Comment s’alimenter avant, pendant et après un effort de longue durée ? Pour que « le moteur tourne parfaitement », il faut lui donner un carburant raffiné, c’est-à-dire une alimentation saine. 1/ En période d’entraînement Pour les coureurs, les conséquences d’une mauvaise alimentation sont multiples : - manque d’énergie, - mauvaise récupération, - fonte musculaire, - anémie, - risque accru de blessures … Quelques règles essentielles : - miser sur les glucides à index glycémique (IG) bas * (glossaire), - consommer des protéines, - éviter les acides gras saturés, - s’hydrater suffisamment (« boire sans soif »). L’énergie devrait être fournie par les 3 principes nutritifs selon les proportions suivantes : - protides : 13% - (1 g de protide libère 4 kcal = 16, 7 kj ) - lipides : 26% - (1g de lipide libère 9 kcal = 37,6 kj) - glucides : 61% - (1g de glucide libère 4 kcal = 16,7 kj) 1 kcal = 4, 186 kj le petit-déjeuner Il doit permettre d’éviter la sensation de faim qui survient en fin de matinée et sera donc assez copieux chez ceux qui s’entraînent vers midi : - un fruit à IG bas (de préférence au jus de fruit dont le sucre est trop vite assimilé) dont les fibres permettent de stabiliser plus longtemps la glycémie * - des céréales, - un produit sucré (confiture …), - une source de protéines (yaourt, lait de soja, œuf à la coque, jambon maigre …), - une boisson chaude (éviter le café au lait trop indigeste). le déjeuner et le dîner On recommande de privilégier l’apport protéique (viande, poisson, volaille …) le midi et d’incorporer au repas du soir une plus petite portion de protéines (œuf, jambon …) avec une prédominance de glucides à faible index glycémique (pâtes complètes, riz complet, pois chiches, lentilles, haricots blancs …) Ex : déjeuner : crudités [cuillerée d’huile d’olive ( ou colza, noix, pépins de raisin , tournesol) de 1ère pression à froid + jus de citron + levure diététique], et au choix, viande, foie, volaille, lapin , poisson ou fruits de mer, légumes verts yaourt ou dessert au soja ou … Ex : dîner : potage, œuf ou jambon, riz ou pâtes ou semoule ou légumes secs …, fruit cuit ou compote ou … Remarque : Afin d’ éviter une anémie ferriprive* qui peut entraîner une grande fatigue à l’effort, il serait judicieux de faire un repas hebdomadaire , le jour de repos, avec des aliments présentant une bonne teneur en fer (foie de volaille, foie de veau, boudin noir, lapin, cerf, lentilles, germe de soja, germes de blé, cacao …) La fixation du fer sera améliorée par la présence d’aliments riches en vitamine C (fruits, persil …) Ex. de repas riche en fer : crudités ( germes de soja , concombre, endive, artichaut, …) saupoudrées de levure diététique et de persil, foie ou boudin aux lentilles, un fruit tel que papaye, mangue, kiwi, pamplemousse ou jus d’orange pressée et éventuellement un carré de chocolat riche en cacao. Certaines substances sont à éviter lors de ce repas car elles agissent de façon défavorable sur la rétention du fer : les produits lactés riches en calcium, le thé, le café. Pendant la séance d’entraînement Le déficit hydrique pouvant engendrer hyperthermie, contractures, crampes, tendinites et urolithiases *, il est essentiel de boire régulièrement en petite quantité dès le début de l’exercice (15 à 20 cl toutes les 20’) même si on ne ressent pas la soif. Durée Ravitaillement < ou = 1h eau 1à3h Boisson glucidique >3h Boisson glucidique + Aliments solides Après la séance d’entraînement S’hydrater immédiatement et dans les 30’ qui suivent, profiter de l’appétence musculaire pour restaurer les réserves de glycogène en privilégiant les glucides à IG élevé. Plus on attend pour ingérer des glucides, plus les muscles auront de difficultés à refaire des réserves. 2/ La dernière semaine Il y a quelques années, le RDS (régime dissocié scandinave) était en vogue et recommandait : J-7 Séance favorisant l’épuisement des réserves J-6 à J-4 Ration hypoglucidique (10%) riche en lipides (70%) et protides (20%) J-3 à J-1 Ration hyperglucidique La phase hypoglucidique étant difficile à vivre, ce régime a été décrié et actuellement, on opte pour un modèle moins strict. J-6 à J-4 Régime mixte + entraînement allégé J-3 Régime hyperglucidique (10g/kg/j) avec un apport de glucides solubles + repos (période la plus propice au stockage = fenêtre métabolique) J-2 Régime hyperglucidique , éventuellement légère séance J-1 Régime hyperglucidique moins copieux. Eviter les aliments à résidus (végétaux crus) Pendant la phase hyperglucidique, les proportions deviennent : protides (17%), lipides (7%), glucides (76%) 3/ Le jour J Le dernier repas Sa composition dépend de l’horaire de l’épreuve et de la susceptibilité de chacun aux troubles digestifs. Ce repas doit : - éviter l’hypoglycémie*, - prévenir tout problème d’ordre digestif, - fournir des acides aminés * (casse musculaire), - ne pas trop amputer la dernière nuit de sommeil (8 h). Problème : les départs matinaux (marathon à 7H, GRNC à 5H ) Composition du dernier repas : PDJ classique (loi des 3 h) ou gâteau énergétique plus vite digéré ? Rythme de vie : horaire du coucher et du lever ? Epreuve G.R.N.C. Dîner à 17H00 Dîner à 18H00 Dîner à 19H00 Dîner à 20H00 MARATHON J–1 Coucher à 18H00 Coucher à 19H00 Coucher à 20H00 Coucher à 21H00 J PDJ classique à 2H00 Gâteau énergétique à 3H00 PDJ classique à 4H00 Gâteau énergétique à 5H00 Entre le dernier repas et le départ Afin d’éviter tout problème d’hypoglycémie réactionnelle*, il est préférable de ne boire que de l’eau après le dernier repas. Juste avant le départ, prendre 15 à 20 cl d’une boisson glucidique hypotonique* qui sera utilisée pendant l’effort. Pendant la course Le ravitaillement pendant l’effort doit satisfaire plusieurs objectifs: - Réhydrater - Prévenir l’hypoglycémie* - Produire de l’énergie - Empêcher l’hyponatrémie * Le sujet des boissons énergétiques est un thème qui revient souvent dans les discussions entre coureurs : Quel dosage ? Quelle quantité ? Quel produit énergétique ? Il n’y a pas de règle intangible qui fonctionne de manière immuable. Chaque coureur doit trouver la solution qui lui convient en appliquant quelques principes physiologiques. Le dosage ? La durée pendant laquelle la solution demeure dans l’estomac dépend de sa concentration déterminée en fonction de la température extérieure. Température < 5°C de 5 à 15°C de 15 à 25 C > 25° C Concentration 80 g/l 65 g/l 40 g/l 30 g/l et moins Entre 20 et 25°C, une solution hypotonique (30 g/l) sera rapidement vidangée dans l’intestin. La quantité ? Une prise de 0,3 g de glucose/kg/h permet de combler le déficit de glucose circulant (F. Péronnet). Chacun peut calculer la quantité de glucose à ingérer par heure. Pour une concentration de 30 g /l , on aurait : P (kg) Glucose ingéré (g/h) Volume ingéré (ml/h) Répartitions 4/h 6/h 50 15 500 125 ml 83 ml 60 18 600 150 ml 100 ml 70 21 700 175 ml 117 ml Le produit ? Il existe sur le marché une multitude de produits énergétiques. De préférence, choisir une boisson aux polymères de glucose * à goût neutre et contenant un peu de sodium (Na). Il sera nécessaire de lire attentivement l’information nutritionnelle et … calculer. Le coureur peut, à moindre frais, fabriquer sa propre boisson : 1 litre d’eau + 30 g de glucose ou de miel + 2 g de sel + jus de citron La prise d’un volume raisonnable de liquide et l’ajout de sel préviennent tout risque d’hyponatrémie Attention aux gels ! En général, ils ne sont pas consommés avec le volume de liquide approprié et peuvent causer de graves troubles digestifs (phénomène d’osmose) * Réflexion ! Un coureur utilise un tube de gel de 27 g. L’étiquette indique qu’il apporte 74,5% de glucides. Quelle est la valeur nutritionnelle de ce produit sachant que 1g de glucides fournit 4 Kcal ? Quelle quantité d’eau le coureur devrait ingurgiter pour obtenir une solution à 30 g/l ? L’alimentation solide Les marathoniens consomment rarement du solide. Les coureurs d’ultra portent leur choix sur les fruits secs, bananes, pâtes de fruit, barres énergétiques … mais après des heures d’effort, ils éprouvent du dégoût pour « le sucré » et sont attirés par « le salé » (biscuits salés, biscottes, petits sandwichs au jambon, soupe chinoise, fruits oléagineux…). On parle même d’une « saucisse de course » !. Dans l’optique d’une telle alimentation, il sera préférable d’être bien assisté et de connaître l’emplacement des postes de ravitaillement mis en place par l’organisation et leur contenu. Info : la plupart des coureurs d’ultra souffrent de problèmes gastro-intestinaux même Dawa Sherpa, Vincent Delebarre et Karine Herry ! Les pastilles de sel ? Elles sont à éviter car elles peuvent provoquer un choc osmotique qui pourrait déclencher diarrhée et déshydratation. Après la course A l’issue de l’épreuve, l’organisme est perturbé : déshydratation, pertes minérales, acidose *, lésions des fibres musculaires, déplétion glycogénique … Dès son arrivée, le coureur doit débuter la phase de récupération alimentaire en profitant des « fenêtres métaboliques *» pour : - Réhydrater l’organisme et relancer la diurèse *, - Combattre l’acidification du milieu intérieur, - Potentialiser la synthèse musculaire, - Restaurer les stocks de glycogène *. Chronologie de la phase de récupération De H à H + 30’ Boisson gazeuse bicarbonatée + boisson glucidique ou eau + bicarbonate de soude + sel + sirop De H + 30’ à H + 2h H+4h Aliments à IG élevé (yaourt à boire, jus de fruit, barres énergétiques, fruits secs …) Repas de récupération de type ovo-lactovégétarien au pouvoir alcalinisant et apportant des acides aminés essentiels + glucides à IG bas Au coucher Lait sucré Petit déjeuner Normo-glucidique avec laitage GLOSSAIRE Acides aminés : ce sont les constituants élémentaires des protéines. 11 sont synthétisés par l’organisme. Les 9 autres, appelés acides aminés essentiels doivent impérativement être apportés par l’alimentation. Acidose : trouble de l’équilibre entre les acides et les bases au niveau sanguin, caractérisé par une prédominance de l’acidité. Anémie : l’abaissement du taux d’hémoglobine s’accompagne d’une fatigue ; on qualifie cet état d’anémie. Lorsque son origine réside dans un déficit en fer, il s’agit d’une anémie ferriprive. Diurèse : production d’urine Fenêtre métabolique : les heures qui suivent immédiatement l’effort correspondent à la période durant laquelle la restauration de l’équilibre physiologique est optimisée. Glycémie : c’est le taux de glucose dans le sang (environ 0,9 g/l). Lorsqu’il est trop bas, on parle d’hypoglycémie et s’il est trop élevé d’hyperglycémie. La glycémie est réglée par plusieurs hormones dont la plus importante est l’insuline (hormone hypoglycémiante secrétée par le pancréas). Glycogène : polymère de glucose représentant la forme de stockage des glucides dans le foie et les muscles. Lorsque les réserves de glycogène sont épuisées, le coureur « frappe le mur ». Hypoglycémie réactionnelle : elle provient d’une libération excessive d’ insuline après l’ingestion de glucides à IG élevé. L’entrée massive du glucose dans les cellules donne lieu, en réaction, à ce type d’hypoglycémie. Hyponatrémie : chute du taux sanguin de sel ou « intoxication par l’eau », à la suite de l’ingestion d’un volume d’eau excédant les pertes. Hypotonique : présente une pression osmotique inférieure à celle du plasma sanguin ; cela facilite la vidange gastrique et permet un passage rapide vers les cellules. Une boisson isotonique présente la même pression osmotique que le plasma sanguin C’est le cas d’une boisson glucidique dont la concentration est de 60 g/l. Une boisson hypertonique présente une pression osmotique supérieure à celle du plasma sanguin ; cela ralentit la vidange gastrique et peut même occasionner un transfert de l’eau des cellules vers le tube digestif avec risque de déshydratation. Index glycémique : il permet de classer les aliments en fonction de leur effet hyperglycémiant. Le glucose, qui sert de référence, a un IG à 100. Plus l’IG est faible, plus l’assimilation est lente et plus l’IG est élevé, plus l’assimilation est rapide. Aliments Sucres rapides Glucose Pommes de terre au four Purée flocons Carottes et navets cuits Gâteau de riz Riz blanc cuisson rapide Purée maison Potiron Baguette, croissant Dattes, sucre (saccharose) Igname, P.de terre vapeur Banane mûre, melon Miel Riz long Boulgour IG Aliments IG Sucres intermédiaires 100 Semoule couscous 95 90 85 85 85 80 75 70 70 65 60 60 60 55 All Bran Kiwi, mangue Pâtes et riz complets Patate douce Riz Basmati Petits pois (boîte) Ananas Orange pressée,raisin Pain de seigle Pilpil Spaghettis al dente (5’) Haricots rouges Figues sèches Pain azyme 50 50 50 50 50 50 45 45 45 45 40 40 40 40 40 Aliments Sucres lents Pomme, nectarine, prune, orange, abricot sec Haricots blancs, quinoa Mandarine, pamplemousse Lentilles brunes, pois chiches Haricots verts, carotte crue Fraise, cerise, framboise Chocolat noir >70% cacao Pois cassés, flageolets Aubergine Coeur palmier-artichaut Fructose Choux, brocoli, courgette Rhubarbe Endive, concombre,fenouil Radis, poireaux, poivron IG 35 35 30 30 30 25 25 25 20 20 20 15 15 15 15 Osmose : phénomène de diffusion qui se produit entre 2 solutions de concentration différente, séparées par une membrane semi-perméable. Polymère de glucose : composé formé par l’union de plusieurs molécules de glucose. Pression osmotique : c’est la pression qui doit être appliquée pour maintenir l’équilibre de part et d’autre d’une membrane ; elle est proportionnelle à la concentration de la substance dissoute. Urolithiases : calculs urinaires.