Aucun titre de diapositive - Cégep de Lévis

publicité
Pythagore
Des triplets au théorème
Vers ~569 à ~475
Montage préparé par :
André Ross
Professeur de mathématiques
Cégep de Lévis-Lauzon
Introduction
La cohérence est une des exigences fondamentales dans la
construction de la connaissance. On ne peut conserver deux
théories qui se contredisent, il faut faire un choix, ou tout
recommencer.
Les pythagoriciens ont été confrontés à un tel choix lorsqu’ils
ont constaté que le théorème de Pythagore venait en
contradiction avec leur théorie de la commensurabilité.
Dans cet présentation, nous allons voir les origines du
théorème de Pythagore ainsi que les recherches et résultats
obtenus dans le cadre de la théorie de la commensurabilité.
Puis nous verrons comment ces deux composantes de la
pensée pythagoricienne se sont révélées incompatibles.
Triplets pythagoriciens
Durant ses voyages, Pythagore avait appris la propriété
suivante :
Les triangles dont les mesures des côtés sont proportionnelles aux nombres 3, 4 et 5 sont rectangles.
Il semble que les égyptiens savaient que l’on
peut former un angle droit à l’aide d’une
corde sur laquelle des nœuds marquent les
longueurs 3, 4 et 5. Il suffit de disposer la
corde pour former un triangle dont les nœuds
seront les sommets.
Cette propriété était connue également des
babyloniens comme en témoigne la tablette
d’argile appelée Plimpton 322.
Relation entre les nombres
Les pythagoriciens, habitués à la représentation ponctuelle
des nombres, pouvaient facilement détecter des relations
intéressantes du carré de ces nombres.
Par exemple, le carré du plus petit de ces nombres est le
gnomon du carré du second pour donner le carré du plus
grand des trois.
Ce qui, en écriture moderne,
donne :
32 + 42 = 52
9 est le gnomon de 16 et, en
lui ajoutant ce gnomon, on
obtient le nombre carré 25.
Relation entre les nombres
Les pythagoriciens ont tout naturellement cherché à
connaître tous les nombres carrés décomposables en une
somme de deux carrés.
Puisque le gnomon d’un nombre carré est toujours un nombre
impair, il faut chercher les nombre carrés qui sont impairs.
Le nombre carré impair suivant est
25. On peut donc le disposer pour
former le gnomon d’un autre nombre
carré.
Le gnomon est 25, soit 52, et la
représentation par des points de ce
nombre permet de trouver un autre
triplet, soit :
122 + 52 = 132
Généralisation
Utilisons une écriture moderne pour voir comment ils ont
généralisé cette approche.
Ils avaient montré que tout nombre carré, n2, est la somme
du nombre carré (n – 1)2 et du gnomon (2n – 1), soit :
n2 = (n – 1)2 + (2n – 1),
Il leur suffisait donc de déterminer les nombres impairs qui
sont des carrés. C’est-à-dire les nombres m tels que :
m2 = (2n – 1).
Connaissant un nombre impair qui est un carré, il est alors
facile de trouver les trois nombres du triplet.
Par exemple, 49 est un nombre impair carré et, en posant :
m2 = (2n – 1) = 49,
on trouve m = 7, n = 25 et n – 1 = 24 et on a la relation :
252 = 242 +72.
Relation de Pythagore
De façon générale, si m2 est un nombre impair, alors
m2 = (2n – 1) et on a :
m2  1
n
2
2
m
1
En posant (2n – 1) =
et n 
2
dans l’expression n2 = (n – 1)2 + (2n – 1), on obtient :
m2
2
2
2
2
m  1 m  1 

  
  m 2
–
1
 2   2

Relation de Pythagore
Si m est un nombre entier impair plus grand ou égal à 3,
alors :
2
2
2
2
m  1 m  1 

  
  m 2
–
1
 2   2

est un triplet pythagoricien
Relation de Platon
L’inconvénient de cette généralisation, c’est que m doit être
un nombre impair plus grand ou égal à 3. On échappe
probablement plusieurs triplets car en prenant quatre fois un
même nombre carré, on forme un autre nombre carré.
Cette démarche graphique se
traduit symboliquement en multipliant par 4 les deux membres
de l’équation :
32 + 42 = 52
Ce qui donne :
4x32 + 4x42 = 4x52
22x32 + 22x42 = 22x52
(2x3)2 + (2x4)2 = (2x5)2
62 + 82 = 102
On obtient ainsi un triplet qui nous échappait par la relation
de Pythagore.
Relation de Platon
Généralisons en multipliant par 4 les deux membres de la
relation de Pythagore, soit
2
2
m 2  1 m2  1 

  
  m 2
–
1
 2   2

2
2
m2  1
m 2  1 
On obtient :
  4
  4m 2
4
–
1
 2 
 2

2
2
 m 2 1  m 2 1 
D’où :
2x
  2x
  (2m2 )
–
1


2  
2
En simplifiant : (m2 + 1)2 = (m2 – 1)2 + (2m)2
Relation de Platon
Si m ≥ 2 est un nombre entier, alors
(m2 + 1)2 = (m2 – 1)2 + (2m)2
est un triplet pythagoricien.
Euclide et les triplets
Dans le premier lemme de la proposition 29 du Livre X,
Euclide s’intéresse lui aussi aux triplets pythagoriciens. Ce
lemme, qui explique comment procéder pour trouver des
triplets, s’énonce comme suit :
Choisir deux nombres plans semblables qui sont tous deux
pairs ou tous deux impairs. Leur différence est alors un
nombre pair, le diviser par 2. Puisqu’ils sont semblables, leur
produit est un carré et celui-ci additionné au carré de la
moitié de leur différence donne un carré.
Rappelons que, pour les grecs, un nombre
plan est un produit de deux nombres et il
représente l’aire d’un rectangle. Ainsi, 6
est un nombre plan.
Euclide et les triplets
Des nombres plans sont semblables
si leurs côtés sont proportionnels.
Ainsi, les nombres 96 et 54 sont
des nombres plans semblables et ils
sont tous deux pairs.
La différence de ces nombres est 42, la moitié de celle-ci
est 21 et son carré est 441.
Le produit des deux nombres est 54 x 96 = 5184 = 722.
La somme de ces carrés est 5184 + 441 = 5625 = 752. On
obtient donc le triplet pythagoricien :
722 + 212 = 752
Relation d’Euclide
On peut généraliser en suivant le conseil d’Euclide :
Choisissons donc deux nombres
semblables et de même parité :
plans
a = m2pq et b = n2pq, deux nombres plans
semblables, tels que a > b (ou m > n).
Leur différence est alors un nombre pair, leur produit est un
carré et celui-ci additionné au carré de la moitié de leur
différence donne un carré.
En simplifiant l’équation obtenue en effectuant cette somme,
on trouve :
Relation d’Euclide
Soit m > n des nombres entiers, alors
(m2 + n2)2 = (m2 – n2)2 + (2mn)2
forme un triplet pythagoricien.
Relation d’Euclide
Remarques
Dans la forme finale de la relation d’Euclide, on n’a pas à se
préoccuper de la similitude des nombres plans car les
facteurs communs ont été simplifiés. Il suffit de considérer
deux nombres positifs m et n tels que m > n.
Ainsi, en posant m = 3 et n = 2, on trouve :
132 = 52 + 122.
On remarque de plus qu’en posant n = 1 dans la relation
d’Euclide, on obtient la relation de Platon et en divisant celle
de Platon par 4, on obtient celle de Pythagore.
Théorème de Pythagore
Pour les pythagoriciens, les produits
de nombres représentaient des aires
de rectangles et les nombres carrés
représentaient des aires de carrés.
La relation entre les carrés des
nombres est donc la manifestation
d’une relation entre les aires des
carrés construits sur les côtés d’un
triangle rectangle.
Cette propriété nous est connue sous l’appellation Théorème
de Pythagore.
Aire d’un parallélogramme
Si les pythagoriciens disposaient d’une démonstration générale
de ce théorème, elle était probablement basée sur le fait
que l’aire d’un parallélogramme est égale à l’aire du rectangle
ayant même base et même hauteur.
Si, à partir des extrémités d’un
côté du parallélogramme, on trace
des
perpendiculaires
au
côté
parallèle à celui choisi, on forme
des triangles égaux.
Il est alors simple de montrer que l’aire du parallélogramme
est égale à celle du rectangle de même base et de même
hauteur.
Remarque
Dans l’illustration, nous avons choisi un côté horizontal pour
tracer les perpendiculaires au côté parallèle, mais cela n’est
pas obligatoire.
Démonstration du théorème
Théorème de Pythagore
L’aire du carré construit sur l’hypoténuse d’un triangle
rectangle est égale à la somme des aires des carrés
construits sur les côtés de l’angle droit.
Voyons
Ces
parallélogrammes
comment,
on
peut
ont même
démontrer
aire
La
Du
perpendiculaire
sommet
A
du
triangle,
abaissée
abaissons
divise
le
On
peut
déplacer
ces
paralce résultat
que
les
carréspar
construits
les
aires
sur les
de
une
carré
perpendiculaire
construit
sur
l’hypoténuse
à
l’hypoténuse
en
lélogrammes
par droit.
translation
pour en
parallélogrammes.
côtés
de
l’angle
Considérons
un
et
deux
prolongeons
rectangles.
cette
Ceux-ci
perpendiculaire
ont
même
faire
coïncider
les côtés
aveccarrés
ceux
triangle
rectangle
et
les
jusqu’à
aire
que
salesrencontre
parallélogrammes
avec demeure
le dont
côté
du
triangle.
L’aire
construits
sur carré
les
côtés.
opposé
les
côtés
du
sont
parallèles
construit
aux côtés
sur
constante.
Ce quil’angle
complètedroit
la démonstration.
l’hypoténuse.
de
du
triangle
rectangle.
Commensurabilité
Il est à remarquer que le rapport 7/4, pour les grecs, n’est
pas un nombre. C’est une qualité qu’ont en commun les deux
segments.
Inversons le problème. Si deux
segments quelconques GH et IJ sont
donnés, peut-on toujours trouver un
segment qui soit commune mesure de
GH et IJ?
C’est à-dire, peut-on trouver un segment KL de telle sorte
qu’il soit possible de reporter un nombre entier de fois la
longueur de KL sur les segments GH et IJ? C’est loin d’être
évident, mais les pythagoriciens croyaient que oui. Pour eux,
les segments de droites sont formés de parties indivisibles,
les points, dont le nombre peut être indéterminé mais le
rapport des segments, qui est le reflet du nombre de ces
points, peut être connu.
Commensurabilité
Ce qui se profile derrière le postulat de la commensurabilité,
c’est la structure même de la matière et du temps. La
matière et le temps sont-ils constitués de grains indivisibles,
ou, au contraire, sont-ils continus et infiniment divisibles?
Les pythagoriciens étaient convaincus qu’ils étaient constitués
de grains indivisibles. Cette conviction les a encouragés à
poursuivre leurs recherches pour expliciter le rapport des
segments de figures géométriques sous forme de proportions.
Pour eux, la connaissance de l’univers passe par la découverte
du rapport entre les grandeurs des figures géométriques.
Cette quête était assez exigeante mais les nombreux
résultats de proportionnalité de figures semblables semblaient
entériner leur conviction.
Diagonale et côté du carré
Les recherches des pythagoriciens pour déterminer le rapport
de la diagonale du carré et de son côté, ont connu une
conclusion qui a sapé les fondements de leur conception de
l’univers.
En effet, ils ont découvert qu’il est impossible d’exprimer le
rapport de la diagonale et du côté du carré comme quotient
de nombres entiers.
Pour les pythagoriciens qui avaient la conviction que toutes
les grandeurs sont commensurables, cela était un dur coup.
Deux parties importantes de leur enseignement, la
commensurabilité des grandeurs de même nature et le
théorème de Pythagore se révélaient incompatibles à
l’intérieur d’un simple carré.
Cette découverte serait l’œuvre du pythagoricien Hippasus de
Métaponte vers 430 av. J.-C.
Raisonnement d’Hippasus
En supposant que la diagonale et le
côté sont commensurables, leurs
longueurs
s’expriment
par
des
nombres entiers dans l’unité de la
plus grande commune mesure des
deux segments. Les entiers mesurant la diagonale et le côté sont
donc les plus petits possibles,
c’est-à-dire que ces nombres n’ont
pas de facteur commun.
Puisque l’aire du carré AEFC est le double de l’aire du carré
ABCD, l’aire du carré AEFC est donnée par un nombre pair
(ce qui signifie pour Hippasus qu’il comporte un nombre pair
de points mais cela n’est pas indispensable ici).
Raisonnement d’Hippasus
Cependant, le carré d’un nombre
impair ne peut jamais donner un
nombre pair. La longueur de la
diagonale est donc donnée par un
nombre pair.
Puisque le carré d’un nombre pair
est divisible par 4, l’aire du carré
AEFC est divisible par 4.
Cette aire étant le double de celle du carré ABCD, l’aire du
carré ABCD est également donnée par un nombre pair. Par
conséquent, la longueur du côté du carré ABCD est également
donnée par un nombre pair. La diagonale et le côté du carré
ont donc un facteur commun. Cela contredit le fait que les
nombres n’ont pas de facteur commun.
Raisonnement d’Hippasus
Cette
contradiction
vient
de
l’hypothèse
selon
laquelle
la
diagonale et le côté du carré ont
une commune mesure. Il faut donc
rejeter cette hypothèse. La diagonale et le côté du carré sont
donc incommensurables.
Cette démonstration a eu un impact majeur sur la philosophie
pythagoricienne. Cela signifie qu’il existe des grandeurs non
commensurables, et pas n’importe quelles longueurs, la
diagonale et le côté du carré, des grandeurs qui pourtant
sont reliées par le théorème de Pythagore. De plus, c’est la
première démonstration par l’absurde dans l’histoire. Ce n’est
pas la dernière.
Conclusion
L’étude des rapports et proportions entreprise par les
pythagoriciens s’est révélée pleine de surprises. Ils ont
démontré plusieurs propriétés des figures géométriques mais,
ils ont également découvert qu’il est impossible d’exprimer le
rapport de la diagonale et du côté du carré comme rapport
de deux nombres entiers.
Tant qu’ils n’avaient pas réussi à déterminer un tel rapport, il
pouvaient garder espoir. Si on ne réussit pas à exprimer le
rapport de deux longueurs comme quotient de deux entiers on
ne peut pas pour autant conclure que ce rapport est
impossible. Pour tirer une telle conclusion, il faut démontrer
que cela est effectivement impossible, ce qui est beaucoup
plus exigeant. C’est ce que Hippasus a fait pour le rapport de
la diagonale du carré à son côté.
Conclusion
Cette découverte a porté un dur coup aux pythagoriciens, car
elle détruisait le fondement de leur conception de l’univers. Ils
n’en ont pas nécessairement vu les implications tout de suite.
Pour être convaincu par une démonstration, il faut prendre le
temps d’y réfléchir, de la critiquer, de voir si elle n’a pas de
faille. Une fois convaincu, il fallait faire un choix entre le
théorème de Pythagore, qui avait fait l’objet d’une
démonstration, et le postulat de la constitution granulaire de
la matière et du temps. Le théorème a survécu.
Par sa démonstration, Hippasus a introduit une nouvelle façon
de s’assurer de la cohérence de la connaissance, la
démonstration par l’absurde. Lorsqu’une hypothèse entraîne
une contradiction avec un résultat préalablement démontré, il
faut rejeter l’hypothèse.
Conclusion
Mais alors, qu’advient-il de tous les résultats
proportionnalité obtenus à partir de ce postulat?
de
La théorie des proportions qui ne pouvait plus se fonder sur
la commensurabilité a été formulée autrement par Eudoxe de
Cnide (408 à 355 av. J.-C) qui fut élève de Platon (vers
427-348 av. J.-C.) et du pythagoricien Archytas de Tarente
(vers 430 av. J.-C.).
Les travaux d’Eudoxe ont été repris et complétés par Euclide
avec qui la théorie des proportions se dégage complètement
du postulat de la commensurabilité. Ce postulat avait
cependant permis de développer un impressionnant corpus de
connaissances qui a été préservé en utilisant d’autres
fondements.
Bibliographie
Ball, W. W. R. A Short Account of History of Mathematics, New York, Dover
Publications, Inc.,1960, 522 p.
Boulger, William, Pythagoras meets Fibonacci, Matematics Teacher, April 1989
Boyer, Carl B. A History of Mathematics, New York, John Wiley & Sons, 1968,
717 p.
Collette, Jean-Paul. Histoire des mathématiques, Montréal, Éditions du Renouveau
Pédagogique Inc., 1979, 2 vol., 587 p.
Cuomo, S. Ancient Mathematics, London and New York, Routledge, Taylor and
Francis Group, 2001, 290 p.
Davis, Philip J, Hersh, Reuben, Marchisotto, Elena Anne. The Mathematical
Experience, Study edition, Boston, Birkhäuser, 1995, 485 p.
Dunham, William. The Mathematical Universe, New York, John Wiley & Sons, Inc.,
1994, 314 p.
Duvillé, Bernard, Sur les traces de l’Homo mathematicus, Les mathématiques avant
Euclide, Paris, Ellipses Éditions Marketing, S.A., 1999, 461 p.
Eves, Howard. An Introduction to the History of Mathematics, New-York, Holt
Rinehart and Winston, 1976, 588 p.
Bibliographie
Fowler, D.H. The Mathematics of Plato’s Academy, a New Reconstruction, Oxford,
Oxford University Press, 1990, 401 p.
Guedj, Denis, Le Théorème du Perroquet, Paris, Éditions du Seuil, 1998, 520 p.
Kline, Morris. Mathematical Thought from Ancient to Modern Times, New York,
Oxford University Press, 1972, 1238 p.
Kramer, Edna E. The Nature and Growth of Modern Mathematics, New York,
Hawthorn Books, Inc. Publishers, 1970, 758 p.
Smith, David Eugene. History of Mathematics, New York, Dover Publications, Inc.
1958, 2 vol. 1 299 p.
Struik, David. A Concise History of Mathematics, New York, Dover Publications, Inc.
1967, 195 p.
Vitrac, Bernard, Euclide, Les éléments, quatre volumes, traduits du texte de
I.L.Heiber, Presses Universitaires de France, Paris, 1990, 1994, 1998, 2001.
http://www-groups.dcs.st-and.ac.uk/~history/
Fin
Téléchargement