DES CONDUITES À RISQUES AUX TROUBLES PSYCHIATRIQUES Dr Jean Chambry CH Fondation Vallée Université Paris VII/ Paris 11 Inserm C’EST QUOI UN ADOLESCENT DIFFICILE? REPÈRES Troubles du comportement: notion de norme Agressivité: Héritage atavique Instinct au service de la vie Violence; Notion subjective Ce qui fait intrusion Processus de destructivité PASSAGE A L’ACTE Agir avec un support représentatif conscient Agir avec un support représentatif plus ou moins conscient: notion d’acting out Agir sans support représentatif: court circuit de la pensée Agir comme mécanisme de défense AGIR Pour faire des rencontres Pour sortir de la passivité Retrouver l’illusion de la maîtrise Pour permettre des investissements Aimer NOTION D’IMPULSIVITÉ Caractéristique neuro-développementale: notion de tempérament, TDAH, trouble des conduites Notion de trouble de la personnalité: borderline, pathologie limite APPROCHE NEURODÉVELOPPEMENTALE DEFICIT DE L’ATTENTION/HYPERACTIVITE CLINIQUE • Troubles de l’attention: –incapacité de terminer une tâche, –fréquence des oublis, –distractibilité, –refus ou évitement des tâches exigeant une attention soutenue • Hyperactivité motrice ou hyperkinésie: –Agitation incessante –Incapacité à rester en place –Activité désordonnée et inefficace • Impulsivité: –Difficultés à attendre –besoin d’agir –Tendance à interrompre les activités d’autrui DEFICIT DE L’ATTENTION/HYPERACTIVITE DONNÉES ÉPIDÉMIOLOGIQUES Prévalence DSM entre 5 et 10% CIM entre 0,4 et 4,2%, moy 2% 3 à 4 garçons pour une fille Prévalence diminue avec l’âge surtout chez les garçons DEFICIT DE L’ATTENTION/HYPERACTIVITE DONNÉES ÉPIDÉMIOLOGIQUES Changement des Prévalences avec le DSM IV qui différencie des sous types: Forme inattentive 5,4% Forme hyperactive 2,4% Forme mixte 3,6% DSM III 9,6% DSM IV 17,8% DEFICIT DE L’ATTENTION/HYPERACTIVITE DIAGNOSTIC Possible à partir de 6 ans mais symptômes repérables à partir de 3 ans Repose sur les critères du DSM IV TR Au moins 6 critères d’inattention Au moins 6 critères d’hyperactivité ou d’impulsivité Observés dans deux environnements différents ou plus Effets néfastes sur le fonctionnement scolaire ou social de l’enfant DEFICIT DE L’ATTENTION/HYPERACTIVITE COMORBIDITÉ % Trouble oppositionnel avec provocation Trouble des conduites 30-50 25 Trouble de l’humeur 18 Trouble anxieux 25 Trouble des apprentissages 15-60 DEFICIT DE L’ATTENTION/HYPERACTIVITE QUESTIONNAIRES ET ÉCHELLES Ne se substituent pas au diagnostic du spécialiste Echelles de Conners: observation comportementale principalement de l’hyperactivité Forme parents, forme enseignant, index d’hyperactivité ADHD rating scale: vérifie les critères du DSM IV DEFICIT DE L’ATTENTION/HYPERACTIVITE AUTRES ÉVALUATIONS Aucun marqueur physique, aucun test cognitif, d’imagerie ou de laboratoire ne peut confirmer ou infirmer ce diagnostic Intérêts d’évaluer la capacité intellectuelle, d’explorer un trouble d’apprentissage Importance des échanges d’informations avec l’enseignant mais avec l’accord de la famille RETARD DE MATURATION DEFICIT DE L’ATTENTION/HYPERACTIVITE ETIOLOGIE • Troubles neuropsychologiques : vigilance, mémoire de travail, troubles de l’attention, … mais cela ne suffit pour expliquer le syndrome. • Vulnérabilité génétique • Troubles des neurotransmetteurs (dopamine, noradrénaline,norepinephrine) • Trouble du fonctionnement préfrontal et du lobe cingulaire antérieur • Facteurs environnementaux: Facteurs prénataux, conflits familiaux, bas niveau socio économique DEFICIT DE L’ATTENTION/HYPERACTIVITE EVOLUTION Persistance possible à l’adolescence voire à l’âge adulte Vulnérabilité vers l ’évolution d’autres troubles: personnalité antisociale, conduites addictives Conséquences scolaires et sociales: rejet, trouble des apprentissages DEFICIT DE L’ATTENTION/HYPERACTIVITE APPROCHE THÉRAPEUTIQUE Dans la majorité des cas la médication seule ne sera pas suffisante DEFICIT DE L’ATTENTION/HYPERACTIVITE APPROCHE MÉDICAMENTEUSE Psychostimulants Méthylphénidate (Ritaline) Amphétamine (Aderall) (USA) Inhibiteur selectif de la recapture de la norépinephrine Atomoxetine (Strattera) Antidépresseurs Bupropion (Wellbutrin) (USA) Agonists alpha adrénergiques Clonidine (Catapressan) Guanfacine (Tenex) (Usa) DEFICIT DE L’ATTENTION/HYPERACTIVITE METHYLPHÉNIDATE En France Prescription initiale par le spécialiste Posologie: entre 0,5et 1 mg/kg/j Soit 10 à 60 mg/j Dose progressive en deux à trois prises au cours de la journée Il exsiste aussi des formes LP (Ritaline LP; Concerta(18 à 54 mg/j) Quasym (10 à 40 mg) DEFICIT DE L’ATTENTION/HYPERACTIVITE METHYLPHÉNIDATE Durée Globale, arrêt de week end ou de vacances en fonction des cas Effets indésirables peu nombreux, proportionnels aux doses (insomnie d’endormissement, diminution de l’appétit avec ou sans perte de poids, irritabilité, douleurs abdominales, céphalées) Retentissement sur la croissance? Problème des tics Pas de dépendance observée Surveillance en cas d’épilepsie DEFICIT DE L’ATTENTION/HYPERACTIVITE INTERVENTIONS AUPRÈS DE L’ENFANT OU L’ADOLESCENT Thérapie comportementale Moins efficace que le traitement médicamenteux et elles ne contribuent pas à l’arrêt du traitement Psychothérapie individuelle Cognitive: peu de résultats Psychodynamique: en particulier si comorbidité anxieuse, dépressive. Permet à l’enfant d’être actif dans le soin Activités sportives et de loisirs Aide instrumentale DEFICIT DE L’ATTENTION/HYPERACTIVITE INTERVENTIONS AUPRÈS DE LA FAMILLE Thérapie familiale Groupe de soutien Programme d’entraînement des parents Approche éducative DEFICIT DE L’ATTENTION/HYPERACTIVITE INTERVENTION AUPRÈS DE L’ÉCOLE Aide pédagogique TROUBLE OPPOSITIONNEL CLINIQUE Ensemble de comportement négativistes, hostiles ou provocateurs persistant pendant au moins 6 mois durant lesquelles sont présentes au moins 4 des manifestation suivantes: • Se met souvent en colère • Conteste souvent ce que disent les adultes • S’oppose souvent activement ou refuse de se plier aux demandes ou aux règles des adultes • Embête souvent les autres délibérément • Fait souvent porter à autrui la responsabilité de ses actes, ses erreurs, sa conduite • Susceptible, facilement agacé • Souvent fâché, plein de ressentiment • Méchant ou vindicatif • altération scolaire ou social • Faible estime de soi, intolérance à la frustration TROUBLE OPPOSITIONNEL EPIDÉMIOLOGIE Début vers 8 ans, classiquement avant l’adolescence Plus fréquent chez le garçon que la fille avant la puberté Sex ratio: 1 après la puberté TROUBLE OPPOSITIONNEL EVOLUTION Favorable dans 25% des cas Stabilisation possible Evolution vers le trouble des conduites, et les conduites addictives, personnalité antisociale Comorbidité fréquente: TDAH TROUBLE OPPOSITIONNEL AXES THÉRAPEUTIQUES Guidance parentale Groupe parole de parents Thérapie familiale systémique ou psychodynamique Approche cognitivo-comportementale Psychothérapie psychodynamique de l’enfant TROUBLE DES CONDUITES CLINIQUE • Apparition progressive des troubles • Ensemble de conduites agressives répétitives et persistantes • Au cours des 12 derniers mois (3 critères ou plus) et au moins 1 des critères diagnostiques présent au cours des 6 derniers mois: - Agressivité envers des personnes ou des animaux - Destruction de biens matériels - Vol ou fraude - Violation grave de règles - Altération du fonctionnement social, scolaire - Usage régulier de tabac, alcool et autres toxiques - Faible estime de soi - Pensées, gestes et actes suicidaires fréquents - Modèles parentaux fragiles: conjugopathie, personnalité antisociale de l’un des parents, conduites addictives TROUBLE DES CONDUITES EPIDÉMIOLOGIE Commence avant 18 ans: 10/12 ans pour les garçons; 14/16ans pour les filles 6 à 16% des garçons et 2 à 9% des filles Plus fréquent chez les garçons Plus fréquents dans les familles ou il existe des difficultés socio économiques, monoparentales, conduites addictives et personnalité antisociale TROUBLE DES CONDUITES ETIOLOGIE • Facteurs neurobiologiques: dysfonctionnement noradrénargique, baisse du taux de sérotonine dans LCR corrélé négativement avec l’agressivité et la violence, dysfonctionnement du système nerveux central. • Facteurs familiaux et socioculturels: agressivité verbale et physique répétitive de la part des parents, conditions de vie défavorables, …. TROUBLE DES CONDUITES EVOLUTION Plus l’âge est jeune, plus mauvais est le pronostic Trouble des apprentissages Vulnérabilité accrue: conduites addictives, troubles de l’humeur Risque de développer une personnalité antisociale TROUBLE DES CONDUITES AXES THÉRAPEUTIQUES Guidance parentale Groupe parole de parents Thérapie familiale systémique ou psychodynamique Approche cognitivo-comportementale Psychothérapie psychodynamique de l’enfant Aide médicamenteuse: neuroleptiques, anticonvulsivants thymorégulateurs APPROCHE PSYCHODYNAMIQUE APPORTS DES THÉORIES PSYCHANALYTIQUES Freud Du besoin au désir Notion de plaisir Notion de pulsion Notion de libido, notion de pulsion de vie Notion d’instinct de mort Importance des liaisons objectales LA CONSCIENCE RÉFLEXIVE Vécu identitaire, construction d’une représentation de soi : au carrefour des modèles (estime de soi, stade du miroir) Le regard du groupe, le regard de soi sur soi La toute puissance infantile: le moi idéal Faire face au Surmoi (intériorisation des interdits) Moi et Self L’idéal du moi Ecart entre le moi et l’idéal du moi: Motivations, frustrations CANALISER SON AGRESSIVITÉ Processus de civilisation: canalisation de l’agressivité Accepter le manque? Notion de castration Le paradoxe de Winnicott: avoir connu l’illusion du tout pour accepter le manque UNE FRUSTRATION INTOLÉRABLE? La dévalorisation narcissique Echec de la capacité de rêverie, du recours à l’imaginaire Agressivité et agir Impossible dépassement de la position dépressive (Mélanie Klein) FAIRE FACE À LA DIFFÉRENCE L’impossibilité de se confronter à la différence La menace identitaire Haine et destructivité SOLIDITE NARCISSIQUE Avoir été investi Comme un sujet autonome Respect de la barrière générationnelle Accès à la tierceité Accès au conflit oedipien Avoir connu des limites adaptées à ses besoins Canaliser son agressivité QUELS OUTILS THÉORIQUES Le trouble du comportment doit s’analyser sous un angle psychopathologique Repérage des organisations psychiques APPROCHE PSYCHOPATHOLOGIQUE ORGANISATION NÉVROTIQUE Moi différencié, constitution d’un espace psychique séparé des autres Inscription dans le principe de réalité Pas de confusion générationnelle Organisé par le conflit œdipien: interdit posé Accès à la culpabilité Angoisse de castration APPROCHE PSYCHOPATHOLOGIQUE ORGANISATION PSYCHOTIQUE Moi non constitué, possibilité de faux self Pas d’inscription dans le principe de réalité Angoisse d’anéantissement, d’intrusion, de morcellement APPROCHE PSYCHOPATHOLOGIQUE ORGANISATION LIMITE Moi constitué mais fragilité de l’enveloppe, reste dépendant du lien à l’autre Reconnaissance fragile du principe de réalité Confusion générationnelle Pas de véritable organisation œdipienne, pas de véritable accès à l’interdit Fragilité narcissique, sentiment de honte Angoisse de séparation, d’abandon APPROCHE PSYCHOPATHOLOGIQUE ORGANISATION PERVERSE Moi différencié, constitution d’un espace psychique séparé des autres Inscription dans le principe de réalité Pas de confusion générationnelle Conflit œdipien refusé: interdit nié Pas de culpabilité Pas d’angoisse ADOLESCENCE ET TROUBLES DU COMPORTEMENT L’ADOLESCENCE: UNE PÉRIODE SENSIBLE Faire face au processus pubertaire Excitation pulsionnelle Interrogation narcissique TROUBLES DU COMPORTEMENT À L’ADOLESCENCE Conduites à risque: accident de la voie publique Crise clastique, intolérance à la frustration Suicide et tentative de suicide Abus et dépendance à des substances psychoactives Emotion Motivation Cognition Emotion Cognition Motricité PRISE DE RISQUE DEATHS IN ADOLESCENCE = 5 X DEATHS IN CHILDHOOD Youth Risk Behavior Surveillance System 2010 PROCESSUS D’ADOLESCENCE ETAPE1 Impact traumatique de la puberté Modification de l’équilibre psychique de l’enfance Accession à la sexualité adulte PROCESSUS D’ADOLESCENCE Etape2 Excitation sexuelle Modifications du corps Travail de deuil de l’enfance Dépressivité PROCESSUS D’ADOLESCENCE Etape3 Mise en place de mécanismes de défense Travail identitaire et Sollicitation du narcissisme La question de l’Idéal PROCESSUS D’ADOLESCENCE Etape 4 Renoncement à la bisexualité Construction de l’identité sexuée Orientation sexuelle QUAND LES BASES SONT FRAGILES Le risque de l’effraction narcissique: pathologie de la dépendance Sentiment d’impasse Carence imaginaire L’impossible déception Le pire ne déçoit jamais Le risque de l’idéal tyrannique Le tout ou rien Le recours aux sensations Le besoin de maîtrise La crainte du lien affectif LA DEMANDE DE RÉPARATION La recherche d’un contenant La tendance antisociale ACCUEILLIR L’ADOLESCENT, LA FAMILLE, L’ENTOURAGE, LE RÉSEAU FACE AU PASSAGE À L’ACTE Un cadre clair et adapté Des objectifs énoncés Un travail pluridisciplinaire Un travail en réseau NOS OUTILS Repérage symptomatique Démarche diagnostique Hypothèses psychopathologiques FONCTION CONTENANTE Investissement Détoxifier le comportement par un travail de mise en sens (Bion) Tenir une continuité Incarner un cadre fiable Lutte contre l’injonction paradoxale Préserver le bon, le soin FONCTION CONTENANTE Place de la contrainte Se confronter à des limites bienveillantes Renforcer le narcissisme Injecter du tiers Sortir du rapport de force Utilisation de la sanction SPÉCIFICITÉS HUMAINES Souffrance identitaire Haine et destructivité A tous les âges Attention à la surpsychiatrisation Importance des facteurs anthropologiques, sociologiques, culturels,… ET LES ADULTES DANS TOUT CELA? Idéaux de société et le manque Rapport à l’idéal: la culture du zéro risque Le rejet des différences: égalitarisme Confiance dans les adolescents? Représentations paradoxales des adultes de la jeunesse: peur et envie