E48 Journal of EMDR Practice and Research, Volume 6, Number 4, 2012
Tofani and Wheeler
récents sont fragmentés, pas encore consolidés, de
sorte que plusieurs cibles doivent être traitées séparé-
ment afin de faciliter l’intégration et la consolidation
de souvenirs distincts. Le protocole des événements
récents est inclus dans Luber (2009).
Le protocole de l’épisode
traumatique récent
Le protocole de l’épisode traumatique récent (recent-
traumatic episode protocol [R-TEP]) développé par E.
Shapiro et Laub (2008 ; E. Shapiro, 2009a) incorpore
et étend les interventions EMDR précoces existantes
en une approche thérapeutique complexe et complète.
Les auteurs émettent l’hypothèse que les informations
transmises dans les quatre modalités (somatique, sen-
sorielle, émotionnelle et cognitive) sont traitées en suiv-
ant des niveaux de complexité croissante. Les quatre
modalités sont considérées comme étant présentes à
chacun des trois niveaux de traitement de l’information
(perceptuel, expérientiel et du sens), une ou deux mo-
dalités étant dominantes à chaque niveau. Le plan
perceptuel est centré principalement sur le somatique
et sur le sensoriel, l’individu portant son attention à
la perception somatosensorielle d’informations intru-
sives menaçantes. Le plan expérientiel est centré sur
les émotions alors que le niveau du sens est avant
tout cognitif, l’individu abordant le traitement bloqué
du point de vue de ses croyances personnelles sur le
monde et de ses propres thèmes de vie.
E. Shapiro et Laub (2008) considèrent que l’événe-
ment traumatique doit être conçu comme s’étendant
depuis le moment de l’incident jusqu’à aujourd’hui
(sur un continuum traumatique continu) et proposent
le concept de l’épisode traumatique (épisode T). Comme
diverses expériences demeurent souvent intrusives ou
fragmentées, le matériel doit être identifié avec précau-
tion. C’est pourquoi l’épisode T comprend plusieurs
cibles, appelées points de perturbation ou PoD (points of
disturbance ; des fragments de données sensorielles, de
sensations corporelles, d’émotions ou de pensées per-
turbantes). Les huit phases du R-TEP suivent les huit
phases du protocole standard.
Un élément procédural particulier au début du pro-
tocole R-TEP est celui du récit de l’épisode lors duquel
le client raconte l’épisode traumatique à voix haute en
recevant des stimulations bilatérales alternées (SBA).
L’étape suivante est la recherche Google (recherche G)
lors de laquelle le client est invité à parcourir inté-
rieurement l’épisode T, de manière non séquentielle,
à la recherche de fragments perturbants (PoD) qui sont
supposés constituer les fragments mnésiques non inté-
grés dominants. La recherche G est une métaphore de
personnes ayant récemment subi un trauma. Le
Cochrane Review a évalué 15 essais cliniques randomi-
sés (ECR) au niveau des symptômes traumatiques
aigus et a trouvé des preuves en faveur de la TCC
centrée sur le trauma en comparaison des entretiens
de soutien et des contrôles de la liste d’attente. Les
auteurs notent toutefois que comme la taille des
échantillons est réduite et hétérogène, les résultats
sont rapportés avec prudence (Roberts, Kitchiner,
Kenardy & Bisson, 2010). Aucune étude EMDR n’a
été incluse dans cette méta-analyse parce qu’aucune
ne répondait aux critères d’inclusion rigides de cette
étude. Une mise à jour de 2009 des directives sur la
pratique de l’APA pour les états ESA et ESPT affirme
que “les premiers soins psychologiques doivent être
considérés comme une intervention informée par les
preuves plutôt que fondées sur les preuves. D’autres
recherches sont nécessaires” (Benedek, Friedman,
Zatzick & Ursano, 2009, p. 8).
Bien que l’EMDR constitue une intervention
thérapeutique bien reconnue pour l’ESPT et figure
dans de nombreuses directives internationales sur
les pratiques ainsi que dans 21 essais randomisés
documentant des résultats positifs (Ahmad, Larsson
& Sundelin-Wahlsten, 2007 ; Kemp, Drummond &
McDermott, 2010 ; Schubert & Lee, 2009 ; Van der
Kolk et al., 2007), l’efficacité de l’EMDR est moins
bien établie pour l’ESA. Les directives pour les pra-
tiques de l’APA (2004) incluent toutefois l’EMDR
en tant que traitement efficace tant de l’ESA que de
l’ESPT, mais ajoutent qu’il n’existe pas d’étude fondée
sur les preuves établissant que l’EMDR est efficace en
tant que traitement précoce ou préventif de l’ESA ou
de l’ESPT.
Il existe plusieurs études de cas rapportant des
résultats positifs des interventions EMDR précoc-
es après un stress aigu (Colelli & Patterson, 2008 ;
Fernandez, 2008 ; Grainger, Levin, Allen-Byrd, Doctor
& Lee, 1997 ; Ichii, 1997 ; Kutz et al., 2008 ; Rost,
Hofmann & Wheeler, 2009 ; Russell, 2006 ; Silver
et al., 2005 ; Wesson & Gould, 2009). La plupart de
ces études utilisent soit le protocole EMDR standard
ou une modification du protocole standard. Francine
Shapiro a développé le protocole des événements
récents (1995) qui correspond à une modification
du protocole standard et de son premier protocole
EMD (eye movement desensitization : désensibilisation
par les mouvements oculaires, 1989). Le protocole
EMD requiert un retour à la cible et une vérifica-
tion du niveau SUD (Subjective Units of Disturbance :
unités subjectives de perturbation) fréquents, sans
poursuivre les chaînes associatives. F. Shapiro (1995)
considère que les réseaux mnésiques traumatiques