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Dr J.P. CAPPOEN - Ancien chef de clinique du Service d'Endocrinologie - Attaché consultant
dans le Service d'Endocrinologie du Pr LEFEVRE et du Service d'Obstétrique du Pr J.C.
MONNIER - Attaché à la clinique de la Louvière (Lille).
La thyroïdite du post-partum est-elle fréquente ?
S'il est habituel de rechercher une
hypothyroïdie chez la femme arrivant en
période ménopausique, il ne faut pas se
cantonner à ce schéma traditionnel et
on se doit de rechercher une pathologie
thyroïdienne qui risque de survenir dans
les 3 à 18 mois après un accouchement.
En effet, la grossesse est une circon-
stance particulière sur le plan de
l'immuno-pathologie car, pour qu'une
femme supporte ou tolère un enfant qui
lui est génétiquement étranger à 50%, il
est important qu'elle puisse modifier et
réduire sa capacité de réaction immu-
nitaire.
Pendant la grossesse, il y a donc
réduction des phénomènes immu-
nitaires et il est démontré que certaines
maladies auto-immunes (comme la
polyarthrite rhumatoïde ou la maladie de
Basedow) voient spontanément leur
évolution se réduire pendant la gros-
sesse, du fait de cette baisse des
activités immunitaires pergravidiques.
Cette diminution est suivie après
l'accouchement d'un phénomène de
rebond et pendant la période du post-
partum (3 à 18 mois), on peut voir appa-
raître, chez des femmes prédisposées
génétiquement, certaines manifestations
de maladies auto-immunes thyroïdi-
ennes.
C'est dans ce post-partum qu'il faudra
savoir rechercher l'existence d'une
pathologie thyroïdienne, d'autant que la
fréquence se situe aux environs de 7 à
8%.
Quelles sont les manifestations de l'hypothyroïdie du post-
partum ?
Les signes d'appel de l'hypothyroïdie
sont frustres, peu caractéristiques et il
est exceptionnel d'avoir un tableau
complet de myxoedème.
La plupart du temps, les signes sont des
signes fonctionnels modérés faits de
fatigabilité, de crampes musculaires, de
frilosité, de tendance à la constipation,
en fait des symptômes peu spécifiques
que l'on attribue presque toujours au
"baby blues".
Devant une femme en post-partum qui se plaint d'asthénie, il est
donc recommandé de pratiquer un bilan thyroïdien.
Dans l'année qui suit un accouchement,
ne pas systématiquement rattacher tous
les symptômes fonctionnels, même s'ils
sont mineurs, à la grossesse mais
savoir penser à l'hypothyroïdie.
Comment rechercher biologiquement l'hypothyroïdie ?
La TSH plasmatique représente
l'analyse la plus simple et la plus
efficace dans ce dépistage car ces
hypothyroïdies dites du post-partum
sont toujours périphériques et le premier
signe biologique à être perturbé est une
augmentation de la TSH.
Il est donc raisonnable dans un but
pragmatique, chez une femme qui vient
d'accoucher dans l'année et qui se sent
en méforme, de pratiquer un dosage de
la TSH. C'est l'examen princeps qu'il
faudra demander au cours de cette
phase.
Si la TSH est élevée, il est souhaitable
de compléter le bilan thyroïdien par le
dosage des fractions libres des
hormones thyroïdiennes, la mesure de
la Thyroxine li:3re (FT4) est à ce titre
l'examen le plus intéressant.
Le problème des anticorps anti-thyroïdiens.
En ce qui concerne le dosage des
anticorps (Ac) anti-thyroïdiens, leur
présence permet d'affirmer que la
thyroïdite du post-partum est bien
d'origine auto-immune.
Les Ac anti-microsomiaux sont très
positifs surtout s'ils sont dosés par
méthode radio-immunologique. Les Ac
anti-thyroglobuline sont aussi volontiers
présents.
Certaines études prospectives ont
recherché la présence d'anticorps anti-
microso-miaux au premier trimestre de
la grossesse chez des femmes
présumées normales. Celles qui avaient
des Ac anti-microsomiaux présents au
premier trimestre de la grossesse, ont
développé une dysthyroïdie du post-
partum dans plus de 3/4 des cas.
On pourrait même à l'extrême s'en servir
comme test de dépistage, mais pour
des raisons de coût, cette pratique n'a
pas été retenue.
Les hypothyroïdies du post-partum sont-elles transitoires ou
définitives ?
Certaines d'entre elles sont transitoires
et régressent spontanément alors que
d'autres seront définitives.
Il est apparent, actuellement, qu'un
certain pourcentage de ces cas d'hypo-
thyroïdies restera définitif.
On peut également classer l'hypo-
thyroïdie en plusieurs stades et le
groupe de Hall et Evered a subdivisé
l'hypothyroïdie en différents stades de
gravité en fonction du tableau clinique et
biologique du patient.
Faut-il traiter ces hypothyroïdies du post-partum et comment ?
Le problème du traitement se pose
lorsqu'on a dépisté ces hypothyroïdies,
après en avoir recherché l'étiologie.
Ce traitement a pour but évidemment,
d'une part, de faire disparaître les
symptômes lorsqu'ils sont présents, et
éventuellement d'empêcher qu'ils ne
s'installent s'ils sont frustres ou absents.
Ce traitement est essentiellement basé
sur la L-T4 qui constitue une
thérapeutique intéressante par sa
souplesse, d'une part car elle a une
demi-vie très longue et d'autre part, car
elle constitue un excellent traitement
freinateur au niveau hypophysaire. En
règle générale, comme il s'agit de
femmes jeunes, il n'y a pas de crainte
d'avoir chez elles une coronaropathie
latente qui risquerait de se démasquer
sous traitement.
L'apport de L-T4 en sera facilité, sans
risques particuliers, à condition d'être
fait à doses progressives, en com-
mençant par une dose de 25 µg/j et en
augmentant peu à peu la posologie
jusqu'à la dose d'entretien qui se situe
souvent entre 75 et 125 µg/j en
moyenne.
On reste souvent étonné que les
hypothyroïdies modestes ont souvent
besoin de doses assez voisines des
hypothyroïdies évoluées.
Pour adapter le traitement on surveillera
- la tolérance clinique : les signes
fonctionnels, le poids, le pouls, la
pression artérielle. - les dosages TSH et
FT4.
Dans ce contexte d'hypothyroïdie du
post-partum, il est souhaitable de faire
un essai de réduction et/ou d'arrêt du
traitement, seul moyen pour savoir si
l'hypothyroïdie est ou non définitive.
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