TSO Méthadone, ELSA, Vincent FAUCHERRE, XI 2008
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INITIER UN TRAITEMENT DE SUBSTITUTION
AUX OPIACES (TSO) PAR LA METHADONE
PREREQUIS INDISPENSABLES et INDICATIONS PRIORITAIRES
Pour qui :
Dépendance majeure aux opiacés agonistes
Plus de 18 ans
Prise en charge préalable de la dépendance à l'alcool et aux benzodiazépines
Prise en charge simultanée du conjoint dépendant, si possible
Antécédents lourds de toxicomanie avec polyconsommations et polydépendances, problèmes affectifs et
sociaux graves, comorbidités psychiatriques ou infectieuses importantes et fréquentes, recherche d'un
cadre car mésusage de la Buprénorphine
(utilisation par voie nasale, IV, troc, revente, posologies automodifiées,
association avec d'autres médicaments sans accord médical)
Accord d'un CSST ou d'un médecin généraliste pour l'articulation immédiate au moment de la sortie
du patient du CHU
Information sur le déroulement du traitement et ses contraintes, en particulier le cadre de dispensation, au
début dans un CSST, avec des contrôles urinaires réguliers et une prise en charge médicale, sociale et
psychologique
Evaluation :
Médicale :
o
Examen d'urine : opiacés positifs et méthadone négative
(pour éviter un suivi dans un autre CSST)
o
Bilan médical complémentaire
(sérologies, NFS, foie, rein, bilan ionique)
o
ECG
(recherche de troubles de conduction, allongement du QT, favorisés par des antécédents personnels
et familiaux de troubles de conduction, des posologies élevées de méthadone > 120 mg/j, une pathologie
cardiaque sévère et des traitements favorisant l'allongement du QT et les hypokaliémies qui contre-
indiquent la méthadone)
Psychosociale
En réalité, il n'y a pas de critères prédictifs d'efficacité, il faut souvent mettre en place le
traitement et voir l'évolution
CONTRINDICATION
Absence de dépendance aux opiacés
Insuffisance respiratoire chronique sévère
Psychopathie sévère avec troubles de la personnalité
Le diabète sucré est une contre-indication relative (sirop de méthadone)
Attention aux interactions médicamenteuses avec les agonistes antagonistes et les médicaments modifiant la
kaliémie
PRESENTATION de la METHADONE
Flacons de chlorydrate de méthadone dosés à 5, 10, 20 et 60 mg. Dans les services, privilégier les posologies à 10 mg. Les flacons
contiennent de fortes quantités de saccharose (9 g par flacon de 15 ml contenant 60 mg de méthadone) et de faibles quantité
d'éthanol (14 mg/ml), susceptible de marquer dans les urines.
Les gélules ne peuvent être prescrites qu'après un an de stabilité en programme méthadone dans un CSST ou avec un médecin
généraliste.
CHOIX DE LA POSOLOGIE INITIALE
Les posologies de méthadone sont difficiles à prévoir, elles ne sont pas toujours en lien avec les quantités d'héroïne
consommées précédemment. S'il y avait déjà eu un programme méthadone, les mêmes posologies peuvent être
reprises (phénomènes de recrutement).
On estime que les éléments suivants peuvent guider le prescripteur vers une posologie initiale élevée :
la gravité de la toxicomanie (voir score TMSP)
autres facteurs :
o Grossesse, au 3
ème
trimestre
o Association à des médicaments psychotropes
o Hépatite C
o Métabolisme hépatique rapide de la méthadone (cytochrome P450)
o IMC > 25 ou 30
MISE EN PLACE DU TRAITEMENT
La posologie doit être suffisante, c'est celle qui permet le meilleur confort au patient, le succès du traitement est
fortement corrélé à une posologie adaptée, suffisante et aux mesures médicopsychosociales
1
er
Jour, la posologie initiale sera comprise entre 40 et 80 mg/j à répartir en deux fois : à 8h, on donnera, toujours
sous contrôle médical ou infirmier, les 2/3 de la posologie prévue, elle sera complétée à 12h si aucun signe de
surdosage. Le patient doit être surveillé entre les deux prises du 1
er
jour.
Du 2
ème
au 7
ème
Jour : période d'adaptation rapide de la posologie individualisée. En fonction des signes de
surdosage ou sous dosage, on ajoutera ou retranchera 10 mg par rapport à la posologie de la veille. La posologie de
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méthadone choisie par l'équipe soignante, sera donnée par l'infirmière le matin à 8h en une seule prise, chaque
jour, puis l'infirmière reprendra le flacon vide. La posologie ne devra pas excéder 120 à 150 mg/j.
Mais l'équilibre pharmacocinétique de la méthadone (steady state) est normalement atteint en 4 à 10 jours après
chaque modification :
donc la possibilité sous surveillance médicale stricte de modifier au cours de la première semaine la
posologie de Méthadone répond à la nécessité de soulager rapidement le patient tout en connaissant la possibilité de survenue
secondairement des effets secondaires de la méthadone liés aux surdosage (somnolence en particulier)
Après la première semaine : la posologie établie au 7
ème
jour doit être poursuivie sans la modifier.
Elle peut être
élevée si elle permet un bien être appréciable pour le patient. A ce stade, après une période de grande satisfaction avec une
posologie fixe de méthadone, les patients peuvent avoir envie de consommer à nouveau de l'héroïne, des BZD, de l'alcool et de la
cocaïne, ce qui peut représenter le seul signe de sous dosage et nécessiter d'augmenter les posologies de méthadone avant de
conclure à une inefficacité du programme méthadone.
Si l'équilibre ne peut être obtenu après la première semaine,
malgré une posologie élevée, la co-prescription d'un
antidépresseur et la recherche étiologique d'une appétence élevée à la méthadone (patient métaboliseur rapide, interactions
médicamenteuses, tolérance très forte), il faut savoir renoncer à la méthadone assez tôt pour éviter au patient une perte de chance
qui va retarder l'accès à une autre technique (Buprénorphine, communauté thérapeutique…). En effet, les chances ultérieures de
succès sont faibles si au moins une fois au cours du 1
er
mois, un équilibre n'a pu être atteint.
Analyse urinaires, elles peuvent être demandées une à deux fois par semaine avec les items suivants : méthadone,
opiacés naturels ou de synthèse, alcool, cocaïne, amphétamine, LSD et cannabis
Dosage méthadone : les méthadonémies sont réalisables au laboratoire de toxicologie à Lapeyronie, la fourchette
thérapeutique se situe entre 200 et 400 ng/ml
A la sortie du patient :
On ne remet pas de flacons de méthadone au patient
Le relais sera réalisé le plus souvent en CSST. Sinon un médecin de ville à la demande du patient peut assuré le relais
dans les situations suivantes : capacité du patient à gérer de façon autonome son traitement, une posologie de
méthadone stabilisée et des dosages urinaires négatifs aux opiacés.
Ordonnance sécurisée (avec un carré noir en bas et à gauche de l'ordonnance) avec nom, prénom et RPPS du
prescripteur hospitalier, la posologie de méthadone est inscrite en toute lettre, de même que la durée de la prescription
qui ne peut pas excéder quatorze jours (en attendant le rendez-vous pour le relais en CSST ou le médecin de ville) et le
nom du CSST qui prendra le relais de la dispensation dans un premier temps (à Montpellier, il s'agit de l'UTTD et de
l'association Arc-en-Ciel) ou du médecin de ville
Donner le rendez-vous au CSST ou chez le médecin généraliste qui prendra le relais, si possible le jour même ou le
lendemain de la sortie
SIGNES DE SUR et SOUS DOSAGE CLINIQUES pour adapter les posologies de
méthadone
Signe de surdosage : somnolence.
Le surdosage de la méthadone peut être mortel, majoré en cas de prise
conjointe de psychotropes et/ou d'alcool (la dose létale pour un adulte non dépendant aux opiacés et de poids
moyen, est 40 mg) : œdème pulmonaire, dépression respiratoire, troubles de la conscience, hypotension artérielle et
bradycardie, rhabdomyolyse, atteinte rénale et décès.
Signes de sous dosage :
symptômes de manque en opiacés : agitation et irritabilité, insomnie, douleurs lombaires, frissons,
malaises, dépression
mais aussi : poursuite de la consommation opiacés, consommation BZD, OH, cocaïne, comportement
délictueux, craving et rêves de drogues
EFFETS SECONDAIRES DE LA METHADONE
au début du traitement : céphalées, flush facial, bradycardie, palpitations, euphorie, insomnie, vertiges, somnolence, prurit et
constipation
au cours des 6 premiers mois : miction difficile, oedèmes des membres inférieurs, gynécomastie, douleurs articulaires, nausées,
vomissements, bradycardie et hypotension artérielle, augmentation de la sudation
après 6 mois : persistance de l'hypersudation, constipation, troubles de la libido et du sommeil, prise de poids
autres effets :
SNC : euphorie, céphalées, agitation, altération de la perception visuelle
Tube digestif : bouche sèche, anorexie
Système cardiovasculaire : flush facial, bradycardie, palpitation, hypotension artérielle symptomatique, allongement de
l'espace QT et torsade de pointe
Appareil génito-urinaire : rétention d'urine, diminution de la libido, gynécomastie
Allergie : prurit, urticaire, rashs cutanés, oedème
INTERACTIONS MEDICAMENTEUSES et PRECAUTIONS D'EMPLOI
Avec dépresseurs SNC
Anxiolytiques : association possible, mais non recommandée, avec les benzodiazépines à demi-vie longue (Séresta,
Valium et Rivotril), éviter celles qui s'accumulent très vite dans le cerveau (Rohypnol, tranxène et Lysanxia). D'une
manière générale, ne pas initier un traitement par les BZD chez un patient dépendant aux opiacés la différence des
patients pour lesquels un sevrage alcoolique est envisagé)
Neuroleptiques : la sédation s'ajoute aux effets de la méthadone
Antidépresseurs :
o Sérotoninergiques : intérêt sur comportement compulsifs et agressifs (Prozac, Deroxat)
o Fluvoxamine (Floxyfral) et Sultopride contrindiqué (hypokaliémie et allongement espace QT)
o Tricycliques : concentrations augmentées par la méthadone
o Antiépileptiques : ils baissent les concentration de la méthadone par induction enzymatique
(carbamazépine, phénobarbital, oxcarbazépine, primidone, phénytoïne)
Avec les antalgiques : association possible avec les non morphiniques. Pour les morphiniques :
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Agonistes des récepteurs µ (opiacés tel que Skénan mais aussi tous les dérivés codéine tels que chlorydrate de
tramadol, dextropropoxyphène), leurs effets s'ajoutent à la méthadone, association possible pour le traitement de la
douleur, mais toutes ces molécules marquent les urines dans la rubrique opiacés ce qui va gêner l'interprétation de la
stabilité du patient (y compris les antitussifs à base de codéine).
Agonistes-antagonistes des récepteurs µ
µµ
µ (Subutex, temgésic, nubain, fortal), comme les antagonistes (Naltrexone) :
FORMELLEMENT CONTRINDIQUES (signes de manque aigu par blocage compétitif des récepteurs)
Avec les antiinfectieux :
Ceux qui diminuent les concentrations de la méthadone dont la posologie doit être compensée (augmenter la posologie
de méthadone de 2 à 8 fois)
o Antibiotiques : tous les médicaments contenant Rifadine ou ses dérivés (Rifabutine, Rifampicine, Rifater,
Rifinah et Rimactan) mais aussi Griséofulvine, Fluoroquinolone et Fluconazole
o Antirétroviraux : Abacavir (Ziagen), Efavirenz (Sustiva), Névirapine (Viramune), Ritonavir (Norvir),
Fosamprénavir (Telzir), Nelfinavir (Viracept)
Ceux qui allongent le QT et risque d'hypokaliémie :
o Antiparasitaire : Halofantrine, Luméfantrine, Pentamidine
o Antibiotiques IV : Erythromycine, Mizolastine, Moxifloxacine, Spiramycine, Vincamine et Amphotéricine
B
Les traitements de l'hépatite C (Interféron et Ribavirine) ne modifient pas les taux de méthadone
Avec tous les antiarythmiques de la classe Ia et III pouvant entraîner des hypokaliémies, allonger l'espace QT et provoquer des
troubles du rythme ventriculaire et des torsades de pointe, mais aussi tous les bétabloquants, les médicaments bradycardisants
(anticalciques bradycardisants, anticholinestérasiques, antihypertenseurs centraux et digitaliques), les diurétiques
hypokaliémiants, laxatifs, glucocorticoïdes
avec les autres substances :
o
consommation aiguë d'alcool
o
Cisapride, Cimétidine (Tagamet) et Inhibiteurs de la pompe à protons
SUIVI du TRAITEMENT
Clinique : recherche de signes de sous et surdosage, autres consommations
Urines : pour suivre l'efficacité de la cure. Recherche possible d'opiacés, alcool, cocaïne, amphétamines,
méthadone. La recherche de Buprénorphine est plus complexe et doit être justifiée, celle de cannabis est souvent
inutile.
Dosage de méthadonémie : seulement pour les patients pour lesquels on envisage les prise deux fois par jour de
méthadone en raison de fortes posologies.
CAS PARTICULIER
Polydépendance : chez les personnes qui présentent une addiction simultanée à l'alcool, il est préférable d'en faire
le sevrage à l'hôpital, ce séjour permettra en même temps l'induction de la méthadone
Douleurs : la prescription d'opiacés agonistes est possible, mais celle des opiacés agonistes antagonistes est contre-
indiquée
Grossesse : l'utilisation de la méthadone pendant la grossesse est possible. Le nouveau-vé peut faire un syndrome
de sevrage aux opiacés dont l'apparition peut être retardée de quelques heures à quelques jours.
Allaitement : la méthadone passe dans le lait maternel
SCORE TMSP
1
2
5
Poly-toxicomanie par voie IV
ATCD ou risque actuels de
complications médicales majeures
Complications
judiciaires
Alcoolisme grave
Héroïnomanie IV ou poly-
toxicomanie > 10 ans
Partenaire toxicomane
Deal et délinquance favorisés
par la dépendance
Mono-toxicomanie per nasal
Peu ou pas de BZD,
Amphétamines,
barbi et cocaïne
Pas d’alcoolisme
Partenaire non toxicomane
Pas de deal ni délinquance
induits par la dépendance
T
1
2
5
Troubles de la personnalité
importants nécessitant une prise
en charge en milieu spécialisé
Troubles de la personnalité
modérés ou suivis et non
décompensés (pas de TS ou
passage à l’acte ou violences
depuis au moins 6 mois)
Pas de troubles notables de la
personnalité
P
1
2
5
Errance quotidienne,
marginalisation complète,
situation abandonnique
Risques judiciaires majeurs
Problèmes sociaux : pas
d’hébergement personnel, papiers
divers non remis à jour, procès et
jugements en cours, pas de
ressources et endettement majeur
Problèmes familiaux (perte
contact)
Situation sociale, professionnelle
et familiale non inquiétante ou
satisfaisante
S
1
2
5
Pas de suivi médical
Suivi médical irrégulier et
difficultés d’observance
thérapeutique
Suivi médical régulier et
observance des traitements
M
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