20 ANS Peer-reviewed article Diabétologie pédiatrique: bilan des années 1994-2014 Harry Dorchy Clinique de Diabétologie, Hôpital Universitaire des Enfants Reine Fabiola, ULB, Bruxelles En 2015, la guérison du diabète de type 1 n’existe pas et il est impossible de la prédire. Ce qui est certain, c’est que les complications potentiellement invalidantes peuvent être prévenues en maintenant une HbA1c < 7%, et c’est possible avec les moyens thérapeutiques actuels et pas nécessairement les plus chers ou les plus «high-tech». Seul le résultat compte: bonne HbA1c et bonne qualité de vie. Pas de dogmatisme! Depuis peu d’années, les pédiatres-diabétologues rencontrent de plus en plus de cas de diabète de type 2 liés à l’obésité croissante et diagnostiquent plusieurs formes de diabètes monogéniques (Maturity Onset Diabetes of the Young ou MODY). Cet article se limite à l’évolution de la diabétologie pédiatrique depuis la naissance de Percentile. La référence 1 permet de remonter aux années 1950. Diabetes Control and Complication Trial (DCCT) Dans les années 1990, les moyens thérapeutiques à disposition pouvaient permettre l’obtention d’un bon contrôle glycémique, donc d’une hémoglobine glyquée la plus proche possible des valeurs normales, afin d’éviter des complications invalidantes à long terme, mais aussi les hypoglycémies sévères à court terme. L’étude américaine Diabetes Control and Complication Trial (DCCT) a prouvé, chez des patients diabétiques insulinodépendants, âgés de 13 à 39 ans au début de l’étude, qu’en gagnant 2% d’HbA1c sur une durée moyenne de 6,5 ans (7% versus 9%; limite normale supérieure = 6%), on réduisait le risque de rétinopathie de 76%, de neuropathie de 60%, de néphropathie de 54% (2). Toutefois, le risque d’hypoglycémies sévères est multiplié par trois. Dans le groupe des adolescents au traitement dit «intensif» inclus dans l’étude DCCT, les résultats étaient moins bons en termes d’HbA1c moyenne, environ 8% (soit 1% de plus que dans la cohorte totale), alors que le groupe des adolescents sous traitement «conventionnel» atteignait une HbA1c d’environ 10%. Années 1990-2000: stagnation des progrès thérapeutiques mais études sur l’HbA1c P1147F A la fin des années 1990, le traitement des jeunes diabétiques, dans ses grandes lignes, est le même que 10 ans plus tôt (1). Centres de diabétologie pédiatrique En Belgique, depuis 1997 (avec adaptation en 2007), l’INAMI reconnaît comme centres de diabétologie pédiatrique ceux qui suivent plus de 60 enfants et adolescents de moins de 18 ans, par une équipe pluridisciplinaire d’éducation à l’autosurveillance et à l’autotraitement, comprenant au moins un(e) pédiatre-diabétologue, un(e) infirmièr(e) spécialisé(e), un(e) diététicien(ne), un(e) psychologue, un(e) assistant(e) social(e), une secrétaire. De facto, il y en a actuellement 15 pour le pays, ce qui est sans doute suffisant, mais en 2012, plus de 400 enfants diabétiques de moins de 18 ans, sur les 2.700 recensés par l’INAMI, étaient encore suivis dans des centres de diabétologie pour adultes. L’INAMI, par la convention de diabétologie pédiatrique, permet aux enfants diabétiques d’avoir le meilleur encadrement (para)médical, en qualité (spécialistes en pédiatrie et en diabétologie) et en quantité (3 fois plus de personnel que dans la convention pour adultes pour s’occuper des enfants et des adolescents diabétiques), sans compter la possibilité de se rendre sur les lieux de vie, école ou domicile. Les centres pour adultes ne peuvent plus qu’exceptionnellement suivre un enfant diabétique, après justification écrite lors de la demande de convention signée par le patient ou son représentant légal. Est-ce appliqué ? Hvidoere Study Group on Childhood Diabetes Dès 1994, nous avions montré qu’on pouvait obtenir une HbA1c proche de 7% aussi bien avec une insulinothérapie à 2 injections quotidiennes d’un mélange individualisé d’insulines «humaines» dans une seringue qu’avec une insulinothérapie basale-prandiale (3, 4). En 1994, un groupe d’étude international (Hvidoere Study Group on Childhood Diabetes) a été créé pour discuter des stratégies qui pourraient améliorer la qualité des soins aux enfants et adolescents diabétiques afin d’éviter des complications qui ne sont manifestes qu’au-delà de l’âge pédiatrique, mais qui se sont 7 Percentile|Vol 20|N°2|2015 préparées à bas bruit dès l’enfance en cas de traitement ne diminuant pas l’hémoglobine glyquée à des valeurs protectrices. Au départ, c’est un groupe international comprenant 22 centres de diabétologie pédiatrique de 18 pays industrialisés en Europe, en Amérique du Nord et au Japon. Dans les années 1990, ce groupe a réalisé deux comparaisons internationales des taux d’hémoglobine glyquée obtenus dans chaque centre de diabétologie pédiatrique, la première en 1995 chez tous les enfants diabétiques âgés de 0 à 18 ans, la deuxième fois en 1998 chez tous les adolescents diabétiques âgés de 11 à 18 ans de 21 centres de diabétologie de 17 pays parmi les 18 de l’étude précédente (5, 6). Le dosage de l’HbA1c était centralisé au Danemark pour standardiser le dosage (moyenne des valeurs normales = 5,4%; limite supérieure des valeurs normales = 6,3%, donc un peu plus haute que dans l’étude américaine DCCT, 6%), et éviter les «tricheries». Les résultats montrent que le taux moyen d’HbA1c, après contrôle des variables confondantes, est insuffisant: 8,6% en 1995 et 8,7% en 1998. Les taux les plus bas sont obtenus à Bruxelles à l’HUDERF, alors que la majorité des patients a une insulinothérapie en 2 injections d’un mélange individualisé d’insulines dans une seringue. Le nombre d’injections d’insuline par jour (2 ou ≥ 4 jour) n’induit pas nécessairement une meilleure HbA1c. Il est inexact d’assimiler une insulinothérapie en 4 injections à un «traitement intensifié» et une insulinothérapie en 2 injections à un «traitement conventionnel non intensifié». Les centres de diabétologie pédiatriques qui obtiennent les meilleurs résultats glycémiques sont aussi ceux qui protègent au mieux leurs patients des hypoglycémies sévères. Une meilleure HbA1c est associée à moins de soucis et à un meilleur bien-être chez les adolescents. Les résultats obtenus à l’HUDERF lors de l’étude de 1995 ont été publiés séparément dans la revue américaine Diabetes Care (7). Figure 1: L’iBGstar® de 2013 se connecte à un iPhone ou un iPod. Rapid® (de Novo Nordisk), glulisine ou Apidra® (de Sanofi Aventis). Ils ont une pharmacocinétique et des effets métaboliques similaires, avec une variabilité intra-individuelle de 10 à 20%, comme pour l’insuline humaine. Ils maîtrisent mieux l’hyperglycémie postprandiale. Les chercheurs ont aussi créé des analogues de l’insuline à action retardée pour obtenir une action plus plane et plus reproductible d’un jour à l’autre. Depuis janvier 2004, on dispose sur le marché belge d’un analogue à longue durée d’action qui est l’insuline glargine ou Lantus® (de Sanofi Aventis). Novo Nordisk a lancé un autre analogue à action retardée, la detemir ou Levemir®, remboursée par l’INAMI depuis novembre 2005. La durée d’action de la detemir comme de la glargine est proche de 24h. L’action de la Levemir® est significativement plus reproductible que celle de la Lantus®, qui elle-même a un meilleur coefficient de variation pharmacocinétique que l’insuline humaine à action retardée NPH (8). Les voies alternatives de l’administration d’insuline (orale, transdermique, nasale) ont échoué. Un système d’inhalation par voie pulmonaire a donné des résultats intéressants, mais le risque d’altération pulmonaire à long terme a conduit l’industrie pharmaceutique à interrompre les programmes de développement. Mesure continue de la glycémie et pompes La technologie des lecteurs de glycémie pour l’autosurveillance à domicile a considérablement évolué avec des «gadgets» non nécessairement utiles pour tous (Figure 1). C’est au pédiatre-diabétologue de choisir le modèle le mieux adapté pour chaque patient, et non pas à un quelconque administratif directeur des achats, comme certains tentent de le Figure 2: Taux moyens d’HbA1c dans la 4e comparaison internationale du Hvidoere Study Group chez les enfants diabétiques de moins de 11 ans. HbA1c moyenne (%) 10 9,5 9 8,5 8 7,5 Al le Be lg m iq ag ue ne (D (N or eu ch Ita ,T y) lie u bi (C ng hi ar en ell i, C ) Al US hiet lem Itali i A e (Fi ) ( ag s ne Van ell her) (D Lu i, P a xe nn ar m m bo e, H a) a ur g ( nno ve de r) Be au fo Isr r a t el ) Su (P iss hi e( Es Sc lip) p h ag oe Da ne nl ne e (C m as ) ar k( ta no M Au or ) str te ali ns e( en C ) a Ja po me ro n( n) Ur ak Su èd am i) e( Am an No UK ) (B rv ar èg re e( tt) Nj Fr an olsta M ce d) ac (R éd o oi ne bert Fin ) (K lan oc de ova ) (K ap I rl rio an ) de (H oe y) 7 Centres de diabétologie pédiatrique (enfants < 11 ans, 2009) faire au mépris des conventions de l’INAMI. Il faut aussi être conscient de ce que l’erreur tolérée dans la mesure glycémique capillaire, en conformité avec les normes ISO de 2013, obligatoires en 2016, peut atteindre ± 15mg/dl à des concentrations de glucose < 75mg/dl, et ± 20% au-dessus de 75mg/dl! Années 2000-2010 Analogues de l’insuline En modifiant la structure de l’insuline humaine (d’où le mot «analogue»), des chercheurs sont parvenus à créer des insulines monomériques qui agissent, grosso modo, 2 fois plus vite et 2 fois moins longtemps que l’insuline humaine à action rapide. Sur le marché belge, on dispose des analogues ultrarapides lispro ou Humalog® (de Lilly), asparte ou Novo- Des systèmes de mesure continue du glucose par voie sous-cutanée sont développés. Un système d’alerte permet de prévoir et de préve- 8 Percentile|Vol 20|N°2|2015 nir des hypoglycémies sévères. Un problème majeur est que le pic de concentration de glucose dans le liquide interstitiel se produit jusqu’à 45 minutes après le pic sanguin. Pour développer une mesure continue de la glycémie de façon non invasive optiquement ou par voie transdermique, une dizaine de technologies sont ou ont été essayées (infrarouges, spectroscopie, etc). Toutefois, aucun de ces appareils ne remplit les critères adéquats pour une utilisation clinique. congénitale, etc.); éviction de certaines protéines du lait de vache (sérum albumine bovine, A1 ß- caséine, etc) en donnant exclusivement le sein ou des diètes semi-élémentaires (Nutramigen®, Alfaré®) pendant les premiers mois de vie chez les enfants de mère ou de père diabétique; éviction des nitrites, nitrates et nitrosamines (eau et légumes contaminés, viandes fumées), etc.; suppléments en vitamine D pour les femmes enceintes diabétiques et leur nourrisson. Certains capteurs du glucose interstitiel transmettent leur information par radio-fréquence à un moniteur qui permet de lire la glycémie en temps réel, disent les fabricants, mais en fait avec un décalage puisque le glucose n’est pas mesuré directement dans le sang, sans compter que leur calibration se fait par des mesures capillaires de la glycémie avec un glucomètre classique dont l’erreur n’est pas négligeable (voir plus haut). Ils sont chers et toujours non remboursés en 2015 pour les enfants et adolescents diabétiques de type 1. Le capteur peut aussi transmettre ses informations à une pompe à insuline. Même s’ils sont commercialisés, ces systèmes ne peuvent pas fonctionner sans l’intervention intellectuelle et manuelle du patient. Les algorithmes d’adaptation des doses d’insuline injectées par la pompe en fonction des glycémies envoyées par le capteur sont loin d’être totalement satisfaisants. Quid de l’activité physique ? En plus, la cinétique des bolus d’insuline est trop lente. Toutefois, un intérêt majeur est de pouvoir stopper automatiquement l’injection d’insuline en cas d’hypoglycémie. Le moniteur idéal pour la mesure continue du glucose est difficile à atteindre, et la boucle est loin d’être fermée entre le capteur de glucose et la pompe à insuline («pancréas artificiel»). Années 2000-2015 Leçons des 4 comparaisons internationales des taux d’HbA1c du «Hvidoere Study Group on Childhood Diabetes» Une troisième comparaison internationale des taux d’HbA1c chez des adolescents diabétiques âgés de 11 à 18 ans, a été organisée en 2005 par par le Hvidoere Study Group on Childhood Diabetes dans 21 centres de diabétologie pédiatrique de 19 pays industrialisés (Allemagne, Australie, Belgique, Canada, Danemark, Espagne, Finlande, Grande-Bretagne (2 centres), Irlande, Israël, Italie (2 centres), Japon, Luxembourg, Macédoine, Norvège, Pays-Bas, Suède, Suisse, USA) (10). A nouveau le dosage de l’HbA1c a été centralisé au laboratoire du Steno Diabetes Center au Danemark (limite supérieure normale: 6,3%). La moyenne des taux d’HbA1c des 2.062 adolescents est de 8,2%, 8,6% en alignant le dosage sur la DCCT. Pour comparer les résultats des 3 études (1995, 1998, 2005), des méthodes statistiques complexes ont été utilisées. Il en ressort que l’HbA1c moyenne n’est pas statistiquement différente à 10 ans d’intervalle: 1995: 8,5%; 1998: 8,7%; 2005: 8,6%. Et ceci alors qu’en 2005, 44% des patients ont une insulinothérapie basaleprandiale et 16% une pompe à insuline. En plus, dans les études de 1995 et 1998, les analogues de l’insuline n’existaient pas. L’étude de 2005 montre une fois de plus que les taux d’HbA1c significativement les plus bas sont obtenus par 2 injections quotidiennes d’un mélange individualisé d’insulines dans une seringue (HUDERF, Bruxelles), devant l’insulinothérapie basale-prandiale et les pompes. Les taux d’HbA1c significativement les plus hauts sont attribués au système à 2 injections avec des mélanges tout faits d’insuline pour stylo-injecteur. Greffe d’îlots de Langerhans Depuis la première greffe du pancréas en 1966, près de 25.500 transplantations ont été réalisées dans le monde jusqu’en 2009. Elles se font quasiment exclusivement chez des patients à qui on doit greffer un rein pour insuffisance rénale, ce qui ne se produit pas à l’âge pédiatrique. Le traitement immunosuppresseur à vie provoque beaucoup d’effets secondaires (hypercholestérolémie, hypertension, infections, cancer, ulcères des muqueuses, toxicité rénale, etc). La survie du greffon à 1 an atteint 87%, à 5 ans, 72%. Est-ce que la transplantation des îlots de Langerhans est une option pour les enfants diabétiques? Non répond J. Shapiro, célèbre pour le «protocole d’Edmonton» qui a obtenu les meilleurs résultats dans la transplantation d’îlots avec un traitement immunosuppresseur sans corticoïdes (9), mais la survie de la greffe est inférieure à 10% après 5 ans. Il écrit que l’insulinothérapie «split mixed or basal/bolus insulin provides an excellent treatment option». Une 4e étude, lancée en 2009 et publiée en 2013, a inclus 1.113 enfants âgés de moins de 11 ans de 18 centres d’Europe, d’Amérique du nord, d’Australie et du Japon, avec la même méthodologie que dans l’étude précédente (11). L’HbA1c moyenne (dosage aligné sur la DCCT) est 8,3%. Malgré de grands changements dans le traitement (> 99% des patients injectent des analogues de l’insuline et 32% sont sous pompe à insuline), l’HbA1c moyenne a peu diminué. Comme dans l’étude de 2005 chez les adolescents, le meilleur contrôle glycémique (HbA1c = 7,3 ± 0,5%) est atteint par 2 injections quotidiennes d’un mélange individualisé d’insulines dans une seringue (HUDERF, Bruxelles) (Figure 2). Les autres essais de guérison du diabète de type 1 n’aboutissent toujours pas: transformation de diverses cellules souches adultes ou embryonnaires en cellules ß, pancréas bio-artificiel (encapsulation d’îlots de Langerhans), clonage thérapeutique, thérapie génique, etc. En 2013, Cameron et al. (12) ont tiré les leçons des 4 études du H ­ vidoere Study Group (1995, 1998, 2005, 2009). Les auteurs notent que «The one center that has consistently had the lowest HbA1c values from 1995 to 2009» est à Bruxelles (HUDERF). Ils commentent: «The Hvidoere member in question is highly charismatic and has a very prescriptive, ‘recipe’-based approach to managing diabetes in his clinic. He prescribes mostly twice-daily free mixing injections of insulin and eschews, a flexible approach to dietary intake. This does not appear to be at the expense of either hypoglycemia or QOL in his patient group. Although many aspects of his practice are shared by other Hvidoere members, it has proved very difficult to translate this total approach into other Plusieurs expérimentations s’efforcent de favoriser la rémission au début du diabète par immunosuppression transitoire avec l’anticorps monoclonal anti CD3, par immunothérapie avec la Gad65, etc. Aucune guérison n’est en vue. Prévention du diabète La prévention primaire du diabète dépend de l’identification des agents de l’environnement impliqués dans le déclenchement du mécanisme auto-immun responsable de la destruction des cellules ß chez les individus prédisposés: vaccination contre les virus diabétogènes (rubéole 9 Percentile|Vol 20|N°2|2015 contexts for a variety of reasons. However, this experience is emblematic that consistently excellent outcomes can be achieved by simple, ‘non-intensive’ insulin regimens that are underpinned by a strong philosophy of care». Dans leur revue, Cameron et al. concluent: «Therapeutic strategies in and of themselves are not enough to obtained desired clinical outcomes. While all clinical regimens have some clinical utility, it is the underlying therapeutic philosophy based on a qualified common training for all team members delivering diabetes care and education to the families that drives improvement. The clinical aphorism of ‘Ask for mediocrity and you will receive’ holds true. Thus, it appears that the best results will be obtained by physicians who are target-driven and teams and families that have unanimity of purpose. Perhaps the conclusions relating the best clinical practice drawn from the entire body of work of the Hvidoere studies can be best summarized as -be dogmatic about outcome but flexible in approach.» Ceci signifie que des traitements coûteux et techniquement sophistiqués n’ont quasiment pas d’impact sur l’HbA1c. La stratégie à l’HUDERF est publiée (13, 14). En Belgique (Health Services Research Unit, Scientific Institute of Public Health) une comparaison des taux d’HbA1c a été réalisée dans 12 centres de diabétologie pédiatrique chez 974 patients avec un diabète de type 1, âgés de moins de 18 ans (15). L’HbA1c médiane valait 7,7% (la médiane donne une valeur plus basse que la moyenne qui n’est pas citée dans cet article), ce qui se compare favorablement aux résultats internationaux. Les biais majeurs sont que le dosage de l’HbA1c était local et non centralisé, et que l’étude comportait moins de la moitié des enfants diabétiques suivis dans les conventions pédiatriques de diabétologie. L’HbA1c médiane était 7,5% avec 2 injections quotidiennes d’un mélange d’insulines (free mix), 7,7% pour l’insulinothérapie basale-prandiale, et 7,9% pour les pompes à insuline. Figure 3: Le système FreeStyle®Libre de mesure continue du glucose interstitiel. Figure 4: Graphique (FreeStyle®Libre) avec l’évolution de la mesure du glucose interstitiel pendant 16 jours et l’estimation de l’HbA1c. Recherche Au niveau recherche scientifique, on poursuit les travaux des décennies précédentes: greffes du pancréas et des îlots de Langerhans, encapsulation des îlots, clonage, traitement immuno-modulateur au début du diabète (anticorps anti-CD3, anticorps anti-IL1, rituximab, ATG, vaccin GAD, etc). On essaye de lutter contre l’apoptose des cellules ß, de les multiplier, de reprogrammer les cellules acinaires, de transformer des cellules α en cellules ß , de transformer d’autres cellules de l’organisme en cellules ß par génie génétique, etc. Quelques avancées technologiques et scientifiques dans le diabète de type 1 ont été récemment résumées dans Percentile en 2014 (16). Le diabète de type 2 (DT2) ne peut plus être considéré comme une maladie affectant uniquement les adultes. Dans certaines régions des USA, l’incidence du DT2 dépasse celle du DT1 chez les enfants à cause de l’obésité secondaire à la «malbouffe» et à la diminution d’activité physique. Ce qui se passe aux USA commence à toucher l’Europe, avec quelques années de retard. L’insulinorésistance joue un rôle primordial dans l’intolérance glucidique qui précède le DT2. Il faut la dépister chez les adolescents et même chez les enfants obèses, en dehors de tout signe clinique de diabète (18). Un diagnostic différentiel doit parfois être fait entre le DT2 et les diabètes monogéniques (Maturity Onset Diabetes of the Young ou MODY) (18). Actuellement, on dénombre 11 gènes différents associés au MODY. En Belgique, les formes les plus fréquentes sont les MODY 2 (mutation du gène de la glucokinase; 20 à 50% des cas; traitement: généralement régime voire anti-diabétiques oraux ou insuline), 3 (mutation du gène «hepatocyte nuclear factor1-alpha»; 32 à 50% des cas; traitement: généralement, antidiabétiques oraux voire insuline), 1 (mutation du gène hepatocyte nuclear factor4-alpha; 5% des cas; traitement: antidiabétiques oraux voire insuline). Ce sont des diabètes non insulinodépendants, sans présence d’auto­ anticorps ß-insulaires, à transmission autosomique dominante, sans insulinorésistance, débutant avant l’âge de 25 ans. Dans le domaine de la mesure continue du glucose, le FreeStyle Libre® représente un progrès considérable. Un capteur étanche de la taille d’une pièce de 2 euros est placé sur le bras pendant 2 semaines. Il mesure le glucose dans le liquide interstitiel toutes les minutes. Un appareil de la taille d’un petit «smartphone», tenu à la main, scanne le capteur, même à travers les vêtements, pour indiquer le taux de glucose et la tendance de son évolution autant de fois qu’on le souhaite (Figure 3) (Figure 4). Il n’est pas encore accrédité en Belgique en janvier 2015; espérons qu’il soit remboursé par la sécurité sociale. Le progrès prévu est de faire communiquer le capteur et le scanner pour alerter en cas de risque d’hypoglycémie. Le diabète néonatal, transitoire (DNT) ou permanent (DNP), est une pathologie rare. Les mécanismes de la maladie ne sont pas élucidés, même si de nombreuses anomalies génétiques ont été décrites: les plus fréquentes sont les anomalies de la région 6q24 lors d’un DNT et les mutations de gènes codant pour le canal potassique de la cellule ß (KCNJ11 et ABCC8) lors d’un DNP (19). Les diabètes et non le diabète Le diabète de type 1 (DT1) est une maladie auto-immune qui peut être associée à d’autres attaques auto-immunes: thyroïdite d’Hashimoto dans 15% des cas, et cœliaquie chez 4% des patients. Celles-ci doivent être recherchées annuellement (17). 10 Percentile|Vol 20|N°2|2015 Conclusion: pas de dogmatisme Références 1. Dorchy H. (R)evolution in pediatric diabetology. Rev Med Brux 2010;31(Suppl):S9-19. 2. The Diabetes Control and Complications Trial Research Group. The effect of intensive treatment of diabetes on the development and progression of long-term complications in insulin-dependent diabetes mellitus. N Engl J Med 1993;329:977-986. 3. Dorchy H. What glycemic control can be achieved in young diabetics without residual secretion of endogenous insulin? What is the frequency of severe hypoglycemia and subclinical complications? Arch Pediatr 1994;1:970-81. 4. Dorchy H. Dorchy’s recipes explaining the «Intriguing efficacity of Belgian conventional therapy». Diabetes Care 1994;17:458-60. 5. Mortensen HB, Hougaard P. Comparison of metabolic control in a cross-sectional study of 2,873 children and adolescents with IDDM from 18 countries. The Hvidøre Study Group on Childhood Diabetes. Diabetes Care 1997;20:714-20. 6. Hoey H, Aanstoot HJ, Chiarelli F, Daneman D, Danne T, Dorchy H, Fitzgerald M, Garandeau P, Greene S, Holl R, Hougaard P, Kaprio E, Kocova M, Lynggaard H, Martul P, Matsuura N, McGee HM, Mortensen HB, Robertson K, Schoenle E, Sovik O, Swift P, Tsou RM, Vanelli M, Aman J. Good metabolic control is associated with better quality of life in 2,101 adolescents with type 1 diabetes. Diabetes Care 2011;24:1923-28. 7. Dorchy H, Roggemans MP, Willems D. Glycated hemoglobin and related factors in diabetic children and adolescents under 18 years of age: a Belgian experience. Diabetes Care 1997;20:2-6. 8. Heise T, Nosek L, Ronn B, Endahl L, Heinemann L, Kapitza C. Draeger E. Lower within-subject variability of insulin detenir in comparison to NPH insulin and insulin glargine in people with type 1 diabetes. Diabetes 2004; 53:1614-20. 9. Hathout E, Lakey J, Shapiro J. Islet transplant: an option for childhood diabetes? Arch Dis Child 2003;88:591-4. 10. de Beaufort CE, Swift PG, Skinner CT, Aanstoot HJ, Aman J, Cameron F, Martul P, Chiarelli F, Daneman D, Danne T, Dorchy H, Hoey H, Kaprio EA, Kaufman F, Kocova M, Mortensen HB, Njølstad PR, Phillip M, Robertson KJ, Schoenle EJ, Urakami T, Vanelli M. Continuing stability of center differences in pediatric diabetes care: do advances in diabetes treatment improve outcome? The Hvidoere Study Group on Childhood Diabetes. Diabetes Care 2007;30:2245-50. 11. de Beaufort CE, Lange K, Swift PG, Aman J, Cameron F, Castano L, Dorchy H, Fisher LK, Hoey H, Kaprio E, Kocova M, Neu A, Njolstad PR, Phillip M, Schoenle E, Robert JJ, Urukami T, Vanelli M, Danne T, Barrett T, Chiarelli F, Aanstoot HJ, Mortensen HB. Metabolic outcomes in young children with type 1 diabetes differ between treatment centers: the Hvidoere Study in Young Children 2009. Pediatr Diabetes 2013;14:422-8. 12. Cameron FJ, de Beaufort C, Aanstoot HJ, Hoey H, Lange K, Castano L, Mortensen HB. 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Il faut éviter tout dogmatisme et ne pas vénérer les nouvelles «religions» dont font partie l’utilisation systématique de multiples injections, de pompes à insuline qui sont des exoprothèses (Figure 5), d’analogues de l’insuline qui sont plus chers (5x 3ml d’un analogue insulinique à longue durée d’action coûtent près de 60€). Il ne faut pas non plus revenir à une alimentation pesée et croire qu’il existe une relation linéaire entre x unités d’insuline et la métabolisation de y grammes de glucose. Enfin, il est illogique d’adapter uniquement les doses d’insuline d’après des algorithmes simplistes basés sur la glycémie qui précède l’injection. Si on veut connaître le vainqueur de la course du 800 mètres, on le sait à l’arrivée et non pas au départ… Figure 5: Pompe à insuline (MiniMed®) et cathéter. En Belgique, on peut être fier de l’INAMI qui, via la convention spécifique de diabétologie pédiatrique, offre la possibilité d’une prise en charge optimale et gratuite des enfants et des adolescents diabétiques. Toutefois, devant les résultats des études du Hvidoere Study Group on Childhood Diabetes prouvant que la pompe est loin d’être la panacée, il est paradoxal que l’INAMI verse mensuellement un supplément, par rapport au forfait de la convention de diabétologie (183,16€), de 198,63€ par patient sous pompe à insuline, soit, au total 381,79€ par patient et par mois et donc 4.581,48€ (au lieu de 2.197,92) par an! C’est du gaspillage financier dans bien des cas si on ne doit pas prouver qu’on améliore l’HbA1c avec une pompe par rapport à une insulinothérapie moins coûteuse. L’économie engendrée permettrait la gratuité de la mesure continue de la glycémie, ce qui serait bien plus utile dans des cas précis (quel que soit le type d’insulinothérapie) pour mieux adapter les doses d’insuline et prévenir les hypoglycémies sévères. Retrouvez Percentile sur internet www.percentile.be 11 Percentile|Vol 20|N°2|2015