Les dés sont-ils à jeter Colloque inter-irem de Périgueux 19-21 juin 2008, Michel Henry Émergence de la probabilité : de la définition classique à l’approche fréquentiste Quelle introduction en troisième ? II - L’approche fréquentiste et l’enseignement III - La modélisation Le théorème de Bernoulli : D’une urne de Bernoulli contenant t boules dont r blanches (fertiles) et s noires (stériles), on tire nt boules avec remises et on compte les boules blanches obtenues (schéma binomial). Bernoulli formule ainsi son théorème : « On peut concevoir des expériences en un nombre tel qu’il soit plus vraisemblable d’autant de fois que l’on veut que le nombre des observations fertiles soit au nombre r 1 de toutes les observations dans un rapport ni plus grand que , ni plus petit que r 1 t ». t Traduction moderne : Une même expérience aléatoire est répétée un nombre n de fois réalisant un événement suffisamment grand. On s’intéresse à la fréquence Fn des issues donné de probabilité p. Cette situation peut être décrite par le schéma binomial de l’énoncé de Bernoulli, où p = r/t ; on note = 1/t, la précision de l’approximation. Alors, il y a une probabilité aussi voisine de 1 que l’on veut que l’écart entre la fréquence Fn des issues réalisant l’événement et sa probabilité p soit plus petit que tout donné. Cette fréquence observée Fn peut donc être prise pour estimer la probabilité p, et cet énoncé explicite la condition de confiance : P(Fn – < p < Fn + ) > 1– (1– est le niveau de confiance) II - L’approche fréquentiste : Elle est dite « objectiviste », liée aux notions de « fréquence », « tendance », « loi des grands nombres », la probabilité serait une mesure objective de l’incertitude. La définition d’Alfred Renyi (calcul des probabilités, Dunod, 1966) « Nous appellerons probabilité d'un événement le nombre autour duquel oscille la fréquence relative de l'événement considéré… » Ce nombre existe-t-il ? Est-il donné de manière unique ? Peut-on toujours le déterminer ? « … la théorie mathématique des probabilités ne s'occupe pas de jugements subjectifs ; elle concerne les probabilités objectives, qui peuvent être mesurées comme des grandeurs physiques ». Ceci en vertu du théorème de Bernoulli : > 0, > 0 et n assez grand, P(Fn – < p < Fn + ) > 1– Ces fréquences observées Fn peuvent donc être prises comme « mesures » à près pour estimer la probabilité p de l’événement par l’encadrement de confiance indiqué, avec un risque inférieur à de se tromper. Problèmes didactiques posés par cet énoncé Dans la formule P(|Fn – p| < ) > 1– , il y a deux sortes de probabilités: - p qui est introduite à partir d’un modèle d’urne par la définition « classique ». - P qui traduit un risque (celui de se tromper en disant que p est dans l’intervalle de confiance). Cette probabilité n’est pas de même nature que la probabilité « objective » p. relève-t-elle aussi d’une approche fréquentiste ? - Combien faut-il faire d’expériences réellement pour garantir cette mesure ? - Comment faire fonctionner cette définition fréquentiste dans un problème ? - La définition de Renyi repose sur l’énoncé de Bernoulli qui sera ensuite démontré comme théorème. Cercle vicieux ? La définition « fréquentiste » confond deux domaines qu’il faut pourtant bien séparer : - le domaine de la réalité où l’on observe les fréquences Fn de réalisations d’un événement au cours de n répétitions d’une même expérience aléatoire, - le domaine théorique (mathématique) où les objets sont définis abstraitement. Renyi explique: La «définition» de la probabilité comme valeur autour de laquelle oscille la fréquence relative n'est pas une définition mathématique mais une description du substrat concret du concept de probabilité. Alors, quelle est la « définition mathématique » ? Laissons la conclusion à Pierre-Simon Laplace : « Il est remarquable qu’une science qui a commencé par la considération des jeux se soit élevée aux plus importants objets des connaissances humaines »… « … On voit par cet Essai que la théorie des probabilités n'est au fond que le bon sens réduit au calcul : elle fait apprécier avec exactitude, ce que les esprits justes sentent par une sorte d'instinct, sans qu'ils puissent souvent s'en rendre compte… » « … on verra qu'il n'est point de science plus digne de nos méditations, et qu'il soit plus utile de faire entrer dans le système de l'instruction publique. » Conclusion de l’Essai Philosophique de 1812