REPUBLIQUE ALGERIENNE DEMOCRATIQUE ET POPULAIRE Ministère de l’enseignement Supérieur et de la recherche Scientifique Université BADJI MOKHTAR – ANNABA Département de Chirurgie dentaire Service de Pathologie Bucco dentaire La Prévention de L’ostéoradionécrose Encadré par: Présente par: DR. R. SAAD-SAOUD Saadi Abderraouf Année Universitaire: 2007/2008 1- Introduction L’ostéoradionécrose des maxillaires est une complication bien connue des radiations ionisantes utilisées dans le traitement des cancers de la région cervicofaciale. L’ostéoradionécrose en tant que complication de la radiothérapie a été décrite la première fois par Regaud en 1922. En stomatologie, Elle est principalement retrouvée au niveau mandibulaire, elle est exceptionnelle au niveau maxillaire. La prise en charge de cette pathologie est une priorité dans la mesure où il s’agit de patients guéris de leur pathologie carcinomateuse initiale. Il s’agit néanmoins d’une prise en charge très difficile en raison des antécédents lourds de ces patients et de l’altération des capacités de cicatrisation des tissus irradiés. De plus, l’atteinte qualitative et quantitative de la vascularisation cervicofaciale réduit les possibilités de reconstruction microchirurgicale. 2-Définition de l’ostéoradionécrose Depuis 1922, différents auteurs ont proposé plusieurs définitions de l’ostéoradionécrose des maxillaires. Store apporte une définition radiologique de l’ostéoradionécrose : « présence de signes radiologiques de nécrose osseuse au sein d’un champ d’irradiation, une récidive tumorale ayant été écartée ». En définitive, l’ostéoradionécrose est une nécrose osseuse secondaire aux radiations ionisantes utilisées à des fins thérapeutiques. Il s’ensuit une altération des capacités de défense et de cicatrisation du tissu osseux mandibulaire ou maxillaire 3- Épidémiologie 3-1 Âge et sexe - L’âge de survenue de l’ostéoradionécrose se situe aux alentours de 55 ans - La prédominance masculine est nette, avec cependant une tendance à l’augmentation de la part féminine (moins de 10 % en 1970, 13 % en 1985). Cette évolution suit l’intoxication alcoolotabagique 3-2 Incidence de l’ostéoradionécrose -L’incidence réelle de l’ostéoradionécrose maxillomandibulaire est difficile à déterminer étant donné que les nombreuses études réalisées mentionnent des chiffres variant de 0 à 43 % des patients ayant bénéficié d’une radiothérapie. 3-3 Délai d’apparition de l’ostéoradionécrose L’ostéoradionécrose fait suite à la radiothérapie. Le délai d’apparition est excessivement variable puisqu’il peut s’agir de quelques semaines après la fin de la radiothérapie jusqu’à plus de 30 années après. - - - Lorsque de la radiothérapie exclusive est effectuée, le délai d’apparition de l’ostéoradionécrose est significativement plus long que dans les cas d’association chirurgie et radiothérapie. La dose totale délivrée influe sur l’extension de l’ostéoradionécrose, mais pas sur le délai d’apparition de cette dernière D’après Marx, il existe deux types principaux d’ostéoradionécrose : - le type précoce (1 à 2 ans) faisant suite au traumatisme chirurgical, ou spontané en rapport avec une forte dose d’irradiation - le type tardif (après 3 ans) consécutif à un traumatisme endobuccal (avulsion, prothèse, biopsie, vestibuloplastie) sur des tissus fragilisés par les radiations ionisantes et présentant une hypovascularisation importante 3-4 Localisation de l’ostéoradionécrose: En chirurgie maxillofaciale et stomatologie, l’ostéoradionécrose peut se rencontrer au niveau des maxillaires, avec une très forte prédominance mandibulaire (20 à 30 fois plus fréquente). Cette constatation est supportée par une architecture osseuse et une vascularisation totalement différentes Au niveau maxillaire, les conséquences fonctionnelles et esthétiques sont souvent moins graves. L’ostéoradionécrose maxillaire est en général moins extensive et peut se traduire par une communication bucconasale ou buccosinusienne. Au niveau de la mandibule, l’ostéoradionécrose se développe préférentiellement au niveau de la région angulaire et de la branche horizontale. Cette zone est fragile en raison de sa vascularisation centromédullaire prépondérante. Figure 1. Vascularisation mandibulaire. S : Symphyse ; ADI : artère alvéolaire inférieure ; T : temporal ; M : masséter ; Ptl : ptérygoïdien latéral ; Ptm : ptérygoïdien mésial. 3-5 Facteurs déclenchants de l’ostéoradionécrose: 3-5 a- Ostéoradionécroses d’origine mécanique ou secondaire: L’apparition de l’ostéoradionécrose fait en général suite à l’odontoradionécrose ou à un traumatisme avec effraction muqueuse et exposition osseuse, y compris d’origine chirurgicale. Sur terrain irradié. ces traumatismes ou microtraumatismes mécaniques ou infectieux sont reconnus par tous les auteurs : • microtraumatismes par prothèse dentaire, brossage, alimentation. • odontoradionécrose et mauvais état buccodentaire ; • avulsions et soins dentaires ; • traumatisme chirurgical (biopsie, vestibuloplastie, implantologie, régularisation de crête, etc.). 3-5 b-Ostéoradionécroses d’origine spontanée: Selon Marx, 35 à 39 % des ostéoradionécroses ne seraient pas secondaires à un traumatisme, mais seraient spontanées, en rapport avec un défaut des capacités métaboliques de l’os irradié. Ce concept est depuis accepté et repris par d’autres auteurs qui trouvent en général des proportions sensiblement inférieures. 3-6 Facteurs favorisants de l’ostéoradionécrose: 3-6 a- Site et stade tumoral: On classe par ordre décroissant : langue, plancher buccal, mur alvéolaire, amygdale, voile du palais, palais dur, larynx, lèvres et glandes salivaires. 3-6 b- Doses élevées de radiations ionisantes: Le volume irradié et la dose reçue par la mandibule sont des facteurs de risque.34,39,40. En deçà de 60 à 65 Gy, le risque est très faible. Au-delà de 70 Gy, le risque augmente proportionnellement à la dose délivrée. Pour Beumer, le risque augmente significativement avec le volume recevant une dose supérieure à 65 Gy. Emami a estimé le risque d’ostéoradionécrose à 5 % à 5 ans pour un volume d’un tiers de la mandibule recevant 65 Gy, ou un volume supérieur recevant 60 Gy. Dans le cas d’une association radiothérapie externe/ curiethérapie, une dose totale supérieure à 80-90 Gy est un facteur de risque d’ostéoradionécrose. 3-6 c- Début précoce de la radiothérapie Le début de la radiothérapie avant la fin de la cicatrisation alvéolaire est un facteur favorisant. Un délai de 10 à 21 jours entre les avulsions dentaires et la radiothérapie est généralement admis. 3-6 d- Absence de protection des dents restantes: En l’absence d’hygiène buccodentaire stricte et de fluorothérapie, les dents restantes sont le siège de caries du collet allant rapidement vers la perte de la couronne. Les racines restantes constituent alors un facteur déclenchant d’ostéoradionécrose. Une prophylaxie fluorée quotidienne en cas de diminution importante de la production salivaire diminue significativement le risque de caries. 3-6 e- Dents restantes non saines les avulsions dentaires pratiquées après la radiothérapie sont considérées par de nombreux auteurs comme un facteur favorisant le développement d’une ostéoradionécrose. 3-6 f- Radiothérapie L’hypofractionnement (utilisation de dose par séance supérieure à 2 Gy) augmente significativement le risque d’ostéoradionécrose. Chez les patients traités selon un schéma hyperfractionné (plus d’une séance quotidienne) un intervalle d’au moins 6 heures doit être respecté entre les séances afin de permettre les réparations cellulaires des tissus sains ; 4- Description clinique: 4-1 Description classique La douleur est un des premiers signes cliniques retrouvés et celui qui demeure le plus invalidant durant toute la maladie. Faisant suite à la douleur, on note l’apparition d’une exposition osseuse endobuccale Figure 2. Exposition osseuse endobuccale au niveau de la branche horizontale gauche. . Si la maladie continue d’évoluer, l’ensemble de ces signes s’intensifie et s’étend. Ensuite, il est possible de voir des fistules, orostomes, expositions cutanées, section labiale et fracture pathologique avec exposition muqueuse ou cutanée Figure 3 . À gauche orostome, à droite, fracture pathologique, exposition osseuse cutanée et section labiale inférieure. 4-2 Modes de découverte Les modes de découverte sont multiples et pas forcément cliniques. La douleur est souvent présente en premier, avec ensuite l’exposition osseuse qui augmente la douleur. L’ostéoradionécrose peut également se découvrir fortuitement sur un panoramique de contrôle ou de suivi. 4-3 Examen clinique: Il faut notée: Les antécédents carcinologiques du patient ses habitudes alcoolotabagiques Le détail de la radiothérapie L’examen endobuccal soigneux doit permettre d’examiner l’ensemble de la muqueuse et de la denture. L’examen cervicofacial est très important afin de juger de la qualité des tissus, et pour rechercher des orostomes et des adénopathies. 4-4 Formes cliniques 4-4 a- Atteinte mandibulaire La localisation mandibulaire est prépondérante (97 % des cas). Le foyer est souvent unilatéral, en général situé au niveau de la branche horizontale ou de l’angle. Les formes bilatérales ont souvent une évolution asynchrone rendant difficile la prise en charge. En effet, lorsqu’un côté peut toujours être traité par des moyens conservateurs, l’autre peut nécessiter un traitement radical. 4-4 b- Atteinte maxillaire Cette localisation est très rare en raison de la nature même de l’os et de sa vascularisation. Par ailleurs, les conséquences fonctionnelles sont beaucoup moins invalidantes, notamment par l’absence d’orostome et de fracture pathologique. 5- Classifications de l’ostéoradionécrose: De très nombreuses classifications de l’ostéoradionécrose ont été proposées. Leur but étant de proposer une thérapeutique adaptée à chacun des stades. Classification de Store • stade 0 : ulcération muqueuse seule ; • stade I : lyse osseuse radiologique sans atteinte muqueuse ; • stade II : lyse osseuse radiologique associée à une dénudation muqueuse buccale ; • stade III : exposition intrabuccale d’os cliniquement nécrotique, et lytique radiologiquement, accompagnée d’une fistule cutanée et d’une infection. 6 Examens complémentaires 6-1 Radiologiques Le panoramique dentaire est l’examen radiologique conventionnel de référence permettant de visualiser l’ensemble de la mandibule et les organes dentaires. Le panoramique est en général prescrit pour vérifier l’état dentaire, rechercher des causes de douleurs des maxillaires. De nombreuses ostéoradionécroses sont souvent dépistées à un stade précoce parfois paucisymptomatique, sans exposition osseuse mais avec une douleur insidieuse et une image de déminéralisation localisée. De plus, la résolution du panoramique dentaire est optimale dans la région de la branche horizontale qui est le siège le plus fréquent des ostéoradionécroses. La région symphysaire est mal visualisée en raison des superpositions rachidiennes Les signes radiologiques sont au départ une densification de la trame osseuse puis une ostéolyse mal limitée. Il est possible de voir des séquestres osseux ou des fractures pathologiques . Fracture pathologique bifocale de la branche horizontale droite avec séquestration. . Foyer d’ostéoradionécrose sur la branche horizontale gauche. 6-2 Scanner Il s’agit de l’examen de référence dans la prise en charge préet postopératoire d’un patient atteint d’ostéoradionécrose. De nombreux signes sont repérables avec notamment les limites d’atteinte corticale et spongieuse, les fractures, les fistules et orostomes, les atteintes des tissus mous. Le scanner mandibulaire apporte une précision beaucoup plus fine que le panoramique dentaire. Pour les stades précoces d’ostéoradionécrose, et notamment dans les cas de séquestres linguaux, la prescription d’un dentascanner peut constituer une alternative intéressante afin de juger des limites d’exérèse interruptrice ou non. Scanner mandibulaire horizontal, foyer d’ostéoradionécrose avec séquestre cortical interne au niveau de la branche horizontale gauche. 6-3 Imagerie par résonance magnétique L’imagerie par résonance magnétique (IRM) ne permet pas de visualiser l’os cortical aussi finement que le scanner. En revanche, la médullaire est relativement bien visualisée et surtout les tissus mous. L’IRM ne s’impose pas comme un examen de référence dans le diagnostic et le suivi de l’ostéoradionécrose. L’IRM n’apporte pas de renseignements supplémentairespar rapport au scanner.De plus, les délais d’obtention et les coûts étant supérieurs à ceux du scanner, l’IRM n’est pas prescrite dans le bilan de l’ostéoradionécrose en pratique courante. 6-4 Scintigraphie La scintigraphie osseuse au gallium 67 et téchnétium 99 permet une hyperfixation très sensible puisqu’elle identifie 100 % des ostéoradionécroses. Malheureusement, sa spécificité est très faible et ne permet pas de faire la distinction entre une ostéite, une ostéoradionécrose ou une récidive tumorale. Cet examen n’est pas utilisé en pratique courante pour le diagnostic de l’ostéoradionécrose. 7- Prevention de l'ostéoradionécrose Le traitement préventif de l’ostéoradionécrose est impératif. Chaque patient devant bénéficier ou ayant bénéficié d’une radiothérapie cervicofaciale doit faire l’objet de bilan et suivi rigoureux dans le cadre de l’ostéoradionécrose. 7-1 Traitement préventif odontologique 7-1 a Bilan dentaire avant irradiation Le bilan dentaire est clinique et radiologique (panoramique dentaire et rétroalvéolaire). La prévention dentaire est primordiale en matière d’ostéoradionécrose, la majorité des ostéoradionécroses étant déclenchées par traumatisme ou infection dentaire. La motivation du patient vis-à-vis de l’hygiène buccodentaire est déterminante. Il est possible de conserver toutes les dents saines et ne présentant pas de foyer infectieux, ainsi que les dents cariées en superficie ou présentant des soins endocanalaires. Chez des patients ne désirant pas se plier à une hygiène buccodentaire stricte (port de gouttières fluorées pour le restant de leur vie, suivi par le biais de consultations régulières), il peut être envisagé des avulsions préventives de dents cariées. La prophylaxie dentaire doit comprendre: • le traitement des foyers infectieux latents ou patents (kystes, granulomes, poches parodontales, dents mobiles, caries pénétrantes) ; • un détartrage complet avec soins des caries superficielles ; • la prise d’empreintes dentaires pour réalisation de gouttière de fluoration. Durant la radiothérapie, les prothèses amovibles ne sont pas portées en raison de la mucite radique. Ces prothèses pourront être réévaluées et adaptées après la fin des manifestations muqueuses. Les dents strictement incluses ou présentant des traitements endocanalaires bien conduits peuvent être conservées. Le problème se pose pour les dents sous-muqueuses ou incluses au contact du collet de la dent adjacente. Il est conseillé de les retirer pour éviter une surinfection. Les avulsions dentaires doivent être réalisées 21 jours avant le début de la radiothérapie pour s’assurer de la parfaite cicatrisation. Au fur et à mesure que ce laps de temps diminue, le risque augmente graduellement. Durant la radiothérapie et les 6 mois après sa fin, les avulsions dentaires sont vivement déconseillées. En somme, avant irradiation, il est préférable de retirer toutes les dents qui ne seront pas conservables durant le restant de la vie du patient. En effet, les avulsions dentaires après irradiation sont pourvoyeuses d’un plus grand taux d’ostéoradionécroses. 7-1 b Suivi dentaire après irradiation Le port des gouttières fluorées est reconnu par tous les auteurs. Le port commence dès la fin de la radiothérapie et des phénomènes de mucite radique, pour une durée de 5 minutes par jour. Du gel fluoré est disposé dans les gouttières thermoformées et appliqué directement sur l’ensemble de la denture. Les avulsions dentaires ou intervention sur la mandibule irradiée doivent être réalisées sous antibioprophylaxie. La suture doit se faire sans tension et être parfaitement étanche. Les fraisages ou sciages doivent s’effectuer avec irrigation abondante pour éviter l’échauffement du tissu osseux, à moins d’utiliserdes instruments non rotatifs ou à faible vitesse (gouge, râpe, scie à main). L’utilisation d’un pansement alvéolaire est actuellement un moyen d’optimiser l’étanchéité de la fermeture. L’utilisation de l’oxygénothérapie hyperbare est conseillée à titre préventif, mais elle n’est pas systématiquement utilisée pour des raisons logistiques et financières. L’oxygénothérapie hyperbare réalisée dans la période périopératoire aux avulsions dentaires permet de réduire significativement l’incidence d’ostéoradionécroses secondaires. 7-3 Traitement médical 7-3 a Antibiothérapie L’antibiothérapie systématique n’est pas indiquée, d’une part en raison de l’absence d’infection en profondeur au niveau des foyers d’ostéoradionécrose, et d’autre part en raison de la faible diffusion des antibiotiques dans les tissus ischémiés. En revanche, lors d’un geste chirurgical de quelque nature que ce soit sur une mandibule irradiée, l’antibiothérapie doit être instaurée. 7-3 b Anti-inflammatoires Les anti-inflammatoires peuvent être utilisés sous couvert d’antibiothérapie, lors des poussées inflammatoires. Il est possible d’utiliser des anti-inflammatoires de type non stéroïdien ou stéroïdien. 7-3 c Bains de bouche antiseptiques En cas d’exposition osseuse endobuccale, les bains de bouche antiseptiques sont utilisés. 7-3 d Antalgiques Les antalgiques sont indispensables afin d’atténuer la douleur. La prescription de morphiniques est tout à fait possible. 7-3 e Lutte contre la résorption osseuse et la fibrose Il s’agit d’une thérapeutique encore en cours d’évaluation. Son action est dirigée contre la fibrose et la résorption osseuse. Il s’agit d’une association médicamenteuse : • tocophérol (Toco 500 ®) × 2 : action antioxydante sur la fibrose constituée ; • pentoxifylline (Torental®) 400 × 2 : prévient la fibrose radio-induite, augmente la déformabilité des globules rouges, vasodilatateur, fibrinolytique, antiagrégant plaquettaire. Favorise l’oxygénation des tissus ; • biphosphonate clodronate (Clastoban®) 800 × 7 ; 5 jours sur 7 : activité antiostéoclastique, permettant de limiter la résorption osseuse. Ce traitement semble actif sur l’ensemble des tissus irradiés. Il s’agit d’une perspective médicamenteuse intéressante qui a déjà montré son efficacité. Il ne s’agit néanmoins que d’un traitement adjuvant à proposer aux stades peu avancés de la pathologie. La seule réserve est constituée par l’utilisation des biphosphonates (cf. supra « Physiopathologie »). 7-4 Oxygénothérapie hyperbare L’ostéoradionécrose des maxillaires est une indication reconnue de l’oxygénothérapie hyperbare. Les résultats positifs de la prise en charge associant l’oxygénothérapie aux protocoles d’oxygénothérapie hyperbare sont nombreux dans la littérature. Principes de l’oxygénothérapie hyperbare Le principe de l’oxygénothérapie hyperbare consiste en une augmentation des pressions tissulaires d’oxygène par une hyperoxygénation sanguine obtenue grâce à l’exposition du patient à une pression de 2 à 3 atmosphères sous 100 % d’oxygène. Indications et contre-indications de l’oxygénothérapie hyperbare . Les contre-indications absolues pneumothorax non drainé, crise d’asthme en évolution. .contre-indications transitoires : otite et obstruction tubaire, sinusite, épisode infectieux bronchopulmonaire .Certaines conditions ne sont pas des contre-indications, mais incitent à renforcer la surveillance en cours de séances : bronchopathie chronique obstructive, coronaropathie, antécédents d’épilepsie, états psychiatriques aigus. . Les indications de l’oxygénothérapie hyperbare dans le cadre de l’ostéoradionécrose sont : les avulsions dentaires et la chirurgie d’exérèse avec reconstruction. Il est également licite de penser que l’implantologie en milieu irradié puisse bénéficier de cette thérapeutique. 7-5 Traitement chirurgical L’ostéoradionécrose se développe en général sur la mandibule, mais il ne faut pas oublier que les tissus mous adjacents ont également été irradiés. C’est pourquoi l’utilisation des capacités de cicatrisation des tissus locorégionaux n’est pas conseillée. Traitement chirurgical conservateur Cette technique relativement ancienne consistait à perforer le foyer d’ostéoradionécrose afin de le faire bourgeonner et d’éviter le curetageséquestrectomie. Cette technique est bien évidemment dépassée et déconseillée. Curetages, séquestrectomies Réalisés aux stades II et III de la classification de Marx et Myers, les curetages ou séquestrectomies n’ont pour but que de retirer les tissus totalement nécrosés et de laisser traditionnellement un tissu osseux saignant. La voie d’abord est en général limitée et endobuccale. La fermeture doit être obtenue sans tension. Il peut être nécessaire d’utiliser un lambeau de recouvrement. Lambeaux de recouvrement Ces derniers peuvent être utiles pour les patients qui ne peuvent pas bénéficier de microchirurgie ou qui ont conservé une hauteur mandibulaire suffisante, et qui donc ne nécessitent pas de reconstruction osseuse. Le lambeau nasogénien, le lambeau pédiculé de pectoralis major, lambeau de temporal ou pédiculé de grand dorsal peuvent aider à recouvrir une dénudation osseuse après curetage appuyé. Résection interruptrice Le premier problème posé par la résection interruptrice est son indication dans l’évolution de la maladie. Initialement, les seules indications retenues étaient l’absence de réponse au protocole conservateur, l’existence d’une douleur incontrôlable et une fracture pathologique. Le deuxième problème posé par la résection interruptrice est celui de la définition des marges d’exérèse. Les règles de résection sont alors guidées d’une part par les constatations radiologiques (panoramique dentaire, scanner, IRM, scintigraphie), mais seule la constatation peropératoire donne la décision finale. Ainsi, la résection se fait en os cliniquement sain et saignant normalement avec une marge d’au moins 1 cm. Autres traitement chirurgicales Reconstruction d’une exérèse interruptrice Plaque de reconstruction Greffes osseuses pédiculées Greffe osseuse libre non vascularisée Reconstruction microanastomosée Microchirurgie en terrain radique. Lambeau libre ostéo-myo-cutané de fibula. Lambeau libre de crête iliaque Lambeau libre de radius. Lambeau serratocostal libre. Lambeau brachial externe. Lambeau de scapula et parascapulaire. 8- Conclusion L’ostéoradionécrose est une complication majeure de la radiothérapie. Cette dernière est cependant incontournable dans le traitement des carcinomes des VADS. Quoi qu’il en soit, il ne faut pas oublier que la pire des complications dans le traitement des carcinomes des VADS reste la récidive ou la poursuite évolutive du néoplasme. La prise en charge de l’ostéoradionécrose est chirurgicale avant tout. Le traitement chirurgical conservateur peut s’envisager tant que la hauteur osseuse résiduelle est suffisamment importante. En revanche, en cas d’atteinte de toute la hauteur mandibulaire, quelle que soit la longueur intéressée, le traitement doit faire appel à une résection interruptrice.Le plus difficile est de poser l’indication de résection interruptrice avec reconstruction sans attendre une complication du type fracture pathologique, exposition cutanée ou orostome. L’oxygénothérapie hyperbare joue un rôle prépondérant dans la stratégie thérapeutique en matière de prévention périopératoire et devrait toujours être envisagée étant donné que ses indications sont reconnues. Le premier traitement de l’ostéoradionécrose est constitué par la prévention à l’aide de la remise en état de la cavité buccale et des modalités de radiothérapie. Les traitements médicaux et l’oxygénothérapie ne sont que des traitements adjuvants ou réservés aux stades très précoces de la pathologie. Seul le traitement chirurgical permet l’éradication de la pathologie, sur terrain radique la reconstruction microanastomosée demeure alors la thérapeutique de choix.