La dépression et son traitement Hervé JAVELOT Service Pharmacie, EPSAN, BRUMATH Les éléments de base Une symptomatologie variable « L’impact clinique » est « objectivable » Dessin d’après http://www.ma-schizophrenie.com Le « diagnostic différentiel » Terminologie clinique autour de « l’humeur dépressive » Terminologie Racine grecque Définition Anhédonie an- privatif et hêdonê « plaisir » incapacité d'un sujet à ressentir des émotions positives lors de situations de vie pourtant considérées antérieurement comme plaisantes Aboulie a- privatif, et boulía « volonté » incapacité à exécuter les actes pourtant planifiés, et difficulté à prendre des décisions Apragmatisme a- privatif, et pragma -atos, « action d'entreprendre » incapacité à entreprendre des actions Athymhormie a- privatif, thumos « cœur, sentiment » et hormé « élan, essor » perte ou une réduction de désir ou d'intérêt envers des motivations qui étaient propres au patient, une perte d'élan et d'envie de satisfaire ses désirs Asthénie a- privatif, et sthénie « force », « vigueur » fatigue physique (par extension psychique dans la dépression) Terminologie clinique autour de « l’humeur dépressive » Ralentissement psychomoteur ¡ Ralentissement psychique l l l l ¡ Troubles de l'attention et de la concentration, troubles mnésiques, menant à une indécision et une perplexité Ruminations (piétinement de la pensée) Bradyphémie : lenteur du discours (rythme verbal) Prosodie monocorde : perte des intonations Ralentissement moteur l l l ¡ (Bradypsychie) Pauvreté gestuelle et mimique (hypomimie voire amimie) Apragmatisme : perte d’initiative Au final, diminutions des conduites élémentaires d’hygiène et d’alimentation (incurie), avec confinement au lit (clinophilie) À l'extrême: Mutisme et Stupeur D’après Chatillon O. Trouble de l’humeur. Symptomatologie - Approches thérapeutiques. Hôpital Sainte Anne Terminologie clinique autour de « l’humeur dépressive » Conduites instinctuelles ¡ Appétit : anorexie (90%) ou hyperphagie (10%) ¡ Sommeil : insomnie, typiquement à réveil précoce (90%) ou hypersomnie (10%) ¡ Libido : baisse du désir sexuel D’après Chatillon O. Trouble de l’humeur. Symptomatologie - Approches thérapeutiques. Hôpital Sainte Anne Terminologie clinique autour de « l’humeur dépressive » Notion d’épisode dépressif « majeur » ¡ Ne veut pas dire sévère, mais « dépression caractérisée » ¡ Sévérité évaluées en fonction du nombre de symptômes et du retentissement: Léger l Moyen l Sévère l D’après Chatillon O. Trouble de l’humeur. Symptomatologie - Approches thérapeutiques. Hôpital Sainte Anne Terminologie clinique autour de « l’humeur dépressive » La mélancolie ¡ Entendu comme un EDM très sévère, dont l’ensemble des symptômes sont exacerbés, Risque suicidaire majeur, Réponse favorable au traitement médicamenteux, ¡ 3 types : ¡ ¡ l l l mélancolie stuporeuse : grande inhibition motrice, mélancolie anxieuse : symptomatologie anxieuse ++ ; risque suicidaire ++, la mélancolie délirante : pensées délirantes s’intègre à la mélancolie ; ex. du syndrome de Cotard. D’après Chatillon O. Trouble de l’humeur. Symptomatologie - Approches thérapeutiques. Hôpital Sainte Anne L’enjeu d’un traitement antidépresseur : agir sur les symptômes « clés » Humeur dépressive Perte d’intérêt ou de plaisir Perte ou gain de poids significatif Insomnie ou hypersomnie Agitation ou ralentissement Fatigue ou perte d’énergie Sentiment de dévalorisation ou de culpabilité Diminution de l’aptitude à penser ou à se concentrer Pensées de mort récurrentes Dessins adaptés d’après http://www.ma-schizophrenie.com ANTIDEPRESSEURS ¡ ¡ ¡ ¡ ¡ Antidépresseurs « imipraminiques » IMAO = Inhibiteurs de la MonoAmine Oxydase ISRS = Inhibiteurs Sélectifs de la Recapture de la Sérotonine IRSNa = Inhibiteurs de la Recapture de la Sérotonine et de la Noradrénaline, Autres antidépresseurs ou « atypiques » : l l Antidépresseurs sédatifs et α2-bloquants Antidépresseurs sédatifs mélatoninomimétiques Classification antidépresseurs ¡ Les « imipraminiques » augmentent la concentration de plusieurs neurotransmetteurs dans le cerveau (noradrénaline, sérotonine, dopamine) ⇒ considérés (avec les IMAO) comme les plus “efficaces”, ⇒ mais plus d’effets indésirables = exposent notamment aux effets dits « anticholinergiques » : sécheresse des muqueuses, rétention urinaire, constipation, … Classification antidépresseurs ¡ ¡ Les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) agissent, comme leur nom l'indique, en augmentant la concentration de la sérotonine dans le cerveau : Les inhibiteurs de recapture de la sérotonine et de la noradrénaline (IRSNa) augmentent la concentration de la sérotonine et de la noradrénaline dans le cerveau : Classification antidépresseurs ¡ Les inhibiteurs de la monoamino-oxydase (IMAO) augmentent la concentration de plusieurs neurotransmetteurs dans le cerveau (noradrénaline, sérotonine, dopamine) ¡ Les "autres antidépresseurs" ou " atypiques " : Antidépresseurs « sédatifs » Tolérance ¡ ¡ Les nouvelles classes sont les plus utilisées (ISRS : type DEROXAT®, SEROPLEX® ou IRSNa : type EFFEXOR®, les « atypiques »: NORSET® et ATHYMIL® sont mieux tolérés, Les imipraminiques (type ANAFRANIL® (clomipramine) ou LAROXYL®) exposent notamment aux effets dits « anticholinergiques » : sécheresse des muqueuses, rétention urinaire, constipation par ex. ⇒ Les IMAO : plus de risque de « syndrome sérotoninergique » Mais plus « efficaces » dans certains contextes. Le suivi par le médecin ¡ Après la mise en route du traitement antidépresseur, il est nécessaire de réévaluer le patient : l l l ¡ quelques jours après, afin d’évaluer la tolérance à court terme et le risque suicidaire ; au cours des deux premières semaines pour évaluer l’évolution clinique, la tolérance et l’observance et notamment dépister une aggravation possible de la symptomatologie dépressive ; à 4 semaines pour évaluer l’efficacité. Le risque suicidaire l l doit être pris en compte tout au long du traitement, notamment chez le jeune adulte. La survenue de symptômes, tels que l’insomnie, l’irritabilité, l’anxiété, l’hyperactivité, la nervosité et a fortiori les idées suicidaires nécessite des consultations plus fréquentes. Le délai d’action ¡ Différencier : l l ¡ Le début de l’amélioration : 1 à 3 semaines, l’obtention d’une réponse thérapeutique complète : 2 à 8 semaines. Il n’est pas démontré que : l une classe d’antidépresseur ait un délai d’action plus court qu’une autre l l’administration d’emblée de doses élevées raccourcisse le délai d’action. Durée et maintien du traitement ¡ Le traitement d’un épisode dépressif comporte deux phases : l l ¡ la phase « aiguë » : l’objectif = la rémission des symptômes est de 2 mois en moyenne (de 6 à 12 semaines) ; la phase de « consolidation », dont l’objectif est de prévenir les rechutes, est de 4 à 12 mois en fonction des symptômes. La durée totale du traitement d’un épisode se situe donc généralement entre 6 mois et un an. Arrêt du traitement ¡ Conduite d’un arrêt de traitement : l L’arrêt du traitement sera toujours progressif et programmé avec le patient, l Traitement < 1 an : arrêt en quelques semaines, en diminuant par exemple toutes les semaines d’1/4 de la dose journalière, l Traitement > 1 an : arrêt en quelques mois, en diminuant par exemple tous les mois d’1/4 de la dose journalière. ANTIDEPRESSEURS : effets indésirables ¡ Effets anticholinergiques : (antidépresseurs tricycliques) l l l ¡ Neuropsychiatrique : euphorie/ sensation de bien-être, confusion, désorientation, agitation, baisse de la mémoire à court terme, difficultés de concentration, troubles du cours de la pensée, pensées incohérentes, incohérence du discours, Neurosensoriels : faiblesse musculaire (myoclonies, mouvements myocloniques), hypersensibilité aux stimuli sonores, troubles visuels (éblouissements brefs, champ visuel rétréci en tunnel, vision floue, modifications transitoires du champ visuel, augmentation de la pression intraoculaire), hallucinations sensorielles (visuelles, auditives, etc), Autres symptômes somatiques : augmentation de la fréquence cardiaque (tachycardie) et troubles du rythme cardiaque, rétention urinaire, constipation. Effets synergiques pour le risque de chute : Exemple d’association : Neuroleptique (ex. RISPERDAL®), Benzodiazépine (ex. SERESTA®) + ATHYMIL® ou NORSET® (antidépresseurs sédatifs). => Cumul d’effets sédatifs (neuroleptiques, benzodiazépine et antidépresseur) + myorelaxant (benzodiazépine). l Syndrome sérotoninergique ¡ Le syndrome sérotoninergique = excès de sérotonine au niveau cérébral. ¡ Peut survenir notamment en réaction à un traitement antidépresseur, à une interaction médicamenteuse. ¡ Le tableau clinique associe de manière inconstante et à des degrés divers l nausées, diarrhée, agitation, troubles du comportement, hallucinations, tremblements, rigidité musculaire, myoclonies, hyperréflexie, tachycardie, élévation de la pression artérielle, l sueurs, hyperthermie. l l l Syndrome sérotoninergique ¡ Peut survenir lors de l’association d’antidépresseurs : l l l Entre eux, Avec d’autres traitements, notamment : ¡ Antiépileptiques (TEGRETOL®, DEPAKINE®), ¡ Antiémétiques (PRIMPERAN®), ¡ Neuroleptiques (LEPONEX®, HALDOL®, RISPERDAL®), ¡ Antalgiques (TOPALGIC® (tramadol)), Avec certains aliments contenant de la tyramine (fromages fermentés, bananes, chocolat, charcuterie, vin par ex.)