Typologie des agresseurs et violeurs de femmes (suite)

publicité
Départager les agresseurs et abuseurs sexuels
souffrant de troubles mentaux de ceux
présentant notamment des problèmes
psychoaffectifs et des
distorsions cognitives
Dr. Marc Ravart, M.A., Ph.D.
psychologue et sexologue clinicien
• Pratique privée, Montréal
• Membre senior, Unité de la sexualité humaine,
Département de psychiatrie à l’Hôpital général de
Montréal
[email protected]
Psychopathologie des abuseurs et
agresseurs sexuels
Toutes les personnes souffrant de troubles mentaux graves ne
sont pas violentes sexuellement, et toute violence sexuelle
n'est pas attribuable à la maladie mentale.
Le fonctionnement cognitif, affectif, sexuel et relationnel de la
majorité des abuseurs et agresseurs sexuels témoignent
généralement la présence de problèmes.
Cependant, cela n’implique pas nécessairement qu’ils
souffrent tous de troubles mentaux majeurs.
Typologie des abuseurs et agresseurs
sexuels d’enfants
Paraphilie : Mode imaginaire érotique et
fantasmatique préférentiels profondément ancrés et
intégrés qui facilite et favorise la création et le
maintien d’une excitation sexuelle et l’atteinte de
l’orgasme
Passif (en fantasme) vs actif (passage à l’acte)
Typologie des abuseurs et agresseurs sexuels
d’enfants (suite)
- Pédophilie (primaire, fixé vs secondaire, régressif)
- Éphébophilie (primaire, fixé vs secondaire, régressif)
- Abuseurs sexuels d’enfants généraux (non exclusif, non
paraphilique)
- Inceste, type intrafamilial vs extrafamilial
• Violent ou non violent
• Type situationnel, interpersonnel, narcissique, agressif,
sadique
• Degré de compétence sociale (faible, adéquat, élevé)
Typologie des agresseurs et violeurs
de femmes
4 grands types, en fonction des motivations et du
comportement
paraphilique vs non paraphilique
Typologie des agresseurs et violeurs de femmes
(suite)
I. Recherche de réassurance ou compensation
(“power-reassurance rape”)
• Sentiment d’inadéquation personnelle (dans sa vie et
avec les femmes)
• Compétence sociale faible
• Anxiété de masculinité
• Peu de force ou violence, ne voulant pas blesser la
victime
• Peut reprendre contact avec la victime, croyant que
cette dernière éprouve un sentiment pour lui
Typologie des agresseurs et violeurs de femmes
(suite)
II. Recherche de pouvoir ou d’expression
d’un sentiment de domination
(“power-assertive rape”)
• Grande importance accordée à l’image de soi, sa
masculinité
• Sentiment d’avoir le droit d’agresser
• Violence augmente avec la résistance de la victime
• Recherche du contrôle et d’humiliation de la victime,
laquelle est considérée comme étant un objet pour ses
fantasmes
Typologie des agresseurs et violeurs de femmes
(suite)
III Type colère et rage vengeresse
(“anger-retaliatory rape”)
• Agression impulsive (en général liée à une réponse
émotive immédiate et négative)
• L’agression est spontanée et brutale
• Peut rechercher à dégrader et à détruire la victime
• La victime est représentative des objets de haine, soit
un substitut permettant le déplacement de la rage et du
ressentiment envers les femmes
• Un sentiment de colère et de rage et davantage ressenti
par l’agresseur qu’une véritable excitation sexuelle
rattachable à des fantasmes sexuels
Typologie des agresseurs et violeurs de femmes
(suite)
IV. Sadisme
(“anger-excitation rape”)
• L’agression est préparée et planifiée selon un
imaginaire érotique paraphilique et violent
• L’agression fait l’objet d’un rituel prolongé découlant
d’une érotisation des mauvais traitements infligés à la
victime
• Violence psychologique et physique, avec torture et
parfois meurtre
Comparaison entre les abuseurs et agresseurs
sexuels et les hommes en général
• 6 fois plus d’hospitalisations pour des troubles
mentaux majeurs (24 % vs < 5 %)
• 5 fois plus d’hospitalisations pour schizophrénie ou
autres troubles psychotiques
• 3 fois plus à risque d’avoir une histoire de trouble
bipolaire
• 4 fois plus à risque d’avoir une histoire de troubles
d’alcool ou de drogue
• 30 fois plus à risque d’avoir des troubles de
personnalité
Le passage à l’acte des abuseurs et agresseurs sexuels
est généralement associé à un ensemble de facteurs
cliniques, en fonction des domaines suivants :
domaine psychoaffectif
- problèmes et troubles psychologiques et émotifs
- schémas cognitifs dysfonctionnels
- besoin psychoaffectifs élevés (p.ex., être aimé et validé)
- conflits émotifs et psychologiques passés non résolus
- ennui et solitude affective
domaine relationnel
- mode relationnel dysfonctionnel et régressif
- mauvaise gestion de conflits
- trouble d’intimité et de dépendance affective
- traits pathologiques ou troubles de personnalité
domaine sexuel
- mauvaise gestion des impulsions sexuelles déviantes
- fantasmes sexuels déviants
- dépendance et compulsions sexuelles
domaine cognitif
-distorsions cognitives : Attitudes et croyances qui
favorisent le passage à l’acte
domaine de vie
- vie malsaine et stressante, négligence de soi
- déficits à résoudre des problèmes
- style de vie impulsif et destructeur
- problèmes liés à l’alcool et la drogue
- problèmes d’adaptation sociale et professionnelle
Problèmes les plus souvent identifiés chez les abuseurs et
agresseurs sexuels d’enfants (sans ordre d’importance) :
• Enfance difficile et traumatismes
• Histoire de victimisation sexuelle
• Timidité excessive et anxiété envers les adultes
• Isolement émotif et social, solitude affective
• Sérieux troubles psychopathologiques
• Immaturité psychologique, identification émotive avec les enfants
• Multiples paraphilies ou autres compulsions-déviations sexuelles
• Antécédents criminels généraux et style de vie antisociale
• Personnalité antisociale et/ou psychopathie
• Infractions sexuelles antérieures
• Attitudes et croyances favorisant des comportements pédophiliques
• Problème d’impulsivité
• Abus d’alcool et autres substances
• Pauvre adaptation sociale et instabilité au travail
Problèmes les plus souvent identifiés chez les agresseurs sexuels et
violeurs de femmes (sans ordre d’importance) :
• Enfance difficile, marquée notamment par la violence
• Histoire de victimisation sexuelle
• Problème d’impulsivité, de colère contre les femmes
• Besoin de contrôle et de dominance
• Infractions sexuelles antérieures
• Antécédents criminels généraux et style de vie antisociale
• Personnalité antisociale et/ou psychopathie
• Fantasmes de coercition, planification et impulsions d’agir
• Multiples paraphilies ou autres compulsions-déviations sexuelles
• Attitudes et croyances favorisant des agressions sexuelles
• Abus d’alcool et autres substances
• Sérieux troubles psychopathologiques
• Pauvre adaptation sociale et instabilité au travail
- 4 fois plus de personnes souffrent d'un trouble mental
en prison que dans la population en général
- 20% des détenus = abuseurs et agresseurs sexuels
- La minorité des cas reçoivent un diagnostic de troubles
mentaux graves
4e édition du manuel diagnostic et
statistiques des troubles mentaux
(DSM-IV)
- Les troubles mentaux sont des maladies du cerveau qui
modifient de façon négative notre mode de fonctionnement
cognitif, affectif et relationnel.
- Les maladies mentales peuvent naître d'un
dysfonctionnement cérébral organique, de processus
psychologiques ou d'états physiologiques.
- Les 5 axes du DSM-IV
Les troubles cliniques à l’Axe I du DSM-IV
souvent associés à la violence sexuelle
- Les troubles cliniques comprennent typiquement des
syndromes et des phases (p.ex., périodes de rémission et
de fonctionnement normal).
- La dysfonction cognitive peut varier selon les phases de
la symptomatologie
Schizophrénie et autres troubles psychotiques
• Schizophrénie
Symptômes caractéristiques de la schizophrénie
- idées délirantes, hallucinations, discours désorganisé et
comportement grossièrement désorganisé ou catatonique
- symptômes négatifs (p.ex., émoussement affectif, alogie,
perte de volonté)
- dysfonctionnement social, relationnel, des activités
Types : paranoïde, désorganisé, catatonique,
indifférencié et résiduel
Schizophrénie et autres troubles psychotiques (suite)
• Trouble psychotique induit par une substance
(psychose toxique – maladie la plus criminogène)
• Trouble schizo-affectif
- présence simultanée (1) épisode dépressif majeur,
maniaque ou mixte et (2) symptômes caractéristiques
de la schizophrénie
• Trouble délirant
• Trouble psychotique bref
Troubles de l’humeur
• Trouble dépressif majeur, type isolé ou récurrent
• Trouble dysthymique
Troubles bipolaires
• Trouble bipolaire I
- Épisode maniaque isolé
(sans antécédents d’une dépression majeure)
- Épisode hypomaniaque actuel ou plus récent
(avec antécédent maniaque)
- Épisode plus récent maniaque
(avec antécédent dépression/maniaque/mixte)
- Épisode plus récent mixte
(avec antécédent dépression/maniaque/mixte)
- Épisode dépressif actuel ou plus récent
(avec antécédent maniaque/mixte)
Troubles bipolaires (suites)
• Trouble bipolaire II
- Épisodes dépressifs récurrents avec épisodes
hypomaniaques
• Trouble cyclothymique
- Nombreuses périodes hypomaniaques et
états dépressifs (non majeurs)
Troubles liés à l’impulsivité
• Trouble de déficit de l’attention,
- Avec hyperactivité et/ou impulsivité
- Épisodes dépressifs récurrents avec épisodes
hypomaniaques
- Comportement débutant à l’enfance
Troubles liés à l’impulsivité (suite)
• Trouble explosif intermittent: Agression impulsive
- Agression sexuelle impulsive = comportement lié à une
réponse émotive immédiate et négative (p.ex., colère, rejet,
peur)
- Épisodes liés à une instabilité affective où la personne ne
peut résister à ses impulsions sexuelles agressives,
lesquelles mènent à des actes de violence sexuelle dirigés
vers autrui ou vers des objets.
Troubles sexuels
• Paraphilie
- Préférences sexuelles déviantes
- pédophilique, éphébophilique, viol
• Obsessions et compulsions sexuelles (non-paraphilique)
Les troubles de la personnalité
de l’Axe II du DSM-IV
- Les troubles de la personnalité causent des modes
durables d'expérience et de comportement qui sont
contraires aux attentes de la société, qui sont profonds,
inflexibles et stables dans le temps et conduisent à la
détresse ou à une déficience.
- Ces troubles peuvent faire apparaître des symptômes à
n’importe quel moment.
- La dysfonction cognitive est beaucoup plus stable.
Les troubles à l’Axe II souvent associés
à la violence sexuelle
• Personnalité antisociale
- rébellion, tromperie, impulsivité, mépris, non respect,
irresponsabilité
- histoire juvénile de troubles de conduites et de
délinquance
- problèmes de colère et d’agressivité
- absence ou manque d’empathie
- relations abusives, instables, conflictuelles
- propension marquée pour des gestes antisociaux et de
violence
• Personnalité limite
- relations instables, intenses et conflictuelles
- impulsivité, instabilité affective, problèmes de colère et
d’agressivité
- efforts effrénés pour éviter les abandons réels ou imaginés
- instabilité marquée et persistante de l’image de soi et des
autres
- comportements auto-destructeurs
- sentiments chroniques de vide
- idéation paranoïde passagère et symptômes dissociatifs
transitoires
- propension marquée pour des gestes antisociaux et
violents
• Personnalité narcissique
- imbu de soi-même et sens grandiose de sa propre
importance
- pense être spécial, supérieur et que tout lui est dû
- besoin d’être aimé, admiré, reconnu et validé
- absence ou manque d’empathie, très sensible au rejet
- envie souvent les autres
- relations abusives et utilitaires
• Personnalité sadique
- retire une satisfaction personnelle et sexuelle en dominant
et en infligeant de la souffrance psychologique ou physique
à autrui (y compris son humiliation)
- absence d’empathie
- besoin de contrôler, dominer et blesser autrui
- effraie les autres pour obtenir ce qu’il veut
Comorbidité
- De nombreux cas ne s’inscrivent pas clairement dans l’une
ou l’autre des deux catégories de troubles mentaux.
- De nombreux cas présentant à la fois plusieurs troubles
cliniques, avec une combinaison de traits pathologiques
mixtes de personnalité.
- Comorbidité typique = Abus d’alcool et de substances
Responsabilité criminelle
- Pour être reconnu coupable d’une infraction, l’accusé doit :
- être doté de discernement moral et
- être en mesure de reconnaître et de comprendre que
le comportement qu’il a adopté consciencieusement et
volontairement était fautif, et ce, malgré l’ampleur de ses
problèmes et troubles sexuels, psychologiques ou
psychiatriques
- Le fait de souffrir d'un trouble mental n'exempte pas
automatiquement une personne de sa responsabilité
criminelle.
Inaptitude à subir son procès
- Il est possible que l’accusé ne soit pas apte à participer à
sa défense pleine et entière en raison de troubles mentaux.
- Un accusé est inapte à subir son procès lorsqu’il est
incapable :
- de comprendre la nature ou l'objet des charges
portées contre lui et les conséquences éventuelles
des poursuites ;
- d’assumer sa défense ;
- de communiquer et donner des instructions à son
avocat, à toute étape des procédures, avant que le
verdict ne soit rendu.
L'incapacité doit être causée par des troubles mentaux ou
une maladie mentale, selon la prépondérance des
probabilités.
Non-responsabilité criminelle pour
cause de troubles mentaux
Selon le Code criminel
… la personne qui commet un acte criminel alors qu'elle est
atteinte de troubles mentaux ne doit pas être tenue
criminellement responsable de ses actes de la même
manière qu'une personne saine d'esprit. Même si elle
reconnaît l’acte criminel, la personne qui était aliénée d'un
point de vue légal au moment de l'infraction ne doit pas être
déclarée coupable […].
- La maladie mentale doit causer l'une incapacité de juger de
la nature et des conséquences d'un acte.
Non-responsabilité criminelle pour cause de troubles
mentaux (suite)
Agression sexuelle et physique impulsive
(comportement lié à une réponse émotive
immédiate et négative)
Vs
Agression sexuelle et physique préméditée
(comportement planifié)
Non-responsabilité criminelle pour cause de troubles
mentaux (suite)
- L'aliénation mentale étant établie au moment de la
commission de l'infraction, le prévenu ne peut ni être
acquitté ni être déclaré coupable. Le verdict sera plutôt
celui de « non-responsabilité criminelle pour cause de
troubles mentaux ».
- Le prévenu est ensuite détenu pour une durée
indéterminée jusqu'à ce qu'une commission d'examen
nommée par le gouvernement détermine qu'il peut
réintégrer la société.
La gestion des délinquants dangereux
et des délinquants à contrôler
-Les dispositions applicables aux délinquants présentant un
risque élevé de récidive (délinquants dangereux et les
délinquants à contrôler) s’appliquent à l’étape de la
détermination de la peine.
-L’objectif principal de ce régime est de protéger le public
des délinquants qui ont commis certaines graves infractions
sexuelles ou de violence (sauf le meurtre) et qui continuent
de constituer une menace pour la société.
- À l’intérieur de ce groupe très restreint, les délinquants
dangereux sont, par définition, considérés comme étant à
risque plus élevé que les délinquants à contrôler.
La gestion des délinquants dangereux et des
délinquants à contrôler (suite)
- Une forte proportion de ces criminels ont commis une
infraction sexuelle.
- Le tribunal pourra déclarer qu’un délinquant est un
délinquant dangereux uniquement sur demande du
poursuivant (couronne ou défense), en fonction de la
gravité du délit.
- Présomption de délinquant dangereux dans le cas de la
commission de trois sérieuses infractions à caractère
violent.
La gestion des délinquants dangereux et des
délinquants à contrôler (suite)
- Pour être déclaré délinquant dangereux, le poursuivant
doit faire la preuve, hors de tout doute raisonnable, de deux
éléments bien précis :
- l’infraction sous-jacente constitue des « sévices
graves à la personne » ;
- le délinquant représente un danger réel et un risque
de récidive indu pour la société.
La gestion des délinquants dangereux et des
délinquants à contrôler (suite)
- Délinquant à contrôler pourra être remis en liberté pendant
ou suivant sa sentence fédérale, en respectant les
conditions d’une ordonnance de surveillance de longue
durée.
- Délinquant dangereux devra, sauf décision contraire du
juge, purger une peine d’emprisonnement pour une période
indéterminée.
Dr. Marc Ravart, M.A., Ph.D.
psychologue et sexologue clinicien
(514) 844-3363
[email protected]
Téléchargement