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AFVP Monographie Maladies allergiques
Chapitre 10
Allergie alimentaire
Dr. Michèle RAFFARD
Allergologue
Centre Médical de l’Institut Pasteur, 75 rue de l’Eglise – 75015, Paris
Dr. Martine VIGAN
Praticien Hospitalier
Unité Fonctionnelle d'Allergologie, Département de Dermatologie,
Hôpital Saint-Jacques, 25030 Besançon Cedex, France
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Chapitre 10-a
Allergie alimentaire
(Michèle RAFFARD, Martine VIGAN)
Il s’agit de manifestations allergiques survenant à la suite de l’ingestion d’un aliment. Tous les
aliments peuvent déclencher des symptômes allergiques chez les patients sensibilisés, certains
aliments sont plus souvent en cause. Le diagnostic n’est pas toujours facile et le bilan doit être
rigoureux : tests cutanées, dosages des IgE et parfois test de provocation allergénique. La prise
en charge est fonction de la symptomatologie et du résultat du bilan avec un régime d’éviction,
s’il y a lieu, bien adapté à chaque cas.
Epidémiologie
Les allergènes alimentaires dépendent du mode d’alimentation des pays ; ces 30 dernières
années l’allergie alimentaire a explosé en France et dans les pays occidentaux en général. En
France le Réseau d’Allergo-Vigilance créé par le Pr AD Moneret-Vautrin donne les chiffres
suivant : doublement en plus de 5 ans, 3,4% de la population française avec 3 fois plus
d’enfants que d’adultes, 5 à 7% des enfants sont âgés de moins de 15 ans. L’allergie alimentaire
est en augmentation dans le monde.
Fréquence des symptômes
Urticaire ……………………….… 57%
Angioœdème ……….….. ………26%
Symptômes digestifs…… ………22%
Eczéma …………………. ………22%
Rhinite …………………... ………6,5%
Syndrome oral ………….. ………6,5%
Asthme ………………….. ………5,7%
Choc anaphylactique …………... 2,7%
Conjonctivite ……………………. 1,4%
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Mecanismes
Il existe plusieurs mécanismes (1) : allergie à IgE, mécanismes immunologiques avec
augmentation des éosinophiles. D’autres manifestations dues aux aliments se manifestent par
une hypersensibilité non immunologique (voir schéma I et chapitre Nomenclature) ou une
intolérance comme la maladie liaque due au gluten de la farine de blé, ou l’intolérance au
lactose. Il faut également distinguer sensibilisation (présence d’anticorps sans manifestations
clinique) et allergie (maladie clinique)
Clinique
Manifestations cutanées
- Urticaire, angiœdème, anaphylaxie, anaphylaxie à l’effort, eczéma atopique
Manifestations digestives
- Syndrome oral X pollen, Nausées / vomissements, douleurs abdominales / diarrhée, gastrite /
œsophagite à éosinophiles, aversion chez le petit enfant.
Les symptômes cliniques sont variés mais principalement cutanés et digestifs : l’urticaire est au
premier rang des manifestations allergiques, il y a aussi des réactions anaphylactiques. Les
symptômes d’urticaire surviennent dans les minutes qui suivent la prise alimentaire. Plus les
réactions sont graves plus elles sont proches de la prise alimentaire, et peuvent faire
interrompre le repas. L’anaphylaxie peut aussi survenir associée ou non à de l’urticaire elle peut
être révélée par un effort, même minime : marche rapide, danse, mais le plus souvent course
ou activité sportive qui suit n’importe quelle prise alimentaire bien supportée au repos.
Par contre les manifestations de la muqueuse buccale sont très fréquentes : le syndrome oral,
entité particulière, avec prurit buccal démangeaisons au fond des oreilles et parfois œdème, au
cours de l’ingestion de fruits ou de légumes, comme dans les allergies croisées au latex.
L’eczéma du nourrisson ou dermatite atopique est un facteur favorisant d’allergie alimentaire.
L’asthme est plus rarement associé à la prise d’aliment de même la rhinoconjonctivite, ils
souvent présents dans le cadre d’une réaction anaphylactique sévère.
Le syndrome œuf-oiseaux associe asthme allergique aux plumes d’oiseaux avec allergie
alimentaire, souvent sévère, au jaune d’œuf qui peut-être associée à une allergie à la viande de
volaille.
Une entité très rare est la gastrite à éosinophile : inflammation due à la présence d’amas
d’éosinophiles dans la muqueuse gastrique et/ou œsophagienne.
Allergenes alimentaires ou trophallergenes (voir aussi ce chapitre)
Tous les aliments (3-4) peuvent déclencher une réaction allergique qui varie selon les habitudes
alimentaires des pays (voir schéma II et les tableaux dans particularités de certains allergènes
alimentaires)
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Allergènes fréquents chez le nourrisson occidental
Lait de vache Ŕ Œuf Ŕ Soja Ŕ Arachide Ŕ Blé Ŕ Poisson Ŕ Moutarde
La fréquence de survenue des allergies alimentaires en Europe a amené les spécialistes à
recommander l’étiquetage de tous les ingrédients présents, même à faible dose, dans les
préparations agro-alimentaires commerciales et en particulier les 12 allergènes les plus
fréquents.
1. Lait et produits à base de lait (y compris le lactose)
2. Crustacés et produits à base de crustacés
3. Œuf et produits à base d’œufs
4. Poisson et produits à base de poisson
5. Anhydride sulfureux et sulfites > 10 mg/kg (ou 10 mg) exprimées en SO²
6. Céréales contenant du gluten (blé, seigle, orge, avoine, épeautre, Kamut® ou leurs
souches hybridées) et produits à base de ces céréales
7. Arachide et produits à base d’arachide
8. Fruits à coques : amandes, noisettes, noix, noix de cajou, de pécan, du brésil, de
macadamia, du Queensland, pistache, ainsi que tous les produits à base de ces fruits
9. Céleri et produits à base de céleri
10. Soja et produits à base de soja
11. Moutarde et produits à base de moutarde
12. Graines de sésame et produits à base de graines de sésame
Allergènes croisant : tropomyosine pour le règne animal et profiline pour le règne végétal
(voir Les allergènes) et les familles moléculaires des végétaux (structure moléculaire proche.
Allergie croisée : sensibilisation à des protéines le plus souvent végétales, d’une même famille
moléculaire, sans parenté botanique : par exemple allergie au latex et à l’avocat ou à la pomme
et au pollen de bouleau.
Règne animal
Crustacés
Poissons
Coquillages
Viande et dérivés
Volaille et dérivés
Règne végétal
Fruits à coque
Fruits
Légumes
Céréales
Épices
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Diagnostic (voir arbre décisionnel pour le diagnostic Tableau IV)
L’histoire de la maladie est soigneusement reconstituée (5), l’interrogatoire est très méticuleux,
avec étude détaillée et précise, des circonstances de survenue (au décours d’un repas, avec
un maximum de 3 heures d’écart, exceptionnellement jusqu’à 6 heures), des ingestions
alimentaires en vérifiant la concordance entre l’aliment suspecté et le déclenchement de la crise,
sans oublier les médicaments pris au cours du repas.
L’aliment peut être : ingéré, humé, procuré (personne à personne; contamination), touché.
Les réactions peuvent être constantes, évolutives, liées à la dose, liées au stress, liées à l’effort.
Il peut être utile de faire un cahier alimentaire sur 7 jours tous les aliments sont notés,
boissons, friandises comprises, ainsi que les médicaments (pour différencier l’allergie
alimentaire de la fausse allergie par excès d’aliments histamino-libérateurs).
Les antécédents personnels et familiaux à la recherche d’une maladie atopique sont utiles pout
identifier le terrain et le risque de dermatite atopique chez le nourrisson ou d’allergie croisée.
Histoire de la maladie
Identification du ou des aliments
Délai entre ingestion et réaction
Symptômes attribués à l’aliment
Quantité ingérée lors de la réaction
Reproductibilité des symptômes lors d’une ingestion antérieure ou suivante
Recherche de facteurs concomitants
Date de la dernière réaction
Enquête catégorielle alimentaire sur 7 jours à noter par le patient dans un cahier
Reconstitution complète du repas, tous les ingestats :
- Viande, poisson, abats, légumes
- Sauce, condiments, additifs, conservateurs
Ingestats en dehors du repas : grignotage
Tests cutanés (voir aussi ce chapitre)
Le choix des allergènes correspond au repas complet incriminé pour la réaction.
Les tests cutanés sont effectués avec des allergènes standardisés des laboratoires spécialisés
et en cas de négativité, de doute ou de discordance avec les aliments natifs, identifiés par
l’interrogatoire et apportés par le patient. Les allergènes commerciaux subissent une
dégradation par oxydation et sont peu réactifs en particulier pour les fruits et légumes.
Pour les aliments natifs : piquer dans l’aliment avec une lancette puis tester le patient avec la
lancette imprégnée = méthode du prick-de-prick.
Les tests peuvent être pratiqués avec le plat complet dans un premier temps puis, en cas de
positivité, chaque ingrédient est testé séparément.
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