CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE D'ANGERS Prise en charge de l’obésité en consultation de médecine générale FMC Ambroise Paré Angers 17 décembre 2013 Docteur Agnès Sallé Département d’Endocrinologie-Diabétologie-Nutrition CHU Angers Première difficulté : aborder le surpoids et l’obésité en consultation de médecine générale Les constats En France en 2012 Enquête auprès de 641 médecin généralistes de Maine et Loire Mayenne et Sarthe en 2011 : - en moyenne 8 patients obèses vus la semaine précédent l’enquête - 72,4 % des patients consultaient pour un motif autre que l’obésité - 19,5 % consultaient spécifiquement pour leur obésité Et pourtant les conséquences sont connues Comment aborder cette pathologie quand le patient vient pour autre chose au stade de la prévention ? - Le sensibiliser : intérêt d’une pesée en sous vêtements à chaque consultation avec calcul du l’IMC et interprétation de la corpulence avec le patient. - Ne pas avoir peur des mots : obésité ce n’est pas surpoids, préciser le stade modérée, sévère, morbide prise de conscience. - Visualiser l’évolution du poids et de l’IMC : courbe à montrer au patient - Lui demander : - ce qu’il en pense, - ce qu’est pour lui l’obésité - Est-ce que quelque chose dans son hygiène de vie peut selon lui expliquer cette évolution du poids - A-t-il déjà essayer de changer quelque chose ? - Souhaite-t-il être informé sur la maladie obésité? SENSIBILISER ET IMPLIQUER LE PATIENT Avancer progressivement de consultation en consultation Que souhaitent les patients ? - Souhaitent-ils être informés des complications auxquelles ils s’exposent ? - Est-ce que ça pourrait les sensibiliser et les aider à être à l’écoute des conseils hygiéno-diététiques et les motiver pour les suivre ? Thèse de médecine générale en cours Qu’est ce que la maladie obésité ? Des mécanismes de développement et des facteurs étiopathogéniques à la prise en charge L’obésité est la conséquence d’une Balance énergétique positive 10 La Balance énergétique Différence entre les - entrées d’énergie (prises alimentaires qui sont intermittentes) et -les dépenses énergétiques (permanentes et variables) Régulation Energétique Entrées Sorties L AP TPP G P stable + - MR 11 Les postes de dépense énergétique Activité physique Thermogenèse postprandiale Métabolisme de repos 0 10 20 30 40 50 60 Dépense énergétique (%) Sujet sédentaire : Métabolisme de repos = 60 à 75 % de la dépense énergétique totale 12 Bilan d’énergie Régulation Energétique Masse grasse stockée Gain de poids fait pour 2/3 de masse grasse et pour 1/3 de masse maigre Entrées Sorties L AP TPP G P stable + - MR L : lipides ; G : glucides ; P : protéines AP : activité physique ; TPP : thermogenèse postprandiale ; MR : métabolisme de repos 13 Facteurs influençant la balance énergétique L’alimentation Le Métabolisme L’activité - Sociaux culturels - Age - Sociaux culturels - Biomédicaux - Sexe - Biomédicaux - Psychologiques - Génétiques - Psychologiques - Traitements - Hormonaux - Traitements - Masse musculaire - Traitements 14 Quels conseils donnés en cabinet de médecine générale ? - Quelle démarche suivre ? - Jusqu’où est-il possible d’aller ? La balance énergétique du patient obèse DEPENSES Stockage Lipidique ENTREES SEDENTARITÉ + DESEQUILIBRE ALIMENTAIRE • QUANTITATIF • QUALITATIF Lip Prot Gluc simples Gluc complets Effets de la prise en charge diététique isolée sur la composition corporelle MASSE GRASSE Repos (MB) MASSE MAIGRE Dépenses E Exercice - Effet métabolique transitoire - Perte de poids limitée et reprise pondérale rapide Intérêt d’une prise en charge globale sur la balance énergétique ENTREES DEPENSES Perte Ponderale ACTIVITÉ PHYSIQUE + EQUILIBRE ALIMENTAIRE Effets de l’activité physique MASSE GRASSE Repos (MB) MASSE MAIGRE Dépenses E Exercice 135 POIDS (KG) 130 125 Série1 120 115 110 M0 M2 M3 M6 M8 TEMPS M10 12 M18 M24 Des conseils diététiques simples L’alimentation équilibrée et diversifiée A PRIVILEGIER Pourquoi ? Qu’est ce que c’est ? Est-ce réalisable en pratique ? Bilan des substrats énergétiques A l’état d’équilibre, composition corporelle reste stable : La composition du mélange glucides/lipides ingéré (quotient alimentaire) doit refléter celle du mélange glucides/lipides oxydé (quotient respiratoire). Métabolisme des glucides complexes: - Capacités de stockage des glucides (glycogène) faibles (0,5 kg) - excès de glucides oxydé quand réserves de glycogène optimales - non stocké sous forme de triglycérides dans le tissu adipeux Métabolisme des lipides : - faible capacité d’oxydation des lipides ingérés - capacités de stockage sans limite, faible coût énergétique A apport énergétique constant une alimentation riche en graisse favorise l’inflation du tissu adipeux 22 Les règles de base Ne pas supprimer de repas Éviter le grignotage Éviter la surconsommation de charcuterie, de fromage Éviter la consommation fréquente d’aliments de l’agroalimentaire (pizza, hors d’œuvre…) Eviter de cuisiner avec beaucoup de matières grasses - Faire 3 repas par jour : - petit déjeuner (20-25% apport énergétique total) - déjeuner (35-40% AET) - dîner (30-35 % AET) - Boire régulièrement sur la journée - Bouger chaque jour le plus possible Trouver un compromis entre le tout « fait maison » et Le tout « plats préparés » Le moyen facile d’avoir une alimentation équilibrée : avoir des repères de consommations par groupe d’aliments Graisses 25-30% Protéines 12-15% Hydrates de carbone 55-60% Objectif de l’alimentation équilibrée : couvrir les besoins en nutriments, avoir un poids normal, éviter les perturbations métaboliques 1. Les glucides complets (produits céréaliers) : apports recommandés : 50-60 % de la ration calorique totale c’est le carburant de l’organisme. Recommandations pratiques : manger un féculent à chaque repas principal 3 portions par jour (si possible 2 sous forme de produit complet) 1 portion = 75 - 125g de pain 60 – 100 g de légumineuses (poids cru) 130 – 300 g de pommes de terre 45 – 75 g de pâtes, maïs ou riz (poids cru) Protéines, fibres alimentaires, vitamines du groupe B, sels minéraux (magnésium, fer, zinc) Produits céréaliers raffinés - Diminution de la teneur en nutriments essentiels - augmentation de la teneur en sucres rapides : stockés sous forme de graisse 2. Les lipides : très peu oxydés par l’organisme consommés en excès ils sont stockés dans la graisse ce stockage ne dépense pas d’énergie apports recommandés : 30 % de la ration calorique totale. Recommandations pratiques : limiter les graisses saturées : - charcuterie : 1 fois par semaine - fromage : 1 part par jour (30 g = 1/8 de camembert) - viennoiserie : 1 fois par semaine équilibre idéal : 1/3 AGS, 1/3 AGM, 1/3 AGP - graisses animales le matin (20-30 g/j) - graisses végétales midi et soir en variant les huiles (10 à 20 g/j) se méfier des graisses cachées : 3. Les protéines : indispensables au bon fonctionnement de l’organisme matière première pour la masse musculaire apports recommandés : 15 % de la ration calorique totale. Recommandations pratiques : une à 2 parts par jour limiter les viandes grasses : -canard, viande rouge, mouton, porc, viandes panées privilégier les viandes maigres : - volaille sans la peau, veau privilégier les poissons gras riches en oméga 3 : - maquereau, saumon, truite de lac, hareng, sardine 2 œufs remplacent une part de viande 4. Les fruits et légumes : 5 portions par jour 2 fruits minimum au moment du repas 2 à 3 portions de fruits et 3 à 2 portions de légumes - Compote ou jus d’orange pressé au petit déjeuner - Une crudité en entrée et un fruit en dessert au déjeuner - Un plat de légume et un fruit au dessert au dîner 5. Les produits laitiers : besoins en calcium de l’organisme 1000 à 1500 mg/jour 1 produit laitier à chaque repas tous les produits laitiers ne sont pas équivalents sources de calcium mais aussi de graisse Recommandations pratiques : 3 produits laitiers par jour 1part de fromage par jour 2 produits laitiers autres : - 1 verre de lait ½ écrémé - 1 yaourt, 1 fromage blanc, 2 petits suisses limiter les produits laitiers au lait entier et à la crème fraîche • Produits sucrés En quantité modérée 1 dessert sucré / semaine l’équivalent de 4 à 8 morceaux de sucre/jour • Boissons 1 à 1,5 litre d’eau /jour 1 verre de vin /repas Consommation modérée d’alcool : - inférieure ou égale à une boisson par jour pour les femmes et deux boissons par jour pour les hommes - une boisson = 36 cl de bière, 15 cl de vin à 12% et 4,5 cl d’alcool distillé Au final : On oublie le mot régime On oublie les restrictions On travaille sur la régularité et l’équilibre des repas dans un premier temps On évite de se resservir On ne supprime pas obligatoirement, on réduit Garder le plaisir de manger est essentiel Proposer de fractionner en cas de grignotage = couper les repas en deux et non rajouter Des conseils d’activité physique Activité physique recommandée Les données actuelles insistent sur l’importance : Des activités d’endurance (marche, vélo, natation), / renforcement musculaire. D’un programme individualisé aux capacités de chaque patient. D’une activité d’intensité modérée (3-6 METs, 4-7 Kcal/min) D’une activité physique régulière (7j/7) et progressive. D’augmenter également les activités de la vie quotidienne (tâches ménagères, escaliers, moins de voiture…) Comment prescrire l’activité physique ? 1. Argumenter la prescription : - c’est bon pour votre état de santé en général - ça va améliorer vos capacités physiques : - ce sera de plus en plus facile, - vous observerez une amélioration fonctionnelle dans la vie de tous les jours, - c’est aussi important que l’alimentation équilibrée 2. Demander au patient de quantifier l’activité : - Porter un podomètre en permanence - Noter quotidiennement le nombre de pas → progression = encouragement, motivation 3. Prescrire une activité adaptée 1. Au mode de vie / emploi du temps, (« je n’ai pas le temps ») 2. Aux goûts du patient (« j’ai horreur de courir, j’aime bien nager, faire du vélo ») 3. Activité physique sport 4. Se baser sur les capacités présentes (pouvez vous marcher sans douleur ? Faire du vélo? Combien de temps ?....) 5. Réalisable par tous les temps été comme hiver (vélo d’appartement, tapis de marche) 6. Intégrée à la vie quotidienne (aller travailler en vélo, descendre à un arrêt de bus plus tôt, marcher pendant la pause déjeuner….) 7. Capacités physiques 4. Recommandations sur l’Activité Physique Spécifique Aérobie (marche, vélo, natation) : ≥ 30 min 7 × sem. En continu Intensité modérée à dynamique « incapable d’aligner 3 mots en marchant» marche à 5 km/h. 3-5 min d’échauffement préalable augmenter progressivement le rythme jusqu’à l’intensité modérée. 3-5 min de récupération active diminuer progressivement le rythme jusqu’à l’arrêt de l’activité. 5. Recommandations sur l’Activité de la vie quotidienne : Aller acheter son journal ou son pain à pieds, laisser sa voiture un parking plus loin, sortir plusieurs arrêts de transport avant le sien. Bricoler, jardiner, cuisiner Ne pas prendre l’ascenseur ni les escalators Aller au travail en vélo Diminuer son temps de télévision, d’ordinateur, de lecture, de travaux manuels Principaux obstacles à la pratique de l’activité physique Importance de transmettre des messages positifs lors des consultations ultérieures (toujours un bénéfice de passer de l’absence d’activité à une activité physique même faible), Intérêt de proposer une stratégie pour améliorer la pratique de l’AP : proposer une prise en charge en groupe ( pb coût, image corporelle) Développer des ateliers spécifiques dans le cadre de l’éducation thérapeutique ? Au-delà de la prise en charge par le médecin généraliste si ça ne suffit pas : - les évaluations fonctionnelle nutritionnelles - et les programmes d’éducation thérapeutique Programme d’éducation thérapeutique ambulatoire « obésité et hygiène de vie » Préalable à l’entrée dans le programme Préciser le mécanisme de l’obésité, faire un diagnostic éducatif et orienter la prise en charge en proposant un programme personnalisé Rôle du médecin, de la diététicienne, de l’enseignant APA Mécanismes de l’obésité 1. Obésité environnementale : - erreurs alimentaires : saut de repas, hyperphagie, grignotage, alimentation déséquilibré (graisse et sucres simples) - activité physique insuffisante ou inexistante 2. Obésité métabolique : arguments pour un hypo métabolisme - restrictions antérieures sévères, diètes protéinées, - suspicion de sarcopénie : absence d’activité physique, pertes de poids antérieures sans activité physique Préalable à la prescription diététique - Identifier les connaissances du patient sur les relations entre ses habitudes alimentaires et sa maladie Obésité. - Rechercher des prise en charge antérieures : types, durée, résultats - Analyser les causes d’échec et de succès de ces prises en charge, - Analyser le vécu du patient : privation? Alimentation équilibrée = régime, Le mot régime est banni : connotation temporaire et restrictive - Analyser les habitudes alimentaires actuelles du patient - Amener le patient à identifier les plus grosses erreurs Préalable à la prescription d’activité physique - Identifier les connaissances du patient sur les relations entre activité physique et sa maladie Obésité. -Prendre connaissance de la pratique actuelle du patient. - Identifier les freins à la pratique : douleurs, manque de temps, n’aime pas, ne sait pas quoi faire, se sent incapable, regard des autres ... - Analyser le vécu du patient vis-à-vis d’expérience antérieure -Distinguer activité physique et sport (vécu antérieur douloureux), Conclusion de cette analyse Proposer un programme personnalisé adapté Suivi médical en EDN Cs diététiques individuelles Ateliers diététiques collectifs La « gym sans complexe » 1. Diététique : Diététicienne - améliorer les connaissances, avoir une alimentation équilibrée - réduire les quantités, arrêter de grignoter Cs individuelles, Ateliers : quantité, lecture des étiquettes, équilibre alimentaire 2. Activité physique : Enseignant APA - adaptée aux capacités fonctionnelles du patient, 3. Psychologique : Psychologue, psychiatre - hyperphagie émotionnelle, troubles du comportement alimentaire..... Programme d’éducation thérapeutique en hospitalisation de jour sur 5 semaines dans le département des soins de suite de Saint Barthélémy