SOLVAY DIGEST DECEMBRE 2003 N°28 E d i t o Fidèle à ses engagements, Pancréascopie vous propose un numéro essentiellement clinique et pratique sur les principales affections pancréatiques. Le point est fait sur l’intérêt et l’interprétation du dosage des enzymes pancréatiques, notamment sur l'augmentation chronique et idiopathique de l'amylasémie, entité qui doit être connue pour éviter la réalisation d'examens inutiles, parfois invasifs, et ne pas inquiéter le patient. La pancréatite chronique fait l’objet d’une mise au point détaillée, concernant sa prise en charge multidisciplinaire. Les critères de non résécabilité du cancer du pancréas sont rappelés. L’article sur les lésions kystiques pancréatiques de découverte fortuite est essentiel : l'article analysé montre que plus de 60 % des lésions asymptomatiques étaient pré-cancéreuses ou cancéreuses. Cette situation de plus en plus fréquente résulte des progrès de l’imagerie liés à la sensibilité de détection des lésions et à la diffusion des techniques d'imagerie médicale. Parallèlement, la formation des médecins chargés de prendre en charge les maladies pancréatiques se développe. Par exemple, le diagnostic erroné de pseudokyste, qui était proche de 40 % dans les séries anciennes est passé à moins de 10 % dans une étude française récente. L'enjeu diagnostique est important car la sanction thérapeutique peut aller d'une simple surveillance à une résection pancréatique « prophylactique » parfois étendue, en cas de tumeur intra-canalaire papillaire et mucineuse. Nous vous souhaitons bonne lecture Patrick Hastier RÉDACTEUR EN CHEF : Pr Philippe Lévy, Hôpital Beaujon (Clichy) COMITÉ DE LECTURE : Pr Marc Barthet, Hôpital Nord (Marseille) Pr Louis Buscail, CHU Rangueil (Toulouse) Dr Patrick Hastier, CH Princesse Grace (Monaco) Dr Marc Zins, Fondation Hôpital St Joseph (Paris) S o m m a i r e INTERVIEW (PR J-P. BERNARD) P. 2-3 Quand doser et comment interpréter les dosages des enzymes pancréatiques ? Différents dosages sont à notre disposition pour diagnostiquer une pancréatite aiguë. Ce fût l’un des objets de la conférence de consensus française sur la pancréatite aiguë (2001) de clarifier cette question MISE AU POINT (PR M. BARTHET) P. 4-6 Que peut-on attendre du traitement médical de la pancréatite chronique ? Il n’est pas possible d’envisager de traiter un patient atteint de pancréatite chronique sans débuter par une prise en charge médicale, qui dans la moitié des cas permettra de stabiliser l’évolution de la maladie et de contrôler les symptômes. EN PRATIQUE (PR J-L. FAUCHERON) P. 7-9 Critères de résécabilité d’un cancer du pancréas La seule chance de guérison d'un patient atteint d'un cancer du pancréas passe par la résection chirurgicale. Cela revient à dire que récuser un patient pour une intervention sur une simple suspicion d'inextirpabilité en imagerie pourrait le condamner à tort. IMAGE COMMENTÉE (DR P. HASTIER) P. 10-11 Masse péri-duodénale et diarrhée chronique P. 12 PUBLICATION COMMENTÉE (DR H. BÉCHEUR) Attention aux lésions kystiques pancréatiques de découverte fortuite ! REVUE DE PRESSE (DR H. BÉCHEUR) P. 13-15 Interview Quand doser et comment interpréter les dosages des enzymes pancréatiques ? ifférents dosages sont à notre disposition pour diagnostiquer une pancréatite aiguë. Ce fût l’un des objets de la conférence de consensus française sur la pancréatite aiguë (2001) de clarifier cette question. Le Pr JP Bernard (Marseille) fait le point sur l’utilité de ces dosages et la chronologie des examens à réaliser. D Pancréascopie : Quand faut-il demander le dosage des enzymes pancréatiques ? Pr J.P. Bernard : Deux situations sont à envisager. ➊ La première est le cas où le diagnostic de pancréatite aiguë (PA) est hautement probable devant la présence de signes cliniques très évocateurs. On a besoin alors d’un test de confirmation. Le dosage de la lipasémie est le seul indiqué. Il devrait désormais être accessible dans tous les laboratoires d’urgence. Il remplit toutes les conditions pour donner cette confirmation biologique. Cependant, il faut savoir que la spécificité de ce dosage n’est pas absolue, mais pour des valeurs supérieures à trois fois la normale, il existe une bonne spécificité (96 %). De plus, la sensibilité du test diminue si le dosage est réalisé au-delà des 48 premières heures après l’apparition des signes cliniques. Le dosage conjoint de la lipasémie et de l’amylasémie n’a aucun intérêt par rapport au dosage de la lipasémie seul. Il ne fait que rajouter un coût. Rappelons de plus que le dosage de l’amylasémie seule est peu spécifique puisqu’elle augmente également dans d’autres situations : ulcère perforé, occlusion, dissection aortique ou appendicite…. ➋ La deuxième situation est celle du dosage que l’on va réaliser au sein des épanchements péritonéaux ou pleuraux. Quand la lipase est très élevée dans le liquide recueilli au niveau des épanchements, il faut suspecter une complication d’une maladie pancréatique sous-jacente (rupture de kyste pancréatique dans la cavité abdominale, fistules pancréatico-pleurales au cours de l’évolution d’une pancréatite chronique…). Cette élévation au niveau des liquides doit être supérieure à 10 fois la limite supérieure de la normale plasmatique pour signer une atteinte pancréatique. Le dosage des enzymes pancréatiques dans les épanchements séreux est souvent omis pendant longtemps quand ils sont le symptôme révélateur de l’affection pancréatique. Rappelons enfin que le dosage des enzymes plasmatiques n’est pas recommandé si les symptômes ne sont pas évocateurs d’une affection pancréatique (troubles fonctionnels intestinaux, etc… cf. ci-dessous). Pancréascopie : Y a-t-il un intérêt à les doser devant une altération de l'état général, au cours de la pancréatite chronique (PC), dans la surveillance d'un cancer pancréatique ? Pr J.P. Bernard : Les dosages sanguins des enzymes pancréatiques n’ont aucun intérêt au cours de ces trois situations. En aucune manière le dosage plasmatique des enzymes pancréatiques ne permet d’évaluer la fonction pancréatique. Une altération de l’état général réclamera éventuellement une évaluation de la fonction exocrine du pancréas s’il existe des 2 signes évoquant une stéatorrhée. Dans le cas de la surveillance d’un cancer pancréatique, le dosage des enzymes pancréatiques a encore moins d’intérêt et n’est en aucune façon un paramètre de diagnostic ou de surveillance. Enfin, au cours de la PC, lorsqu’on se trouve dans le cas de la confirmation d’une complication (poussée aiguë sur une PC pré-existante ou pseudo-kyste), le dosage des enzymes pancréatiques conserve sa valeur. Pancréascopie : Laquelle ou lesquelles doser ? Pr J.P. Bernard : La conférence de consensus a conclu que, dans tous les cas, seul le dosage de la lipasémie est utile et constitue l’examen de référence puisqu’il est sensible et spécifique d’une atteinte pancréatique. Pancréascopie : L‘iso-amylase pancréatique, l'amylasurie, les autres dosages ont ils encore un intérêt ? Pr J.P. Bernard : Le dosage des isoenzymes de l’amylase ne conserve plus aucun intérêt depuis l’utilisation en routine du dosage de la lipasémie. Le dosage de l’amylasurie ne conserve plus qu’une indication : la confirmation du diagnostic de macro-amylasémie. En effet, la coexistence d’une amylasémie modérément élevée et d’une amylasurie normale signe la présence de cette anomalie qui n’a aucune traduction clinique et permet donc d’arrêter toutes les explorations coûteuses. En fait, il ne devrait plus Interview être dosé car le dosage de l’amylasémie ne doit plus être fait en général et a fortiori chez un malade asymptomatique. Le dosage du trypsinogène 2 par bandelettes urinaires a l’intérêt de la rapidité d’obtention des résultats (dosage semi-quantitatif). C’est très certainement le test enzymatique qui a la meilleure valeur prédictive négative pour exclure le diagnostic de PA. Lorsqu’il est négatif, il permet d’éliminer le diagnostic de PA et d’éviter tous les autres examens. Les autres dosages enzymatiques ne sont pas supérieurs aux dosages de la lipase. Pancréascopie : A partir de quel seuil faut-il s'inquiéter ? Pr J.P. Bernard : Le seuil optimal d’interprétation d’une élévation des enzymes se situe au-dessus de trois fois la limite supérieure de la valeur normale. Au-dessous de ce seuil, le dosage perd beaucoup en spécificité. Il faut avoir à l’esprit que les dosages doivent être réalisés dans les 48 premières heures suivant l’apparition des symptômes. Lorsque les valeurs sont au-dessous de ce seuil, on peut répèterépéter les dosages si les symptômes le justifient. Si l’on observe une élévation franche de ces enzymes après quelques heures, ceci a valeur de test de confirmation. En revanche, une diminution du taux d’enzymes doit faire reconsidérer le diagnostic, surtout lorsque les examens d’imagerie ne montrent aucune anomalie au niveau pancréatique. Pancréascopie : Que pensez vous du dosage urinaire en bandelette du peptide d'activation du trypsinogène ? Pr J.P. Bernard : Ce dosage est potentiellement intéressant pour établir un score de gravité biologique spécifique du pancréas.Aujourd’hui, c’est le seul test qui remplit cette fonction. Cependant, il permet de discriminer les formes sévères de PA, mais ne fait pas la différence entre les témoins et les PA peu sévères, ce qui en limite l’intérêt pratique.Au total il n’est spéci- fique que pour le diagnostic des PA graves d’emblée. Il n’existe pas encore de valeur seuil. Pancréascopie : Quelle conduite à tenir lorsque les enzymes ont été dosées en dehors du contexte d'une pancréatite aiguë et qu'elles sont modérément élevées (2-3 N) ? Pr J.P. Bernard : Cette situation ne devrait plus exister car elle génère des dépenses inconsidérées, des consultations et des examens complémentaires inutiles et beaucoup d’inquiétude. Si malgré tout ce dosage est fait et qu’il concerne l’amylasémie, il faut tout d’abord éliminer le diagnostic d’une macro-amylasémie, sans signification. Il faut également rappeler que contrairement à ce qui est fait pour le foie, il n’est pas licite de doser les enzymes pancréatiques chez un malade sans symptôme qui reçoit un médicament potentiellement pancréatotoxique. Rappelons-le encore, les enzymes pancréatiques ne doivent être dosées que devant des symptômes évocateurs de pancréatite. La présence d’une élévation asymptomatique de la lipasémie n’a pas la valeur d’une élévation des transaminases. Cette dernière est généralement le reflet d’une cytolyse hépatique. Certains médicaments pancréatotoxiques peuvent n’entraîner que des anomalies biologiques, sans symptôme dont la signification pathogénique est inconnue mais sans aucun doute faible ou nulle. Si la PA n’a pas de manifestation clinique, on est autorisé à poursuivre le traitement et une surveillance régulière des enzymes pancréatiques est inutile. Pancréascopie : Pouvez vous nous dire un mot de l'étude italienne rapportant des cas d’« élévation chronique non pathologique de l'amylase sérique » ? Pr J.P. Bernard : Cette étude reflète l’inflation d’examens supplémentaires induits par un dosage inapproprié des enzymes pancréatiques, singulièrement l’amylasémie. Cette hyperamylasémie chronique , bénigne d’origine 3 pancréatique est idiopathique. Ce diagnostic est un diagnostic d’élimination après : avoir éliminé une atteinte pancréatique par des examens morphologiques ; ou une macro-amylasémie. Cette entité a été caractérisée par une étude italienne (Gastroenterology 1996 ; 110 : 1905-8) qui a montré chez 18 patients ayant une élévation chronique de l’amylase et de la lipase sériques, que cette anomalie chronique n’était pas en rapport avec une affection caractérisée notamment sur le plan morphologique. En effet, les 18 patients ont été suivis pendant une période de 8 ans, période pendant laquelle aucune maladie n’est apparue et aucune anomalie morphologique du pancréas n’a été mise en évidence par l’échographie et la scanographie. A l’issue de cette période de suivi, une exploration fonctionnelle du pancréas a été réalisée et n’a montré aucune insuffisance pancréatique fonctionnelle. Les auteurs en ont déduit qu’il s’agissait d’une anomalie constitutionnelle de la sécrétion des enzymes pancréatiques, avec un relargage minime des enzymes pancréatiques dans la circulation sanguine. Ce diagnostic n’est à évoquer que lorsque toutes les autres causes d’atteinte pancréatique ont été éliminées et parfois en présence de plusieurs cas dans la même famille. Propos recueillis par Le Dr C. Mura EN PRATIQUE ● Seul le dosage de la lipasémie est recommandé. ● Il ne doit être demandé qu’en cas de symptômes évoquant une pancréatite aiguë. Mise au point Que peut-on attendre du traitement médical de la pancréatite chronique ? e traitement médical comprend le sevrage alcoolo-tabagique, le traitement médicamenteux de la douleur ou de l’insuffisance pancréatique exocrine et le traitement nutritionnel. De fait, il n’est pas possible d’envisager de traiter un patient atteint de pancréatite chronique sans débuter par une prise en charge médicale, qui dans la moitié des cas permettra de stabiliser l’évolution de la maladie et de contrôler les symptômes. L SEVRAGE ALCOOLIQUE : IL S’AGIT DE LA PREMIÈRE ÉTAPE DU TRAITEMENT MÉDICAL L’alcoolisme chronique est à l’origine de 80 à 90 % de l’ensemble des pancréatites chroniques. En raison de la difficulté de suivi des patients, de la difficulté de l’arrêt de l’intempérance chez ces patients et de la difficulté d’obtention d’un chiffrage précis de la consommation d’alcool et de sa réduction éventuelle, le sevrage alcoolique est souvent négligé. Pourtant, le sevrage est possible, est efficace sur la disparition de la douleur et influence les résultats des traitements associés endoscopiques ou chirurgicaux. La faisabilité du sevrage alcoolique au cours des PC a été étudiée dans des travaux d’origine médicale ou chirurgicale. L’abstinence alcoolique est obtenue chez 64 % des patients atteints de PC après un an de suivi. Cette abstinence semble plus précoce et plus fréquente que chez les patients atteints d’hépatopathie alcoolique, probablement en raison de l’intensité des symptômes douloureux associés à la PC. Le problème du sevrage alcoolique en cas de PC s’inscrit donc plus dans sa durabilité que dans son obtention immédiate. Une série chirurgicale a montré qu’un sevrage définitif était obtenu à 10 ans chez 50 % des patients opérés et seulement 25 % des patients dont la prise en charge était médicale. L’efficacité du suivi et également la sévérité des symptômes initiaux semblent donc influencer considérablement la prévalence du sevrage, ce qui doit constituer un facteur de motivation pour les médecins traitant des patients atteints de PC. Le sevrage alcoolique est utile pour ralentir la progression de la maladie, pour faire disparaître les symptômes douloureux et améliorer le résultat des traitements associés [1]. Certes, l’arrêt de l’alcool ne supprime pas l’évolution de la maladie. Mais dans une étude rétrospective italienne, la progression de la maladie, évaluée sur le plan de la fonction exocrine, était moins sévère dans le groupe abstinent avec un suivi moyen de 7 ans alors que le taux de calcifications pancréatiques n’était pas différent [1]. Chez ces mêmes patients, les fréquences de la douleur et du diabète étaient moindres en cas d’abstinence. L’arrêt de l’alcool diminue également la prévalence de la douleur. Dans 4 études évaluant la douleur chez des patients abstinents, la proportion de patients asymptomatiques dépassait la moitié des cas. Dans deux de ces études, qui étaient comparatives, la proportion de patients asymptomatiques était significativement supérieure en cas d’abstinence (6052 % vs 26-37 % respectivement). LA RELATION ENTRE LE SEVRAGE ALCOOLIQUE ET L’EFFICACITÉ DES TRAITEMENTS ASSOCIÉS EST PLUS CONTROVERSÉE. Dans trois études évaluant l’efficacité du traitement endoscopique, l’arrêt 4 de l’alcool semblait sans influence sur les résultats thérapeutiques. Sur le plan chirurgical, la poursuite de la consommation d’alcool détériorait les résultats dans 3 études non contrôlées. La mortalité était nettement inférieure chez les patients sevrés. LE TABAC EST UN FACTEUR DE RISQUE DISCUTÉ DANS LA PC Ce facteur de risque est présent dans trois études, mais non retrouvé dans deux autres [2]. Pourtant, la consommation d’alcool et celle de tabac sont étroitement liées en cas de PC, l’association étant observée dans plus de 80 % des cas. Il n’existe pas à ce jour d’étude ayant évalué l’impact du sevrage tabagique sur l’histoire naturelle de la PC. Par contre, l’influence du sevrage alcoolo-tabagique sur le pronostic de la PC est essentielle [2]. En effet, si la survie actuarielle à 10 ans des patients atteints de PC varie entre 69 et 80 %, le taux de décès imputable à la PC elle-même n’est que de 3 à 38 %, plus de la moitié des décès étant d’origine cardiovasculaire ou par cancer des voies aériennes supérieures et digestives. Dans l’étude de Miyake et coll, la survie actuarielle à 20 ans était de 80 % chez les patients sevrés et de 35 % chez les patients non sevrés. Dans le travail de Lowenfels et coll., la mortalité à 10 ans était de 30 %, les principaux facteurs de risque étant l’alcool et le tabac. Le sevrage alcoolotabagique est donc primordial pour le pronostic des patients. Mise au point DOULEUR Kyste Infiltration nerveuse Hypertension canalaire et hypertension tissulaire reproductible pour prendre en charge et suivre ces patients. ● La gradation des traitements doit constituer la deuxième règle. Des paliers progressifs doivent être employés : paracétamol, paracétamol/codéïne, tramadol, buprénorphine, et enfin morphine et dérivés. ● Enfin, l’effet antalgique de ces médicaments peut être potentialisé par l’emploi d’antidépresseur. Inflammation TRAITEMENT MÉDICAMENTEUX DE L’INSUFFISANCE PANCRÉATIQUE EXOCRINE : DES CONTRAINTES antalgiques AINS PHARMACOLOGIQUES ET DES RÈGLES DE PRESCRIPTION LE TRAITEMENT MÉDICAMENTEUX DE LA DOULEUR VISE À DIMINUER LA PRESSION CANALAIRE PANCRÉATIQUE ET À TRAITER NON SPÉCIFIQUEMENT L’INFLAMMATION ET LA DOULEUR Les composantes de la douleur au cours de la PC sont nombreuses (figure 1) [3]. L’hyperpression canalaire et tissulaire est responsable d’une partie seulement des phénomènes douloureux de la PC [3]. Elle peut se compliquer de kyste rétentionnel qui peuvent aggraver la douleur de façon considérable. Cette composante est la cible principale des traitements inhibiteurs de la sécrétion pancréatique exocrine (figure 1). L’inflammation pancréatique et péripancréatique est responsable d’un infiltrat nerveux péripancréatique entraînant des douleurs permanentes dont la prise en charge est difficile. Les anti-inflammatoires et les antalgiques sont utilisés pour traiter de façon non spécifique cette composante. Une étude basée sur l’utilisation d’inhibiteur des récepteurs de la CCK (loxiglumide) a été récemment effectuée [5]. Il s’agissait d’une étude doseréponse contrôlée, placebo versus 300, 600, 1200 mg/j. L’amélioration de la douleur était significative chez tous les patients traités par rapport au placebo. Ce travail demande bien sûr, confirmation avant d’être suivi par une éventuelle application thérapeutique. L’utilisation d’anti-inflammatoires non stéroïdiens est assez répandue, mais n’a jamais fait l’objet d’études contrôlées [3]. En pratique quotidienne, chez des patients ne présentant aucune cause traitable (kyste, dilatation canalaire…) et résistant aux traitements classiques, ces médicaments peuvent être efficaces. Leur potentiel ulcérogène ne doit cependant pas être négligé chez des patients souvent fumeurs, qui ont souvent une sécrétion hydrobicarbonatée pancréatique faible. LES TRAITEMENTS ANTALGIQUES N’ONT FAIT L’OBJET D’AUCUNE ÉTUDE RANDOMISÉE DANS LA PC ● La première règle doit consister à éviter la toxicomanie, chez des patients qui ont souvent un comportement addictif, et qui souffrent souvent de façon chronique. La douleur doit être soigneusement évaluée dans le temps, mais aussi dans son intensité, grâce à une échelle visuelle analogique qui constitue le moyen le plus simple et le plus 5 L’insuffisance pancréatique exocrine n’apparaît qu’au-delà de la destruction de 90 % du parenchyme exocrine et donc, généralement, en cas de PC évoluée et ancienne (après 10 ans d’évolution) [4]. La maldigestion lipidique traduite par la stéatorrhée est plus difficile à équilibrer que la maldigestion protéique. En effet, la lipase pancréatique est diminuée plus précocemment et plus intensément que les autres enzymes pancréatiques au cours de l’insuffisance pancréatique exocrine. De plus, la lipase est inactivée à pH acide et plus sensible à la protéolyse des enzymes protéolytiques pancréatiques. L’équilibre de la digestion enzymatique lipidique est donc le plus difficile à obtenir. Enfin, pour assurer une bonne digestion enzymatique, les extraits pancréatiques doivent être délivrés en même temps que les aliments dans le duodénum où ils seront actifs. Ils doivent être mélangés harmonieusement au bol alimentaire gastrique et de taille adaptée pour franchir le filtre pylorique avec celui-ci. Tous ces éléments (stabilité, enzymatique, vidange gastrique…) imposent des contraintes pharmacologiques et des règles de prescription [4]. Les enzymes pancréatiques sont protégées par encapsulation (enteric coated) pour permettre leur libération à suite page 6 Mise au point Que peut-on attendre du traitement médical de la pancréatite chronique (Suite de la page 5) un pH > 5, garant de la stabilité de la lipase. Elles sont présentées sous forme de granules de 1,5mm, qui semble être le diamètre idéal pour permettre un passage pylorique précoce. Les préparations d’extrait pancréatique doivent comporter plus de 10 000 UI de lipase car le taux de lipase active parvenant à l’angle de Treitz n’est que de 8 %. Les règles de prescription tiennent également compte de ces données. Les extraits pancréatiques doivent être pris dès la première bouchée afin d’être mélangés au chyme gastrique. La posologie doit être adaptée à la charge calorique des repas, c’est-à-dire augmentée en cas de repas gras ou copieux. Si une deuxième gélule est nécessaire, elle doit être prise au milieu du repas afin de permettre un meilleur mélange au bol alimentaire. Si le traitement est inefficace, un traitement antisécrétoire peut être rajouté. En cas de persistance de la stéatorrhée, une pullulation microbienne ou un trouble de la vidange gastrique doivent être recherchés. Enfin, en cas de résection gastrique antérieure, les gélules doivent être ouvertes avant ingestion. Les indications du traitement de l’insuffisance pancréatique exocrine sont l’existence d’une stéatorrhée clinique ou mesurée par dosage de graisse dans les selles > 15 g/j, un amaigrissement continu non expliqué par une complication évolutive, l’association diarrhée-météorisme qui peut être un symptôme fruste de maldigestion. NUTRITION ET PANCRÉATITE CHRONIQUE : LES REPAS DOIVENT ÊTRE FRACTIONNÉS LE PLUS SOUVENT POSSIBLE Plus de 95 % des patients atteints de PC ont une alimentation orale exclusive. On estime que 1 % a recours à une alimentation parentérale et 4 % à une alimentation entérale. L’alimentation au cours de la PC doit être normocalorique (35 Kcal/J), équilibrée avec des repas fractionnés le plus sou- vent possible. Elle doit tenir compte de l’existence d’un diabète éventuel et éviter la restriction lipidique . En effet, de nombreux patients atteints de PC ont un déficit en vitamine A et vitamine E, vitamines liposolubles dont la carence peut être aggravée par un régime trop sévère. L’apport lipidique doit être adapté à la tolérance digestive et à l’efficacité des extraits pancréatiques. En cas de mauvaise tolérance digestive ou d’efficacité incomplète des extraits pancréatiques, l’apport lipidique peut être enrichi en triglycérides à chaîne moyenne dont la digestion enzymatique et l’absorption intestinale sont facilitées. Enfin, il convient de restreindre l’alimentation en fibres alimentaires qui adsorbent les enzymes pancréatiques et altèrent leur biodisponibilité. Pr Marc Barthet, (Hôpital Nord, Marseille) Références EN PRATIQUE Le traitement médical est à la fois le carrefour de tous les traitements envisageables au cours de la PC et leur préalable. • L’arrêt de l’intoxication alcoolo-tabagique est indispensable pour une prise en charge correcte et pour préserver le pronostic. Le sevrage alcoolique diminue la prévalence de la douleur, ralentit l’évolution de la PC. La persistance de l’intoxication alcoolique altère les résultats de la chirurgie pancréatique et obère significativement le pronostic. • La prise en charge de la douleur vise à diminuer la pression canalaire pancréatique et à traiter non spécifiquement l’inflammation et la douleur. • L’insuffisance pancréatique exocrine n’apparaît qu’au-delà de la destruction de 90 % du parenchyme exocrine et donc généralement en cas de PC évoluée. La maldigestion lipidique traduite par la stéatorrhée est difficile à équilibrer, nécessitant des règles de prescription strictes. Il faut utiliser des extraits pancréatiques à haute teneur en lipase, généralement délivrés sous forme de granulés enrobés, idéalement d’un diamètre de 1,5 mm. • Enfin, l’apport nutritionnel doit éviter la restriction lipidique sous peine de carences sévères. 6 1- Gullo L, Barbara L, Labo G. Effect of cessation of alcohol use on the course of pancreatic dysfunction in alcoholic pancreatitis. Gastroenterology 1988 ; 95 : 1063-8 2- Levy Ph, Ruszniewski Ph, Bernades P. Histoire naturelle de la pancréatite chronique alcoolique. Gastroentérol Clin Biol 2000 ; 24 : 725-41 (pas d'abstract) 3- Warshaw AL, Banks PA, Fernadez-delCastillo C (AGA). Treatment of pain in chronic pancreatitis. Gastroenterology 1998 ;115 :763-76 (pas d'abstract) 4- Greenberger NJ. Enzymatic therapy in patients with chronic pancreatitis. Gastroenterol Clin N Am 1999 ;28 : 687-93 5- Shiratori K, Takeuchi T , Satake K et al. Clinical evaluation or oral administration of a cholecystokinin A receptor antagonist (loxiglumide) to patients with acute, painful attacks of chronic pancreatitis : a multicenter doseresponse study in Japan. Pancreas 2002 ; 25 : e1-5 En pratique Critères de résécabilité d’un cancer du pancréas e cancer du pancréas est le quatrième cancer digestif en France. Son pronostic est sombre, puisque moins de 5 % des patients sont en vie 5 ans après le diagnostic. La seule chance de guérison d'un patient atteint d'un tel cancer passe par la résection chirurgicale. Cela revient à dire que récuser un patient pour une intervention sur une simple suspicion d'inextirpabilité en imagerie pourrait le condamner. L POURQUOI LE PRONOSTIC DU CANCER DU PANCRÉAS EST-IL SI EFFROYABLE ? pancréas, alors qu’il en existe par exemple pour un cancer métastatique colorectal). ● Enfin, il existe assez fréquemment des formes plurifocales (dans la littérature, le taux de foyers multiples varie de 3 à 30 %). Pourtant le bilan,aussi complet et sophistiqué qu'il puisse être, ne permet pas toujours d'affirmer absolument que telle adénopathie supracentimétrique du pédicule hépatique est tumorale, que l'absence de liseré de sécurité avec une artère hépatique est la certitude d'une inextirpabilité de la lésion, que tel prolongement vers la racine du mésentère est la signature d'une tumeur fixée ou encore que telle image tumorale fusant vers la gauche est à l'évidence une coulée tumorale et non un foyer de pancréatite chronique d'amont… Le pancréas, en particulier céphalique, comporte plusieurs spécificités qui expliquent en partie pourquoi un cancer qui s’y développe est rapidement incurable. ● Tout d’abord,il contracte des rapports LES LIMITES DU BILAN très étroits avec les voies biliaires et le D’UN CANCER DU PANCRÉAS duodénum. Un cancer de la tête du pancréas va rapidement avoir un retentissement sur ces organes adjacents. L'échographie abdominale,la TDM,l'échoLe traitement chirurgical devra sacrifier endoscopie, l'IRM et la cholangiopanune partie plus ou moins importante créatographie rétrograde par voie endodes trois éléments de ce carrefour,avec scopique (CPRE) sont autant d'examens QU’EST-CE QUI PEUT RENDRE LE la complexité que cela suppose et la morphologiques qui permettent de préCANCER DU PANCRÉAS ciser les caractères de la tumeur, son morbidité qui en découle. IRRÉSÉCABLE ? ● Ensuite, le pancréas livre passage aux retentissement d'amont et son extenvaisseaux mésentériques supérieurs, sion locorégionale. Les ponctions sous en arrière de l’isthme. L’engainement, imagerie,ou lors d'une écho-endoscopie, LA TAILLE DE LA LÉSION voire l’envahissement de ces vaisseaux les brossages ou les biopsies réalisés lors Le taux de résécabilité est corrélé à la par une tumeur de la tête ou du corps des manœuvres endoscopiques peuvent taille de la tumeur : le cancer est en prala rendra rapidement inextirpable. Un souvent aboutir à un diagnostic histolo- tique toujours localement extirpable lorsque le diamètre est inférieur à 2 cm envahissement du mésentère signe l’im- gique précis. tandis qu’il ne l’est quasiment possibilité d’exérèse, tous les jamais lorsque sa taille auteurs s’accordant à considérer dépasse 4 cm. Cela en fait que l’ablation complète de l’intesd’ailleurs un critère prédictif tin grêle n’est pas licite dans le de survie dans plusieurs contexte. ● Troisièmement, le drainage lymétudes, la limite faisant basphatique du pancréas est très comculer le pronostic étant à 2,5 plexe, se faisant soit vers la rate, cm. soit vers le tronc cœliaque, soit L’ATTEINTE GANGLIONNAIRE dans le mésentère, soit en arrière Les groupes péripancréavers les vaisseaux aorticocaves tiques sont atteints d’emblée (Figure 1).Au moment du diagnosdans environ 50 % des cas. tic de cancer du pancréas, les ganCes métastases, intracapsuglions sont atteints dans plus de laires pour la plupart, sont 75 % des cas. ● Quatrièmement, les métastases, cependant parfois compalorsqu’elles sont présentes, tibles avec une longue survie. condamnent le malade à brève A l’inverse, l’envahissement échéance, quel que soit le traitedes chaînes mésentériques, Figure 1 : Principaux relais ganglionnaires dans le cancer du pancréas ment proposé (il n’y a pas de surcœliaques ou aorticocaves vivant à un cancer métastatique du s’accompagne d’une survie 7 En pratique Critères de résécabilité… (Suite de la page 7) cable dans les trois quart des A cas ; si les vaisseaux paraissent comprimés ou refoulés, le taux de résécabilité chute à un tiers des cas ; en cas d’obstruction vasculaire le taux d’exérèse est nul. D’autres auteurs ont publié des corrélations similaires avec le scanner hélicoïdal, (Figures 2,3). Le scanner hélicoïdal, couplé à l’écho-endoscopie et surtout à l’écholaparoscopie (tous, examens très opérateur-dépendants) permettrait d’être aussi fiable que l’angiographie. La B place de l’IRM pour préciser l’extirpabilité d’un cancer du pancréas est encore en évaluation. Figure 2 : Cliché TDM réalisé chez une femme de 44 ans Il est difficile de récuser un montrant une volumineuse tumeur pancréatique céphalique avec patient pour une opération si perte du liseré de sécurité graisseux entre la tumeur et la veine l’envahissement veineux n’est mésentérique supérieure. L'exérèse a été possible et l'examen pas massif et évident : un certain anatomopathologique final a conclu en la présence d’un adénocarcinome du pancréas exocrine envahissant la nombre d’entre eux pourront musculeuse duodénale. en effet avoir une exérèse ; et si les adhérences vasculaires ne Figure 3 : Cliché TDM (a) et écho-endoscopie (b) réalisés chez un patient de 69 ans, faisant suspecter un envahissement sont découvertes qu’en fin de veineux. L’intervention chirurgicale a infirmé cette atteinte et toujours inférieure à 1 an. Comme l’ont dissection du pancréas, il est toula duodénopancréatectomie céphalique a pu être réalisée. rappelé Baulieux et Delpero en 2000, jours difficile d’affirmer qu’elles l’exérèse reste justifiée en cas d’enva- sont tumorales et non pas hissement ganglionnaire proximal pour inflammatoires. Dans des séries trois raisons : elle reste le meilleur trai- d’exérèses larges avec sacritement palliatif pour les tumeurs locale- fice veineux mésentéricoporte ment extirpables par des équipes entraî- en cas d’adhérences serrées, il nées ; l’extension ganglionnaire précise a été démontré que l’extenn’est connue qu’a posteriori ; des survies sion du cancer à la veine n’exisprolongées ont été publiées. tait en fait que dans moins de 50 % des cas. L’ENVAHISSEMENT VEINEUX MÉSENTÉRICOLa résection d’une partie du PORTE tronc porte ou de la terminaiL’extension d’un cancer du pancréas vers son de la veine mésentérique le duodénum n’est pas un signe d’inex- supérieure est faisable, avec tirpabilité, puisque cet organe est résé- suture directe si la longueur qué dans le même temps que la tête du réséquée ne dépasse pas trois pancréas. centimètres, avec interposition Car c’est en effet de là que peut venir la d’un greffon veineux sinon. contre-indication à l’exérèse : le cancer Ishikawa a cependant publié un peut envahir le système porte (veine article qui fait encore réféFigure 4 : Cliché TDM réalisé chez une femme de 62 ans montrant mésentérique supérieure, tronc spléno- rence, montrant que la survie un adénocarcinome pancréatique corporéocaudal avec mésaraïque ou tronc porte pédiculaire). d’un patient ayant subi une envahissement veineux splénique, qui a pu être réséqué. Plusieurs équipes radiologiques ont publié résection veineuse pour un des critères de résécabilité en se basant envahissement de plus de la sur des séries d’angiographie : si l’angio- moitié de la circonférence sur une lon- à celle d’un même patient n’ayant pas graphie est normale, la lésion sera résé- gueur de plus de 15 mm était identique subi d’exérèse… 8 En pratique EN PRATIQUE Figure 5 : Cliché TDM réalisé chez un patient de 52 ans montrant un volumineux cancer du pancréas associé à des métastases hépatiques, une carcinose péritonéale (ascite) et des envahissements vasculaires. Figure 6 : Cliché TDM réalisé chez un patient de 67 ans ne montrant qu'une petite lésion pancréatique céphalique sans signe d'inextirpabilité. La cœlioscopie première n'a montré aucune anomalie patente. Malheureusement, lors de la conversion, l'exploration a fait découvrir 3 nodules de carcinose dans le plan de décollement du fascia de Toldt droit (derrière le colon droit) Un envahissement veineux et même artériel splénique ne pose habituellement pas de problème lorsqu’il s’agit d’un cancer du pancréas corporéal ou a fortiori caudal : l’intervention consistant en une splénopancréatectomie gauche avec curage (en l’absence de métastases à distance bien sûr), ces vaisseaux seront de toute façon emportés en monobloc avec le pancréas tumoral (Figure 4). L’ENVAHISSEMENT ARTÉRIEL ● S’il est vrai que l’existence de métastases ganglionnaires distales, l’existence de métastases dans le foie, le poumon ou le péritoine ou encore l’existence d’une atteinte veineuse rendent un cancer du pancréas non résécable, encore faut-il être sûr de ces atteintes. ● Les métastases à distance sont le plus souvent facilement et rapidement confirmées ou infirmées par la ponction sous imagerie. ● Les adénopathies à distance, si elles ne peuvent pas faire leur preuve histologique formelle sur une biopsie par imagerie ou par écho-endoscopie, ne doivent conduire à l’abstention d’exérèse pancréatique qu’après biopsie chirurgicale par laparotomie ou mieux par laparoscopie. ● L’envahissement veineux diagnostiqué sur une TDM ou même en échoendoscopie doit être réévalué de manière collégiale, en faisant intervenir le radiologue, le gastro-entérologue et le chirurgien. Il arrive que l’absence de liseré graisseux de sécurité le long d’une veine mésentérique supérieure en TDM associée à une suspicion de bourgeon tumoral intraluminal en écho-endoscopie conduise quand même à une exérèse curative… ● A l’inverse, il arrive de ne trouver la contre-indication à l’exérèse qu’à la laparotomie, alors que les examens pré-opératoires et la cœlioscopie n’avaient identifié aucun critère d’irrésécabilité (Figure 6). un problème : les artères hépatique, mésentérique supérieure ou splénique sont pendant très longtemps refoulées par la tumeur. Lorsqu’elles sont malheureusement envahies franchement, il existe toujours de nombreux autres signes d’inextirpabilité comme une tumeur énorme, des métastases diffuses, une atteinte vasculaire multiple avec thrombose porte, une ascite de carcinose péritonéale, etc. (Figure 5). LES MÉTASTASES Elles rendent le cancer du pancréas non résécable, car la survie n’est de toute façon que de quelques mois. Encore faut-il faire la preuve, avant d’exclure la chirurgie, de la nature d’un nodule hépatique ou pulmonaire. Pr Jean-Luc Faucheron, (Département de Chirurgie Digestive et de l’Urgence Hôpital Albert Michallon, Grenoble) Bibliographie • Cameron JL, Pitt HA, Yeo CJ et al. One hundred and forty five consecutive pancreaticoduodenectomies without mortality. Ann Surg 1993 ; 217 : 430-5. • Minnard EA, Conlon KC, Hoos A, et al. Laparoscopic ultrasound enhances standard laparoscopy in the staging of pancreatic cancer. Ann Surg 1998 ; 228 : 182-7. • Sauvanet A, Zins M. Bilan d'extension du cancer du pancréas exocrine. J Chir 1998 ; 135 : 10-6. • Baulieux J, Delpero JR. Traitement chirurgical du cancer du pancréas : les exérèses à visée curative. Ann Chir 2000 ; 125 : 609-17. • Lévy P. Comment affirmer la résécabilité d’un adénocarcinome de la tête du pancreas ? Gastroenterol Clin Biol 2001 ; 25 : C19-C23.(pas d'abstract) • Tamm E, Charnsangavej C, Szklaruk J. Advanced 3-D imaging for the evaluation of pancreatic cancer with multidetector CT. International Journal of Gastrointestinal Cancer 2001 ; 30 : 65-71. La question d’une atteinte artérielle est 9 Image commentée Masse péri-duodénale et diarrhée chronique Observation Un malade âgé de 37 ans était hospitalisé en octobre 2002 pour bilan d'une diarrhée chronique. Cette diarrhée évoluait depuis le début de l'année 1999. Elle était constituée initialement de deux selles par jour, liquides sans sang, ni glaire. Un bilan sanguin ne montrait qu'une hypokaliémie à 3,3 mmol/l. La gastroscopie avec biopsies duodénojéjunales était normale. L'iléocoloscopie avec biopsies étagées était normale. Un transit du grêle ne montrait pas d'anomalie tant sur le plan fonctionnel que morphologique. Un traitement symptomatique par antidiarrhéique était inefficace. Le malade était hospitalisé en octobre 2002. L'examen clinique était sans anomalie. Le malade signalait une aggravation de sa diarrhée estimée à 5-6 selles par jour dont une selle nocturne, très abondantes et malodorantes, associée à une perte de 9 Kg en un an. Le poids des selles quotidiennes dépassait 1200 grammes. Les examens biologiques montraient uniquement une gastrinémie élevée à 146 ng/l (limite supérieure à 80). Le test à la sécrétine était positif avec augmentation de la sécrétion acide basale et des taux de gastrinémie. Une tomodensitométrie abdominale mettait en évidence un ganglion centimétrique se situant en arrière de la portion moyenne du deuxième duodénum, au contact et immédiatement sous la portion proximale du troisième duodénum (photo 1). Une écho-endoscopie pancréatique notait, en péri-duodénal, en regard du crochet pancréatique, une formation ovoïde mesurant 2 cm de grand axe tissulaire à centre anéchogène et aux limites très régulières (photo 2). Cette image était compatible avec un gastrinome. La scintigraphie à l'octréotide marquée montrait un foyer de très forte fixation en regard du pôle inférieur du rein droit en avant de celui-ci (photo 3). Le diagnostic de gastrinome était retenu. Le bilan complémentaire à la recherche d'une néoplasie endocrinienne multiple (NEM) était négatif. L'intervention chirurgicale réalisée le 5 janvier 2003 retrouvait les lésions décrites sur le plan morphologique et permettait l'énucléation de la tumeur duodénale. L'examen histologique confirmait une localisation ganglionnaire d'un gastrinome. Les suites opératoires étaient simples. Un an après la chirurgie, le malade avait un transit normal. La scintigraphie à l'octréotide était normale. Discussion Le diagnostic de gastrinome doit être évoqué devant de nombreuses situations cliniques parmi lesquelles des ulcères multiples avec vomissements, diarrhées et complications ulcéreuses ou post-opératoires faisant suite à une intervention sur l'estomac pour maladie ulcéreuse ou œsophagite. Le mode de révélation par une diarrhée chronique isolée est rare. L'ulcère duodénal et la diarrhée chronique sont les deux signes les plus souvent observés dans l'histoire naturelle de la maladie puisque les lésions endoscopiques du tube digestif supérieur sont présentes dans 80 % des cas et la diarrhée dans 65 % des cas. Chacun de ces symptômes peut inaugurer la maladie pendant quelques années. LA DIARRHÉE, COMME DANS NOTRE OBSERVATION, EST DITE VOLUMOGÉNIQUE Photo 1 : Scanner abdominal Ganglion en arrière de la portion moyenne du 2ème duodénum 10 Elle est liée à l'augmentation des sécrétions digestives hautes, gastriques, biliopancréatiques et duodéno-jéjunales induites par l'hyper-acidité intra-intestinale. La mal-digestion (pH intra-luminal acide) et la malabsorption (jéjunite) y contribuent aussi ainsi que dans une moindre mesure, l'accélération du transit intestinal. Le diagnostic repose d'abord sur la mise Image commentée Photo 2 : Echoendoscopie pancréatique Lésion tumorale de 20 mm péri-duodénale en évidence d'une hyper-sécrétion gastrique acide, et d'une hypergastrinémie non régulée à l'état basal. La gastrine sérique est élevée dans 80-90 % des cas. Le diagnostic de certitude est apporté par le test à la sécrétine. Ce test est actuellement le plus performant et le mieux toléré.On observe sous sécrétine une élévation en moyenne de la sécrétion acide et de la gastrinémie, alors que l'effet physiologique inverse est généra- lement observé dans l'ulcère duodénal banal. successives.L'hyperparathyroïdie est l'atteinte endocrinienne la plus souvent associée suivie par l'atteinte hypophysaire,puis corticosurrénalienne, puis thyroïdienne. La recherche d'une NEM doit être systématique car son existence peut modifier fortement la conduite thérapeutique. En cas de syndrome de Zollinger Ellison de type sporadique, le gastrinome primitif est le plus souvent unique et situé dans au moins 50 % des cas dans le duodénum (notre observation). La localisation pancréatique est plus rare (25 % des cas).Enfin,le gastrinome primitif peut être ganglionnaire. En cas de gastrinome s'intégrant dans une NEM, ceux-ci sont multiples dans plus de 75 % des cas. La localisation des gastrinomes primitifs repose essentiellement,outre sur la tomodensitométrie, sur l'écho-endoscopie biliopancréatique et la scintigraphie des récepteurs à la somatostatine. L'ÉCHO-ENDOSCOPIE CONTRIBUE DE AU COURS DU GASTRINOME, UNE NEM DE TYPE I EST OBSERVÉE DANS 25 % DES CAS Ce syndrome est défini par l'association d'au moins deux atteintes endocriniennes bénignes ou malignes simultanées ou Photo 3 : Scintigraphie à l’octréotide Foyer de fixation en regard du pôle inférieur du rein droit 11 MANIÈRE PRÉPONDÉRANTE AU DIAGNOSTIC PRÉ-OPÉRATOIRE DES GASTRINOMES Elle permet le dépistage de très petites tumeurs mesurant de 5 à 20 mm de diamètre. Sa sensibilité est supérieure à celle du scanner pour les tumeurs pancréatiques et ganglionnaires. S'agissant des tumeurs duodénales, sa sensibilité n'est que de 50 %. Dans ce dernier cas, elle est donc complémentaire à la scintigraphie à l'octréotide marquée. La scintigraphie à l'octréotide permet de mettre en évidence 70 à 100 % des tumeurs endocrines pancréatiques et digestives. Pour le diagnostic de tumeur endocrine pancréatique, la sensibilité de la scintigraphie à l'octréotide est comprise entre 67 et 78 %. Le pronostic et l'évolution sont étroitement liés à l'appartenance ou non à une NEM. En cas de gastrinome sporadique, comme dans notre observation, le traitement chirurgical est la règle. Dr Patrick Hastier (CH Princesse Grace, Monaco) Publication commentée Attention aux lésions kystiques pancréatiques de découverte fortuite ! Incidental pancreatic cysts - clinicopathologic characteristics and comparison with symptomatic patients. C Fernandez Del Castillo, J Targarona, SP Thayer et al. Arch Surg 2003 ; 138 : 427-33 La découverte fortuite de lésions kystiques pancréatiques tend à devenir plus fréquente en raison de la diffusion des examens radiologiques et de la pratique plus facile des bilans systématiques. Cette étude rétrospective (1997-2002) avait comme objectif d’établir la fréquence et les caractéristiques clinicopathologiques des malades porteurs de telles lésions et de les comparer à celles des malades symptomatiques . Parmi les 212 malades colligés, 78 (36,7 %) étaient asymptomatiques. Ils étaient plus vieux, avaient des lésions kystiques de plus petite taille plutôt localisées dans le corps ou la queue du pancréas. Dans ce groupe, la part des malades ayant un pseudokyste (PK) était moins importante (3,8 %) que celle constatée dans le groupe symptomatiques (19,4 %). Globalement, la lésion kystique la plus fréquemment rencontrée était la tumeur intracanalaire papillaire mucineuse du pancréas (TIPMP) (n = 75) suivie par les kystes mucineux (n = 43). A signaler que la moitié des lésions de moins de 2 cm dans le groupe asymptomatique, correspondait à ces deux types de lésions qui devaient donc être considérées comme potentiellement malignes. Les symptômes les plus souvent objectivés étaient la douleur abdominale, la perte de poids et à un moindre degré l’ictère et la palpation d’une masse abdominale. Le diagnostic de lésion kystique du pancréas a été fait par scanner, échographie, IRM ou écho-endoscopie. La sensibilité et la spécificité de ce dernier examen dans la détection d’une lésion maligne (cancer in situ ou invasif) étaient respectivement de 69 % et 90 %. La plupart des malades a été opéré (78 % dans le groupe asymptomatique), ce qui a autorisé un diagnostic de certitude. Dans les autres cas, l’évolution, les examens morphologiques ainsi que la ponction et l’analyse du liquide du kyste ont permis de caractériser les lésions. Dr H. Bécheur (CHG, Evreux) COMMENTAIRES Cette étude, la première à s’être intéressée aux caractéristiques des lésions kystiques du pancréas découvertes fortuitement et surtout à leur devenir,est riche d’enseignement. Assez logiquement, on constate en premier lieu, que ces lésions sont en général de plus petite taille et localisées dans le corps ou la queue du pancréas, ce qui explique, en partie, leur caractère asymptomatique. De même, la faible fréquence des PK (3,8 %) paraît compatible avec la découverte fortuite de ces lésions dans la mesure où ces derniers sont dans la plupart des cas, consécutifs à une pancréatite qui se traduit le plus souvent par des symptômes. L’élément le plus significatif consiste à objectiver parmi les lésions kystiques fortuites de taille inférieure à 2 cm, jusqu’à 50 % d’atteintes potentiellement malignes. Il est à noter que globalement sur les 212 patients colligés, 75 d’entre eux avaient une TIPMP et 43 un cystadénome mucineux. D’autre part, 12 adénocarcinomes ont été trouvés dans le groupe de patients symptomatiques et 2 dans le groupe asymptomatique.Au total plus de 60 % des lésions étaient potentiellement malignes ou malignes ! A cet égard, les auteurs souligneront le rôle majeur de l’écho-endoscopie dans le bilan des lésions kystiques du pancréas, notamment de diagnostic de malignité avec, pour cet examen, une sensibilité et une spécificité (69 % et 90 %, respectivement) des plus respectables. L’ensemble de ces données a conduit les auteurs à proposer un arbre décisionnel pertinent en présence d’une lésion kystique du pancréas de découverte fortuite, qui pourrait se résumer comme suit : ● si la taille est inférieure à 2 cm : le risque de cancer est faible mais dans un cas sur deux la lésion pourrait être potentiellement maligne, ce qui implique une surveillance morphologique régulière et une intervention chirurgicale (quand elle est possible). ● si la taille de la lésion est d’emblée supérieure à 2 cm et que le patient est jeune, la résection est recommandée. Dans les autres cas, l’écho-endoscopie, éventuellement associée à l’analyse du liquide kystique (dosage de la mucine et de l’ACE notamment),devrait permettre de trancher.Un aspect évocateur de cystadénome séreux, l’absence de mucine et un taux faible d’ACE dans le liquide de ponction, incitent à une surveillance simple. En revanche, des images écho-endoscopiques équivoques et/ou des taux de mucine ou d’ACE intra-kystiques élevés indiquent plutôt la résection. En définitive, ce travail a le grand mérite de clarifier la conduite à tenir vis-à-vis des lésions kystiques du pancréas dans leur globalité et concernant celles qui sont de découverte fortuite à inciter les praticiens à la plus grande vigilance afin de ne pas méconnaître une atteinte maligne. 12 Revue de presse... Revue de presse... Revue de presse... Les résultats sont « dérangeants » à plus d’un titre : en examinant 782 malades suivis pendant 2 à 3 ans dans 29 hôpitaux, il s’avère que la survie des malades traités dans les hôpitaux les plus « experts » (ceux dont le volume de malades atteints de cancer pancréatique était le plus élevé) était significativement plus longue que celle des malades pris en charge dans les autres hôpitaux. En revanche, cette corrélation n’était pas établie pour l’expertise médicale, même si celle-ci était liée, fort logiquement, à celle de l’hôpital dans lequel le médecin exerçait. D’autre part, on constatait une tendance à plus d’interventionnisme médical (examen anatomo-pathologique, résection et prothèse biliaire) dans les hôpitaux considérés comme experts par rapport aux autres. De là à y voir une explication à la plus longue survie des malades traités dans ces hôpitaux experts, il n’y a qu’un pas que les auteurs ne… franchissent pas. Cependant, leur conclusion est sans ambiguité : en cas de cancer du pancréas (quel qu’en soit le stade) mieux vaut se faire soigner dans un centre spécialisé ! Une bonne partie de la discussion de ce travail a consisté à justifier sa méthodologie, effectivement très sujette à caution, tant les biais (pour une large part reconnus par les auteurs eux-mêmes) étaient multiples : nombreuses informations absentes du dossier médical, seuil arbitraire entre hôpitaux experts ou non, probable sur représentation de malades potentiellement curables dans les centres référents, absence de prise en compte de la qualité de vie, etc … Chacun jugera si à la lumière de ces… zones d’ombres, il est capable de se faire une opinion tranchée ! MO Bachmann, D Alderson, TJ Peters and al Br J Sur 2003 ; 90 : 171-7 Echo-endoscopie normale : CPRE ou non ? Influence de l’expertise dans la prise en charge et le devenir des malades atteints de cancer du pancréas Le but de cette étude conduite dans des hôpitaux anglais et gallois a été de déterminer dans quelle mesure la prise en charge de malades atteints de cancer du pancréas et leur devenir étaient influencés par l’expertise de l’hôpital et/ou du médecin qui les avaient soignés. Celle-ci était évaluée en termes de volume de malades traités. En présence de signes évocateurs de lithiase de la voie biliaire principale (LVBP), la normalité de l’écho-endoscopie est-elle suffisante pour se dispenser d’une cholangiographie endoscopique ? Afin de répondre à cette question de pratique courante, l’équipe lyonnaise a mené une étude prospective d’1 an comprenant 238 malades. Durant le suivi, 59 malades (25 %) ont eu une cholécystectomie avec (n = 31) ou sans (n = 28) cholangiographie per-opératoire et 30 (13 %) ont eu une CPRE, dont la moitié a été effectuée dans la première semaine suivant l’écho-endoscopie, en raison d’un haut risque de LVBP. La plupart (n=10) des 14 calculs cholédociens mis en évidence l’ont été à cette occasion. La valeur prédictive négative de l’écho-endoscopie s’établissait à 95,4 %, ce qui était considéré par les auteurs comme un taux élevé. De ce fait, en cas de suspicion de LVBP, le risque de 13 Revue de presse... Revue de presse... Revue de presse... méconnaître un calcul alors que l’écho-endoscopie est normale, paraît très faible et rejoint celui rapporté dans d’autres études. En définitive, concluent les auteurs, la stratégie diagnostique adéquate en présence d’une suspicion de LVBP, pourrait être la suivante : - en cas de risque moyen ou intermédiaire (épisode d’angiocholite ou de pancréatite, perturbations du bilan hépatique, dilatation modérée de le VBP), l’écho-endoscopie est proposée en première intention (ou la bili-IRM si le malade a une anastomose gastro-jéjunale, une sténose digestive ou un âge avancé) ; - la CPRE (associée à une sphinctérotomie) pourrait être réservée aux malades à haut risque de calcul (en cas d’ictère ou de dilatation importante de la VBP) ou, a fortiori, en cas de calcul cholédocien connu. B. Napoléon, J. Dumortier, O. Keriven Souquet et al. Endoscopy 2003 ; 35 : 411-5 « L'insoutenable légèreté de l’être » de la scanographie dans la pancréatite aiguë En examinant de façon rétrospective (Octobre 1999-Octobre 2001), 108 malades admis dans un hôpital universitaire pour pancréatite aiguë dont 58 (soit 54 %) ont eu un examen tomodensitométrique, il s’avère qu’il n’y avait pas de différence significative en termes de sévérité de la maladie entre les malades ayant eu cet examen et ceux qui en avaient été « privés ». A signaler également que ces derniers quittaient l’hôpital 3 jours avant « les bénéficiaires » de la scanographie. De plus, les scanographies jugées appropriées étaient le plus souvent prescrites par des gastroentérologues plutôt que par des urgentistes. Le caractère approprié d’une scanographie était défini par les critères suivants : • existence d’un doute chimique quant au diagnostic de pancréatite aiguë ; • situation clinique sévère à savoir distension abdominale, contracture, fièvre, hyperleucocytose ; • absence d’amélioration 72 heures après le début d’un traitement médical symptomatique ; • aggravation clinique après une phase d’amélioration, dénotant d’une possible complication ; • suspicion de malignité à l’échographie nécessitant une confirmation tomodensitométrique. Les auteurs considèrent que les coûts indirects et directs (sans bénéfice médical) générés par une prescription systématique d’une scanographie en cas de pancréatite aiguë ne se justifient pas et devraient inciter selon eux à revenir aux règles de prescriptions énumérées ci-dessus. Néanmoins, celles-ci, définies par Balthazar et al en 1994, peuvent paraître un peu anciennes et d’autre part le 5ème critère (la suspicion de malignité à l’échographie) est souvent difficile à préciser en raison des difficultés techniques de l’échographie dans l’exploration complète du pancréas. A cet égard, une suivi prolongé des malades après leur hospitalisation aurait sans doute été intéressant. Enfin, l’effectif étudié (58 malades dans un groupe et 50 dans l’autre) paraît un peu faible pour autoriser une conclusion définitive. Néanmoins, à ces réserves près, il est effectivement utile de se poser la question d’une scanographie systématique en cas de pancréatite aiguë, dans la mesure où près de 85 % de malades qui en sont atteints ont une forme modérée et non compliquée de la maladie. Affaire à suivre. F. Fleszer, F. Frieddenberg, B. Krevsky et al. Am J Med Sci 2003 ; 325 : 251-5 Moindre sévérité de la pancréatite aiguë lithiasique en présence d’un pancréas divisum Il paraît logique de considérer que la pancréatite aiguë lithiasique puisse être moins sévère en présence d’un pancréas divisum dans la mesure où, dans ce cas, la sécrétion pancréatique reste possible par la papille accessoire tandis que la papille principale est obstruée par un calcul. Néanmoins, cette hypothèse n’avait pas encore été vérifiée. Dans une étude rétrospective ayant concerné 13 malades avec pancréatite aiguë et pancréas divisum et 39 malades également atteints de pancréatite aiguë mais indemnes de pancréas divisum, constituant le groupe contrôle, un recueil des valeurs de l’amylase, lipase, CRP et leucocytes avant la sphinctérotomie endoscopique (effectuée chez tous les malades) ainsi qu’une appréciation de la sévérité de la pancréatite sur la base de la CRP, du score de Ranson, de la scanographie, de la nécessité de soins intensifs, de la présence ou non d’une nécrose, de la durée d’hospitalisation et enfin de la mortalité, ont permis de comparer les 2 groupes. Il s’avèrait que chez les malades avec pancréas divisum le score de sévérité tomodensitométrique était significativement moins élevé. De même, le temps d’hospitalisation était plus court et la mortalité moindre (aucun décès dans ce groupe vs 4 décès parmi les 39 malades de l’autre groupe). Pour les autres paramètres étudiés la différence n’était pas significative mais il existait une tendance vers des valeurs biologiques et un score de Ranson moins élevés en cas de pancréas divisum. Ces résultats confirment le caractère « protecteur » du pancréas divisum en présence d’une pancréatite aiguë. Même si la prise en charge doit rester la même (d’autant que la pancréatite aiguë peut être sévère quand il existe un pancréas divisum), la connaissance de ce nouveau facteur pronostique pourrait avoir une influence en termes de décisions thérapeutiques, notamment vis-à-vis de la sphinctérotomie endoscopique qui serait - suggèrent les auteurs (sans le prouver) – moins nécessaire dans ce cas. N. Boon, M. Delhaye, O. Lemoine et al.Endoscopy 2003 ; 35 : 407-10 14 Revue de presse... Revue de presse... Revue de presse... Histoire naturelle de la pancréatite et mutations du gène CFTR L’implication des mutations du gène CFTR (celui de la mucoviscidose) est de plus en plus rapportée dans les cas de pancréatites chroniques idiopathiques. Une équipe italienne a cherché ces mutations (au nombre de 18 connues à l’heure actuelle) parmi 99 patients dont 45 étaient atteints de pancréatite chronique idiopathique et 54 de pancréatites aiguës itératives et inexpliquées. Une ou plusieurs mutations étaient trouvées chez 14 patients dont 3 avaient une authentique mucoviscidose. Tous ces patients avaient un long passé de poussées récidivantes avec un intervalle précédant le diagnostic de pancréatite chronique plus long que dans le cas de pancréatites chroniques idiopathiques sans mutation CFTR (7,4 ans vs 2,1 ans). Par ailleurs, le diabète et/ou la stéatorrhée évocateurs d’une insuffisance endocrine ou exocrine étaient plutôt rares ou tardifs chez les patients présentant une ou des mutations du gène CFTR. Il en était de même concernant l’apparition de calcifications pancréatiques. Ainsi, pour les auteurs, ces pancréatites semblent d’évolution plus lente que les atteintes « classiques ». D’autre part il a été constaté chez 2 de ces patients une dilatation importante du canal de Wirsung qui a été rapportée, à tort, à une tumeur mucineuse papillaire pancréatique. De ce fait, chez un patient plutôt jeune souffrant de pancréatites récidivantes inexpliquées, la constatation d’une dilatation canalaire doit conduire à la recherche d’une mutation du gène CFTR avant toute chirurgie. De façon plus générale, cette recherche devrait être systématisée en présence d’une pancréatite chronique considérée jusque là comme idiopathique et dans le cas de poussées aiguës itératives inexpliquées. En pratique, il faudra attendre la « démocratisation » d’une telle recherche avant de l’inclure dans le bilan étiologique courant, mais dans certaines situations (par exemple pour le diagnostic différentiel avec une TIPMP) y penser devrait permettre d’éviter des actes chirurgicaux abusifs. Un total de 75 patients, dont 58 étaient atteints de tumeurs kystiques (toutes confirmées histologiquement) et 17 de pseudokystes (6 diagnostics obtenus après chirurgie et 11 à la lumière de l’évolution) ont été étudiés. En analyse multivariée, les modifications parenchymateuses pancréatiques étaient significativement associées aux PK tandis que l’existence de cloisons et/ou de nodules pariétaux intrakystiques étaient évocateurs de tumeurs kystiques. Dans ce groupe de lésions, l’aspect alvéolaire orientait vers le CS alors que les nodules pariétaux étaient significativement associés aux CM. Les auteurs n’ont pas trouvé de facteurs prédictifs de malignité en écho-endoscopie s’agissant des TIPMP, mais l’effectif était trop faible (n=28) pour que les différences constatées atteignent le seuil de significativité. Néanmoins, conformément aux résultats de la littérature, on constate qu’une dilatation du canal pancréatique principal supérieure à 5 mm était plus souvent objectivée en cas de lésion maligne par rapport à une lésion bénigne (63 % vs 25 %). Il en était de même concernant la taille du kyste (> 4 cm) avec 33 % de lésions malignes et 8 % de TIPMP bénignes dans ce cas. En revanche et contrairement à d’autres résultats, la présence et la taille des nodules pariétaux ne paraissent pas discriminantes dans ce travail. En définitive, l’EES paraît un bon examen d’orientation pour faire la part entre PK et tumeurs kystiques et également entre CS et CM même si cet examen ne peut à lui seul suffire (la clinique, les autres examens morphologiques, ainsi que la ponction et analyse du liquide kystique, sont également importants). Dans le diagnostic de malignité de TIPMP, les résultats de cette étude sont plus contrastés. Cependant, dans cette indication, la capacité du patient à subir une résection pancréatique constitue souvent l’élément déterminant (sauf en cas de lésions localisées au niveau des canaux secondaires où la TIPMP est alors presque toujours bénigne) pour décider ou non de la chirurgie. M.H. Song, S.K. Lee, M.H. Kim et al. Gastrointest Endosc 2003 ; 57 : 891-6 L. Frulloni, C. Castellani, P. Bovo et al. Digestive and Liver Disease 2003 ; 35 : 179-85 Revue de presse réalisée par Hakim Bécheur Pancréascopie Journal réalisé à l’initiative de Solvay Pharma Editeur : Ektopic n° d’ISSN : 1265-4043 Directeur de la publication : J.-P. Yaher Maquette : C. Huzer - E. Pasquier Rédacteur en chef : Pr Ph. Lévy Imprimeur :Typoform Echo-endoscopie et lésions kystiques du pancréas Le diagnostic de lésions kystiques du pancréas est souvent difficile. Les auteurs coréens de ce travail ont cherché à cerner la place de l’écho-endoscopie (EES) dans le diagnostic différentiel entre pseudokystes (PK) et tumeurs kystiques, cystadénome séreux (CS) et mucineux (CM), malignité ou non dans les tumeurs intracanalaires papillaires mucineuses du pancréas (TIPMP). 15