Notions / Concepts
1. La vieillesse vue par 3 philosophes :
Cicéron (106-43 avant JC) : Savoir vieillir fut écrit en - 45. Cicéron a 61 ans, il vient de perdre sa fille Tullia.
Retiré de la vie politique il se voue aux études désintéressées et publie de nombreux livres qui introduisent la
philosophie grecque (stoïcienne essentiellement) à Rome.
Extrait « Tous ceux qui ne puisent pas en eux les ressources nécessaires pour vivre dans le bonheur, trouveront
exécrables tous les âges de la vie. Mais quiconque sait tirer de lui-même l'essentiel ne saurait juger mauvaises les
nécessités de la nature. Et la vieillesse assurément en fait partie.... Retenez que nous sommes sages si nous
suivons la nature... c'est le meilleur des guides. Il ne serait d'ailleurs pas vraisemblable qu'ayant si bien agencé
les autres périodes de la vie, elle ait bâclé le dernier acte comme l'aurait fait un poète sans talent. Il fallait
seulement qu'il y ait une fin... A tout cela, le sage doit consentir paisiblement. »
Sénèque (4-65) : Précepteur de Néron qui le condamna à mort. Diderot, le fondateur de l'encyclopédie au
XVIIIe siècle, l’a appelé « le précepteur du genre humain ».
Extrait de lettre à Lucilius : « Ce n'est plus au nombre de mes années, à un corps usé comme le mien, que
convient le nom de vieillesse; il désigne l'affaiblissement de l'être, et non sa dissolution. Rangez-moi, je vous prie,
parmi les décrépits et les agonisants. Et pourtant, je m'en félicite auprès de vous, les injures du temps ne se font
pas sentir en moi à l'âme comme au corps; je n'ai de vieilli que les vices et leurs organes. Mon âme est pleine
de vigueur, et ravie de n'avoir presque plus rien de commun avec le corps; elle se sent en partie délivrée de
son fardeau; elle triomphe, elle me donne un démenti sur ma vieillesse; c'est pour elle la fleur de l'âge. Il faut bien
l'en croire : laissons-la jouir de son bonheur. »
Montaigne (1533-1592) : Dans la vieillesse, les plaisirs du corps conservent leur place. Les avantages que
constituent : l’oisiveté (les loisirs), la liberté, la cessation de ce qu’il appelle « l’embesognement » qui est le fait de
la jeunesse, sont appréciés. Montaigne aimait trop la vie pour louer la vieillesse. Il se contente de la positiver.
Il faut savoir goûter le présent comme il est, non l’anéantir par des projets insensés. La raréfaction des moments
de santé va de pair avec une appréciation et une véritable jouissance de ces moments.... « Le corps a une grande
part à notre être, il y tient un grand rang […]. Ceux qui veulent déprendre nos deux pièces principales ( le corps et
l’esprit) et les séquestrer l’une de l’autre, ils ont tort. »
La vieillesse est un remède contre l’hypertrophie de l’esprit, hypertrophie qui peut mener, selon Montaigne, à un
véritable ressentiment contre le corps, voire même à la folie paranoïaque. Au vieillard et à lui seul il est donné de
vivre un rapport équilibré au corps : « Il faut ordonner à l’âme non de se tirer à quartier, de s’entretenir à part, de
mépriser et d’abandonner le corps ..., mais de se rallier à lui, de l’embrasser, le chérir, le contrôler, le conseiller et
ramener quand il se fourvoie, l’épouser en somme et lui servir de mari ». La vieillesse est ainsi l’âge où nous vivons
l’intégralité de notre condition d’homme, et non seulement une partie tronquée de cette condition.