CANCER DU SEIN ET DU COLON ET ACTIVITE PHYSIQUE ET SPORTIVE Pr Martine DUCLOS Service de Médecine du Sport, CHU G.Montpied Laboratoire de Nutrition Humaine, CRNH Université d’Auvergne Clermont-Ferrand USA : toutes les 1,5 minutes un nouveau cas de cancer sein ou colon diagnostiqué La prévention de la survenue de ces cancers : enjeu de Santé Publique pour lequel l’AP pourrait jouer un rôle. Nombreuses études : relation entre AP et cancer sein et colon Fonds Mondial de Recherche contre le Cancer (2009) : Sur les 10 millions de nouveaux cas de cancer/an, entre ¼ et 1/3 (dont 30% cancers sein et colon) pourraient être évités avec un mode de vie plus sain. ↑« Cancer survivors » « Après cancer du sein » 85% rémission complète à 5 ans tous stades confondus 35 000 nouvelles femmes « après cancer du sein »/an = 2 millions de femmes au total A facteurs pronostics identiques la survie après ttt d’un cancer est très variable → influence du mode de vie Or le mode de vie change souvent après ttt cancer Equivalent métabolique : MET 1 MET = dépense énergétique au repos, assis = 3,5 ml O2 consommé / kg poids / min ~ 1 kcal / kg / h Tables d’activité Ainsworth et al. Med Sci Sports Exerc 1993, 2000 Recommandations internationales : 3 MET x 2,5h = 7,5 à 10,5 MET.h/semaine ACTIVITE PHYSIQUE ET PREVENTION PRIMAIRE DU CANCER DU COLON ET DU CANCER DU SEIN PREVENTION PRIMAIRE CANCER du COLON Cancer pour lequel le plus d’évidences d’effet bénéfique AP 51 études : 43 études ↓ risque chez les sujets les + actifs → - 40-50% 29 études où dose-réponse étudiée : 25 :+,+ Rq / Cancer rectal Lee I MSSE 35: 1823-27, 2003 Roberts et Barnard J Appl Physiol 98: 3-30, 2005 Kruk et Aboul-Enein Asian Pac J cancer Prev 7: 11-21, 2006 Spence et al. Scand J Med Sci Sports 2009 Martinez et al. J Natl Cancer Inst 89: 948-55, 1997 RR: 0,69 = ↓31% ♂ RR: 0,72 ♀ RR: 0,68 Wolin et al. Br J cancer 100: 611, 2009 RR: 0,83 =↓17% ♂ RR: 0,81 ♀RR: 0,89 Méta-analyse ensemble des 52 études : AP →↓- 24% cancers colon Wolin et al. Br J cancer 100: 611, 2009 Effet AP indépendant de la nutrition Slattery et al. Med Sci Sports Exerc 34: 913-919, 2002 Etude prospective sur une cohorte Danoise 55 487 personnes : 50 à 64 ans Suivi moyen : 9,9 ans → 678 cancers colorectaux diagnostiqués Index de style de vie : 5 items cotés de 0 à 1 point -Tabac -AP: 30 min/j (ou travail physique) -Alcool<7verres/sem pour ♀ et <14 pour ♂ -TT<88cm pour ♀ et <102cm pour ♂ -Alimentataion saine → min : 0 - max : 5 points Kirkegaard et al. BMJ 341, 2010 Relation linéaire entre index de style de vie et risque de cancer colo-rectal → à chaque point supplémentaire respecté correspond une↓ du risque (incidence rate ratio 0,89) Par rapport au groupe 0-1 -58% -30% Kirkegaard et al. BMJ 341, 2010 Si chaque patient avait suivi - 1 recommandation supplémentaire : 13% des K évités - les 5 recommandations : 23% des K auraient été évités Kirkegaard et al. BMJ 341, 2010 PREVENTION PRIMAIRE CANCER COLON QUELLE ACTIVITE PHYSIQUE ? Caractéristiques AP très controversées : 30-60 min/j AP intensité modérée à élevée (Lee 2003) 1h/j intense (MET=6) ou 2h/j modérée (MET=3) (Friedenreich et al. 2006) 1h marche/sem (Wolin et al. 2007) NHS (Martinez et al. 1997) : rôle intensité ↓33% pour intensité modérée ↓46% pour intensité élevée Causes probables de ces divergences : catégorisations et méthodes de mesure AP très ≠ Cumul de plusieurs sessions d’AP/jour >10 min → 30-60 min/j AP intensité modérée Effet dose réponse Quand? A quelle période de la vie? → Le plus efficace si toute la vie PREVENTION PRIMAIRE CANCER DU SEIN 2002: 32/44 études (Friedenreich J Nutr 132: 3456S-64, 2002) 2006: 45/64 études (Kruk et al. Asian Pac J Cancer Prev 7: 2006) 2008: 47/62 études (Friedenreich Br J Sports Med 42: 2008) ↓ cancer sein chez femmes les plus actives ↓ moyenne de 25-30% → ↓ 20 à 80% chez la femme ménopausée → ↓ 15 à 20% chez la femme non ménopausée Courbe dose-réponse sur 28/33 études (2008) Effet préventif AP sur survenue K sein - Femmes ménopausées et non ménopausées (mais post>pré: 43% vs pré: 33%) - Pour K infiltrants et pour les formes in situ - Avec ou sans récepteurs hormonaux (mais ER-/PR- vs ER+/PR+: 0.61 vs 0.86) - Quelque soit catégorie d’IMC sauf obèses et effet le plus important chez minces Lean BMI (<22): 0.73 vs normal BMI (22-25): 0.76 vs high BMI (25-30): 0.81 vs very high BMI (<30): 1.04 - Femmes nullipares ou multipares Friedenrich CM. Br J Sports Med 42: 636-647, 2008 ACTIVITE PHYSIQUE ET PREVENTION PRIMAIRE du CANCER DU SEIN QUELLE ACTIVITE PHYSIQUE? PREVENTION PRIMAIRE DU CANCER DU SEIN Etude E3N Enquête de cohorte prospective 100 000 femmes nées entre 1925 et 1950 (MGEN) Suivies depuis 1990: → 3424 femmes : cancer du sein Questionnaire : - distance /jour parcourue à pied - nombre étages gravis - nombre d’heures/sem consacrées : à grand ou léger ménage, à des activités sportives ou de loisirs pratiquées de manière soutenue ou modérée Tehard et al. Cancer Epidemiol Biomarkers Prev 15: 57-64, 2006 Cette ↓ risque associée à une AP est également présente chez les femmes à risques de K sein (surpoids, nulliparre, THM, ATCD familiaux de K sein) Tehard et al. Cancer Epidemiol Biomarkers Prev 15: 57-64, 2006 AP EN PREVENTION PRIMAIRE CANCER SEIN SYNTHESE Recommandations internationales AP en prévention primaire = 3 à 4h/semaine d’AP d’intensité modérée à intense Effet dose réponse observé dans 50% des études qui rapportent une ↓ du risque NHS Comparaison intensité la plus faible vs la plus élevée: → pas d’intérêt supplémentaire à ↑ intensité AP > 9-14 MET/h/sem Monninkhof et al. Epidemiology 18: 137-57, 2007 AP EN PREVENTION PRIMAIRE CANCER SEIN Le risque de développer un cancer du sein diminue de 6% chaque fois que l’on ajoute 1h d’AP/semaine → Le niveau d’AP « total » est essentiel Monninkhof et al. Epidemiology 18: 137-57, 2007 ACTIVITE PHYSIQUE ET PREVENTION TERTIAIRE DU CANCER DU COLON ET DU CANCER DU SEIN Exercice et survie Diminution du risque de récidive: -50-60% K sein (NHS) -50-60% pour K colon AP ET SURVIE APRES CANCER COLON Nurses’Health Study 1976 : cohorte 121 700 infirmières suivies / 2 ans : path cardiovx et cancer (questionnaires) Si réponse oui K colon: accès au dossier médical → participantes avec Dg K colorectal entre 1986 et 2002 → 573 ♀ avec K colon stade I,II ou III AP mesurée avant Dg et après / 2ans : questionnaire 573 ♀ suivi moyen 9,6 ans Meyerhardt JA et al. J Clin Oncol 24: 3527-34, 2006 AP ET SURVIE APRES CANCER COLON 61% Niveau AP post Dg Effet indépendant IMC, âge, stade K, lieu K Meyerhardt JA et al. J Clin Oncol 24: 3527-34, 2006 Aucun effet du niveau AP avant le Dg sur la survie Effet de la variation d’AP après le diagnostic sur la survie (≠ niveau AP après – avant) Meyerhardt JA et al. J Clin Oncol 24: 3527-34, 2006 ↑AP après diagnostic: Mortalité toute cause : -57% Mortalité par cancer : -61% Ajustée pour IMC, stade K (I,II ou III), grade de diff°tumorale, âge au Dg, chimiottt (0-N), DIMC, tabac Meyerhardt JA et al. J Clin Oncol 24: 3527-34, 2006 AP ET SURVIE APRES CANCER COLON 832 patients K colon stade III avec chirurgie + chimiothérapie Cohorte CALGB Questionnaire AP pdt chimiothérapie et 6 mois après fin de chimiothérapie (inclusion sujets sans récidive à 6 mois posttraitement) Suivi moyen 2,7 ans (/entrée: 3,8 ans) Meyerhardt JA et al. J Clin Oncol 24: 3535-41, 2006 84.5% 75.1% >18MET-h/sem vs <18 MET-h/sem (6h marche/sem) → HR: 0.57 vs 1 → amélioration de 47% absence de récidive à 3 ans Meyerhardt JA et al. J Clin Oncol 24: 3535-41, 2006 9 MET-h /semaine Meyerhardt JA et al. J Clin Oncol 24: 3535-41, 2006 ACTIVITE PHYSIQUE ET PREVENTION TERTIAIRE du CANCER DU SEIN Depuis 2005 Plusieurs cohortes Pour chacune : >1500 femmes dont le traitement était achevé depuis en moyenne 2 ans Activité physique mesurée par questionnaire Effets activité physique régulière démarrée après le traitement du cancer sein sur la mortalité totale sur la mortalité par cancer du sein sur le risque de récidive du cancer du sein Nurses’Health Study 2987 participantes Diagnostic de cancer sein stade I,II, III médiane de suivi : 8 ans 463 décès dont 280 liés au cancer sein Relation entre activité physique et survie après cancer sein : → questionnaire activité physique tous les 2 ans (au moins 2 ans après diagnostic : médiane 38 mois) Holmes et al. JAMA 293: 2479-86, 2005 Recommandations internationales AP Analyse multivariée Holmes et al. JAMA 293: 2479-86, 2005 Nurses’Health Study Marche : 3 à 5 h/semaine Par rapport aux femmes sédentaires : RR = 1 → RR décès lié au cancer = 0.50 (IC=0.38 à 0.84) → RR récidive du cancer = 0.57 (IC=0.38 à 0.85) avec bénéfice observé dès 1h marche/sem → -26% risques évolution défavorable (décès cause, décès par cancer sein, récidive) Pas d’effet du niveau d’activité physique avant le cancer Holmes et al. JAMA 293: 2479-86, 2005 Collaborative Women’s Longevity Study (CWLS) 4482 ♀ 20-79 ans au moment diagnostic cancer sein Questionnaire d’activité physique complété en moyenne 5,6 ans après le diagnostic Incidence décès lors du suivi : 109 décès Holick et al. Cancer Epidemiol Biomarkers Prev 17(2): 379-86, 2008 Collaborative Women’s Longevity Study (CWLS) Holick et al. Cancer Epidemiol Biomarkers Prev 17(2): 379-86, 2008 Collaborative Women’s Longevity Study (CWLS) Activité physique: < 2.8 vs ≥ 2.8 MET-h/sem → ↓35 à 49% risque décès lié au cancer ou décès toute cause confondue Effet favorable de l’activité physique quelque soit l’IMC Pas d’effet du niveau d’activité physique avant le diagnostic Holick et al. Cancer Epidemiol Biomarkers Prev 17(2): 379-86, 2008 Health, Eating, Activity and Lifestyle Study (HEAL) 933 femmes Dg cancer du sein local ou régional entre 1995 et 1998 et suivies → sept 2004 Objectifs: nombre de décès en fonction de l’AP avant et les 3 ans après le diagnostic et de la différence d’AP pre-post diagnostic Activité physique évaluée par questionnaire (MAQ) Irwin et al. J Clin Oncol 24: 3958-64,2008 Effets de la variation de l’AP après traitement pour cancer du sein -67% -35% (après ajustement pour âge, ethnie, stade du cancer, traitement du cancer, utilisation de tamoxifène, IMC et quantité de fruits et légumes consommés). + Effet péjoratif de la diminution de l’activité physique après le traitement pour le cancer → risque de mortalité multiplié par 4 (RR=3,95) Irwin et al. J Clin Oncol 24: 3958-64,2008 AU TOTAL 3 cohortes L’activité physique démarrée après le diagnostic de cancer sein ↓du risque de récidive du cancer sein : -40% (NHS -43%) ↓ Mortalité totale : - 45 à 65% (NHS -41%,CWLS: -56%,HEAL: -67%) ↓ Mortalité par cancer du sein : -50% (NHS -50%,CWLS: -51%,HEAL: -35%) Indépendamment IMC, niveau d’activité physique avant le diagnostic ACTIVITE PHYSIQUE ET PREVENTION TERTIAIRE CANCER du SEIN et du COLON Activité physique et survie Mais aussi… Prise de poids (cancer sein : +2,5kg) → facteur mauvais pronostic Collaborative Women’s Longevity Study (CWLS) Holick et al. Cancer Epidemiol Biomarkers Prev 17(2): 379-86, 2008 ACTIVITE PHYSIQUE ET PREVENTION TERTIAIRE CANCER DU SEIN et du COLON Activité physique et survie Mais aussi… ↓ Fatigue ↓ Anxiété, dépression Prise de poids (K sein: +2,5kg) → facteur mauvais pronostic ↑ Qualité de vie ↓ risques pathologies cardiovasculaires et métaboliques (liées sédentarité) L’activité physique pourrait apporter des effets bénéfiques supplémentaires à ceux de chirurgie, radiothérapie et/ou chimiothérapie pour la survie après traitement pour un cancer sein. Mais résultats études observationnelles qui ne permettent pas de dégager une relation de cause à effet. LES DIFFERENTES ETAPES DE LA CANCEROGENESE Rogers et al. Sports Med: 38 (4): 271-296, 2008 2007: Fonds Mondial pour la Recherche sur le Cancer → Association statistique entre excès de poids et certains cancers : - sein chez femme ménopausée - cancer du colon Etudes prospectives: 141 études → 300 000 nouveaux cas cancer Risque de cancers (20 types de cancer) et ↑ IMC de 5kg/m2 Renahan et al. Lancet 371: 579, 2008 Risque de cancers pour une ↑ IMC de 5kg/m2 IMC = 23 kg/m2 → +15kg (♂) →+13kg (♀) Renahan et al. Lancet 371: 579, 2008 Renahan et al. Lancet 371: 579, 2008 Renehan AG et al. Arch Physiol Biochem 114: 71-83, 2008 AP↓ AP↓ AP↑ AP↓ CANCER DU COLON Effets systémiques de l’AP Effets locaux: - ↑Motilité intestinale - ↓Temps de transit gastrointestinal (et donc ↓ opportunité pour cancérigènes d’être en contact avec muqueuse colique) AUTRES EFFETS POSSIBLES -↓ stress oxydatif -Effets sur l’immunité -↓ inflammation Pour une revue cf Rogers et al. Sports Med: 38(4): 271-296,2008 ACTIVITE PHYSIQUE ET PREVENTION TERTIAIRE du CANCER du SEIN et du COLON Quels effets? Quels mécanismes? Quelle activité physique? Quels risques pour les patients ? Quels effets indésirables? Quelles contre-indications à l’activité physique? Recommandations d’activité physique en prévention primaire et tertiaire du cancer du sein et colon À ajuster-adapter à chaque patient Associer 1+2+3 Newton et Galvao Current Treatment Opinion in Oncology 2008 ACTIVITE PHYSIQUE ET PREVENTION TERTIAIRE du CANCER DU SEIN et du COLON Quels effets? Quels mécanismes? Quelle activité physique? Quels risques pour le patient ? Quels effets indésirables? Quelles contre-indications à l’activité physique ? Jones et Demark-Wahnefried Lancet Oncol 7: 1017-26, 2006 MUSCULATION ET LYMPHOEDEME Femmes traitées pour cancer sein (4-36 mois après fin ttt), 54±9 ans, TTT: RX, chimio et curage gg axillaire (majorité) 85 ♀ dont 14♀ avec lymphoedème Musculation : 2x/sem pdt 6 mois ou 12 mois (1 séance = 60 min) -13 sem supervisé - Le reste : à la maison Membres supérieurs et membres inférieurs MI: % 1 RM (8-10/série x3) MS:début sans poids ou avec 200g sur poignets et progression en fonction symptomatologie Schmitz et al. Cancer Epidemiol Biomarkers Prev 14: 1672-80, 2005 MUSCULATION ET LYMPHOEDEME 85♀ dont 14♀ avec lymphoedème Analyse très précise blessures à 0, 6 et 12 mois Aucune blessure grave. Aucune aggravation lymphoedème Autres effets bénéfiques : composition corporelle -1kg masse grasse +1 kg masse maigre Schmitz et al. Cancer Epidemiol Biomarkers Prev 14: 1672-80, 2005 ACTIVITE PHYSIQUE ET PREVENTION TERTIAIRE du CANCER DU SEIN Recommandations Faire attention aux complications des traitements : Curage ganglionnaire : lymphoedème Chimiothérapie : cardiotoxicité neuropathie périphérique Activité physique adaptée à chaque patiente Et suivie par un professionnel Très peu de contre-indications absolues à l’activité physique après cancer du sein