le contraire, en affirmant que la galette est plus grande (parce que plus large que la boule) et moins dans le boudin (car il est plus étroit) 11 Le développement affectif • Complexe d’Œdipe (Freud): temps essentiel dans la formation de la personnalité • Permet la triangulation • Ensemble des désirs amoureux et hostiles que l’enfant éprouve à l’égard de ses parents • L’identification au parent du même sexe et l’intériorisation des interdits parentaux sont les acquis importants 12 Théorie de l’esprit • = Capacité à attribuer des états mentaux à lui-même et aux autres, système qui peut être utilisé pour faire des prédictions relatives aux comportements des autres. • Paradigme de la fausse croyance : hypothèse d’une reconnaissance chez autrui des états mentaux différents des siens propres mais aussi de la réalité telle qu’on la perçoit. 13 Théorie de l’esprit Modèle expérimental : Sally et Anne L’enfant est spectateur d’une saynète à l’aide de poupées. - Anne, l’une des poupées, possède une bille - Elle met la bille dans un panier et quitte la pièce. - Sally, l’autre poupée, retire la bille du panier et la met dans une caisse. Elle part. - Anne revient. -> Où ira-t-elle chercher la bille ? 14 Théorie de l’esprit • Réponse d’un enfant – Avant 3 ans : «dans la caisse» impossibilité d’inférer que Anne ignore le déplacement – Après 3 ans : «dans le panier» capacité à inférer la fausse croyance 15 Attachement et développement • Partenariat corrigé • Capacité de l’enfant à intégrer les objectifs et les désirs de ses partenaires et à les modifier par son propre comportement en fonction de ses besoins va jouer un rôle clé dans la capacité à négocier les conflits. • Rôle important des modèles de représentation de soi et de l’environnement. La présence physique n’est plus nécessaire. • Des figures d’attachement secondaires prennent le relais et permettent d’affronter des milieux 16 étrangers. 6-12 ans • Mise en place des structures des opérations concrètes • Phase de latence 17 Le développement cognitif selon Piaget • Entrée au CP • Concentration +++ • Apparition phase des opérations concrètes = actions conceptualisées, réversibles et coordonnées à d’autres en un système d’ensemble 18 Expérience de Piaget • Réponse d’un enfant de 7 ans: la quantité est conservée, l’étendue compense l’épaisseur • Passage de l’intuition à l’opération –Notion de conservation • nécessaire à toute activité rationnelle • longueur et numérique, puis substance, puis poids, puis volume –Notion de réversibilité • possibilité d’exercer ses actions en pensée • 1ers groupements opératoires: sériation, classification 19 Le développement affectif • Phase de latence : –désexualisation des pensées et comportements grâce au refoulement, qui permet les sublimations. D’où une disponibilité particulière pour les apprentissages. –obsessionnalisation de la personnalité, avec apparition tendresse et dévotion envers parents. –Attirance de l’enfant vers des activités sociales plus larges et des milieux différents. 20 L’adolescence • Passage entre enfance et âge adulte • Phase importante du développement, riche de potentialités • Prise de distance vis-à-vis de l’enfance et recherche d’un statut stable adulte • « crise d’adolescence » • Où finit la crise normale ? où commence la pathologie? 21 Processus maturatif • Adolescent rendu vulnérable par les effets physiques et psychiques de la puberté • Sexualisation et conflictualisation des liens, notamment parentaux • Se séparer de ses parents, s’autonomiser • Devenir soi-même, construire sa propre identité 22 Approche physiologique • La crise pubertaire se manifeste par l’accélération de la croissance et l’apparition des caractères sexuels secondaires. Il y a émergence de la maturité génitale somatique. • L’âge de survenue des premiers signes pubertaires et la rapidité du processus varient considérablement d’un individu à l’autre. • Les premières règles survenaient à 17 ans au milieu du 19è siècle alors qu’actuellement l’âge moyen se situe autour de 12 ans et demi. 23 Approche physiologique • La puberté se manifeste par de profondes modifications physiologiques, qui ont évidemment d’importantes répercussions psychologiques. • Les phénomènes pubertaires modifient le schéma corporel de l’adolescent qui se cherche une nouvelle identité. 24 Le développement cognitif selon Piaget • Stade de l’intelligence opératoire formelle, à partir de 12 ans • La pensée formelle opère sur du matériel symbolique • L’accession au raisonnement formel se caractérise par la capacité à raisonner par hypothèse, d’envisager l’ensemble des cas possibles et de considérer le réel comme un simple cas particulier. 25 Le développement cognitif selon Piaget • Il est essentiel de comprendre qu’avec le stade des opérations formelles, le rapport au monde change complètement. • L’intelligence accède à un niveau tel qu’elle se situe au plan des relations entre le possible et le réel, mais avec une inversion de sens tout à fait remarquable car, au lieu que « le possible se manifeste simplement sous la forme d’un prolongement du réel, c’est au contraire le réel qui se subordonne au possible. » 26 Historicité • Concept d’apparition plutôt récente (fin du 18ème siècle en Occident). Jusqu’alors, on était ou enfant, ou adulte. • Ph. Aries: « l’enfant passait directement et sans intermédiaire des jupes des femmes au monde des adultes. D’enfant, il devenait tout de suite un petit homme, habillé comme les hommes ou les femmes, mêlé à eux, sans autre distinction que la taille. » 27 Historicité • Durée progressivement allongée au sein de nos sociétés occidentales : – D’un côté, son début qui correspond à la puberté physiologique tend à survenir de plus en plus tôt. – De l’autre, certaines données socio-démographiques comme l’allongement du temps des études et l’absence de fonctions sociales définies et de métier, sont un facteur important de prolongation du temps de l’adolescence, avec ce que cela comporte d’ouverture possible et de richesse potentielle, mais aussi d’angoisse et d’incertitude. 28 Sociétés occidentales actuelles • Perte des rites d’initiation • Pour la 1e fois, une place est faite à une génération qui a le pouvoir de proposer de nouvelles formes de conduites (Bruner) • Relais nécessaire entre monde des enfants et des adultes car propose de nouveaux styles de vie mieux adaptés à des conditions nouvelles et changeantes, à des changements qu’elle affirme, à tort ou à raison, percevoir mieux que ceux qui se sont adaptés à l’état de choses antérieur. 29 Le développement affectif • Réédition de l’enfance • Evelyne Kestemberg: « si tout se prépare dans l’enfance, tout se rejoue à l’adolescence » • L’adolescent doit renoncer aux premiers objets d’amour, les parents, et établir de nouvelles relations objectales 30 Le développement affectif • En proie à ses pulsions, il doit rejeter ses parents, dont la présence réactive les conflits oedipiens et le menace d’un inceste maintenant réalisable • Les conditions d’un véritable traumatisme sont réunies, du fait de la pression des désirs sexuels et de la possibilité physique de les réaliser 31 Relation aux parents • Nécessité d’une mise à distance, non voulue par l’adolescent • Conflit = compromis (permet de garder le contact tout en manifestant son indépendance) • Renversement des affects en leur contraire (admiration -> mépris, amour-> haine...) • Ampleur attachement et idéalisation = ampleur renversement • Culpabilité ++ (incitation à la punition) 32 Attachement et développement • L’adolescence est l’occasion de : –une mise à distance des figures d’attachement primaires ; –la création de nouveaux liens d’attachement de type symétrique; –importance du système d’exploration –l’émergence des systèmes comportementaux de reproduction et de caregiving, mais aussi la sexualisation des liens. –remaniements importants des MIO, et de leur intégration en un ensemble unifié et cohérent. 33 Psychopathologie à l ’adolescence La Crise n’explique pas tous les troubles Crise: pas de sabotage, de toxicomanie, d’isolement Morosité, variabilité Attention à l’auto-sabotage: isolement, corps, travail, loisirs Les risques des essais, le danger de vivre Anorexie, schizophrénie, phobies, PMD, toxicomanies: début à l’adolescence 34