Violence conjugale

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Violence conjugale chez les hommes et les femmes
présentant des traits de personnalité limite :
Comprendre et mieux gérer le risque d'abus physique et
psychologique
Sébastien Bouchard, Ph. D., psychologue , professeur, TÉLUQ
&
Natacha Godbout, Ph.D., psychologue, professeure, UQAM
24 janvier 2012
POUR UNE APPROCHE «GENDER
INCLUSIVE» DES DÉTERMINANTS DE
LA VIOLENCE CONJUGALE
Pour une approche «gender inclusive» des
déterminants de la violence conjugale
• 24% des couples rapportent de la violence physique
– 29% F et 23% H ont été victimes au cours de leur vie
(National Violence Against Women Survey)
• 7% F et 6% H victimes (physique ou sexuelle) durant les 5
dernières années (Canada)
• Mutualité de la violence
– F : davantage d’actes de violence physique (d = -.05)
– H : plus susceptibles d’infliger des blessures (d = . 15), 62%
des blessures sur des F (voir Archer, 2000)
• Explorer l’étiologie et les dynamiques dyadiques…
Pertinence d’une approche tenant compte de la
personnalité des personnes violentes dans l'intimité
Pertinence d’une approche tenant compte de la
personnalité des personnes violentes dans l'intimité
• Y a-t-il des types de personnalité souvent
associés à la violence conjugale?
– Violence ponctuelle, associée à une crise dans
le couple : pas TP ou Évitant
– Violence «partenaire seulement» de sévérité
modérée : Borderline/dysphorique/ réactive
– Violence plus généralisé et plus sévére :
Psychopathique/ instrumentale / proactive
ATTACHEMENT
Styles d’attachement chez l’adulte :
Le modèle de Bartholomew
Représentation des autres
Deux dimensions, quatre styles d’attachement
ÉVITANT/DÉTACHÉ
NÉGATIVES
Haute estime de soi
Faible sociabilité
POSITIVES
CRAINTIF
Faible estime de soi
Faible sociabilité
SÉCURE
PRÉOCCUPÉ
Haute estime de soi
Haute sociabilité
Faible estime de soi
Haut sociabilité
POSITIVES
NÉGATIVES
Représentation de soi
Chez l’adulte, stabilité des MIA
• 60-70 % des sujets présentaient à l’âge
adulte le même type d’attachement qu’à un
an. (Waters et al. dans Van Ijzendoorn,
Juffer et Dayvesteyn, 1995)
VIOLENCE CONJUGALE ET
ATTACHEMENT
Contexte relationnel de l’agressivité
(tiré de Crichfield, Levy, Clarkin & Kernberg, 2008)
(n = 94 patients-TPL selon le IPDE)
Agressivité réactive /
attribution d’intentions hostiles
Irritabilité/
tempérament colérique
Auto-mutilation
DÉTACHÉ
CRAINTIF
Suicidalité
SÉCURE
Hétéro-agression
PRÉOCCUPÉ
Attachement et violence conjugale
Enfance
• L’échec des figures d’attachement à répondre
aux besoins de l’enfant amène typiquement
l’expérience de peur et détresse
• Réponse immédiate : comportements de
colère et protestation
– Ex : Colère observée par Ainsworth et al. (1978)
lorsque la mère d’un enfant de 1 an avec
attachement anxieux quitte la salle et revient 3
minutes plus tard
Attachement et violence conjugale
• Le système d’attachement régule les cpt de
l’enfant (pleurs, proximité) en période de stress
• En fonction de la réponse des figures
d’attachement (disponible, à l’écoute, réassurance,
réconfort) l’enfant développe un sentiment de
valeur personnel et de confiance dans la relation
intime (safe haven).
– Développement de modèles internalisé de son rôle et du
rôle de l’autre en relaiton.
Attachement et violence conjugale
• Rôle de la colère :
– motive l’enfant à mobiliser ses efforts et surmonter les
obstacles pour ré-établir le contact,
– exprimer des reproches
– Décourager la figure d’attachement de devenir nondisponible dans le future
– Stratégie pour prévenir la séparation; donc l’expérience
d’anxiété
– Toutefois, peut être destructif et provoquer une escalade
de violence-colère, ou retrait de l’autre. Donc,
l’attachement insécure est à la fois source et conséquence
de la violence.
Attachement et violence conjugale
• En raison de leur histoire (violence dans la famille,
environnement invalidant) ces individus ont développé des
mécanismes qui amplifient ou désactivent leur système
d’attachement
• Chez l’adulte avec un attachement insécurisant, tendance à
répondre aux menaces (perçues) de séparation avec colère
et comportements de contrôle, lesquels mènent à la
violence.
• Forme exagérée et destructive de protestation envers le
partenaire (figure d’attachement) en contexte d’abandonséparation (Les «pitbulls» de Jacobson & Gottman, impulsifs
de Dutton).
Attachement et violence conjugale
• homme violents qui se présentent comme froids,
manquent d’empathie, distant, émotionnellement
déconnecté de l’autre
• Utilisent la violence afin de garder le partenaire à
distance, surtout si l’autre évoque l’anxiété-peur
interne qu’ils cherchent à dénier
– (cobras de Jacobson & Gottman,
instrumental de Dutton)
Quelques études empiriques
• Attachement insécure comme prédicteur de
la violence conjugale
• Homme principalement/exclusivement
violent dans leur relation amoureuse ont
plus de risques de présenter un attachement
insécure
Quelques études empiriques
• Hommes violents référés par la court pour traitement
(Dutton et al., 1994)
• Environ 80% des hommes violents VS environ 50 %
des hommes en général, ont un attachement insécure:
–
–
–
–
Sécurisant (20%, vs. 47% dans pop normale)
Préoccupé (33%, vs. 14%)
Détaché (27%, vs. 18%)
Craintif similaire (20%, vs. 21%)
• Mais lié à la fréquence des cpt violents, tel que rapportés par la
conjointe
Quelques études empiriques
• Expression de la violence lorsque la peur
d’abandon est activée
– Hommes violents génèrent des réponses agressives
lorsqu'ils interprètent des signaux de rejet/abandon dans
les comportement de leurs compagnes
• Leurs réponses sont similaires aux hommes du groupe
contrôle lorsque les vignettes présentent des conflits
maritaux centrés sur des demandes pour augmenter
l’intimité ou sans référence à l’intimité-proximité
– Sur une note plus dramatique : l’homicide en contexte
conjugal est corrélé aux perceptions d’abandon
Étude de Allison et al, 2008
Deux dynamiques majeures
1. Le retrait du conjoint est lié aux comportements violents
des préoccupés, afin de forcer l’autre à ramener son
focus, obtenir une proximité physique ou émotionnelle
plus grande (stratégie de poursuite)
• Angoisses abandonniques
2. Violence utilisée pour mettre le conjoint à distance ou
s’échapper lorsque le partenaire est perçu comme
venant dangereusement trop près ou intrusif (stratégie
de distanciation)
• Autorité et contrôle
TROUBLE DE PERSONNALITÉ, VIOLENCE
CONJUGALE ET ATTACHEMENT
Attachement et trouble de la personnalité
• De plus en plus d’étude et de modèles théoriques font état
des liens étroits qui existent entre les troubles de la
personnalité et divers aspects de l’attachement:
– Rôle étiologique des troubles de l’attachement dans
l’enfance dans le développement d’TP (voir Fonagy et
al.,).
– Style d’attachement (Meyer et Pilkonis) :
• TPL → Craintif
• DEP → Préoccupé
• NA, ANT, SCHZ → Détaché
– Dimensions de l’attachement et TP
• Anxiété (de séparation) → Angoisse d’abandon du TPL
Style d’attachement et trouble de la personnalité
(Meyer & Pilkonis, 2005; n = 152 adultes d’un hôpital psychiatrique)
ÉTUDE
DE BOUCHARD ET AL. (2009)
LES COUPLES DONT LA FEMME SOUFFRE D’UN
TROUBLE SÉVÈRE DE LA PERSONNALITÉ :
fonctionnement conjugal et attitudes à l’égard de la
sexualité
Étude
Par Dr Sébastien Bouchard, Ph. D., psychologue
Unité d’enseignement et de recherche en éducation
TÉLUQ-UQAM
CRIPCAS
Première étude – Résultats en six points
La majorité des couples à l’étude (68,7 %) traverse des épisodes
répétitifs de rupture et de réconciliation.
1.
–
Près du tiers de ces couples se sont séparés «définitivement» sur une
période de 18 mois.
Près de la moitié des hommes en couple (15/34) avec une femme
présentant un TPL répond aux critères diagnostiques d’un trouble de la
personnalité.
2.
–
–
Principalement : paranoïde, antisociale, obsessionnel-compulsif et évitant.
La moitié des hommes en relation de couple avec une femme présentant un
TPL répond au critère A pour le diagnostic de trouble de la personnalité
antisociale (trouble des conduites avant l’âge de 15 ans).
Les couples à l’étude se montrent moins satisfaits de leur union.
3.
–
–
Cependant, les hommes de l’échantillon clinique ne semblent pas plus
insatisfaits de leur union que ne le sont leurs conjointes atteintes d’un TPL.
51 % des femmes-TPL et 60 % des conjoints peuvent être classifiés comme
étant « satisfaits » de leur union.
Première étude - Résultats
Plus d’insécurité dans l’attachement
4.
–
–
–
Près de 70 % des hommes du groupe clinique rapportent avoir des
représentations d’attachement insécurisé (groupe contrôle : le tiers).
100 % des conjointes ont un style d’attachement insécurisé.
37 % des femmes présentant un TPL auraient un style d’attachement craintif.
Plus de problèmes de communication de type demande/retrait
5.
–
–
Moins de communication mutuelle et plus d’évitement de la communication.
Les femmes présentant un TPL ont plus tendance à éviter la communication
lorsque leur conjoint le demande.
Plus de violence conjugale
6.
–
–
–
La proportion de femmes présentant un TPL usant de violence dans leur
couple est de 88,6 % pour la violence psychologique et de 54,3 % pour la
violence physique.
73 % des femmes présentant un TPL rapportent n’avoir subi aucune violence
physique.
Une minorité de couples rapportent tout de même des niveaux élevés de
violence conjugale mutuelle.
/ évitement
Peur du rapprochement
Avoidance of intimacy
Figure 1. Scores moyens aux deux dimensions de l’attachement pour
le groupe contrôle et pour les couples dont la femme présente un TPL
ÉVITANT
3,4
CRAINTIF
Femmes-TPL
BPD
women
3
SÉCURE
2,6
Men dating BPD
Conjoints de
femme-TPL
Hommescontrôles
Control
men
PRÉOCCUPÉ
2,2
Control women
Femmescontrôles
1,8
2,4
2,8
3,2
3,6
4
Rejection
anxiety
Peur du rejet
/ anxiété
4,4
4,8
5,2
ÉTUDE
DE GODBOUT, DUTTON,
LUSSIER & SABOURIN (2009)
Participants & Procédure
•
•
•
•
•
•
•
315 H et 329 F en couple
marriés (n = 189) cohabitent (n = 455)
Durée moyenne de l’union = 7 ans (ET = 4.5)
47.5% sans enfant
Âge moyen des F 27.6 ans (ET = 4.3) et H 29.5 ans (ET = 5.5)
Éducation moyenne F = 14.9 (ET = 3.1), H = 14.3 (ET = 3.5)
Revenu annuel moyen F = $26,811 (ET = $17,681) et H = $38,126
(ET = $19,862)
Procédure:
• Recrutés sur une base volontaire :
1. 533 via firme de sondage
2. 91 via médias variés (radio, TV, journeaux)
Mesures
• Violence vécue en enfance : 4 questions
• Attachement. Experiences in Close Relationships
Questionnaire (Brennan et al., 1998).
• Violence conjugale. Conflict Tactics Scale (CTS2; Straus
et al., 1996)
– Psychologique (briser qqc de l’autre, noms)
– Physique (pousser, frapper)
• Ajustement conjugale. Dyadic Adjustment Scale (Spanier,
1976).
– Cohésion (connexion), satisfaction (degré de bonheur)
Résultats
Violence conjugale
Rapporte au moins 1 comportement dans la dernière
année
• 27% physique
– 31% F, 23% H (x2 = 3.8, p = .05)
• 83% psychologique
– 86% F, 80% H (x2 = 5.0, p = .03)
• 16% aucun comportement violent
– 13% F, 19% H (x2 =
4.3, p = .04)
Corrélations styles d’atachement et
violence conjugale
Prevalence
Variables
V Physique
V Psychologique
434 (67%)
45 (7%)
139 (22%)
Secure
-.19*
Craintif
.09*
Préoccupé
.16*
Détaché
.01
-.24*
.15*
.14*
.07
N = 644
* p < .05
26 (4%)
Structural Equation Modeling
Violence, Attachment and Marital Adjustment 1
.96*
.75*
Direct
psychol
Violence
.89
.91***
Anx1
Anx2
Direct
physical
Violence
Anx3
Att.
Anxiété
.17**
Violence
Enfance
.76***
-.11**
.85
Psychological
.51***
Physical
.28***
-.23***
.20**
DAS
R2 =
.52
Violence
.16**
Att.
Évitement
Avoidance
Psychol
Parental
Violence
.18**
.66
Evt1
Evt2
Evt3
.87
.88***
.65***
R2 = .19
Satisfaction
Cohésion
.54
.97***
-.61***
Fit (Robust) : NFI = .96, NNFI = .98, CFI = .98, RMSEA = .03 (90% C.I. = .02, .04), X2/df = 1.62
**p < .01. *** p < .001
Différences entre
les femmes et les hommes
• Peu de différences
• Invariance : résultats indiquent que le modèle
représentent bien les données des H et des F
(multi-genre modèle) (CFI = .99, NFI = .94, NNFI = .99,
RMSEA = .02 with 90% C.I. = .01, .03, and x2/df = 1.09).
• Aucune différence significative; même
étiologie
La dynamic du couple :
Modèle APIM
• Explore les associations entre les variables de
partenaires et les effets d’un conjoint sur l’autre
F Anxiété
.16
.13
-.24
.29
F violence enfance
F Violence
.20
F DAS
-.65
F Évitement
.31
.14
-.33
.18
.18
H violence enfance
.14
-.30
H Anxiété
.21
H Évitemen
-.21
H Violence
.34
H DAS
-.57
Mutualité
F Anxiété
F violence enfance
R2 = .15
F Violence
F DAS
F Évitement
.79
variance de la
violence non
expliquée par le
modèle
H Anxiété
H violence enfance
H Violence
H Évitemen
R2 = .28
H DAS
DISCUSSION ET
CONCLUSION
Discussion
• Recommandations en clinique :
– Évaluer la dynamique de couple, l’Axe II et l’attachement
– Formater : Individualiser l’offre de services
– Séquence : Adopter une approche séquentielle allant de
l’arrêt d’agir à la modification des capacités de régulation
des modèles opérants internes
– Légaliser et refuser de traiter : Dans certains cas, le
traitement de choix est d’offrir aucun traitement
psychosocial
– Intensité et durée : Prolonger la durée (ou l’intensité) du
traitement psychosocial. La plupart des programmes de
traitement offert sont de trop courte durée pour pouvoir
adresser les enjeux de personnalité et d’attachement...
Implications pratiques
• Différentes approches selon la dynamique
sous-jacente
– Individus anxieux doivent apprendre à gérer leur
angoisses abandonniques autrement que par la
reprise de contrôle agressif sur l’autre
– Individus évitant doivent reconnaître leur besoins
émotionnels et d’attachement; briser le déni de la
dépendance à l’autre (voir Sonkin & Dutton, 2003)
Merci à nos collaborateurs
•
•
•
Dr. Donald Dutton, UBC
Dr. Stéphane Sabourin, ULaval
Dr. Yvan Lussier, UQTR
Questions ?
• Pour nous contacter :
Natacha Godbout, Ph.D., Psychologue
Professeure
UQAM
Courriel : [email protected]
Sébastien Bouchard, Ph.D., Psychologue
Professeur
TELUQ
Courriel : [email protected]
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