Risque hémorragique gastro-intestinal avec les ISRS Des observations d’ecchymoses et d’hémorragies parfois sévères chez des patients traités par des inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (ISRS), en dehors de toute prise d’anticoagulant, ont été publiées dans les années 90.1 Le risque hémorragique gastro-intestinal est depuis mieux documenté. Cet effet pourrait s’expliquer par l’inhibition de la recapture de la sérotonine au niveau des plaquettes ce qui diminue l’agrégation plaquettaire2 Quelle pertinence clinique ? Une revue de la littérature3 portant au total sur 153.000 patients indique que le risque d’hémorragie digestive haute est multiplié par 2 chez les patients traités par ISRS seul versus placebo. Des études plus récentes montrent un risque multiplié par 34.Ce risque est comparable à celui observé avec de faibles doses d’AAS ou d’AINS, chez des patients non à risques. Ce risque relativement faible par individu peut toutefois avoir un impact important sur la population en raison du nombre important de personnes traitées. Ainsi en 2003, les estimations de cas supplémentaires d’hémorragies digestives hautes étaient de l’ordre de 18.000 aux USA et au Royaume-Uni. Risque majoré avec les AINS, l’AAS, les autres antiplaquettaires, les antivitamines K et chez les patients âgés. L’association d’un ISRS à un anticoagulant oral accroît le risque hémorragique et un suivi de l’INR plus rapproché doit être instauré, il faut noter que des saignements peuvent toutefois survenir sans augmentation de l’INR5. L’utilisation simultanée d’un AINS avec un ISRS augmente le risque relatif d’hémorragies gastrointestinales jusqu’à 12 environ 6. De plus avec les AINS seuls, on sait que l’âge est un des facteurs de risque les plus importants. Dès l’âge de 55-60 ans, le risque de complications gastro-intestinales augmente de manière linéaire de 4% l’an7 ; au-delà de 80 ans le risque est multiplié par 10 par rapport aux personnes de moins de 50 ans. Pour rappel, l’AINS de référence reste l’ibuprofène ; un risque accru d’effets gastro-intestinaux a été démontré avec le piroxicam8. L’utilisation combinée d’AINS et d’ISRS peut avoir un effet synergique qui se traduit par un risque de saignement plus élevé que celui observé avec chaque médicament seul. Le risque hémorragique a parfois des conséquences graves. Les patients à risque sont surtout les personnes de plus de 80 ans, en cas d’antécédents d’hémorragie gastro-intestinale ou en cas de traitement par l’acide acétylsalicylique, un autre médicament antiplaquettaire, un AVK ou un AINS. Il convient dans la mesure du possible d’éviter l’utilisation d’ISRS chez les patients à risque. Lorsque l’administration est jugée nécessaire, un suivi du patient doit être assuré et il pourrait être rationnel d’informer ces patients sur les signaux d’alarme évoquant une hémorragie digestive (selles noires, pâleurs, tachycardie). De même il convient d’être prudent lors d’administration d’un AINS chez des patients traités par ISRS. 1 Prescrire n°207 juin 2000 p. 444 et références Drug Ther Bull 2004 ; 42 : 17-18 3 Interaction between SSRI’s et NSAD’s : review of literature. Pharmacother 2006; 2006; 26(9): 1307-1313 456 4 Folia pharmacotherapeutica 32, avril 2005 p.35 5 Prescrire. Guide des interactions médicamenteuses 2010 p. 263 6 L’usage adéquat des AINS. Réunion de consensus 25/11/2004 7 L’usage efficient de médicaments dans le traitement de la douleur en ambulatoire. Revue de consensus INAMI 8 EMEA recommends restricted use for piroxicam 25 june 2007 2 e-news médecins-pharmaciens Févier 2011