ONCOLOG IE 612 Oncologie (2009) 11: 612–793 © Springer 2009 DOI 10.1007/s10269-009-1823-9 RPC NICE SAINT PAUL DE VENCE 2009 Recommandations pour la pratique clinique : Nice, Saint-Paul de Vence 2009 « cancers du sein » et « soins de support » Partie II - Soins de support1 Promoteur Cours de Saint-Paul-de-Vence Coordination logistique et scientifique LOb Conseils P. Ferran, L. Massa-Auvray, N. Mathivas, J. Tessaire Comité d’organisation J. Gligorov, I. Krakowski, E. Luporsi, M. Namer Correspondance : [email protected] ; [email protected] Membres du groupe de travail « Cancers du sein » L. Aimard, radiothérapie, centreClairval, Marseille, France B. Barreau, radiologie, centre Futura, Anglet, France F. André, oncologie médicale, institut Gustave-Roussy, Villejuif, France C. Bourgier, radiothérapie, institut Gustave-Roussy, Villejuif, France M. Antoine, anatomie et cytologie pathologiques, AP–HP, hôpital Tenon, Paris, France E. Brain, oncologie médicale, centre René-Huguenin, Saint-Cloud, France 1 La partie « Cancers du sein » de ces recommandations a fait l’objet d’une publication dans le volume 11 – Numéro 11 – novembre 2009 de la revue Oncologie. L. Ceugnart, radiologie, centre Oscar-Lambret, Lille, France K. Clough, oncologie chirurgicale, institut du sein, Paris, France J. Chiras, radiologie, AP–HP, la Pitié-Salpêtrière, Paris, France M. Cohen, oncologie chirurgicale, cabinet médical, Aubagne, France B. Coudert, oncologie médicale, centre GeorgesFrançois-Leclerc, Dijon, France B. Cutuli, oncologie radiothérapique, polyclinique de Courlancy, Reims, France T. Delozier, oncologie médicale, centre FrançoisBaclesse, Caen, France S. Delaloge, oncologie médicale, institut GustaveRoussy, Villejuif, France N. Dohollou, oncologie médicale, polyclinique Nord, Bordeaux, France F. Ettore, anatomie et cytologie pathologiques, centre Antoine-Lacassagne, Nice, France T. Facchini, oncologie médicale, polyclinique de Courlancy, Reims, France C. Falandry, oncologie médicale, centre hospitalier Lyon-Sud, Pierre-Bénite, France G. Freyer, oncologie médicale, centre hospitalier Lyon-Sud, Pierre-Bénite, France G. Ganem, oncologie radiothérapique, centre JeanBernard, Le Mans, France S. Giard, oncologie chirurgicale, centre Oscar-Lambret, Lille, France J.-P. Guastalla, oncologie médicale, centre Léon-Bérard, Lyon, France J.-M. Guinebretiere, anatomie et cytologie pathologiques, centre René-Huguenin, Saint-Cloud, France J. Jacquemier, anatomie et cytologie pathologiques, institut Paoli-Calmettes, Marseille, France A. Lesur, oncologie gynécologique, centre AlexisVautrin, Vandœuvre-lès-Nancy, France P.-M. Martin, biologiste, faculté de médecine, secteur Nord, Marseille, France L. Mauriac, oncologie médicale, institut Bergonié, Bordeaux, France F. Lokiec, pharmacologie, centre René-Huguenin, SaintCloud, France S. Ménard, oncologie expérimentale et laboratoire, Institut national du cancer, Milan, Italie I. Morel-Soldner, gérontologie, centre hospitalier Lyon-Sud, Pierre-Bénite, France L. Ollivier, radiodiagnostic, institut Curie, Paris, France T. Petit, oncologie médicale, centre Paul-Strauss, Strasbourg, France P. Pujol, oncogénétique, hôpital Arnaud-de-Villeneuve, Montpellier, France H. Roché, oncologie médicale, institut Claudius-Regaud, Toulouse, France G. Romieu, oncologie médicale, centre Val-d’AurellePaul-Lamarque, Montpellier, France P. Rouanet, chirurgie, centre Val-d’Aurelle-PaulLamarque, Montpellier, France R. Salmon, oncologie chirurgicale, institut Curie, Paris, France J.-P. Spano, oncologie médicale, AP–HP, la PitiéSalpêtrière, Paris, France M. Spielmann, oncologie médicale, institut GustaveRoussy, Villejuif, France A. Tardivon, radiologie, institut Curie, Paris, France G. Houvenaeghel, chirurgie, institut Paoli-Calmette, Marseille, France R. Villet, chirurgie, groupe hospitalier DiaconessesCroix-Saint-Simon, Paris, France M. Hery, oncologie radiothérapique, centre hospitalier Princesse-Grâce, Monaco, France L. Zelek, oncologie médicale, AP–HP, Henri-Mondor, Créteil, France Membres du groupe de travail « Soins de support » M. Ackermann, pharmacologie Morges, Suisse T. Bouillet, oncologie médicale, Paris, France D. Ammar, médecine de la douleur, Marseille, France C. Bouleuc, oncologie médicale, institut Curie, Paris, France E.-C. Antoine, oncologie médicale, clinique Hartmann, Neuilly-sur-Seine, France T. Bachelot, oncologie médicale, centre Léon-Bérard, Lyon (SFRO), France P.-A. Brioschi, gynécologie–obstétrique, Genolier, Suisse P. Bachmann, nutrition, centre Léon-Bérard, Lyon, France F. Brocard, oncologie médicale, centre Alexis-Vautrin, Nancy, France C. Bagnis, néphrologie, AP–HP, la Pitié-Salpêtrière, Paris, France L. Chaigneau, oncologie médicale, CHU Jean-Minjoz, Besançon, France F. Barruel, psychologie, CHI Le Raincy, Montfermeil, France L. Chassignol, médecine de la douleur, centre hospitalier de Saintonge, Saintes, France K. Belhadj, hématologie, AP–HP Henry-Mondor, Créteil, France F. Chauvin, oncologie médicale et santé publique, institut de cancérologie, Saint-Priest-en-Jarez, France CONSEIL SCIENTIFIQUE / SCIENTIFIC BOARD 613 ONCOLOG IE 614 G. Chvetzoff, oncologie médicale, centre Léon-Bérard, Lyon, France A.-S. Le Bihan, psychiatrie clinique, AP–HP, SaintAntoine, Paris, France C. Ciais, soins palliatifs, centre Antoine-Lacassagne, Nice, France J.-L. Machavoine, psycho-oncologie, centre FrançoisBaclesse, Caen, France M.-F. Cosset, Anesthésie–réanimation, institut GustaveRoussy, Villejuif, France M. Magnet, oncologie médicale, HAD, Lyon, France S. Dauchy, psychiatrie, institut Gustave-Roussy, Villejuif, France F. Debiais, rhumatologie, CHU de la Milétrie, Poitiers, France T. Delorme, médecine de la douleur, institut Curie, Paris, France S. Mimoun, gynécologie-sexologie, Paris, France S. Perrot, rhumatologie, AP–HP, Hôtel-Dieu, Paris, France P. Poulain, soins palliatifs, polyclinique de l’Ormeau, Tarbes, France M. Reich, psychiatrie, centre Oscar-Lambret, Lille M. Di Palma, oncologie médicale, institut GustaveRoussy, Villejuif, France P. Saltel, psychiatrie, centre Léon-Bérard, Lyon, France M. Dicato, oncologie médicale, centre hospitalier de Luxembourg, Luxembourg F. Scotté, oncologie médicale, AP–HP, HEGP, Paris, France S. Dolbeault, psychiatrie, institut Curie, Paris, France P. Sénesse, oncologie médicale, centre Val-d’Aurelle– Paul-Lamarque, Montpellier, France J.-P. Durand, oncologie médicale, AP–HP Cochin, Paris, France J. Duret, kinésithérapie, Avignon, France S. Toussaint, soins palliatifs, centre Alexis-Vautrin, Vandœuvre-lès-Nancy, France P. Escure, oncologie médicale, AP–HP Avicenne, Bobigny, France M. Tubiana, oncologie médicale, centre René-Huguenin, Saint-Cloud, France N. Jovenin, oncologie médicale, centre Jean-Godinot, Reims, France M.-P. Vasson, pharmacologie, faculté de pharmacie, Clermont-Ferrand, France L. Juhel, oncologie médicale, clinique Victor-Hugo, Le Mans, France D. Kamioner, oncologie médicale, hôpital privé OuestParisien, Trappes, France I. Kriegel, anesthésie–réanimation, AP–HP Lariboisière, Paris, France F. Laroche, rhumatologie, AP–HP, Saint-Antoine, Paris, France C. Villanueva, oncologie médicale, CHU Jean-Minjoz, Besançon, France F. Tiberghien, médecine de la douleur, CHU JeanMinjoz, Besançon, France C. Tournigand, oncologie médicale, AP–HP, SaintAntoine, Paris, France P. Latino-Martel, Nutrition, Jouy-en-Josas, France R.-M. Javier, rhumatologie, CHU Hautepierre, Strasbourg, France D. Mayeur, oncologie médicale, hôpital André-Mignot, Le Chesnay, France M. Marty, rhumatologie, AP–HP, Henri-Mondor, Créteil, France V. Launay-Vacher, néphrologie, AP–HP, La PitiéSalpêtrière, Paris, France J. Otto, oncologie médicale, centre Antoine-Lacassagne, Nice, France Membres du comité d’organisation J. Gligorov, oncologie médicale, AP–HP Tenon, Paris, France I. Krakowski, oncologie médicale, centre Alexis-Vautrin, Vandœuvre-lès-Nancy, France E. Luporsi, oncologie médicale, recherche clinique et biostatistique, méthodologie, centre Alexis-Vautrin, Vandœuvre-lès-Nancy, France M. Namer, oncologie médicale, Nice, France Membres du jury M. Aapro, Suisse M. Marty, Paris, France Y. Belkacemi, Paris, France F. Mornex, Lyon, France A. Di Leo, Italie M. Piccart, Belgique A. Dicato, Luxembourg J. Pouyssegur, Nice, France C. Isamel-Domenge, Brésil I. Tannock, Canada D. Khayat, Paris, France S. Uzan, Paris, France Membres du groupe de lecture D. Azria, oncologie radiothérapique, centre Vald’Aurelle-Paul-Lamarque, Montpellier, SFRO, France C. Meyer, oncologie chirurgicale, hôpitaux civils de Colmar, Colmar, France J.-L. Beal, anesthésie–réanimation, Quétigny, France S. Million Daessle, radiologie, cabinet médical, Colmar, France P. Bensa, neurologie, Marseille, France P. Bertheau, anatomie pathologie, SFP, Paris, France J. Camerlo, oncologie médicale, institut Paoli-Calmette, Marseille, France A. Carbonne, biologie médicale, AP–HP, La PitiéSalpêtrière, Paris, France E. Carola, oncologie médicale, centre hospitalier de Senlis, France J. Carretier, coordinateur des SOR Savoir Patient, Paris, France B. Sigal-Zafrani, anatomopathologie, institut Curie, Paris, France V. Conri, oncologie chirurgicale, hôpital Saint-André, Bordeaux, France A. Courdi, oncologie radiothérapique, centre AntoineLacassagne, Nice, France H. Cure, oncologie médicale, centre Jean-Godinot, Reims, GEPOG, France P. Debourdeau, oncologie médicale, HIA Desgenettes, Lyon, France C. Delcambre, oncologie médicale, centre FrançoisBaclesse, Caen, France V. Doridot, oncologie chirurgicale, centre République, Clermont-Ferrand, France A. Dufresne, oncologie médicale, hôpital ÉdouardHerriot, Lyon, France E. Monpetit, radiothérapie, clinique Océane, Vannes, France P. Montcuquet, oncologie médicale, clinique SaintVincent, Besançon, France L. Moreau, oncologie médicale, clinique des Dômes, Clermont-Ferrand, France F. Mousteou, gynécologie médicale, Cagnes-sur-Mer, FNCGM, France F. Penault-Llorca, anatomie et cytologie pathologiques, centre Jean-Perrin, Clermont-Ferrand, France F. Pinguet, pharmacien, Montpellier, SFPO, France N. Pinto, oncologie radiothérapique, centre de HauteÉnergie, Nice, France I. Piollet, psycho-oncologie, SFPO J. Provencal, oncologie médicale, centre hospitalier, Annecy, France K. Prulhiere Corviole, oncologie médicale, polyclinique de Courlancy, Reims, France I. Ray-Coquard, oncologie médicale, centre LéonBérard, Lyon, France D. Serin, oncologie médicale et oncologie radiothérapie, institut Sainte-Catherine, Avignon, France A. Serrie, médecine de la douleur, AP–HP Lariboisière, Paris, SFETD, France C. Sibai-Sere, gynécologie–obstétrique, Bordeaux, FNCGM, France M. Espié, oncologie médicale, AP–HP Saint-Louis, Paris, France H. Simon Swirsky, oncologie médicale, hôpital Morvan, Brest, France R. Fauvet, oncologie chirurgicale, CHU Sud-Amiens, France J. Stines, radiologie, centre Alexis-Vautrin, Vandœuvrelès-Nancy, SOFMIS, France B. Fervers, oncologie médicale méthodologie, centre Léon-Bérard, Lyon, France D. Tammam, neurologie, Marseille, France P. Geniés, anesthésie, Montpellier, France A. Toledano, oncologie radiothérapique, clinique Hartmann, Neuilly-sur-Seine, France G. Hirsch, soins palliatifs, centre hospitalier de Blois, SFAP, France P. Troufleau, radiologie, centre Alexis-Vautrin, Vandœuvre-lès-Nancy, France G. Laval, soins palliatifs, hôpital Nord Albert-Michallon, Grenoble, SFAP, France N. Tubiana-Mathieu, oncologie médicale, hôpital Dupuytren, Limoges, France M. Le Heurteur, oncologie médicale, centre Jean-Perrin, Clermont-Ferrand, France M. Untereiner, oncologie radiothérapique, centre Baclesse, Esch-sur-Alzette, Luxembourg C. Lévy, oncologie radiothérapique, centre FrançoisBaclesse, Caen, France L. Vanlemmens, oncologie médicale, centre OscarLambret, Lille, France N. Mahmoudi, oncologie médicale, centre hospitalier de Bourganeuf, France M. Veluire, gynécologie, Athis-Mons, France P. Marti, oncologie médicale, centre hospitalier Dracénie, Draguignan, France J.-P. Ziccarelli, Anesthésie–réanimation, clinique Beauregard, Marseille, France G. Massé, médecine générale, Reims, France P. Zlatoff, oncologie chirurgicale, centre Léon-Bérard, Lyon, France O. Mejjad, rhumatologie, CEDR, France D. Zarca, chirurgie gynécologique, Paris, France CONSEIL SCIENTIFIQUE / SCIENTIFIC BOARD 615 616 Sociétés relectrices ONCOLOG IE AFSOS : Association francophone pour les soins oncologiques de support SFCO : Société française d’oncologie chirurgicale CEDR : Cercle d’étude de la douleur en rhumatologie SFETD : Société française d’étude et de traitement de la douleur FNCGM : Fédération nationale des collèges de gynécologie médicale SOFMIS : Société française de mastologie et d’imagerie du sein GEPOG : Groupe d’échange de pratiques en oncogériatrie SFP : Société française de pathologie SFAP : Société française d’accompagnement et de soins palliatifs SFPOa : Société française de pharmacie oncologique SFCP : Société française de cancérologie privée SFRO : Société française de radiothérapie oncologique SFPOb : Société française de psycho-oncologie Patientes Jeannine, Reine, Sylviane, Corinne, Pascale, Martine, Catherine et Silke Coordination logistique et scientifique : LOb Conseils Pierre Ferran Laurie Massa-Auvray Nathalie Mathivas Juliette Tessaire Méthodologie des recommandations pour la pratique clinique (RPC) Saint-Paul de Vence 2009 Contexte et organisation Depuis 22 ans, les experts de la pathologie mammaire se réunissent à Saint-Paul de Vence pour échanger les nouvelles données scientifiques dans leur domaine d’exercice. En 2003, le groupe a souhaité formaliser en recommandations pour la pratique clinique (RPC) ce cours pour aider tous les acteurs de soin du cancer du sein dans leur pratique clinique. La première édition des RPC, issue du travail du groupe en 2003–2004, a été publiée en septembre 2005 (Oncologie, 2005 7(5): 342–79). Le projet continue dans une dynamique de mise à jour biennale en intégrant par ailleurs de nouvelles questions. Pour la publication 2007 (Oncologie, 2007 9: 593–644), le projet s’est construit autour d’un comité d’organisation constitué de Moı̈se Namer, Joseph Gligorov, Elisabeth Luporsi et Daniel Serin. Pour 2009, la RPC Nice-Saint-Paul de Vence, en plus des mises à jour, traite de nouvelles thématiques dans le cancer du sein et aborde les soins de support en cancérologie en partenariat avec l’AFSOS (Association francophone des soins oncologiques de support). Objectif du document Ces RPC visent à améliorer la qualité de la prise en charge des patientes atteintes de cancer du sein en fournissant aux praticiens une aide à la décision facilement utilisable et actualisée. Cible du document Ces recommandations s’adressent aux acteurs de soin prenant en charge les patientes atteintes ou à risque de cancer du sein. Questions traitées – Cancers du sein : cancers des femmes non ménopausées ; cancers des femmes âgées (hors situation métastatique) ; cancers métastatiques ; surveillance posttraitement locorégional ; – Soins de support : abord veineux de longue durée ; extravasation ; intérêt de l’activité physique ; épidémiologie, diagnostic, facteurs de risque et prévention des douleurs neuropathiques chroniques séquellaires après traitement locorégional ; utilisation des facteurs de croissance granulocytaires ; érythrodysesthésie palmoplantaire (syndrome palmoplantaire) ; toxicité unguéale ; candidoses oropharyngées ; prise en charge des mucites ; prise en charge des nausées et vomissements chimio-induits ; iatrogénie rénale ; nutrition ; atteintes rhumatologiques douloureuses induites par les traitements par antiaromatases ; ostéoporose ; dépression ; interférence du cancer du sein sur la sexualité ; quand et comment préserver la fertilité ? dyspnée en phase avancée ; poursuivre ou non la chimiothérapie palliative symptomatique. Tableau 1. Niveaux de preuve et grades des recommandations d’après Anaes 2000 (adapté du score de Sackett) Niveau de preuve scientifique fourni par la littérature Grade des recommandations Niveau 1 : – essais comparatifs randomisés de forte puissance ; – méta-analyse d’essais comparatifs randomisés ; – analyse de décision basée sur des études bien menées. Niveau 2 : – essais comparatifs randomisés de faible puissance ; – études comparatives non randomisées bien menées ; – études de cohorte. Niveau 3 : – études cas-témoins ; – essais comparatifs avec série historique. Niveau 4 : – études comparatives comportant des biais importants ; – études rétrospectives ; – séries de cas ; – études épidémiologiques descriptives (transversale, longitudinale). Grade A Preuve scientifique établie Grade B Présomption scientifique Grade C Faible niveau de preuve scientifique Groupe de travail L’élaboration des RPC implique un groupe de travail multidisciplinaire constitué d’une centaine d’experts praticiens venant de tous les modes d’exercice (service public, établissements privés et centres de lutte contre le cancer) répartis géographiquement de façon représentative. Un groupe d’une cinquantaine d’experts, sélectionnés selon les mêmes critères, a relu le document. Le groupe de travail a été accompagné d’une équipe de méthodologistes. Huit patientes ont participé à la relecture (cf. méthode). Méthodes La méthode d’élaboration des RPC de Nice–Saint-Paul de Vence repose sur l’analyse des données de la littérature et l’expertise des cliniciens prenant en charge les patientes atteintes de cancer. Ils ont suivi les étapes suivantes : – formulation des questions cliniques par les experts au cours d’une réunion plénière ; – recherche des données : les références scientifiques ont été recherchées de façon systématique dans les banques de données médicales et sur Internet (cf. résultats de la recherche bibliographique) ; – sélection des données : les références de haut niveau de preuve (méta-analyses ou essais randomisés) ont été retenues en priorité par les experts ; – analyse et synthèse méthodique des données par les cliniciens au cours de sept réunions plénières. Les experts ont évalué le niveau de preuve de chacun des Nota : le grade de la recommandation qui découle du niveau de preuve scientifique des articles est indiqué dans le résumé des recommandations. articles cités dans la RPC selon le Tableau 1. Une veille des données scientifiques a été mise en œuvre ; – rédaction de l’argumentaire et des recommandations par les cliniciens. Des propositions d’études de recherche clinique ont été formulées pour chaque question traitée. Les recommandations sont gradées et accompagnées des niveaux de preuve de la littérature (cf. ci-après). Les études ont été mises en cohérence avec les données légales existantes (AMM, ATU). Lorsqu’il n’y a pas de données légales, le groupe de travail a estimé que l’usage du produit concerné est conforme à la qualité requise des soins ; – présentation de la méthodologie et des résultats préliminaires à un jury d’experts en janvier 2009 ; – lecture nationale : 200 acteurs de la prise en charge du cancer du sein, utilisateurs potentiels de la RPC, ont été sollicités avec un délai de retour de six semaines, un tiers d’entre eux a émis un avis. Les commentaires obtenus ont été analysés par le groupe de travail et intégrés dans le document final selon leur pertinence ; – lecture par un groupe de huit patientes avec le soutien méthodologique de professionnels de l’information délivrée aux patients (méthodologie des SOR). Les patientes ont complété les recommandations cliniques de leur point de vue. Ces remarques sont présentées en préambule des recommandations et en fin de chaque chapitre ; CONSEIL SCIENTIFIQUE / SCIENTIFIC BOARD 617 ONCOLOG IE 618 – lecture scientifique des RPC par 18 médecins exerçant dans l’industrie pharmaceutique, avec comme objectif de vérifier l’adéquation des recommandations aux AMM respectives et également aux résultats publiés ou présentés afin de permettre une diffusion des recommandations sans modification ni interprétation de celles-ci. Les commentaires proposés ont été analysés, intégrés si pertinents ou réfutés si considérés comme non scientifiques ; – lecture méthodologique à deux reprises par des méthodologistes indépendants ; – publication contenant l’argumentaire et les recommandations. Le rapport intégral est mis à disposition sous forme de diaporama dynamique. Stratégie de diffusion – Diffusion électronique par l’intermédiaire d’un site Internet dédié (www.cours-rpc-nice-saintpaul.fr), du site de l’AFSOS (www.afsos.org) des sites Internet des sociétés savantes partenaires (www.sfcp-cancer.com ; www.fncgm.com ; www.sfco-esso.com ; www.imagemed.org/Sofmis ; www.sfpo.com ; www.sfpo.fr ; www. sfro.org ; www.rhumatologie.asso.fr). Sur ces sites seront disponibles tous les types de production ; diffusion sous format papier dans différentes revues et sous forme de plaquettes, diffusées mais sous un format non modifiable. Perspectives – La RPC de Saint-Paul de Vence se fixe quatre objectifs majeurs pour l’édition 2011 : travail en tant que tel n’est pas en situation de conflit d’intérêt du fait : – de l’objectif du document qui vise à améliorer la qualité de la prise en charge des patientes par la recherche de la meilleure option thérapeutique pour elles ; – du nombre important de cliniciens impliqués dans le processus (groupe de travail et relecteurs) ; – de la rigueur de la méthodologie ; – de la confidentialité du document tant qu’il n’est pas validé, création de documents labélisés Saint-Paul de Vence, seuls autorisés à être diffusés et implémentés ; – de la pluralité du financement et de l’externalisation de sa gestion. Dans ce contexte, la protection du jugement professionnel est assurée. Le comité d’organisation a veillé au respect de l’objectivité scientifique des conclusions et des recommandations selon le protocole méthodologique établi et décrit ci-dessus. Partenaires financiers La RPC Saint-Paul de Vence a reçu le soutien financier des 18 laboratoires pharmaceutiques (liste en annexe), chacun ayant contribué à valeur équivalente. La gestion du financement a été réalisée par une interface indépendante, le cabinet LOb Conseils SA, qui globalise le financement et assure la logistique du projet. Aucun financement ne peut être direct entre l’industrie pharmaceutique et les experts, et la comptabilité est contrôlée par un Commissaire aux comptes (annexe budget de LOb Conseils pour les RPC). une mise à jour des thématiques abordées en fonction de la veille bibliographique mise en place ; Remerciements l’exploration de nouveaux thèmes apparaissant essentiels pour la prise en charge clinique (exemple de l’évaluation et de la validation méthodologique des facteurs pronostiques et prédictifs) mais également l’exploration de thèmes liés au développement des soins de support ; Le comité d’organisation des RPC de Saint-Paul de Vence remercie tous les experts qui ont participé à l’élaboration de ces recommandations, les patientes et les acteurs de soin qui en ont fait une relecture et un commentaire attentifs et les sociétés savantes pour leur participation active. l’identification des futurs thèmes de recherche clinique ; Résultats de la recherche bibliographique une ouverture francophone des RPC. Intérêts compétitifs, propriété intellectuelle, sources de financement, remerciements et responsabilité Intérêts compétitifs Chaque membre du groupe de travail en tant qu’expert de son domaine est à la fois un clinicien expérimenté et un chercheur reconnu. De ce fait, chaque membre du groupe de travail est en contact, voire en lien, avec l’industrie pharmaceutique. Toutefois, le groupe de La recherche bibliographique a été réalisée en collaboration avec Mme Guillemette Utard-Wlérick, conservateur à la bibliothèque interuniversitaire de médecine de Paris (Paris-Descartes). Elle a procédé entre juin et août 2008 à l’interrogation des banques de données Embase, PubMed, Cochrane Library, Pascal et PsychInfo sur la période 2003–2008, en intégrant les critères de sélection des études. Les équations de recherche utilisées sont présentées en annexe et disponibles sur le site du cours de Saint-Paul de Vence (www.cours-rpc-nice-saintpaul.fr). La stratégie de la recherche bibliographique a été limitée aux publications de langues française et anglaise. Les études sélectionnées ont été les suivantes : méta-analyses, synthèses méthodiques ; essais randomisés ; études prospectives ou rétrospectives lorsqu’aucun essai randomisé n’était disponible. Les études qui ne présentaient pas de données originales ont été exclues de la sélection (doublons de publications et revues non systématiques notamment). Les éditoriaux, les lettres à l’éditeur, les nouvelles, les cas rapportés, les communiqués, les références qui ne présentaient pas d’abstracts ainsi que les études conduites spécifiquement chez l’animal ont également été exclus de la recherche. Ces références ont été complétées par des articles issus des bibliothèques personnelles des auteurs. Finalement, sur 16 300 abstracts proposés et 2 500 articles fournis, 1 000 références ont été retenues pour être analysées dans l’argumentaire. Recommandations des patientes (« ce qu’elles nous disent ») Principes généraux de la prise en charge des patientes atteintes de cancer du sein Les participantes jugent importantes de rappeler aux cliniciens d’informer les patientes. Une information adaptée est jugée importante pour pouvoir faire confiance : – importance de l’écoute, de s’adresser à la personne, de choisir un vocabulaire adapté ; – expliquer au patient ce qu’il peut faire pour participer à sa prise en charge : nutrition, activité physique ; – informer le patient sur les possibilités de participer à la recherche ; – lieu pour obtenir du support, ERI, possibilité d’échange avec d’autres malades. Les patientes regrettent que l’information sur ce que sont les ERI ne soit pas plus diffusée. Il est important également d’informer–d’éduquer les patients afin de faciliter une meilleure compréhension du contexte clinique (comprendre par exemple qu’un temps d’attente peut être lié au fait que le médecin a pris du temps pour répondre au besoin d’information ou de soutien d’un patient) : – inclure une information à destination des médecins concernant l’information des patientes sur la consultation d’oncogénétique : devant une possible forme familiale, les patientes souhaiteraient que la possibilité d’une consultation d’oncogénétique soit évoquée dès les premières visites, compte tenu de l’impact potentiel de l’existence d’une mutation sur le choix du traitement chirurgical ; – assurer une meilleure diffusion des informations relatives à l’oncogénétique aux gynécologues et médecins généralistes ; – assurer le lien avec le médecin généraliste et une meilleure accessibilité au dossier patient ; – ne pas limiter les recommandations aux médecins, mais intégrer–s’adresser aux infirmières et autres professionnels de santé, acteurs importants dans la prise en charge. Les patientes jugent important que la participation aux choix thérapeutiques prenne en compte leurs préférences concernant le degré d’implication souhaité dans ces choix ; – rappeler les recommandations 2007 pour les thèmes non abordés en 2009. Il manque un chapitre sur la prise en charge psychologique. Les participantes trouvaient le seul sujet de la dépression un peu réducteur. Recommandations pour la prochaine actualisation des recommandations de Saint-Paul de Vence en 2011 – Faire participer les patients aux choix des questions à aborder par les recommandations ; – aborder le sujet de l’oncogénétique dans la prochaine actualisation ; – aborder la prise en charge psychologique. Ce chapitre devrait également aborder la question de la décision partagée. Glossaire ACR5 : American College of Radiology CLIS : carcinome lobulaire in situ A-LHRH : analogue de la LH-RH CO : contraception orale AMM : autorisation de mise sur marché du médicament CCIS : carcinome canalaire in situ DHOS : Direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins CIC : carcinome intracanalaire DIU : dispositif intra-utérin CICE : composante intracanalaire extensive ECD : extracellular domaine CISH : chromogenic in situ hybridation EIC : extensive invasive carcinoma CLI : carcinome lobulaire infiltrant EVPT : emboles vasculaires péritumoraux CONSEIL SCIENTIFIQUE / SCIENTIFIC BOARD 619 ONCOLOG IE 620 FISH : fluorescence in situ hybridation RH : récepteurs hormonaux HR : hazard ratio RL : récidive locale HT : hormonothérapie RO : réponse objective IA : inhibiteurs de l’aromatase RP : réponse partielle IHC : immunohistochimie RPg : récepteur à la progestérone IRM : imagerie par résonance magnétique RL : récidive locale LOH : loss of heterozygity RT : radiothérapie MBP : mastectomie bilatérale prophylactique RTE : radiothérapie externe NE : non évalué SBR : grade histopronostique Scarff-Bloom-Richardson NF : neutropénie fébrile SG : survie globale NSSM : non-skin sparing mastectomy (c’est-à-dire, mastectomie sans conservation de l’étui cutané) SSM : skin sparing mastectomy (c’est-à-dire, mastectomie avec conservation de l’étui cutané) OR : odds ratio SSP : survie sans progression PCR : polymerase chain reaction SSR : survie sans récidive PS : performance status TD : tumor differentiation RCP : réunion de concertation pluridisciplinaire THM : traitement hormonal de la ménopause RE : récepteur d’estradiol vs : versus. Laboratoires pharmaceutiques partenaires2 Amgen Lilly AstraZeneca MSD-Chibret Bayer Schering Pharma Novartis BioAlliance Pharma Pierre Fabre Cephalon Pfizer Chugaı̈ Roche GlaxoSmithKline Sanofi-Aventis Janssen-Cilag Schering-Plough Keocyt Wyeth 2 Ces recommandations n’auraient pu être réalisées sans le soutien financier de ces laboratoires. Ce financement a été exclusivement logistique. L’abord veineux de longue durée dans le cancer du sein. Dispositifs veineux implantables (DVI) : indications, pose et complications Coordonnateur du groupe de travail : D. Kamioner Groupe de travail : M. Ackermann, M.-F. Cosset-Delaigue, D. Kamioner, I. Kriegel Introduction Les dispositifs veineux implantables (DVI) ou chambres à cathéter implantables sont utilisés depuis le début des années 1980 [41]. Les cathéters centraux extériorisés sont actuellement réservés à des situations particulières : chimiothérapie de moins de trois cures et soins palliatifs terminaux. Les DVI se sont rapidement imposés comme un outil essentiel permettant un accès vasculaire fiable et permanent tout au long de la maladie cancéreuse, en apportant aux patientes une sécurité et un confort indéniables. Ils sont particulièrement indispensables dans le traitement du cancer du sein, où il est recommandé de ne pas traumatiser le côté opéré. Cependant, des complications pouvant mettre en jeu le pronostic fonctionnel, voire vital des patientes, ne sont pas rares : 6 à 15 % présentent une ou des complications d’ordre mécanique, infectieux ou thrombotique [52,58] dont la répercussion économique n’est pas négligeable. Afin de limiter et/ou de prévenir ces complications, il est impératif de respecter des règles de bonnes pratiques lors de la pose, de l’entretien et de la manipulation des DVI. De plus, l’évolution des techniques et la multiplicité des professionnels de santé amenés à manipuler ces dispositifs, notamment dans le cadre d’une prise en charge en réseau de soins (hospitaliers, libéraux, etc.), sont à l’origine d’une hétérogénéité des pratiques. Il est donc impératif d’établir des recommandations communes, concertées et évaluées afin de garantir la qualité et la sécurité des soins et d’acquérir la pleine confiance du patient. Modalités de la pose et complications immédiates septum (membrane) en silicone destiné à recevoir jusqu’à 1 000 ponctions par centimètre carré de surface utile en utilisant des aiguilles spécifiques dites de Huber (à biseau tangentiel). La capacité de la chambre n’excède pas 1 ml et ne constitue donc pas un réservoir. Le poids de ce matériel est particulièrement léger (une dizaine de grammes) ; – d’un cathéter central en silicone ou en polyuréthane, radio-opaque, dont l’extrémité distale est placée dans la veine cave supérieure à l’entrée de l’oreillette droite en cas de pose dans le système cave supérieur. Les caractéristiques spécifiques des différents produits disponibles sur le marché influencent les performances du dispositif et l’acceptabilité par le patient. L’objectif est de trouver un DVI « idéal » susceptible d’entraı̂ner le moins de complications possibles et convenant aux nombreux utilisateurs. Toutes les chambres ont un marquage CE et doivent répondre à la norme ISO 13485. Le choix peut se porter sur un DVI préconnecté (moindre risque de déconnexion, mais impossibilité de ne changer qu’une partie du dispositif en cas de nécessité) ou sur un DVI connectable (meilleur ajustement de la position distale du cathéter lors de la pose, mais risque de déconnexion). Le modèle du boı̂tier doit être adapté à la corpulence du patient. Les cathéters en polyuréthane sont plus thrombogènes, mais leur diamètre interne est plus important, et ils sont donc à moindre risque d’occlusion que les cathéters en silicone. Les consignes relatives à la matériovigilance doivent impérativement être respectées. Les règles de traçabilité régies par les articles R 5212-36 à R 5212-42 du Code de la santé publique doivent s’appliquer au 31 décembre 2008. Définition du DVI Décision d’une pose de DVI Le DVI est un système totalement implanté sous la peau permettant l’accès transcutané continu ou intermittent au cathéter. Il peut être utilisé pour des perfusions, des transfusions, des prélèvements sanguins ainsi que pour l’administration de médicaments ou de nutrition parentérale exigeant des accès répétés au réseau veineux. On privilégiera la pose dès le début de la chimiothérapie, sans attendre l’« entame » du capital veineux périphérique. Caractéristiques générales du DVI Information du patient Le DVI est un dispositif composé : L’information délivrée au patient est désormais largement inscrite dans la loi. Selon les établissements de santé, cette information peut être délivrée, lors d’une – d’une chambre d’injection sous-cutanée en titane ou en plastique comportant à sa partie supérieure un Indications de pose : elles font toujours l’objet d’une réflexion bénéfice/risque RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 621 622 consultation dédiée par le prescripteur (souvent l’oncologue), l’opérateur (l’anesthésiste, le radiologue ou le chirurgien) ou par l’utilisateur (l’infirmier). Elle doit être intégrée dans le dispositif d’annonce. ONCOLOG IE L’information porte notamment sur : – l’intérêt de la pose de ce type de dispositif ; – le matériel et son lieu d’implantation ; – le nom de l’opérateur ; – les conditions de pose (anesthésie générale ou locale, douche préopératoire) ; – les complications possibles ; – l’entretien et les conseils pour la vie quotidienne. Cette information orale doit être complétée par une information écrite remise au patient. Ce temps de consultation permet enfin : – de définir avec le patient le type d’anesthésie en fonction de son état clinique, de ses antécédents et de ses souhaits ; – d’anticiper la difficulté technique du geste ; décembre 2000) recommande l’anesthésie locale chez l’adulte et l’anesthésie générale (AG) chez l’enfant. Cependant, une AG pourra être proposée à une patiente particulièrement anxieuse ou qui conserve un souvenir douloureux d’une pose précédente ou lorsque des difficultés techniques de pose sont suspectées ou surviennent. Dans les cas où une AG est décidée, une consultation préanesthésique s’impose. Le consentement éclairé du patient est requis. Le dossier constitué comprend l’autorisation d’opérer pour les mineurs. Choix du côté de l’implantation Le choix du côté de la pose doit se faire en concertation avec le patient, l’oncologue, le radiothérapeute et l’opérateur. Il est préférable de ne pas poser un DVI en zone irradiée, infectée ou à proximité de métastases cutanées. Il est habituel de poser le DVI du côté opposé à la tumeur (raisons balistiques en cas de radiothérapie). – de repérer les indications de doppler préopératoire et/ou de scanner, voire d’IRM en cas d’antécédent de pose de voie veineuse centrale (recherche de thrombose asymptomatique) ou d’examen clinique évocateur d’une thrombose ou d’une compression de la veine cave supérieure ; En cas de cancer bilatéral, on tiendra compte de l’importance de la taille tumorale, du siège de la tumeur et du plan de traitement pour décider de l’implantation en système cave supérieur ou inférieur. Lorsque le choix est possible, le côté droit est privilégié (descente plus facile du guide et position de l’extrémité distale plus facile à déterminer). – d’établir une stratégie en cas de prise d’anticoagulants, d’antiagrégants ou de troubles de l’hémostase. Choix de la voie veineuse Examens préopératoires Le choix de la voie veineuse se fait selon l’expérience de l’opérateur. Il n’existe actuellement aucune réglementation ou recommandation scientifique imposant la pratique d’examens complémentaires paracliniques préopératoires. Les examens sont prescrits en fonction des antécédents du patient et de son état clinique. Les examens couramment préconisés sont une numération formule sanguine, un bilan d’hémostase et une radiographie thoracique. Coagulopathies et prises d’anticoagulants Il est admis que le taux de plaquettes avant la pose doit être supérieur à 50 000/ml et l’INR inférieur à 1,5 [3]. De même, la stratégie d’arrêt des antiagrégants plaquettaires nécessite une réflexion bénéfice/risque [49]. On peut être amené à effectuer une pose sous Aspirine®. Après discussion collégiale avec le prescripteur de l’anticoagulant, le patient doit être informé des modalités et des risques de modifications de son traitement. Dans tous ces cas, la pose devra être réalisée par un opérateur entraı̂né, souvent sous échographie de façon à être le plus atraumatique possible [23]. Dans la très grande majorité des cas, le DVI est mis en place dans le système cave supérieur, dans la veine sous-clavière ou la veine jugulaire interne. L’implantation dans le système cave inférieur majore le risque thrombotique et infectieux. Les contre-indications à la pose en système cave supérieur sont les tumeurs médiastinales comprimant la veine cave supérieure, les thromboses jugulo-sous-clavières bilatérales, les thromboses caves supérieures, les métastases et lymphangites cutanées étendues et certains cancers bilatéraux. Il existe deux techniques d’implantation : la ponction percutanée (le plus souvent par technique de Sedlinger ou sous fluoroscopie en temps réel) et la dénudation chirurgicale. Choix du type d’anesthésie En cas de ponction percutanée, il est fortement recommandé d’utiliser une échographie de repérage ou de guidage de la veine jugulaire [17,24,33,40]. Ces techniques permettent une diminution du nombre de tentatives de ponctions veineuses incriminées dans la genèse de la thrombose, une diminution du temps de pose moyen et une diminution du taux de complications immédiates et d’échec de pose : L’Anaes (évaluation de la qualité de l’utilisation et de la surveillance des chambres à cathéter implantable : – la veine jugulaire interne : la tunnellisation peut être plus difficile que la pose en sous-clavière ; Mise en place au bloc opératoire – la veine sous-clavière : la lettre circulaire DH/EM 1 96-2517 du 24 mai 1996 relative à la sécurité des dispositifs médicaux – utilisation des chambres à cathéter implantables – recommande de ponctionner la veine sous-clavière en dehors de la pince costoclaviculaire. Certains auteurs recommandent une approche par voie sus-claviculaire [39] ou une approche latérale sous-claviculaire sous échographie [8,50] ; La recommandation no 82 du CNTIN précise que la mise en place d’un cathéter veineux central doit être faite par un opérateur entraı̂né à la pose, dans des conditions d’asepsie chirurgicale : – la veine jugulaire externe est inesthétique, mais le risque thrombogène ne semble pas plus élevé [13,46,48] ; – préparation de l’opérateur : habillage de l’opérateur (calot, masque, blouse stérile, gants stériles), après lavage chirurgical des mains et avant-bras ; – les veines brachiales présentent un avantage en termes d’accessibilité et de discrétion [1,22,34], mais s’accompagnent d’un taux de thrombose plus élevé (11,4 versus 4,8 %) [28] ; – préparation de la zone d’insertion du cathéter : – la veine fémorale n’est utilisée qu’en cas de contre-indications définitives ou temporaires des autres voies [57]. Le repérage échographique peut être utile ; il s’accompagne dans la littérature d’un taux plus élevé de thromboses et d’infections, mais il existe incontestablement un biais de sélection des patients. L’extrémité distale doit être positionnée au niveau de la jonction veine cave inférieure–oreillette droite [35], en tout cas, elle doit être en position sus-rénale. Le boı̂tier est placé au niveau de la crête iliaque ou de la paroi abdominale antérieure [12]. Certains cas difficiles devraient être discutés avec le radiologue : des techniques utilisant des stents peuvent permettre de reperméabiliser des vaisseaux sténosés [35]. Réalisation de la pose Préparation locorégionale os Les recommandations n 63 à 66 du Comité national technique des infections nosocomiales (CNTIN) préconisent que la préparation de l’opéré(e) soit effectuée selon un protocole précis, sous le contrôle de l’infirmière. Sa réalisation doit être enregistrée dans le dossier du patient à l’aide, par exemple, d’une fiche préétablie. La préparation de l’opéré comporte : – la dépilation de la zone opératoire (tondeuse ou crème dépilatoire) ; – une douche antiseptique pratiquée la veille de l’intervention et renouvelée, si possible, le matin de l’intervention. Elle concerne la totalité du corps (y compris les cheveux), en utilisant un savon de la même gamme que l’antiseptique utilisé au bloc opératoire ; – la détersion et l’antisepsie de la zone de l’incision opératoire doivent être réalisées avec un savon et un antiseptique de même gamme ; – par ailleurs, un temps de séchage doit être respecté entre deux applications d’antiseptique. On peut utiliser les produits à base de chlorhexidine alcoolique ou de polyvidone iodée alcoolique ; – en chirurgie ambulatoire, il est nécessaire d’adopter une démarche similaire. La pose doit s’effectuer au bloc opératoire ou dans une salle réservée spécifiquement à cet usage. détersion, rinçage et double antisepsie ; mise en place de champs stériles débordant largement la zone de cathétérisation. Des recommandations analogues existent outreAtlantique [42,47]. Particularités liées à la pose d’une chambre à cathéter implantable – La confection d’un seul champ opératoire est à privilégier de façon à pouvoir convertir facilement une technique en une autre si la voie d’accès prévue s’avère impossible à utiliser ; – la zone d’incision ne doit pas être en regard de la chambre ; – l’opérateur doit s’assurer de la bonne connexion entre la chambre et le cathéter, quels qu’en soient le type ou la voie utilisés, comme le précise la lettre circulaire DH/EM 1 96-2517 du 24 mai 1996 relative à la sécurité des dispositifs médicaux ; – le nombre de points d’ancrage de la chambre doit être respecté par l’opérateur lorsqu’il s’agit d’une dénudation chirurgicale ; – la mise en place sous fluoroscopie en temps réel ou le contrôle radioscopique peropératoire avec amplificateur de brillance permet : de vérifier en peropératoire la position de l’extrémité distale du cathéter ; d’éliminer de rares malpositions : une malposition en veine azygos a été retrouvée dans 1,2 % des poses, en particulier quand elles sont faites du côté gauche et doivent être reconnues en raison du risque de rupture [7] ; la malposition en veine mammaire interne est facilement reconnue par une radio de profil ; une veine cave supérieure gauche persistante existe chez 0,5 % de la population ; dans 80 % de ces cas de veine cave supérieure gauche persistante, il existe une veine cave supérieure droite, et la veine cave supérieure gauche se jette dans l’oreillette gauche par l’intermédiaire du sinus coronaire. Il existe donc deux risques : troubles du rythme et thrombose en cas de veine cave supérieure gauche RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 623 624 ONCOLOG IE mineure. Un scanner est utile pour préciser le diagnostic et décider de l’ablation éventuelle du cathéter [4,20,44]. – l’opérateur vérifie l’existence d’un reflux sanguin et rince par une injection de sérum physiologique afin de s’assurer de la perméabilité du site. L’infirmière pourra alors immédiatement utiliser le site ; – les sutures du plan superficiel sont de plus en plus souvent résorbables. Dans le cas contraire, leur ablation a lieu 10 à 12 jours après leur pose. En cas d’utilisation d’une colle chirurgicale sur la cicatrice, ne pas mettre de pansement. Prévenir le patient de ne pas chercher à enlever la colle ; le grade 1 correspond à un pincement du cathéter entre la clavicule et la première côte sans rétrécissement de la lumière du cathéter ; le grade 2 correspond à un rétrécissement de la lumière du cathéter ; le grade 3 à une rupture avec embolisation du cathéter. Le fragment rompu donne exceptionnellement lieu à des manifestations cardiorespiratoires graves, mais doit être enlevé systématiquement par technique radiointerventionnelle au lasso. – une radiographie pulmonaire doit être réalisée en fin d’intervention pour : Le DVI doit être changé dès le grade 1 (pose en jugulaire interne). vérifier la bonne position du cathéter à la jonction oreillette droite–veine cave supérieure (OD–VCS) ; Précautions après la pose : éliminer un pneumothorax. Les paramètres cliniques sont surveillés. L’absence de douleur thoracique, de dyspnée ou de saignement suspect est vérifiée ; la carte d’identification du matériel posé précisant le numéro du lot sera ensuite remise au patient (un exemplaire reste dans son dossier et un autre est transmis à la pharmacie). ne pas toucher le pansement pendant trois jours à moins qu’il ne soit souillé, mouillé ou décollé ; ablation du pansement au quatrième jour ; autorisation des douches après le troisième jour en séchant soigneusement la plaie ; autorisation des bains au dixième jour ; les fils se résorbent en trois semaines. Celle-ci doit être exhaustivement renseignée. Un carnet de surveillance, comportant le nom du patient, l’hôpital, le modèle et le numéro de lot, les précautions essentielles à respecter lors de l’utilisation du dispositif ainsi que les dates de perfusion ou injections réalisées, doit être remis au patient (lettre circulaire DH/EM 1 96-6225) ; Certains poseurs utilisent la biocolle permettant les douches dès le premier jour. une antibioprophylaxie systématique n’est pas recommandée, en particulier en raison des résistances aux antibiotiques qu’elle pourrait entraı̂ner à long terme [53,56]. Manipulations et entretien Complications périopératoires Hématome de la loge opératoire. Pneumothorax : il survient dans 1 % des cas et nécessite un drainage thoracique dans 60 % des cas ; il peut survenir jusqu’à 48 heures après la pose, d’où la nécessité d’informer le patient de signaler toute gêne respiratoire ; il retarde de quelques jours le traitement prévu [36]. Hémothorax. Ponctions artérielles. Embolie gazeuse : exceptionnelle (15 cas/7 000). Pinch-off ou syndrome de la pince costoclaviculaire [25,43,51] : le débit est positionnel et/ou le reflux est intermittent ; complication dépistée par une radiographie de face en position de Sanders (épaules abaissées en arrière) ; Le DVI peut être utilisé dès la pose ou dans les jours qui suivent. Formation, information, protocoles et évaluation La recommandation no 89 du CNTIN relative à la prévention des infections liées aux cathéters vasculaires préconise : l’existence de protocoles écrits, régulièrement révisés, portés à la connaissance du personnel soignant qui les appliquent ; leur observance est évaluée ; la formation du personnel à la pose, la manipulation et l’entretien des cathéters ; la surveillance continue des infections associées aux cathéters vasculaires et leur recensement. Le patient doit être informé sur les mesures d’hygiène et les procédures d’entretien du dispositif. La remise d’une fiche conseil ou d’un livret accompagnant l’information orale du professionnel de santé est fortement recommandée. Protection du personnel Il est impératif : de mettre à la disposition du personnel soignant des mesures de protection (gants, surblouses, masques, etc.) afin de prévenir la transmission d’agents infectieux véhiculés par le sang ou les liquides biologiques du patient ; tre : 0,7 mm (21 ou 22 gauges) pour les injections, les perfusions et les rinçages ; – de respecter les précautions générales d’hygiène, en particulier friction hydroalcoolique des mains avant tout soin ; – d’utiliser ce même type d’aiguilles, mais d’un diamètre supérieur : 0,9 mm (19 gauges) pour l’administration de nutrition parentérale et de dérivés sanguins ; – de mettre à disposition du matériel sécurisé pour éviter les accidents d’exposition au sang (AES). Il est également impératif de mettre en place des mesures de protection du personnel, pour ce qui concerne la manipulation des agents cytotoxiques [19]. Mesures d’asepsie Hygiène stricte des mains Juste avant toute manipulation au niveau du site, le personnel de santé doit respecter une hygiène stricte et régulière des mains (friction hydroalcoolique) et ne porter ni bijou ni manches longues. Habillage au moment de la manipulation Il est recommandé que : – le personnel soignant porte des gants stériles lors du montage des lignes de perfusion, lors de la pose de l’aiguille de Huber, lors de la réfection du pansement ; – le personnel soignant et le patient portent un masque ; – si le patient est neutropénique, le personnel soignant porte une surblouse (ou casaque) sur une tenue professionnelle propre et une coiffe couvrante. Réfection du pansement (en cas de perfusion continue) – Maintenir l’aiguille de Huber avec des bandelettes adhésives stériles ; – appliquer un pansement occlusif et stérile sur la zone désinfectée sèche. La visualisation du point de ponction est recommandée. Le pansement est changé tous les huit jours au maximum en l’absence de souillure, de décollement ou de signes inflammatoires au point de ponction. – de varier le point de ponction ; – d’orienter le biseau de l’aiguille en direction du cathéter ; – de traverser complètement le septum. L’aiguille est changée tous les huit jours au maximum. Ligne de perfusion Il est recommandé d’assurer le respect du système clos, en limitant les connexions et les robinets, en regroupant les manipulations, en ne reconnectant jamais une ligne de perfusion débranchée : – utilisation des lignes à l’aide de compresses stériles imprégnées d’antiseptiques alcooliques et désinfecter avant et après toute utilisation ; – lors des injections, toujours utiliser des seringues dont le volume est supérieur ou égal à 10 ml (risque de surpression et de rupture du cathéter en cas d’utilisation de seringues inférieures à 10 ml) ; – ne pas rincer avec la perfusion de base, mais faire un rinçage obligatoire après toute injection médicamenteuse avec 10 ml de solution NaCl à 0,9 % en actionnant le piston en trois à coups afin d’améliorer la qualité du rinçage. L’efficacité de la protection des rampes et des robinets n’a, à ce jour, pas été démontrée ; cette protection est cependant recommandée en pédiatrie et en réanimation : – il est recommandé de changer tous les quatre jours les perfuseurs, connexions (rampes et robinets) et prolongateurs. Pas de changement en cas de perfusion continue sur sept jours ! en soins palliatifs, on prépare des perfuseurs de sept jours ; – il est recommandé de changer systématiquement, après chaque administration de produits sanguins et de dérivés lipidiques, les perfuseurs, les connexions et les prolongateurs. Pose de l’aiguille de Huber – Vérifier l’état cutané et l’absence de signes inflammatoires ; – appliquer éventuellement l’EMLA® une heure avant ; – effectuer une antisepsie cutanée en respectant les cinq temps de l’antisepsie et les temps de contact et en privilégiant les antiseptiques alcooliques. Retrait de l’aiguille – Rinçage en trois poussées ; – rotation de l’aiguille sur 360 durant le rinçage ; Il est recommandé : – retrait de l’aiguille tout en injectant pour maintenir une pression positive et éliminer immédiatement l’aiguille dans un collecteur en laissant dans le cathéter une colonne de sérum physiologique ; – d’utiliser des aiguilles coudées à biseau, de type Huber, munies d’un prolongateur et d’un petit diamè- – appliquer un pansement stérile et occlusif pendant une heure. RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 625 626 Rinçage : héparine ou sérum physiologique ? ONCOLOG IE Il n’existe pas de niveau de preuve pour recommander l’utilisation d’héparine, d’autant qu’il existe un risque théorique de Thrombopénie induite par l’héparine. Au regard du risque infectieux lié à la manipulation d’une voie veineuse centrale, un entretien du DVI en intercure ou à l’issue du traitement n’est pas préconisé. Une simple surveillance clinique (signes infectieux et signes de thrombose) reste nécessaire. Surveillance et gestion des complications – si échec, demander un avis médical et faire une radio de thorax avec ou sans opacification à la recherche d’une fuite, d’une fissure ou d’une rupture proximale du cathéter. Ces dysfonctions proximales sont dues soit à un pinch-off (cf. supra), soit à une désadaptation du boı̂tier, soit à une usure du matériel ou à des microtraumatismes lors des mouvements de tous les jours (en particulier pour les chambres brachiales). S’il y a rupture du cathéter, un recours à la radiologie interventionnelle s’impose. S’il y a fuite, il faut changer le dispositif en étant particulièrement vigilant lors de la dépose du matériel. Un changement sur guide, en l’absence de tout signe infectieux peut être envisagé. Les indicateurs de bon fonctionnement sont : Absence de reflux, bon débit d’injection, pas de douleur ni de gonflement – la présence d’un reflux veineux ; – l’absence de douleurs à l’injection ; – Vérifier le bon positionnement de l’aiguille et demander une radiographie de thorax avec opacification, voire un échodoppler ; – un bon débit de perfusion libre ; – une injection à la seringue aisée. L’absence d’un de ces quatre critères impose un examen clinique infirmier, voire médical. Complications mécaniques Absence de reflux (Fig.1) – exclure une thrombose, une gaine de fibrine (changement du dispositif ou mieux ablation de la gaine par stripping endovasculaire) [9], une malposition secondaire du cathéter (déplacement en jugulaire interne d’une pose sous-clavière par exemple). Absence de reflux, pas de douleur ni de gonflement mais injection difficile ou impossible : obstruction du cathéter Absence de reflux, injection possible mais douleurs à l’injection ± gonflement – Vérifier le bon positionnement de l’aiguille et le montage ; – Vérifier le bon positionnement de l’aiguille : Absence de reflux Reflux antérieurement connu NON OUI Cliché simple + Sanders Passage indolore de 40 ml de sérum physiologique + bon débit + pas de gonflement NON Suspicion de rupture OUI NON Opacification OUI OK Opacification Passage indolore de 40 ml de sérum physiologique + bon débit + pas de gonflement NON Opacification Fig. 1. Absence de reflux OUI OK Anomalie NON Conservation de la CCI OUI Discussion Ablation CCI – vérifier sur la radiographie de thorax le bon positionnement du cathéter ; – effectuer des manœuvres d’aspiration–injection douces avec une seringue remplie avec 10 ml de solution NaCl à 0,9 % durant 10 à 15 minutes. Ne jamais tenter de désobstruction sous pression (risque de fissure du cathéter, rupture ou migration) : si échec, poursuite de la procédure après avis médical : si cathéter intègre et en place, injecter sans forcer 1 à 2 ml de solution fibrinolytique en répétant les manœuvres d’aspiration–injection ; si échec, laisser en place la solution fibrinolytique 12 à 24 heures. Protocole de préparation de la solution fibrinolytique – Reconstituer un flacon d’urokinase (exemple : Actosolv® 100 000 UI) avec 2 ml d’eau PPI dans une seringue de 10 ml ; – prélever 1 ml de cette préparation et ramener à 10 ml avec 9 ml de solution NaCl à 0,9 %. On obtient ainsi une solution d’urokinase à 5 000 UI/ml ; – la prévention de l’obstruction par un rinçage obsessionnel est impérative. Extériorisation de la chambre, ulcérations et nécroses cutanées Elles surviennent en raison de la situation sous-cutanée du site d’injection. Elles sont dues à : – un défaut de cicatrisation après la mise en place du site (attention à l’Avastin®, bevacizumab) [2]. – une ulcération tardive en regard du boı̂tier : patient très dénutri, microextravasation passée inaperçue, faute technique de pose, rejet du matériel. Dans toutes les circonstances, un abord chirurgical du site est nécessaire pour changer le boı̂tier et/ou le cathéter. Extravasation L’extravasation secondaire à l’injection extravasculaire de produits cytotoxiques est une complication souvent grave pouvant être à l’origine de nécroses tissulaires sévères et d’ulcérations avec lésions nerveuses, articulaires et tendineuses qui entraı̂nent parfois des séquelles majeures (douleurs chroniques, dystrophie, perte de fonctions, séquelles esthétiques). C’est une urgence thérapeutique sous-évaluée et sous-traitée qui peut retarder une prise en charge correcte de la maladie par l’interruption de la chimiothérapie et entraı̂ner des procédures médicolégales. Il est indispensable que le personnel médical et infirmier soit formé à la prévention et la prise en charge de l’extravasation. Vu l’importance du sujet, les extravasations sont traitées dans un chapitre à part. Complications infectieuses L’enjeu du traitement est la conservation ou non du cathéter tout en assurant la sécurité du patient (Fig. 2). En oncologie, le taux moyen d’incidence d’infection est de 0,2/1 000 jours de cathéters (0 à 2,7 /1 000 jours) [10]. Morbidité et mortalité Les infections sur voie veineuse centrale représentent une cause majeure d’infections nosocomiales, sources d’un excès de morbidité et de mortalité. Environ 13 % des infections nosocomiales sont des bactériémies nosocomiales [45]. Ces infections allongent la durée d’hospitalisation, retardent l’administration des traitements spécifiques et risquent d’augmenter les problèmes de résistance aux antibiotiques. Ces complications génèrent des surcoûts hospitaliers. Définitions Il est nécessaire de distinguer : – la contamination de la VVC (voie veineuse centrale) : présence d’agents pathogènes en culture de la VVC liée à la contamination du prélèvement par des bactéries cutanées (présentes sur le site d’insertion ou sur les mains du personnel soignant lors de la manipulation) ; – la colonisation de la VVC : présence en plus grand nombre d’agents potentiellement pathogènes, sans signe associé d’infection ; – l’infection de l’hôte : septicémie due à une infection du KT (CRBSI – catheter-related blood stream infection) : hémocultures positives et culture du KT positive infection locale : superficielle avec ou sans CRBSI ; profonde : tunnelite et infection de loge ; thrombophlébite septique. Facteurs de risque infectieux liés à l’hôte La fréquence des infections sur VVC varie suivant certains paramètres : – neutropénie (risque infectieux × 11) ; – maladies hématologiques (risque infectieux × 4) ; – syndrome immunodéficitaire acquis (risque infectieux × 4) ; – nombre de jours d’utilisation du cathéter. Facteurs de risque infectieux liés au cathéter Le risque infectieux dépend : – du site d’implantation du dispositif : le risque est minimum quand le site est implanté par voie RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 627 ONCOLOG IE 628 sous-clavière ou par voie jugulaire interne, et nettement augmenté par voie fémorale ; l’hémoculture périphérique [18] est hautement prédictive d’une bactériémie liée à la VVC. – du type de matériel : le risque est minimum quand il s’agit d’une chambre implantable, intermédiaire avec un cathéter tunnellisé, et nettement augmenté s’il s’agit d’un cathéter simple ; Plus récemment a été introduite la notion de temps différentiel de pousse entre la périphérie et l’hémoculture centrale avec un cut-off à 2 heures en faveur de l’hémoculture prélevée sur KT central [32]. Cette méthode n’est interprétable que si on a prélevé simultanément les hémocultures avant toute antibiothérapie, en prélevant la même quantité de sang dans les deux hémocultures et à condition de s’assurer d’un étiquetage fiable des flacons. – l’utilisation de cathéters imprégnés d’antibiotiques qui paraı̂t prometteuse en réanimation ou en hémodialyse n’est pas encore évaluée à ce jour en cancérologie ; – de ses conditions d’utilisation. On rappelle l’importance d’une formation spécifique de tous les soignants du réseau de soins. Stratégie thérapeutique Attitude initiale Microbiologie Certains germes sécrètent des biofilms avec dépôt de thrombine à la surface interne ou externe du KT. Ces biofilms constituent un manchon agissant comme facteur de résistance aux antibiotiques et augmentent les difficultés de mise en évidence des germes. Ce manchon constitue également un environnement préthrombotique expliquant le rôle prophylactique de l’héparine en matière d’infection. Les germes les plus fréquents restent les staphylocoques, et en particulier Staphylococcus (staph.) epidermidis, et les Candidas, mais on retrouve de plus en plus de germes environnementaux et des bacilles Gram–. Diagnostic Diagnostic clinique Le diagnostic clinique est peu fiable, il repose surtout sur les signes généraux (fièvre et frissons) apparaissant en particulier au moment de la manipulation de la VVC. L’état local est source de peu d’information ; la purulence ayant une sensibilité très faible chez le patient neutropénique. Il est recommandé de rechercher l’existence d’un autre foyer septique ou d’une thrombophlébite septique ; une étude réalisée sur des patients hospitalisés en réanimation a montré que 75 à 85 % des KT retirés n’étaient pas infectés (cf. § morbidité et mortalité). Si après la réalisation d’hémocultures périphériques et centrales et éventuellement d’un prélèvement au point d’entrée du KT (par écouvillonnage), il existe un des signes suivants : – choc septique (sans autre foyer infectieux) ; – infection locale profonde ; – thrombophlébite septique. La VVC s’avère inutile. Il faut pratiquer l’ablation du DVI, et une antibiothérapie adaptée doit être administrée pendant 10 à 14 jours en association avec de l’héparine en cas de thrombose. Le traitement sera poursuivi quatre à six semaines en cas d’endocardite et six à huit semaines en cas d’ostéomyélite. S’il n’existe aucun des signes précédents : – la voie veineuse centrale peut être laissée en place ; – une antibiothérapie probabiliste est débutée de façon quasi systématique ; – seule une fièvre isolée, bien tolérée, sans porte d’entrée évidente, et en l’absence de neutropénie et d’hémoculture positive, peut faire surseoir à la prescription d’une antibiothérapie probabiliste ; – une surveillance de la température du patient est instituée, et la chambre implantable peut être utilisée. Diagnostic bactériologique Attitude secondaire à 48 heures La méthode de référence est la culture de l’extrémité distale du cathéter après son ablation (diagnostic rétrospectif) par méthode semi-quantitative de Maki ou de Brun-Buisson (seuil à 10) [11]. Après 48 heures, une évaluation de la situation est réalisée. Elle tient compte : La réalisation d’hémocultures quantitatives effectuées simultanément sur voie périphérique et sur voie centrale améliore la fiabilité du diagnostic d’infection sur VVC. L’existence de cinq fois plus de germes poussant sur l’hémoculture sur KT central que sur – de l’état clinique du patient ; – des résultats des hémocultures et en particulier des critères quantitatifs de ces hémocultures ; – de l’existence d’un autre foyer infectieux ; – de l’existence de complications : endocardite (ETO), os (scintigraphie), thrombose (doppler). En cas d’absence de complication, la décision thérapeutique est fonction du germe, mais aussi de la nécessité de conserver la VVC. Prise en compte de l’antibiogramme Staphylocoques coagulase-négatifs. Les staphylocoques coagulase-négatifs sont les germes les plus fréquemment rencontrés : – on rappelle qu’il est nécessaire d’obtenir deux hémocultures positives en moins de 48 heures avec les staphylocoques à coagulase négative pour affirmer la bactériémie ; – si le germe est sensible à la méthicilline (méthi S), la prescription d’oxacilline ou d’une céphalosporine de première génération est recommandée ; – en cas de résistance (méthi R), un traitement par vancomycine est indiqué. Ce traitement sera poursuivi pendant sept jours si la VVC est retirée. Si elle est laissée en place, les sept jours d’antibiothérapie seront complétés par 14 jours de verrou antibiotique. On observe 20 % de récurrence si le KT est laissé en place versus 3 % s’il est retiré – en cas de rechute, des complications septiques doivent être systématiquement recherchées ; thérapeutique a été menée dans le domaine de l’alimentation parentérale. Indications et contre-indications ? Le verrou antibiotique ne constitue pas une alternative à l’ablation de la VVC si le patient présente des signes de gravité ou que le germe est très pathogène. Quand le délai entre la pose et l’infection est inférieur à deux semaines, il s’agit probablement d’une infection extraluminale, et le verrou est inutile. S’il s’agit d’une colonisation de la VVC, et si le patient n’est pas bactériémique, le verrou antibiotique est une bonne indication et peut être utilisé seul. Seul ou en association ? Si le patient est bactériémique, l’antibiothérapie par voie systémique est obligatoire. Quel médicament et à quelle dose ? Par exemple : – vancomycine : 10 à 20 mg/3 ml ; – amikacine : 10 à 20 mg/3 ml ; – ciprofloxacine : 15 mg/3 ml. Ces verrous doivent être changés tous les jours de la durée du traitement, et il est souhaitable que la VVC ne soit pas utilisée. On aspire le volume du verrou avant de réutiliser la chambre implantable. – attention : les Staphylococcus lugdunensis et schleiferi sont une indication au retrait. Staphylococcus aureus. Le standard thérapeutique en cas d’infection par S. aureus est l’ablation du cathéter associée à une antibiothérapie de 14 jours : – s’il s’agit d’un staph. méthi S : oxacilline ; – s’il s’agit d’un staph. méthi R : vancomycine. Des études sont en cours pour évaluer la possibilité de conserver la VVC en utilisant une antibiothérapie générale et des verrous antibiotiques à base de rifampicine et de fluoroquinolones. Bacilles Gram négatifs. En cas d’infection par bacilles Gram négatifs, l’ablation du dispositif est recommandée, sauf s’il s’agit d’entérobactéries. L’antibiothérapie sera adaptée au germe et maintenue 14 jours. Candida. La VVC doit également être retirée en cas d’infection à Candida, et ce, de façon urgente. Un traitement antifongique par fluconazole ou amphotéricine B est institué et maintenu 14 jours après la dernière hémoculture positive et faire systématiquement pratiquer un examen ophtalmologique. Complications thromboemboliques La thrombose veineuse sur dispositif intraveineux de longue durée représente un problème clinique émergent, comme en témoigne une étude prospective sur registre de Joffe et al. : 11 % des 5 451 patients présentaient une thrombose du système cave supérieur, 30 % des patients avaient un cancer [26]. La présence d’un cathéter a été le principal facteur de risque indépendant de survenue d’une thrombose du système cave supérieur (5 % des patients). L’impact médical et économique de ces thromboses est loin d’être négligeable. Enfin, il existe un SOR (Standards Options Recommandations) récent : thrombose et cancer [16]. La thrombose veineuse sur dispositif intraveineux de longue durée se définit comme le développement d’une obstruction cruorique dans la lumière de la veine soit à partir du cathéter (thrombus en manchon), soit à partir de la paroi veineuse (thrombus mural). Aspects cliniques Verrou antibiotique Le verrou antibiotique permet de stériliser la lumière du KT afin d’éviter une ablation inutile de la VVC. L’augmentation des concentrations actives d’antibiotiques au site de l’infection entraı̂ne une efficacité accrue de ceux-ci et diminue leurs effets indésirables. Il est à noter que la majorité des études portant sur cette Lorsque la thrombose est complète, la symptomatologie clinique est évidente, associant fébricule à 38 , œdème cervical, gros bras douloureux, comblement du creux sus-claviculaire, circulation collatérale, voire syndrome cave supérieur. Ailleurs, la thrombose est suspectée sur un simple mais évocateur dysfonctionnement du cathéter. Les caractéristiques d’un thrombus cave supérieur sont d’être localisées, non extensives RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 629 630 ONCOLOG IE [15], et non occlusives dans 85 % des cas [6], rendant compte de l’hétérogénéité clinique. Bien que trop souvent sous-estimé, le risque embolique existe, et ce, quel que soit le tableau clinique de la thrombose sur dispositif intraveineux. L’embolie pulmonaire peut être inaugurale. Elle est souvent de petite taille, symptomatique dans 6 à 10 % des cas chez l’adulte, mais retrouvée dans 15 à 30 % des cas quand elle est recherchée de manière systématique. Diagnostic Quel que soit le tableau clinique, une radiographie de thorax standard doit être réalisée, car elle permet d’identifier rapidement un cathéter trop court, en boucle ou en « fausse route », imposant alors son retrait. L’échodoppler est l’examen de référence et doit être utilisé dès la suspicion clinique [38]. Si sa spécificité est de 94 à 100 %, sa sensibilité plus médiocre varie selon la topographie de la thrombose : près de 100 % en jugulaire, moins de 10 % dans la veine cave supérieure, d’où l’intérêt de la tomodensitométrie [5]. Cet examen est indispensable en cas de suspicion de thrombose cave supérieure ou de pathologie médiastinale préexistante. Par contre, il existe une très faible sensibilité de l’ordre de 30 % de l’échodoppler pour le dépistage des thromboses asymptomatiques. La validation d’autres examens que la phlébographie quasi abandonnée est un préalable indispensable à toute étude sur la thrombose asymptomatique. L’angiographie par IRM pourrait être dans l’avenir le gold standard de l’évaluation de l’anatomie des veines thoraciques. Données épidémiologiques Une revue récente de la littérature a colligé les résultats de 51 études, dont six en pédiatrie sur les thromboses sur dispositifs intraveineux de longue durée chez les patients cancéreux [55] : le taux de thrombose symptomatique varie de 0,3 à 28,3 %. Les chiffres les plus élevés ont été rapportés dans les études les plus anciennes. Deux de ces études ont étayé les propositions d’anticoagulation systématique préventive rarement mise en œuvre. Des données plus récentes et l’impression clinique quotidienne suggèrent que l’incidence des thromboses symptomatiques serait plus faible, de l’ordre de 4 %, soit de 0,2 à 0,3 thrombose par 1 000 jours de cathétérisme [14,27,29,37,54]. Ces mêmes études n’arrivent pas à montrer de bénéfice à l’utilisation en prévention primaire des antivitamines K (AVK) ou des héparines de bas poids moléculaire (HBPM). Facteurs de risque de thrombose sur cathéter veineux central La blessure endothéliale au moment de l’insertion, la stase veineuse due à la présence de matériel intravas- culaire et l’hypercoagulabilité liée au cancer sont les principales causes retrouvées. Facteurs liés à la maladie cancéreuse La maladie veineuse thromboembolique est une complication fréquente des tumeurs malignes dont la prévalence attendue est de 15 %. Les publications sont abondantes mettant en lumière de nombreux facteurs de risque : la maladie cancéreuse elle-même, le type de cancer, le stade de la maladie, le type de chimiothérapie utilisée, les traitements hormonaux, le traitement chirurgical, l’hyperplaquettose, l’existence d’une masse médiastinale gênant le retour veineux, etc. La maladie thromboembolique chez le patient cancéreux est l’expression d’un déséquilibre entre les deux processus : coagulation et fibrinolyse. Ce déséquilibre conduit à une augmentation du fibrinogène et du catabolisme plaquettaire, à une diminution des taux de protéines C et S et de l’antithrombine, à une production directe de thrombine et parfois à une thrombocytose. Une résistance à la protéine C activée, la mutation du facteur V de Leiden, homo- ou hétérozygote ou la présence d’une anomalie génétique ou acquise de la coagulation sont les anomalies les plus fréquemment rencontrées. Facteurs liés aux cathéters Ils sont bien connus ; le facteur principal mis en évidence est la position de l’extrémité distale du cathéter qui, idéalement, doit être située à la jonction oreillette droite–veine cave supérieure [31]. Ainsi, tout cathéter trop court, en fausse route, en boucle ou à contre-courant doit être replacé. La notion de blessure veineuse endothéliale, lors des ponctions itératives, explique l’intérêt suscité par les techniques d’abord veineux sous repérage échographique et l’engouement actuel pour les poses en jugulaire. Ainsi, de très nombreuses études souvent contradictoires ont cherché à mettre en évidence la supériorité de la voie jugulaire–voie sous-clavière ou inversement. La réponse pourrait être : ponction unique et extrémité OD/VCS, ce qui, pour des raisons anatomiques, est souvent plus facile à réaliser pour les sites droits. Les autres facteurs de risque sont le matériau utilisé, avec abandon des chlorures de polyvinyle et de polyéthylène au profit de la silicone et du polyuréthane moins thrombogènes, le nombre de lumières (augmentation du risque avec l’augmentation du nombre de lumières), le diamètre du cathéter (augmentation du risque pour les diamètres élevés), l’insertion par voie fémorale qui multiplie le risque par un facteur 6 et justifie la mise systématique sous traitement prophylactique [37]. La notion de cathéter antérieur jusque-là controversée justifie la pratique d’échographie, voire d’une tomodensitométrie prépose. Une étude récente de Lee et al. montre une augmentation du risque de thrombose par un facteur 3,8 en cas de repose sur cathéter antérieur [29]. Cette même étude insiste sur la rareté du syndrome postphlébitique clinique. Ces facteurs de risque rendent compte des deux pics de fréquence observés dans la survenue des thromboses : 50 % des thromboses surviennent précocement dans les six semaines qui suivent l’implantation et sont liées à la blessure veineuse endothéliale, à la position de l’extrémité distale du cathéter et à des facteurs patients ; 50 % surviennent plus tardivement, sont peu étudiées dans la littérature, notamment en ce qui concerne les études de prévention primaire, et sont liées aux facteurs patients et à l’avancée dans la maladie cancéreuse. Traitement curatif Il n’est ni consensuel, ni standardisé. Il comporte dans tous les cas un traitement anticoagulant d’au moins six mois ou indéfiniment, aussi longtemps que le cancer est actif et le DVI en place. Les HBPM présentent des avantages certains en raison de la simplicité d’administration, de la surveillance, du risque hémorragique et des interactions médicamenteuses. Il est recommandé d’utiliser l’héparine non fractionnée chez les patients nécessitant une anticoagulation rapide ou un arrêt rapide de l’effet anticoagulant, présentant une embolie pulmonaire massive ou en cas d’insuffisance rénale sévère. Les AVK sont difficiles à manier avec un risque de saignement ou de récidive lié à la difficulté d’avoir un équilibre constant (dénutrition, vomissements, hypoprotidémie, infection, interactions médicamenteuses, notamment avec la chimiothérapie, altérations de la fonction hépatique). Les deux HBPM qui ont montré leur supériorité dans cette indication sont la daltéparine 200 UI/kg par jour d’anti-Xa pendant un mois, puis 150 UI/kg par jour et la tinazaparine 175 UI/kg par jour d’anti-Xa. Enfin, il est possible que les HBPM réduisent la mortalité des patients non métastatiques [30]. Il n’y a pas d’attitude standard concernant la chronologie de la mise en route d’un traitement anticoagulant par rapport au retrait. La durée du traitement a fait l’objet d’une recommandation en option formulée par les experts : le cathéter est retiré, et le cancer est en progression : il est recommandé trois à six mois de traitement par HBPM, suivi par un relais par AVK. Le cathéter est retiré, et le cancer n’est pas en progression ni en cours de traitement : il est recommandé six semaines de traitement par HBPM. Le succès du traitement anticoagulant est indépendant du retrait ou du maintien du cathéter. Il y a actuellement un consensus entre les équipes préconisant le maintien du dispositif intraveineux, sous réserve d’une étroite surveillance clinique. Le bénéfice pour le patient est important, tant en termes de confort physique que de sécurité. Les bénéfices du traitement conservateur sont une préservation du capital veineux, une durée de vie des cathéters thrombosés ou non comparables et une fréquence des complications identiques, notamment d’embolie pulmonaire. Ces protocoles conservateurs ne se conçoivent qu’en cas de cathéters fonctionnels, de longueur adéquate, en l’absence de pathologies infectieuses associées et surtout que si les signes cliniques s’amendent en 48 à 72 heures sous anticoagulants. Cette attitude est recommandée par la conférence de consensus nordaméricaine sur les traitements antithrombotiques [21]. Dans certains cas, des options thérapeutiques plus invasives incluant thrombolytiques, thromboaspiration, dilatation et/ou pose de « stent » ont pu être proposées. Ainsi, en cas de thrombose massive récente, un traitement thrombolytique peut être envisagé en première intention par voie générale ou locorégionale au moyen d’un cathéter monté au contact du thrombus. Des contre-indications classiques limitent souvent leur emploi en oncohématologie (chirurgie récente, saignements digestifs, localisations cérébrales, etc.). Ils sont donc réservés aux patients dont le pronostic à long terme est bon ou lors de syndromes caves supérieurs mal tolérés. Il est nécessaire de poursuivre les études permettant le ciblage des populations à risque pouvant éventuellement bénéficier d’une prophylaxie primaire, tout en précisant la place des nouveaux traitements antithrombotiques. Enfin, l’organisation d’équipes spécialisées dans la mise en place et l’entretien des dispositifs intraveineux de longue durée pourraient réduire l’incidence des thromboses sur cathéter et permettre une évaluation précise, par centre, de l’incidence des thromboses symptomatiques ; de même, des référentiels de pose et d’entretien, comme pour l’infection, seraient utiles. Ablation du matériel Si le DVI doit être posé par une équipe spécialisée dans des conditions d’asepsie chirurgicale, il en est de même pour la dépose. Le patient doit donc être informé des motifs du retrait du DVI : fin du traitement, survenue de complications ou mauvaise tolérance et des conséquences de cette ablation. Le taux de plaquettes doit être supérieur à 50 000/ml, et l’INR inférieur à 1,5. Les complications sont essentiellement une embolisation d’un fragment distal, plus rarement une impossibilité d’ablation par fibrose intraveineuse. Le moment idéal d’ablation à la fin de traitement n’est pas standardisé. Il semble licite d’enlever rapidement un cathéter qui n’est plus utilisé. Recommandations – L’information du patient, écrite et orale, doit précéder la pose. Exhaustive, claire et compréhensible, elle porte sur les bénéfices et les risques ainsi que sur les consignes d’entretien et de gestion des complications. L’objectif est d’assurer le confort et la sécurité du patient ; RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 631 632 – les complications hémorragiques et la gestion des anticoagulants doivent avoir été anticipées ; ONCOLOG IE – l’opérateur doit être entraı̂né à la pose et évalué ; – la pose doit se faire en conditions d’asepsie chirurgicale dans un lieu dédié ; SOR « thrombose et cancer » Prévention primaire des thromboses veineuses sur cathéter central chez les patients atteints d’un cancer Standards – la préparation cutanée de la peau respecte les cinq temps de l’asepsie ; – L’extrémité distale du cathéter veineux central doit être située à la jonction de la VCS et de l’OD ; – le choix de la voie veineuse se fait selon l’expérience de l’opérateur et en fonction de l’état du patient ; – la prévention primaire de la thrombose veineuse profonde sur KTVC par anticoagulants n’est pas recommandée chez le patient atteint de cancer. – il est fortement recommandé d’utiliser une échographie de repérage ou de guidage ; – la zone d’incision ne doit pas être en regard de la chambre et l’opérateur doit s’assurer de la connexion entre chambre et cathéter ; – l’opérateur vérifie l’existence d’un reflux sanguin et effectue la première injection ; – une radiographie pulmonaire est systématique, effectuée pour s’assurer de la bonne position du cathéter et éliminer une malposition ainsi qu’une complication ; – un carnet de surveillance avec la carte d’identification du dispositif est remis au patient ; – une antibioprophylaxie systématique n’est pas recommandée ; – des protocoles écrits, évalués ainsi qu’une formation à l’entretien des cathéters doivent être faits ; – la protection du personnel doit être assurée (matériel sécurisé) ; – les consignes relatives à la matériovigilance doivent être respectées ; – changement du pansement et de l’aiguille de Huber tous les huit jours ; – changement des lignes de perfusion tous les quatre jours (sauf sang) ; – respect du système clos pour les lignes de perfusion ; – utilisation d’aiguille de 0,7 mm (sauf sang et lipides) ; – pas d’utilisation de seringues de moins de 10 ml ; – retrait de l’aiguille en pression positive ; – rinçage au sérum physiologique ; – pas d’entretien systématique si la chambre n’est pas utilisée ; Options Il faut privilégier l’insertion du KTVC du côté droit, le repérage échographique de la veine et la pose en milieu spécialisé. Traitement curatif des thromboses veineuses sur cathéter central chez les patients atteints d’un cancer Standards – Le traitement curatif des thromboses sur cathéter doit reposer sur l’utilisation prolongée des HBPM ; – en cas d’insuffisance rénale sévère, le traitement doit reposer sur l’utilisation d’HNF (héparine non fractionnée), avec relais précoce (possible dès j1) par AVK ; – le maintien du cathéter nécessite qu’il soit indispensable, fonctionnel, bien positionné et non infecté, avec une évolution clinique favorable sous surveillance rapprochée. Dans ce cas, le traitement anticoagulant doit être poursuivi tant qu’un cathéter est en place ; – en cas de retrait du cathéter, il n’y a pas d’attitude standard concernant la chronologie de la mise en route d’un traitement anticoagulant par rapport au retrait. Options – En cas de nécessité de poser un nouveau cathéter, il convient d’évaluer au préalable l’état du réseau veineux cave supérieur par scanner ou échographie doppler ; – en cas de reflux ou d’impossibilité de traitement prolongé par HBPM, l’utilisation d’HBPM avec relais par AVK peut être proposée. – les fibrinolytiques peuvent être envisagés en milieu spécialisé en cas de mauvaise tolérance clinique (syndrome cave supérieur) et en l’absence de contre-indications ; – durée du traitement anticoagulant en cas de retrait du cathéter : – les indicateurs de bon fonctionnement sont une chambre indolore, la présence d’un reflux et une injection aisée ; le cathéter est retiré, et le cancer est en progression ou en cours de traitement : il est recommandé trois à six mois de traitement par HBPM suivi par un relais par AVK (cf. chapitre « MTEV hors cathéter ») ; – les complications infectieuses doivent être traitées sans tarder avec ou sans conservation du dispositif. le cathéter est retiré, et le cancer n’est pas en progression ni en cours de traitement : il est recommandé six semaines de traitement par HBPM. 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Kriegel Généralités L’extravasation secondaire à l’injection extravasculaire de produits cytotoxiques est une complication souvent grave pouvant être à l’origine de nécroses tissulaires sévères et d’ulcérations avec lésions nerveuses, articulaires et tendineuses avec risque de séquelles majeures (douleurs chroniques, dystrophie, perte de fonctions, séquelles esthétiques). Il s’agit d’une urgence thérapeutique qui, si elle est sous-évaluée et non ou mal traitée, peut retarder une prise en charge correcte de la maladie, par l’interruption de la chimiothérapie, et entraı̂ner des procédures médicolégales. Des recommandations ont été publiées en 2007 par l’European Oncology Nursing Society Le Tableau 1 concerne les principales publications sur la toxicité cutanée des cytostatiques utilisés en intraveineux en cas d’extravasation dans le cadre du traitement du cancer du sein. Le pouvoir nécrotique de certains produits (doxorubicine, épirubicine, vinorelbine) est reconnu par tous les auteurs, mais pour la majorité des médicaments cette classification est disparate (carboplatine, cisplatine, cyclophosphamide, docétaxel, fluoro-uracile, méthotrexate, paclitaxel) [14]. Il est indispensable que le personnel médical et infirmier soit formé à la prévention et la prise en charge de l’extravasation. Procédure urgente générale Les recommandations du Comité national hospitalier d’information sur le médicament sont les plus couramment utilisées La procédure urgente générale s’applique à tous les cytostatiques indépendamment de leur potentiel nécrotique. Elle doit être mise en place le plus rapidement possible après l’extravasation (idéalement dans les dix minutes). Après six heures, le traitement n’est plus curatif, mais vise à limiter les dommages. Elles distinguent trois niveaux de risque liés à l’extravasation : médicaments responsables de nécroses sévères (médicaments dits vésicants) ; médicaments responsables d’irritations (médicaments dits irritants) ; médicaments n’entraı̂nant pas de réactions sévères (médicaments dits non irritants) [8]. Mesures spécifiques en fonction de la toxicité cutanée du médicament Les mesures spécifiques tiennent compte de la toxicité cutanée du médicament qui a diffusé. On distingue deux types d’approches : Tableau 1. Classification du potentiel nécrotique des cytostatiques par différents auteurs Drogues Krämer et al. Cytotoxic Handbook [Stanley 2002] Mader et al. QUAPOS 3 CNHIM CCO RPC Saint-Paul Année de publication 2002 [22] 2002 2002 2003 2004 2007 2009 Bevacizumab ?? Carboplatine Cisplatine ≤ 0,4 mg/ml Cisplatine > 0,4 mg/ml Cyclophosphamide Docétaxel Doxorubicine Doxorubicine liposomale ? Épirubicine Fluorouracile Méthotrexate Paclitaxel Trastuzumab Vinorelbine – Irritant Irritant – N-Irritant Vésicant Vésicant – – Irritant Exfoliant – N-Irritant Exfoliant Vésicant Irritant – N-Irritant Irritant Vésicant N-Irritant Irritant Vésicant Irritant – N-Irritant Irritant Vésicant N-Irritant Irritant Vésicant Irritant – Vésicant Vésicant – Irritant Irritant Vésicant – N-Irritant N-Irritant Irritant – N-Irritant Irritant Vésicant Irritant N-Irritant Irritant Irritant Vésicant N-Irritant Irritant Vésicant Irritant Vésicant Irritant N-Irritant Vésicant – Vésicant Vésicant Inflam. drug Inflam. drug Vésicant – Vésicant Vésicant N-Irritant N-Irritant Vésicant – Vésicant Vésicant N-Irritant N-Irritant Vésicant – Vésicant Vésicant N-Irritant N-Irritant Irritant – Vésicant Vésicant N-Irritant Irritant-min Irritant N-Irritant Vésicant Vésicant Irritant N-Irritant Vésicant N-Irritant Vésicant N-irritant : non irritant. chirurgicale (dilution, rinçage–drainage, lipoaspiration, débridement) ; pharmacologique (DMSO, hyaluronidase [H] ou dexrazoxane, combinés ou non avec des applications de chaud ou de froid). Approche chirurgicale Deux techniques précoces sont utilisées [16,20,43] (Tableau 2) : le lavage–drainage (LD) consiste à pratiquer quatre incisions en périphérie de la zone d’extravasation et à effectuer éventuellement une infiltration locale de l’hyaluronidase, enzyme dégradant l’acide hyaluronique, non disponible en France. Par la suite, du liquide physiologique sous pression est injecté successivement dans chaque incision, réalisant ainsi une douche sous-cutanée qui lave le tissu interstitiel, dilue le toxique et assure son élimination par les incisions non irriguées ; la lipoaspiration (LA) est une aspiration chirurgicale, par une petite incision le long de la zone extravasée, de la graisse sous-cutanée superficielle et/ ou profonde. La zone lipoaspirée est ensuite abondamment irriguée avec du liquide physiologique, et la canule aspirante est à nouveau utilisée pour éliminer le liquide stagnant. Tableau 2. Études ayant utilisé la technique du lavage–drainage et/ou de la lipoaspiration Références Technique Patient N = Time of referral Results Comments Gault 1993 [16] Saline flush out + H, ± LA 44 < 24 h 39 chemotherapy 37 metabolic 10 other agents 52 Late referral 7 1 15 <2h 6h < 12 h 39 (89 %) no tissue damage 5 (11 %) minor skin necrosis or delayed healing 8 (15 %) no tissue damage 17 (33 %) minor skin necrosis or delayed healing 27 (52 %) extensive damage 8 (100 %) no tissue damage Vanwijck et al. [42] Lambert et al. [24] LA Von Heimburg et al. [43] Saline flush out 8 24 <8h mean of 19 days Khan et Holmes [20] Saline flush out + lidocaı̈ne 17 1 Immediately late LD 15 (100 %) no tissue damage 8 (100 %) no tissue damage 18 skin grafting, 6 debridement 17 (94 %) no tissue damage 1 (6 %) needed split skin graft 8 contrast agents 7 chemotherapy 3 contrast agents 5 other agents 13 chemotherapy 8 metabolic 11 others 16 chemotherapy 2 other agents RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 635 ONCOLOG IE 636 Efficacité de ces techniques Traitement conservateur Elle peut être illustrée lors d’une extravasation d’un produit radio-opaque, puisque des images peuvent être prises avant et après l’intervention pour s’assurer qu’il ne reste plus de produit [24,42]. La facilité et l’efficacité de ces deux méthodes incitent certains auteurs à conseiller cette technique comme solution thérapeutique de choix en cas d’extravasation avec les produits de contraste ou de chimiothérapies [16,24,42]. Il peut être appliqué pendant 72 heures, puis une intervention chirurgicale en cas de persistance des douleurs ou de lésions cutanées importantes doit être effectuée [29,30]. Pour certains auteurs, cette attitude attentiste est préjudiciable et non recommandable [16,24,42], tandis que d’autres la préconisent toujours [28]. Approche pharmacologique Débridement Il reste indiqué pour les patients traités tardivement qui présentent des ulcérations ou des nécroses notamment lorsqu’elles sont situées sur le dos de la main ou au pli du coude. [43]. L’excision comprendra non seulement toutes les parties ulcérées ou nécrosées, mais également leur pourtour en présence d’un érythème ou d’une induration [17]. Le Tableau 2 résume le résultat des différentes études ayant évalué le lavage–drainage et/ou la lipoaspiration. L’instauration rapide et précoce d’un drainage–aspiration et/ou d’une lipoaspiration en milieu chirurgical est un facteur essentiel pour prévenir le développement de lésions irréversibles des tissus mous et/ou des séquelles cicatricielles invalidantes [16,24,42]. Idéalement, il devrait être instauré dans les quatre à six heures suivant l’accident [8]. Sans intervention, les produits lipophiles (ex. : doxorubicine) peuvent persister dans les tissus sous-cutanés jusqu’à cinq mois après l’accident [6]. Les techniques suivantes sont recommandées : – lavage–drainage sous pression au liquide physiologique de la zone infiltrée et/ou lipoaspiration, car ces techniques éliminent le produit. Cette technique est identique pour tous les produits vésicants, que ce soit des cytotoxiques, des produits de contraste, des nutritions parentérales, des solutions d’électrolytes, etc.) ; – Débridement secondaire, en cas de nécrose cutanée ou d’ulcération cutanée. – Les greffes de peau pourront être nécessaires dans un second temps. Ces techniques peuvent nécessiter le sacrifice de la chambre implantable. Les techniques suivantes ne sont pas recommandées : – principe de dilution ; – larges exérèses tégumentaires précoces à titre prophylactique ; – ne rien entreprendre et attendre l’évolution. Différentes approches pharmacologiques ont été mises en œuvre en cas d’extravasation. Anthracyclines : doxorubicine et épirubicine Différents traitements ont été décrits pour les anthracyclines (Tableau 4) : DMSO ; dexrazoxane. DMSO (diméthylsulfoxyde). Mécanisme d’action. Le DMSO est un solvant qui a les propriétés suivantes : pénétration rapide dans la peau, pouvant ainsi disperser l’agent vésicant ; contribution à l’inhibition de l’ulcération par capture des radicaux libres produits par les anthracyclines ; vasodilatateur ; légère activité anti-inflammatoire [33]. L’utilisation du DMSO est basée sur l’hypothèse que certains cytostatiques, dont les anthracyclines lèsent les tissus par la formation de radicaux libres [4,21]. Des cas cliniques d’extravasation traités avec du DMSO ont été rapportés [3,10,31], mais seulement deux études ont inclus 20 patients ou plus. Le Tableau 3 résume ces différentes observations cliniques. Dans les deux études, incluant 20 patients ou plus, l’application de DMSO ne provoque pas d’effets indésirables majeurs, excepté chez certains patients une brûlure modérée pouvant être associée à un érythème, un prurit et une légère desquamation [3,36]. L’apparition de cloques était rare (5 % des patients), mais un cas s’est avéré sévère, car la surface traitée avec le DMSO a été recouverte avec un pansement au lieu de la laisser à l’air libre [36]. Certains patients ont senti une odeur d’ail caractéristique du DMSO [3,4,36]. Différents auteurs recommandent l’utilisation du DMSO et l’application de froid en cas d’extravasation aux anthracyclines [8,7,21,23,33,37]. Dexrazoxane. Mécanisme d’action. Le dexrazoxane (DEX) est associée à deux mécanismes d’action majeurs : inhibition de l’ADN topo-isomérase-2 ; Tableau 3. Cas/cohorte ayant utilisé le DMSO suite à une extravasation Référence Type d’étude (design) Nombre Médicaments Traitement Absence d’ulcération Toxicité Olver et al. [36] Report de cas Cohorte 20 Doxo 18 Dauno 2 DMSO 99 % 2 applications 6×/j durant 14 jours Dose exacte appliquée en fonction de la surface traitée non décrite 20 (100 %) Lawrence et al. [31] Report de cas 4 Dauno 1 Doxo 3 4 (100 %) Bertelli et al. [3,4] Report de cas 127 Doxo 11 Epi 42 Mitomycine 5 Autresa 69 Creus et al. [10] Report de cas 1 Dauno 1 Llinares [32] Report de cas pédiatrique 1 Idarubicine 1 DMSO 55-99 % 1 application toutes les 4 heures durant au moins 3 jours + application de froid, injection de glucocorticoı̈des en sous-cutané DMSO 99 % 2 applications 3 fois/j durant plus de 7 jours application de froid/60 minutes, 3 fois par jour/3 jours DMSO1 application sur une surface 2 fois plus grande que la zone extravasée DMSO 99 % 4 fois par jour durant 5 jours application de froid 1 heure avant le DMSO – Sensation réversible de brûlures légères ; – démangeaison, érythème, faible desquamation superficielle ; – cloques 20 % (4/20) ? 57 (98 %)b 1 patient développa une ulcération suite à une réaction de réactivation Brûlure légère 6 % (8/127) 1 (100 %) Réaction d’hypersensibilité 1 (100 %) Douleur intense après chaque application Érythème N : nombre de patients ; Doxo : doxorubicine ; Dauno : daunorubicine. a Les produits incriminés furent cisplatine, carboplatine, fluoro-uracile, ifosfamide, mitoxantrone. b Extravasation d’anthracycline et mitomycine uniquement (n = 58). Exemple d’application La recommandation émise est d’appliquer trois à quatre gouttes de DMSO 99 % par 10 cm2 de surface de peau traitée trois à quatre fois par jour pendant au moins 7 à 14 jours. Ce dosage est un compromis pour éviter l’apparition accrue de toxicité locale. L’application de froid peut être bénéfique pour soulager la douleur. En association avec le DMSO, il peut être utilisé de manière séquentielle due à la différence du mode d’action (vasoconstriction versus vasodilatation). En cas de douleur persistante ou de l’apparition d’une nécrose, un débridement chirurgical devrait être envisagé. chélation du fer : en se liant au fer, il déplace le complexe Fe3+–anthracycline, prévenant ainsi la formation de radicaux libres. Des études chez la souris ont démontré que l’administration de DEX, peu après des injections de doxorubicine, de daunorubicine ou d’idarubicine en sous-cutané, diminuait ou prévenait la formation de lésions cutanées [25,26]. Le dexrazoxane a fait l’objet de deux études cliniques multicentriques de phases II et III sur la prévention des lésions tissulaires dues à l’extravasation d’anthracycline vérifiée par biopsie [35]. Sur 54 patients, un a présenté une nécrose et a dû avoir recours à la chirurgie (1,8 %). Une publication de Langer et al. [27] a montré que le DEX a été utilisé avec succès chez sept patients ayant une voie centrale. Indication. Le dexrazoxane (DEX), est indiqué pour le traitement de l’extravasation d’anthracycline (doxorubicine, épirubicine, daunorubicine et idarubicine). Il n’est pas remboursé en France. Remarques. Lorsque l’extravasation a lieu sur une voie centrale, il est préconisé d’administrer le dexrazoxane à l’aide d’une voie périphérique. RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 637 638 ONCOLOG IE Tableau 4. Résumé des diverses publications ayant utilisé le dexrazoxane suite à une extravasation à une anthracycline Référence Type d’étude (design) Nombre de patients Médicaments Traitement Résultats en terme d’ulcération uniquement Langer et al. [26] Report de cas Brest CA 2 fois Report de cas Brest CA 2 Épirubicine Doxorubicine J1 DEX 1 000 mg/m2, dans les 5 heures J1 DEX 1 000 mg J2 DEX 500 mg Pas d’ulcération 1 Épirubicine Pas d’ulcération Jensen et al. [18] Report de cas CA du sein ? 1 Épirubicine El-Saghir et al. [13] Report de cas Brest CA 1 Doxorubicine Actions immédiates ou dans les 2 heures : – DMSO 99 % (stoppé après 20 minutes) ; – de froid durant 12 heures ; – hydrocortisone onguent. Puis : – DEX 1 000 mg i.v. après 12 heures ; – hydrocortisone ong. durant 3 semaines Refroidissement local immédiat, puis : J1 DEX 1 000 mg/m2, dans les 2 heures J1 DEX 1 000 mg, après 5 heures J1 DEX 500 mg, à 24 heures J1 DEX 1 000 mg/m2, dans 1 heure J1 DEX 1 000 mg/m2 dans les 5 heures J1 DEX 500 mg/m2, à 24 heures DMSO toutes les 6 heures, arrêté après 3 doses Injection de GM-CSF pour soigner l’ulcération. Frost et al. [15] Report de cas 1 Brest CA 1 autre 2 Doxorubicine Mouridsen et al. [35] Prospective 54 Épirubicine Doxorubicine Daunorubicine Bos et al. [5] J1 DEX 1 500 mg, dans les 4 à 5 heures J2 DEX 1 500 mg J3 DEX 750 mg DMSO pour 5 jours J1 DEX 1 000 mg/m2, dans les 6 heures J2 DEX 1 000 mg/m2 J3 DEX 500 mg/m2 Pas d’ulcération Après 3 mois, ulcération au niveau de la zone extravasée Après 4 mois, chirurgie, puis injection de local de GM-CSF 3 fois par semaine durant 2 semaines, puis (greffe de peau non nécessaire) Aucun patient n’a présenté d’ulcération 1 patient a nécessité un débridement chirurgical DEX : dexrazoxane ; DMSO : diméthylsulfoxide. Une étude chez la souris a montré que l’utilisation concomitante de DMSO en application topique ou d’hydrocortisone en intralésionnel diminue l’effet du dexrazoxane [27]. administrée dans les six heures qui suivent l’extravasation. Les perfusions des deuxième et troisième jours doivent débuter à la même heure (± 3 heures) que celle du premier jour. La FDA a pris position par rapport à ce traitement [19]. L’administration se fait par voie intraveineuse pendant 1 à 2 heures dans une grosse veine située dans le membre opposé à la diffusion. Sur la base des expériences cliniques, la posologie quotidiennea du dexrazoxane est la suivante : 2 J1 : 1 000 mg/m J2 : 1 000 mg/m2 J3 : 500 mg/m2 a Pour les patients ayant une surface corporelle supérieure à 2 m2, la dose unique ne doit pas dépasser 2 000 mg les jours 1 et 2 et 1 000 mg le jour 3 [14]. Remarques. L’administration du dexrazoxane doit débuter le plus rapidement possible et doit être La préparation doit se faire conformément aux directives quant à la préparation des cytostatiques. Association non recommandée avec le dexrazoxane. La zone extravasée doit rester à la température corporelle pour garantir une meilleure vascularisation de la zone atteinte. Par conséquent, l’application concomitante de froid n’est pas recommandée. Il faut retirer tout dispositif de refroidissement local au minimum 15 minutes avant l’administration de dexrazoxane. En général, le refroidissement n’est pas conseillé après l’administration de dexrazoxane (en particulier pendant les quatre premières heures après son administration). Niveau de preuve scientifique fourni par la littérature : 4 Force de recommandations : grade C. L’efficacité de l’hyaluronidase n’est pas formellement démontrée, car les données publiées ne comprennent qu’un nombre restreint de patients. En vue de ces informations, le traitement de choix en cas d’extravasation avec un vinca-alcaloı̈de est d’effectuer un rinçage chirurgical. Avantages : – produit commercialisé et enregistré en France pour l’extravasation d’anthracycline ; Taxanes Standford et Hardwicke [40], dans une analyse de 13 publications regroupant un total de 39 patients sur l’extravasation du paclitaxel, arrivent aux conclusions suivantes : – méthode non invasive ; – permet de conserver le DVI. Désavantages : – la nature précise des mécanismes d’action n’est pas connue. Vinca-alcaloı̈des le paclitaxel devrait être considéré comme un produit vésicant indépendamment de la concentration (variant entre 0,2 et 1,2 mg/ml). L’hyaluronidase n’est habituellement pas recommandée pour les extravasations de paclitaxel ; l’application de froid est recommandée ; Hyaluronidase Les vinca-alcaloı̈des induisent une forte douleur, un érythème et une inflammation dans les minutes qui suivent l’extravasation pouvant conduire à la nécrose [12]. Une expérience chez la souris a montré que la vincristine est plus vésicante que la vinblastine ou la vindésine (la vinorelbine n’a pas été évaluée). Parmi les substances testées, l’injection intradermique de l’hyaluronidase s’est avérée le traitement pharmacologique le plus efficace pour diminuer la toxicité cutanée en cas d’extravasation avec les trois vinca-alcaloı̈des testés. L’application de chaud limitait les lésions cutanées mais uniquement pour la vincristine, tandis que l’application de froid l’aggravait. Une série de sept observations cliniques a montré que les patients traités avec l’hyaluronidase ne souffraient d’aucune nécrose tissulaire après une extravasation d’un vinca-alcaloı̈de et que cet antidote était bien toléré. Le Tableau 5 ci-après résume cette étude [2]. Plusieurs auteurs recommandent l’utilisation de l’hyaluronidase entre 250 et 1 500 UI avec application de chaud [8,23,33]. l’application de chaud n’est pas recommandée, car elle a entraı̂né une aggravation chez un patient. Tous les avis ne sont pas concordants [23,33,37,41] : pour certains, le paclitaxel devrait être considéré comme un produit vésicant [23,33,37] et les extravasations traitées par : – injection jusqu’à 1 500 UI de l’hyaluronidase en sous-cutané autour de la zone affectée indépendamment de l’étendue de l’extravasation associée à des applications de chaud (CH) ou sans application de compresse (ni chaude, ni froide) [33,37] ; – application immédiate de froid (sans utilisation de l’hyaluronidase) [23]. D’après les expériences animales et des recommandations contradictoires au niveau clinique, les bénéfices de l’hyaluronidase ne sont pas formellement démontrés, et les données publiées ne permettent pas de la recommander systématiquement. Le traitement de choix en cas d’extravasation avec le paclitaxel est d’effectuer un rinçage chirurgical. Tableau 5. Utilisation de l’hyaluronidase Référence Type d’étude Nombre Médicaments Traitement Absence d’ulcération Toxicité Bertelli et al. [2–4]a Report de cas 7 Vinblastine 1 Vincristine 1 Vinorelbine 4 250 UI d’hyaluronidase en sous-cutané dans les 10 minutes après l’extravasation 7 (100 %) Induration présente après 3 mois après extravasation de vincristine Vinorelbine 1 250 UI d’hyaluronidase en sous-cutané 10 jours après l’extravasation a Précise la dose employée dans l’étude de 1994. RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 639 640 Tableau 6. Récapitulatif pour les produits vésicants utilisés dans le cadre du cancer du sein ONCOLOG IE Vésicant Tableau 7 Procédure spécifique Conclusion Classe Produit Rinçage chirurgical Froid Chaud DMSO DEX Hyal Anthracyclines Doxo Épirubicine ✓ ✓ CI ✓ ✓ – Vinca-alcaloı̈des Vinorelbine ✓ CI CI? – – ? Taxanes Paclitaxel ✓ ? CI – – ? Rinçage chirurgical ou DMSO + froid ou DEX (?) 1er choix : rinçage chirurgical 1er choix : rinçage chirurgical ✓: peut être utilisé, correspond à un niveau de preuve de 4, grade C ; ? : évidence insuffisante ; CI : contre-indiqué ; – : pas de données ; non testé. Remarque. Voir aussi chapitre concernant la réaction de réactivation (recall reaction). Les cas cliniques rapportés avec le docétaxel décrivent des réactions locales de type irritation, inconfort, cloques, desquamation, pigmentation de la peau [13,37,41]. A priori, il n’entraı̂ne pas de nécrose comme le paclitaxel ou la doxorubicine. On peut donc considérer le docétaxel comme un produit irritant et non vésicant. Recall reactions Une recall reaction est une réactivation de l’ulcère ou la réapparition des lésions guéries, lors d’une injection ultérieure dans une autre veine ou lors d’une irradiation. Ce phénomène est dû à la synergie possible entre médicament et radiothérapie ou entre médicaments eux-mêmes [4]. Ce phénomène a été décrit chez des patients recevant des anthracyclines [3,9,11,36,39] de la mitomycine C [34], du cisplatine [1] et du paclitaxel [34,38,40]. Conclusion Le Tableau 6 ci-après récapitule les différentes mesures spécifiques à entreprendre en cas d’extravasation en fonction du produit et du niveau de preuve. Il n’y a pas de donnée dans la littérature sur la conservation ou non du DVI. Il n’y a pas de donnée sur un délai éventuel avant la reprise d’une chimiothérapie, en particulier pour les extravasations aux anthracyclines qui peuvent avoir un effet prolongé dans le temps. Références 1. Bairey O, Bishara J, Stahl B, Shaklai M (1997) Severe tissue necrosis after cisplatin extravasation at low concentration: possible immediate recall phenomenon. J Natl Cancer Inst 89: 1233-4 2. Bertelli G, Dini D, Forno GB, et al. (1994) Hyaluronidase as an antidote to extravasation of vinca-alkaloids: clinical results. J Cancer Res Clin Oncol 120(8): 505-6 3. Bertelli G, Gozza A, Forno GB, et al. 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Von Heimburg D, Pallua N (1998) Früh- und Spätbehandlung iatrogener Injektionsschäden. Chirurg 69: 1378-82 Intérêts de l’activité physique dans le cadre des cancers du sein Groupe de travail : T. Bouillet, P. Escure Résumé : Le cancer du sein, comme toute maladie chronique, modifie progressivement l’état de santé des patientes. L’activité physique s’intègre dans les soins de support en améliorant les possibilités fonctionnelles de l’organisme, en optimisant les fonctions principales, cardiovasculaires, ostéoarticulaire et neurologique. Elle améliore l’état de fatigue et la qualité de vie et semble aussi modifier la survie. Cette activité physique ne s’accompagne pas de complication si elle est réalisée de façon médicalement dirigée. Les mécanismes d’action de l’exercice physique sur la maladie cancéreuse commencent à être compris. Mots clés : Activité physique adaptée – Fatigue – Cancer du sein – Survie – Estrogènes – Insuline – Adipokines Introduction L’amélioration de la qualité de vie et la réinsertion des patients sont des objectifs fondamentaux en cancéro- logie. Le recours à un exercice physique régulier vise à améliorer cette qualité de vie en cours ou au décours des soins et semble également avoir un impact sur la survie après traitement. Qu’est-ce que l’activité physique ? L’activité physique correspond à un mouvement du corps lié à une contraction musculaire volontaire accroissant la consommation d’énergie de l’organisme [33]. L’intensité de cette activité physique est mesurée en MET-H. Un MET-H correspond à la dépense d’énergie observée en restant assis sans bouger, soit une consommation de 3,5 ml d’oxygène par kilogramme et par minute. La marche normale correspond à une dépense d’énergie de 3 MET-heures, les activités à faible dépense énergétique (marche, montée d’escalier, etc.) correspondent à une dépense inférieure à 6 METheures, celles à haute dépense énergétique sont supérieures à 6 MET-heures (footing, tennis, natation, etc.). Les exercices proposés aux patientes sont adaptés à leur condition médicale définissant une activité physique adaptée (APA) [7]. RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 641 642 Mesures activite physique ONCOLOG IE Dépense énergétique en MET-heure Metabolic Equivalent Task-h = dépense énergie assis 1 heure 3.5 ml O2 / Kg / minute Marche normale = 3 MET < 6 MET – h : marche, escaliers > 6 MET – h : footing, tennis, natation... Population de référence < 3 MET – h par semaine Fig. 2. Risque accru de récidive et de mortalité liée à la prise de poids après traitement du cancer du sein [25] APA, fatigue et qualité de vie La fatigue est un symptôme fréquent parmi les survivants de cancer [10], présent chez 75 à 99 % des patientes [27]. On distingue, notamment, la fatigue qui survient pendant les traitements et celle qui persiste après et qui peut durer plusieurs années. Cette fatigue peut avoir un retentissement à tous les niveaux de la vie quotidienne et sociale [4] ; elle n’est pas limitée à la période du traitement et peut durer très longtemps [15]. La fatigue liée au cancer reste difficile à définir. Une définition pratique est donnée par le National Comprehensive Cancer Network américain (NCCN) : « la fatigue liée au cancer est une fatigue persistante, une sensation subjective de lassitude en rapport avec un antécédent de cancer ou son traitement et qui interfère avec le bon déroulement de la vie quotidienne » (NCCN, cancerrelated fatigue and anemia: treatment guidelines for patients). La fatigue liée au cancer est différente de celle due à l’exercice physique, elle est plus profonde, persistante et ne s’améliore pas avec le repos [23,40]. La fatigue liée au cancer est d’origine multifactorielle, physiologique et psychologique [3]. La fatigue est à la fois indépendante et liée à des éléments d’ordre psychologique que l’on peut schématiquement appeler dépression. La dépression est un trouble de l’humeur souvent difficile à discerner de la fatigue. La prévalence de la dépression en oncologie est de plus de 50 %. La fatigue est un symptôme lié au syndrome dépressif dans plus de 70 % chez les femmes suivies pour cancer de l’utérus ou du sein [3,14]. La fatigue et la dépression sont les deux plus importants facteurs prédictifs de fatigue à distance des soins [40]. La qualité de la prise en charge de la fatigue est dépendante de la possibilité de différencier la fatigue des conséquences de la dépression. Dépression et fatigue ne sont pas synonymes, ainsi à distance du traitement du cancer du sein, des inhibiteurs de recapture de la sérotonine ont amélioré la dépression sans améliorer la fatigue [35]. Inversement, il existe chez des survivantes de cancer du sein un état de fatigue persistant sans dépression associée. La fatigue liée au cancer est donc bien une entité complexe hétérogène difficile à étiqueter et à mesurer avec les outils actuels psychologiques ou physiologiques. Exercice physique : un traitement de la fatigue liée au cancer du sein ? L’exercice physique fait partie des moyens thérapeutiques désormais bien décrits pour améliorer la fatigue, les publications recouvrent des études dans les différents cancers pendant et après les traitements, et ces essais tendent à montrer que le type d’exercice physique et le moment de son application, ainsi que le type de cancer interviennent sur son efficacité. La Cochrane Database [8] établit l’efficacité de l’exercice physique et recommande son utilisation pendant et après le traitement, mais ne permet pas de conclure quant au type de l’exercice ou au moment optimal. Ces études rapportent une gamme extrêmement large de méthodes employées : la marche, le vélo, des exercices contre résistance. L’intensité des exercices lors des programmes suivis est dans la majorité des cas de 50 à 90 % de la VO2max ou de la fréquence cardiaque maximale théorique. Les programmes utilisent des séances allant de deux par jour à deux par semaine sur une période de huit semaines à un an. « Après » un cancer du sein Plusieurs essais et une méta-analyse [11,32] sont en faveur d’un effet favorable de l’exercice en aérobie sur la fatigue et la qualité de vie des patientes après cancer du sein. La méthodologie des études varie de façon significative et quatre points méritent d’être soulignés pour permettre à la recherche sur ce sujet d’avancer : – un design rigoureux des études différenciant les types d’exercices selon leur intensité ; – la prescription de l’exercice doit être bien spécifiée et détaillée pour évaluer la réponse par rapport à l’intensité de l’exercice ; un consensus est nécessaire pour standardiser les méthodes et comparer les données ; les études doivent monitorer au mieux les effets indésirables dont le lymphœdème. Exercice physique pendant le traitement du cancer du sein Dans le cancer du sein en cours de soins, plusieurs essais et une méta-analyse [5,29,37] retrouvent une amélioration de la fatigue et de la qualité de vie non significative, avec plusieurs limites méthodologiques (petit nombre de patientes incluses, pas d’information sur les causes de refus, hétérogénéité des protocoles de chimiothérapie). La Cochrane Database de 2008 [8] fait la preuve de l’efficacité de l’exercice physique adapté dans la fatigue liée au cancer « en général » pendant le traitement en particulier d’un cancer du sein. Plusieurs études retrouvent un bénéfice sur la fatigue et la qualité de vie de la pratique d’une activité physique pendant et après les traitements. Dans ces deux cadres, per- et postthérapeutique, le yoga semble pouvoir améliorer la qualité de vie et la fatigue des patientes [6,34]. Impact de l’APA sur la survie après traitement d’un cancer mammaire La réduction du taux de rechute augmente avec le niveau d’exercice jusque vers 20 MET-heures. Des biais méthodologiques évidents existent dans ces études prospectives, entre autres, du fait de l’absence de randomisation. Mais ce gain de survie en cas d’activité physique existe en analyse multivariable intégrant les facteurs pronostiques classiques tels que l’âge, le stade tumoral TNM, la présence de récepteurs hormonaux, le lieu de résidence, l’alcoolisme ou le tabagisme, l’IMC (BMI), le statut hormonal de la patiente. Impact de l'activité physique sur le risque de rechute des cancers du sein APA APA 0,63 0,63 Nombre de patientes MET-H RR IC p NHS WHEL CWLS HEAL 2 987 1 490 4 482 933 9 9 8 9 0,63 0,56 0,63 0,33 0,48-0,81 0,31-0,98 0,31-0,88 0,15-0,73 0,004 0,04 0,01 0,046 Dans les différents essais prospectifs d’exercice physique en oncologie mammaire, 30 à 40 % des patientes éligibles acceptent de participer aux programmes. En revanche, en cas d’adhésion au projet, plus de 80 % des patientes vont jusqu’au bout du programme. Un certain nombre de barrières à l’adhésion existent [33]. Ces barrières sont de trois niveaux : – le principal a trait à la maladie et aux soins (fatigue, nausées et vomissements, douleurs, rendezvous) ; – le deuxième niveau est lié à la vie personnelle (vacances, difficultés de transport, garde d’enfants) ; – le troisième est en rapport avec une absence de motivation, de temps, d’intérêt, d’information sur la possibilité d’APA. La perception de ces différentes barrières par le médecin facilitera l’adhésion de la patiente aux programmes d’APA. Exercice physique : effet protecteur anticancéreux ? 1,0 0,6 Étude APA et cancer du sein, quelles difficultés ? L’impact de l’activité physique a été exploré, de façon prospective, dans quatre cohortes de femmes souffrant d’un cancer du sein localisé et non évolutif par des questionnaires réalisés dans les deux ans suivant le diagnostic [18,19,21,39]. Le maintien d’une activité physique au-delà de 8 à 9 MET-heures diminue de près de 50 % le risque de décès par cancer (Tableau 1). Le bénéfice en termes de survie à cinq ans et à dix ans est alors de 4 à 6 %. 0,8 Tableau 1. Impact de l’activité physique sur la survie des cancers du sein 0,56 0,4 0,33 Effet sur le risque de cancer du sein Pour évaluer l’impact de l’exercice physique sur le risque de cancer du sein, deux types d’étude ont été réalisés, des suivis de cohortes [1,12,26,30,31,45] et des analyses cas-témoins [2,25,38,43] (Tableaux 2 et 3). 0,2 0,0 NHS WHEL Pas APA CWLS HEAL APA Études NHS WHEL CWLS HEAL 0,63 0,56 0,63 0,33 Ces études retrouvent une association entre réduction du risque de cancer du sein et activité physique régulière. Il existe une augmentation de ce bénéfice avec l’intensité de l’exercice physique. Le risque relatif de cancer du sein chez les femmes déclarant au moins cinq heures par semaine d’activité physique intense est voisin de 0,6 par rapport aux femmes sans activité physique régulière. Ce bénéfice est retrouvé chez la femme ayant un IMC important mais uniquement alors en cas d’activité physique intense. Cette diminution de risque est retrouvée en pré- et en postménopause [26,30] et aussi bien pour les cancers infiltrants que pour les formes in situ [12]. RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 643 644 ONCOLOG IE Tableau 2. Effet prophylactique de l’activité physique sur le risque de cancer du sein – études de cohorte Étude Population Seuil RR Perte effet si IMC > 25 WHI E3N CTS EPIC 74 171 90 509 110 599 218 169 20 Met-H 5 H/sem 5 H/sem 52 Met-H Oui Non Oui Non IWHS NHS II 41 836 64 777 Haut/bas 39 Met-H 0,86 (0,7-0,98) 0,62 (0,49-0,78) 0,69 (0,48-0,98) Pré-MP 0,71 (0,55-0,9) Post-MP 0,81 (0,7-0,93) 0,86 (0,78-0,96) Pré-MP 0,77 (0,64-0,93) Non Non H : heure ; sem : semaine ; MP : ménopause. Tableau 3. Effet prophylactique de l’activité physique sur le cancer du sein – études cas-témoins Étude Patients/témoins Âge Seuil RR IC P SPREAGUE KRUK PEPLONSKA WCRES 8 080/7 630 250/301 2 176/2 326 4 538/4 649 20-69 35-75 20-74 35-64 35 Met-H/sem 150 Met-H/sem par an Quartile haut/bas 15,2 Met-H/sem par an 0,77 0,43 0,74 0,80 0,65-0,91 0,25-0,75 0,62-0,89 0,70-0,92 0,02 0,004 0,001 0,003 Sem : semaine. Il ne semble pas exister de différence de bénéfice selon l’intensité de l’exercice, le bénéfice est lié à l’activité physique totale. Par contre, l’activité physique entre 12 et 22 ans paraı̂t être la principale pourvoyeuse de ce bénéfice sous forme de diminution de cancer du sein en préménopause [30]. La méta-analyse de Friedenreich et Cust a conclu à une réduction du risque de cancer du sein de 25 à 30 % en cas d’exercice physique régulier. La réduction la plus importante est rencontrée dans les populations sans antécédents familiaux, sans surcharge pondérale, postménopausique et dans les formes RH-négatifs [13]. Actions biologiques de l’APA L’activité physique modifie plusieurs paramètres biochimiques impliqués dans le métabolisme des cellules cancéreuses mammaires. Action sur les estrogènes L’activité physique modifie le taux d’estrogènes [46]. En préménopause, il n’existe que peu de variation du taux d’estrogènes en cas d’activité physique, sauf très intense. En postménopause, l’activité physique diminue les estrogènes libres, d’une part, en diminuant la masse graisseuse réduisant l’activité aromatase et, d’autre part, en augmentant la synthèse de la Sex Hormone Binding Globuline. Cette action expliquerait l’impact de l’activité physique en postménopause et son échec en cas de surpoids. L’activité physique modifie également le métabolisme des estrogènes en diminuant la transformation en 16-alphahydroxyestrone à action forte estrogénique et en accroissant la formation de 2-hydroxy-estrone à faible rôle estrogénique. Action de l’activité physique sur l’insuline et l’IGF-1 L’insuline et l’Insulin-like Growth Factor-1 sont des facteurs de prolifération cellulaire et des inhibiteurs de l’apoptose, en particulier pour les cellules RH+. Ils accroissent la production de V-EGF par les cellules tumorales et l’activité aromatase dans les tissus graisseux, et diminuent la sécrétion de la SHBG [16,30,42,44]. Ces actions expliquent l’augmentation du taux de cancer dans le diabète de type 2 et dans le syndrome métabolique ainsi que le mauvais pronostic d’un taux élevé d’insuline dans les cancers du sein. L’activité physique réduit les sécrétions d’insuline et d’IGF-1, ainsi que l’insulinorésistance [28]. Action de l’activité physique sur les sécrétions issues des tissus graisseux L’activité physique modifie les sécrétions des adipokines par les adipocytes, (leptine, mitogène, et adiponectine, proapoptotique) [33]. L’activité physique accroı̂t la sécrétion d’adiponectine et réduit la leptine. Ces mécanismes sont retrouvés également en diététique, il semblerait donc que l’exercice physique et la prise en charge diététique soient deux facettes complémentaires d’une même prise en charge thérapeutique. Outre ces actions métaboliques, l’APA module le système immunitaire avec une augmentation du taux de lymphocytes T CD4+ CD69+ au décours de après la séance. Ces séances d’APA doivent être encadrées par des intervenants formés, éducateurs médicosportifs ou kinésithérapeutes, ayant reçu une formation complémentaire pour assurer un bilan initial et un suivi des progrès des capacités physiques. APA MODE D'ACTION DIMINUE INSULINE et IGF 1 AUGMENTE ADINOPECTINE REDUIT LEPTINE APA INHIBE LA CROISSANCE TUMORALE REDUIT ESTROGENE S LIBRES chimiothérapies en cas de pratique d’APA sur une période de six mois [20]. Complications Les différents essais prospectifs portant sur l’activité physique ne rapportent pas de complications significatives. En présence de métastases osseuses, l’exercice physique ne semble majorer ni la douleur, ni le risque de fractures. Néanmoins, pour éviter ces complications, le recours à des exercices à l’aide d’une bicyclette ergométrique permet, d’une part, de contrôler l’effort physique et, d’autre part, de diminuer la pression du corps sur le squelette [9]. L’activité physique diminue le risque de lymphœdème et favorise le fonctionnement de l’articulation scapulohumérale au décours de chirurgie pour cancer du sein [17,21,24,41]. Précautions : critères d’exclusion Il s’agit d’exercices réguliers, deux à trois fois par semaine, débutés dès le début des soins et poursuivis sur plusieurs mois après la fin des soins. Ces exercices physiques sont faits à une fréquence cardiaque déterminée en fonction d’un pourcentage de la fréquence maximale théorique (FMT), soit 220, moins l’âge du patient. En règle en cancérologie, c’est la fréquence maximale corrigée qui est utilisée, soit la FMT moins la fréquence cardiaque de base de la patiente. En l’absence de structures d’APA au sein de l’établissement de soins, l’activité recommandée doit être soit d’une heure trois fois par semaine, soit de 30 minutes cinq fois par semaine, sous forme d’une activité physique de moyenne intensité type marche ou gymnastique respectant la FMT corrigée. Recommandations du groupe APA Ce qui est sûr : l’activité physique adaptée (APA) dans le cadre des cancers du sein : est faisable sans danger significatif (niveau 2, grade B) ; améliore la qualité de vie et la fatigue pendant le traitement (niveau 2, grade B) ; améliore la qualité de vie et la fatigue après le traitement (niveau 2, grade B) ; améliore les survies globale et spécifique (niveau 2, grade B) ; réduit le risque de cancer du sein (prophylaxie primaire) [niveau 2, grade B] ; les mécanismes biologiques d’action sont connus. L’APA doit être adaptée à la situation clinique et ne peut être proposée à toutes les patientes. Sa mise en place doit tenir compte de l’état général, de l’âge, des antécédents de pratique physique, des comorbidités. L’existence d’une fraction d’éjection inférieure à 40 %, d’une insuffisance coronarienne ou respiratoire sévère, d’une hypertension artérielle non contrôlée, de métastases osseuses en particulier sur le rachis ou les fémurs, d’une dénutrition, d’une ostéoporose sévère sont des contre-indications. Quels sont les critères de sélection des patientes, pour quelle APA ? Exercice physique : que faire, que conseiller ? bilan initial : comorbidités, contre-indications, pratiques sportives antérieures ; La mise en place d’une APA est précédée d’une consultation médicale évaluant les aptitudes présentes et éliminant toute contre-indication. Les principes de base sont la progressivité des efforts, des séances encadrées par une période d’échauffement puis de retour au calme, la contre-indication de tout tabagisme, l’absence de douche immédiatement au décours de l’exercice et une hydratation régulière avant, pendant et Ce qui est à étudier : existe-t-il une synergie entre l’APA et le traitement ? Quelle pratique de l’APA ? Proposer aux patientes une consultation d’APA afin de les faire bénéficier de conseils personnalisés (niveau 2, grade B) ; recommander un exercice régulier une heure, trois fois par semaine, avec une dépense de l’ordre de 4 à 6 MET-heure (marche rapide, gymnastique adaptée) par tranche de 15 minutes à 50 à 90 % de la FMT de 220, moins l’âge (niveau 2, grade B) ; recommander d’éviter toute prise de poids supplémentaire (niveau 1, grade A). RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 645 ONCOLOG IE 646 Conclusions Recommandation des patientes L’activité physique s’intègre dans le traitement de la maladie cancéreuse mammaire, en améliorant la qualité de vie, l’état psychologique, les capacités physiques, le maintien de l’indépendance des patients et en améliorant les chances de guérison. L’activité physique limite les risques de surcharge pondérale et d’ostéoporose. Ces bénéfices se font sans effet indésirable ni danger, à condition de ne pas proposer à toutes les patientes l’APA et de respecter les critères de sélection, de mise en place et de suivi. L’exercice physique n’est pas une solution universelle, mais doit être proposé et facilité pour certaines personnes. De nombreux exercices physiques ou sports sont possibles chez les patientes cancéreuses et pas seulement les classiques vélos ou marche. Sensibiliser les médecins cancérologues et les gynécologues à l’importance de l’activité physique, afin qu’ils informent la patiente sur le lien avec le bien-être et la fatigue et le lien possible avec le pronostic de la maladie. Les patientes souhaitent que les médecins puissent informer les femmes sur le type de sport et le niveau d’activité. Des exemples plus précis de sports pourraient être inclus dans les recommandations. Développer des brochures d’information (support papier et accessible sur Internet) que le médecin peut remettre à la femme. Mettre une fiche dans le dossier médical. La standardisation des protocoles de recherche doit permettre de valider cet apport de soins de support de manière indiscutable afin d’obtenir son application de manière institutionnelle et pratique. Ces mesures d’APA doivent s’articuler avec une prise en charge hygiénodiététique qui s’adresse aux mêmes problématiques et aux mécanismes biologiques. Nous conseillons la mise en place de programmes d’APA au sein des services de cancérologie réalisés en collaboration avec des éducateurs médicosportifs. L’intérêt de l’exercice physique dans le domaine de la cancérologie s’appuie aujourd’hui sur les données de l’evidence-based medicine tant en phase préventive que métastatique. L’exercice physique protocolisé, programmé, institutionnel ou personnel doit maintenant faire partie des soins de support proposés au même titre que la prise en charge psychologique, sociale ou nutritionnelle. Les diverses expériences en Île-de-France (karaté et yoga à Avicenne) ou en Provence, à Avignon, peuvent servir de point de départ. Vignette d’information donnée à titre d’exemple Que faut-il conseiller à nos patients ? Un exercice régulier, trois fois par semaine, dès le début du traitement. Il peut s’agir de marche rapide ou de footing. Idéalement, il s’agit d’un travail des quatre membres avec une période d’échauffement puis une période de récupération. La fréquence cardiaque type est dite maximale théorique corrigée (FMTc) qui correspond à 220, moins l’âge et moins la fréquence cardiaque de base. Cette FMTc est maintenue sur une période de quatre minutes suivie de deux minutes de repos, l’exercice étant poursuivi par tranche de 20 minutes et accru progressivement au fur et à mesure de l’entraı̂nement jusqu’à 40 minutes au total par séance. Ce conseil de soins de support, doit tenir compte de l’âge, des comorbidités, des effets indésirables des traitements, en particulier sur le plan pulmonaire ou cardiaque (anthracyclines, trastuzumab, etc.) et de l’éventuelle existence de métastases osseuses. Afin de favoriser l’activité physique des femmes en cours de traitement, il est important qu’elles puissent bénéficier d’une sortie libre pendant leur arrêt maladie. Références 1. Bardia A, Hartmann LC, Vachon CM, et al. (2006) Recreational physical activity and risk of postmenopausal breast cancer based on hormone receptor status. Arch Intern Med 166: 2478-83 2. Bernstein L, Patel AV, Ursin G, et al. (2005) Lifetime recreational exercise activity and breast cancer risk among black women and white women. J Nat Cancer Inst 97: 1671-9 3. Bower JE, Ganz PA, Dickerson SS, et al. (2005) Diurnal cortisol rhythm and fatigue in breast cancer survivors. Psychoneuroendocrinology 30(1): 92-100 4. Bower JE, Ganz PA, Desmond KA, et al. 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Les douleurs séquellaires de la chirurgie, de la radiothérapie et des traitements médicaux chez les patientes en rémission d’un cancer du sein altèrent indiscutablement la qualité de vie et compromettent le travail psychologique de rémission et la qualité de la réhabilitation biopsychosociale. Ces recommandations concernent le diagnostic, l’épidémiologie, les facteurs de risque, la prévention et le traitement des douleurs neuropathiques chroniques iatrogènes après traitement locorégional d’un cancer du sein et après chimiothérapie par taxanes. Elles s’adressent à l’ensemble des professionnels de santé intervenant auprès des patientes atteintes d’un cancer du sein. Elles précisent les traitements antalgiques de première ligne et les indications de recours à RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 647 648 une structure spécialisée d’évaluation et de traitement de la douleur chronique. ONCOLOG IE Elles répondent aux questions du groupe de travail : – quelle est la fréquence des douleurs neuropathiques chroniques séquellaires après traitement locorégional d’un cancer du sein ? – Existe-t-il des facteurs de risques identifiés de développer des douleurs séquellaires après un traitement locorégional d’un cancer du sein ? – Existe-t-il un intervalle libre fortement évocateur d’une douleur annonçant une récidive ? – Quels sont les traitements préventifs médicamenteux et non médicamenteux des douleurs neuropathiques chroniques séquellaires après traitement locorégional d’un cancer du sein ? – Quelle est la fréquence et l’histoire naturelle des douleurs de polyneuropathie pendant et après traitement par taxanes ? – Existe-t-il des facteurs prédictifs d’apparition des polyneuropathies douloureuses chroniques pendant et après taxanes ? – Quels traitements antalgiques médicamenteux et non médicamenteux sont proposés pour soulager les douleurs neuropathiques séquellaires des traitements locorégionaux d’un cancer du sein et des taxanes ? Sont exclues du domaine de ces recommandations : – les plexites douloureuses (prises en charge diagnostique et thérapeutique spécifiques) ; – les douleurs séquellaires non neuropathiques : douleurs musculosquelettiques, syndrome douloureux régional complexe, etc ; – les autres séquelles participant au handicap des patientes : lymphœdème, atteinte de la mobilité de l’épaule, troubles de la marche. Ces recommandations sont construites en trois parties principales : – douleurs après traitement locorégional : épidémiologie, diagnostic, facteurs de risque, prévention ; – douleurs après taxanes : épidémiologie, diagnostic, facteurs de risque, prévention ; – traitement des douleurs neuropathiques. Douleurs neuropathiques chroniques séquellaires après traitement locorégional d’un cancer du sein : épidémiologie, diagnostic, facteurs de risque et prévention Diagnostic, fréquence et histoire naturelle On distingue cinq types de douleurs neuropathiques séquellaires des traitements locorégionaux d’un cancer du sein : – le syndrome postmastectomie ou névralgie intercostobrachiale (NICB) ; – les douleurs de la cicatrice et les névromes ; – les névralgies de la branche médiane ou latérale du pectoral, du nerf long thoracique, du nerf thoracodorsal ; – les algohallucinoses du sein ; – les plexites tumorales ou, exceptionnellement aujourd’hui, post-radiothérapiques (non abordées dans les recommandations). Syndrome postmastectomie ou NICB Définition En 1994, l’Association internationale d’étude et de traitement de la douleur [57] définit le syndrome postmastectomie comme « une douleur chronique débutant immédiatement ou précocement après une mastectomie ou une tumorectomie affectant le thorax antérieur, l’aisselle et/ou le bras dans sa moitié supérieure ». Nosographie Le « syndrome postmastectomie » est fréquent après tumorectomie (cf. infra). Il convient donc de proposer une autre terminologie. Le « syndrome postmastectomie est aussi appelé « douleurs après dissection axillaire » [73]. Cette terminologie ne permet pas de distinguer cette douleur des douleurs neuropathiques de la branche médiane ou latérale du pectoral, du nerf long thoracique et du nerf thoracodorsal [136]. De plus, elle désigne la chirurgie comme étiologie exclusive de ces douleurs neuropathiques, ce qu’il faut encore démontrer notamment chez les patientes ayant justifié d’une radiothérapie. Il est donc recommandé d’appeler ces douleurs neuropathiques « NICB » (accord d’experts). Cette terminologie a de plus le mérite de rappeler le territoire algique pour le clinicien. Diagnostic Le diagnostic est posé sur trois critères : – douleur neuropathique : le diagnostic sémiologique de douleur neuropathique peut-être est facilité pour les soignants non spécialisés par un score supérieur à 4/10 à l’échelle DN4 (cf. Annexe 1) ; – territoire neurologique systématisé du deuxième nerf intercostobrachial : hémithorax homolatéral et/ou creux axillaire, et/ou partie antéro-interne de la moitié supérieure du bras homolatéral (Fig. 1) ; – absence de récidive tumorale locale : la chronicité est affirmée si la douleur évolue depuis plus de trois mois [58]. Fréquence La NICB est fréquente et persistante : prévalence 23 à 39 % de six mois à neuf ans après la chirurgie. Une étude prospective exposée/non exposée récente – et/ou signe de Tinel positif (la percussion du névrome reproduit la douleur spontanée de la patiente), et/ou perception d’une tuméfaction à la palpation. Le diagnostic de douleur neuropathique de la cicatrice est porté sur deux critères : – DN4 supérieur à 4/10 ; – localisation péricicatricielle. La chronicité est affirmée si la douleur évolue depuis plus de trois mois. Prévalence des douleurs de la cicatrice Fig. 1. territoire de la névralgie intercostobrachiale montre une prévalence de la NICB de 23,9 % à 18 mois [137]. Ce résultat confirme celui d’études antérieures avec un recul de 6 à 116 mois [19,65,71,126,138]. La NICB est associée à d’autres douleurs dans 10 à 29 % des cas [19,118,127]. Deux études de cohorte montrent des incidences plus élevées de 38 à 57 %, 3 à 33,2 mois après la chirurgie [52,143], ainsi que trois études rétrospectives qui montrent une prévalence de 40 à 46 %, de 6 à 54 mois après chirurgie [2,51,119]. Elle est de 22,7 % à un an, de 32 à 40 % à 32 mois et de 30,9 à 40 % à six ans [2,69,119,125]. On ne connaı̂t pas la prévalence des névromes. Leur recherche n’est pas systématique dans les travaux étudiés. Névralgie de la branche médiane ou latérale du pectoral, du nerf long thoracique, du nerf thoracodorsal Diagnostic Il est posé devant la présence de trois critères : – DN4 supérieur à 4 ; – territoire neurologique systématisé (Fig. 2) ; Intervalle libre Avant trois mois 48,9 à 65 % des patientes, entre 3 et 12 mois 11,3 à 17 % des patientes, après 12 mois 3,5 à 17 %, de trois à neuf ans 17 % [2,17,82,121]. Après tumorectomie, la douleur apparaı̂t plus précocement qu’après mastectomie et mastectomie avec reconstruction (p = 0,03 à trois mois) [17]. Ces études rétrospectives présentent cependant de nombreux biais méthodologiques, et leurs résultats nécessitent d’être confirmés par d’autres études bien menées. En l’absence d’étude de qualité, on ne sait pas s’il existe un intervalle libre fortement évocateur d’une récidive. – absence de récidive tumorale. La chronicité est affirmée si la douleur évolue depuis plus de trois mois. On ne connait pas la fréquence de ces douleurs neuropathiques, car elles ne sont pas recherchées systématiquement dans les travaux analysés. Spinal cord Brachial plexus C5 C6 Evolution Trente-huit pour cent des patientes mastectomisées ne ressentent plus de NICB entre 3 et 12 ans après la chirurgie, et 52 % des patientes souffrent d’un syndrome postmastectomie persistant entre 3 et 12 ans après la chirurgie [82]. L’allodynie diminue de 20 % à un mois et de 3 % à un an [126]. C7 C8 T1 Stellate ganglion Medial pectoral nerve to the pectoralis minor muscle Douleur de la cicatrice et névrome Medial pectoral nerve to the pectoralis major muscle Diagnostic Long thoracic nerve to the serratus anterior muscle Le diagnostic de névrome est porté sur deux critères : Thoracodorsal nerve to the latissimus dorsi muscle – décharges électriques spontanées ou provoquées mécaniquement notamment au niveau du deuxième espace intercostal à la jonction avec la ligne axillaire antérieure [142] ; Breast Fig. 2. Nerfs de la branche médiane et latérale du pectoral, nerf long thoracique, nerf thoracodorsal d’après Wallace et al. [136] RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 649 650 Intensité et impact sur la vie quotidienne ONCOLOG IE Intensité Elles sont intenses pour 3 à 5 % des patientes entre trois et cinq ans après la chirurgie [12,19,138]. La fréquence des douleurs d’intensité modérée et moins bien connue, car les résultats des études sont discordants. Quarantequatre pour cent des patientes souffrent de douleurs modérées trois ans après la chirurgie [19], alors que deux autres études rétrospectives utilisant des échelles d’évaluation de la douleur validées montrent que seules 10 % des patientes souffrent de douleurs d’intensité modérée entre trois et cinq ans après la chirurgie [12,138]. Wyatt et Friedman [143] montrent, en 1998, une fréquence des douleurs d’intensité modérée de 30 % à trois mois et de 17 % à six mois en cas de traitements adjuvants, de 6 % à trois mois et de 13 % à six mois sans traitements adjuvants. Cependant, l’échelle d’évaluation de la douleur utilisée n’était pas validée (échelle de Likert à quatre niveaux : douleur absente, faible, modérée ou forte). L’ensemble des études apportent une indication, mais posent le problème de nombreux biais méthodologiques. Impact sur la vie quotidienne Elles diminuent globalement la qualité de vie des patientes [16,82,99,123,128]. Cet impact est plus important en cas de douleurs continues [17,82] et sur les dimensions de capacités physiques (p < 0,001), de bien-être physique (p = 0,001) et de souffrance psychologique (p = 0,01) [17]. Les scores d’anxiété et dépression sont significativement plus élevés chez les patientes algiques [19,70,71,84,126,127]. Les douleurs majorent la perte d’autonomie physique [17]. Les patientes algiques rapportent plus fréquemment des difficultés à marcher, à conduire, à travailler, à soulever, à porter, à pousser, à étendre le bras, à réaliser des activités ménagères et à avoir des relations sexuelles [2,16,82,121,126–128]. La douleur est plus fréquemment aggravée par la position allongée, le temps froid, la fatigue, le frottement des vêtements sur la peau, les mouvements d’étirement et les émotions [82,121]. Elle est insomniante pour 23 à 47 % des patientes [71,82,121,126,127] une à deux nuits par semaine pour 18 % des patientes et plus de trois nuits par semaine pour 17 % d’entre elles [82]. Il n’existe pas de données exploitables dans les articles analysés, concernant les répercussions professionnelles et financières de ces douleurs séquellaires en France. Par exemple, huit à quatre-vingt-quatre pour cent des patientes souffrant de douleurs séquellaires montrent une incapacité à travailler suivant les études [30,121]. La moitié d’entre elles rapportent des problèmes financiers liés à cette situation [121]. Peu d’études ont considéré l’accès des patientes à une prise en charge adaptée. Les données parcellaires des études analysées montrent que 5 à 45 % des patientes sont traitées, mais que leur soulagement est faible à modéré [2,19,82,121,126,138]. Des études complémentaires sont nécessaires pour étudier l’accès de ces patientes algiques à une prise en charge adaptée, tant il est indiscutable que les douleurs neuropathiques séquellaires en phase de rémission altèrent leur qualité de vie, leur réhabilitation et les exposent au risque de passage à un syndrome douloureux chronique. Algohallucinose du sein Définition Perception persistante et douloureuse de la présence d’une partie ou de l’ensemble du sein mastectomisé. Diagnostic La sensation persistante du sein amputé douloureux (algohallucinose) ou non douloureux (hallucinose) n’est pas rapportée spontanément par les patientes. Il est recommandé de rechercher systématiquement à l’interrogatoire une algohallucinose du sein chez toute patiente mastectomisée (accord d’experts). La prévalence de l’algohallucinose est de 8 % à six mois, de 3 à 13 % à 12 mois, et de 17 % à six ans [107]. Une étude de cohorte prospective récente a observé la fréquence de l’algohallucinose du sein. Les pourcentages étaient de 7, 8, 3 et 1 % respectivement six semaines, six mois, un an et deux ans après chirurgie [28]. Krøner et al. montrent une prévalence de 13,3 et 12,7 %, respectivement trois semaines et un an après chirurgie [69]. Elle est de 17,4 % à six ans [68]. L’analyse de la littérature révèle une diminution d’incidence de 0,13 % par an de l’algohallucinose depuis 1950 [28]. La douleur est localisée au niveau du mamelon précocement après la chirurgie (87,5 %) et dans l’ensemble du sein après un an de suivi (42,9 % des cas) [69]. Évaluation À chaque consultation, l’interrogatoire et l’examen de la patiente doivent être attentifs et minutieux. Il comporte un entretien ouvert et un entretien semi-directif [42]. Il est recommandé de rechercher et d’inscrire sur le dossier et dans les courriers (accord d’experts) : – avant la chirurgie : la présence ou l’absence de douleur du sein, la présence d’autres douleurs et les antécédents de douleurs chroniques (supérieures à trois mois) ; – après la chirurgie et à chaque consultation : la présence ou l’absence de douleur. Pour chaque douleur, il est recommandé de préciser et d’inscrire dans le dossier [42] : – la topographie de la douleur et de ses irradiations : cette information essentielle pourra être reportée sur un schéma par la patiente ou le praticien ; – l’intensité de la douleur continue par échelle d’évaluation unidimensionnelle : EVA ou EVS ou EN ; – la fréquence et le rythme (continue, intermittente) ; – la présence ou l’absence de douleurs insomniantes ; – le type de douleurs : neuropathiques, nociceptives (mécaniques et/ou inflammatoires), mixtes ; – intervalle libre de plus de trois mois ; – modification de la symptomatologie ; – signes cliniques ou biologiques évocateurs de récidive tumorale, pour les patientes souffrant d’une NICB. – les conditions d’apparition de ces douleurs et leur intervalle libre ; Devant un tableau clinique typique, il n’est pas recommandé de prescrire des examens paracliniques pour confirmer le diagnostic (accord d’experts). – le temps d’évolution : supérieur ou inférieur à trois mois ; Facteurs de risque – les traitements utilisés, leur tolérance et leur efficacité ; – l’évolution et la modification de chaque douleur ; – les facteurs aggravants et les facteurs améliorants. Il est recommandé d’évaluer : – à quoi la patiente attribue sa douleur : 30 % des patientes attribuent la douleur à la persistance de la maladie [19]. Cette signification de la douleur aggrave indiscutablement les répercussions psychologiques, sociofamiliales de la douleur et pèse sur le comportement de la patiente et sur la relation soignant–soigné ; – l’état thymique de la patiente : syndrome anxiodépressif réactionnel, etc. ; – les répercussions émotionnelles, affectives et sexuelles ; – le bras dominant et le handicap perçu pour les activités de la vie quotidienne ; – le soutien disponible (famille, amis, proches) et la nature de la relation ; – les conditions de vie : type de logement, situation professionnelle, type de travail (conduite de véhicule, port de charge), situation sociale et financière. Il est recommandé d’informer la patiente, avant les traitements, de la possibilité de survenue de douleurs (accord d’experts). Il est recommandé de proposer à la patiente de signaler toute douleur dès son apparition (accord d’experts). Il est recommandé d’expliquer à la patiente l’origine séquellaire de ses douleurs et leurs mécanismes pour en améliorer le vécu, la décision sur le comportement à adopter, les répercussions psychosociales et l’observance des traitements. Diagnostic différentiel Il est recommandé d’entreprendre un bilan diagnostic étiologique si le tableau clinique est « atypique » (accord d’experts) : – abolition ROT tricipital (atteinte plexique) ; – territoire atypique ; – signes cliniques centraux, déficit moteur associé ; L’analyse des facteurs de risque a pour objet de définir des sous-groupes à risque et de développer des stratégies de prévention. Les données analysées sont de faibles niveaux de preuve et ne permettent de conclure pour plusieurs facteurs de risque présumés. Facteurs de risque sociodémographiques Âge Les patientes jeunes présentent plus fréquemment des douleurs neuropathiques séquellaires dans 12 études en analyse univariée et multivariée [4,17,51,56,66,82, 98,118,126,127,135,137,138,141]. L’âge de la patiente n’est pas un facteur de risque d’algohallucinose [68,69]. Niveau socioéducatif Le niveau socioéducatif est un facteur de risque de majoration de l’intensité de la douleur pour Tasmuth et al. [125] et pour Arnaud et al. [6]. Arnaud et al. montrent en analyse univariée que la douleur est plus forte chez les patientes ayant arrêté leurs études avant le baccalauréat (p = 0,047). Situation familiale On ne sait pas si le soutien émotionnel joue un rôle sur la survenue de douleurs, car les résultats des études sont discordants. Une étude montre que la vie en couple est un facteur de risque de douleur plus intense [6], mais deux études montrent le contraire, Tasmuth et al., et Averill et al. [8,125]. Poids, taille et indice de masse corporelle Le surpoids apparaı̂t comme facteur de risque [82,118]. La dissection axillaire peut alors être plus difficile. On ne sait pas si l’indice de masse corporelle est un facteur de risque, car les deux études l’ayant analysé sont de mauvaise qualité méthodologique [82,137]. La grande taille est un facteur de risque dans une étude rétrospective en analyse univariée [118]. État général Une seule étude montre en analyse univariée un effet d’un score ASA II–III (score évaluant le risque anesthésique de l’American Society of Anesthesiologists) sur l’intensité de la douleur (p = 0,002) [6]. RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 651 ONCOLOG IE 652 Facteurs de risque psychologiques Nombre de ganglions au curage On ne sait pas si les facteurs psychologiques préopératoires constituent un facteur de risque, car les études sont discordantes : l’anxiété préopératoire est associée à une augmentation de fréquence des douleurs séquellaires dans deux études [11,126] mais ne l’est pas dans quatre autres [19,52,84,127]. On ne sait pas si le nombre de ganglions enlevés constitue un facteur de risque, car les données sont contradictoires. Pour Keramopoulos et al. [67], le risque de douleurs séquellaires augmentait lorsque plus de 30 ganglions sont retirés. Une autre étude retrouve ce facteur de risque à partir de dix ganglions [59], alors que ce facteur de risque n’est pas retrouvé dans deux études [17,20]. Douleur préopératoire Dans l’étude de Katz et al. [66], il existe une tendance non significative pour affirmer un lien entre douleurs préopératoires et douleurs postopératoires. Poleshuck et al. [98] montrent qu’une douleur aiguë postopératoire est un facteur de risque de douleurs chroniques d’intensité supérieure à 5/10. L’intensité de la douleur postopératoire et l’utilisation d’antalgique sont des facteurs de risque de douleur chronique du bras homolatéral [125,126,128,129]. La présence de douleur du sein avant la chirurgie est un facteur de risque d’algohallucinose précoce à trois semaines, mais pas à un an [69]. La présence d’une douleur est un facteur de risque d’autres douleurs séquellaires : il existe une association significative entre douleur de la cicatrice et algohallucinose (OR = 2,6 ; IC 95 % : [1,4–4,6]), douleur de la cicatrice et autres douleurs postmastectomie (OR = 5 ; IC 95 % : [2,8–8,9]), algohallucinose et autres douleurs postmastectomie (OR = 5 ; IC 95 % : [2,8–8,9]) [70]. Le niveau de preuve reste cependant faible sur cette question essentielle aux vues des théories modernes qui décrivent les mécanismes de neuroplasticité centrale éclairant le risque de passage à la chronicité des douleurs aiguës non soulagées. Des travaux complémentaires sont indispensables en ce domaine. Extension tumorale La taille de la tumeur n’est pas un facteur de risque [6,20]. La présence de métastases ganglionnaires n’est pas un facteur de risque de douleurs séquellaires [20,135]. Mastectomie versus tumorectomie Les douleurs séquellaires chroniques apparaissent aussi bien après tumorectomie qu’après mastectomie. Cependant, on ne sait si la mastectomie constitue un facteur de risque en comparaison à la tumorectomie, car les résultats sont discordants. La mastectomie est un facteur de risque d’apparition de douleurs chroniques séquellaires dans trois études [6,66,67] et un facteur de risque de douleurs plus intenses dans deux études [6,98]. Cependant, quatre études ne montrent pas de différence [17,20,51,135]. Le côté opéré, droit ou gauche, ne constitue pas un facteur de risque [28]. Des études complémentaires sont nécessaires. Reconstruction avec prothèses Pour Wallace et al. [137], la fréquence d’apparition de douleurs après mastectomie et reconstruction est plus importante qu’après mastectomie seule : 49 versus 31 %. La douleur est plus fréquente s’il s’agit d’une reconstruction avec implant (53 %) que sans implant (30 %). La fréquence des douleurs est de 50 % pour les implants sous-musculaires et de 21 % pour les implants sous-glandulaires. La fréquence des douleurs est de 39 % après une reconstruction immédiate et de 59 % après une reconstruction secondaire. Mais cette étude est de mauvaise qualité méthodologique et ne permet d’affirmer un facteur de risque significatif. Complications postopératoires Elles ne constituent pas un facteur de risque dans quatre études [20,28,51,69]. Type de chirurgie Expérience du chirurgien Curage axillaire versus ganglion sentinelle La faible expérience du chirurgien dans ce type de chirurgie apparaı̂t comme un facteur de risque dans deux études [125,137]. Les études qui ont comparé « curage axillaire » versus « ganglion sentinelle » sont discordantes. Trois études prospectives et une étude rétrospectives retrouvent une plus grande fréquence d’apparition des douleurs séquellaires dans le groupe « curage axillaire » [6,56,86,106,112], alors que deux études prospectives (dont une en analyse multivariée) ne retrouvent pas de différence significative entre les deux groupes [20,135]. Le curage axillaire n’est pas un facteur de risque d’algohallucinose [28]. Facteurs de risque médicaux Radiothérapie On ne sait pas si la radiothérapie (et quelle type de radiothérapie) constitue un facteur de risque, car les études sont discordantes : la fréquence des douleurs est plus importante après radiothérapie dans cinq études [51,119,125,128], mais ne l’est pas dans deux autres études [20,135]. La radiothérapie ne constitue pas un facteur de risque d’algohallucinose [28,68,69]. manque de puissance [46,110,131]. Des essais de bonne qualité sont nécessaires pour répondre à cette question. Chimiothérapie Anesthésie La chimiothérapie n’est pas un facteur de risque de NICB et de douleurs de la cicatrice [6,20]. Elle ne ressort pas non plus comme facteur de risque d’algohallucinose [28,68,69]. Ces données demandent à être confirmées avec les nouveaux protocoles de chimiothérapies. Pommade lidocaı̈ne/prilocaı̈ne Hormonothérapie L’hormonothérapie n’est pas un facteur de risque de douleurs neuropathiques séquellaires [20,51,135]. Fassoulaki et al. [35] ont montré que l’application de pommade lidocaı̈ne/prilocaı̈ne sur la région sternale et des creux sus-claviculaires et axillaires, cinq minutes avant la chirurgie et tous les jours pendant quatre jours, versus placebo diminue la fréquence des douleurs du sein (p = 0,004), des douleurs axillaires (p = 0,025) et globalement des douleurs chroniques à trois mois (p = 0,002). Prévention Mexilétine et gabapentine, mexilétine et bloc du plexus brachial Chirurgie Fassoulaki et al. [36] ont comparé mexilétine (600 mg) et gabapentine 1 200 mg versus placebo. Ils étaient administrés la veille de l’intervention et tous les jours jusqu’au dixième jour postopératoire. Aucune différence de fréquence de la douleur n’a été observée après trois mois de surveillance [34]. De même, l’association d’un bloc du plexus brachial du cinquième au septième espace intercostal avec mexilétine (200 mg/j) débutée le jour précédant la chirurgie et les six jours suivants, dans un essai mené en plan factoriel 2 × 2, ne diminue pas la fréquence de la douleur après trois mois. Ganglion sentinelle versus curage axillaire La technique du ganglion sentinelle diminue l’incidence des douleurs neuropathiques chroniques séquellaires, mais ne permet pas d’éviter leur apparition. Seize études ont analysé l’apport de cette technique sur l’incidence et/ou l’intensité de douleurs séquellaires. Cependant, de nombreuses études présentent un biais majeur de mesure : l’absence d’évaluation de la douleur par des échelles validées. Les cinq études prospectives utilisant une échelle d’évaluation de la douleur validée montrent une diminution de la fréquence des douleurs séquellaires dans le groupe « ganglion sentinelle » [6,95,106,112,124]. L’intensité de la douleur était significativement plus faible dans les groupes « ganglion sentinelle », mais non significative (différence inférieure à 20/100 sur l’EVA) [6,106]. Les résultats des études analysant la qualité de vie ne permettent pas de conclure ; Fleissig et al. [40] notent une amélioration dans le groupe « ganglion sentinelle » versus curage axillaire, mais Peintinger et al. [95] n’en montrent aucune. D’autres références (1,9,23,27,74,105,132,134) sont disponibles sans modifier les conclusions. La technique du ganglion sentinelle est recommandée lorsqu’elle est indiquée, mais elle ne permet pas de prévenir totalement l’apparition des douleurs séquellaires (niveau de preuve 4, grade C). Préservation du nerf intercostobrachial On ne sait pas si la préservation du deuxième nerf intercostobrachial ou de ses branches diminue la fréquence d’apparition des douleurs neuropathiques séquellaires. Bien que la lésion chirurgicale du deuxième nerf intercostobrachial constitue une des hypothèses physiopathologiques du développement de la NICB [73], les essais menés sur la préservation du deuxième nerf intercostobrachial ne permettent pas de conclure, du fait de leur mauvaise qualité méthodologique (pas d’échelle de la douleur validée) et de leur Bloc paravertébral Kairaluoma et al. [61] ont comparé un bloc paravertébral (troisième thoracique) préopératoire par bupivacaı̈ne avec un bloc avec injection placebo. Ils ont montré une diminution de la fréquence de la douleur à six mois (p = 0,02) et à un an (p = 0,003). À un an, ils ont aussi montré une diminution de l’intensité de la douleur au repos (p = 0,003) et aux mouvements (p = 0,011) ainsi qu’une diminution de la consommation d’opioı̈de. Traitement multimodal préventif Fassoulaki et al. [37] ont comparé un « traitement multimodal » associant gabapentine, pommade prilocaı̈ne/lidocaı̈ne et bloc de ropivacaı̈ne versus placebo. Ils ont montré une diminution de la fréquence de la douleur à trois mois (p = 0,028) et une diminution non significative à six mois (p = 0,424). Ils ont aussi montré une diminution de la consommation d’antalgique à trois mois (p = 0,048) et une diminution non significative à six mois (p = 0,107). Aucune recommandation ne peut être proposée en ce domaine, car le nombre d’essais randomisés contrôlés est limité pour chaque proposition de traitement préventif en anesthésie. Des essais complémentaires, notamment pour les stratégies non invasives, sont à développer pour pouvoir répondre à cette question essentielle. RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 653 654 Recommandations ONCOLOG IE Fréquence et répercussions Les douleurs neuropathiques séquellaires sont fréquentes et persistantes après traitement locorégional du cancer du sein : un tiers de patientes présentent une NICB et/ou une douleur de la cicatrice six mois à neuf ans après la chirurgie. Dix pour cent souffrent d’algohallucinose six ans après le traitement (niveau 3, grade C). On ne connaı̂t pas la fréquence des névromes et des névralgies de la branche médiane ou latérale du pectoral, du nerf long thoracique, du nerf thoracodorsal. Ces douleurs apparaissent dans l’année suivant la chirurgie dans 90 % des cas (niveau 5, grade C). On ne sait pas s’il existe un intervalle libre fortement évocateur d’une récidive tumorale (accord d’experts). Ces douleurs altèrent la qualité de vie des patientes et compromettent bien souvent leur réhabilitation psychosociale et professionnelle (niveau 5, grade C). Leur identification et leur prise en charge sont insuffisantes (niveau 5, grade C). Évaluation (accord d’experts) À chaque consultation, l’interrogatoire et l’examen de la patiente doivent être attentifs et minutieux. Ils comportent un entretien ouvert et semi-directif. Il est recommandé de rechercher et d’inscrire sur le dossier et dans les courriers : – avant la chirurgie : la présence ou l’absence de douleur du sein, la présence d’autres douleurs et les antécédents de douleurs chroniques (supérieures à trois mois) ; – après la chirurgie et à chaque consultation : la présence ou l’absence de douleur. Pour chaque douleur, il est recommandé de préciser et d’inscrire dans le dossier : la topographie de la douleur et de ses irradiations, l’intensité de la douleur continue et des accès transitoires évalués par EVA ou EVS ou EN, le caractère continu ou intermittent, la présence ou l’absence de douleurs insomniantes, le type de douleur (neuropathique, nociceptive, fonctionnel, etc.), les conditions et leur délai d’apparition, le temps d’évolution (supérieur ou inférieur à trois mois), les traitements utilisés, leur tolérance et leur efficacité, l’évolution et la modification de chaque douleur, les facteurs aggravants et les facteurs améliorants. Il est recommandé d’évaluer : à quoi la patiente attribue sa douleur (récidive ?), son état thymique, les répercussions émotionnelles et sexuelles, son bras dominant, le handicap perçu, le soutien disponible, les conditions de vie, la situation professionnelle, sociale et financière. Il est recommandé d’informer la patiente, avant les traitements de son cancer, du risque de survenue de douleurs et de lui demander de les signaler dès leur apparition. Il est recommandé d’expliquer à la patiente l’origine séquellaire de ses douleurs et leurs mécanismes pour en améliorer le vécu, la décision sur le comportement à adopter, les répercussions psychosociales et l’observance des traitements. Nosographie et diagnostic (accord d’experts) Il est recommandé de dénommer le syndrome postmastectomie : « NICB ». Il est recommandé de confirmer le diagnostic de NICB sur trois critères cliniques : – douleur neuropathique : score DN4 supérieur à 4/10 ; – territoire neurologique systématisé (deuxième nerf intercostobrachial) : hémithorax homolatéral et/ ou creux axillaire, et/ou partie antéro-interne de la moitié supérieure du bras homolatéral ; – absence de récidive tumorale locale. Le caractère chronique est affirmé si la douleur évolue depuis plus de trois mois. Il est recommandé de rechercher systématiquement à l’interrogatoire une algohallucinose du sein chez toute patiente mastectomisée. Il est recommandé de porter le diagnostic de névrome sur deux critères cliniques : – décharges électriques spontanées ou provoquées mécaniquement, notamment au niveau du deuxième espace intercostal à la jonction avec la ligne axillaire antérieure ; – et/ou signe de Tinel positif et/ou perception d’une tuméfaction à la palpation. Il est recommandé de porter le diagnostic de douleur neuropathique de la cicatrice sur deux critères cliniques : – douleur neuropathique : score DN4 supérieur à 4/10 ; – localisation péricicatricielle. Le caractère chronique est affirmé si la douleur évolue depuis plus de trois mois. Le diagnostic de névralgie de la branche médiane ou latérale du pectoral, du nerf long thoracique, du nerf thoracodorsal chronique séquellaire est porté sur trois critères : – DN4 supérieure à 4 ; – territoire neurologique systématisé ; – absence de récidive tumorale. Le caractère chronique est affirmé si la douleur évolue depuis plus de trois mois. Diagnostic différentiel (accord d’experts) – Il est recommandé d’entreprendre un bilan diagnostique étiologique différentiel si tableau « atypique » : atteinte motrice, abolition ROT tricipital, territoire atypique, signes cliniques centraux, déficit moteur associé, intervalle libre de plus de trois mois, modification de la symptomatologie, signes cliniques ou biologiques évocateurs de récidive tumorale ; – devant un tableau clinique typique, il n’est pas recommandé de prescrire des examens paracliniques pour confirmer le diagnostic (accord d’experts). Facteurs de risque – Oui : le jeune âge (niveau 3, grade C), le niveau socioéducatif bas, le surpoids et la grande taille, l’état général, une douleur postopératoire, l’association à d’autres douleurs séquellaires, la taille de la tumeur, la mauvaise technique chirurgicale ; – non : la douleur postopératoire, le curage axillaire ne sont pas des facteurs de risque d’algohallucinose chronique du sein. Les complications postopératoires, la taille de la tumeur, la chimiothérapie, l’hormonothérapie ne constituent pas un facteur de risque d’autres douleurs séquellaires chroniques neuropathiques ; – on ne sait pas si la situation familiale, l’indice de masse corporelle, les facteurs psychologiques, la douleur préopératoire, la technique du ganglion sentinelle, le nombre de ganglions enlevés, la mastectomie, la reconstruction et la radiothérapie sont des facteurs de risques. Des travaux complémentaires sont nécessaires. Prévention – Aucune méthode de prévention ne permet d’éviter la survenue de douleurs neuropathiques séquellaires (accord d’experts) ; – la technique du ganglion sentinelle diminue la fréquence des douleurs neuropathiques séquellaires (niveau 3, Grade C) ; – on ne sait pas si la préservation chirurgicale du deuxième nerf intercostobrachial prévient l’apparition de douleurs séquellaires. Des études complémentaires sont nécessaires ; – on ne sait pas si les techniques invasives (bloc paravertébral, bloc du plexus brachial, etc.), les topiques locaux, les traitements médicamenteux préventifs et les stratégies d’analgésie multimodales préviennent l’apparition de douleurs séquellaires. Des essais complémentaires sont nécessaires (accord d’experts). Douleurs neuropathiques chroniques séquellaires après taxanes. Épidémiologie, diagnostic, facteurs de risque, prévention et traitement Introduction Les taxanes sont largement utilisés dans le traitement du cancer du sein. En situation adjuvante comme en situation métastatique, le docétaxel et le paclitaxel sont devenus au cours de la dernière décennie des cytotoxiques incontournables dans le traitement du cancer du sein. L’efficacité des taxanes a été montrée maintes fois, mais elle n’est pas sans cacher une toxicité sévère. Les toxicités limitantes (celles qui imposent une diminution des doses de chimiothérapie ou son arrêt) sont avant tout d’ordre hématologique (neutropénie) et neurologique. La toxicité neurologique liée aux taxanes la plus rencontrée est une neuropathie périphérique (NP) associée ou non à des douleurs neuropathiques. L’évolution de la NP peut être chronique. La persistance des troubles sensitifs peut perturber les activités de la vie quotidienne et les activités professionnelles. Ces incapacités acquises associées à un syndrome douloureux chronique peuvent conduire au handicap (selon Wood) et à une altération de qualité de vie liée à la santé (QDVLS). En l’absence de prévention primaire et de traitement efficaces, le diagnostic précoce semble être, pour l’heure, la seule arme efficace pour lutter contre cette toxicité et ses conséquences. Diagnostic Tableau clinique typique Le syndrome arthromyalgique survient le plus souvent dans les 24–72 heures, après injection de taxanes. Il est caractérisé par des sensations de crampes et de douleurs diffuses. Il s’amende habituellement en quatre à cinq jours. Les douleurs sont principalement localisées au niveau du dos, des hanches, des épaules, et des membres inférieurs. Elles sont irradiantes, à type d’élancement, lancinantes et pulsatiles [80]. Le tableau clinique de neuropathie périphérique induite par les taxanes (NPIT) est celui d’une neuropathie périphérique symétrique, distale, ascendante progressive et à prédominance sensitive. La neuropathie périphérique est d’abord présente aux extrémités des membres inférieurs (orteils) et apparaı̂t secondairement aux membres supérieurs RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 655 656 ONCOLOG IE (doigts), où l’atteinte peut être simultanée [108]. L’évolution est ascendante en forme de « chaussette » et de « gant » avec l’aggravation des troubles. Les premiers signes cliniques sont le plus souvent une gêne à type de paresthésies ou d’engourdissement, puis peut s’installer une dysesthésie (questionnaire DN4) plus ou moins étendue et potentiellement invalidante. À l’examen clinique, il peut être retrouvé dans les territoires concernés (extrémités distales) : une hypoesthésie, une hypopallesthésie, et/ou une hypothermoalgésie. Les troubles moteurs sont plus rares (4–8 %), ils sont le plus souvent minimes, limités à une parésie des extrémités avec trouble de la flexion dorsale de la cheville (difficulté à gravir les escaliers) ou de l’extension des doigts. Une aréflexie ostéotendineuse est observée dans les formes avancées [54,75,91,108]. Histoire naturelle Les premiers symptômes de toxicité neurologique apparaissent 24 à 72 heures après injection. Ils peuvent débuter dès la deuxième injection [85], voire dès la première injection pour des doses importantes (au-delà des doses utilisées en pratique clinique). Ils peuvent persister plusieurs mois après la fin des traitements. Postma et al. [101] ont observé que seulement 50 % des neuropathies s’amélioraient en neuf mois dans un schéma à base de paclitaxel historique (taxol). D’une manière générale, plus la toxicité initiale est sévère, et plus les symptômes peuvent persister longtemps et devenir chroniques [108]. Diagnostic différentiel La douleur est fréquente chez le patient cancéreux. Il est souvent difficile de faire la part entre les douleurs liées au cancer et les douleurs liées aux traitements. Devant un tableau atypique, signes centraux, atteinte proximale ou atteinte motrice prédominante, un diagnostic différentiel doit être évoqué, et une consultation spécialisée neurologique doit être proposée au patient. Les diagnostics différentiels suivants peuvent être évoqués (liste non exhaustive) [75] : infiltrations des tissus nerveux, effets des traitements concomitants (antiviraux, ATB, antiépileptiques, antiémétiques, corticoı̈des, antidépresseurs ou antalgiques), complications postradiques, tumeur cérébrale secondaire ou primitive, AVC, thrombophlébites cérébrales, méningite, syndrome neurologique paranéoplasique, etc. Cependant, il existe des facteurs augmentant le risque de développer une NPIT. Ils peuvent être classés en trois groupes : la molécule et son véhicule pharmacologique, le schéma d’administration, et les facteurs associés aux patientes. Molécule et véhicule pharmacologique L’incidence des NPIT est plus importante avec paclitaxel qu’avec docétaxel. Dans l’étude de Cassier et al. [21], les fréquences des NPIT de grade 3 ou 4 (NCI–CTC) étaient évaluées à 6,8 % avec paclitaxel versus 0,9 % avec docétaxel (p = 0,03). Cela a été montré à la fois dans un schéma hebdomadaire et dans un schéma toutes les trois semaines par Sparano et al. [120]. Cet essai de phase III, incluant près de 5 000 patientes, a montré que les NPIT de grades 2, 3 ou 4 (échelle inconnue) étaient plus fréquentes avec le paclitaxel hebdomadaire (27 %) versus les trois autres schémas : paclitaxel toutes les trois semaines (20 %), docétaxel hebdomadaire ou toutes les trois semaines (16 % pour chacun), p < 0,001 pour chaque comparaison. Avec les paclitaxels cremophor-free, les NPIT sont plus fréquentes Dans un essai portant sur 454 patients et comparant nab–paclitaxel et paclitaxel historique, les NPIT de grades 3 et 4 (NCI–CTC) étaient évaluées à 10 versus 2 % respectivement (p < 0,001) [50]. Avec Genexol–PM (polimeric micelle formalation without cremophor EL) à la dose de 300 mg/m2 dans un schéma toutes les trois semaines [76], les auteurs observent plus de 50 % de NPIT de grade 3 (échelle inconnue). Schéma d’administration Incidence des NPIT plus importante avec paclitaxel dans un schéma hebdomadaire versus un schéma toutes les trois semaines L’essai de Sparano et al. [120] déjà cité a évalué la fréquence des NPIT de grades 2, 3 ou 4 (échelle inconnue) à 27 et 20 % pour le paclitaxel hebdomadaire et le paclitaxel toutes les trois semaines respectivement. Un autre essai de forte puissance confirme ces données [114]. La fréquence des NPIT des grades 3 et 4 (NCI–CTC) était de 24 % pour le paclitaxel hebdomadaire et de 12 % pour le paclitaxel toutes les trois semaines. Aucune différence n’a été mise en évidence entre les deux schémas de docétaxel. Fréquence et facteurs de risque Il existe de nombreuses données sur la toxicité des taxanes depuis leur apparition dans les années 1980. La toxicité neurologique est une des principales toxicités limitantes de cette classe thérapeutique. En fonction des études et de l’échelle de mesure utilisée, la fréquence des neuropathies périphériques varie de 2 à 32 % pour le paclitaxel historique et de 0 à 17 % pour docétaxel. Incidence des NPIT plus importante avec l’augmentation de la dose par cycle Un essai de Harvey et al. [53] a comparé trois doses de docétaxel (60, 75 et 100 mg/m2) en schéma toutes les trois semaines. Il existait une relation dose-dépendante de la fréquence des NPIT : respectivement 1,3, 1,6 et 3,8 % de grade 3 ou 4 (NCI–CTC v2). Nabholtz et al. [90] ont comparé deux doses de paclitaxel (175 et 135 mg/m2) dans un schéma toutes les trois semaines. La fréquence des NPIT (grades 3 et 4, WHO) était respectivement de 7 % et de 3 %. La même tendance a été observée dans plusieurs essais [10,79,113]. Incidence des NPIT plus importante avec l’augmentation de la dose-densité Deux schémas adjuvants associant épirubicine, paclitaxel et CMF ont été comparés [44]. À dose cumulée égale, il a été observé plus de NPIT de grade supérieur ou égal à 3 (échelle inconnue) avec paclitaxel dose-dense à 200 mg/m2 toutes les deux semaines (trois cures) qu’avec paclitaxel 187 mg/m2 (quatre cures), respectivement 9,5 et 2,1 %. Piedbois et al. [97] ont rapporté les mêmes résultats dans une étude sur 99 patientes traitées par docétaxel. Rôle de la dose cumulée moyenne Pour l’observation d’une NPIT de grade 2 ou supérieur dans un schéma toutes les trois semaines, elle était pour le docétaxel de 371 mg/m2 et pour le paclitaxel de 715 mg/m2 [60]. prédisposition génétique a été rapportée dans une étude portant sur 22 patients [117]. L’âge ne semble pas être un facteur de risque. Argyriou et al. [5] ont comparé la fréquence des NPIT chez les plus et les moins de 65 ans sans trouver de différence (50 % dans les deux groupes). L’étude portait sur 35 sujets traités par cisplatine ou paclitaxel. Prévention La diminution des doses de taxanes après apparition de la neurotoxicité permet de diminuer le plus souvent les symptômes et permet de poursuivre le traitement à doses diminuées [114] ; mais cela pose le problème de l’efficacité du traitement à dose plus faible. Les voies de recherches vont vers la prévention médicamenteuse des NPIT. De nombreux agents neuroprotecteurs ont été testés. L’amifostine et AM424 n’ont pas fait la preuve de leur efficacité. La glutamine et la vitamine E présentent une efficacité qui reste à prouver. Plusieurs agents médicamenteux sont à l’étude : le dimesna (BNP7787) ou la lamotigrine par exemple, mais d’autres molécules ont été étudiées (31,64,87,111,115). Amifostine Dans un schéma de paclitaxel hebdomadaire, Mielke et al. [85] n’ont pas montré de différence d’incidence de NPIT entre une durée de perfusion de trois heures versus une heure. En revanche, dans un schéma de paclitaxel toutes les trois semaines, Smith et al. ont rapporté une diminution de la fréquence des NPIT (grade ≥ 3, échelle inconnue) avec une durée de perfusion de 24 versus 3 heures, respectivement 13 et 22 % [118]. Trois essais randomisés menés chez des patientes traitées par taxanes pour un cancer du sein ont montré qu’il n’y avait pas de différence de neurotoxicité entre les groupes recevant ou non de l’amifostine [47,88,94]. Les essais menés dans le cancer de l’ovaire ou du poumon avec un schéma paclitaxel–carboplatine ont montré des résultats discordants [26,55,77,81]. Les récentes guidelines de l’ASCO ne recommandent pas l’utilisation de l’amifostine dans la prévention des NPIT [83]. Association avec un sel de platine Glutamine Dans une étude de phase III du Hellenic Cooperative Oncology Group [45], le carboplatine ne s’est pas montré particulièrement neurotoxique avec 2,5 % de patientes atteintes (carboplatine-paclitaxel versus épirubicine-paclitaxel). Deux essais montreraient une efficacité préventive de la glutamine orale [122,133]. Il s’agissait d’essais de petites tailles (45 et 47 patientes) rapportés par la même équipe du Memorial Sloan-Kettering Cancer Center (MSKCC), et de qualité méthodologique critiquable (niveau de preuve 4). Cependant, Vahdat et al. ont observé une réduction importante de l’incidence des dysesthésies : 8 versus 40 %, avec ou sans glutamine. Stubblefield et al. [122] ont observé une réduction de l’incidence des hypoesthésies, un bénéfice conservé un mois après la fin des traitements dans le groupe glutamine. Ces résultats doivent être confirmés par des essais randomisés de bonne qualité et de puissance suffisante. Rôle de la diminution de la durée de perfusion Facteurs liés aux patientes Les patientes aux antécédents de neuropathie périphérique ou présentant des comorbidités telles que le diabète ou l’alcoolisme sont plus à risque de développer une NPIT [49,109], et cela avec des doses moins importantes de taxanes [22]. Les NPIT ne sont pas plus fréquentes en fonction de la taille des sujets [93]. Dans une étude d’électrophysiologie, l’effet de la taille de 21 sujets traités par paclitaxel n’était pas significatif. Les patients porteurs d’un variant de l’allèle ABCB1 seraient plus à risque de développer une NPIT. Cette Vitamine E Elle a été étudiée dans un seul essai de phase II randomisée de petite taille (n = 40) [4]. Les NPIT étaient moins fréquentes dans le groupe vitamine E : 18,7 RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 657 658 ONCOLOG IE versus 62,5 %. L’échantillon était hétérogène (cancers du poumon, du sein et ovarien), et la mesure des NPIT était réalisée par un score non validé (niveau de preuve 4). Un essai du NCCTG devrait publier des résultats en 2009 [92]. AM424 Dans un essai de phase II randomisé, le recombinant human leukemia inhibitory factor (rhuLIF–AM242) n’a pas montré d’efficacité [25]. Évaluation de la douleur Pour mesurer la toxicité neurologique dans les essais thérapeutiques, il est habituellement fait appel aux échelles OMS, NCI–CTC (v1 à v3), ECOG ou Ajani. L’utilisation de ces échelles pose un problème de concordance. Dans l’étude de Postma et al. [100], deux neurologues ont gradé la neurotoxicité (en insu l’un de l’autre) de patients traités par taxanes. La gradation était faite à l’aide de trois échelles différentes (WHO, Ajani et NCI–CTC). Les auteurs ont montré que la concordance interéchelles et que la concordance interjuge étaient médiocres. De même, Brundage et al. [15] ont étudié la concordance des échelles WHO et NCI–CTC. Ils ont conclu à un manque de reproductibilité interjuge pour les deux échelles. Au total, le manque de fiabilité de ces échelles pose le problème de comparabilité entre les études et de concordance au sein d’une même étude multicentrique. En outre, ces échelles utilisent le terme de paresthesia (paresthésie) pour la gradation de la toxicité neurologique. Le terme « paresthésie » est défini par l’IASP [58] comme une sensation cutanée anormale, mais non désagréable, spontanée ou induite (picotements, engourdissement, etc.). Il est différent du terme « dysesthésie » qui intègre le caractère désagréable de la sensation et donc la perception douloureuse. Ainsi, la fréquence des douleurs neuropathiques liées aux taxanes est mal estimée. Elle est souvent fréquemment mêlée avec la toxicité neurologique non douloureuse. Au total, l’utilisation des échelles habituelles pose des problèmes de fiabilité en recherche clinique et des problèmes de diagnostic des phénomènes neurologiques et douloureux imputables aux taxanes. Le diagnostic précoce repose la recherche à l’interrogatoire. sance de la lignée granuleuse (G-CSF). Les troubles sont fréquemment graves (≥ grade 3) et peuvent persister plusieurs mois après la dernière injection. Cette « chronicisation » est d’autant plus fréquente que la toxicité initiale est importante. Seul le diagnostic précoce suivi d’un changement de stratégie thérapeutique (baisse de la dose ou changement de ligne) permet de diminuer la fréquence et/ou l’intensité de ces troubles. Il n’existe pas en 2009 de prévention médicamenteuse prouvée, et les traitements curatifs sont partiellement efficaces et présentent une forte iatrogénie. Pour améliorer la prise en charge de la toxicité neurologique, le diagnostic doit être amélioré en attendant une chimioprévention efficiente. Un autoquestionnaire, le PNQ (Patient Neurotoxicity Questionnaire) [72] a été développé pour améliorer le diagnostic de neuropathie induite par les chimiothérapies. Il s’agit d’un autoquestionnaire qui peut être administré avant la consultation et permet au clinicien d’estimer la toxicité de la chimiothérapie d’une manière fiable et rapide. Ce questionnaire n’est pas validé en français. Les résultats encourageants observés avec la glutamine et la vitamine E sont à valider dans un essai de grande envergure. Recommandations (accord d’experts) Contexte La fréquence des neuropathies périphériques induites (NPIT) par les taxanes varie de 2 à 32 % pour le paclitaxel historique et de 0 à 17 % pour le docétaxel. Les facteurs de risque de développer une NPIT sont de trois ordres : la molécule et son véhicule pharmacologique, le schéma d’administration et les facteurs associés aux patientes. Diagnostic Il n’est pas recommandé d’utiliser pour le diagnostic les échelles telles que l’échelle WHO, ECOG ou NCI–CTC. Il est recommandé avant chaque cure, de rechercher : crampe, gêne, paresthésie, dysesthésie ou allodynie, d’administrer le questionnaire DN4 et de réaliser un examen neurologique. Si le tableau clinique est atypique, il est recommandé de rechercher un diagnostic différentiel et/ou de proposer une consultation neurologique. Traitement préventif Il n’est pas recommandé d’utiliser de traitement préventif. Conclusion et futur La toxicité neurologique est une des principales toxicités limitantes des taxanes. Sans doute « la principale » depuis l’utilisation des facteurs de crois- Adaptation des traitements Il est recommandé de diminuer la dose de 20 % ou de changer de projet thérapeutique en cas d’apparition d’une neurotoxicité sévère. Traitement des douleurs neuropathiques Traitements médicamenteux AMM françaises Le Tableau 10 en annexe rappelle les AMM des molécules utilisées dans le traitement de douleurs neuropathiques. Les traitements ayant prouvé leur efficacité et bénéficiant d’une AMM sont proposés en première intention (tricycliques, gabapentine, prégabaline, tramadol). Les opioı̈des forts sont proposés en deuxième intention chez les patientes en rémission et en première intention chez les patientes en phase d’évolution tumorale si échec des traitements de palier II associés aux coantalgiques adaptés [42]. Les traitements n’ayant pas d’AMM pour les douleurs neuropathiques postchirurgicales et qui ont prouvé leur efficacité dans des essais contrôlés randomisés sont à utiliser après échec des traitements de première intention par des structures spécialisées dans l’évaluation et le traitement de la douleur. Trycicliques. Mécanisme d’action présumé. Inhibition de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline [7]. Preuve d’efficacité dans les douleurs neuropathiques d’étiologie diverse (niveau 1, grade A). Les tricycliques ont prouvé leur efficacité dans les douleurs neuropathiques centrales après accident vasculaire, les douleurs neuropathiques postzostériennes, les polyneuropathies douloureuses diabétiques et non diabétiques et le syndrome postmastectomie [7,39,78]. Les tricycliques n’ont pas démontré leur efficacité dans les douleurs neuropathiques de lésions médullaires, les algohallucinoses après amputation d’un membre, les douleurs neuropathiques du VIH, les polyneuropathies douloureuses du cisplatine, les neuropathies tumorales. NNT et NNH. Finnerup et al. [39] : NNT 2,3 (2,1–2,7), NNH 14,7 (10–25). Recommandations canadiennes : Librach et al. [78] : NNT 2,1 (1,7–2,5) pour l’amitriptyline. Profil d’efficacité sur les différentes composantes des douleurs neuropathiques. Action sur la douleur de fond et la douleur paroxystique dans les polyneuropathies diabétiques et les neuropathies postzostériennes [6]. Effets contradictoires sur les douleurs provoquées : effet faible sur l’allodynie par effleurement, mais effet positif sur la sensation de douleur à l’effleurement [6]. Preuve d’efficacité dans les douleurs neuropathiques postchirurgicales du cancer du sein et dans les polyneuropathies douloureuses après taxanes. Kalso et al. [63], en 1995, dans un essai croisé randomisé en double insu, évaluant sur dix semaines amitriptyline 100 m versus placebo, incluant 20 patientes présentant des douleurs neuropathiques modérées à sévères après chirurgie d’un cancer du sein (15 évaluables : 13 douleurs du bras homolatéral, 12 douleurs de la cicatrice), montrent une efficacité de l’amitriptyline (p < 0,05) sur la douleur, le sommeil et les activités quotidiennes. Ils calculent un NNT à 2,5 (1,4–10,6) et un NNH (2,7–40,5). Les effets secondaires dans le groupe amitriptyline sont significativement supérieurs au placebo pour asthénie (p < 0,05), bouche sèche (p < 0,05), constipation (p < 0,01), sueurs (p < 0,05). Malgré le manque d’essais cliniques randomisés dans les indications de douleurs neuropathiques après traitement locorégional du cancer du sein et dans les polyneuropathies séquellaires des taxanes, il semble possible de considérer que l’efficacité des tricycliques n’est pas différente quelle que soit l’étiologie [6]. Posologie et conduite du traitement. Débuter à 10 mg en dose unique et augmenter par paliers de 10 mg tous les cinq à sept jours jusqu’à apparition d’une efficacité ou d’effets indésirables [6]. La posologie efficace varie d’un individu à l’autre. En moyenne, elle est de 35 à 75 mg [6]. L’efficacité est le plus souvent constatée une à cinq semaines après obtention de la posologie optimale. Effets indésirables et comorbidité. Les plus fréquents : effets indésirables anticholinergiques (sécheresse de la bouche, constipation, sueurs, tachycardie, troubles de l’accommodation, palpitations, trouble de la miction) et adrénolytiques (hypotension orthostatique, impuissance) et effets sédatifs, asthénie, prise de poids. La notriptyline est mieux tolérée, avec moins d’effets cholinergiques et de sédation [29]. Les tricycliques sont à utiliser avec prudence chez les patients présentant des pathologies cardiovasculaires, notamment chez les patients âgés, du fait d’un risque de décès démontré à des posologies supérieures à 100 mg dans une étude rétrospective de 58 827 patients [103]. Gabapentine et prégabaline. Mécanisme d’action présumé. Agissent sur la sous-unité alpha-2 delta des canaux calciques voltages-dépendants et réduisent la libération présynaptique des neurotransmetteurs [6]. Preuves d’efficacité dans les douleurs neuropathiques d’étiologie diverse (niveau 1, grade A). La prégabaline et la gabapentine ont prouvé leur efficacité dans les douleurs neuropathiques postzostériennes, la polyneuropathie douloureuse diabétique, les douleurs neuropathiques médullaires [7,39,78]. La gabapentine n’a pas montré son efficacité dans trois études concernant le membre fantôme, les mononeuropathies du VIH et une étude sur les polyneuropathies toutes causes confondues [7,39,78]. NNT et NNH. Finnerup et al. [39] : gabapentine et prégabaline NNT 3,9 à 4,3 (3,6–5,4) : NNH 17,8 (12–30). Recommandations canadiennes : Librach et al. [6] : NNT 4,3 (3,5–7,5). Profil d’efficacité sur les différentes composantes des douleurs neuropathique. La gabapentine et la RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 659 660 ONCOLOG IE prégabaline sont efficaces sur la douleur continue de brûlure et sur les douleurs paroxystiques. Preuve d’efficacité dans les douleurs neuropathiques postchirurgicales du cancer du sein et dans les polyneuropathies douloureuses après taxanes. Malgré le manque d’essais cliniques contrôlés randomisés dans les indications de douleurs neuropathiques après traitement locorégional du cancer du sein et dans les polyneuropathies séquellaires des taxanes, il semble possible de considérer que l’efficacité de la gabapentine et de la prégabaline ne soient pas différentes (accord d’experts). Des travaux complémentaires dans ces indications sont nécessaires. Il est à noter que dans un essai randomisé contrôlé parallèle incluant 121 patientes, Caraceni et al., en 2004, [18] montrent une supériorité d’efficacité (p = 0,025) de la gabapentine à la posologie de 1 800 mg sur le placebo, sans augmentation significative des effets secondaires, dans les douleurs neuropathiques tumorales sur dix jours. Posologie et conduite du traitement. Gabapentine : commencer à 100 mg trois fois par jour chez le sujet âgé et à 300 mg en une prise chez l’adulte, puis augmenter par paliers de quatre à sept jours jusqu’à efficacité ou effets secondaires. La posologie habituellement efficace est de 1 800 mg par 24 heures. Le délai d’action varie selon la rapidité de titration et peut être ressenti dès les premiers jours. Prégabaline : commencer à 75 mg et augmenter par paliers de 150 mg par semaine. L’augmentation par paliers de 150 mg par semaine semble mieux toléré en termes d’effets secondaires. Les doses efficaces se situent entre 150 et 600 mg. Le délai d’action est environ d’une semaine. Il n’existe pas d’arguments de qualité prouvant la supériorité d’efficacité d’une molécule par rapport à l’autre. La prégabaline offre l’intérêt d’un nombre de prises moindres que la gabapentine (deux prises versus trois prises quotidiennes), d’un délai d’obtention de la posologie maximale plus rapide, mais le recul est plus important avec la gabapentine. Effets indésirables et comorbidité. La gabapentine et la prégabaline ont les mêmes effets secondaires : somnolence, asthénie, impression vertigineuse, troubles gastro-intestinaux, sécheresse de la bouche, céphalées et prise de poids. La prise de poids peut être particulièrement mal vécue dans le contexte du cancer du sein et amener la patiente à l’arrêt du traitement. La fréquence des effets secondaires augmente en fonction de la posologie. La prégabaline a des effets bénéfiques sur les troubles anxieux (AMM dans l’anxiété généralisée de l’adulte), la qualité du sommeil, certains paramètres de la qualité de vie. La gabapentine a montré des effets positifs sur les troubles du sommeil et les troubles de l’humeur. à long terme dans les douleurs de neuropathies, les douleurs postzostériennes et les douleurs de cancer (niveau 1, grade A). NNT et NNH. Finnerup et al. [39] : NNT 3,9 (2–6,8) ; NNH 29,3. Profil d’efficacité sur les différentes composantes des douleurs neuropathiques. Le tramadol soulage les douleurs continues, les douleurs paroxystiques et les douleurs provoquées [6]. Preuve d’efficacité dans les douleurs neuropathiques postchirurgicales du cancer du sein et dans les polyneuropathies douloureuses après taxanes. Dans un essai randomisé contrôlé parallèle, incluant 36 patients souffrant de douleurs neuropathiques tumorales ou séquellaires, Arbaiza et al., en 2007, [3] (N2) montrent une efficacité du tramadol (1 mg/kg toutes les six heures jusqu’à 1,5 mg/kg toutes les six heures) supérieure au placebo (p < 0,001) sans modification de l’humeur, avec amélioration du score de Karnovsky, amélioration du sommeil (p < 0,05), augmentation des activités (p < 0,05). Ils notent plus des effets secondaires à type de nausée et de constipation. Posologie et conduite du traitement. Doses efficaces 200 à 400 mg. Augmentation tous les quatre à sept jours. Commencer à 50 mg, libération immédiate le soir chez les patientes âgées. Effets indésirables et comorbidité. Effets indésirables les plus fréquents : nausées, constipation, céphalées, somnolence, bouche sèche, vertiges, troubles mictionnels. Les formes retards sont mieux tolérées. Le tramadol a un effet sur l’amélioration de l’autonomie et sur le sommeil [3]. Il faut prendre en compte le risque de crise d’épilepsie chez les patients aux antécédents épileptiques ou recevant d’autres médicaments abaissant le seuil épileptogène. Il est conseillé d’éviter l’association aux tricycliques et aux antidépresseurs IRS et IRS–NA, car il existe un risque de syndrome sérotoninergique. Oxycodone, morphine. Mécanisme d’action présumé. Agoniste des récepteurs mu [6]. Preuve d’efficacité dans les douleurs neuropathiques (niveau 1, grade A). L’oxycodone et la morphine ont prouvé leur efficacité dans les douleurs neuropathiques postzostériennes, les polyneuropathies douloureuses du diabète et à doses élevées dans les douleurs du membre fantôme [39]. Les NNT et le NNH sont dans les douleurs neuropathiques périphériques : Finnerup et al. [38] : NNT 2,7 (2,1–3,6) ; NNH 17,1 (10–66). Tramadol. Mécanisme d’action présumé. Agoniste des récepteurs mu et inhibiteur de la recapture de mononamines [6]. Profil d’efficacité sur les différentes composantes des douleurs neuropathiques. L’oxycodone et la morphine soulagent les douleurs continues, les douleurs paroxystiques et les douleurs provoquées [6]. Preuve d’efficacité dans les douleurs neuropathiques d’étiologie diverse. Le tramadol est sûr et efficace Posologie et conduite du traitement. Titration [43] per os. La dose moyenne analgésique sur la douleur neuropathique est de 10 à 120 mg/j pour l’oxycodone et 15 à 300 mg/j pour la morphine. Topiques locaux Effets indésirables et comorbidité. Somnolence, nausées, constipation sont la cause de trois quarts des abandons à un, à deux ans, mais on n’observe pas de déclin cognitif au long cours contrairement aux tricycliques, sauf à des posologies dépassant 300 mg/j de morphine ou équivalent. Mécanisme d’action présumé. Bloquent les canaux sodiques et inhibent probablement les décharges ectopiques au niveau périphérique [6]. Le risque de dépendance psychique est exceptionnel ainsi que la tolérance, mais la dépendance physique est fréquente [43]. Autres molécules. D’autres molécules ont prouvé leur efficacité ou ont une présomption d’efficacité dans le traitement des douleurs neuropathiques, mais ils n’ont pas d’AMM en France pour le traitement des douleurs séquellaires après traitement locorégional du cancer du sein et dans les douleurs neuropathiques des taxanes. Ils ne sont donc pas recommandés en première intention. Ils peuvent être proposés après échec des traitements de première ligne par des consultations spécialisées : – venlafaxine : dans un essai randomisé contrôlé incluant 13 patientes, étudiant l’efficacité de la venlafaxine 37,5–75 mg versus placebo sur les douleurs postmastectomie. Tasmuth et al. [130] montrent une supériorité de la venlafaxine sur la douleur maximale, mais pas sur la douleur moyenne ; – duloxétine, inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (fluoxétine, paroxétine, citalopram), antiépileptiques (oxacarbamazépine, lamotrigine, topiramate), mexilétine, antagoniste NMDA (dextrométorphan, mémamtine, biluzole), antiépileptiques (valproate de sodium), cannabinoı̈des (dronabinol), carbamazépine, phénytoı̈ne. Comparaisons d’efficacité entre molécule et efficacité des associations Deux essais ont comparé l’efficacité et la tolérance de la gabapentine versus amitriptyline dans les neuropathies diabétiques, une négative sur 19 patientes, mais à faible dose (gabapentine 1 800 mg et amitriptyline 75 mg) et de faible puissance (n = 13) [89], l’autre positive sur 13 patientes (soulagement p = 0,026 ; effets secondaires p = 0,003) pour la gabapentine à 2 400 mg versus amitriptyline 90 mg [24] : – association gabapentine et morphine : Gilron et al. montrent un effet additif dans un essai clinique randomisé [48] ; – association gabapentine et venlafaxine : Simpson et al. montrent un effet supérieur de l’association gabapentine–venlafaxine versus gabapentine–placebo dans les polyneuropathies diabétiques [116]. Aucun de ces essais ne concerne les douleurs postchirurgicales et les douleurs de neuropathique des taxanes. Des essais complémentaires sont nécessaires. Anesthésiques en application locale Preuve d’efficacité toute étiologie de douleurs neuropathiques (niveau 1, grade A). La lidocaı̈ne en emplâtre est efficace sur la douleur postzostérienne et autres lésions périphériques. Profil d’efficacité sur les différentes composantes des douleurs neuropathique. La lidocaı̈ne est efficace sur la douleur spontanée superficielle et profonde, action inconstante sur l’allodynie mécanique. Posologie et conduite du traitement. Un à trois emplâtres locodolenti 12 sur 24 heures. Efficacité inconstante sur l’allodynie. Effets indésirables et comorbidité. Réaction cutanée allergique, effet systémique chez les patients recevant un analogue de synthèse de la xylocaı̈ne (mexilétine). Améliore le sommeil. Capsaı̈cine. Mécanisme d’action présumé. Probable effet sur les fibres C [6,32]. Preuve d’efficacité (niveau 1, grade A). La capsaı̈cine a prouvé son efficacité dans les douleurs postzostériennes et postchirurgicales [39]. Les résultats sont négatifs sur les polyneuropathies. NNT et NNH : Finnerup et al. [39] : douleurs postzostériennes NNT = 3,2 (2,2–5,9), lésions nerveuses périphériques 6,5 (3,4–69), NNH : non connu. Profil d’efficacité sur les différentes composantes des douleurs neuropathiques. La capsaı̈cine est plus efficace sur la composante paroxystique et l’allodynie que sur la composante continue [6]. Posologie et conduite du traitement. Quatre applications par jour sur la zone douloureuse. Efficacité au bout de deux à quatre semaines. Effets indésirables et comorbidité. Éviter le contact avec les muqueuses. La capsaı̈cine peut provoquer une sensation de brûlures intenses. Cette sensation désagréable peut être diminuée par un mélange avec la lidocaı̈ne, et diminuer avec le temps. Traitement non médicamenteux Neurostimulation transcutanée électrique Plusieurs travaux démontrent l’efficacité de la neurostimulation transcutanée électrique dans les douleurs neuropathiques périphériques localisées. Cependant, elle ne peut être recommandée en première intention, car sa prescription et son évaluation sont réservées à des médecins et des équipes spécialisées (Arrêté du 2 août 2000 : Journal officiel no 213 du 14 septembre 2000). RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 661 662 ONCOLOG IE Kinésithérapie Elle n’a pas démontré son efficacité sur les douleurs neuropathiques séquellaires après traitement locorégional d’un cancer du sein et dans les polyneuropathies des taxanes. Il est cependant recommandé de l’associer aux traitements des douleurs neuropathiques dans les lymphœdèmes, les troubles de la mobilité de l’épaule et les troubles proprioceptifs et de la marche pour diminuer le handicap des patientes et améliorer leur qualité de vie (accord d’experts). Psychothérapie et traitements psychiatriques Le bénéfice des psychothérapies a étépeu évaluédans les douleurs neuropathiques. Cependant, dans le contexte des douleurs neuropathiques séquellaires, il est recommandé de proposer un espace d’élaboration et/ou de thérapie (accords d’experts). L’indication d’une psychothérapie et/ou d’un traitement médicamenteux doit être évaluée au cas par cas en équipe pluridisciplinaire. Il est recommandé de proposer une consultation avec un psychiatre et/ou une psychologue en cas de syndrome dépressif ou de comorbidité psychiatrique associée (cf. recommandations Saint-Paul : « psycho-oncologie »). Accompagnement social Son impact n’a pas été évalué sur les douleurs neuropathiques. Il est recommandé d’évaluer la situation sociale et financière de la patiente et de proposer une prise en charge avec une assistante sociale si nécessaire (accord d’experts). Algorithme décisionnel (accord d’experts) – si douleurs neuropathiques sans douleurs non neuropathiques associées (douleurs neuropathiques pures) : si dépression, migraine, céphalée de tension : amitriptyline ou imipramine ou tofranil ; si patiente épileptique, âgée, glaucome à angle fermé, insuffisance cardiaque, bloc auriculoventriculaire de haut grade : prégabaline ou gabapentine ; si troubles anxieux : prégabaline ; si patiente obèse ou n’acceptant pas la possible prise de poids sous tricycliques, gabapentine, prégabaline : tramadol ; – si efficacité insuffisante du traitement de première ligne : associer un autre traitement de première ligne en évitant l’association tramadol–tricycliques et tramadol-antidépresseurs tricycliques et IRS ou IRS–NA ; – si inefficacité, contre-indication ou mauvaise tolérance du traitement de première ligne : arrêt du traitement et proposer un autre traitement de première intention ; – si deuxième traitement prescrit inefficace ou effets indésirables, ou contre-indications : adresser le patient à une consultation spécialisée ; – si douleurs mononeuropathiques et soulagement insuffisant par traitement per os : lidocaı̈ne en emplâtre (hors AMM). Si inefficace ou mal toléré et allodynie non soulagée : capsaı̈cine 0,025 à 0,075 %. Le soulagement, l’inefficacité de soulagement et l’efficacité partielle sont définis par le groupe de travail (accords d’experts) : L’efficacité d’un traitement est définie par : Cet algorithme tient compte : – une douleur habituelle d’intensité faible : inférieure à 30/100 (3/10) par EVA, EN, ou 1 sur 4 par EVS ; – des preuves d’efficacité dans le traitement des douleurs neuropathiques ; – et/ou crises douloureuses rares (moins de deux à trois par jour) ; – des données concernant l’AMM française ; – de la sémiologie douleur, du statut tumoral, du statut de la patiente et de ses comorbidités : – si syndrome douloureux chronique préexistant, et/ou névrome, et/ou sémiologie atypique, et/ou indication de neurostimulation, et/ou indication de gestes interventionnels antalgiques, et/ou contre-indication ou mauvaise tolérance, ou efficacité insuffisante des traitements de première intention, et/ou comorbidités psychiatriques sévères, et/ou abus médicamenteux, et/ ou insuffisance rénale ou hépatique, il est recommandé d’adresser la patiente à une structure spécialisée dans l’évaluation et le traitement de la douleur ; – si douleur neuropathique associée à d’autres douleurs non neuropathiques locorégionales ou générales : patiente en rémission : tramadol ; patiente en phase tumorale : tramadol si douleur justifiant un palier II, ou opioı̈des forts (oxycodone ou morphine) si douleur nociceptive nécessitant un palier III [43] ; – et douleur non insomniante ; – et/ou un soulagement de plus de 50 % par EN, 50/ 100 à l’EVA de soulagement et/ou supérieur à « un peu amélioré » au CGI patient (cf. Annexe 2) ; – et un sentiment de soulagement et d’amélioration par la patiente ; – et activités quotidiennes ou professionnelles non limitées par la douleur. L’inefficacité d’un traitement est définie à posologie maximale bien tolérée par : – absence de diminution de l’EVA ou EN de plus de 20/100 patientes (2 sur 10 patientes) ; – ou diminution de 1 point sur 4 à l’EVS ; – ou absence de soulagement à l’EVA, l’EN ou l’EVS de soulagement, ou inférieure ou égale à « absence de soulagement » au CGI [33] ; – ou douleur insomniante ; – ou gênante sur les activités quotidiennes. L’efficacité partielle est définie par un résultat intermédiaire entre l’efficacité et l’inefficacité du traitement. Recommandations Conduite du traitement (accord d’experts) : il est recommandé : – d’expliquer et de valider avec la patiente et sa famille des objectifs thérapeutiques réalistes concernant l’intensité de la douleur, l’état thymique, l’activité physique ; Conduite du traitement Il est recommandé (accords d’experts) : – d’expliquer et de valider avec la patiente (et/ou sa famille) des objectifs thérapeutiques réalistes concernant l’intensité de la douleur, l’état thymique, l’activité physique ; – d’expliquer la nature des traitements et leur indication pour les douleurs neuropathiques, notamment pour les antidépresseurs et les antiépileptiques ; – d’expliquer la conduite du traitement et le délai d’efficacité ; – d’expliquer les effets secondaires les plus fréquents et de préciser la conduite à tenir en cas de mauvaise tolérance : modalités d’arrêt, coordonnées des personnes ressources. D’évaluer régulièrement les effets secondaires (iatrogénie de types A et B) ; – de commencer chaque traitement à faibles doses et d’augmenter la posologie par paliers, en fonction de l’efficacité et des effets secondaires, notamment chez les personnes âgées, grabataires, cachectiques, les patients dénutris, insuffisants rénaux et hépatiques (cf. recommandations « iatrogénie ») ; – de contrôler l’efficacité du traitement antalgique prescrit au bout de sept jours et à 15 jours et une fois par mois ; – en cas de disparition totale de la douleur et de disparition des troubles de la sensibilité d’interrompre le traitement en le diminuant par palier progressif de 50 % et en surveillant l’apparition d’un rebond algique ou de syndrome de sevrage pour le tramadol et les opioı̈des forts. – d’expliquer la nature des traitements et leur indication pour les douleurs neuropathiques, notamment pour les antidépresseurs et les antiépileptiques ; – d’expliquer la conduite du traitement et le délai d’efficacité ; – d’expliquer les effets secondaires les plus fréquents et de préciser la conduite à tenir en cas de mauvaise tolérance : modalités d’arrêt, coordonnées des personnes ressources ; – d’évaluer régulièrement les effets secondaires (iatrogénie de type A et B) ; – de commencer chaque traitement à faibles doses et d’augmenter la posologie par paliers, en fonction de l’efficacité et des effets secondaires, notamment chez les personnes âgées, grabataires, cachectiques, les patients dénutris, insuffisants rénaux et hépatiques (cf. recommandations « iatrogénie ») ; – de contrôler l’efficacité du traitement antalgique prescrit au bout de sept jours et à 15 jours et une fois par mois ; – de diminuer le traitement par palier progressif de 50 % en surveillant l’apparition d’un rebond algique ou d’un syndrome de sevrage pour le tramadol et les opioı̈des forts, en cas de disparition totale de la douleur et de disparition des troubles de la sensibilité ; – une monothérapie est recommandée en première intention en prenant en compte l’efficacité de la molécule, le statut tumoral, le statut du patient et ses comorbidités. ARBRE DECISIONNEL : ACCORD D’EXPERTS SDC préexistant,névrome, sémiologie atypique, indic de neurostimulation, indic de gestes interventionnelles, comorbidité psychiatriques sévères , abus médicamenteux Phase tumorale justifiant d’un palier III Oxycodone ou morphine EFFICACE : suivi et réévaluation Phase de remission et douleur mixte ou phase tumorale justifiant d’un palier II DOULEUR NEUROPATHIQUE PURE Problème de prise de poids Tramadol EFFICACE : suivi et réévaluation Prégabaline ou gabapentine Tca: amitrypline, imipramine,tofranil Rotation du traitement de première intention en monothérapie PARTIELLEMENT EFFICACE STRUCTURE SPECIALISEE DE PRISE EN CHARGE DE LA DOULEUR Arbre décisionnel : accord d’experts Dépression, migraine, céphalée de tension MAL TOLERE OU INNEFICACE A DOSE MAX PARTIELLEMENT EFFICACE Bithérapie (sans associer TCA-Tramadol) Insuffisance cardiaque, B.A.V, glaucome a angle fermé, personnes âgées MAL TOLERE OU INNEFICACE A DOSE MAX RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 663 664 ONCOLOG IE Algorithme décisionnel (accord d’experts) : – si syndrome douloureux chronique préexistant et/ou névrome, et/ou sémiologie atypique, et/ou indication de neurostimulation, et/ou indication de gestes interventionnels antalgiques, et/ou contreindication ou mauvaise tolérance ou efficacité insuffisante des traitements de première intention, et/ou comorbidités psychiatriques sévères, et/ou abus médicamenteux, et/ou insuffisance rénale ou hépatique, il est recommandé d’adresser la patiente à une structure spécialisée dans l’évaluation et le traitement de la douleur ; – si douleur neuropathique associée à d’autres douleurs non neuropathiques locorégionales ou générales : patiente en rémission : tramadol ; patiente en phase tumorale : tramadol si douleur justifiant un palier II ou opioı̈des ; forts (oxycodone ou morphine) si douleur nociceptive nécessitant un palier III ; – si douleurs neuropathiques sans douleurs non neuropathiques associées (douleurs neuropathiques pures) : si dépression, migraine, céphalée de tension : amitriptyline ou imipramine ou tofranil ; si patiente épileptique, âgée, glaucome à angle fermé, insuffisance cardiaque, bloc ; auriculoventriculaire de haut grade : prégabaline ou gabapentine ; si troubles anxieux : prégabaline ; si patiente obèse ou n’acceptant la possible prise de poids sous tricycliques, gabapentine, prégabaline : tramadol ; – si efficacité insuffisante du traitement de première ligne : associer un autre traitement de première ligne en évitant l’association tramadol–tricycliques et tramadol–antidépresseurs tricycliques et IRS ou IRS–NA ; – si inefficacité, contre-indication ou mauvaise tolérance du traitement de première ligne : arrêt du traitement et proposer un autre traitement de première intention ; – si deuxième traitement prescrit inefficace ou effets indésirables ou contre-indication : adresser le patient à une consultation spécialisée ; – si douleurs mononeuropathiques et soulagement insuffisant par traitement per os : lidocaı̈ne en emplâtre (hors AMM). Si inefficace ou mal toléré et allodynie non soulagée : capsaı̈cine 0,025 à 0,075 %. Le soulagement, l’inefficacité de soulagement et l’efficacité partielle sont définis par le groupe de travail en fonction des critères suivants (accords d’experts) : – l’efficacité d’un traitement est définie par : une douleur habituelle d’intensité faible : inférieure à 30/100 (3/10) par EVA, EN ou 1/4 par EVS et/ou crises douloureuses rares (moins de deux à trois par jour) et douleur non insomniante, et/ou un soulagement de plus de 50 % par EN, 50/100 EVA de soulagement supérieur à « un peu amélioré » au CGI patient (cf. Annexe 2), et un sentiment de soulagement et d’amélioration par la patiente, et activités quotidiennes ou professionnelles non limitées par la douleur. – l’inefficacité d’un traitement est définie à posologie maximale bien tolérée par : absence de diminution de l’EVA ou EN de plus de 20/100 patientes (deux sur dix patientes) ou diminution de 1 point sur 4 à l’EVS, ou absence de soulagement à l’EVA, l’EN ou l’EVS de soulagement, ou inférieure ou égale à « absence de soulagement » au CGI ou douleur insomniante, ou gênante sur les activités quotidiennes ; – l’efficacité partielle est définie par un résultat intermédiaire entre l’efficacité et l’inefficacité du traitement. Traitement non médicamenteux (accord d’experts) : – il est recommandé de proposer un espace de soutien et d’é laboration des difficulté s ressenties ; – il est recommandé de proposer une psychothérapie et/ou un traitement médicamenteux au cas par cas (cf. recommandations « psychooncologie ») ; – il est recommandé de proposer une rééducation par kinésithérapeute si lymphœdème du bras, atteinte de la mobilité de l’épaule, troubles de la marche et troubles proprioceptives ; – il est recommandé d’évaluer la situation sociale et financière de la patiente et de proposer l’aide d’une assistante sociale en cas de difficultés. Liste des abréviations : NICB, névralgie intercostobrachiale ; EVA, échelle visuelle analogique ; EVS, échelle verbale simple ; EN : échelle numérique ; BPI, Brief Pain Inventory ; ROT, réflexes ostéotendineux ; NPTI, neuropathie périphérique induite par les taxanes ; TCA, antidépresseurs tricycliques ; AMM, autorisation de mise sur le marché ; NNT, number needed to treat (nombre de patients à traiter pour en soulager de 50 %) ; NNH, number needed to harm (nombre de patients traités pour un arrêt pour effets indésirables majeurs) ; IRS : inhibiteur de la recapture de la sérotonine ; IRS–NA, inhibiteur de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline ; SDC, syndrome douloureux chronique Annexe 2 Annexe 1 Tableau 1. Échelle DN4 : l’échelle DN4 est une échelle diagnostic des douleurs neuropathiques. Cette échelle a été validée en français par une étude multicentrique [13]. Elle est facile à utiliser et de passation rapide. La douleur neuropathique est affirmée si le score est supérieur ou égal à 4/10 Échelle DN4 Oui 1) La douleur présente-t-elle les caractéristiques suivantes ? Brûlures Sensation de froid douloureuse Décharges électriques 2) La douleur est-elle associée dans la même région à un ou plusieurs des symptômes suivants ? Fourmillements Picotements Engourdissements Démangeaisons 3) La douleur est-elle localisée dans un territoire où l’examen met en évidence ? Hypoesthésie au tact Hypoesthésie à la piqûre 4) La douleur est-elle provoquée ou augmentée par ? Le frottement 1 1 1 Non 0 0 0 Tableau 10. AMM des médicaments proposés dans le traitement des douleurs neuropathiques (d’après Vidal en ligne 2009) DCI AMM (source Vidal en ligne 17 avril 2009) Amitriptyline Douleur neuropathique périphérique de l’adulte Douleur neuropathique de l’adulte Douleur neuropathique de l’adulte Douleur neuropathique diabétique périphérique chez l’adulte Douleur neuropathique périphérique Douleur neuropathique périphérique et centrale Douleur neuropathique de l’adulte, douleur de la névralgie du trijumeau et du glossopharyngien Douleurs persistantes intenses ou rebelles aux autres analgésiques, en particulier douleurs d’origine cancéreuse Douleurs chroniques d’origine cancéreuse, intenses ou rebelles aux antalgiques de niveau plus faible, chez l’adulte (à partir de 18 ans) Traitement des douleurs modérées à intense de l’adulte Traitement symptomatique des douleurs neuropathiques postzostériennes (DPZ) Douleurs articulaires mineures Imipramine Clomipramine Duloxétine Gabapentine Prégabaline Carbamazépine 1 1 1 1 0 0 0 0 Sulfate de morphine Oxycodone 1 1 0 0 Tramadol 1 0 Coter 1 si l’item est présent et 0 s’il est absent. Tableau 2. Sensibilité et spécificité de l’échelle DN4 Bouhassira et al. [14] Score Sensibilité (%) Spécificité (%) 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 100 98,8 95,1 90,3 82,9 69,5 56,1 35,4 15,8 8,5 2,4 0 37,7 59,4 76,8 89,9 92,7 98,5 98,6 100 100 100 La spécificité s’accroı̂t si le score augmente (cf. Tableau 2). Il est nécessaire en cas de douleurs multiples de coter chaque douleur séparément. Bien que le score DN4 n’ait pas été validé spécifiquement chez des patientes présentant une NICB, les douleurs les plus fréquentes dans ces douleurs correspondent aux items du DN4 [20,82]. L’hypoesthésie est fréquente dans la région tricipitale [140]. L’allodynie mécanique du creux axillaire est un des critères principaux dans la définition de Watson et al. [139]. Emplâtre xylocaı̈ne Capsaı̈cine Venlafaxine Maprotiline Valproate sodium Clonazépam Topiramate Oxacarbazépine Lamotrigine Non Non Non Non Non Non Non Annexe 3 Échelle CGI – patient Coter avec le patient à propos de sa douleur : énormément améliorée, beaucoup améliorée, un peu améliorée, aucun changement, un peu aggravée, beaucoup aggravée, énormément aggravée [33]. Références 1. Abdullah TI, Iddon J, Barr L, et al. (1998) Prospective randomized controlled trial of preservation of the intercostobrachial nerve during axillary node clearance for breast cancer. Br J Surg 85(10): 1443-5 2. Amichetti M, Caffo O (2003) Pain after quadrantectomy and radiotherapy for early-stage breast cancer: incidence, characteristics RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 665 ONCOLOG IE 666 and influence on quality of life. Results from a retrospective study. Oncology 65(1): 23-8 3. Arbaiza D, Vidal O (2007) Tramadol in the treatment of neuropathic cancer pain: a double blind, placebo-controlled study. 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Cependant, des effets indésirables, voire délétères, peuvent apparaı̂tre dans certains cas. En prenant la décision d’utiliser une prévention par G-CSF, les oncologues doivent prendre en compte non seulement le schéma optimal de chimiothérapie, mais aussi les facteurs de risque individuels des pts et le but du traitement : curatif, palliatif, préventif ou symptomatique. C’est pourquoi, les grandes sociétés savantes internationales ont émis des recommandations sur leur utilisation. RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 669 670 Mots clés : Neutropénie fébrile – Toxicité des chimiothérapies – G-CSF reconnus sont les suivants (d’après le dictionnaire Vidal 2009). Filgrastim ONCOLOG IE Introduction La neutropénie fébrile (NF) est associée à une morbidité et à une mortalité importantes, et à un coût élevé pour la société. La NF est encore une menace majeure chez les patients (pts) sous chimiothérapie entraı̂nant une perte de la qualité de vie. Un accroissement de la mortalité pouvant atteindre 9,5 % est constaté dans les suites d’une hospitalisation pour NF. Plusieurs facteurs de risque ont été identifiés afin de prévoir le risque individuel de NF. Ces facteurs de risque sont liés au pt : âge, état général, mais aussi à la maladie sous-jacente (extension, comorbidités), ainsi qu’au protocole de chimiothérapie utilisé (Tableau 1). Neutropénie et NF peuvent entraı̂ner un retard d’administration et/ou une réduction de dose de la chimiothérapie, et donc influer sur l’évolution de la maladie. Pour Kuderer et al., la mortalité globale hospitalière est de 9,5 % ; les pts sans comorbidité majeure ont un risque de mortalité de 2,6 %, alors qu’un facteur de comorbidité majeure est associé à un risque de 10,3 %, et plus d’une comorbidité majeure entraı̂ne un risque de mortalité d’au moins 21,4 % [13]. Le coût pour la société est élevé [1,2,13,15,18,20] : en effet, la durée de séjour moyenne était de 11,5 jours et le coût moyen de 19 110 $ par épisode de NF, les pts hospitalisés plus de dix jours (35 % des pts) représentant 78 % du coût total. Les facteurs de risque majeurs de mortalité chez les pts hospitalisés sont les infections fungiques, les infections à BG–, pneumonies et autres pathologies pulmonaires, et les affections cérébrales, rénales et hépatiques. État des lieux Trois produits sont actuellement disponibles en France : le filgrastim, le lénograstim et le pegfilgrastim (peg), dont les modes d’action et les indications Le filgrastim, r-metHuG-CSF, facteur recombinant humain, est une glycoprotéine qui régule la production et la libération des polynucléaires neutrophiles fonctionnels à partir de la moelle osseuse. Il est indiqué dans la réduction de la durée des neutropénies et de l’incidence des NF chez les pts traités par une chimiothérapie cytotoxique pour une pathologie maligne (à l’exception des leucémies myéloı̈des chroniques et des syndromes myélodysplasiques), et dans la réduction de la durée des neutropénies chez les pts recevant une thérapie myélosuppressive suivie de greffe de moelle et présentant un risque accru de neutropénie sévère prolongée et dans la mobilisation de cellules souches progénitrices (CSP) dans le sang circulant. Pharmacocinétique Il existe une corrélation linéaire positive entre la dose de filgrastim administrée par voie sous-cutanée ou par voie intraveineuse et la concentration sérique. Après administration sous-cutanée aux doses recommandées, les concentrations sériques de filgrastim sont maintenues au-dessus de 10 ng/ml pendant 8 à 16 heures. Lénograstim Le lénograstim, rHu G-CSF, est une glycoprotéine recombinante équivalente au granulocyte stimulating factor humain, isolé de CHU-2 une lignée cellulaire humaine. Il est produit par la technique de l’ADN recombinant sur des cellules d’ovaire de hamster chinois. Il est indiqué pour la réduction de la durée des neutropénies chez les pts (avec néoplasie non myéloı̈de) recevant une thérapie myélosuppressive suivie de greffe de moelle et présentant un risque accru de neutropénies sévères et prolongées, dans la réduction de la durée des neutropénies sévères et des complications associées chez les pts au cours des chimiothérapies établies, connues pour être associées à une Tableau 1. Toxicité des chimiothérapies utilisées dans le cancer du sein, protocoles de chimiothérapie associés à un risque de NF supérieur à 20 % (d’après Zielinski et al.) [26] Protocole de chimiothérapie situation de traitement Doses (mg/m2) Taux de NF (%) TAC-adjuvant ET (T = doc)-adjuvant AT (T = doc)-métastatique 1re ligne AT (T = pac)-métastatique 1re ligne A > T (T = doc)-métastatique 1re ligne Vino/F (FUN)-métastatique 2e ligne 75-50-500 q3sem 75-75 q3sem 50-75 q3sem 60-175 q3sem 75 q3sem > 100 q3sem 25 (j1 + j5)-750 (j1-j5) q3sem 25 31 33-48 32 29 22 A = doxorubicine ; C = cyclophosphamide ; doc = docétaxel ; E = épirubicine ; F = 5-fluoro-uracile ; pac = paclitaxel ; vino = vinorelbine. incidence significative de NF et dans la mobilisation des cellules souches hématopoı̈étiques dans le sang périphérique. Pharmacocinétique Le lénograstim est un facteur qui stimule les progéniteurs des polynucléaires neutrophiles, comme cela a été démontré par l’augmentation dans le sang périphérique du nombre de CFU-S et CFU-GM. Il entraı̂ne une augmentation notable du nombre des polynucléaires neutrophiles du sang périphérique dans les 24 heures suivant son administration. Cette élévation des polynucléaires neutrophiles est dose-dépendante entre 1 et 10 mg/kg par jour. L’utilisation du lénograstim chez les pts qui reçoivent une greffe de moelle ou qui sont traités par chimiothérapie cytotoxique entraı̂ne une réduction significative de la durée de la neutropénie et de ses complications associées. Peg Il est produit par la technique de l’ADN recombinant, à partir d’une souche d’Escherichia coli (K-12). Il est indiqué dans la réduction de la durée des neutropénies et de l’incidence des NF chez les pts traités par une chimiothérapie cytotoxique pour une pathologie maligne (à l’exception des leucémies myéloı̈des chroniques et des syndromes myélodysplasiques). Pharmacocinétique Après administration sous-cutanée unique de peg, le pic de concentration sérique apparaı̂t entre 16 et 120 heures après l’injection, et les concentrations sériques se maintiennent pendant la période de neutropénie qui suit la chimiothérapie myélosuppressive. L’élimination de peg n’est pas linéaire en fonction de la dose ; la clairance sérique de peg diminue lorsque les doses augmentent. La clairance étant autorégulée, la concentration sérique de peg diminue rapidement dès le début de la récupération en polynucléaires neutrophiles. Des données limitées montrent que les paramètres pharmacocinétiques du peg ne sont pas modifiés chez les sujets âgés (> 65 ans). Rappel des recommandations émises par les sociétés savantes, EORTC, ASCO, NCCN Trois études importantes – celles de Timmer-Bonte et al., de Vogel et al. et de Citron et al. – ont été notamment à l’origine d’une mise à jour des recommandations sur l’utilisation des facteurs de croissance granulocytaires (G-CSF) en oncologie [5,22,23] (Tableaux 2 et 3). En 2005 et en 2006, le comité de mise à jour de l’ASCO [20] a considéré que la diminution de la NF est Recommandation EORTC et ASCO pour l'utilisation des G-CSF dans la prise en charge de la NF Tableau 1 Prévisibilité du risque de NF selon les protocoles de chimiothérapie planifiés - Le risque de NF devrait être évalué avant chaque cycle de chimiothérapie - Les protocoles de CT dose-dense devrait toujours être considérés comme à haut risque de NF (risque ≥ 20 %)1 - Les patients > 65 ans recevant une chimiothérapie curative pour LMNH doivent être considérés à haut risque de NF2 NF risque ≥ 20 % NF risque 10-20 % NF risque < 10 % Facteur individuel de NF Prophylaxie par G-CSF recommandée - Age ≥ 65 ans1,2 - Mauvais état général2 - Maladie avancées2 - Co-morbidités importantes2 - Cytopénies par envahissement tumoral médulaire - Sexe fémini Risque majeur de NF ≥ 20 % - Hémoglobine < 12 g/dL1 - Mauvais état nutritionnel1,2 - Pas d'antibio prophylaxie1 - Association radio chimio2 - Antécédant de NF1,2 - Bessures ouvertes ou infections actives2 G-CSF pas d'indication Risque majeur de NF < 20 % Cet algorithme représente une interprétation combinée des recommandation ASCO et EORTC 2006 sur les G-CSF. Les facteurs ci-dessus ont une évidence de niveau I/II selon l'EORTC. 1. Aapro MS et al. Eur J Cancer 2006;42:2433-2453 2. Smith TJ et al. J Clin Oncol 2006;24:3187-3205 LMNH : Lymphomes Malins Non-Hodgkiniens RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 671 672 ONCOLOG IE Tableau 3. Comparaison des recommandations des sociétés savantes Résumé des recommandations EORTCb ASCOc NCCNd Risque NF supérieur ou égal à 20 %, prévention primaire par G-CSF Évaluation des facteurs individuels de risque de NF G-CSF pour maintenir la dose-intensité si la diminution ou d’autres alternatives sont péjoratives sur le bénéfice attendu Protocoles de CT dose-dense, lorsque leur bénéfice est validé ou dans le cadre d’essais thérapeutiques G-CSF en traitement curatif des NF, patients à haut risque G-CSF, présentation et dosage Prévention secondaire par G-CSF V V V V V V V V X V V X V V Xa V V V V V V a b c d Antécédent de NF = facteur de risque d’un nouvel épisode de NF : prévention secondaire à envisager. Aapro et al. [1]. Smith et al. [20]. NCCN [15]. un objectif important qui justifie l’utilisation des G-CSF, lorsque le risque de NF est d’environ 20 % et qu’il n’existe pas d’alternative thérapeutique permettant de s’abstenir de G-CSF. La prévention primaire est recommandée chez les pts à risque en fonction de l’âge, des antécédents médicaux, des caractéristiques de la maladie et de la myélotoxicité de la chimiothérapie. Les G-CSF permettent une augmentation modeste ou modérée de la dose-densité ou de la dose-intensité des protocoles de CT. Des protocoles dose-dense ne doivent être effectués que selon des essais cliniques bien conduits ou si des données sur leur efficacité sont prouvées. Chez les pts âgés de 65 ans ou plus, traités pour des lymphomes diffus agressifs de façon curative par CHOP ou protocoles plus agressifs, un traitement préventif par G-CSF est recommandé pour réduire l’incidence des NF et des infections. Dans leur méta-analyse, Kuderer et al. confirment le bénéfice de la prophylaxie primaire par G-CSF (diminution du risque relatif [RR] de NF de 46 % [p < 0,001], diminution du RR de mortalité infectieuse de 45 % [p = 0,018]) [14]. L’EORTC [1,18], en 2006, a présenté ses recommandations générales sur l’utilisation des G-CSF et une publication, en 2008 [26], dans le cadre du traitement du cancer du sein. Les facteurs de risque liés au pt, augmentant l’incidence de la NF, doivent être pris en compte dans l’évaluation globale du risque de NF avant chaque cycle de chimiothérapie : âge supérieur à 65 ans, stade avancé de la maladie, antécédents de NF et absence d’utilisation de G-CSF et d’antibioprophylaxie : recommandation de grade B ; il convient de considérer le risque élevé de NF lors de l’utilisation de certains protocoles de chimiothérapie par exemple : CHOP-21, TAC : recommandation de grades A–B (en fonction de la preuve apportée pour chaque protocole de chimiothérapie). L’EORTC ajoute que l’utilisation sans discernement d’une antibioprophylaxie n’est pas recommandée et propose les recommandations suivantes. Un traitement préventif par G-CSF devrait être utilisé en support de la chimiothérapie dans les circonstances où les stratégies de dose-densité ou de dose-intensité de chimiothérapie apportent des gains de survie, et si les réductions de dose-intensité ou de dose-densité sont des facteurs de mauvais pronostic. Par exemple : traitement adjuvant ou potentiellement curatif ou quand l’objectif du traitement est de prolonger la survie. Dans le cas où ce n’est pas indispensable, l’utilisation d’une chimiothérapie moins myélosuppressive ou d’une modification de la dose, ou du schéma thérapeutique doivent être envisagées (recommandation de grade A). Le traitement préventif par G-CSF est recommandé si le pt présente un risque global de NF supérieur ou égal à 20 %. Lors de l’utilisation de protocoles de chimiothérapie s’accompagnant d’un risque de NF de 10 à 20 %, une attention particulière sera donnée à l’évaluation des caractéristiques du pt, susceptibles d’augmenter le risque global de NF (recommandation de grade A). Le traitement par G-CSF chez les sujets présentant une NF confirmée n’est indiqué que dans des circonstances particulières, lorsque les pts ne répondent pas à un traitement antibiotique bien conduit et dans le cas d’infections engageant le pronostic vital (septicémie sévère ou choc septique par exemple). L’utilisation est à envisager chez des pts présentant un risque plus important de complications infectieuses et ayant des facteurs pronostiques prédictifs d’une évolution clinique défavorable (recommandation de grade A). Qui doit recevoir un traitement par G-CSF ? Les différentes recommandations officielles conviennent que la prophylaxie primaire par G-CSF devrait être proposée lorsque le risque global de NF, en raison du schéma thérapeutique et des facteurs liés au pt, est supérieur ou égal à 20 %. Avant 2006, la prophylaxie primaire par G-CSF était recommandée pour des protocoles de chimiothérapie associés à un niveau de NF supérieur ou égal à 40 %. La National Comprehensive Cancer Network (NCCN), en janvier 2009, recommande l’utilisation de G-GSF chez les pts âgés, notamment de plus de 65 ans, en cas d’antécédent de chimiothérapie ou de radiothérapie, de neutropénie préexistante, d’envahissement médullaire ou de conditions préexistantes : infection/ blessure ouvertes, chirurgie récente, altération de l’état général, insuffisance rénale, bilan hépatique perturbé, en particulier élévation de la bilirubine. Beaucoup de ces facteurs sont, bien sûr, communs aux trois sociétés, comme l’âge supérieur ou égal à 65 ans, un mauvais état général, un antécédent de NF, la présence de comorbidités sérieuses (maladie hépatique, rénale ou cardiovasculaire), le stade avancé de la maladie, un mauvais état nutritionnel, un antécédent de traitement intensif, dont une radiothérapie étendue, l’envahissement médullaire, la présence de plaies ouvertes ou d’infections non contrôlées, le sexe féminin. Modalités d’administration Pour l’ASCO, les G-CSF doivent être administrés 24 à 72 heures après l’administration de la chimiothérapie cytotoxique et poursuivis jusqu’à ce que le taux de polynucléaires neutrophiles atteigne 2 à 3 × 109/l [20]. Le peg doit être administré en dose unique, 24 heures après la fin de la chimiothérapie. Chez l’adulte, les doses de G-CSF sont de 5 mg/kg par jour (filgrastim, lénograstim) et de 6 mg en une seule injection s.c. par cycle pour le peg. Quel G-CSF choisir ? Pour l’EORTC, le filgrastim, le lénograstim et le peg sont cliniquement efficaces, et leur utilisation est recommandée, lorsqu’elle est indiquée, afin de prévenir la NF et ses éventuelles complications [1,18]. Certaines études suggèrent que le taux de NF pourrait être plus faible chez les pts traités par peg en comparaison à ceux traités par filgrastim [7,8,11,12,24,25]. Rappelons l’étude princeps de Vogel et al. sur le cancer du sein avec le peg, dont l’objectif était la réduction de l’incidence de la NF chez des ptes atteintes de cancer du sein (stades II à IV), les résultats ont montré une diminution de 94 % de l’incidence de la NF sur l’ensemble des cycles, moins d’hospitalisations liées à la NF (14 % sous placebo vs 1 % sous peg [p < 0,001]) et un moindre recours aux anti-infectieux, 10 % sous placebo vs 2 % sous peg (p < 0,001) [23]. Athar et al. ont étudié l’incidence de la NF selon le jour de l’administration du peg [3]. Basées sur quelques petites études dans le cancer du sein, et le lymphome non hodgkinien montrant qu’il existe un risque accru de NF si le peg est utilisé le même jour que la chimiothérapie plutôt que 24 heures après, 64 injections ont été réalisées au cours de 212 cycles de chimiothérapie. Le sex-ratio était de 97 % d’hommes pour 3 % de femmes, l’âge moyen étant de 70 ans. Les pathologies dont étaient porteurs les pts consistaient en lymphomes malins non hodgkinien, 42 % ; en carcinomes bronchiques à petites cellules, 18 % ; en cancers bronchiques non à petites cellules, 14 % et en maladie de Hodgkin, en adénocarcinomes d’origine indéterminée et en myélomes multiples, 4 % chacun. Dix-sept pts (27 %) avaient été traités par radiothérapie antérieure ou concomitante. Le pegfilgrastim a été administré le j1 de la chimiothérapie dans 112 cycles, soit 53 % et après le j1 pour 100 cycles, soit 47 %. L’incidence de la NF a été de 5 sur 112, soit 4,5 % lorsque le peg a été administré à j1 et 5 % lorsqu’il a été administré ultérieurement. Conclusion : pas de différence significative selon le jour d’administration. Hartmann et al. ont présenté une étude randomisée concernant l’utilisation du peg au j4 de la chimiothérapie chez des pts traités pour lymphome malin non hodgkinien diffus à larges cellules par R–CHOP comparée à l’administration à j2 (pts âgés) qui a montré, chez 103 pts évaluables, 51 pts recevant le peg en j2 et 52 en j4, qu’il y avait moins de neutropénies, moins d’infections et moins de décès associés au traitement chez les pts recevant le traitement à j4 au lieu de j2 [9]. Cela reste à démontrer dans le cancer du sein. Le filgrastim, le lénograstim et le peg sont cliniquement efficaces, et l’EORTC recommande l’utilisation de l’un ou l’autre de ces trois produits, lorsqu’elle est indiquée, afin de prévenir la NF et ses éventuelles complications. Il existe peu de différences d’importance clinique entre les trois produits (recommandation de grade A). La NCCN (myeloid growth factors) a mis à jour ses recommandations en janvier 2009. Les indications sont sensiblement les mêmes que pour les deux autres sociétés.Tableau 2. Cet algorithme représente une interprétation combinée des recommandations de l’ASCO et de l’EORTC de 2006. Les facteurs les plus importants ont une évidence de niveau I/II selon l’EORTC. Limites et risques Hémopathies induites Les facteurs de croissance donnés avec les chimiothérapies seraient associés à un risque accru d’hémopathies. Un article paru dans le JNCI et relayé par la grande presse américaine a été à l’origine d’une polémique [10]. Les femmes traitées par chimiothérapie pour un cancer du sein, qui reçoivent des facteurs de croissance, RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 673 674 ONCOLOG IE présenteraient un risque accru de développer une leucémie myéloblastique aiguë ou un syndrome myélodysplasique. Selon les auteurs, le risque absolu est faible, mais il doit être pris en considération lors des décisions thérapeutiques. Comme le nombre de femmes traitées pour un cancer du sein par chimiothérapie adjuvante avec prévention par G-CSF augmente, Hershman et al. ont cherché à déterminer l’association entre ces facteurs de croissance et le risque de leucémie myéloblastique aiguë et de syndrome myélodysplasique chez les femmes traitées pour un cancer du sein de stade précoce par chimiothérapie [10]. En utilisant les données du programme SEER (surveillance, epidemiology and end results), ils ont identifié 5 510 femmes, âgées de 65 ans et plus, traitées par chimiothérapie, entre 1991 et 1999. Au total, 906 ptes (16 %) avaient été traitées par au moins une cure de G-CSF (832), de GM-CSF (29) ou des deux (49). Parmi elles, 16 ptes (1,77 %) ont développé une leucémie myéloblastique aiguë ou un syndrome myélodysplasique contre 48 (1,04 %) des 4 604 femmes n’en ayant pas reçu. Le risque était donc doublé en cas de prise de GM-CSF ou de G-CSF. « Notre étude démontre que le surrisque de leucémie myéloblastique aiguë ou de syndrome myélodysplasique associé à la chimiothérapie adjuvante pourrait être encore augmenté par l’utilisation concomitante de ces facteurs de croissance » ajoutent les auteurs. Toutefois, ils notent que le risque absolu reste faible. « Même si cette association est confirmée, les bénéfices des facteurs de croissance sont bien supérieurs aux risques. Ils concluent que les facteurs de croissance ne doivent pas être considérés comme dénués de tout risque ». Douleurs osseuses Elles sont fréquentes après administration de G-CSF, souvent modérées, elles sont en général bien contrôlées par administration de paracétamol ou d’antalgiques de niveau 2. Cependant, parfois, on doit changer de produit lors du cycle suivant. Pour Papaldo et al., lorsque l’on compare l’injection d’une dose standard de G-CSF avec des schémas d’administration moins fréquents, on peut également prévenir la survenue de la NF et des retards d’administration de la CT et diminuer ainsi les douleurs osseuses et la fièvre [16]. Cet essai n’était pas randomisé, il s’agit d’une étude basée sur des observations, dont les résultats devraient donc être considérés comme générateurs d’hypothèses. Comme souligné par Djulbegovic et al., comme l’incertitude préjudice/bénéfice des options de traitement alternatives est élevée, s’ils sont prouvés aussi efficaces, des injections de G-CSF moins fréquentes pourraient avoir un impact significatif sur le coût de traitement [6]. G-CSF et augmentation du CA-15/3 Plusieurs publications ont rapporté l’élévation du CA 15/3 associée à l’administration de G-CSF. Le CA-15/3 est un marqueur tumoral régulièrement utilisé dans la surveillance des ptes traitées pour cancer du sein, en particulier en phase avancée ou métastatique. Il est un épitope de la mucine MUC1. Ces ptes sont souvent traitées par chimiothérapie et susceptibles de recevoir en soutien du G-CSF. Briasoulis et al. ont suivi 57 ptes opérées d’un cancer du sein de stades II à III, traitées par chimiothérapie adjuvante densifiée avec administration de G-CSF [4]. La valeur limite supérieure de la normale avec le test utilisé est de 31,3 U/ml. Il a été observé une augmentation de plus de 100 % du taux de Ca-15/3, statistiquement significative, par rapport à la valeur préchimiothérapique chez toutes les ptes. Le taux retombe ensuite au niveau préthérapeutique dans les deux mois suivant la chimiothérapie administrée avec le G-CSF. Après un suivi médian de 32 mois, dix ptes ont rechuté : leur valeur moyenne de CA-15/3 avant traitement est de 17 U/ml, avec une augmentation maximale de 142 % sous traitement avec G-CSF et un retour à une moyenne de 17 U/ml dans les deux mois suivant la fin de l’administration du G-CSF. Le taux de CA-15/3 de ces ptes, lors du traitement adjuvant, n’est pas statistiquement différent de celui des ptes vivantes sans rechute lors de ce même traitement adjuvant. Cette augmentation du CA-15/3, lors d’un traitement par G-CSF, est liée à une augmentation de l’expression de MUC1 par les neutrophiles [17]. Saura et al. ont étudié 74 ptes traitées selon un schéma dose-dense pour cancer du sein avec ou sans G-CSF : 4 × AC suivis de 4 × paclitaxel toutes les deux semaines avec G-CSF (cohorte A = pegfilgrastim, cohorte B = filgrastim) ou bien suivant un schéma toutes les trois semaines sans G-CSF (cohorte C) [19]. Les taux de CA-15/3 posttraitement ont été comparés. Ils constatent une différence significative dans les taux de CA-15/3 entre les bras A et C, mais pas de différence entre les bras A et B. Les auteurs suggèrent que ces élévations du CA-15/3 pourraient être dues à une augmentation de l’expression du gène MUC1 par les neutrophiles dans les groupes recevant du G-CSF. Cette élévation est transitoire et ne devrait pas entraı̂ner d’inquiétude chez le médecin et la pte. Qualité de vie L’impact des G-CSF sur la qualité de vie a été moins bien étudié. Thatcher et al. ont montré que la palliation des symptômes et la qualité de vie étaient identiques chez des pts traités pour cancer bronchique à petites cellules selon un schéma conventionnel toutes les trois semaines ou selon un protocole dose-intense tous les 15 jours avec support par G-CSF [21]. Des études complémentaires sont, bien sûr, nécessaires. Conclusion La NF est une complication fréquente des chimiothérapies. Elle est responsable d’une morbimortalité importante. Le bénéfice de l’utilisation des G-CSF semble acquis. Il est vrai que, depuis dix ans, les G-CSF ont permis une réduction importante de la survenue de neutropénies chimio-induites et, surtout, de la mortalité liée aux infections. Les grandes sociétés internationales ont émis des recommandations permettant de rationaliser leur utilisation. Références 1. Aapro MS, Cameron DA, Pettengell R, et al. (2006) EORTC guidelines for the use of granulocyte-colony stimulating factor to reduce the incidence of chemotherapy-induced febrile neutropenia in adult patients with lymphomas and solid tumors. Eur J Cancer 42(15): 2433-53 2. Adams JR, Angelotta C, Bennett CL (2006) When the risk of febrile neutropenia is 20%, prophylactic colony-stimulating factor use is clinically effective, but is it cost-effective? J Clin Oncol 24(19): 2975-7 3. Athar U, Rajan A, Gajra A, Lynch TP (2007) Incidence of febrile neutropenia (FN) is not altered by the day of administration of pegfilgrastim (peg). 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L’impact fonctionnel du syndrome palmoplantaire (appelé également érythrodysesthésie palmoplantaire [PPE]) est majeur et peut entraı̂ner, pour le patient, une perte complète d’autonomie lors des gestes de la vie courante aussi simples que marcher ou prendre un verre. Au-delà des chimiothérapies telles que les taxanes, le 5-FU ou les anthracyclines, les thérapies ciblées sont d’importantes pourvoyeuses de cette toxicité qui reste toujours d’actualité. Épidémiologie Substances en cause Chimiothérapies Trois grandes classes de chimiothérapies sont à l’origine d’une PPE. Les deux formes galéniques du 5-FU, orale ou intraveineuse, peuvent causer cet effet indésirable. La capécitabine notamment, dont le schéma initial était une administration 14 sur 21 jours à la posologie de 2 500 mg/m2 par jour, avait une incidence de grades 3 et 4 évaluée de 8 à 24 % [1,28]. Cette incidence importante de grades sévères de toxicité a amené les équipes à modifier très rapidement leurs schémas d’administration du produit. Le tégafur occasionne plus rarement ce syndrome. Le docétaxel est également en cause dans la survenue d’un syndrome palmoplantaire avec une incidence là encore dose-dépendante. À la posologie de 100 mg/m2, l’incidence d’une PPE est élevée (56 % des patients), avec 6 % de grades 3 et 4. À la dose de 75 mg/m2, l’incidence est plus faible, évaluée à 15 % dont 1 % de grades 3 et 4. La troisième grande classe de chimiothérapie employée dans la lutte contre le cancer du sein, et occasionnant un syndrome palmoplantaire, est celle de la doxorubicine liposomale pégylée [32]. La fréquence d’une PPE avec cette molécule est évaluée à 45 % dont moins d’1 % de grade 4. Là encore, peut-être en raison de l’expérience de la capécitabine, les équipes ont très rapidement réévalué les doses à administrer. Traitements ciblés Le lapatinib est reconnu pour entraı̂ner une atteinte cutanée comme les autres traitements ciblés. Autorisé en premier lieu dans le traitement du cancer du sein, il présente une toxicité importante à type de PPE, notamment. Cette toxicité propre, évaluée à 40 % des patients, est importante à connaı̂tre, puisque sa prescription est associée à la capécitabine [2,13]. Certains facteurs de risque sont connus pour majorer le risque de survenue d’une PPE [15,19,28]. La prescription associée de plusieurs substances anticancéreuses majore le risque de survenue d’un syndrome palmoplantaire, notamment pour le docétaxel et la capécitabine. La vinorelbine majore également le risque de PPE lié à la capécitabine. L’âge et la posologie sont les autres facteurs de risque retrouvés pour cette chimiothérapie orale. La dose et les traumatismes majorent la toxicité liée à la doxorubicine liposomale pégylée [22]. Classification des toxicités Deux classifications sont proposées pour évaluer et donner un grade de toxicité au syndrome palmoplantaire. La première est celle du National Cancer Institute, largement utilisée avec une description clinique associée à l’évaluation du retentissement sur l’activité quotidienne. La seconde, publiée par l’Organisation mondiale de la santé, s’attache beaucoup plus à une description précise de la présentation clinique et de l’impact douloureux du syndrome. Ces toxicités sont présentées dans le Tableau 1. Diagnostic Clinique La description clinique correspond à la définition de la PPE ou syndrome palmoplantaire. Il s’agit d’un érythème évolutif et extensif sur les paumes des mains et les plantes des pieds. Cette rougeur s’accompagne de douleurs à type de brûlures, de l’apparition de phlyctènes pouvant évoluer en bulles avec desquamation. La limitation fonctionnelle est classique dans ce syndrome avec un risque de perte d’autonomie et un retentissement social majeur pour les patients touchés. Hypothèses physiopathologiques L’hypothèse principale proposée de niveau 4C est une hyperexpression de la thymidine phosphorylase dans la couche basale de l’épiderme [10,16]. La faible expression palmaire de la dihydropyrimidine-déshydrogénase expliquerait également la prévalence palmaire de ce syndrome. L’histologie des tissus atteints a été évaluée sur un faible nombre de patients, limitant à un grade 4B le Tableau 1. Classification NCI et OMS (WHO) du syndrome palmoplantaire AE 1 2 3 4 NCI Minimal skin changes of dermatitis (erythema, peeling) with altered sensations (numbness, tingling, burning) that do not interfere with ADL Dysesthesia/paraesthesia tingling of hands and feet Skin changes present with accompanying pain interfering little with ADL; skin surface remains intact Ulcerative dermatitis or skin changes with severe pain interfering with ADL; tissue breakdown is evident (peeling, blisters, bleeding, edema Painfull erythema and swelling of palms and soles, periungual erythema and swelling – WHO Discomfort in holding objects and upon walking, painless swelling or erythema Desquamation, ulceration, blistering, severe pain AE = Adverse event; NCI = National Cancer Institute; WHO = World Health Organisation. niveau de preuve scientifique [12,26,31,32]. On retrouve lors de l’analyse tissulaire : pégylée est prescrite à 10 mg/m2 par semaine sans impact sur le bénéfice attendu. – une dégénérescence vacuolaire de la couche basale de l’épithélium ; Les règles hygiéniques sont largement retrouvées dans la pratique courante sans qu’il n’y ait de littérature abondante pour valider ces attitudes [11,19,21,32]. En raison du bon sens clinique et de l’expérience des produits, un accord de professionnels est proposé pour l’utilisation de ces règles. – une nécrose des kératinocytes ; – un œdème du derme papillaire ; – une infiltration lymphohystiocytaire ; – une infiltration périvasculaire de lymphocytes et d’éosinophiles ; – une syringométaplasie eccrine ; – un transport des substances par les glandes sudoripares palmoplantaires. Approche thérapeutique Pratique courante, niveaux de preuve De nombreuses propositions de traitements ont été testées depuis plusieurs années. Certaines ont été généralisées dans la pratique courante, d’autres font partie de conduites à tenir propres à certains services, quelques principes actifs, enfin, sont testés au travers d’études cliniques. L’adaptation de dose est largement retrouvée dans la littérature avec un niveau de preuve 2 (grade B) [3,7,8,14,21,27,29,32]. La modification de posologie consiste le plus souvent en une diminution de 25 % de la dose dès l’initiation du traitement, tel que l’a proposé l’équipe du MD Anderson [14]. La capécitabine est ainsi prescrite à 2 000 mg/m2 14 sur 21 jours au lieu des 2 500 mg/m2 initiaux, et la doxorubicine liposomale L’utilisation du froid, en prévention de la survenue d’une PPE, a été testée au cours d’études randomisées avec un niveau de preuve 2, recommandation de grade B [23,24,30]. L’effectif de ces études était malheureusement limité. Les moufles ont apporté un bénéfice lors des perfusions de docétaxel (effet non retrouvé pour les chaussons en raison d’une puissance trop faible de l’étude). L’utilisation d’un bandeau de poignet réfrigérant a été proposée avec bénéfice lors des traitements par doxorubicine liposomale pégylée. Les prises de corticoı̈des oraux ont un intérêt curatif, en limitant l’inflammation et le retentissement douloureux et fonctionnel d’une PPE [4,6,32]. Si le niveau de preuve est coté à 2 (grade B) pour la corticothérapie orale, elle n’a pas de validation pour leur application locale, classant la recommandation en grade C (niveau de preuve 4) [9]. L’utilisation de pommades appliquées localement, le plus souvent à base d’émollients, obtient un niveau de preuve 4, recommandation C. On retrouve l’utilisation de crèmes à la diphénhydramine ou des préparations à base de Petroleum®–lanoline et du sulfate d’hydroxyquinoline qui pourraient avoir un intérêt. Les préparations à base d’urée sont également proposées Tableau 2. Adaptation de dose de capécitabine, d’après Hennessy et al. [14] Toxicité Grade 2 Grade 3 1re Stop jusqu’à résolution (g 0/1) Reprise avec mesures symptomatiques et prévention Stop jusqu’à résolution (g 0/1) Reprise à 75 % de dose Stop jusqu’à résolution (g 0/1) Reprise à 50 % de dose Stop Stop jusqu’à Reprise à 75 Stop jusqu’à Reprise à 50 Stop 2e 3e 4e Grade 4 résolution (g 0/1) % de dose résolution (g 0/1) % de dose Si poursuite, 50 % de dose Stop RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 677 678 Tableau 3. Adaptation de dose de la doxorubicine liposomale pégylée d’après Von Moos R et al. [32] ONCOLOG IE Grade de tox 1 et 2 3 4 Mesures Première fois Seconde fois Stop jusqu’à résolution (G 0/1) Reprise avec mesures symptomatiques et évaluation de réduction de dose pour les cycles suivants Stop jusqu’à résolution (G 0/1) Reprise à 75 % de dose Stop jusqu’à résolution (G 0/1) Reprise à 50 % de dose Stop jusqu’à résolution (G 0/1) Reprise à 75 % de dose Stop jusqu’à résolution (G 0/1) Reprise à 50 % de dose Stop G : grade. avec un niveau de preuve 4 (recommandation de grade C) au regard de la littérature. L’utilisation de la pyridoxine (vitamine B6) est également répandue. Elle permettrait une réparation de la barrière cutanée et une prévention de l’hyperplasie épithéliale [5,25]. La pyridoxine peut être appliquée localement sous forme de pommade ou administrée par voie orale avec des doses habituelles de 100 à 300 mg/j. Le niveau de preuve est de 4, en raison d’études cas-témoins, mais avec une évaluation scientifique de qualité. D’autres principes actifs ont été proposés sans validation scientifique et sont classés en niveau de preuve 4 (grade C). On retrouve les patchs nicotiniques pour leur effet vasoconstricteur [18] (recommandation de grade C), la vitamine E à 300 mg/j [17], avec le même niveau de preuve corroborant son impact très contesté sur l’évolution tumorale. Le célécoxib pour son effet anti-inflammatoire a connu un début de développement rapidement stoppé en raison de la toxicité cardiovasculaire de sa classe thérapeutique [20]. D’autres produits sont en cours d’évaluation malgré un développement commercial déjà actif. Ces produits ne sont pas recommandés en attendant les résultats des études cliniques. Recommandations Dans tous les cas, il est recommandé une éducation thérapeutique du patient aux règles hygiéniques et à la surveillance de la symptomatologie spécifique. Ces règles sont les suivantes : application régulière de crèmes émollientes sur les pieds et les mains ; porter des chaussettes et des gants en coton la nuit afin d’améliorer l’absorption de la crème ; en dehors de ces périodes, garder la peau découverte au maximum afin de limiter la transpiration ; éviter tout contact avec des irritants cutanés (parfums, alcool, détergents) ; éviter de porter des vêtements et des chaussures étroits, serrés et irritants ; éviter l’utilisation de bandages adhésifs ; éviter les activités manuelles répétitives et la station prolongée dans la même position ; éviter les travaux manuels traumatisants ; porter des gants de caoutchouc lors des tâches ménagères ; ne pas frotter la peau pour la sécher ; éviter au maximum les températures extrêmes, les pressions et les frictions ; limiter l’exposition directe au soleil ; surélever les membres atteints. En prévention de la survenue du syndrome palmoplantaire, il est recommandé de suivre ces règles hygiéniques et de proposer une adaptation de dose des substances utilisées. Une application réfrigérante lors des perfusions de chimiothérapie est également recommandée. En curatif des syndromes palmoplantaires avérés, il est proposé de suivre les schémas d’adaptation de dose présentés dans les Tableaux 2 et 3. Il est également recommandé l’utilisation d’antalgiques et d’anti-inflammatoires oraux par corticoı̈des afin de limiter le retentissement fonctionnel d’une PPE. On proposera également en ce sens de poursuivre les mesures de prévention, d’immerger régulièrement les pieds et les mains dans des bains d’eau tiède, et d’appliquer des compresses froides pour soulager la symptomatologie. Références 1. Blum JL, Jones SE, Buzdar AU, et al. (1999) Multicenter phase II study of capecitabine in paclitaxel refractory metastatic breast cancer. JCO 17: 485-93 2. 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Scotté Introduction La toxicité unguéale liée aux traitements dans le cancer du sein est décrite depuis longtemps, mais n’a vraiment été mise en avant que depuis le traitement par docétaxel, pourvoyeur de choix de ce type d’effet indésirable. Cette toxicité est importante par ailleurs en raison de sa fréquence et de l’impact sur la poursuite ou non des traitements, mais également en raison de la gêne occasionnée pour les patientes et du retentissement sur l’activité quotidienne, l’image corporelle et la resocialisation des patientes après traitement. L’essor actuel des thérapies ciblées fait apparaı̂tre de nouvelles toxicités dont l’atteinte unguéale qui est également décrite. L’objectif de ces recommandations est de faire un état des lieux épidémiologique, physiopathologique de cette toxicité, d’évaluer les pratiques courantes et les traitements validés pour proposer une démarche thérapeutique de qualité. Épidémiologie Incidence Les seules données statistiques disponibles sur l’atteinte unguéale sont celles décrites pour le docétaxel RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 679 ONCOLOG IE 680 [8,9,11]. On retrouve une évaluation chiffrée pour le paclitaxel [8] et pour les inhibiteurs d’EGFR [3]. Des données de cas ont été publiées avec les anthracyclines, le 5-FU et ses prodrogues (capécitabine), ainsi qu’avec la bléomycine et le méthotrexate. l’ongle ou une chute partielle, mais entraı̂nant un retentissement sur l’activité quotidienne des patients. La classification est présentée dans le Tableau 1. L’incidence de la toxicité unguéale s’élève jusqu’à 51 %, dont 22 % d’onycholyse au niveau des mains [9], et 21 % dont 6 % d’onycholyse pour les pieds [8]. Diagnostic On retrouve un impact dose-dépendant avec une incidence des symptômes qui se majore après le cinquième cycle jusqu’à 85,7 % pour les mains (dont 31,4 % de grade 2) et 68,6 % pour les pieds (dont 25,7 % de grade 2) [11]. L’importance et la fréquence de cette toxicité doivent imposer aux équipes une vigilance particulière et une prise en charge adaptée, notamment en cas de traitement prolongé avec le docétaxel. Le diagnostic de toxicité unguéale se fait par examen clinique simple des mains et des pieds des patients. Il est donc indispensable de s’imposer un regard avant chaque cycle de traitement ou à chaque consultation. Les lignes de Beau sont classiques avec les chimiothérapies toxiques sur les phanères et correspondent à un arrêt de synthèse par la matrice unguéale à chaque administration de la chimiothérapie. Le grade 1 de toxicité correspondant à la dyschromie résulte d’un effet toxique sur la matrice avec activation des mélanocytes donnant cette teinte foncée au lit de l’ongle. On peut également expliquer cette coloration par la toxicité vasculaire de certaines chimiothérapies qui entraı̂nent des hémorragies et hématomes sous-unguéaux. Clinique L’incidence avec le paclitaxel s’élève à 20 % dans une publication en administration hebdomadaire. Cette fréquence, bien que plus réduite, doit également amener un regard attentif sur les extrémités des membres [7]. L’incidence de l’atteinte unguéale par les inhibiteurs d’EGFR s’élève à 10–15 %, essentiellement décrite avec le cetuximab, non recommandé en routine dans les cancers du sein [3]. Ce chiffre est la seule donnée retrouvée avec les thérapies ciblées, mais doit imposer une attention particulière lors de l’utilisation de plus en plus large de ces médicaments, dont les effets indésirables commencent à être analysés. L’onycholyse est définie comme la destruction partielle ou complète de l’ongle. Elle résulte des différentes altérations et agressions subies par l’ongle et sa matrice [2,4,10]. Les paronychies sont décrites notamment avec les thérapies ciblées et sont des inflammations des murs latéraux de l’ongle éventuellement surinfectées [3]. Elles sont douloureuses et représentent une des principales plaintes des patients lors des périodes de traitement. Aucune donnée d’incidence n’est à ce jour disponible ou analysable quant aux associations de traitements. Au regard de l’incidence retrouvée avec les taxanes et le risque identifié d’atteinte unguéale avec les anthracyclines et le 5-FU, on s’attend à une majoration du risque de toxicité lors des traitements associés ou séquentiels. Prélèvements microbiologiques Classification Si l’examen clinique reste la base indispensable au diagnostic, mais également au suivi des toxicités unguéales, il reste une interrogation quant aux prélèvements à pratiquer. La classification de la toxicité unguéale proposée par le NCI (National Cancer Institute) et utilisée dans les publications a été modifiée entre la version 2.0 et la version 3.0. La version 3.0 intègre la notion d’impact sur l’activité quotidienne et sépare en grade 2 la chute partielle de l’ongle, sans interférence avec l’activité, avec le grade 3, correspondant à une perte complète de La pratique de prélèvements fongiques est recommandée en cas de surinfection clinique avec un grade de recommandation B (niveau de preuve 2) [11]. Il s’agit alors de gratter toute lésion suspecte unguéale ou subunguéale avec examen en microscopie directe et culture sur milieu de Sabouraud. La confirmation d’onychomycose a été évaluée à 7,4 % par Winter Tableau 1. Grade de toxicité NCI versions 2.0 et 3.0 Adverse Event 0 1 2 3 Nail changes version 2.0 Nail changes version 3.0 Normal Discoloration or ridging or pitting Discoloration or ridging or pitting Partial or complete loss of nail or pain in nail beds Partial loss of nail or pain in nail beds not interfering with function – Normal Partial loss of nail or pain in nail beds interfering with function or complete loss of nail 4 – et al. [11]. Les germes retrouvés sont Trichophyton rubrum, mentagrophyte et Candida albicans. Ces prélèvements ne sont recommandés qu’en cas de doute sur une surinfection fongique (accord d’experts). Les infections bactériennes sont peu fréquentes et se retrouvent essentiellement en cours de traitement ciblé [1,3,4,6]. Le germe le plus en cause dans ce cas est le Staphylococcus aureus. Il n’est pas recommandé de pratiquer des prélèvements bactériologiques, excepté en cas de surinfection évidente pour adapter le traitement antibiotique (recommandation de grade C). Aucune donnée n’a été retrouvée dans la littérature concernant les surinfections virales. Les prélèvements avec culture de virus ne sont donc pas recommandés. Approche thérapeutique mise en place de sous-gants et sous-chaussons en papier tissé, afin d’éviter tout risque de gelure. Le nombre limité de patients inclus (50 patients par étude) limite le niveau de preuve à 2, mais l’impact statistique largement significatif des résultats en fait un grade de recommandation A pour les experts, tant pour la protection au niveau des mains (moufles) qu’au niveau des pieds (chaussons). La question des traitements séquentiels par anthracyclines–docétaxel s’est posée pour cette protection. Aucune étude n’a été menée à ce jour pour voir l’impact d’une protection réfrigérante menée dès le premier cycle d’anthracycline 5-FU, toutes deux chimiothérapies pouvant causer une toxicité unguéale. Dans l’attente d’études publiées, un accord de professionnels est proposé pour cette utilisation, au regard des risques impliqués par l’association séquentielle. Pratique courante L’utilisation de vernis protecteurs est largement répandue. Il s’agit le plus souvent de vernis durcisseurs à la silice. L’application de crèmes nutritives à la vitamine A est également proposée. Aucune étude n’a, à ce jour, été publiée, mais au regard de l’expérience d’utilisation de ces procédés, un accord de professionnels est proposé. Un accord de professionnels a également été proposé pour les règles hygiéniques simples telles que le port de chaussures confortables, l’éviction de tout traumatisme des extrémités, une hygiène locale rigoureuse avec soins de pédicure et de manucure. Une désinfection régulière et attentive est également proposée dans les cas de surinfection. Il est également proposé, dans les habitudes courantes, une protection spécifique de la photosensibilité. Une seule étude traite de ce risque avec le docétaxel. Il s’agit alors d’appliquer un vernis opaque et de porter des gants également opaques afin d’éviter toute exposition aux rayonnements UV [5]. Un grade de recommandation bas (C) est retenu pour cette pratique. Recommandations en traitement préventif Les seules études, avec contrôle, publiées concernant la protection contre la toxicité unguéale utilisent les enveloppes réfrigérantes [9,8]. Ces deux études multicentriques case-control ont été menées auprès de patients traités par docétaxel, en monothérapie ou en association, aux posologies de 70 à 100 mg/m2. Le principe consiste en l’application de moufles et de chaussons remplis d’un gel bactériostatique placé au congélateur à –20 C, en suivant le principe du casque réfrigérant. L’enveloppe est placée 15 minutes avant de démarrer la perfusion de docétaxel, changée à la moitié de la perfusion (ou au réchauffement du gel), jusqu’à 15 minutes après la perfusion de chimiothérapie. La protection doit débuter dès le premier cycle de chimiothérapie par docétaxel. Le contact direct entre l’enveloppe froide et la peau doit être évité par la Recommandations en traitement curatif Aucune étude publiée n’a retrouvé de traitement curatif efficace en cas de toxicité unguéale. Un grade de recommandation B est proposé pour l’utilisation d’antifongiques et/ou d’antibiotiques en cas de surinfection diagnostiquée, bien que les études menées soient d’un niveau de preuve scientifique 4. La doxycycline à la posologie de 100 mg/m2 est notamment mise en avant en cas de traitement ciblé. Non-recommandations En raison de l’absence d’étude publiée, tout autre produit proposé en application locale sur l’ongle, en traitement curatif ou préventif, n’est pas recommandé. En l’absence de publication, mais au regard du bon sens clinique, un accord de professionnels est proposé pour un traitement local antiseptique et la poursuite de règles hygiéniques (soins manucure, pédicure, hygiène locale rigoureuse, chaussures confortables, etc.). Remarques des patientes Le document parle beaucoup des pieds, mais peu des mains, alors que les problèmes sont équivalents. Références 1. Boucher KW, Davidson K, Mirakhur B, et al. (2002) Paronychie induced by cetuximab, an antiepidermal growth factor receptor antibody. J Am Acad Dermatol 47: 632-3 2. Correia O, Azevedo C, Pinto-Ferreira E, et al. (1999) Nail changes secondary to docetaxel (Taxotere®). Dermatology 198: 288-90 3. Galimont-Cohen AFS, Vos LE, Lavrijsen APM, et al. (2007) Classification and management of skin, hair, nail and mucosal side-effect of epidermal growth factor receptor (EGFR) inhibitors. European J of Cancer 43: 845-51 4. 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Elle peut évoluer avec une extension œsophagienne et devenir invasive par candidémie, après passage de la barrière hématique. Le pronostic vital est alors engagé ; il est donc important d’éviter tout retard de diagnostic et de traitement adapté spécifique. Si la littérature est peu abondante dans le cadre du traitement de cette infection dans le domaine carcinologique, il est possible de s’appuyer sur les travaux menés par les équipes dans le domaine du VIH qui proposent des référentiels de prise en charge très documentés. en 1998 à 62 % en 2003. On retrouve alors l’émergence de souches de candida non albicans, telles que Candida krusei et Candida glabrata, plus résistantes au traitement habituel par fluconazole [2,12]. Les facteurs de risque impliqués dans la COP sont la localisation primitive du cancer et/ou une maladie sousjacente, les facteurs iatrogènes et des facteurs environnementaux [4,9,13]. Facteurs liés à une pathologie – Localisation primitive du cancer (ORL, digestif d’incidence supérieure au cancer du sein) ; – hémopathies, par atteintes des lignées granuleuses ; – altérations immunohématologiques, par neutropénie et fragilisation des muqueuses ; – infections bactériennes et virales par fragilisation des tissus (immunodépression du VIH) et par le traitement reçu (antibiotiques) ; – endocrinopathies (diabète, etc.) ; Épidémiologie La COP toucherait 66 % des patients atteints de cancer à un stade avancé de la maladie, selon une étude menée par Davies et al. [6]. Les patientes traitées pour un cancer du sein seraient peu touchées par cette complication, avec seulement 12 % de candidoses retrouvées dans cette localisation primitive, alors que 56 à 75 % des patients traités pour un cancer ORL souffriraient d’une COP [13]. Le type de candida le plus fréquemment retrouvé est encore le Candida albicans, avec apparition de souches devenant résistantes au fluconazole [6,10]. Néanmoins, il apparaı̂t que 83 % de patients serait infectés par candida à une phase évoluée de leur maladie néoplasique, quelle que soit la localisation primitive de leur cancer. L’écologie fongique lors des candidoses invasives, évaluée dans le cadre du programme de surveillance ARTEMIS, retrouve 17 espèces différentes de candidas avec une proportion majoritaire de Candida albicans [8]. Cette proportion est en régression et passe de 73 % – affections dermatologiques. Facteurs iatrogènes – Chimiothérapies : aucune donnée d’incidence propre à la candidose n’a été retrouvée dans la littérature, on retrouve toutefois des incidences de mucites, premières étapes du processus d’infection fongique. Dans le cadre du cancer du sein, les principales substances en cause sont : – taxanes ; – anthracyclines (standard et pégylées) ; – 5-FU intraveineux et oral ; – cyclophosphamide [7]. L’utilisation du protocole TAC entraı̂ne près de 60 % de mucites (IC 95 % = 57–63), avec 5 % de grades 3 et 4. Le protocole AC a un risque évalué à 13,64 % de mucites de grades 3–4 (IC 95 % = 2,27–27,27), le protocole AT 8,33 % de grades 3–4 (IC 95 % = 1,39–19,44), les taxanes seuls 2,87 % de grades 3–4 (IC 95 % = 1,15–6,90). Globalement, le risque de mucite rapporté aux chimiothérapies classiques dans le cancer du sein (hors doxorubicine liposomale pégylée) est évalué à 2,3 % – Radiothérapie, par modification des tissus irradiés et disparition des défenses locales ; – chirurgie par agression muqueuse et stress traumatique ; – voies d’abord centrales ; – alimentation parentérale par altération de la barrière intestinale ; – greffes de moelle, limitées dans le cancer du sein, elles représentent néanmoins un risque important d’infection fongique. Facteurs environnementaux – Contamination notamment nosocomiale ; – âge jeune ; – périodontopathies ; – statut nutritionnel (dénutrition). Diagnostic Le diagnostic est essentiellement clinique et repose sur la simple ouverture de la bouche en consultation. Il conviendra bien entendu de regarder la muqueuse une fois la bouche ouverte. Cet examen clinique devrait être répété à chaque consultation pour suivre et anticiper correctement une COP. Les signes cliniques sont classiquement : – un enduit blanc sur un fond de muqueuse érythémateuse ; – une perlèche ; – une modification de la couleur de la langue (rouge, noire, etc.). Quel traitement pour la COP ? subissant une allogreffe de cellules souches hématopoı̈étiques ». Plusieurs études au nombre limité de patients sont en accord avec cet intérêt du traitement préventif par azolés des candidoses localisées, mais mettent en avant l’émergence de nombreuses souches de Candida albicans et non albicans résistantes à cette famille d’antifongiques [2,11,12] (niveau de preuve 2, recommandation de grade B). La principale action préventive de la survenue d’une COP est de prévenir l’apparition d’une mucite avec des soins rigoureux et répétés buccodentaires [9]. Il convient de proposer des bains de bouche au bicarbonate sans addition d’antifongiques ou d’antiseptiques [1,13]. L’ensemble des mesures utilisant des antiseptiques locaux, des anesthésiques et analgésiques ou encore des pansements digestifs ne sont pas recommandées par le groupe « mucite » de la MASCC (MultiNational Association for Supportive Care in Cancer) [niveau de preuve 2, recommandation de grade B]. Au total, au regard de l’évolution de l’écologie fongique et des résistances, il ne semble pas recommandable de traiter massivement, de manière préventive par antifongique, l’ensemble des patients traités pour une maladie cancéreuse. On évaluera chaque situation au cas par cas en fonction de l’anamnèse du patient, des facteurs de risque et des déroulements des précédents cycles de traitements (accord d’experts). Traitement curatif ? Les dernières recommandations en la matière sont celle de la Fédération des centres de lutte contre le cancer (FNCLCC) dans le cadre des SOR 1999. Dans le milieu oncologique, la MASCC publierégulièrement des mises à jour de recommandations, sans qu’il y ait de consensus évident dans la littérature. C’est dans le milieu infectiologue dans le cadre de la lutte contre la maladie VIH que les recommandations ont été le plus récemment validées. Les recommandations de Yeni et al. dans le contexte viral (VIH) sont d’utiliser un topique local dans les formes simples de COP [14] (niveau de preuve 1, recommandation de grade A). Plusieurs formulations sont alors disponibles : Traitement préventif ? La méta-analyse Cochrane, publiée en 2008, a regroupé 28 études randomisées de 4 226 patients traités préventivement contre la candidose lors de traitements par radio et/ou chimiothérapie dans le cadre d’un cancer [5] (niveau de preuve 1, recommandation de grade A). Cette étude a permis de retrouver un intérêt des antifongiques absorbés par le tube digestif en prévention des COP. L’autorisation de mise sur le marché (AMM) a été donnée au fluconazole, gélules 100 et 200 mg pour l’indication suivante : « Prévention des infections à Candida sensibles chez l’adulte exposé à une neutropénie sévère et prolongée lors du traitement d’induction et de consolidation des leucémies aiguës et – les bains de bouche à l’amphotéricine B sont le plus couramment utilisés sans association à un antiseptique ; – le miconazole présente un intérêt supplémentaire car actuellement sans souche résistante. Deux formulations équivalentes existent [3] (niveau de preuve 1, recommandation de grade A) : le gel buccal qui peut être gênant en raison de sa texture et de son goût ; le comprimé mucoadhésif qui a l’avantage de diffuser dans le temps sans passer la barrière hématogène et conférant au traitement une utilisation purement locale avec passage limité de principe actif dans la circulation. RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 683 684 ONCOLOG IE Le traitement de la candidose invasive reste un traitement systémique oral ou intraveineux. Il est proposé d’utiliser du fluconazole, (en suspension buvable, comprimés oraux ou voie injectable) ou de l’itraconazole jusqu’à disparition des signes cliniques (durée habituelle de huit à dix jours). Recommandations Les recommandations du groupe digestif de SaintPaul sont donc pour la prise en charge curative d’une COP (niveau de preuve 1, recommandation de grade A) (Tableau 1) : – utiliser en première intention un antifongique en topique local ; – préférer des topiques ayant le moins possible d’interactions médicamenteuses ; – préférer un topique ayant le moins possible de résistances ; – réserver les formes systémiques d’antifongiques aux candidoses invasives et/ou sévères. Tableau 1. Recommandations en curatif Traitement curatif Candidose Oropharyngée Forme Localisées absence de signe d’oesophagite Forme étendue Présence de signes de dissémination : fièvre, douleurs rétrosternales Traitements antifongiques locaux / topiques Traitements antifongiques systémiques Cp gingival mucoadhésif ou gel ou suspension buvable Suspension buvable (bain de bouche à avaler) ou comprimé / gélule ou IV La première attitude à avoir restera, dans tous les cas, d’être attentif aux symptômes exprimés par le patient et de savoir faire ouvrir la bouche lors de chaque consultation afin de dépister toute modification de l’épithélium muqueux et de détecter toute infection. Références 1. Barasch A, Elad S, Altman A, et al. (2006) Antimicrobials, mucosal coating agents, anesthesics, analgesics, and nutritional supplements for alimentary tract mucositis. Support Care Cancer 14: 528-32 2. Bassetti M, Righi E, Costa A, et al. 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Cette incidence des mucites graves est bien sûr faible en comparaison avec celle observée dans les protocoles d’intensification thérapeutique en hématologie par exemple, mais même de bas grade, la survenue d’une mucite n’en altère pas moins la qualité de vie des patientes concernées. Il faut évaluer systématiquement les mucites chimioinduites, et pour cela utiliser une échelle validée. La plupart du temps, les mucites survenant chez les patientes traitées pour un cancer du sein sont transitoires, et c’est typiquement un effet indésirable qui ne sera pas pris en compte si on ne pense pas à interroger correctement les patientes. L’évaluation repose sur un examen clinique minutieux et à une évaluation fonctionnelle qui correspond au retentissement de la mucite en particulier sur l’alimentation, et une évaluation de la douleur éventuellement induite. Recommandation no 1 (grade C) L’échelle la plus simple d’évaluation des mucites est l’échelle de l’OMS : Conséquences de la mucite Elles sont bien connues : – douleur buccale ; – difficulté à l’alimentation solide, voire liquide ; – difficulté à parler ; – risque de surinfection ; – et dans les cas des mucites graves, baisse des doses de chimiothérapie, diminution de la dose d’intensité et coûts induits par une éventuelle hospitalisation de ces patientes. Facteurs influençant la survenue d’une mucite Ils sont les suivants : – la chimiothérapie d’abord : la nature de la chimiothérapie bien sûr (les molécules les plus souvent concernées sont le 5-fluoro-uracile [5-FU], la capécitabine, les anthracyclines), les doses utilisées, et les modalités d’administration ; – d’autres éléments concernent la patiente ellemême : il existe une susceptibilité individuelle, en partie liée à l’âge, au poids, mais surtout à l’état buccodentaire ; l’existence d’une sécheresse buccale favorise la survenue d’une mucite, cette sécheresse buccale pouvant être éventuellement d’origine iatrogène chez les patientes recevant un traitement antidépresseur ou opioı̈de. Recommandations Il existe actuellement peu de recommandations pour la prise en charge préventive et curative des mucites chez des patientes traitées pour un cancer du sein. La première étape consiste certainement à informer les patientes et leur entourage de cet effet indésirable possible, de sa gravité potentielle, de la nécessité de venir consulter en cas de difficulté à s’alimenter. Il convient également de sensibiliser les équipes soignantes et de les former à l’évaluation correcte des mucites [2,4]. grade 1 : douleurs modérées et un simple érythème ; grade 2 : ulcérations sans conséquence sur l’alimentation ; grade 3 : l’alimentation solide devient impossible, seule l’alimentation liquide est possible ; grade 4 : toute alimentation solide ou liquide est impossible. Recommandation no 2 (grade C) Un bilan dentaire est indispensable avant toute chimiothérapie, et des conseils d’hygiène buccale doivent être donnés aux patientes : réalisation systématique de bains de bouche (voir ci-dessous), utilisation d’une brosse souple régulièrement pendant la durée du traitement, y compris en cas de mucite modérée, consultation en cas de mucite interférant avec l’alimentation. Recommandation no 3 (accord d’experts) Des protocoles écrits de prise en charge des mucites sont indispensables et leur application doit être régulièrement vérifiée. Prévention des mucites Peu de choses, en fait, sont validées [1] : l’utilisation de glace (le fait de sucer des glaçons) pendant une perfusion de 5-FU diminue l’incidence des mucites (grade C) ; le KGF (palifermine) est validé pour la prévention des mucites chez des patientes traitées pour des maladies hématologiques mais n’a pas son autorisation de mise sur le marché pour les tumeurs solides, même s’il existe quelques données dans la littérature montrant l’efficacité du KGF chez des patientes traitées par des chimiothérapies à base de 5-FU pour des tumeurs digestives (grades A et B) ; en ce qui concerne les bains de bouche préventifs, la recommandation est d’utiliser du bicarbonate de sodium à 14/1 000 (accord d’experts) ; les antiseptiques (type chlorexidine) préventifs ne sont pas recommandés, de même qu’il n’est pas recommandé d’utiliser un traitement anti-infectieux systématique préventif, que ce soit un traitement antibactérien, antifongique ou antiviral (accord d’experts). RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 685 686 Traitement des mucites (accord d’experts) ONCOLOG IE Le traitement doit s’adapter à la clinique [3]. L’objectif de la prise en charge des patientes souffrant d’une mucite est de maintenir un bon état d’hydratation et des apports caloriques suffisants. Le maintien d’une hygiène buccale satisfaisante et donc de soins locaux réalisés, soit par la patiente à son domicile, soit par l’équipe soignante si la patiente est hospitalisée, est indispensable : en cas de mucite de grade 1 ou 2, recommandation de bains de bouche simples avec du bicarbonate de sodium, pas de traitement anti-infectieux, sauf si infection avérée ; intérêt éventuellement d’utiliser des anesthésiques locaux type lidocaı̈ne en gel ponctuellement, en prévenant les patientes que ce type de médicament gêne le réflexe de déglutition, à ne pas utiliser avant de s’alimenter ; intérêt éventuellement des agents dits « couvrants » qui améliorent les symptômes locaux ; le laser baisse d’intensité pourrait avoir un intérêt mais les données pour l’instant disponibles ne permettent pas de le recommander ; le traitement antalgique doit être adapté en fonction de l’intensité de la douleur : en cas de mucite sévère le recours à une PCA de morphine doit être envisagé. Références 1. Keefe DM, Schubert MM, Elting LS, et al. (2007) Updated clinical practice guidelines for the prevention and treatment of mucositis. American Cancer Society 109(5): 820-30 2. Mc Guire DB, Correa P, Johnson J, Wienandts P (2006) The role of basic oral care and good clinical practice principles in the management of oral mucositis. Support Care Cancer 14: 541-7 3. Peterson DE, Bensadoun RJ, Roila F (2008) Management of oral and gastrointestinal mucositis: ESMO clinical recommendations. Annals of Oncology 19(Suppl 2): 122-5 4. Quinn B, Potting C, Stone R, et al. (2008) Guidelines for the assessment of oral mucositis in adult chemotherapy, radiotherapy and haematopoietic stem cell transplant patients. Eur J Cancer 44: 61-72 Prise en charge des nausées et vomissements chimio-induits chez les patientes traitées pour un cancer du sein Coordonnateur du groupe de travail : J.-P. Durand Groupe de travail : M. Di Palma, J.-P. Durand, L. Juhel, F. Scotté, C. Villanueva Physiopathologie Le réflexe de vomissement est un mécanisme complexe de protection de l’organisme contre un poison ingéré. Au concept de centre unique du vomissement, anatomiquement identifiable, on préfère aujourd’hui celui d’une organisation de différentes zones neuronales interconnectées, au niveau du rhombencéphale, pour déclencher le réflexe émétique ; on parle maintenant de central pattern generator (CPG). Ce CPG est stimulé par deux voies principales : une, d’origine périphérique constituée des neurones vagaux abdominaux et une, d’origine centrale issue de l’area postrema, située dans le plancher du quatrième ventricule, appelée également « zone gâchette » (chemoreceptive trigger zone, CTZ). Au niveau périphérique, on trouve sur les extrémités terminales des voies vagales afférentes, différents récepteurs, en particulier : les récepteurs de type 3 à la sérotonine (ou 5-hydroxytryptophane – 5-HT), de type 1 aux neurokinines (NK1) et à la cholécystokinine. Les agents antitumoraux, par des mécanismes muqueux directs et d’origine sanguine, stimulent la libération de médiateurs par les cellules entérochromaffines de l’intestin grêle supérieur, qui se lient à leurs récepteurs respectifs sur les terminaisons vagales à proximité. Cela provoque un stimulus afférent qui se termine dans le tronc cérébral dorsal, essentiellement dans le noyau du tractus solitaire (NTS), et active alors le CPG. Parmi les différents médiateurs locaux, la sérotonine (5-HT) joue le rôle le plus important. Ce mécanisme dépendant des voies vagales est considéré comme prédominant à la phase aiguë, et l’inhibition périphérique de la liaison de la 5-HT aux récepteurs 5-HT3 sur les fibres vagales afférentes constitue le principal mécanisme par lequel les anti-5-HT3 exercent leur effet antiémétique. Au niveau de l’area postrema, la barrière hématoméningée est poreuse et les antitumoraux ou leurs métabolites peuvent donc stimuler directement les neurones de la CTZ. Les neuromédiateurs impliqués à ce niveau sont notamment : la sérotonine, la dopamine (qui active les récepteurs de type 2) et la substance P. Cette dernière active les récepteurs NK1, présents également dans le NTS. Même si les antagonistes des récepteurs NK1 peuvent avoir un site d’action périphérique, leur efficacité clinique repose uniquement sur leur action centrale. Les autres sources de stimuli à l’origine des nausées et vomissements chimio-induits (NVCI) sont des centres de la partie supérieure du système nerveux central situés dans des structures limbiques. Facteurs de risque Les facteurs de risque de NVCI sont de deux ordres : – individuels : le risque est plus élevé chez la femme [8], chez les patientes de moins de 55 ans [9], anxieuses ou qui pensent être à haut risque de NVCI [11], chez les patientes aux antécédents de mal des transports [6] ou de nausées gravidiques [5] ; l’intoxication alcoolique est un facteur protecteur [6]. – liés au traitement, fonction du potentiel émétogène des antitumoraux et la dose de chimiothérapie. Le potentiel émétogène intrinsèque des antitumoraux est le facteur déterminant du potentiel émétogène d’un protocole de chimiothérapie [1,2,4]. Hesketh [3] puis la conférence de consensus de la Multinational Association for Supportive Care in Cancer (MASCC) [10] et les dernières recommandations du National Comprehensive Cancer Network [7] ont classé les médicaments antitumoraux en quatre niveaux d’émétogénicité : très faiblement, faiblement, moyennement et hautement émétisant (Tableau 1). Le médicament antitumoral le plus émétogène d’une association d’antitumoraux définit le niveau émétogène global du protocole de chimiothérapie. Pour les chimiothérapies fractionnées sur plusieurs jours, le médicament antitumoral le plus émétogène, administré à un jour donné, définit le niveau émétogène de l’association administrée ce jour-là. Tableau 1. Émétogénicité des médicaments antitumoraux, en l’absence de prophylaxie antiémétique Très faiblement Faiblement Moyennement Risque de NVCI < 10 % Risque de NVCI entre 10 et 30 % Risque de NVCI entre 31 et 90 % Alemtuzumab Interféron alpha L-Asparaginase Bevacizumab Bléomycine Bortézomib Busulfan Cetuximab Chlorambucil Cladribine Dasatinib Décitabine Denileukin Diftitox Erlotinib Fludarabine i.v. Gefitinib Gemtuzumab Ozogamycine Hydroxyurée Lapatinib Lénalidomide Melphalan p.o. Méthotrexate < 50 mg/m2 Nélarabine Panitumumab Pentostatine Rituximab Sorafenib Sunitinib Temsirolimus Thalidomide Thioguanine Trastuzumab Vinblastine Vincristine Vinorelbine i.v. Hautement b 2 Bexarotène Capécitabine Cytarabine 100–200 mg/m2a Docétaxel Doxorubicine Liposomale Étoposide i.v. Fludarabine p.o. 5-fluoro-uracile Gemcitabine Ixabépilone Méthotrexate 50–250 mg/m2a Mitomycine C Mitoxantrone Aldesleukine > 12–15 MU /m Azacitidine Bendamustine Busulfan > 4 mg/j Carboplatine Carmustine ≤ 250 mg/m2a Cisplatine ≤ 50 mg/m2a Cyclophosphamide ≤ 1,5 g/m2a Cyclophosphamide p.o. Cytarabine > 1 g/m2a Dactinomycine Daunorubicine Doxorubicine Nilotinib Paclitaxel Pemétrexed Topotécan i.v. et p.o. Vorinostat Épirubicine Étoposide p.o. Idarubicine i.v. et p.o. Ifosfamide NVCI : nausées et vomissement chimio-induits. a Mètre carré de surface corporelle. b Millions d’unités. Irinotécan Imatinib Lomustine Melphalan i.v. > 50 mg/m2a Méthotrexate 250–1 000 mg/m2a Oxaliplatine > 75 mg/m2a Temozolomide Trioxyde d’arsenic Vinorelbine p.o. Risque de NVCI > 90 % Altrétamine Carmustine > 250 mg/m2a Cisplatine ≥ 50 mg/m2a Cyclophosphamide > 1,5 g/m2a Dacarbazine Méchloréthamine Procarbazine Streptozocine RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 687 688 Présentation clinique ONCOLOG IE Les NVCI se divisent en trois phases cliniques distinctes : – les NVCI anticipés qui surviennent dans les 24-48 heures qui précèdent l’administration de la chimiothérapie. Ils correspondent à une réponse conditionnée, fonction du niveau d’anxiété de la patiente et de la sévérité des NVCI vécus lors des précédentes cures, en particulier la première ; – les NVCI aigus qui surviennent pendant les 24 premières heures de la chimiothérapie ; – les NVCI retardés qui surviennent au-delà des 24 premières heures. Recommandations méthodologiques pour optimiser la prise en charge des NVCI (accord d’experts) – associer à chaque niveau émétisant un protocole antiémétique clairement défini, respectant les recommandations internationales et d’emblée optimal. Ce protocole doit préciser : les antiémétiques qui doivent être administrés systématiquement avant et après la chimiothérapie (traitement prophylactique), les antiémétiques à administrer en cas de nausées et/ou de vomissements pendant la chimiothérapie et après la chimiothérapie (traitement de secours). En cas de prescription informatisée, le protocole antiémétique ainsi défini doit être incorporé au protocole de chimiothérapie. À ce protocole sont associées des ordonnances d’antiémétiques pour la prise en charge au domicile (Tableau 3). Recommandations pour la prophylaxie primaire des NVCI dans le cancer du sein (grade A) Chimiothérapie hautement émétisante – Définir le niveau émétisant de chaque protocole de chimiothérapie administré dans le service. Pour mémoire, le niveau émétisant d’un protocole associant plusieurs antitumoraux est déterminé par le niveau émétogène du médicament le plus émétisant. Le niveau émétisant doit apparaı̂tre clairement sur la feuille de prescription et d’administration de la chimiothérapie ; – classer l’ensemble des protocoles de chimiothérapie utilisés dans le service, dans un tableau à quatre colonnes, selon leur niveau émétisant : très faiblement, faiblement, moyennement, hautement émétisant. Ce document sert de référence à l’ensemble des soignants (exemple du Tableau 2) ; Phase aiguë, avant l’administration de la chimiothérapie : association d’un anti-5-HT3, d’un corticoı̈de et d’aprépitant ou de fosaprépitant. Phase retardée : association d’un corticoı̈de de j2 à j4 et d’aprépitant à j2 et j3. Chimiothérapie moyennement émétisante Phase aiguë, avant l’administration de la chimiothérapie : association d’un antagoniste 5-HT3, d’un corticoı̈de et d’aprépitant ou de fosaprépitant. Phase retardée : aprépitant à j2 et j3. Tableau 2. Émétogénicité des principaux protocoles de chimiothérapie dans le cancer du sein, en l’absence de prophylaxie antiémétique Très faiblement Risque de NVCI < 10 % Faiblement Risque de NVCI entre 10 et 30 % Moyennement Risque de NVCI entre 31 et 90 % Hautement Risque de NVCI > 90 % Lapatinib Vinorelbine i.v. Tout schéma de 5-FU 5-FU-vinorelbine Gemcitabine-vinorelbine Trastuzumab Vinorelbine-trastuzumab Vinorelbine-paclitaxel Vinorelbine-capécitabine Paclitaxel Paclitaxel-Avastin® Paclitaxel-gemcitabine Paclitaxel-trastuzumab Paclitaxel Paclitaxel-trastuzumab Paclitaxel-capécitabine Capécitabine Capécitabine-Avastin® AC ou EC, ou ElipoC CMF Épirubicine-trastuzumab FAC ou FEC FEC-paclitaxel Gemcitabine-oxaliplatine Ifosfamide Méthotrexate HD Paclitaxel-AC Paclitaxel-adriamycine Paclitaxel-carboplatine Paclitaxel-épirubicine TAC ou TEC Théprubicine Toute chimiothérapie avec cisplatine Chimiothérapie faiblement émétisante Phase aiguë, avant l’administration de la chimiothérapie : corticoı̈de seul. Phase retardée : rien. Chimiothérapie très faiblement émétisante Phase aiguë, avant l’administration de la chimiothérapie : rien. Phase retardée : rien. Situations particulières (grade B et accord d’experts) Prophylaxie primaire pour les chimiothérapies sur plusieurs jours Pour mémoire, le médicament antitumoral le plus émétogène administré à un jour donné définit le niveau émétogène de l’association administrée ce jour-là. Chaque jour, le patient doit recevoir l’association d’antiémétiques prophylactiques de la phase aiguë, adaptée au risque émétogène de la chimiothérapie administrée ce jour-là. Si la prophylaxie comprend de l’aprépitant, la posologie de la première prise est de 125 mg puis, les jours suivants, de 80 mg par prise, à poursuivre deux jours après la fin de la chimiothérapie. Prophylaxie primaire pour les chimiothérapies continues Pour les chimiothérapies en continu sur plusieurs semaines, souvent faiblement émétisantes, il ne semble pas judicieux d’administrer chaque jour un corticoı̈de au long cours. Un traitement systématique par anti-D2 est recommandé (métoclopramide : 30 mg par voie orale, une heure avant chaque administration ou prise de l’antitumoral). En cas d’échec, on choisira un sétron en une prise unique journalière, par voie orale, une heure avant l’antitumoral. Recommandations pour la prophylaxie secondaire des NVCI (grade C) Vomissements ou nausées pendant l’administration de la chimiothérapie ou à la phase aiguë Cela incitera à reconsidérer le protocole antiémétique pour la cure suivante. On s’assurera dans un premier temps que le niveau émétisant de la chimiothérapie a été correctement établi, et que le traitement antiémétique prophylactique correspondait au bon niveau émétisant. Si tel était le cas, on recommande : – en cas de chimiothérapie hautement émétisante ou moyennement émétisante : ajouter, lors de la prochaine cure, soit une prise de benzodiazépine une heure avant le début de la chimiothérapie (par exemple alprazolam 0,5 mg), soit un anti-D2 en perfusion continue pendant la chimiothérapie (métoclopramide – 60 mg – ou alizapride – 600 mg) ; – en cas de chimiothérapie faiblement émétisante : ajouter, lors de la prochaine cure, un sétron en une prise unique par voie orale, une heure avant le début de la chimiothérapie ; – en cas de chimiothérapie très faiblement émétisante : donner, une heure avant le début de la chimiothérapie, un anti-D2 par voie orale (métoclopramide : 30 à 40 mg). Vomissements ou nausées à la phase retardée Cela incitera également à reconsidérer le protocole antiémétique pour la cure suivante, en s’assurant dans un premier temps que niveau émétisant et traitement antiémétique prophylactique étaient corrects. Si tel est le cas, on recommande : – en cas de chimiothérapie hautement émétisante : ajouter, lors de la prochaine cure, une prise de benzodiazépine, matin et soir, de j1 à j4 ; – en cas de chimiothérapie moyennement émétisante : ajouter, lors de la prochaine cure, une prise de corticoı̈des à j2 et j3. Recommandations pour les traitements de secours en cas de NVCI malgré une prophylaxie bien conduite (accord d’experts) Pendant la chimiothérapie : il est inutile d’administrer à nouveau un sétron ou un bolus de corticoı̈des. Il est préférable de recourir à un anti-D2, en bolus : métoclopramide 30 mg ou alizapride 300 mg, en perfusion i.v. de 10–15 minutes. Ces injections sont renouvelables deux fois. En cas d’échec des anti-D2 ou d’emblée si le patient est manifestement angoissé, on choisira une benzodiazépine : triazolam ou alprazolam par voie orale, diazépam par voie intraveineuse. Pendant les 24 premières heures : le traitement de secours est classiquement un anti-D2. Il est toutefois possible d’administrer un sétron, 12 heures après la première prise de sétron. En cas d’état nauséeux persistant, on aura recours à une benzodiazépine. À la phase retardée : le traitement de secours est classiquement un anti-D2. En cas d’état nauséeux persistant, on aura recours à une benzodiazépine. Conclusion Les recommandations pour la prophylaxie antiémétique des NVCI sont aujourd’hui validées par plusieurs sociétés savantes ; elles font partie intégrante des soins oncologiques de support permettant une prise en charge de qualité des patients atteints de cancer. La RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 689 690 Tableau 3. Doses et schémas d’administration des agents antiémétiques en prévention systématique pour une chimiothérapie administrée sur un jour Médicament Dose ONCOLOG IE Avant la chimiothérapie (j1) En cas de nausées et vomissements Après la chimiothérapie Chimiothérapie hautement émétisante Aprépitant (voie orale) Fosaprépitant (voie) Granisétron Ondansétron Dexaméthasone Voie orale : 125 mg, 1 heure avant Voie i.v. : 115 mg, 30 minutes avant Ajouter à la prochaine cure Voie orale uniquement : 80 mg le matin de j2 et j3 Voie i.v. : 3 mg, 30 minutes avant Voie orale : 2 mg, 1 heure avant Voie Voie Voie Voie i.v. : 8 à 16 mg, 30 minutes avant orale : 16 mg, 1 heure avant i.v. : 12 mg, 30 minutes avant orale : 12 mg, 1 heure avant Soit une benzodiazépine la veille au soir de j1, le matin et le soir de j1 à j4 Soit un anti-D2 en perfusion continue pendant la chimiothérapie Voie i.v. : 8 mg de j2 à j4 Voie orale : 8 mg de j2 à j4 Chimiothérapie moyennement émétisante avec aprépitant/fosaprépitant Aprépitant Fosaprépitant Granisétron Ondansétron Dexaméthasone Voie orale : 125 mg, 1 heure avant Voie i.v. : 115 mg, 30 minutes avant Voie i.v. : 3 mg, 30 minutes avant Voie orale : 2 mg, 1 heure avant Voie i.v. : 8 à 16 mg, 30 minutes avant Voie orale : 8 mg, 1 heure avant et 12 heures après Voie i.v. : 12 mg, 30 minutes avant Voie orale : 12 mg, 1 heure avant Voie orale uniquement : 80 mg le matin de j2 et j3 Voie i.v. : 8 mg à j2 et j3 Voie orale : 8 mg à j2 et j3 Chimiothérapie moyennement émétisante sans aprépitant/fosaprépitant Aprépitant Fosaprépitant Granisétron Ondansétron Dexaméthasone Voie orale : 125 mg, 1 heure avant à j1 Voie orale uniquement : 80 mg le matin de j2 et j3 Voie i.v. : 3 mg, 30 minutes avant Voie orale : 2 mg, 1 heure avant Voie i.v. : 8 mg, 30 minutes avant Voie orale : 8 mg, 1 heure avant et 12 heures après Voie i.v. : 12 mg, 30 minutes avant Voie orale : 12 mg, 1 heure avant Voie i.v. : 8 mg à j2 et j3 Voie orale : 8 mg à j2 et j3 Chimiothérapie faiblement émétisante Dexaméthasone Voie i.v. : 12 mg, 30 minutes avant Voie orale : 12 mg, 1 heure avant diffusion de ces référentiels de bonne pratique doit permettre, à l’avenir, de réduire au maximum l’incidence des NVCI chez les femmes traitées pour un cancer du sein. 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(2004) Patient experience is a strong predictor of severe nausea after chemotherapy: a University of Rochester Community Clinical Oncology Program study of patients with breast carcinoma. Cancer 101: 2701-8 Iatrogénie rénale Coordonnateur du groupe de travail : V. Launay-Vacher Groupe de travail : C. Bagnis, F. Brocard, V. Launay-Vacher L’insuffisance rénale est une comorbidité fréquemment rencontrée chez les patients atteints de cancer. La recherche d’une insuffisance rénale doit être réalisée chez tous ces patients, systématiquement. La créatininémie n’étant pas un index fiable, les différentes méthodes d’évaluation de la fonction rénale utilisables en pratique clinique seront développées dans ce chapitre. La présence d’une insuffisance rénale expose, notamment, à un risque de surdosage médicamenteux pour un certain nombre de traitements nécessitant une réduction des doses en cas de diminution de la fonction rénale. Ces adaptations posologiques doivent être réalisées avec soin, afin d’optimiser la tolérance au traitement sans perdre en efficacité thérapeutique. De plus, certains traitements récents, comme les antiangiogéniques qui ont démontré leur intérêt dans la prise en charge de ces patients, présentent un profil de tolérance rapportant des effets indésirables rénovasculaires qu’il faut connaı̂tre afin de mieux les gérer en pratique. Méthodes d’évaluation de la fonction rénale La définition de la maladie rénale chronique repose sur l’évaluation du débit de filtration glomérulaire (DFG) et/ou la recherche d’une anomalie morphologique rénale, et/ou d’une anomalie du sédiment urinaire ou d’une protéinurie. La méthode de mesure de référence du DFG étant réalisée en hôpital de jour suivant une technique de clairance isotopique (coût élevé, personnel formé et entraı̂né), des méthodes alternatives utilisables au quotidien sont utilisées en routine : créatininémie, clairance de la créatinine, formules d’estimation de la clairance de la créatinine telle que Cockcroft-Gault ou du DFG telle que la formule abrégée de l’étude Modification of Diet in Renal Disease (aMDRD). Créatinine La créatinine est utilisée comme reflet de la filtration glomérulaire, paramètre essentiel de la mesure de la fonction rénale lié au fonctionnement glomérulaire et à la création de l’urine primitive. Malheureusement, le taux plasmatique de la créatinine est intimement lié à la masse musculaire, puisqu’il s’agit d’une protéine dérivée du métabolisme de la créatine, protéine du muscle. Elle est donc également très dépendante de l’âge et du sexe, qui font varier considérablement la masse musculaire. Toutes les situations dans lesquelles la masse musculaire ne correspond pas à celle attendue pour l’âge et le sexe exposent à de mauvaises interprétations du DFG sur la base de la créatinine. Par ailleurs, le calcul de la clairance de la créatinine comme mesure du DFG est rendu imprécis par l’existence d’une réabsorption partielle de la créatinine et surtout d’une sécrétion tubulaire surtout importante lorsque la fonction rénale diminue. Clairance de créatinine, formules d’estimation L’utilisation d’une technique de clairance pour la mesure du DFG repose sur le fait que le marqueur utilisé n’est ni réabsorbé ni sécrété par le tubule. La créatininémie n’est pas non plus un marqueur optimal pour la mesure de la clairance de la créatinine. Enfin, la clairance de la créatinine mesurée est rarement exacte, étant sous la dépendance du recueil des urines de 24 heures exceptionnellement complet. Des formules mathématiques d’estimation du DFG, prenant en compte certains paramètres de variabilité de la fonction rénale, ont été élaborées à partir de la créatinine, dont celle de Cockcroft-Gault [20] et celle, abrégée, de l’étude aMDRD [63]. La formule de Cockcroft-Gault inclut la créatininémie, l’âge, le sexe et la masse pondérale dans son calcul. Elle a été déterminée dans une population masculine de 249 patients hospitalisés dont la fonction rénale était normale. Elle a été ensuite extrapolée à la population féminine. Elle surestime le DFG globalement d’environ 2 ml/min et doit être théoriquement ajustée à la surface corporelle. La formule aMDRD tient compte de l’âge et du sexe et introduit un facteur de correction pour les patients d’origine afro-américaine. Elle est ajustée à la surface corporelle. Elle sous-estime globalement le DFG, surtout chez les patients à fonction rénale normale, et ne devrait en théorie pas être utilisée si le DFG attendu est supérieur à 60 ml/min par 1,73 m2. Elle a d’ailleurs été validée initialement dans une population de patients de DFG inférieur à 60 ml/min par 1,73 m2. Elle a ensuite été réévaluée en utilisant une technique de dosage de la créatinine calibrée par rapport à l’IDMS. La formule MDRD, réexprimée après utilisation de techniques de dosage de la créatinine, utilisables en routine et calibrées par rapport à la technique de référence, est désormais recommandée pour améliorer la pratique. Formule de Cockcroft-Gault [20] : ClCr (ml/min) = k × ([140–âge] × poids [kg])/SCR (mmol/l) RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 691 692 k = 1,23 (homme) ou 1,04 (femme) ; ClCr = clairance de la créatinine ; SCR = créatininémie. Formule aMDRD [63] : DFG (ml/min par 1,73 m2) = k × 186 × (SCR [mg/ dl]) × (âge)–0,203 ONCOLOG IE –1,154 k = 1 (homme) ou 0,742 (femme) ; DFG = débit de filtration glomérulaire ; SCR = créatininémie. Recommandation La fonction rénale doit être évaluée à l’aide de la formule de Cockcroft-Gault ou de la formule aMDRD (préférentiellement) [niveau 3, grade C]. Cystatine C La cystatine C, polypeptide basique de 13 kDa (faible poids), est librement filtrée par le glomérule grâce à sa taille et sa charge positive. Elle est exprimée par toutes les cellules nucléées de l’organisme. Elle est réabsorbée par les cellules tubulaires proximales et totalement catabolisée. Sa clairance est intimement corrélée au DFG mesuré par la clairance du chrome EDTA (l’une des méthodes de référence). Elle appartient à la superfamille des cystatines et est synthétisée et sécrétée par toutes les cellules nucléées humaines. Elle n’est pas significativement influencée par l’âge et le sexe ou l’inflammation. Son taux sérique augmente considérablement dans l’insuffisance rénale, et elle a été proposée comme marqueur endogène du DFG. L’un de ses avantages est qu’une diminution modérée du DFG est associée à une augmentation importante de son taux sérique. Sa sensibilité est donc plus importante que celle du dosage de la créatinine chez le patient atteint de cancer, mais sa performance diagnostique semble inférieure à celle de la formule de CockcroftGault. Son intérêt a été documenté chez le sujet âgé, diabétique, transplanté ainsi que chez le patient atteint de cancer à la fois chez l’adulte et chez l’enfant [5,9,89,94]. Il faut noter qu’une étude a mis en évidence le fait que les variations de la masse musculaire peuvent influencer le dosage de la cystatine C. Par ailleurs, plusieurs formules d’estimation du DFG à partir de la cystatine C ont été publiées [28,59,84], mais aucune n’a été validée chez des patients atteints de cancer. Mesure isotopique du DFG La clairance des radiotraceurs d’extraction rénale élevée (EDTA, DTPA, OIH, MAG 3) peut être déterminée selon la méthode de clairance urinaire, qui nécessite des prélèvements plasmatiques et des recueils urinaires minutés ou selon la méthode de clairance plasmatique, qui ne nécessite que des prélèvements plasmatiques multiples. La clairance plasmatique n’est valide (c’est-à-dire égale à la clairance urinaire) que lorsque le patient n’a ni ascite ni œdème et qu’il n’est pas atteint d’insuffisance rénale sévère (DFG ≤ à 30 ml/ min). En pratique clinique habituelle, la méthode la plus utilisée en médecine nucléaire est la clairance plasmatique, en ayant recours à des méthodes « simplifiées » qui ne nécessitent que quelques prélèvements effectués à des temps précis, après l’injection d’une dose déterminée avec précision. La détermination de la clairance urinaire peut se faire après injection intraveineuse (IV) unique (pour le DFG) ou lors d’une perfusion continue du radiotraceur (pour le DFG ou pour l’ERPF). Ces méthodes, plus contraignantes et lourdes à mettre en œuvre, sont, en revanche, valides quels que soient la fonction rénale et le volume extracellulaire. Elles imposent, en revanche, une vidange vésicale correcte (problématique chez le diabétique et l’homme âgé, par exemple) et un contrôle sphinctérien (impossible chez le jeune enfant). Ces méthodes permettent de déterminer la fonction rénale globale et, couplées à la scintigraphie, permettent de connaı̂tre la fonction rénale de chacun des reins en valeur absolue. En revanche, les méthodes scintigraphiques, destinées à déterminer la fonction de chacun des reins sans prélèvement plasmatique, ne sont pas suffisamment fiables, leur imprécision étant du même ordre de grandeur que celle de la clairance de la créatinine. Dépistage et mesure de la protéinurie La protéinurie est la manifestation la plus fréquente des maladies rénales. Lorsque la protéinurie est importante, les patients décrivent souvent leurs urines comme troubles et remarquent la présence de mousse, secondaire à la présence de protéines dénaturées. Les bandelettes urinaires permettent de dépister facilement la protéinurie, mais l’examen de référence pour la quantification était jusqu’à présent la protéinurie des 24 heures. La découverte d’une protéinurie des 24 heures positive, associée à un dépistage à la bandelette négatif, doit faire évoquer une protéinurie constituée de chaı̂nes légères d’immunoglobulines. Compte tenu de la difficulté de réalisation et du caractère contraignant du recueil des urines de 24 heures, il devient de plus en plus accepté dans la communauté néphrologique d’utiliser le rapport protéine/créatinine ou albumine/créatinine comme équivalent de la protéinurie des 24 heures. Dans les urines collectées sur 24 heures, la quantité de protéines est normalement inférieure à 100 mg/j (Tableau 1). ECBU L’examen cytobactériologique doit être réalisé sur des urines fraı̂ches. Normalement, les urines ne contiennent qu’un nombre très limité de globules rouges et de leucocytes. Le dépistage de l’hématurie et de la leucocyturie peut également être réalisé à la bandelette, mais il faut garder à l’esprit la grande fréquence des faux-positifs pour l’hématurie. Enfin, le compte d’Addis Tableau 1. Valeurs normales et pathologiques de la protéinurie des 24 heures suivant la méthode de dosage Normale Microalbuminurie Protéinurie Échantillon urinaire : protéinurie (mg/l)/ créatininurie (g/l) Échantillon urinaire : protéinurie (mg/l)/ créatininurie (mmol/l) Urines des 24 heures : (mg/24 heures) < 30 mg/g 30-300 (albuminurie) ≥ 300 mg/g < 2 mg/mmol 2-22 (albuminurie) ≥ 22 mg/mmol < 30 30-300 ≥ 300 ou HLM ne doit plus être utilisé. Les valeurs normales sont : Hématurie pathologique : GR > 10/mm3 ou 10 000/ml Leucocyturie pathologique : GB > 10/mm 3 ou 10 000/ml Prévalence de l’insuffisance rénale chronique (IRC) chez les patients présentant un cancer du sein Définition de l’IRC L’IRC est définie par une diminution permanente du DFG. Ses méthodes de mesure sont de réalisation complexe et nécessitent une infrastructure spécifique. Leur utilisation en pratique clinique courante en est limitée, d’où le recours à des méthodes d’estimation du DFG et, plus particulièrement, la mesure de la créatininémie et les formules d’estimation de la fonction rénale telles que Cockcroft-Gault [20] qui tient compte de l’âge, du sexe et du poids du malade ou la formule aMDRD [63] qui nécessite l’âge, le sexe et la créatininémie du patient. Ces dix dernières années, une définition internationale de l’insuffisance rénale ou maladie rénale a été élaborée. Ces travaux ont débuté aux États-Unis, menés par le groupe de travail KDOQI (Kidney Disease Outcomes Quality Initiative) de la National Kidney Foundation, et ont été ensuite repris et validés à l’international par le groupe de travail des KDIGO (Kidney Disease: Improving Global Outcomes) [64,73] (Tableau 2). Un DFG inférieur à 60 ml/min par 1,73 m2 signe une insuffisance rénale, que la réduction du DFG soit ou non accompagnée d’autres signes biologiques ou cliniques. L’insuffisance rénale est dite chronique lorsqu’elle est présente depuis au moins trois mois et est irréversible. On parle d’insuffisance rénale terminale lorsque le DFG est inférieur à 15 ml/min par 1,73 m2. Prévalence dans la population générale, principales causes et facteurs de risque L’IRC touche entre 1,74 et 2,5 millions de personnes en France selon les estimations, et l’insuffisance rénale chronique terminale (IRCT) environ 45 000. Environ deux tiers des patients ayant une IRCT sont actuellement traités par dialyse, et un tiers a un greffon rénal fonctionnel. Cette population augmente d’environ 7 000 nouveaux cas par an, soit une incidence de 112 par million d’habitants. La prévalence de l’IRC non terminale est difficile à estimer, en France, en l’absence d’étude d’envergure. Aux États-Unis, les résultats de deux campagnes de l’étude NHANES (National Health and Nutrition Examination Survey) montrent, d’une part, la forte prévalence de l’insuffisance rénale non terminale (stades 1 à 4) et, d’autre part, l’augmentation de cette prévalence. Ce programme porte sur un échantillon représentatif de la population générale américaine, âgée de 20 ans et plus, et portant sur 15 488 sujets pour la période d’étude 1988–1994 et 13 233 sujets pour la période 1999–2004. La prévalence de l’IRC non terminale avait augmenté de 10,0 % sur la période 1988–1994 à 13,1 % sur la période 1999–2004, avec une forte augmentation de la prévalence de stade 3 (Tableau 3) [21]. Prévalence de l’insuffisance rénale dans le cancer et dans le cancer du sein en particulier La fréquence de l’IRC chez les patients atteints de cancer est mal connue, alors que c’est une pathologie fréquente dans la population générale. C’est pourquoi, l’étude IRMA (insuffisance rénale et médicaments anti- Tableau 2. Définition et stratification de la maladie rénale chronique Stade Description Fonction rénale (ml/min par 1,73 m2) Risque élevé Existence de facteurs de risque de maladie rénale (diabète, hypertension, antécédents familiaux, sujet âgé, etc.) Atteinte rénale (protéinurie, taille des reins, etc.) et DFG normal Atteinte rénale et réduction « légère » du DFG Réduction « modérée » du DFG Réduction sévère du DFG Insuffisance rénale terminale (dialyse ou transplantation nécessaires) ≥ 90 1 2 3 4 5 ≥ 90 60 à 89 30 à 59 15 à 29 < 15 RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 693 694 Tableau 3. Prévalence de l’IRC aux États-Unis [21] ONCOLOG IE Fonction rénale (ml/min par 1,73 m2) ≥ 90 89–60 59–30 29–15 Stade 1 2 3 4 Total Prévalence de l’IRC aux États-Unis (population générale) [%] NHANES 1988–1994 NHANES 1999–2004 1,7 2,7 5,4 0,21 10,01 1,8 3,2 7,7 0,35 13,05 cancéreux) a été réalisée en 2005 [55]. Les objectifs de cette étude observationnelle étaient de : – déterminer la prévalence de l’insuffisance rénale chez les patients atteints de cancer en France ; – décrire le profil des médicaments anticancéreux, y compris soins de support, utilisés chez ces patients, à savoir, d’une part, la nécessité ou non d’adapter leur posologie chez le patient insuffisant rénal et, d’autre part, leur potentielle toxicité rénale chez ces patients à risque. Cette étude rétrospective a été menée dans 15 centres d’oncologie, en France, en février et en octobre 2004, chez un total de 4 684 patients souffrant de tumeurs solides, ayant consulté dans l’un des centres de l’étude et ne présentant pas d’IRCT, l’étude n’ayant pas inclus les patients dialysés. À partir des données recueillies, la fonction rénale des patients était évaluée à l’aide des deux formules recommandées à l’heure actuelle, celle de Cockcroft-Gault [20] et la formule abrégée MDRD (aMDRD) de Levey et al. [63]. Parmi les 4 684 patients analysés, 64,4 % étaient des femmes, l’âge moyen dans l’ensemble de la population était de 58,1 ans, et les cinq types de cancer les plus fréquemment retrouvés étaient un cancer du sein (1 898 patients), un cancer colorectal (573 patients), un cancer du poumon (445 patients) un cancer de l’ovaire (270 patients) et un cancer de la prostate (222 patients). Parmi les patients, 7,2 % présentaient un taux sanguin élevé de créatinine supérieur à 110 mmol/l. Cependant, la créatininémie est un mauvais index de la fonction rénale, et celle-ci doit être estimée à l’aide de l’une des deux formules recommandées. Ainsi, en appliquant la formule de Cockcroft-Gault, 57,4 % avaient une fonction rénale anormale (< 90 ml/min) et 52,9 % selon l’équation aMDRD. La prévalence d’une IRC de stades 3 et plus était importante, avec 19,8 et 12,02 % des patients concernés, lorsque la fonction rénale était estimée, respectivement, à l’aide de la formule de CockcroftGault et de la formule aMDRD. Cette étude souligne également la faible puissance de la créatininémie en tant qu’index de la fonction rénale : 60,3 et 54,7 % des 3 903 patients présentant une créatininémie « normale » (< 110 mmol/l) avaient en réalité une fonction rénale anormale, que ce soit avec la formule de Cockcroft-Gault ou avec la formule aMDRD. Tableau 4. Prévalence de l’IRC chez les patients présentant un cancer du sein dans l’étude IRMA [48,49,56] Fonction rénale (ml/min par 1,73 m2) 89–60 59–30 29–15 < 15 Total Stade 2 3 4 5 Prévalence de l’IRC en France dans l’étude IRMA (population cancer du sein) [%] CockcroftGault aMDRD 37,6 13,7 0,4 0,1 51,8 43,0 7,4 0,3 0,1 50,8 Les analyses portant sur le sous-groupe de 1 898 patients présentant un cancer du sein rapportent des chiffres similaires, avec 1,63 % des patients présentant une créatininémie élevée, mais 51,8 et 50,8 % ayant une fonction rénale anormale (< 90 ml/min) (Tableau 4) [48]. La prévalence de l’IRC était significativement plus importante chez les patients présentant une maladie métastatique (métastases osseuses), lorsque la fonction rénale était estimée à l’aide de la formule de Cockcroft-Gault (p = 0,0381), et pas significativement différente lorsque celle-ci était estimée à l’aide de la formule aMDRD (p = 0,05). Plus de la moitié des patients atteints de cancer en France, et en particulier les patients présentant un cancer du sein, présentent une fonction rénale anormale (< 90 ml/min), et 10 à 20 % d’entre eux ont une IRC de stade 3 ou plus, alors même que leur créatininémie est, dans la plupart des cas, dite « normale ». Il est crucial d’estimer la fonction rénale de ces patients, systématiquement à chaque visite, à l’aide de l’une des deux formules recommandées, la formule de CockcroftGault ou la formule aMDRD. Adaptation posologique chez l’insuffisant rénal Rationnel de l’adaptation La pharmacocinétique des médicaments est modifiée chez les patients insuffisants rénaux. La pharmacocinétique consiste en l’étude du devenir des médicaments dans l’organisme. Ainsi, un médicament, une fois administré dans un organisme, va subir quatre phases : l’absorption du médicament dans le compartiment central (le sang) ou phase d’entrée, après administration par une voie autre que la voie IV en bolus : voie orale, percutanée, intramusculaire, sous-cutanée, ou en perfusion IV. Ensuite viennent la distribution, le métabolisme (spontané, cellulaire, hépatique, enzymatique ou non) et l’excrétion du médicament sous forme inchangée ou de métabolites vers l’extérieur de l’organisme (urines, bile, fèces). Ces quatre phases sont appelées phases ADME (absorption, distribution, métabolisme, excrétion) de la pharmacocinétique. Si l’insuffisance rénale entraı̂ne d’évidence une réduction de l’excrétion urinaire des médicaments et/ou de leurs métabolites, celle-ci est également à l’origine de modifications de l’absorption, de la distribution et du métabolisme des médicaments [58]. Ainsi, l’absorption, et en particulier l’absorption orale, des médicaments peut être modifiée chez le patient insuffisant rénal. Il existe de nombreuses variations physiopathologiques comme, par exemple, les modifications du pH gastrique, qui peuvent modifier l’absorption de certains médicaments administrés par voie orale en modifiant leur état d’ionisation. De plus, au niveau intestinal, des modifications de l’intégrité de la paroi intestinale chez les patients insuffisants rénaux ont été rapportées, du fait d’une inflammation intestinale asymptomatique observée chez ces patients. Cet état inflammatoire entraı̂ne une augmentation de la perméabilité intestinale et donc, potentiellement, de l’absorption des médicaments [38,85]. Par ailleurs, une diminution de l’activité et de l’expression des enzymes intestinales et hépatiques responsables du métabolisme des médicaments ont été rapportées chez les patients insuffisants rénaux, induisant ainsi une diminution des effets de premier passage intestinal et hépatique [60,61,92]. L’ensemble de ces modifications conduit à une augmentation de la fraction de médicament inchangé qui atteint la circulation systémique chez les patients insuffisants rénaux par rapport aux patients ayant une fonction rénale normale. Les modifications les plus évidentes de la phase de distribution sont celles portant sur la fixation aux protéines plasmatiques. En effet, l’albuminémie des patients insuffisants rénaux est souvent inférieure à celle des sujets sains. Ainsi, les médicaments acidesfaibles seront moins fixés. La fraction libre de médicament dans le compartiment sanguin se trouve ainsi augmentée, et une quantité plus importante de produit est donc disponible pour atteindre le site d’action et/ou pour diffuser dans des compartiments plus profonds de l’organisme. De plus, certaines substances qui s’accumulent chez les patients urémiques vont entrer en compétition avec les médicaments au niveau des sites de fixation aux protéines [16], entraı̂nant ainsi également une réduction de la fixation des médicaments basiques, liés à l’alpha-1 glycoprotéine acide en général présente à des concentrations normales, même chez les patients dont la fonction rénale est altérée. Il a été longtemps considéré que la pharmacocinétique des médicaments, dont la clairance métabolique était très supérieure à la clairance rénale, n’était pas modifiée chez le patient insuffisant rénal. Toutefois, chez certains patients insuffisants rénaux, des modifications majeures du métabolisme peuvent se produire du fait du ralentissement de certaines réactions enzymatiques hépatiques comme les réductions, les acétylations et les oxydations [60,61,92], notamment via les enzymes du cytochrome p450, comme nous l’avons abordé au sujet des effets de premier passage de la phase d’absorption. L’excrétion rénale des médicaments est soumise à trois mécanismes distincts : la filtration glomérulaire, la sécrétion tubulaire et la réabsorption tubulaire. Sont éliminés par filtration glomérulaire les médicaments non liés aux protéines et dont la taille est suffisamment faible pour traverser la membrane glomérulaire. La sécrétion et la réabsorption tubulaires sont des mécanismes de transport actif impliquant des transporteurs différents selon la nature des médicaments. On distingue essentiellement trois types de transporteurs tubulaires rénaux : les transporteurs des anions organiques (OATs, organic anion transporters), les transporteurs des cations organiques (OCTs, organic cation transporters) et les transporteurs qui s’apparentent à la glycoprotéine P [50]. En cas d’insuffisance rénale, ces trois mécanismes d’excrétion peuvent être plus ou moins altérés en fonction de la nature de l’atteinte rénale. Ainsi, des modifications de l’expression et de l’activité de ces transporteurs ont également été rapportées chez des patients insuffisants rénaux, induisant donc des modifications de l’excrétion rénale de différentes substances, dont les médicaments [47,71]. Il existe de plus chez le patient insuffisant rénal un certain nombre de molécules qui s’accumulent du fait de la diminution de la fonction rénale. Ces composés sont appelés « toxines urémiques ». Celles-ci peuvent également induire des modifications de la pharmacocinétique des médicaments en interagissant à différents stades. Ces toxines peuvent, par exemple, entrer en compétition avec les médicaments au niveau de leur site de fixation sur les protéines plasmatiques et, ainsi, entraı̂ner des modifications de leur fraction libre. De plus, elles sont souvent substrats des mêmes transporteurs rénaux, biliaires et hépatiques que ceux qui permettent l’excrétion dans l’urine ou dans la bile ou le captage hépatique des médicaments. Ainsi, ces interactions de transport peuvent induire une diminution de l’excrétion urinaire ou biliaire ou du métabolisme hépatique des médicaments. Les médicaments dont l’excrétion s’effectue par voie urinaire sous forme active, inchangée ou de métabolites, auront les pharmacocinétiques les plus modifiées, avec le plus souvent des conséquences cliniques significatives en termes d’efficacité et de tolérance. En ce qui concerne les médicaments métabolisés par le foie se pose la question de l’altération éventuelle de leur métabolisme, difficile à envisager a priori, mais également celle de l’excrétion secondaire de leur(s) métabolite(s) et de l’activité pharmacologique et/ou de la toxicité éventuelle de ces derniers. En effet, l’élimination des métabolites peut être ralentie et, de ce fait, conduire à une accumulation de ces produits de dégradation induisant un prolongement de l’activité pharmacologique et/ou l’apparition ou l’aggravation de phénomènes toxiques. Les modifications du profil pharmacocinétique des médicaments chez le patient insuffisant rénal résultent de modifications multiples portant sur l’ensemble des phases et pas seulement sur l’excrétion urinaire. Ainsi, RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 695 ONCOLOG IE 696 du fait de la complexité et de la multiplicité des mécanismes concernés, il est impossible d’établir des règles générales en matière d’adaptation posologique, car celles-ci devront être élaborées pour chaque médicament en fonction de son profil pharmacocinétique chez le patient insuffisant rénal, réalisé au cours d’études spécifiques. Dans l’attente de chapitres spécifiques bien faits dans les résumés des caractéristiques du produit (RCP) des médicaments commercialisés, il est indispensable de faire appel à la littérature, afin de savoir si la posologie d’un médicament doit ou non être adaptée chez un patient insuffisant rénal et de connaı̂tre les modalités de ces adaptations. Il existe trois méthodes différentes pour adapter la posologie d’un médicament chez le patient insuffisant rénal. Le rationnel en est simple, dès lors que l’on a intégré la notion qu’administrer une dose normale de médicament chez un patient insuffisant rénal peut, en réalité, correspondre à un surdosage, du fait des modifications de sa pharmacocinétique liées à l’IRC. L’on peut, tout d’abord, utiliser la « méthode de la dose » qui consiste à administrer le médicament au même rythme, mais à une dose plus faible. La « méthode de l’intervalle » s’applique en augmentant l’intervalle d’administration, tout en conservant la même dose unitaire. La troisième méthode est dite « mixte » et combine les deux premières. Le choix d’une méthode plutôt que d’une autre ne peut être recommandé de manière systématique, car les médicaments présentent des comportements différents chez le patient insuffisant rénal, y compris au sein d’une même classe thérapeutique. Les sels de platine en sont un bon exemple en cancérologie pour ce qui est des chimiothérapies, et les bisphosphonates en sont un autre pour les traitements de support. En effet, au sein de ces deux classes thérapeutiques comportant chacune trois médicaments différents, deux médicaments nécessitent une adaptation posologique chez le patient insuffisant rénal, selon des modalités qui diffèrent (carboplatine et cisplatine ; pamidronate et zolédronate), alors que le troisième ne nécessite pas d’adaptation posologique ou exceptionnellement pour les stades 4 et 5 (oxaliplatine, ibandronate). Pour un médicament donné, la méthode d’adaptation posologique appropriée dépendra donc des caractéristiques pharmacocinétiques du médicament et de son mécanisme d’action (molécule-mère active, métabolites actifs, prodrogue, etc.). Recommandations d’adaptation posologique L’adaptation de la posologie des médicaments est une question cruciale en oncologie, car la majorité des médicaments utilisés est concernée, du fait de leur néphrotoxicité potentielle chez ces patients à haut risque d’insuffisance rénale aiguë (IRA) iatrogène du fait de l’IRC préexistante ou bien parce qu’il est nécessaire d’adapter la posologie de ces médicaments anticancéreux, afin d’éviter un surdosage secondaire à un défaut d’élimination du médicament et les effets toxiques, souvent sévères, qui en découlent. Dans l’étude IRMA [55], les médicaments anticancéreux prescrits étaient relevés et ensuite classés suivant deux critères : la néphrotoxicité potentielle du médicament (« oui » ou « non ») et la nécessité ou non d’adapter la posologie de ce médicament chez les patients insuffisants rénaux (« oui », « non » ou « ND » pour les médicaments pour lesquels aucune donnée n’était disponible dans la littérature internationale sur ce thème). Les résultats pour le groupe de patients présentant un cancer du sein rapportent que la majorité des médicaments utilisés, des prescriptions et des patients traités étaient concernés par cette question (Tableau 5). Ainsi, du fait de la prévalence importante de l’IRC chez les patients présentant un cancer du sein et de la forte proportion de médicaments anticancéreux utilisés qui interagissent avec le rein, que ce soit en termes d’adaptation posologique ou de toxicité rénale potentielle, il est indispensable de recourir à des sources d’informations fiables pour prescrire ces traitements à leur juste posologie chez ces patients. Dans une étude de Launay-Vacher et al. [57], la disponibilité et la qualité des informations disponibles dans les RCP ont été évaluées. Cette étude comparait, pour dix médicaments anticancéreux, les informations proposées dans le dictionnaire Vidal® 2002, le Physician’s Desk Reference® (PDR) 2002, américain et un ouvrage synthétisant les données disponibles dans la littérature internationale, le GPR® anticancéreux, Guide de prescription et rein [52]. La classification utilisée était la suivante, et les résultats de l’étude sont présentés dans le Tableau 6. Cette étude met l’accent sur le manque d’informations facilement accessibles sur ce thème de l’adaptation posologique des médicaments anticancéreux chez le patient IRC. Récemment, toutefois, plusieurs travaux Tableau 5. Médicaments anticancéreux prescrits chez les patients présentant un cancer du sein dans l’étude IRMA [48,49,56] Médicaments (en DCI) [n = 40] Prescriptions (lignes de prescription) [n = 3 465] Patients traités recevant au moins 1 médicament de ce type (n = 1 702) DCI : dénomination commune internationale ; NC : non connue. Adaptation posologique Oui ou NC (%) Néphrotoxicité Oui ou NC (%) 65 53,2 80,2 65 41,7 76,9 Tableau 6. Disponibilité et qualité des informations disponibles sur l’adaptation posologique de dix médicaments anticancéreux dans le Vidal®, le PDR® et la littérature internationale (GPR® anticancéreux) [57] DCI Classification Vidal® PDR® Littérature internationale (GPR® anticancéreux) Docétaxel D D Cisplatine D D 5-FU B D Paclitaxel C D Ifosfamide C C Carboplatine A A Vinorelbine C A Doxorubicine D D Épirubicine C C Gemcitabine B C A/B Pas d’adaptation posologique jusqu’à 10 ml/min de fonction rénale, pas de données chez le patient hémodialysé A Il est nécessaire d’adapter la posologie. Les modalités sont connues A Il n’est pas nécessaire d’adapter la posologie, quelle que soit la sévérité de l’insuffisance rénale A Il n’est pas nécessaire d’adapter la posologie, quelle que soit la sévérité de l’insuffisance rénale A Il est nécessaire d’adapter la posologie. Les modalités sont connues A Il est nécessaire d’adapter la posologie. Les modalités sont connues A Il n’est pas nécessaire d’adapter la posologie, quelle que soit la sévérité de l’insuffisance rénale A Il n’est pas nécessaire d’adapter la posologie, quelle que soit la sévérité de l’insuffisance rénale A/B Pas d’adaptation de la posologie jusqu’à 10 ml/min de fonction rénale, pas de données chez le patient hémodialysé B Aucune donnée chez les patients dont la fonction rénale est inférieure à 30 ml/min A : médicaments pour lesquels une information complète et pratique était donnée dans le RCP, expliquant leur utilisation chez les patients souffrant d’insuffisance rénale ; B : médicaments pour lesquels l’information était moins claire et/ou pour lesquels aucun conseil clair sur leur utilisation chez ces patients n’était donné ; C : médicaments pour lesquels l’information se résumait à une simple phrase telle que « utiliser avec précaution » ou « utiliser des doses plus faibles » ; D : quand aucune indication relative à l’utilisation des médicaments chez les patients insuffisants rénaux n’était donnée, résultant en une absence totale des mots « insuffisance rénale » du RCP ou en une simple phrase telle que « il n’y a pas de données/d’études sur la pharmacocinétique/ l’utilisation chez les patients présentant une altération de la fonction rénale ». ont été réalisés en ce sens, et des recommandations de sociétés savantes (Société internationale d’oncologie gériatrique, SIOG) [66] ou des synthèses de la littérature bien faites sont disponibles [51,65]. Même si celles-ci ne portent pas spécifiquement sur le patient présentant un cancer du sein, ces recommandations peuvent être transposées dans ce contexte. Invariablement, les adaptations posologiques sont présentées dans ces sources par médicament. Dans le cadre des Recommandations pour la pratique clinique de Saint-Paul de Vence 2009, les recommandations d’adaptation posologique sont présentées par protocole de chimiothérapie dans l’objectif d’adapter ces recommandations à la pratique clinique quotidienne. Traitements spécifiques : tableaux par protocoles Les recommandations d’adaptation posologique des traitements spécifiques sont présentées en plusieurs tableaux : l’hormonothérapie (Tableau 7), les théra- Recommandations (niveau 2, grade B) L’IRC est fréquente chez les patients atteints d’un cancer du sein. Les traitements spécifiques et les traitements de support : – nécessitent une adaptation posologique chez les patients IRC pour éviter un surdosage et une toxicité ; – peuvent être toxiques pour le rein et nécessiter la mise en place de mesures de prévention spécifiques. Les patients atteints de cancer et d’IRC nécessitent une prise en charge pluridisciplinaire (oncologues, néphrologues, infirmières, etc.). pies ciblées (Tableau 8) et les protocoles de chimiothérapie impliquant des combinaisons de trois produits (Tableau 9). Les protocoles de chimiothérapie incluant des combinaisons de deux produits sont présentés sous la forme de deux tableaux distincts RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 697 698 Tableau 7. Recommandations d’adaptation posologique pour l’hormonothérapie DCI Posologies recommandées selon la fonction rénale en ml/min ONCOLOG IE ≥ 90 89–60 59–30 Tamoxifène Anastrozole Exemestane Létrozole Fulvestrant 29–15 < 15 et dialyse 20 à 40 mg/j 1 mg/j 25 mg/j 2,5 mg/j ND Recommandations (niveau 2, grade B) Aucune adaptation posologique n’est nécessaire pour l’hormonothérapie chez le patient insuffisant rénal. Les traitements hormonaux peuvent être prescrits à leur posologie usuelle, quel que soit le niveau de fonction rénale. Tableau 8. Recommandations d’adaptation posologique pour les thérapies ciblées DCI Posologies recommandées selon la fonction rénale en ml/min ≥ 90 Bevacizumab Lapatinib Trastuzumab 89–60 Schéma 1 Schéma 2 59–30 29–15 < 15 et dialyse 10 mg/kg par 2 semaines 15 mg/kg par 3 semaines 1 250 mg/j 4 mg/kg, puis 2 mg/kg par semaine 8 mg/kg, puis 6 mg/kg par 3 semaines Hebdo 3 semaines ND Hebdo : Hebdomadaire. Recommandations Bevacizumab (Avastin®) – Aucune adaptation posologique nécessaire ; – prescription à la posologie usuelle quel que soit le niveau de fonction rénale (niveau 2, grade B). Trastuzumab (Herceptin®) – Aucune adaptation posologique nécessaire ; – prescription à la posologie usuelle quel que soit le niveau de fonction rénale (niveau 2, grade B). Lapatinib (Tyverb®) Aucune étude chez le patient insuffisant rénal ; pas de recommandation possible lorsque la fonction rénale est inférieure à 60 ml/min par 1,73 m2. Tableau 9. Recommandations d’adaptation posologique pour les protocoles de chimiothérapie combinant trois produits DCI Posologies recommandées selon la fonction rénale en ml/min ≥ 90 Protocole CMF Cyclophosphamide Méthotrexate 5-fluoro-uracile Protocole FAC 5-fluoro-uracile Adriamycine Cyclophosphamide Protocole FEC 100 (ou 50 ou 75) 5-fluoro-uracile Épirubicine Cyclophosphamide Protocole TAC Docétaxel Adriamycine Cyclophosphamide 600 mg/m2 40 mg/m2 600 mg/m2 500 mg/m2 50 mg/m2 500 mg/m2 500 mg/m2 100 mg/m2 (ou 50 ou 75) 500 mg/m2 75 mg/m2 50 mg/m2 500 mg/m2 89–60 59–30 29–15 < 15 et dialyse 600 mg/m2 32 mg/m2 600 mg/m2 600 mg/m2 20 mg/m2 600 mg/m2 ND (Tableaux 10 et 11), pour les patients dont la fonction rénale est comprise entre 30 et 59 ml/min et ceux dont la fonction rénale est comprise entre 15 et 29 ml/min. Recommandations Protocoles FAC, FEC (100, 75 et 50) et TAC Aucune adaptation posologique nécessaire ; prescription à la posologie usuelle quel que soit le niveau de fonction rénale (niveau 2, grade B) Protocole CMF globalement les mêmes risques en termes de toxicité rénale que les AINS, et leur prescription doit s’entourer des mêmes précautions [23]. Recommandations Recommandations pour les protocoles associant deux produits Une adaptation posologique est recommandée pour la plupart des traitements utilisés à visée antalgique dans la prise en charge de la douleur neuropathique (niveau 2, grade B) Une adaptation posologique est recommandée sur la dose de méthotrexate (niveau 2, grade B) Bisphosphonates Recommandations Recommandations pour les protocoles associant deux produits (niveau 2, grade B) Traitements de support Antalgiques Le maniement des antalgiques chez le patient insuffisant rénal peut être délicat, en particulier dans le cas des opioı̈des ou dans le rationnel de choix des médicaments des différents paliers, pour lesquels il est important de considérer également la disponibilité des informations sur leur maniement, en cas d’IRC, comme un critère de choix [54]. En accord avec le groupe de travail sur la prise en charge de la douleur de ces Recommandations pour la pratique clinique de Saint-Paul de Vence 2009, il a été décidé, pour cette édition, de centrer le propos sur les traitements de la douleur neuropathique. Les recommandations issues du GPR® antalgiques et anti-inflammatoires [42], du GPR ® antidépresseurs et anxiolytiques [43], du GPR ® médecine générale [53], du GPR® neurologie [100] et celles de la littérature internationale sont présentées dans le Tableau 12. Il est toutefois important de préciser que les antiinflammatoires non stéroı̈diens (AINS) présentent une potentielle néphrotoxicité qu’il est nécessaire d’avoir en mémoire. Ces médicaments doivent être utilisés avec précaution chez les patients présentant une IRC et doivent être probablement évités, dès lors que la fonction rénale est inférieure à 60 ml/min, voire contre-indiqués lorsque celle-ci est inférieure à 30 ml/ min. Ces médicaments étant très largement utilisés dans le cadre d’une automédication, que ce soit chez les patients atteints de cancer ou dans la population générale, une information claire et une sensibilisation des patients à ces potentiels effets délétères sur la fonction rénale doivent être délivrées. De même, les anti-inflammatoires spécifiques de la cyclo-oxygénase de type 2 (les COX-2), comme le célécoxib, présentent Les bisphosphonates étant quasi exclusivement excrétés dans les urines sous forme inchangée, leur pharmacocinétique est modifiée chez les patients dont la fonction rénale est anormale, et il est ainsi nécessaire d’adapter la posologie de ces médicaments chez le patient insuffisant rénal. Le clodronate administré per os est en règle générale bien toléré, même lorsqu’il est administré à sa posologie usuelle chez des patients présentant une IRCT. Toutefois, il est recommandé d’initier le traitement à une posologie réduite chez les patients dont la fonction rénale est inférieure à 30 ml/ min [52]. Dans le cas des bisphosphonates administrés par voie IV, le pamidronate et l’ibandronate peuvent être administrés à leur posologie usuelle chez les patients dont la clairance de la créatinine (estimée par la formule de Cockcroft-Gault ou la formule aMDRD) est supérieure à 30 ml/min. En revanche, le zolédronate nécessite une adaptation posologique dès 60 ml/min de clairance de la créatinine, avec une réduction de la posologie pour chaque diminution de 10 jusqu’à 30 ml/min. Pour les patients dont la clairance de la créatinine est inférieure à 30 ml/min, le zolédronate ne doit pas être utilisé. Le pamidronate et l’ibandronate peuvent être utilisés à une posologie adaptée au niveau de l’insuffisance rénale, y compris chez les patients dialysés. Il est intéressant de noter que la posologie de l’ibandronate doit être adaptée chez les patients dont la fonction rénale est inférieure à 30 ml/min, car il a été démontré qu’à la posologie recommandée de 2 mg, la charge de médicament délivrée à l’os était similaire à celle observée après l’administration d’une dose usuelle chez des patients présentant une fonction rénale normale. Ainsi, cette adaptation posologique est-elle recommandée, car cette dose est suffisante et non pas en raison d’une toxicité éventuelle [12–14] (Tableau 13). Le denosumab est un anticorps monoclonal antiRANK ligand, qui présente des propriétés intéressantes dans la prise en charge des métastases osseuses du cancer. Il n’existe aucune donnée sur sa pharmacocinétique ou son adaptation posologique éventuelle chez les patients présentant une IRC. Toutefois, ce médicament étant un anticorps monoclonal, il est métabolisé par les cellules du lit vasculaire, et l’insuffisance rénale n’a, en théorie, pas d’influence sur son élimination. RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 699 30 60 à 80 37,5 75 30 60 à 80 250 15 250 30 25 175 175 25 150 150 Vinorelbine 90 100 135 100 100 90 100 135 75 75 80 50 50 80 30 30 Cyclophosphamide CDDP Paclitaxel Docétaxel Dose monothérapie adaptée Dose adaptée à AUC (formule de Calvert et al.) 600 600 Carbo Platine Dose usuelle Dose monothérapie adaptée Taxane Dose usuelle 50 75 50 50 60 600 60 175 60 60 Adriamycine (doxorubicine) 75 175 75 75 90 25 90 90 Épirubicine Anthracycline 50 50 75 600 75 75 Caelyx 500 500 5-FU 600 80 600 600 750 80 750 750 1237.5 80 1 650 1 237,5 1 500 60 à 80 1 500 25 1 500 75 1 500 100 2 000 1 500 Capécitabine 5-fluoro-uracile 2 500 1 875 750 15 750 750 1250 175 1 250 1 250 1 500 50 1 500 1 500 Gemcitabine 2 000 150 2 000 2 000 Tableau 10. Recommandations d’adaptation posologique pour les protocoles de chimiothérapie combinant deux produits pour une fonction rénale comprise entre 30 et 59 ml/min ONCOLOG IE 600 75 600 600 Cyclophosphamide 25 37,5 25 25 25 30 135 30 30 30 30 Vinorelbine 700 Cyclophosphamide Vinorelbine Platine Dose usuelle Dose monothérapie adaptée Taxane Carbo CDDP Placitaxel Docétaxel 150 175 250 15 37.5 150 175 250 30 75 25 30 60 à 80 25 30 60 à 80 Dose adaptée à AUC (formule de Calvert et al.) 600 600 90 100 135 100 100 90 100 135 75 75 80 50 50 80 30 Dose monothérapie adaptée 30 Dose usuelle 50 75 50 50 60 600 60 175 60 60 Adriamycine (doxorubicine) 75 175 75 75 90 25 90 90 Épirubicine Anthracycline 50 50 Caelyxé 75 600 75 75 500 500 5-FU 600 80 600 600 750 80 750 750 1 650 2 000 Contre-indiquée Capécitabine 5-fluoro-uracile 750 15 750 750 1 250 175 1 250 1 250 1 500 50 1 500 1 500 2 000 150 2 000 2 000 600 75 600 600 Cyclophosphamide 25 37,5 25 25 30 135 30 30 30 30 Vinorelbine RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 2 500 Gemcitabine Tableau 11. Recommandations d’adaptation posologique pour les protocoles de chimiothérapie combinant deux produits pour une fonction rénale comprise entre 15 et 29 ml/min 701 702 Tableau 12. Recommandations d’adaptation posologique pour les antalgiques utilisés dans la prise en charge de la douleur neuropathique DCI (nom commercial) Posologies recommandées selon la fonction rénale en ml/min ONCOLOG IE ≥ 90 Gabapentine (Neurontin®) Paroxétine (Déroxat®) Prégabaline (Lyrica®) Tramadol p.o. (Topalgic®) Venlafaxine (Effexor®) Amitryptilline (Laroxyl®) Carbamazépine (Tégrétol®) Citalopram p.o. et i.v. (Séropram®) Clomipramine p.o. et i.v. (Anafranil®) Clonazépam p.o. (Rivotril®) Clonazépam i.m./i.v. (Rivotril®) 89–60 900 à 1 200 mg/j 59–30 29–15 < 15 et dialyse 300 mg toutes les 12 heures 300 mg toutes les 24 heures Débuter à 10 mg/j 300 mg toutes les 48 heures Débuter à 75 mg/ j par paliers de 25 mg Dose maximale 300 mg/j 50 à 200 Débuter à 25 à 50 mg/j par paliers de 25 mg Dose maximale 150 mg/j mg/j Débuter à 25 mg/j par paliers de 25 mg Dose maximale 75 mg/j 50 à 100 mg/j 10 à 50 mg/j 150 mg/jn puis 300 mg/j Dose maximale 600 mg/j 40 à 100 mg toutes les 4 à 6 heures 75 à 375 mg/j 25 à 175 mg/j 75 à 150 mg/j p.o. 25 à 100 mg/j par voie i.v. ou i.m. 400 à 1 200 mg/j 10 à 60 mg/j Débuter à 10 mg/j 50 à 150 mg/j Débuter à 25 mg/j 50 à 150 mg/j Débuter à 0,05 mg/kg par jour 50 à 150 mg/j Débuter à 0,25 à 1 mg toutes les 4 à 6 heures Tableau 13. Recommandations d’adaptation posologique pour la prise en charge médicamenteuse des métastases osseuses : bisphosphonates [52] DCI (nom commercial) Posologies recommandées selon la fonction rénale (ml/min) ≥ 90 Clodronate p.o. Pamidronate (Aredia®) Zolédronate (Zometa®) Ibandronate (Bondronat®) Clastoban Lytos® ® 89–60 59–30 1 600 à 3 200 mg/j 1 040 à 2 080 mg/j 90 mg 60–90 mg 4 mg 59–50 ml/min : 3,5 mg 49–40 ml/min : 3,3 mg 39–30 ml/min : 3,0 mg 6 mg Recommandations Une adaptation posologique est recommandée pour les bisphosphonates dans la prise en charge des métastases osseuses. Clodronate et pamidronate (niveau 2, grade B) Ibandronate et zolédronate (niveau 1, grade A) Antiémétiques De nombreuses chimiothérapies émétisantes nécessitent le recours à la prescription de médicaments antiémétiques pour lutter contre les nausées et les vomissements qui sont un facteur majeur d’intolérance 29–15 < 15 et dialyse 800 à 1 600 mg/j 520 à 1 040 mg/j 60 mg Non recommandé 2 mg au traitement. Chez le patient insuffisant rénal, de la même façon que pour n’importe quel autre médicament, il est nécessaire de se poser la question d’une adaptation posologique éventuelle, ces médicaments n’étant pas dénués d’effets indésirables s’ils sont surdosés. Les recommandations disponibles dans la littérature sont présentées dans le Tableau 14 ci-après. Il est important de noter que la prescription de ces médicaments peut permettre d’éviter une déshydratation en prévenant les vomissements, déshydratation qui peut, lorsqu’elle se manifeste, entraı̂ner une IRA fonctionnelle et/ou majorer la néphrotoxicité des médicaments que le patient a reçus, sels de platine par exemple. Ainsi, prévenir les vomissements peut avoir également un intérêt dans un objectif de prévention d’une néphrotoxicité médicamenteuse. Tableau 14. Recommandations d’adaptation posologique pour les antiémétiques utilisés dans la prise en charge des nausées et des vomissements DCI (nom commercial) Source Posologies recommandées selon la fonction rénale en ml/min ≥ 90 Aprépitant (Emend®) Dompéridone (Motilium®) Granisétron (Kytril®) Métoclopramide (Primpéran®) Métopimazine (Vogalène®) Ondansétron (Zophren®) 89–60 59–30 29–15 Bergman et al. [11] 125 mg à j1 et 80 mg à j2 et j3 Brogden et al. [17] 10 à 20 mg, 3 à 4 fois/jour Li et al. [65], Aapro et al. [1], Albares et al. [2] Bateman et al. [10], Lehmann et al. [62] ND Balaskas et al. [7], Deshpande et al. [24] 2 à 3 mg/j, i.v. ou p.o. 2 à 10 mg/kg par jour 15 à 30 mg/j 8 mg toutes les 12 heures 1 à 5 mg/kg par jour < 15 et dialyse Débuter à 1 mg/j 0,6 à 3 mg/kg par jour En l’absence de données, débuter à la plus faible dose Débuter à 4 mg toutes les 12 heures Recommandations Recommandations pour les antiémétiques Une adaptation posologique est recommandée pour la plupart des traitements antiémétiques (niveau 2, grade B) Toxicité rénale des médicaments Recommandations pour la prévention Rationnel de la toxicité rénale et de sa prévention Traitements spécifiques L’incidence de la toxicité rénale secondaire à l’administration d’un médicament est en augmentation. Il s’agit d’un événement grave qui s’associe à une morbidité et à une mortalité importante. Celle-ci est liée principalement au terrain sur lequel la défaillance rénale survient, mais également à l’altération de la filtration glomérulaire en elle-même, qui met la vie du patient en danger en l’exposant à de multiples complications. Le rein est un organe particulièrement sensible à la toxicité des médicaments circulant dans l’organisme, car il reçoit chaque minute 25 % du débit cardiaque dans un réseau capillaire qui représente une très importante surface endothéliale. De plus, l’existence d’un gradient osmotique corticomédullaire favorise l’accumulation interstitielle de toxiques au niveau de la papille et de la médullaire. Enfin, le rôle fondamental du tubule rénal dans la réabsorption des solutés l’expose à une concentration particulièrement élevée des molécules de médicaments dans la lumière tubulaire mais aussi dans la cellule tubulaire. Le diagnostic de toxicité rénale d’un médicament est le plus souvent posé devant une altération aiguë de la filtration glomérulaire, une des présentations cliniques les plus fréquentes, les autres (atteinte tubulaire isolée, syndrome néphrotique, syndrome hémolytique et urémique) étant largement sous-estimées, car moins bien repérées par les cliniciens. La gravité du problème est soulignée par la possibilité d’évolution vers l’IRC et la dialyse. Sels de platines Cisplatine L’IRA aux platines est dose-dépendante et principalement observée pour des doses supérieures à 50 mg/m2. Son incidence augmente avec le nombre de cures réalisées. Elle est très nettement favorisée par l’usage concomitant d’autres traitements néphrotoxiques. Les facteurs de risque de l’IRA au cisplatine sont essentiellement la déshydratation, l’association aux produits de contrastes iodés ou à d’autres traitements néphrotoxiques, le mode d’administration (mieux toléré en perfusion continue que sous forme de bolus IV) ou un traitement antérieur par le cisplatine. Elle est largement favorisée par l’administration de cisplatine en hôpital de jour chez les patients qui, s’ils bénéficient d’une hydratation satisfaisante avant et durant la perfusion du cisplatine, présentent souvent des troubles digestifs 24 ou 48 heures après leur sortie, alors qu’ils sont dans l’impossibilité de maintenir une hydratation satisfaisante par voie orale du fait des nausées et des vomissements. L’atteinte rénale secondaire au cisplatine se présente habituellement comme une IRA à diurèse conservée, de profil tubulo-interstitiel et en règle réversible. L’apparition d’une atteinte tubulaire attestée par l’existence d’une enzymurie et d’une hypomagnésémie sévère qu’il faut systématiquement rechercher et compenser, d’une faible protéinurie de type tubulaire et/ou d’un trouble de la concentration des urines précèdent l’altération de la filtration glomérulaire. Dans les premières études, plus de 70 % des RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 703 ONCOLOG IE 704 patients traités par le cisplatine développaient une IRA. L’hydratation agressive par du sérum physiologique a permis de réduire cette néphrotoxicité d’environ 50 %. En effet, actuellement il est rapporté que seuls 42 % des patients traités par de fortes doses de cisplatine développent une néphrotoxicité [22]. Il faut noter que l’atteinte rénale liée au cisplatine peut être irréversible même en l’absence d’insuffisance rénale préalable, et ce, malgré une hydratation correcte. La posologie du cisplatine doit être adaptée à la fonction rénale. L’hydratation par le sérum physiologique reste la base du traitement préventif de la néphrotoxicité lors de l’utilisation du cisplatine. Selon le poids du patient et l’état des fonctions cardiaques et rénales, une perfusion de deux litres de sérum physiologique, toutes les 12 à 24 heures avant le traitement et au moins 24 heures après le traitement, permet de minimiser les lésions rénales au cours de l’usage du cisplatine. L’objectif de l’hydratation est de maintenir au moins une diurèse de 125 ml/heure (1,7 l/m2 par 24 heures). Cette hydratation doit être réalisée sans avoir recours aux diurétiques. En effet, chez l’homme, il n’existe aucune preuve de leur efficacité dans la prévention de la toxicité rénale du cisplatine. Ainsi, dans une étude randomisée portant sur un groupe de patients recevant du cisplatine associé à une hydratation avec ou sans mannitol, les auteurs n’ont observé aucun effet bénéfique de l’ajout du mannitol sur la fonction rénale des patients après plusieurs cures [4]. De plus, dans une autre étude, un protocole d’hydratation à base de sérum salé isotonique était associé à une moindre diminution de la fonction rénale après administration de cisplatine que le même protocole d’hydratation auquel on ajoutait du furosémide ou du mannitol [86]. Il n’existe, par conséquent, aucune preuve aujourd’hui de l’intérêt des diurétiques, furosémide et mannitol, dans la prévention de la toxicité rénale du cisplatine, ces derniers pouvant même être délétères par rapport à une hydratation seule. Le groupe de travail sur le cancer de la Société européenne de pharmacie clinique a récemment publié des recommandations en ce sens [56]. En parallèle, un traitement antiémétique efficace doit être administré concomitamment pour minimiser la déplétion hydrique. L’hydratation IV par du sérum physiologique devrait dans l’idéal être maintenue au moins trois jours après l’arrêt du cisplatine. Cependant, chez certains patients, malgré l’hydratation salée agressive et la supplémentation magnésique, le risque d’insuffisance rénale persiste (Tableau 15). Carboplatine. Le carboplatine est moins néphrotoxique que le cisplatine. Néanmoins, il a été rapporté des cas de toxicité rénale au carboplatine, notamment à fortes doses supérieures à 1 500, à 2 000 mg/m2, où l’incidence peut atteindre 29 %, avec 8 % de patients hémodialysés [15,80]. Les mesures de prévention sont donc absolument indispensables avant l’utilisation de cette thérapeutique. Les formules de Calvert et al. et de Chatelut et al. permettent de déterminer la dose totale de carboplatine à administrer à un patient en fonction de l’aire sous la courbe désirée (AUCcible) qui représente l’efficacité attendue et de la clairance du platine, rénale (DFG) et extrarénale. Calculer la dose de carboplatine avec l’une ou l’autre de ces formules permet d’adapter la posologie du carboplatine à la fonction rénale du patient traité. Formule de Calvert et al. [18] : Dose (mg) = AUCcible × (DFG + 25) AUCcible = aire sous la courbe « cible » de carboplatine désirée ; DFG = débit de filtration glomérulaire, estimé en pratique par la formule de Cockcroft-Gault (DFG = 0 ml/min chez l’hémodialysé). Formule de Chatelut et al. [19] : Dose (mg) = AUC cible × (0,134 × poids + 218 × poids (1–0,00457 × âge) × (1–0,314 × sexe)/Scr Avec le poids en kg, l’âge en années, le sexe = 0 pour les hommes et 1 pour les femmes et la créatininémie (Scr) en mmol/l. Chez le patient IRC, une hydratation par sérum physiologique doit également être assurée, surtout audelà d’une dose de 800 mg/m2. Le carboplatine est Tableau 15. Recommandations pour la prévention de la toxicité rénale des sels de platine et du cisplatine en particulier [49] Mesures générales Avant la chimiothérapie Pendant la chimiothérapie Après la chimiothérapie Avant la cure suivante – Évaluation de la fonction rénale (Cockcroft-Gault, aMDRD, bandelette urinaire confirmée par ECBU et protéinurie avant le début du traitement) ; – vérification de l’état d’hydratation (examen clinique, ionogramme urinaire, pression artérielle). – Hydratation (sérum physiologique 250 ml/h 6 à 8 heures avant la chimiothérapie) sans diurétiques ; – prévention des complications digestives (antiémétiques) ; – contrôle biologique de la créatininémie, de l’ionogramme ; – magnésémie, kaliémie si cisplatine ; – surveillance de la diurèse, pression artérielle ; – éviter les médicaments néphrotoxiques associés (aminosides, AINS, produits de contraste iodés, bisphosphonates et en particulier le zolédronate). – Si traitement ambulatoire, prescrire un contrôle biologique à distance (5 à 8 jours après). – Vérifier que la fonction rénale est restée normale ou redevenue normale ; – noter l’augmentation de créatinine induite par la cure antérieure pour éventuellement adapter la dose suivante. moins émétisant que le cisplatine, ce qui doit probablement contribuer à sa moindre toxicité. Oxaliplatine. L’oxaliplatine est un autre dérivé du platine, pour lequel il n’existe pas de données dans la littérature permettant de préciser clairement sa néphrotoxicité. Il a été cependant rapporté deux cas de nécrose tubulaire aiguë secondaire à l’utilisation de l’oxaliplatine [46,78]. Les rares données disponibles dans la littérature suggèrent qu’il n’est pas nécessaire d’adapter la posologie de l’oxaliplatine chez le patient IRC [52]. Recommandations Recommandations pour la prévention de la toxicité rénale des sels de platine et du cisplatine en particulier (niveau 1, grade A) Une adaptation posologique est recommandée pour le cisplatine et le carboplatine. Gemcitabine La microangiopathie thrombotique (MAT) associée à la gemcitabine est un événement rare mais grave. L’incidence de la MAT imputable à la gemcitabine, d’après les données de pharmacovigilance du laboratoire, est estimée à 0,015 % pour 78 800 patients exposés et à 0,072 % sur la période de janvier 1998 à avril 2003 (sur 13 854 patients traités) [31]. Entre 1987 et 1997, 12 observations de syndrome hémolytique et urémique ont été rapportées, atteignant également l’homme et la femme chez des patients dont l’âge moyen était de 55,5 ans (37 à 73). Dans une étude récente, l’incidence (rétrospective d’après l’analyse de 706 dossiers de patients d’une seule institution) était évaluée à 0,4 % [41]. Le délai d’apparition de la MAT s’étend de quelques jours à plusieurs mois après la fin du traitement [33,72]. La dose cumulée de traitement est également très variable (de 2 450 à 48 000 mg/m2), et seuls certains auteurs considèrent la MAT comme dosedépendante [87,98]. La physiopathologie de la MAT, secondaire aux chimiothérapies et, en particulier à la gemcitabine, n’est pas formellement élucidée, mais l’augmentation du facteur Von Willebrand et la diminution d’une métalloprotéase, l’ADAMTS 13, capable de cliver les multimères du facteur Von Willebrand, ont été associées à ces pathologies. Les signes cliniques et biologiques associés à la MAT n’ont rien de spécifique, mais il faut noter la fréquence des formes biologiques discrètes nécessitant une surveillance de la présence de schizocytes et de l’haptoglobine, en plus du taux d’hémoglobine et du taux de plaquettes régulièrement surveillés, pour assurer le diagnostic chez les patients à risque. L’hypertension artérielle est fréquemment associée et peut, même si elle apparaı̂t de novo, être un signe devant faire suspecter le diagnostic de MAT. L’atteinte rénale est variable, parfois limitée à une altération modérée de la fonction rénale précédée d’une faible protéinurie et d’une hématurie. Le tableau peut être plus grave avec une IRA oligurique nécessitant la dialyse. Plus d’un patient sur deux présentent une protéinurie et une hématurie, les essais de phase II ayant montré qu’une protéinurie, une hématurie, une augmentation de l’urée ou de la créatine de grade 1/2 étaient retrouvés chez 58, 41, 17 et 8 % des patients respectivement [34,35]. Ces données suggèrent soit des formes mineures transitoires, soit une sous-documentation de ces épisodes qui passeraient inaperçus. Le diagnostic de l’atteinte rénale repose sur la biopsie rénale, parfois impossible à réaliser chez un patient anémique et thrombopénique. Lorsqu’elle est réalisée, elle retrouve des caractéristiques histologiques typiques d’un syndrome hémolytique et urémique classique, avec parfois des lésions irréversibles, et permet de mieux préciser le pronostic rénal. Les facteurs de risque mis en évidence sont essentiellement l’association au cisplatine avec deux observations d’IRA ayant entraı̂né le décès chez des patients traités par cette combinaison d’anticancéreux. Le pronostic semble plus grave que pour les MAT apparaissant dans d’autres contextes (40 à 90 % vs 10 à 20 % [67,75,87,91], d’autant que les MAT sont souvent observées chez des patients présentant une maladie métastatique. L’aspirine et le dipyridamole sont parfois utilisés pour le traitement de la MAT, mais aucune étude ne documente l’intérêt de ces stratégies. Il a été proposé d’utiliser les stéroı̈des en association aux perfusions de plasma et aux échanges plasmatiques [45,74]. L’intérêt de ces traitements n’est documenté que pour les MAT dans le cadre du purpura thrombopénique thrombocytopénique dans d’autres contextes cliniques, avec un effet sur la mortalité. Dans tous les cas, l’effet du traitement est surtout observé sur la mortalité mais peu sur la fonction rénale, les patients dialysés d’emblée ne récupérant qu’exceptionnellement leur autonomie rénale. La majorité des patients atteints de MAT présentent des formes métastatiques de cancer ou à forte masse tumorale, situation qui peut également être associée à une MAT, indépendamment du traitement. Dans la littérature, les taux d’incidence de la MAT chez le patient souffrant de cancer (indépendamment du traitement) sont compris entre 2,6 et 13 % [29,33,77,88,90]. Antiangiogéniques Les médicaments antiangiogéniques agissent sur l’angiogenèse et la néoangiogenèse tumorales, en les inhibant, par leur mode d’action sur la voie du vascular endothelial growth factor (VEGF). Il existe plusieurs molécules disponibles aujourd’hui agissant soit directement sur le VEGF circulant pour le bevacizumab, anticorps monoclonal anti-VEGF, et l’aflibercept, « récepteur soluble » au VEGF, soit en bloquant la RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 705 ONCOLOG IE 706 propagation du signal à partir des récepteurs au VEGF en inhibant les tyrosines-kinases de ces récepteurs (sunitinib, sorafenib, axitinib). D’autres molécules de la même classe sont en cours de développement et devraient faire leur apparition dans les années futures. Aujourd’hui, seul le bevacizumab est indiqué dans le traitement des patientes atteintes d’un cancer du sein. Ce médicament a été le premier développé et commercialisé et est le chef de file de la classe des « antiangiogéniques ». Néanmoins, il est important de considérer l’ensemble de la classe thérapeutique, les effets indésirables rénovasculaires, à type d’hypertension artérielle, de protéinurie et, dans de rares cas, d’insuffisances rénales, étant communs à toutes les molécules de la classe. Les effets rénovasculaires du bevacizumab ont été observés dès les études de développement de ce médicament, et une méta-analyse publiée en 2007 précise l’incidence de ces derniers [101]. Ainsi, le risque relatif (RR) de développer une protéinurie était de 1,4 pour le bevacizumab à faible dose (3,5 ou 7,5 mg/kg par dose) et de 2,2 pour les fortes doses (10 ou 15 mg/kg par dose). Le RR pour l’hypertension artérielle était plus important : 3,0 et 7,5, respectivement pour les faibles et les fortes doses. Il n’existe pas de données sur l’apparition d’une insuffisance rénale ou l’aggravation d’une insuffisance rénale préexistante chez un patient présentant une IRC avant l’introduction du bevacizumab. Des cas de MAT sous bevacizumab ont été également rapportés [26], de même qu’avec le sunitinib. Le sunitinib est également connu pour entraı̂ner l’apparition d’une hypertension artérielle ou l’aggravation d’une hypertension artérielle préexistante. Dans les essais de développement, 30 vs 4 % des patients présentant un cancer du rein métastatique et 15 vs 11 % des patients présentant des tumeurs stromales gastrointestinales avaient présenté un effet indésirable de ce type [95]. Dans une autre publication plus récente, les auteurs rapportent sept cas de protéinurie et d’hypertension artérielle chez des patients ayant reçu le sunitinib seul (quatre patients) ou le sorafenib suivi par le sunitinib (deux patients). Le septième patient avait été traité par sorafenib seul et avait présenté une protéinurie sans hypertension artérielle [76]. Une synthèse des effets rénovasculaires observés sous bevacizumab utilisé dans le traitement d’un cancer du sein est présentée dans le Tableau 16. Ce médicament étant le seul à ce jour à disposer d’une AMM dans cette indication, aucune donnée fiable n’est disponible pour les autres médicaments de cette classe. Il est, néanmoins, particulièrement important de considérer ces effets rénovasculaires comme un effet classe des médicaments antiangiogéniques, anticorps monoclonaux ou inhibiteurs de tyrosines-kinases. La prise en charge des patients présentant un effet rénovasculaire sous traitement antiangiogénique a été détaillée récemment dans le cadre de recommandations pour la pratique clinique élaborées conjointement par la Société de néphrologie, la Société française d’hypertension artérielle, l’Association nationale des enseignants de thérapeutique et la Fédération francophone de cancérologie digestive [36]. Sont présentées ci-après les quelques situations pour lesquelles la poursuite d’un traitement par médicament antiangiogénique doit être considérée comme contre-indiquée. Des données complémentaires sont disponibles, pour les autres anti-angiogéniques et d’autres types de tumeurs [6,8,25,27,30,32, 40,44,79,82,83,97,99]. Ces situations sont rares et doivent conduire à l’arrêt du traitement antiangiogénique : – hypertension maligne ; – leucoencéphalopathie postérieure ; – MAT ; – syndrome néphrotique sévère mal toléré cliniquement (hypotension sévère, patient confiné au lit [avis néphrologique déterminant]) ; – insuffisance rénale rapidement progressive sévère (avis néphrologique déterminant) ; – poussée d’insuffisance cardiaque non contrôlée (avis cardiologique déterminant) ; – accident vasculaire cérébral ; – infarctus du myocarde (avis cardiologique déterminant). Tableau 16. Effets rénovasculaires des antiangiogéniques Bevacizumab + paclitaxel Bevacizumab + docétaxel Dose 1 : 7,5 mg/kg par 3 semaines Dose 2 : 15 mg/kg par 3 semaines Bevacizumab + chimiothérapie à base de taxanes Bevacizumab + chimiothérapie Protéinurie (tous grades) Protéinurie (> 3,5 g) [%] Hypertension (tous grades) [%] Hypertension (grades 3–4) [%] Références – Dose 1 : 0,4 % 3,5 0 – 17,8 14,8 0,4 Miller et al. [70] Miles et al. [69] Dose 2 : 3,2 % – 0,4 0,9 13,6 – 3,2 3,2 Smith et al. [93] 1,9–3,4 – 8,9–10 Robert et al. [81] Recommandations La survenue d’une hypertension artérielle, d’une protéinurie, d’une insuffisance rénale n’est pas systématiquement une contre-indication à la poursuite d’un traitement par médicament antiangiogénique (avis néphrologique recommandé). L’existence d’une hypertension artérielle, d’une protéinurie, d’une insuffisance rénale n’est pas systématiquement une contre-indication à l’initiation d’un traitement par médicament antiangiogénique (avis néphrologique recommandé). Un certain nombre de situations cliniques nécessitent, néanmoins, l’interruption du traitement par médicament antiangiogénique (avis néphrologique impératif). Accord d’experts ayant une meilleure longévité et un faible taux de complications [3]. Pour toutes ces raisons, les fistules sont préférables aux greffes, et les greffons sont préférables aux cathéters. Cependant, elles nécessitent un minimum de maturation d’un mois (idéalement trois à quatre mois) avant leur première utilisation. La cartographie préopératoire évalue le réseau veineux et artériel augmentant les possibilités de construction d’AVF chez 70 % des patients. Moins de 10 % de l’hémodialyse chronique devrait être alors maintenue sur les cathéters permanents. Les cathéters restent la méthode de choix pour les accès temporaires de moins de trois semaines. Recommandations pratiques Les lignes directrices sont les suivantes [37] : Insuffisance rénale et cancer : préservation du capital veineux Complications des abords vasculaires utilisés en cancérologie L’utilisation de dispositifs d’accès veineux est omniprésente dans la médecine moderne. La mise en place et le maintien de l’accès par voie IV pour les patients avec une IRC nécessitent des considérations spéciales propres à cette population de patients. La préservation du capital veineux (réseaux périphérique et central) est d’une importance vitale pour l’avenir de l’accès d’hémodialyse [96]. La mise en place de cathéter veineux a un risque de blesser les veines, de nuire à la circulation veineuse en provoquant sclérose, sténose ou thrombose [68]. La création d’une fistule artérioveineuse (AVF) devient alors difficile, voire impossible, suite à des blessures veineuses répétées. En outre, le bon fonctionnement à long terme de l’accès vasculaire est un facteur influant sur la morbidité et la mortalité des patients d’hémodialyse. Dans ce contexte sont nées des directives internationales de la National Kidney Foundation–Kidney Disease Outcomes Quality Initiative (NKF–KDOQI) [39] dont l’objectif est, dans un premier temps, d’identifier précocement les patients susceptibles d’avoir besoin d’un accès veineux et, dans un second temps, de fournir un algorithme clair dans la prise en charge optimale de l’accès vasculaire. Cela implique l’approche d’une équipe pluridisciplinaire (néphrologue, infirmière de soins, chirurgien vasculaire et radiologue) et un temps suffisant pour la planification, la création et la maturation des accès vasculaires. La perméabilité vasculaire et l’accès adéquat d’hémodialyse sont essentiels pour une gestion optimale des hémodialyses chez les patients avec IRC. L’AVF est la méthode la plus appropriée pour répondre aux critères de prestation adéquate de dialyse, tout en – identifier les patients IRC qui devront nécessiter d’un traitement d’hémodialyse : – une clairance de la créatinine estimée (formule de Cockcroft-Gault ou de aMDRD) inférieure à 30 ml/ min par 1,73 m2 (stade 4) [ou plutôt en cas de néphropathie rapidement progressive ou de conditions cliniques spécifiques telles que le diabète ou graves telles que les maladies vasculaires périphériques] doit conduire à un avis néphrologique. L’éducation de la préservation du capital veineux peut, d’ores et déjà, débuter dès le stade 3 ; – chez ces patients, le capital veineux devra être préservé. Chaque patient avec IRC doit avoir un plan détaillé sur la préservation de l’accès vasculaire et leur potentiel d’accès : – les veines dorsales de la main, de préférence dans la main dominante, seront privilégiées pour les prélèvements et les poses de cathéters périphériques ; – les veines du bras, en particulier les veines céphaliques du bras non dominant, ne doivent pas être utilisées pour les ponctions veineuses ou les cathéters IV ; – les veines jugulaires internes sont les veines à privilégier pour l’accès veineux central, y compris les chambres implantables, de préférence du côté controlatéral de l’AVF ; – les veines jugulaires externes sont une alternative acceptable pour l’accès veineux ; – les veines sous-clavières ne doivent pas être utilisées pour l’accès veineux central. Recommandations Recommandations pour la préservation du capital veineux (niveau 3, grade C) RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 707 ONCOLOG IE 708 Aucune étude scientifique n’a démontré l’augmentation du risque vasculaire et du risque d’endommagement du réseau veineux, suite à la mise en place d’une chambre implantable en jugulaire interne, comparée aux autres cathéters. La mise en place de tout cathéter en sous-clavier comporte un haut risque de sténose vasculaire (entre 25 et 50 %) sur tout le réseau des membres supérieurs et compromet fortement la réussite d’une AVF. Références 1. Aapro M, Granisetron (2004) An update on its clinical use in the management of nausea and vomiting. Oncologist 9(6): 673-86 2. Albares MP, Betlloch I, Guijarro J, et al. (2003) Severe pruritus in a haemodialysed patient: dramatic improvement with granisetron. Br J Dermatol 148(2): 376-7 3. Allon M (2007) Current management of vascular access. Clin J Am Soc Nephrol 2(4): 786-800 4. 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C’est aussi un facteur important à prendre en compte au cours du traitement des cancers, étant donné son impact sur la réussite du traitement, le pronostic vital et la qualité de vie des patients. En effet, l’allongement de la survie des cancers du sein localisés nous oblige à reconsidérer certains aspects de la prise en charge globale des patientes : cette population semble avoir un risque majoré de survenue de pathologies chroniques, par exemple seconds cancers ou maladies cardiovasculaires. La prise de poids survenant pendant ou au décours du traitement adjuvant est un problème largement sous-évalué avec des conséquences multiples : dyslipidémies associées, stéatose hépatique, majoration de douleurs d’origine dégénérative, risque de lymphœdème, pour ne citer que les plus fréquentes. Alors que la prise de poids a un retentissement négatif sur la qualité de vie des patientes, et augmente le risque de comorbidités, le contrôle du poids, où diverses interventions sur le mode de vie sont susceptibles d’après certains essais récents demandant à être confirmés, de réduire le risque de récidive. Il y a donc matière à développer des stratégies de prévention tertiaire portant sur la nutrition et le mode de vie après traitement des cancers du sein localisés. Le bénéfice attendu pourrait concerner la morbidité liée au traitement et à la qualité de vie globale, mais un effet sur la survie spécifique est peut-être envisageable. En tout état de cause, cette prise en charge répondrait à une demande des patientes, désireuses de modifier leur mode de vie, et qui, faute d’interlocuteurs, se tournent souvent vers une automédication avec des substances potentiellement néfastes (antioxydants à doses supraphysiologiques, vitaminothérapies, phytoestrogènes). De nombreux aspects nutritionnels méritent donc d’être évalués et d’être pris en compte dans le cadre de la prise en charge des femmes atteintes de cancer du sein. En 2008–2009, le groupe de travail s’est focalisé sur la prise de poids liée aux traitements et sur l’alimentation après la maladie. D’autres aspects importants, tels que la dénutrition ou les recommandations nutritionnelles pour les femmes à haut risque de cancer du sein, pourront être abordés ultérieurement. La bibliographie de ce rapport inclut les articles publiés jusqu’au 16 octobre 2008. Prise de poids liée aux traitements L’indice de masse corporelle (IMC = poids en kg/taille en mètre carré) est considéré comme normal dans la fourchette 18,5–24,9 pour la population générale. Le surpoids (25 IMC ≤ 29,9) et l’obésité (IMC ≥ 30) ont connu au cours des dernières décennies une augmentation majeure de leur prévalence dans les pays occidentaux. L’obésité et le surpoids sont des facteurs associés à un risque accru de cancer pour de nombreuses localisations et en particulier le cancer du sein [23,127]. La prise de poids est un facteur de risque de cancer du sein en phase postménopausique (en absence de traitement hormonal substitutif) dans la cohorte européenne EPIC [85]. La prévalence du surpoids et de l’obésité chez les femmes atteintes de cancer du sein est importante. En Amérique du Nord, comme en témoignent des essais randomisés ou d’intervention nutritionnelle, 50 à 57 % des patientes ont un IMC supérieur ou égal à 25, et 20 à 27 % sont obèses [29,45,106]. En France, parmi 14 709 patientes atteintes de cancer du sein incluses entre 1981 et 1999, plus de 22,4 % sont en surpoids et 8 % sont obèses, mais la prévalence de l’obésité a augmenté de façon dramatique, passant de 4,5 % en 1981 à 11 % en 1999 [91]. Seulement, 4,5 % des femmes ont un IMC inférieur à 18,5 dans cette cohorte française. L’obésité et le gain de poids en cas de cancer du sein sont probablement des facteurs de moindre qualité de vie [28], mais les données cliniques manquent pour étayer ce point. L’obésité et le surpoids pourraient aussi être associés à une sévérité plus marquée des bouffées de chaleur chez les femmes récemment traitées pour le cancer du sein [55]. L’obésité et le surpoids majorent le lymphœdème postchirurgical [98]. Prise de poids en cours de traitement : incidence et facteurs de risque L’incidence de la prise de poids en cours de traitement adjuvant est mal évaluée par les grands essais randomisés d’hormonothérapie [57,31] ou de chimiothérapie [68,93,94,95,112]. Seul, l’essai ATAC (Arimidex, Tamoxifen Alone or in Combination) [8] évalue la prise de poids qui semble moins importante sous antiaromatase que sous tamoxifène. RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 711 712 ONCOLOG IE La majorité des données provient donc des études de cohorte incluant des patientes en rémission prolongée après traitement local [22,28,84,118]. Ces études sont pour l’essentiel américaines, mais des données européennes commencent à être disponibles [67]. Il est difficile d’avoir une idée précise de la prise de poids moyenne, car les chiffres diffèrent d’une étude à l’autre, qui plus est, le gain est souvent exprimé en pourcentage du poids initial. Néanmoins, on peut considérer que la prise de poids moyenne après traitement est de l’ordre de 3 kg (pouvant atteindre une dizaine de kilogrammes dans certains cas), et qu’elle concerne 40 à 50 % des patientes [28,67]. Les données de la littérature ne permettent pas de mettre en évidence de façon indiscutable des facteurs de risque de prise de poids. Cependant, les données disponibles suggèrent que : – la chimiothérapie est le facteur le plus souvent retrouvé dans la littérature [43] ; – le rôle de l’hormonothérapie est retrouvé dans certaines études, mais les données sont discordantes et la prise de poids semble moins importante que celle liée à la chimiothérapie [43] ; – dans certaines études, les femmes jeunes ont un risque accru [92], mais ce point demeure débattu ; – la période ménopausique dans l’année suivant le traitement serait un facteur de risque (mais il existe un lien entre administration de chimiothérapie et survenue de la ménopause) [56]. Nous n’avons pas de données fiables sur le risque en fonction du type de chimiothérapie, notamment avec les schémas les plus modernes contenant des taxanes. Le risque lié aux traitements associés à la chimiothérapie, et en particulier aux corticoı̈des n’est pas connu avec précision, faute d’études en nombre suffisant, mais il est possible que ceux-ci majorent la prise de poids. Le fait qu’une plus grande durée du traitement, ainsi que l’association de plus de cytotoxiques, soit un risque supplémentaire plaide dans ce sens [43]. Enfin, la radiothérapie locorégionale ne paraı̂t pas avoir d’effet sur le risque de prise de poids. Au total, les données actuellement disponibles ne permettent pas d’individualiser une sous-population de femmes atteintes de cancer du sein dont le risque de prise de poids serait majoré. Enfin, les mécanismes de la prise de poids sous traitement demeurent mal connus. Cette prise de poids ne semble pas résulter d’une hyperphagie des patientes [42]. Par contre, elle est associée à une diminution de la dépense énergétique, du fait de la réduction de la masse maigre, et de l’activité physique, et cette diminution n’est pas compensée par une réduction de la prise alimentaire [41,63,78]. Le rôle de la ménopause chimioinduite ne peut être exclu comme facteur aggravant de la prise de poids. L’association entre l’obésité, des manifestations dépressives ou des perturbations du comportement alimentaire chez les patientes à risque de récidive reste à confirmer [114]. Au total, la prise de poids après traitement du cancer du sein est un phénomène dont l’ampleur a longtemps été méconnue, et qui commence à peine à être pris en compte. Ses conséquences à terme restent à évaluer. La prise de poids en cours de traitement concerne près d’une femme sur deux (niveau de preuve 2). La physiopathologie de cette prise de poids reste largement méconnue, et les données actuellement disponibles ne permettent pas d’individualiser les populations à risque même si les patientes recevant une chimiothérapie semblent les plus concernées. Recommandations pour la prévention de la prise de poids pendant les traitements Il n’est pas possible de proposer des recommandations adaptées à des profils particuliers de patientes, car nous ne sommes pour l’instant pas en mesure de les définir avec précision. Néanmoins, les propositions suivantes paraissent légitimes : 1. Surveiller la courbe pondérale en cours de traitement : mesurer le poids (et calculer l’IMC) dès le diagnostic et à chaque hospitalisation ou consultation et le porter chaque fois dans le dossier du patient (accord d’experts). 2. Inciter les patientes à maintenir le poids pendant le traitement et après le traitement : cela passe notamment par une activité physique adaptée (cf. recommandations du groupe activité physique), une prise en charge diététique paraissant d’une façon générale souhaitable. Cela passe donc par : – une activité physique adaptée ; – des conseils pour suivre les recommandations nutritionnelles pour la population générale du Programme national nutrition–santé (PNNS) ; – une consultation diététique en cas de surpoids, d’obésité, de variations de poids ou de perturbations de la prise alimentaire ; – le suivi des recommandations sur l’alimentation après la maladie (niveau 2, grade B). 3. Limiter l’usage des corticoı̈des au minimum nécessaire : préférer les autres classes d’antiémétiques (accord d’experts). 4. Développer la recherche : dans la mesure où la prise de poids reste mal évaluée, tant en ce qui concerne son incidence chez les patientes françaises que sa physiopathologie et ses conséquences à long terme, le groupe recommande fortement le développement de programmes de recherche clinique sur cette question, passant notamment par la constitution de grandes cohortes de patientes traitées pour cancers localisés dont le suivi devra être prolongé (accord d’experts). Alimentation après la maladie La nutrition est l’un des déterminants des risques de cancer primaire, de récidive et de seconds cancers. Pour la prévention primaire des cancers en général, les recommandations nutritionnelles sont d’éviter la consommation régulière de boissons alcoolisées, de maintenir un poids normal et d’avoir une alimentation équilibrée et diversifiée et une activité physique régulière. La brochure PNNS, destinée aux professionnels de santé « nutrition et prévention des cancers : des connaissances scientifiques aux recommandations » [44], regroupe les recommandations nutritionnelles actuelles, établies à partir des conclusions du panel d’experts internationaux publiées dans le rapport WCRF/AICR [127] en tenant compte du contexte français (cf. Fig. 1). Pour le cancer du sein, par rapport à d’autres facteurs de risque (âge, non-fécondité ou fécondité tardive, etc.), l’inactivité physique, l’obésité postménopausique et la consommation d’alcool apparaissent comme les principaux facteurs de risque évitables. Après le cancer du sein, le risque de développer un autre cancer persiste et justifie de mettre en place une prévention tertiaire. En effet, d’après une étude de survie portant sur 335 191 femmes américaines ayant eu un diagnostic de cancer du sein entre 1973 et 2000, le risque de développer un second cancer primaire, après un cancer du sein, a été estimé à 12 %. Le temps moyen d’apparition est de 6,2 ans. Les principales localisations de seconds cancers concernés sont : le sein (52 %), le côlon–rectum (10 %), le poumon (8 %), l’endomètre (5 %) et l’ovaire (3 %) [110]. Dans l’analyse de 525 527 femmes ayant présenté un premier cancer du sein (15 % en préménopause, 61 % en postménopause) de 13 registres d’Europe, de Singapore, du Canada et d’Australie, après 7,2 ans de suivi, le risque de seconds cancers est de 1,25 (IC 95 % : [1,24–1,26]) ; ce risque augmente avec le temps passant de 1,04 à un an (IC 95 % : [1,01–1,08]) à 1,42 à dix ans (IC 95 % : [1,39–1,44]) [99]. Dans la série française de l’institut Curie, le risque est de même ordre après un suivi médian de huit ans [91]. Pour les personnes atteintes d’un cancer, le rapport WCRF/AICR [127] indique que l’état des connaissances est encore limité et ne permet pas de faire des recommandations spécifiques, autres que celles de la prévention primaire des cancers. Les personnes ayant eu un diagnostic de cancer doivent bénéficier des conseils d’un professionnel de la nutrition. Si possible, Fig. 1. Principales recommandations nutritionnelles pour la prévention primaire des cancers [44] RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 713 714 ONCOLOG IE et sauf avis contraire (lié au traitement, à l’état physiologique ou nutritionnel, au stade de la maladie), il convient de suivre les recommandations concernant l’alimentation, le poids optimal et l’activité physique. Surpoids et obésité La situation de surpoids ou d’obésité constatée après la maladie est selon les cas, soit présente dès le diagnostic, soit apparue en cours de traitement. Ces deux circonstances sont donc examinées séparément, ci-après. Obésité au diagnostic de cancer du sein et évolution clinique Risque accru de mortalité (niveau de preuve 2) Au diagnostic de la pathologie, l’effet péjoratif de l’obésité–surpoids (poids, IMC) sur le pronostic de cancer du sein est largement démontré, aussi bien en préménopause qu’en postménopause [30,91,120], par de multiples grandes cohortes [26,28]. En comparaison avec les patientes de poids normal, les patientes obèses présentent un risque accru de mortalité toutes causes confondues : HR = 1,31 ; IC 95 % : [1,12–1,54] [45] ; HR = 1,56 ; IC 95 % : [1,01–2,4] [90] ; HR = 1,6 ; IC 95 % : [1,1–2,3] [22]. L’étude prospective (n = 1 692) de Caan et al. [22] retrouve un risque accru de mortalité par cancer du sein (HR = 1,6 ; IC 95 % : [0,9–2,7]). Risque accru de récidives (locale, régionale ou à distance) (niveau de preuve 2) De nombreuses études mettent en évidence un risque accru de récidives associé à l’obésité présente au diagnostic de cancer mammaire [26,38,66]. Dans une étude prospective [90] conduite sur une cohorte australienne (n = 1 360 dont 25 % de surpoids et 12 % d’obésité), l’obésité est associée, quel que soit l’âge des patientes, à un risque accru de récidives de cancer du sein (HR = 1,57 ; IC 95 % : [1,11–2,22] ; p = 0,02), après ajustement sur le nombre de ganglions axillaires, l’âge au diagnostic, les critères tumoraux (taille, grade, récepteurs hormonaux). Le risque ajusté est évalué, en préménopause à 1,50 (IC 95 % : [1,00–2,26] ; p = 0,06) et en postménopause à 2,03 (IC 95 % : [0,99–4,21] ; p = 0,07). Majed et al. [91], à partir d’une large cohorte française (n = 14 709 dont 8 % de patientes obèses), déterminent que l’obésité est un facteur pronostique négatif sur le risque de récidive métastatique (HR = 1,32 ; IC 95 % : [1,19–1,48] ; p < 0,0001) et de survie sans récidive (HR = 1,20 ; IC 95 % : [1,08–1,32] ; p = 0,002). Risque accru de seconds cancers (niveau de preuve 2) Dignam et al. [45] montrent que le risque de cancer du sein controlatéral est plus élevé chez les femmes obèses que chez les femmes présentant un poids normal ou réduit (HR = 1,58 ; IC 95 % : [1,10–2,25]). Chez 1 508 femmes, après un suivi moyen de 5,6 ans, (198 décès dont 128 par cancer), Cleveland et al. [30] montrent également que parmi les femmes préménopausées, celles qui ont une prise de poids supérieure à 16 kg entre l’âge de 20 ans et l’année qui précède le diagnostic de cancer du sein, ont un risque deux fois plus élevé de mortalité toutes causes confondues (HR = 2,45 ; IC 95 % : [0,96–6,27]) ou spécifique au cancer initial (HR = 2,09 ; IC 95 % : [0,80–5,48]), par rapport aux patientes de poids stable [30]. Ce risque de mortalité est également majoré (de deux à trois fois) chez les patientes postménopausées qui ont un gain de poids supérieur à 12,7 kg entre l’âge de 50 ans et l’année précédant le diagnostic de cancer, en comparaison avec les patientes de poids stable : risque de mortalité toutes causes confondues (HR = 2,69 ; IC 95 % : [1,63–4,43]) et risque de mortalité liée au cancer du sein (HR = 2,95 ; IC 95 % : [1,36–6,43]). Il en est de même pour le risque de seconds cancers : L’étude d’Abrahamson et al. [1], sur une cohorte de femmes jeunes (n = 1 254), retrouve une augmentation importante de la mortalité toutes causes confondues chez les femmes obèses à l’âge de 20 ans par comparaison aux femmes de poids idéal (HR = 2,49 ; IC 95 % : [1,45–3,40]). Le retour au poids d’avant traitement est rarement observé [92,97]. Récemment, une étude rétrospective de patientes présentant un cancer du sein local avancé (n = 602) a évalué le temps moyen de survie à 7,1 ans pour les patientes obèses versus 12,7 ans pour les patientes de poids normal (p < 0,001) [38]. – HR = 1,62 ; IC 95 % : [1,16–2,24] [45] ; – HR = 1,57 ; IC 95 % : [1,19–2,07] ; p < 0,0001 [91] ; – HR = 3,16 ; IC 95 % : [1,23–8,15] [117]. Parmi ces seconds cancers, les plus fréquents sont les cancers gynécologiques et digestifs, respectivement 38,2 et 23,2 % [91]. Prise de poids après traitement et évolution clinique Prise de poids fréquente et durable (niveau de preuve 2) La prise de poids après le diagnostic de cancer du sein est fréquemment rapportée notamment chez les femmes recevant une chimiothérapie adjuvante. Dans l’étude WHEL, 45 % des patientes ont un gain pondéral supérieur ou égal à 5 % du poids initial, et 10 % seulement retrouvent leur poids initial [118]. Risque de récidive : résultats contradictoires Les études visant à évaluer l’impact de la prise de poids sur le pronostic de la maladie donnent des résultats contradictoires. En effet, certains auteurs l’associent à une augmentation du risque de récidive ou de limitation de la survie, notamment pour les cancers du sein de diagnostic précoce [88]. Camoriano et al. [25] évaluent que le risque de récidive est majoré de 1,5 fois pour les patientes en préménopause dont la prise de poids est supérieure à la moyenne (> 5,9 kg) (durée moyenne du suivi : 6,6 ans) (cf. Fig. 2). Dans la Nurses’ Health Study (NHS), le gain de poids est associé à une augmentation de récidive chez les femmes n’ayant jamais fumé [83]. D’autres auteurs n’identifient aucun effet de la prise de poids après traitement sur le risque de récidive [21], quelle que soit l’importance de cette prise de poids (durée moyenne du suivi : six ans) : HR = 0,8 (IC 95 % : [0,6–1,1]) pour une prise de poids modérée de 5 à 10 % et HR = 0,9 (IC 95 % : [0,7–1,2]) pour une prise de poids supérieure à 10 %. Risque accru de mortalité (niveau de preuve 2) Le risque de mortalité est majoré de 1,6 fois (covariable p = 0,04) pour les patientes en préménopause dont la prise de poids est supérieure à la moyenne (> 5,9 kg) (durée moyenne du suivi : 6,6 ans) [25] (cf. Fig. 2). En revanche, le risque de mortalité n’est pas significativement majoré pour les patientes postménopausées [25]. Ce risque accru de mortalité associée à la prise de poids après diagnostic du cancer est retrouvé dans l’étude récente NHS avec un risque relatif de 1,64 (IC 95 % : [1,07–2,51]) pour une augmentation de l’IMC de 2 kg/m2 [83]. Études d’intervention chez les patientes après traitement Intervention nutritionnelle Dans l’étude prospective randomisée WINS, réalisée à partir d’une cohorte de patientes (n = 2 437) traitées pour un cancer du sein de stade précoce, le groupe d’intervention (n = 975) a bénéficié d’un régime appauvri en lipides de 33 g/j en moyenne sur 12 mois versus 51,3 g pour le groupe témoins (n = 1 462). La réduction significative du risque de récidive observé pour le groupe d’intervention en comparaison avec le groupe témoins (HR = 0,76 ; IC 95 % : [0,60–0,98]), lors de l’analyse intermédiaire à cinq ans, n’a pas été retrouvée dans l’analyse suivante [29]. D’après les résultats communiqués plus récemment lors du congrès de l’ASCO 2008 et non encore publiés, le gain persiste uniquement chez les femmes dont les tumeurs n’expriment pas de récepteurs hormonaux. Dans l’étude prospective randomisée WHEL sur une cohorte de patientes après traitement d’un cancer du sein de stade précoce, le groupe d’intervention (n = 1 537) a été inclus dans un programme de prévention nutritionnelle basé sur un régime enrichi en fruits (+25 %) et en légumes (+65 %), en fibres (+30 %) et appauvri en lipides (–13 %). Le groupe témoins (n = 1 551) a reçu les recommandations nutritionnelles émises pour la population générale : cinq fruits et légumes par jour, fibres supérieures à 20 g/j, lipides inférieurs à 30 % de l’apport énergétique total (AET). Aucune différence en termes de risque de récidive ou de mortalité n’a été observée durant les 7,3 années de suivi entre le groupe intervention et le groupe témoins [106]. Cependant, malgré un apport calorique plus faible, les patientes présentent une prise de poids, ce qui fait suspecter soit une erreur de mesure de l’apport nutritionnel, soit une baisse de l’activité physique. Approche combinée : régime alimentaire et activité physique Dans l’étude prospective randomisée WHEL, les patientes privilégiant un mode de vie associant une consommation quotidienne de cinq (ou plus) portions de fruits et de légumes et une activité physique modérée 100 100 80 80 Gain ≤ median 60 Survival, % Relapse-free survival, % Des études observationnelles de cohortes de patientes atteintes de cancer du sein ont recherché les liens entre la consommation alimentaire et l’évolution clinique après traitement. Il a été ainsi identifié des facteurs augmentant le risque de récidive (consommation de matières grasses et de viande rouge) [66] et d’autres facteurs réduisant le risque de nouveaux cancers du sein (consommation importante de fruits et de légumes) [113]. Partant de ces observations, de grandes études d’intervention nutritionnelle, associées ou non à un programme d’activité physique, ont été initiées (niveau de preuve 2). 40 Gain > median 20 0 0 2 4 6 8 Years from completion of adjuvant therapy Gain ≤ median 60 Gain > median 40 20 10 0 0 2 4 6 8 Years from completion of adjuvant therapy Fig. 2. Risque accru de récidive et de mortalité liée à la prise de poids après traitement du cancer du sein [25] 10 RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 715 716 Survival ONCOLOG IE 1.00 0.98 0.96 0.94 0.92 Lifestyle Low VF/low PA High VF/low PA Low VF/high PA High VF/hign PA 0.90 0.88 0.86 0.84 0 1 2 3 4 5 6 Time (years) 7 8 9 Fig. 3. Survie dans les quatre bras de l’étude WHEL [107] (marche de 30 min, 6 j/sem) présentent un meilleur taux de survie (HR = 0,56 ; IC 95 % : [0,31–0,98]) au cours des dix années de suivi (cf. Fig. 3). Cet effet protecteur voisin de 50 % est retrouvé aussi bien chez les femmes de poids normal que chez les patientes obèses [107] (niveau de preuve 1). Les nombreuses données disponibles à ce jour mettent en lumière le rôle du mode de vie et en particulier, des facteurs nutritionnels et de l’activité physique, dans la survenue des récidives après traitement d’un cancer du sein, même si la qualité des études disponibles est hétérogène. Recommandations pour les patientes en situation de surpoids ou d’obésité après la maladie Dans l’objectif d’améliorer le bien-être des patientes et de limiter les effets indésirables des traitements, la prise en charge optimale doit intégrer une nutrition adaptée de l’activité physique un soutien psychologique et un suivi régulier. 1. Proposer aux patientes une consultation de diététique afin de les faire bénéficier de conseils alimentaires personnalisés (niveau 1, grade A). 2. Leur recommander d’éviter toute prise de poids supplémentaire (niveau 1, grade A). 3. Leur recommander d’adapter l’alimentation en privilégiant les aliments à faible densité énergétique (fruits et légumes) et en limitant les aliments gras et les aliments sucrés (niveau 1, grade A). 4. Leur recommander d’augmenter de façon progressive l’activité physique (suivre au moins les recommandations émises pour la population générale) [niveau 1, grade A]. 5. En cas d’obésité, les orienter vers un programme de réduction pondérale (niveau 1, grade A). Dyslipidémies et risque cardiovasculaire Le risque cardiovasculaire augmente avec l’âge, quel que soit le sexe, mais la femme en période postménopausique présente un risque inférieur à l’homme du fait de son exposition prolongée aux estrogènes et de l’effet bénéfique de cette dernière sur le profil lipidique, le métabolisme glucidique et la répartition des graisses. La ménopause s’accompagne d’une modification de la répartition des graisses, mais aussi d’une augmentation fréquente du poids liée à l’avancée en âge [47]. Les estrogènes sont à l’origine de la répartition prédominante des graisses au niveau des cuisses et des hanches alors que chez l’homme celle-ci est périviscérale, intra-abdominale ; la ménopause et la suppression estrogéniques résultent en une transformation androı̈de de la répartition des graisses et sont des facteurs de risque reconnus d’affections cardiovasculaires [122]. L’augmentation du poids à la ménopause résulte généralement d’une diminution des dépenses énergétiques (baisse de l’activité physique, réduction de la masse musculaire liée à l’âge) mais aussi à de changements éventuels du comportement alimentaire. On note également une modification du profil lipidique avec une élévation du cholestérol total et de la LDL (facteur de risque d’athérosclérose), et dans certaines études une baisse du HDL-cholestérol. La ménopause se traduit donc par une augmentation du risque cardiovasculaire liée à de multiples facteurs. La prise de tamoxifène s’accompagne par contre d’une hypocholestérolémie relative (versus témoin), effet qui n’est pas retrouvé sous-antiaromatase. Prévalence des accidents vasculaires et cardiovasculaires sous traitement hormonal du cancer du sein (niveau de preuve 1) Le tamoxifène possède des effets estrogéniques se traduisant par une réduction significative du risque de décès par infarctus du myocarde (RR = 0,62 ; IC 95 % : [0,41–0,93] ; 27 790 patientes) sans que l’incidence globale de ces accidents soit significativement plus faible (RR = 0,90 ; IC 95 % : [0,66–1,23]) [16]. L’effet de réduction semble d’autant plus marqué que la population étudiée présente un risque cardiovasculaire important (antécédents de coronaropathie ou population avec prévalence élevée de dyslipidémie). Pour le tamoxifène, le risque d’accident vasculaire cérébral est par contre accru (RR = 1,49 ; IC 95 % : [1,16–1,90] ; 38 992 patientes), ainsi que celui d’embolie pulmonaire (RR = 1,88 ; IC 95 % : [1,77–3,01] ; 36 604 patientes) d’un niveau comparable à celui des thromboses veineuses profondes (RR = 1,87 ; IC 95 % : [1,33–2,64] ; 35 817 patientes) [16]. Les antiaromatases ont été comparés au traitement standard antérieur, le tamoxifène. La très récente métaanalyse de Cupponne et al. [36] portant sur les sept essais randomisés principaux (19 818 patients) objective un risque significativement accru d’événements cardiovasculaires de grade 3 ou 4 (RR = 1,31 ; IC 95 % : [1,07–1,60] ; p = 0,007) signant une différence absolue de risque de 0,52 % avec un nombre de 189 patients nécessaires pour observer un de ces événements. Si l’on considère seulement les antiaromatases de troisième génération (anastrazole, exemestane, létrozole), la différence (0,57 %) est toujours significative (RR = 1,34 ; IC 95 % [1,09–1,63] ; p = 0,0038) avec 165 patients nécessaires pour observer un effet. Ce risque accru existe qu’il s’agisse de traitement d’attaque ou de switch précoce tamoxifène–antiaromatase [36]. Il semble que le risque ait été surestimé lors des premières publications du fait d’un suivi d’événements plus précoce. Ce risque pourrait dépendre du temps d’exposition, d’autant plus élevé que l’exposition aux antiaromatases est plus longue contrairement à l’effet du tamoxifène. D’après ces auteurs, il est possible que ce faible risque disparaisse si l’on adopte une surveillance correcte du profil lipidique. Un essai comparant létrozole versus placebo après cinq ans de tamoxifène ne montre, en tout cas, pas de majoration du risque cardiovasculaire par rapport à une population témoin [57,102]. Concernant les accidents thromboemboliques veineux, les antiaromatases comparés au tamoxifène présentent un risque moindre d’accidents (RR = 0,53 ; IC 95 % : [0,42–0,65] ; p < 0,0001). Ce risque correspond à une différence absolue de 1,17 %, soit un nombre de 85 patients pour observer un événement. Ce risque persiste qu’il s’agisse d’une stratégie de traitement d’attaque ou de switch précoce. Le risque des accidents thromboemboliques et vasculaires cérébraux est probablement identique à celui de la population témoin [57,102]. Prise en charge des dyslipidémies La prévention cardiovasculaire a des effets démontrés chez les femmes ménopausées [3]. La recherche d’une dyslipidémie repose sur l’exploration d’une anomalie lipidique (EAL), qui détermine les concentrations de cholestérol total, triglycérides, HDL-cholestérol et LDLcholestérol. Le diagnostic de cancer du sein et son traitement par hormonothérapie imposent ce bilan. Le bilan lipidique est considéré comme normal pour des taux de LDL-cholestérol inférieurs à 1,60 g/l (4,1 mmol/l), triglycérides inférieurs à 1,50 g/l (1,7 mmol/l) et HDLcholestérol supérieurs 0,40 g/l (1 mmol/l). La prise en charge médicamenteuse d’une éventuelle anomalie ne se distingue pas de celle des autres patients à risque [3]. Les facteurs de risque cardiovasculaire à prendre en compte en cas de dyslipidémies sont représentés par : – l’âge, 60 ans pour la femme habituellement, mais dans le cas du cancer du sein, la ménopause induite prend la même valeur ; – les antécédents familiaux de maladie coronaire précoce, soit infarctus du myocarde, soit mort subite : avant 55 ans chez le père ou chez un parent du premier degré de sexe masculin ; avant 65 ans chez la mère ou chez un parent du premier degré de sexe féminin. – un tabagisme actuel ou arrêté depuis moins de trois ans ; – une hypertension artérielle permanente traitée ou non ; – un diabète de type 2 traité ou non ; – un taux de HDL-cholestérol inférieur à 0,40 g/l (1,0 mmol/l). À l’opposé, un taux sanguin de HDL-cholestérol supérieur à 0,60 g/l (1,5 mmol/l) est considéré comme un facteur protecteur que l’on soustrait au score de niveau de risque cardiovasculaire. Une intervention thérapeutique est indiquée en fonction du taux de LDL-cholestérol dans chaque situation (un, deux ou trois facteurs de risque). La prescription d’hypolipémiant est fonction de l’état cardiovasculaire, des facteurs de risques individuels et des anomalies constatées du taux de LDL-cholestérol. Une hypertriglycéridémie supérieure ou égale à 4 g/l (4,6 mmol/l), quel que soit le niveau du cholestérol total doit également être traitée. En cas d’anomalie de l’EAL, une mesure de la glycémie à jeun doit être réalisée de façon systématique à la recherche d’un diabète de type 2. En absence de changement des habitudes alimentaires d’un événement cardiovasculaire ou d’une augmentation du poids, il n’y a pas lieu de répéter le bilan lipidique avant cinq ans s’il est normal. L’objectif thérapeutique dépend ensuite du niveau de risque et détermine le taux cible de LDL-cholestérol. L’âge et la ménopause constituant deux facteurs de risque, la concentration de LDL-cholestérol doit être inférieure à 1,90 g/l (4,90 mmol/l). L’abaissement de la LDL-cholestérolémie est le meilleur indicateur d’efficacité de la prévention cardiovasculaire par les mesures diététiques et les hypolipémiants. Le bilan doit être contrôlé trois mois après institution du traitement. Eu égard au risque éventuel de prise de poids liée au traitement, et aux données épidémiologiques entre nutrition et risque de cancers ou de maladies cardiovasculaires, le conseil diététique s’avère primordial. La réduction de la consommation de graisses totales (à moins de 35 % de l’AET en France ; 20 à 30 % pour certaines recommandations nord-américaines [46]), en particulier des graisses saturées (si possible s 10 %) et l’augmentation de la consommation d’acides gras polyinsaturés, en particulier de la série n-3, sont souhaitables. Une limitation du cholestérol alimentaire, voire l’utilisation d’aliments enrichis en stérols végétaux, est conseillée en cas d’anomalies du bilan lipidique. La réduction de la consommation de glucides à index glycémique rapide et la préférence pour des aliments à index glycémique bas tels que les produits céréaliers riches en fibres et micronutriments doivent être conseillées. L’augmentation de la consommation de fruits et de légumes est un facteur de protection cardiovasculaire ; des méta-analyses de cohortes portant sur la relation entre le risque cardiovasculaire (coronarien et accidents vasculaires cérébraux) et la consommation de fruits et de légumes ont montré des résultats convergents et des relations doses-dépendantes [37,65]. Un effet bénéfique de cette consommation sur la RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 717 ONCOLOG IE 718 pression artérielle est également observé [4]. Cependant, les essais d’intervention chez des hommes coronariens sont pour l’instant sans effet clinique [20]. C’est aussi le cas du Women’s Health Initiative Randomized Controlled Dietary Modification Trial qui vise à mesurer l’effet sur la survenue de maladies cardiovasculaires de conseils diététiques pour augmenter la consommation de fruits et de légumes à cinq portions par jour et réduire les apports lipidiques chez des femmes ménopausées [76]. La limitation de la consommation d’alcool est également recommandée [3]. Ainsi, le tamoxifène améliore le profil lipidique et réduit le risque d’événements cardiaques graves liés à l’âge et à la ménopause, et cet effet n’est pas constaté avec les antiaromatases. Bien qu’il n’ait pas été montré que les inhibiteurs de l’aromatase affectaient de manière importante le profil lipidique ou la survenue d’événements cardiovasculaires par rapport à une population témoin, il paraı̂t prudent de suivre les taux de lipides sanguins et de prévenir les risques cardiovasculaires au même titre que dans la population générale [109]. – une limitation de l’apport en acides gras saturés (graisses d’origine animale), au profit des acides gras mono- ou polyinsaturés ; – une augmentation de la consommation en acides gras polyinsaturés oméga-3 (poissons) ; – une augmentation de la consommation de fibres et de micronutriments naturellement présents dans les fruits, les légumes et les produits céréaliers ; – une limitation du cholestérol alimentaire, voire l’utilisation d’aliments enrichis en stérols végétaux. À ces recommandations, s’ajoute la nécessité de : – limiter la consommation d’alcool ; – contrôler le poids ; – corriger une sédentarité excessive. En dehors des formes familiales de dyslipidémies, pour les patients avec zéro ou un facteur de risque cardiovasculaire associé, les mesures nutritionnelles et l’activité physique doivent, le plus souvent, permettre à elles seules d’atteindre les objectifs thérapeutiques (niveau 1, grade A). Du fait du risque augmenté d’accidents cardiovasculaires et de dyslipidémies habituellement contemporains de la ménopause, une EAL et une prévention des pathologies cardiovasculaires selon les recommandations applicables à la population générale s’imposent. Il est impératif de réaliser l’EAL avant la mise en route de l’hormonothérapie. Le traitement hypolipémiant est justifié en cas de facteur de risque cardiovasculaire supplémentaire et d’anomalies du bilan lipidique (Tableau 1). Les mesures diététiques (alimentation et activité physique) visant à réduire le risque cardiovasculaire sont de particulière importance, et doivent être conseillées à toutes les patientes atteintes de cancer du sein. Vitamines D, calcium et prévention de l’ostéoporose Recommandations pour la prise en charge des dyslipidémies et la prévention des maladies cardiovasculaires L’âge et la ménopause constituant un facteur de risque, les concentrations de LDL-cholestérol doivent être inférieures à 1,90 g/l (4,9 mmol/l). 1. Dépister les dyslipidémies (niveau 1, grade A). 2. Aider les patientes à suivre les recommandations diététiques [3] Il est recommandé, en raison de la concordance des données et des impacts multiples d’un bon équilibre alimentaire, qu’une prise en charge nutritionnelle rigoureuse et adaptée soit mise en place pour chaque patient. Un traitement diététique adapté, visant à modifier le comportement nutritionnel, et associé à la pratique d’exercices physiques réguliers, permet d’éviter l’instauration d’un traitement médicamenteux dans de nombreux cas. Il doit, pour cela, être instauré avec la conviction du prescripteur et celle du patient. Les modifications du régime alimentaire comprennent quatre catégories de mesures : L’ostéoporose est une diminution de la solidité de l’os susceptible d’entraı̂ner des fractures. Elle consiste en une altération de la densité osseuse et de la qualité de l’os [104]. Le risque cumulé pour une femme de présenter une fracture (lifetime risk) liée à l’ostéoporose est estimé entre 30 et 40 % [104]. Il existe des facteurs de risque qui ont été établis par un groupe de travail de l’OMS et qui augmentent ce risque cumulé de fracture [82]. Le risque de fracture est lié à la présence d’une ostéoporose mise en évidence par ostéodensitométrie, cette mesure permettant d’évaluer le risque individuel. Risque osseux chez les femmes traitées pour cancer du sein Chez les femmes ménopausées traitées pour un cancer du sein, les inhibiteurs des aromatases ont augmenté les risques de perte osseuse et de fracture par rapport à celui qui était observé avec les antiestrogènes comme le tamoxifène. Ce risque est encore augmenté lorsque les femmes sont traitées par ces molécules avant la ménopause, après suppression ovarienne quelle que soit la méthode utilisée [33] (Fig. 4). De la même façon, la suppression de la fonction ovarienne liée à la chimiothérapie est responsable d’une augmentation du risque. Cette augmentation du risque pose donc la question Tableau 1. Indication d’un traitement hypolipémiant chez les patientes avec cancer du sein Patientes ayant une élévation de LDL-cholestérol Valeur d’instauration du traitement médicamenteux g/l (mmol/l) Valeur cible de LDL-cholestérol g/l (mmol/l) Prévention primaire des patientes avec cancer du sein > 1,90 (4,9) malgré une prise en charge diététique suivie pendant six mois > 1,60 (4,1) < 1,60 (4,1) > 1,30 (3,4) < 1,00 (2,6) Prévention primaire des patientes avec cancer du sein ayant au moins un autre facteur de risque Prévention secondaire des patientes ayant une maladie coronaire patente < 1,30 (3,4) 10.0 Naturally occurring bone loss CTIBL Bone loss at 1 year, % 8.0 6.0 4.0 2.0 0 Premenopausal womena Postmenopausal womena Menopausal womenb Ovarian failure secondary to chemotherapyd Al therapy in postmenopausal womenc Al therapy plus GnRH agonist in postmenopausal womene Fig. 4. Comparaison de la perte osseuse au niveau de la colonne lombaire selon le vieillissement, et les thérapeutiques utilisées dans le cancer du sein [33] de la conduite diagnostique à tenir et de la prévention à mettre en œuvre [58]. Tamoxifène et risque osseux Le risque lié au traitement antiestrogénique semble limiter et ne représente pas un problème clinique. En préménopause et en association avec les agonistes de LH-RH, le traitement est responsable d’une perte limitée de la densité osseuse. En postménopause, le tamoxifène est au contraire responsable d’une augmentation de la densité osseuse dans les différentes parties du squelette en raison de son action agoniste des estrogènes. Des effets similaires ont été observés avec le raloxifène. exemestane). La perte de densité osseuse est de l’ordre de 1 à 2 % par an et de 7 à 8 % sur cinq ans de traitement. Elle est associée à une modification des marqueurs de la résorption osseuse. Les trois principaux inhibiteurs des aromatases sont associés à un risque augmenté de fracture comparé à celui observé sous tamoxifène : létrozole (3,6 %) versus placebo (2,9 %) dans l’essai MA-17 ; exemestane (3,1 %) versus tamoxifène (2,3 %), dans l’essai EIS ; anastrozole (7,1 %) versus tamoxifène (4,4 %), p < 001, dans l’essai ATAC). Les effets de l’exemestane non stéroı̈dien pourraient être moins importants [8,7,34,32] (Fig. 5). Prévention du risque osseux par les bisphosphonates Inhibiteurs des aromatases et risque osseux Le risque lié à la prescription des inhibiteurs des aromatases est différent. L’essai ATAC a confirmé l’intérêt de ces molécules dans le cancer du sein en situation adjuvante (anastrozole). Il en va de même des essais BIG et IES avec d’autres molécules (létrozole et Plusieurs essais thérapeutiques randomisés ont confirmé le rôle protecteur des bisphosphonates sur la perte osseuse, soit après ménopause induite [40,14] soit donnés simultanément aux inhibiteurs des aromatases [54,18,116,19,48,87,60]. L’efficacité de ceux-ci est probablement conditionnée à l’absence de déficit en calcium et de vitamine D. Plus récemment, l’acide zolédronique a RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 719 720 vitamine D et mortalité par cancer notamment colorectal [59,50,53]. La dose efficace en prévention devrait être supérieure à 700 UI/jour chez les personnes ayant un taux de base inférieur à 44 nmol/l [11,100]. En revanche, une récente méta-analyse de sept essais thérapeutiques et portant sur plus de 170 000 patients ne montre pas d’effet de la supplémentation en calcium sur le risque de fracture [10]. Au total l’effet réel de la supplémentation est encore discuté [35]. 4 Change from baseline BMD, % ONCOLOG IE 3 2 1 0 -1 -2 -3 -4 Recommandations existantes -5 Des recommandations ont été formulées concernant la prévention de la perte osseuse et des fractures chez les femmes traitées pour cancer du sein. Le problème particulier est, en effet, celui de la balance bénéfices– risques. -6 -7 0 1 2 3 4 Time, years Tamoxifen (ATAC) Anastrozole (ATAC) Pacebo (MA-17) 5 6 7 Letrozole (MA-17) Tamoxifen (IES) Exemestane (IES) Fig. 5. Changement estimé de la densité osseuse au niveau de la colonne lombaire observée lors des essais des inhibiteurs des aromatases [32] montré une efficacité dans la prévention de la perte de densité osseuse observée chez les femmes préménopausées traitées par chimiothérapie [69]. Diagnostic de l’ostéoporose L’US Preventive Services Task Force (USPSTF) a recommandé le dépistage systématique de l’ostéoporose des femmes à partir de 60 ans dès lors qu’elles ont des facteurs de risque, la mesure de la densité osseuse permettant de prédire un risque élevé de fracture [124]. Cette recommandation ne comporte pas de limite supérieure d’âge à laquelle la surveillance pourrait être arrêtée. Prévention de l’ostéoporose Déficit en calcium, vitamine D et supplémentation Un déficit en vitamine D est largement constaté chez les femmes après la ménopause, en France comme dans d’autres pays, et est responsable d’une augmentation du risque de fracture [27,89,79,73]. Chez les femmes ayant eu un cancer du sein, un déficit est aussi retrouvé pour 38 % d’entre elles [24]. Un apport journalier suffisant de vitamine D et de calcium est considéré comme une composante essentielle de la prévention de l’ostéoporose (http://consensus.nih.gov/cons/111/ 111_statement.htm). Aux États-Unis, l’apport recommandé de vitamine D est de 400 IU pour les individus de 51 à 70 ans et de 600 IU pour ceux âgés de 70 ans et plus. En Europe, 400 IU sont recommandés pour les personnes de plus de 75 ans. Par ailleurs, il existe une diminution de la synthèse cutanée de vitamine D rendant les personnes plus âgées dépendantes de l’apport alimentaire [71]. Cette déplétion est aussi constatée chez les patientes traitées pour ostéoporose ne recevant pas des doses suffisantes de vitamine D [72]. L’intérêt de cette supplémentation est confirmé par les résultats de plusieurs études randomisées ou méta-analyses [12,39,123]. Récemment, l’essai Women Health Initiative Calcium-Vitamine D trial a montré un effet sur la densité osseuse mais non sur le risque de fracture, alors que le risque de calcul rénal est augmenté [80]. Une explication pourrait être un apport limité en vitamine D utilisé dans cet essai. Enfin, plusieurs études épidémiologiques comme la Health Nurses Study ont montré un lien entre déplétion en Recommandations américaines. L’American Society of Clinical Oncology (ASCO) a proposé un algorithme pour l’utilisation des inhibiteurs des aromatases dans la prise en charge des cancers du sein hormonodépendants [128]. Les patientes traitées par inhibiteurs des aromatases sont considérées comme étant à haut risque d’ostéoporose liée au traitement chez lesquelles le diagnostic doit être fait ainsi qu’une prise en charge adaptée [70]. Les recommandations sont : – un bilan osseux permettant d’établir un T-score ; – un apport quotidien de 400 à 800 UI de vitamine D et de 1 200 mg de calcium ; – en cas de T-score inférieur à 2,5, un traitement associant l’apport de calcium et de vitamine D ainsi qu’un traitement par bisphosphonates et un bilan systématique annuel. Les patientes traitées pour cancer du sein soit par chimiothérapie en préménopause, soit par chimiothérapie et/ou hormonothérapie doivent être considérées comme étant à risque de perte osseuse et donc faire l’objet d’un dépistage systématique [62]. Recommandations anglaises. Plus récemment, un groupe d’experts anglais a complété les algorithmes de décision en fonction du risque individuel d’ostéoporose [111]. Le premier algorithme concerne les femmes ayant un traitement suppresseur de la fonction ovarienne avant 45 ans. Un bilan osseux doit être systématiquement réalisé dans l’année suivant la suppression ovarienne. Ce bilan doit être renouvelé si des inhibiteurs des aromatases sont associés. Toute patiente présentant une fragilité osseuse doit recevoir un traitement de bisphosphonates. Trois sous-groupes de patientes doivent être considérés : – les patientes à haut risque : chez ces femmes présentant des signes d’ostéoporose une autre cause d’ostéoporose doit être recherchée. Un traitement par biphophonates doit être prescrit associé à une supplémentation systématique par calcium et par vitamine D. Le bilan doit être fait tous les deux ans avec une évaluation de l’efficacité du traitement, par la détermination de marqueurs biologiques de la résorption osseuse. – chez les patientes à risque moyen : un dosage de calcium et de vitamine D permettra la mise en route d’un traitement par supplémentation en cas de déficit. – pour les femmes à risque faible : il n’y a pas d’indication particulière. Chez les patientes ménopausées, un traitement par inhibiteurs des aromatases est une indication d’ostéodensitométrie. Le risque doit être évalué en fonction de l’âge et des facteurs de risque suivants : – fragilité osseuse avec fracture avant 50 ans ; – ménopause précoce ; – IMC inférieur ou égal à 22 ; – maladies rhumatismales ; – maladie de Crohn ; – utilisation de corticoı̈des pendant plus de six mois ; – consommation importante d’alcool. Au-delà de 75 ans la présence d’un au moins de ces facteurs de risque est une indication de bisphosphonates. Chez les femmes à haut risque (ostéodensitométrie) et à risque moyen il n’y a pas d’indication systématique de bisphosphonates. Une supplémentation systématique de calcium et de vitamine D est donnée en cas de déficit constaté. Un bilan osseux doit être réalisé à 24 mois. En cas de progression importante de la perte osseuse annuelle (> 4 %), les bisphosphonates doivent être prescrits, associés avec une supplémentation systématique de calcium (> 1 g/j) et de vitamine D (> 800 UI). Ces recommandations concordent avec les autres recommandations d’experts récemment publiées [61,64]. dans certaines indications en raison de leur efficacité prouvée est un facteur de risque supplémentaire ; ce risque doit être apprécié en fonction du risque de la patiente avant traitement. Recommandations pour la prévention de l’ostéoporose 1. Évaluer chez toutes les femmes le risque d’ostéoporose en fonction des facteurs de risque connus (cf. groupe de travail de l’OMS ; Kanis [82], recommandations Afssaps 2006) : – l’existence d’antécédents personnels ou familiaux d’ostéoporose ou de fracture ; – la survenue d’une ménopause précoce ; – un IMC inférieur ou égal à 19 ; – l’existence de pathologie associée à une ostéoporose ; – la consommation d’alcool ou de tabac ; – la prise de corticoı̈des (niveau 1, grade A). 2. Réaliser un bilan osseux de type ostéodensitométrie ainsi qu’un dosage de calcium et de vitamine D permettant de définir le risque individuel en dehors de facteurs de risque (niveau 1, grade A). 3. Attirer régulièrement l’attention des patientes sur l’importance d’apports journaliers alimentaires suffisants en calcium et en vitamine D (recommandations PNNS) [niveau 2, grade B]. 4. Adapter la prise en charge en fonction du risque (niveau 1, grade A). a) Pour les femmes à haut risque (ostéoporose constatée) recevant ou non des inhibiteurs des aromatases : – associer un traitement par bisphosphonates et une supplémentation systématique de calcium et de vitamine D à des doses suffisantes (1 g/j de Ca, > 800 UI/j de vitamine D) ; – réaliser un bilan osseux régulier permettant de s’assurer de l’efficacité du traitement. b) Pour les femmes à risque individuel moyen ou faible : b1) Pour les femmes recevant des inhibiteurs des aromatases : – corriger systématiquement les déficits en calcium et en vitamine D et maintenir un apport alimentaire suffisant ; – réaliser un bilan osseux au bout d’un an, puis tous les deux ans ; – Le traitement du cancer du sein est un facteur augmentant le risque d’ostéoporose chez la femme préménopausique (chimiothérapie et hormonothérapie) et chez la femme ménopausée (hormonothérapie) ; – mettre en route un traitement par bisphosphonates en cas de progression rapide de l’ostéoporose. – la prescription de plus en plus fréquente des inhibiteurs des aromatases qui constituent un standard – effectuer une surveillance selon les recommandations en cours en fonction de l’âge. b2) Pour les autres femmes : RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 721 722 Compléments alimentaires Recommandations à l’égard de la prise de compléments alimentaires ONCOLOG IE Exposition De nombreuses études ont examiné la prévalence de consommation des compléments alimentaires. Celle-ci est élevée chez les femmes ayant un cancer du sein, et atteint 80 % aux États-Unis [103,126]. Dans la majorité des cas, il s’agit de compléments de vitamines et/ou de minéraux (68 % au Canada) [6]. Une étude européenne observe une consommation de vitamines multipliée par trois chez les femmes après le diagnostic d’un cancer du sein [101]. Risque de mortalité par cancer du sein, de récidive ou de seconds cancers Très peu d’études spécifiques au cancer du sein ont évalué l’association entre la consommation de compléments alimentaires et le risque de mortalité, de récidive ou de seconds cancers. Une étude cas-témoin portant sur 385 femmes ménopausées ayant eu un diagnostic de cancer du sein rapporte une absence d’association : OR = 0,54 (IC 95 % : [0,27–1,04]) entre supplémentation en antioxydants et risque de récidive de cancer du sein ou de mortalité par cancer du sein [51]. Une étude prospective a examiné l’impact de la prescription de mégadoses de vitamines et de minéraux sur le traitement du cancer du sein non métastatique, après un suivi moyen de 68 mois, et n’a pas observé d’effet significatif sur la survie (HR = 1,75 ; IC 95 % : [0,83–2,69]) après ajustement sur les variables relatives au diagnostic et au traitement [86]. En revanche, les données obtenues en population incitent à la prudence. Ainsi, l’évaluation faite par le rapport WCRF/AICR indique que la supplémentation en bêtacarotène à forte dose augmente le risque de cancer du poumon chez les individus exposés à des facteurs de risque (tabac ou amiante) [niveau de preuve 1]. De plus, une méta-analyse récente (180 938 participants en population générale), incluant 47 essais de supplémentation avec des antioxydants (bêtacarotène, vitamines A, C, E et sélénium seuls ou combinés) et présentant un faible risque de biais, observe une augmentation du risque de mortalité (RR = 1,05 ; IC 95 % : [1,02–1,11]) [13] (niveau de preuve 1). Les études sont trop peu nombreuses pour évaluer l’effet spécifique des compléments alimentaires dans le cas du cancer du sein. Il convient donc de s’appuyer sur les recommandations pour la population générale. Soja Exposition Le terme de « phytoestrogène » regroupe plusieurs molécules issues du monde végétal et présentant une similarité avec la structure de l’estradiol. Parmi les six familles de phytoestrogènes, la famille des isoflavones est la plus étudiée. 1. Ne pas prescrire de compléments alimentaires, sauf en cas de déficience avérée (niveau 1, grade A pour la population générale/accord d’experts pour les patientes avec cancer du sein). 2. Informer les patientes qu’il est conseillé de satisfaire les besoins nutritionnels par une alimentation équilibrée et diversifiée sans recourir aux compléments alimentaires (niveau 1, grade A). Dans un régime occidental traditionnel, les isoflavones sont essentiellement présents dans les légumes, les fruits et les céréales. D’après les données du rapport Afssa–Afssaps [2], les apports observés dans un régime traditionnel de la population française sont cohérents avec ceux observés dans d’autres populations européennes comparables (toujours inférieurs à 1 mg). Les populations asiatiques (Japon notamment) ont des apports moyens en isoflavones aglycones de 45 mg/j (valeurs variant entre 8 et 118 mg/j). L’apport en isoflavones par les compléments alimentaires est plus difficile à apprécier mais reste le plus souvent assez proche des apports des populations asiatiques. Depuis les recommandations publiées par l’Afssa et l’Afssaps en 2005, peu de publications sont disponibles. Prévention primaire Une méta-analyse a été publiée en 2006 avec inclusion de 12 études cas-témoins et six cohortes [17]. Les résultats ont objectivé une réduction de risque de cancer du sein, mais l’hétérogénéité des études, de l’origine du soja (tofu en Asie et additifs de soja dans les pays occidentaux), ne permettent pas de conclure (Fig. 6). Deux études de cohortes ont été publiées ultérieurement [105,129]. La première a été conduite auprès de 35 303 femmes chinoises (629 cas de cancer du sein incidents). Les résultats ont objectivé un effet protecteur par des apports de soja à partir de tofu [105]. La seconde a été réalisée au Japon auprès de 30 454 femmes, avec un suivi de 7,6 ans, et 145 cas de cancer du sein documentés. Aucune association n’a été observée entre consommation de soja et risque de cancer du sein [129]. Prévention tertiaire Concernant la prévention tertiaire, seule une étude de cohorte est publiée [15]. Il s’agit d’une étude prospective réalisée à Shanghai auprès de 1 459 personnes atteintes de cancer du sein. Sur une période de cinq ans, 240 décès sont survenus. Aucune association n’a été trouvée entre apport de protéines de soja ou d’isoflavones et risque de mortalité par cancer du sein. Par ailleurs, il existe aucune association entre apport de soja et statut des récepteurs hormonaux, IMC, âge et Association Between Soy and Breast Cancer Risk All Studies Lee (postmeno) 1992 Lee (premeno) 1992 Hirose (postmeno) 1995 Hirose (premeno) 1995 Yuan (Tianjin) 1995 Yuan (Shanghai) 1995 Wu 1996 Greenstein (postmeno) 1996 Ingram 1997 Witte (premeno) 1997 Chie 1997 Key 1999 Dai 2001 Horn-Ross 2001 Dan Tonkelaar (postmeno) 2001 Wu 2002 Horn-Ross 2002 Yamamoto 2003 Linseinsen (premeno) 2004 Grace 2004 All Studies 0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 3.5 4.0 4.5 Association Between Soy and Breast Cancer Risk, by Population Subgroups Asian Women Lee (postmeno) 1992 Lee (premeno) 1992 Hirose (postmeno) 1995 Hirose (premeno) 1995 Yuan (Tianjin) 1995 Yuan (Shanghai) 1995 Chie 1997 Key (all women) 1999 Dai 2001 Yamamoto 2003 All Asian studies Postmenopausal Lee 1992 Hirose 1995 Wu 1996 Greenstein 1996 Key 1999 Shu 2001 Horn-Ross 2001 Dan Tonkelaar 2001 Wu 2002 Yamamoto 2003 All postmenopausal studies Premenopausal Lee 1992 Hirose 1995 Wu 1996 Witte 1997 Key 1999 Shu 2001 Horn-Ross 2001 Wu 2002 Yamamoto Linseisen 2004 All premenopausal studies 0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 3.5 4.0 4.5 OR or RR for high vs. low soy or isoflavone levels OR or RR for high vs. low soy or isoflavone levels *Premeno=premenopausal women, postmeno=postmenopausal women Fig. 6. Association entre soja et risque de cancer du sein d’après la méta-analyse de Bruce et al. [17] ménopause. L’analyse a été complétée sur le statut ER+ (63 % des femmes). Aucune différence n’a été observée. Wu et al. ont publié une étude sur 380 femmes atteintes de cancer du sein sous tamoxifène [130]. L’objectif de ce travail a été d’étudier l’association entre apports de soja et métabolites circulants du tamoxifène. Aucune association n’a été mise en évidence, alors que les taux circulants de tamoxifène ont été modifiés significativement par l’âge, le statut de la ménopause, l’IMC et les traitements hypertenseurs. De même que cela a été mentionné dans le rapport du WCRF 2007, et celui de l’Afssa–Affsaps, les études sont insuffisantes pour apporter une conclusion que ce soit en phase pré- ou postménopausique. Nous proposons donc de garder les recommandations de l’Afssa–Afssaps qui n’ont pas lieu d’être modifiées en l’absence de données suffisantes. Recommandations à l’égard de la consommation de soja [2] 1. Informer les patientes que les aliments à base de soja peuvent être consommés sans excès par les adultes, dans le cadre d’une alimentation équilibrée et diversifiée (niveau 2, grade B). 2. Informer les patientes qu’un apport élevé en phytoestrogènes (supérieur 1 mg/kg par jour) à partir d’aliments à base de soja ou de compléments alimentaires n’est pas recommandé (accord d’experts). Alcool Il est important de rappeler que l’alcool est la deuxième cause évitable de mortalité par cancer, après le tabac. Les boissons alcoolisées sont actuellement classées parmi les facteurs cancérogènes pour l’homme par le Centre international de recherche contre le cancer [5]. La consommation de boissons alcoolisées augmente le risque de cancer de la bouche, du pharynx, du larynx, de l’œsophage, du côlon–rectum, du sein et du foie. Le risque augmente avec la quantité d’alcool consommée, quel que soit le type de boisson alcoolisée. Dans le cas du cancer du sein, le risque augmente de 10 % par verre d’alcool consommé par jour [44,127]. Exposition des femmes ayant eu un cancer du sein Dans une étude transversale américaine, parmi 1 528 femmes ayant eu un diagnostic de cancer du sein entre 1998 et 2001, environ un tiers des patientes consomment des boissons alcoolisées (10 % en consomment plus de sept verres par semaine) [9]. Échec du traitement Une étude prospective, portant sur 240 femmes suédoises opérées d’un cancer du sein aux stades I et II, rapporte une absence d’association entre la consommation d’alcool au cours de l’année précédant le diagnostic (exprimée en pourcentage de l’énergie totale) et l’échec du traitement à quatre ans (30 événements se caractérisant par un cancer contralatéral, une RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 723 724 récidive locorégionale, des métastases distantes ou un décès) [74]. ONCOLOG IE Risque de mortalité par cancer du sein Peu d’études ont évalué l’association entre consommation d’alcool et mortalité chez les femmes ayant eu un cancer du sein. Cinq études prospectives relativement anciennes, n’étudiant pas spécifiquement la consommation d’alcool, ont rapporté une absence de relation significative entre la consommation d’alcool et la survie de patientes américaines, australiennes ou suédoises, dans les 5 à 18 ans suivant le diagnostic d’un cancer du sein [49,75,115,119,131]. Cependant, la plupart de ces études présentent plusieurs limites : manque de puissance en raison du faible nombre d’événements (26, 40, 112, 241 à 326 décès selon l’étude), catégories de consommation d’alcool imprécises, absence d’ajustement sur le stade au diagnostic, le traitement et le tabagisme. En revanche, une étude prospective plus récente ayant pour objectif principal la consommation d’alcool a été ajustée sur le stade au diagnostic, la radiothérapie et le tabagisme : conduite chez 125 femmes afroaméricaines ménopausées atteintes de cancer du sein invasif, elle rapporte un RR de 2,7 (IC 95 % : [1,3–5,8]) associé à la consommation d’alcool (au moins un verre par semaine) [96]. Trois études prospectives en population générale, et rapportant un plus grand nombre d’événements (223, 350 et 691), observent une augmentation de la mortalité par cancer du sein associée à la consommation d’alcool : – dans la Nurses’ Health Study, étude prospective conduite sur 85 705 femmes américaines, la consommation de plus de 30 g d’alcool par jour a été associée à une augmentation du risque de décès par cancer du sein (RR = 1,67 ; IC 95 % : [1,1–2,5]), selon une analyse multivariée ajustant sur de nombreux facteurs [52]. Risque de récidive Seulement deux études sur la relation entre la consommation d’alcool et le risque de récidive de cancer du sein sont disponibles : – une étude prospective portant sur 149 femmes américaines ayant eu un diagnostic de cancer du sein rapporte une absence d’association entre la consommation d’alcool (deux verres par jour) et le risque de récidive (HR = 0,82 ; IC 95 % : [0,54–1,25]) après ajustement sur l’énergie [119]. Cependant, cette étude a une faible puissance (28 récidives). – dans une étude prospective avec un plus grand effectif (472 femmes américaines ayant eu un diagnostic de cancer du sein), la consommation de bière est associée à une augmentation du risque de récidive de cancer du sein (RR = 1,41 ; p = 0,04), qui se maintient après ajustement sur le statut socioéconomique [66]. Risque de seconds cancers primaires D’après une étude cas-témoin (27 cas, 70 témoins), menée aux Pays-Bas, chez des patientes ayant été traitées pour un cancer du sein (30 %), du poumon ou d’un lymphome, le risque relatif de seconds cancers de l’œsophage a été estimé selon une analyse univariée à 3,3 (p = 0,01) chez les consommatrices d’alcool et chez les consommatrices d’au moins de trois verres par jour par rapport aux non-consommatrices [125]. L’interaction avec le tabac n’a pas été examinée. Le rôle cancérogène de l’alcool est clairement établi. Les études sur la relation entre alcool et risque de mortalité par cancer du sein, récidive de cancer du sein ou de seconds cancers sont peu nombreuses. Alors que quelques études de faible puissance et/ou mal contrôlées sur les facteurs de confusion rapportent une absence de relation, plusieurs études de meilleure qualité rapportent un risque accru. – dans la Cancer Prevention Study II, étude prospective incluant 251 420 femmes américaines, le risque relatif de décès par cancer du sein était de 1,3 (IC 95 % : [1,1–1,6]), selon une analyse multivariée, chez les femmes consommant au moins un verre de boisson alcoolisée par jour [121]. Il convient donc de s’appuyer sur les connaissances actuelles concernant la relation entre consommation d’alcool et risque de cancer et les recommandations de prévention des cancers destinées à la population générale [44,77]. – l’étude prospective multicentrique canadienne, The National Breast Screening Study (NBSS), incluant 58 926 femmes, rapporte que la consommation d’alcool est associée à une augmentation faible mais significative du risque de décès par cancer du sein : 1,04 (IC 95 % : [1,01–1,07]) pour 10–20 g d’alcool par jour et 1,06 (IC 95 % : [1,03–1,10]) pour une consommation supérieure à 20 g/j [81]. Dans cette étude, les données sont ajustées sur de nombreux facteurs de confusion : âge à l’inclusion, âge aux premières règles, nombre de naissances viables, statut ménopausique, histoire familiale de cancer du sein au premier degré, autoexamen des seins, tabagisme, usage de contraceptifs oraux, éducation, mammographie, centre de l’étude, IMC et apport énergétique. Recommandations des patients – Assurer le lien avec le médecin généraliste pour le suivi du poids et la prise en charge nutritionnelle ainsi que pour le suivi des dyslipidémies ; – être plus spécifique sur les apports des fruits et de légumes ; – proposer aux personnes malades des consultations diététiques afin de s’assurer d’une alimentation adaptée et éviter ainsi les prises ou pertes de poids liées à la chimiothérapie ; – renforcer l’information sur les manières de contourner les altérations du goût liées aux protocoles de chimiothérapie (accès à des recettes on line par exemple). Recommandations à l’égard de la consommation d’alcool 1. Informer les patientes que la consommation d’alcool est déconseillée, quel que soit le type de boisson (vin, bière, spiritueux) [niveau 1, grade A]. 2. Ne pas inciter les patientes abstinentes à une consommation régulière, même modérée, car toute consommation d’alcool régulière est à risque (niveau 1, grade A). 3. En cas de consommation d’alcool, afin de réduire le risque de cancers, inciter les patientes à limiter la consommation autant que possible, tant en termes de quantité consommée que de fréquence de consommation (niveau 1, grade A). 4. En cas de difficulté à limiter la consommation d’alcool, envisager un accompagnement et éventuellement une prise en charge (accord d’experts). Références 1. Abrahamson PE, Gammon MD, Lund MJ, et al. (2006) General and abdominal obesity and survival among young women with breast cancer. Cancer Epidemiol Biomarkers Prev 15(10): 1871-7 2. Afssa, Afssaps (2005) Sécurité et bénéfices des phytoestrogènes apportés par l’alimentation. Recommandations Afssa Consulté sur: http://afssa.fr 3. Afssaps. (2005) Prise en charge thérapeutique du patient dyslipidémique. Recommandations à consulter sur : http://afssaps.sante.fr/pdf/5/rbp/dysreco.pdf 4. Appel LJ, Moore TJ, Obarzanek E, et al. (1997) A clinical trial of the effects of dietary patterns on blood pressure. 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Les traitements par AA au cours du cancer du sein sont à l’origine de manifestations rhumatologiques de plus en plus décrites, à type d’arthralgies ou de douleurs diffuses. Ces complications ne sont pas exceptionnelles (entre 20 et 50 % des cas) et peuvent parfois conduire à l’arrêt ou à une modification des traitements par AA. La prise en charge de ces douleurs doit passer par une analyse précise des symptômes, car plusieurs tableaux rhumatologiques très différents peuvent survenir et l’on devra dans tous les cas, au préalable, éliminer des douleurs liées à une évolutivité du cancer. Le traitement sera adapté au type de douleur, allant si besoin jusqu’à une prise en charge multidisciplinaire associant un cancérologue et un rhumatologue. Les approches seront pharmacologiques (antalgiques, anti-inflammatoires, corticoı̈des, antidépresseurs) et non pharmacologiques (kinésithérapie, physiothérapie, exercice physique). Mots clés : Cancer du sein – Antiaromatase – Douleur – Atteinte articulaire Introduction Le cancer du sein est le cancer de la femme le plus fréquent ; en France, le nombre de nouveaux cas estimés en 2000 est d’environ 42 000. L’hormonothé- rapie fait partie intégrante des traitements médicaux des patientes ayant un cancer du sein, utilisée en situation adjuvante ou en situation métastatique. Environ 70 % des cancers du sein invasifs présentent des récepteurs aux estrogènes et/ou à la progestérone, positifs au moment du diagnostic, permettant de définir une hormonosensibilité. Pendant plus de 30 ans, le tamoxifène est resté le traitement antiestrogène de choix, que ce soit en situation adjuvante ou en situation métastatique. Le tamoxifène inhibe de façon compétitive la fixation des estrogènes sur leur récepteur, mais il possède également un effet estrogénique agoniste partiel, pouvant être responsable de cancers de l’endomètre ou d’accidents thromboemboliques. – Les inhibiteurs de l’aromatase de troisième génération ont été introduits plus récemment. Leur mécanisme d’action consiste à bloquer l’aromatase, enzyme présente au niveau du tissu adipeux, du foie, du muscle, du cerveau et du tissu mammaire. Les inhibiteurs de l’aromatase bloquent l’enzyme, empêchant ainsi la conversion de la testostérone et d’autres androgènes en estrogènes ; – on distingue deux types d’inhibiteurs de l’aromatase : les antiaromatases (AA) stéroı̈diens, et non stéroı̈diens. Les AA stéroı̈diens réalisent une inhibition compétitive et irréversible de l’enzyme (exemestane), et les AA non stéroı̈diens réalisent une inhibition réversible de l’enzyme (létrozole, anastrozole). De nombreuses études ont démontré la supériorité des inhibiteurs de l’aromatase sur le tamoxifène, en situation métastatique ainsi qu’en situation adjuvante (en ce qui concerne la survie sans récidive dans cette dernière situation) ; – chez les patientes ménopausées ayant des métastases et, chez qui, une hormonothérapie est indiquée, les inhibiteurs de l’aromatase létrozole et anastrozole sont recommandés en première intention. L’exemestane est indiqué en cas d’échec du tamoxifène ; – en situation adjuvante, chez les patientes ménopausées, un inhibiteur de l’aromatase est indiqué soit d’emblée (létrozole, anastrozole) pour une durée de cinq ans, soit après deux ans de tamoxifène (exemestane). Il peut être recommandé à l’issue des cinq ans de tamoxifène, chez les patientes ayant une atteinte ganglionnaire (létrozole, anastrozole) [7]. Douleurs sous AA : fréquence, épidémiologie La fréquence des manifestations articulaires survenant sous AA est très variable dans la littérature depuis la description princeps de Donnellan et al. en 2001, avec des arthralgies survenant chez 16 % des 77 femmes dans les deux mois suivant le début du traitement [12]. Deux types de données très différentes sont disponibles : – au cours des essais cliniques visant à démontrer l’efficacité des AA en traitement adjuvant du cancer du sein, la prévalence des douleurs varie de 5,4 à 35,6 %, principalement parce qu’il n’y a aucune recherche systématique, ni évaluation de la douleur. Seules les données musculosquelettiques recueillies comme événements indésirables sont disponibles pour les trois molécules commercialisées. Sous létrozole, 5,6 % d’arthrites, 21,3 % d’arthralgies et 11,8 % de myalgies sont rapportées pour respectivement 3,5, 16,6 et 9,5 % sous placebo, avec des différences statistiquement significatives pour tous ces items [14]. Pour l’exemestane [6], 5,4 % d’arthralgies sont rapportées par rapport à 3,6 % sous tamoxifène avec une différence statistiquement significative. Pour l’anastrozole dans l’étude ATAC, à 68 mois, 35,6 % d’événements musculosquelettiques sont survenus sous anastrozole après un délai moyen de 13,9 mois, et pour 10,6 %, il s’agit d’événements sévères, 2,1 % menant à l’arrêt du traitement [4] ; – dans les quelques études transversales et les études prospectives, les fréquences des douleurs articulaires sont plus élevées, entre 47 % des cas dans une étude transversale avec questionnaire systématique [8,9] et 45,4 % à 12 mois chez les 100 premières patientes de l’étude prospective COBRA, évaluées systématiquement par des échelles de douleur et de qualité de vie et, si besoin, un examen rhumatologique [15]. Ces douleurs articulaires ont débuté en moyenne après 1,6 mois de traitement, avec une EVA de douleur moyenne à 51 mm, allant dans 13 cas sur 100 jusqu’à un arrêt de traitement pour toxicité articulaire. Au total, la prévalence des manifestations articulaires survenant sous AA est proche de 45 % sans donnée comparative entre molécules à ce jour. Description des douleurs sous AA Il existe peu de précision sur la symptomatologie et la localisation exactes des manifestations rhumatologi- ques douloureuses survenant sous AA, publications en majorité issues de la littérature cancérologique, principalement centrées sur les problèmes oncologiques. Les douleurs sont rapportées dans 23 à 61 % des cas [8,9,23] et apparaissent ou s’aggravent dans un délai de huit semaines en moyenne (2 semaines à 19 mois) après le début des AA [1,23]. – Les signes fonctionnels les plus fréquents [1,8,9,15,22] sont des arthralgies et myalgies avec sensation de raideur articulaire pouvant s’améliorer après des étirements, dérouillage matinal et impression de gonflement des doigts. De localisation le plus souvent symétrique, touchant par ordre décroissant les mains (articulations interphalangiennes proximales et métacarpophalangiennes des doigts) et les poignets, les genoux, le rachis lombaire, les épaules, et plus rarement le bassin avec les hanches, les pieds et les chevilles [8,9,15,18,19]. Il existe parfois des synovites et des ténosynovites [11,20], voire d’exceptionnelles polyarthrites évoluant vers une polyarthrite chronique d’allure rhumatoı̈de [21]. Les analyses biologiques sont le plus souvent normales [15]. Il existe également des tableaux douloureux, diffus et proches du syndrome fibromyalgique ; – les diagnostics évoqués lors de ces atteintes rhumatologiques sont nombreux : arthrose (des genoux, des doigts en particulier rhizarthrose), doigts à ressaut, canal carpien, bursite, trochantérite, tendinite (coiffe des rotateurs, poignets, coudes), ténosynovite ou syndrome fémoropatellaire [15,18,19] ; – la sévérité des symptômes ne conduit que rarement à l’arrêt du traitement par AA : dans 2 à 5 % des cas pour l’étude ATAC [1], mais jusqu’à 20 % des patientes pour d’autres auteurs [11]. Le plus souvent, l’intensité est modérée ou moyenne, les atteintes sont observées surtout au début du traitement et peuvent céder après quelques semaines, en général après 3 à 18 mois d’AA [4,22]. Facteurs de risque de survenue de douleurs articulaires liées à la prise d’AA de troisième génération Peu d’études spécifiques ont été conduites pour tenter d’identifier d’éventuels facteurs de risque de survenue de complications rhumatologiques sous AA. L’âge, l’ethnie, le mode de survenue de la ménopause (naturelle versus chirurgicale), l’ancienneté de la ménopause, le type d’AA et la durée de traitement par AA ne semblent pas être des facteurs de risque prouvés de la survenue de douleurs articulaires liées à la prise d’AA de troisième génération [8,9]. Des données sur le poids ont été publiées de façon contradictoire [8,9,21]. La prise préalable de tamoxifène ne paraı̂t pas être un facteur de risque et pourrait même réduire le risque de survenue de manifestations rhumatologiques [8,9,22], au contraire d’un traitement hormonal substitutif RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 729 730 ONCOLOG IE antérieur qui serait, pour certains, un facteur de risque majeur [24]. De façon plus nette, une chimiothérapie préalable expose à un risque plus important de complications rhumatologiques avec un délai d’apparition des symptômes plus court [5], en particulier après la prise de taxane [3,8,9]. Par contre, la radiothérapie préalable ne serait pas un facteur de risque [24]. Physiopathologie des douleurs ostéoarticulaires survenant sous AA La physiopathologie précise des douleurs ostéoarticulaires induites par les AA de troisième génération n’est pas précisément connue. Ces douleurs semblent être liées à un effet de classe, quelle que soit la molécule. Deux grands mécanismes physiopathologiques peuvent être identifiés : – un phénomène général de diminution du seuil de la douleur par suppression de l’effet antinociceptif des estrogènes (chute de leur taux circulant). Les estrogènes ont une action sur le système nerveux central de modulation du système de la douleur : il existe un effet de renforcement du système opioı̈de [10,13]. Les estrogènes ont aussi une action sur les systèmes dopaminergique et sérotoninergique centraux [16,26]. La chute brutale du taux d’estrogènes induite par le traitement par AA modifie donc le système de transmission du message douloureux et peut induire des douleurs diffuses ; – un effet plus spécifique sur le cartilage par suppression de l’effet trophique des estrogènes sur le cartilage (liés à l’existence de récepteurs aux estrogènes dans le cartilage) [8,9] et suppression de l’effet immunomodulateur de l’estradiol. Les douleurs articulaires sous AA sont proches de celles observées lors de la diminution des taux circulants d’estrogènes (lors de la ménopause, lors de traitements par agoniste de la gonadolibérine – leuprolide –, à l’arrêt de traitements hormonaux substitutifs [13]), c’est ce que l’on appelle « rhumatisme de la ménopause » ; – un effet inducteur de pathologies auto-immunes : les souris knock-out pour le gène de l’AA présentent des signes de pathologie auto-immune lymphoprolifératives [25], mais l’induction de pathologies auto-immunes chez les femmes traitées par AA, ayant développé des douleurs articulaires, est controversée [15,18,21,25]. L’inhibition estrogénique pourrait par ailleurs favoriser localement au niveau articulaire la sécrétion de cytokines pro-inflammatoires (IL-6, anti-TNF-a, IL-1b, IL-10) [13,18]. Conduite pratique du traitement par AA lors de la survenue de manifestations rhumatologiques Lors de l’apparition de douleurs sous AA, il conviendra de faire une évaluation particulièrement approfondie du type de douleurs et des manifestations associées. Le premier élément est bien sûr d’éliminer une pathologie évolutive néoplasique (métastases ?) ou inflammatoire rhumatologique. Dans ce contexte, l’avis spécialisé du cancérologue suivant la patiente, et éventuellement d’un rhumatologue dans un deuxième temps, sera nécessaire. Si l’on a éliminé toute pathologie néoplasique ou rhumatologique spécifique, on pourra évoquer le diagnostic de douleurs liées au traitement par AA. Les conditions de l’arrêt du traitement par AA seront décidées d’un commun accord entre la patiente, son cancérologue et un rhumatologue [27]. En présence de douleurs importantes avec retentissement majeur sur la qualité de vie, malgré une prise en charge médicamenteuse et non médicamenteuse, la discussion de l’arrêt du traitement par AA se posera. Le traitement par AA est habituellement prescrit pour une durée minimale de trois à cinq ans. Si ce traitement est arrêté, il pourrait être repris après un arrêt de deux à trois mois, soit avec la même molécule, soit avec un autre AA (changement d’un AA non stéroı̈dien vers un stéroı̈dien ou inversement). En effet, pour certains auteurs, le changement de molécules pourrait atténuer les symptômes [25]. En fonction du risque de rechute évalué par l’oncologue, l’AA pourra éventuellement être remplacé par du tamoxifène. Ainsi, pour tout traitement par AA, il importera d’expliquer aux patientes l’intérêt de maintenir le traitement par AA pendant une durée suffisante, en mentionnant les objectifs de ce traitement, ses inconvénients éventuels et la prise en charge possible des complications éventuellement observées. Approche non pharmacologique des douleurs des AA L’approche non médicamenteuse des douleurs, qu’elles soient directement ou non liées aux AA, est indispensable, et il faut mentionner aux patientes qu’elle peut être aussi efficace que les approches médicamenteuses. Plusieurs principes sont importants : – prévoir des traitements physiques adaptés aux types de douleurs : application d’agents physiques froids ou chauds sur les articulations ou les zones douloureuses, stimulation physique, ultrasons, etc. ; – prescrire de la kinésithérapie, indispensable pour éviter la désinsertion physique, avec proposition en particulier de kinésithérapie de reconditionnement musculaire ; – proposer des orthèses nocturnes, notamment pour le pouce, en cas de douleurs inflammatoires touchant les extrémités ; – conserver une activité physique avec si besoin, prise d’antalgique avant l’activité physique ; – expliquer des techniques de relaxation, d’hypnose, voire proposer une approche psychothérapique si contexte de stress ou d’anxiété important ; – envisager des mesures sociales d’adaptation du travail et d’ergonomie dans le cas d’un retentissement psychosocial important. Tableau 1. Les 13 recommandations AAA (algies sous antiaromatases) 1. Préalable : indication, bénéfice/risque des AAA 1.1. Les traitements par antiaromatase (AA) sont des traitements efficaces en situations adjuvante et métastatique chez des patientes ménopausées ayant un cancer du sein hormonodépendant. 2. Évaluation et information avant la mise en route des AAA 2.1. Les patientes doivent être informées de l’apparition ou aggravation possibles de douleurs musculosquelettiques sous AA, survenant habituellement en début de traitement et pouvant s’améliorer avec le temps. 2.2. Avant la mise sous traitement par AA, la recherche de douleurs et leur évaluation (intensité, localisation ) doit être effectuée et indiquée dans le dossier clinique (pour améliorer le suivi en cas de changement d’oncologue lors des visites). 3. Facteurs de risque des douleurs liées aux AA 3.1. Les douleurs survenant sous AAA ne dépendent pas de l’AA, de la radiothérapie préalable, de l’âge, de l’ethnie ni du mode de survenue de la ménopause (naturelle ou médicochirurgicale) mais peuvent être favorisées par des chimiothérapies préalables (taxanes notamment). 4. Évaluation pendant le traitement par AAA 4.1. En l’absence de signe clinique inflammatoire, en cas de survenue d’arthralgies, myalgies, tendinopathies, syndromes canalaires, aucun examen complémentaire biologique ou radiologique n’est indispensable et un traitement symptomatique doit être prescrit. 4.2. En cas d’échec du traitement symptomatique ou en présence de signes inflammatoires articulaires, un avis spécialisé rhumatologique est indiqué. 5. Généralités sur la prise en charge 5.1. Le traitement est une association de traitements pharmacologiques et non pharmacologiques. 6. Prise en charge médicamenteuse et non médicamenteuse des douleurs ostéoarticulaires sous AAA 6.1. Un traitement symptomatique par antalgiques de palier 1 doit être systématiquement proposé pour soulager les douleurs induites par les AAA. Les antalgiques de palier 2 et les AINS par voie générale seront proposés dans un deuxième temps selon le type de douleurs et les comorbidités de la patiente. 6.2. Des gestes locaux de type infiltration pourront être envisagés, en évitant si possible le membre supérieur du côté du sein opéré. 6.3. Dans les atteintes chroniques, même en l’absence de troubles thymiques, des traitements tels que les antidépresseurs et/ou des antiépileptiques peuvent être proposés. 6.4. Les traitements physiques (application de chaud–froid, ultrasons ), l’exercice physique à type de reconditionnement, l’éducation, le port d’orthèses de repos nocturne, la relaxation et/ou l’hypnose peuvent être proposés. 7. Décision et modalités d’arrêts des AAA 7.1. La décision d’arrêt de l’AAA doit être prise d’un commun accord entre la patiente, son cancérologue et le spécialiste consulté pour ces douleurs (rhumatologue), après rappel du rapport bénéfice/risque. 7.2. Il n’y a pas lieu de privilégier la prescription d’une molécule particulière d’AA, il s’agit d’un effet de classe. Dans le cas de douleurs, une rotation entre AA peut être proposée (par exemple passage d’un AA stéroı̈dien à un non stéroı̈dien et inversement), ou le passage au tamoxifène. Approches pharmacologiques des douleurs sous AA Les stratégies de prise en charge des douleurs rhumatologiques survenant sous AA ne sont pas définies de façon consensuelle [3,17], mais des recommandations ont été proposées [5]. Les traitements pharmacologiques seront décidés après une analyse précise de la sémiologie douloureuse, et le traitement devra être adapté à la durée et à l’intensité des symptômes, au besoin avec l’aide d’un rhumatologue. Niveau de preuve Force de la recommandation 1 A 1 A 1 A 2 B 4 C Accord d’experts 4 C 4 C Accord d’experts Accord d’experts Accord d’experts 2 B 1 A Aucun essai thérapeutique spécifique n’a été conduit pour étudier l’effet des traitements sur les manifestations rhumatologiques observées sous AA, mais on peut actuellement conseiller les approches suivantes : – les antalgiques de palier 1 ou 2 (dextropropoxyphène, codéine, tramadol) et les anti-inflammatoires peuvent être utilisés dans la plupart des douleurs avec leurs précautions d’emploi habituelles, en particulier chez le sujet âgé ; le dextropropoxyphène ne sera peut-être cependant plus disponible prochainement. Dans l’étude ATAC, près de 90 % des patientes ont utilisé des AINS ; RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 731 732 ONCOLOG IE – dans le cas de douleurs tendinomusculaires chroniques diffuses associées à des troubles du sommeil et de la fatigue, des antiépileptiques ou des antidépresseurs peuvent être proposés à visée antalgique ; – dans le cas de douleurs articulaires inflammatoires, avec ténosynovites des mains, un traitement par faibles doses de corticoı̈des pourra être envisagé : 5 à 10 mg de prednisone au maximum de façon transitoire, au maximum quatre semaines ; – les antiarthrosique d’action symptomatique lente peuvent éventuellement être proposés si des lésions arthrosiques sont associées ; – une ou plusieurs infiltrations de corticoı̈des pourront être réalisées, ainsi que l’application topique d’AINS en cas de douleurs ou d’inflammation localisée, en évitant si possible les gestes au membre supérieur du côté du sein traité ; – les bisphosphonates, utilisés pour la prévention de l’ostéoporose liée aux AA pourraient également avoir des effets sur les douleurs articulaires [2,28,29]. Conclusion Les manifestations rhumatologiques survenant sous AA sont de mieux en mieux décrites et connues. La physiopathologie de ces atteintes est un champ expérimental qui permet d’analyser les liens entre le système hormonal, le système de la douleur et l’appareil locomoteur. Treize recommandations précises sur la prévention, l’évaluation et la prise en charge de ces douleurs ont été présentées en janvier 2009 dans le cadre des recommandations de Saint-Paul de Vence (Tableau 1). Références 1. Baum M, Budzar AU, Cuzick J, et al. (2002) Anastrozole alone or in combination with tamoxifen versus tamoxifen alone for adjuvant treatment of postmenopausal women with early breast cancer: first results of the ATAC randomised trial. Lancet 359: 2131-9 2. Boonen S, Haentjens P, Vandenput L, et al. (2004) Preventing osteoporotic fractures with antiresorptive therapy: implications of microarchitectural changes. J Intern Med 255: 1-12 3. 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La densitométrie, réalisée par absorptiométrie biphotonique à rayons X à deux sites (rachis lombaire et hanche), est la méthode de référence pour mesurer la densité minérale osseuse (DMO). La définition de l’ostéoporose de l’OMS utilise le T-score, écart entre la densité osseuse mesurée et la densité osseuse théorique de l’adulte jeune de même sexe au même site osseux. Le T-score, exprimé en écart-type, permet de définir si la DMO est normale ou s’il existe une ostéoporose ou une ostéopénie. La DMO est normale si le T-score est supérieur à –1 ; il existe une ostéopénie si le T-score est inférieur ou égal à –1, mais reste supérieur à –2,5 ; et il existe une ostéoporose densitométrique si le T-score est inférieur ou égal à –2,5. En cas de T-score inférieur ou égal à –2,5 et de fracture, il s’agit d’une ostéoporose sévère. La DMO n’est pas le seul déterminant de la résistance osseuse, et les autres facteurs de risque de fracture seront à évaluer lors d’une décision thérapeutique. Les facteurs de risque à prendre en considération pour l’estimation du risque de fracture sont, d’une part, des facteurs indépendants de la DMO et, d’autre part, des facteurs liés à la DMO [1]. Les mécanismes responsables d’une ostéoporose chez les femmes ayant un cancer du sein sont multiples. Ces effets osseux peuvent être aggravés par une corticothérapie, par des carences en calcium et en vitamine D pouvant être à l’origine d’une hyperparathyroı̈die secondaire et devant toujours être recherchées ou par la présence d’autres facteurs de risque d’ostéoporose. L’objectif de ces recommandations est de préciser les situations où un risque osseux a été mis en évidence chez la femme ayant un cancer du sein et de définir celles où une prise en charge spécifique semble justifiée, à partir de la littérature et des recommandations existantes. Facteurs de risque à prendre en considération pour l’estimation du risque de fracture Facteurs indépendants de la DMO : – âge ; – antécédent personnel de fracture ; – corticothérapie ancienne ou actuelle ; – antécédent de fracture de l’extrémité supérieure du fémur chez les parents du premier degré ; – diminution de l’acuité visuelle ; – insuffisance de masse corporelle (< 19 kg/m2) ; – troubles neuromusculaires ou orthopédiques ; – tabagisme ; – mauvais état de santé ; plus de trois maladies chroniques ; – hyperthyroı̈die ; – polyarthrite rhumatoı̈de ; – cancer du sein ; – augmentation du remodelage osseux : élévation des marqueurs de résorption. Facteurs liés à la DMO : – ménopause précoce ; – aménorrhée primaire ou secondaire ; – immobilisation prolongée ; – carence vitaminocalcique. Relation entre masse osseuse et incidence du cancer du sein Études réalisées chez les femmes ostéoporotiques Les premières publications mettant en évidence une relation entre le degré de masse osseuse et l’incidence du cancer du sein remontent au début des années 1990. Ces séries consistaient en l’étude de patientes ostéoporotiques décelées selon des critères variés et suivis à travers des registres de population enregistrant les cas de cancer et la mortalité. Le nombre de cancers du sein observé était rapporté au nombre de cancers attendu. Une réduction de l’incidence du cancer du sein chez les patientes ostéoporotiques a été mise en évidence dans ces diverses études. Certaines populations étaient définies par un antécédent de fracture caractéristique de l’ostéoporose commune : avant-bras [58], fracture du col fémoral [60]. Cette dernière étude porte sur une population suédoise de 18 000 patientes avec un suivi moyen de six ans : les cancers observés sont réduits en nombre par rapport au nombre de cas attendus, RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 733 ONCOLOG IE 734 indépendamment de l’âge lors de la fracture, de la durée de suivi et de la période de l’année. Relation masse osseuse et sous-groupes de cancer du sein Les études plus récentes ont mesuré la masse osseuse par densitométrie. Récemment, deux études ont été publiées portant sur des populations ostéoporotiques qui sont les groupes témoins des études dites MORE et CORE comparant des populations ostéoporotiques ou ostéopéniques traitées ou non par raloxifène. L’étude de Burshell et al. montre un risque de cancer du sein deux fois plus élevé pour le groupe ostéopénique (3 829 cas) par rapport au groupe ostéoporotique (3 836 cas), la masse osseuse étant appréciée par DEXA à la hanche [14]. L’étude de Cauley et al., reprenant les mêmes groupes témoins de MORE et de CORE, a l’intérêt de rechercher la valeur prédictive de survenue d’un cancer du sein, par la DMO à la hanche [15]. L’étude porte sur 2 576 femmes ménopausées, 13 698 femmesannées de suivi et 61 cas de cancers incidents ; le suivi moyen a été de 6,5 ans. Les auteurs concluent de même à une différence significative après ajustement des groupes sur l’âge, l’âge à la ménopause et l’indice de masse corporelle (IMC), ces derniers facteurs étant reconnus comme influençant l’incidence du cancer du sein. Une étude cas témoin [26] a porté sur des femmes ayant eu un cancer du sein avec récepteurs hormonaux positifs par rapport à un groupe témoin sans cancer : la densité osseuse étudiée par DEXA au rachis lombaire est plus élevée dans le groupe ayant eu un cancer du sein, après ajustement sur l’âge, le nombre d’années après la ménopause et l’IMC. Études réalisées dans la population générale ménopausée Ces études portent sur des populations chez lesquelles la densité osseuse a été mesurée avec des valeurs obtenues regroupées par quartile ou tertile, et l’incidence du cancer du sein a été comparée dans chacun des groupes formés. L’étude de Framingham [75], portant sur 1 373 patientes recrutées entre 1967 et 1970, a bénéficié d’un suivi médian de 22,1 ans. La mesure de la densité reposait sur une radiogrammétrie de la corticale du deuxième métacarpien. Quatre-vingt-onze cas de cancer du sein ont été observés ; l’incidence cumulative de cancer du sein croı̂t par quartile de masse osseuse après ajustement sur l’âge. L’étude multivariée, incluant l’index métacarpien, la taille, l’IMC, l’âge, l’âge à la première grossesse, le tabac, l’activité physique et la prise de traitement hormonal de la ménopause (THS), confirme la relation observée. Les résultats sont identiques dans les études de population basées sur la masse osseuse étudiée par densitométrie : elles montrent une incidence augmentée de cancer du sein dans le quartile ou le tertile de masse osseuse le plus élevé par rapport à la fraction la plus basse. Ainsi, l’étude de Zmuda et al., portant sur 8 905 femmes de 65 ans ou plus, étudiées par absorptiométrie monophotonique (poignet, avant-bras et hanche) puis suivies en moyenne six ans et demi, montre une différence significative [77]. L’étude de Seattle [12] qui porte sur 8 203 femmes ménopausées ayant eu une densitométrie par DEXA à la hanche et un suivi moyen de 3,7 ans et l’étude de Rotterdam [69] avec 3 017 femmes ménopausées ayant eu une DEXA lombaire et de la hanche et un suivi de 6,5 ans, ont des conclusions identiques. Dans l’étude de Zmuda et al., déjà citée, l’amplitude du risque dans le quartile supérieur est majorée lorsqu’il s’agit de tumeurs de stade avancé par rapport aux tumeurs de stade I ou in situ [77]. De surcroı̂t, l’amplitude du risque pourrait être majorée dans les formes familiales [56]. Relation entre masse osseuse et incidence du cancer du sein Augmentation de l’incidence du cancer du sein chez les femmes ménopausées ayant une masse osseuse élevée (quartile ou tertile supérieur) après ajustement sur l’âge, l’IMC et l’âge à la ménopause (niveau 2, grade B) Moindre incidence chez les patientes ostéoporotiques ménopausées (niveau 2, grade B) Relation entre cancer du sein et risque fracturaire L’étude de Kanis et al. conclut à un taux élevé de fractures vertébrales chez les femmes ayant eu un cancer du sein [52]. Il s’agit d’une étude cas témoin avec un groupe témoin de 776 patientes (25 % ayant eu un THS). Il existe deux populations de patientes ayant un cancer du sein. L’une porte sur 352 patientes ayant un cancer du sein : au moment du diagnostic, la prévalence des fractures n’apparaı̂t pas différente à celle du groupe témoin. En cours de suivi (trois ans en moyenne), le risque de fracture vertébrale apparaı̂t multiplié par 2,8. L’autre groupe de 82 patientes ayant un cancer du sein en rechute « non osseuse » a un risque multiplié par 24,5 par rapport aux témoins. Chez des femmes ayant eu un cancer du sein, en particulier en rechute, des fractures vertébrales interprétées comme ostéoporotiques (en l’absence de moyens modernes de détection) peuvent correspondre à des métastases osseuses non reconnues, ce qui laisse planer un doute sur les conclusions. L’étude WHI [16] est une cohorte prospective de 5 298 femmes avec un antécédent de cancer du sein suivi 5,1 ans et 80 000 témoins. Les fractures sont enregistrées lors du contrôle annuel (les fractures de hanche sont vérifiées). En prenant en compte les fractures de hanche, de l’avant-bras et du poignet, il existe une augmentation significative du risque de 30 % ; les fractures vertébrales n’apparaissent significativement plus fréquentes que parmi les patientes ayant eu un cancer avant 55 ans. Après ajustement sur l’âge, le risque de chute, les médications et les comorbidités, l’augmentation du risque n’est plus que de 15 %. La conclusion est qu’il y a bien un risque augmenté de fractures après cancer du sein : le rôle de l’absence de THS et des divers traitements dont l’hormonothérapie antiestrogénique est probablement en cause. Relation entre cancer du sein et risque fracturaire Prévalence des fractures : paraı̂t identique à celle de la population témoin lors du diagnostic de cancer du sein (niveau 3, grade C) Augmentation des fractures si cancer du sein en rechute (niveau 4, grade C) Augmentation du risque fracturaire si antécédent de cancer du sein (niveau 2, grade B) Au total, il existe une relation entre la masse osseuse et l’incidence du cancer du sein qui paraı̂t plus fréquent chez les sujets ayant une masse osseuse élevée par rapport à celle ayant une masse osseuse basse. Cela est montré dans la population générale ménopausée ou au sein de la population ostéopénique par rapport à la population ostéoporotique. Une confirmation est apportée par les résultats obtenus dans l’étude des cohortes de femmes ostéoporotiques définies par des antécédents de fracture ou par la mesure de la masse osseuse, où l’incidence du cancer du sein est plus faible que celle attendue. Les patientes ayant une aménorrhée secondaire à la chimiothérapie présentent une perte osseuse, de l’ordre de 4 % à six mois, de 7 % à un an au niveau lombaire, alors qu’il n’y a pas de perte osseuse significative en l’absence d’aménorrhée. À deux ans, la perte est de 9,5 % au rachis et de 4,6 % au col fémoral en cas d’aménorrhée [65]. Seule l’étude de Rodriguez-Rodriguez et al. [63] ne montre pas de différence en fonction de l’aménorrhée. Le rôle direct de la chimiothérapie adjuvante sur l’os en préménopause ne paraı̂t pas démontré ; de surcroı̂t, il n’y a pas d’étude dans la littérature testant cette hypothèse chez la femme ménopausée recevant une chimiothérapie seule. Retentissement osseux de la chimiothérapie Perte osseuse importante chez les patientes ayant une aménorrhée secondaire à la chimiothérapie par rapport à celles maintenant des menstruations (niveau 2, grade B) Retentissement osseux des analogues de la Gn-RH chez les femmes en préménopause Il existe une perte osseuse importante chez les femmes non ménopausées traitées par agoniste de la Gn-RH [32,50,68]. Elle est de l’ordre de 10,5 % au niveau lombaire et de 6,4 % au col fémoral à deux ans [32]. L’augmentation de l’incidence du cancer du sein chez les femmes ayant une masse osseuse élevée paraı̂t indépendante de l’IMC. L’hypothèse proposée est que ces deux variables résultent de la durée globale d’exposition aux estrogènes. On note une réversibilité partielle de cette perte osseuse, un an après l’arrêt de la goséréline, avec retour de la fonction ovarienne, chez la majorité des patientes [32]. Lorsque tous les facteurs associés à l’incidence du cancer du sein sont pris en compte, on note que ce facteur prédictif a une puissance faible, probablement insuffisante pour établir des surveillances particulières des populations à masse osseuse élevée. Retentissement osseux des analogues de la Gn-RH Perte osseuse importante avec les agonistes de la Gn-RH (niveau 2, grade B) Réversibilité partielle à l’arrêt de l’agoniste de Gn-RH lors de la réapparition des règles (niveau 2, grade B) Cancer du sein en préménopause Retentissement osseux de la chimiothérapie La chimiothérapie adjuvante (CMF, anthracyclines ou taxanes) entraı̂ne une interruption des règles transitoire ou définitive, d’autant plus fréquente que la patiente a 40 ans et plus [67]. Une perte osseuse significativement accrue a été observée dans toutes les études de la masse osseuse des femmes non ménopausées traitées par chimiothérapie adjuvante : étude cas témoin [11], études prospectives [46,63,66,67] ou groupes témoins d’études randomisées testant un médicament de la perte osseuse [34,47,65,71]. La perte osseuse survient chez les patientes ayant eu une interruption des règles ou une ménopause précoce, alors qu’elle n’est pas observée chez les patientes conservant un cycle menstruel [11,34,46,47,65,67]. Retentissement osseux du tamoxifène chez la femme en préménopause L’effet du tamoxifène sur la densité osseuse a été étudié dans les études de prévention du cancer du sein et en traitement adjuvant. Il varie selon l’état de la fonction ovarienne. L’étude de prévention de Powles et al., randomisée en double insu, menée chez 179 patientes, montre une réduction significative de la masse osseuse en préménopause, alors que celle-ci augmente chez les femmes ménopausées [61]. Les études réalisées en cours de traitement adjuvant arrivent à des conclusions identiques. En préménopause, le tamoxifène exerce un effet antiestrogénique avec perte osseuse modérée. En l’absence d’étude randomisée basée sur ce critère, cette conclusion repose sur la convergence des résultats de plusieurs études. RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 735 ONCOLOG IE 736 La densité osseuse a été mesurée dans un sousgroupe de patientes participant à une étude randomisée concernant l’hormonothérapie adjuvante d’une durée de deux ans : tamoxifène versus goséréline versus goséréline + tamoxifène versus absence de traitement [68]. Une perte osseuse lombaire modérée est constatée dans le groupe recevant du tamoxifène et l’association goséréline–tamoxifène, alors qu’elle est plus importante dans le groupe recevant la goséréline seule. L’étude prospective de Vehmanen et al. [70] porte sur 111 patientes recevant une chimiothérapie adjuvante suivie, six mois plus tard, de tamoxifène en cas de récepteurs positifs ou d’une absence de traitement en cas de récepteurs hormonaux négatifs (groupe témoin). L’effet du tamoxifène sur la masse osseuse (DMO lombaire) était étudié en fonction du maintien ou non d’un cycle. Les patientes non aménorrhéiques ont une aggravation de la perte osseuse (à trois ans perte de –4,6 % des valeurs initiales) par rapport au groupe témoin qui a un gain minime (+0,6 %), alors que les patientes aménorrhéiques sous tamoxifène ont une perte osseuse réduite (–6,8 %) par rapport aux patientes n’en recevant pas (–9,5 %). Retentissement osseux du tamoxifène chez la femme en préménopause Perte osseuse avec le tamoxifène chez la femme non ménopausée (niveau 2, grade B) Retentissement osseux des hormonothérapies combinées chez la femme en préménopause L’association goséréline et anastrozole versus goséréline et tamoxifène a été étudiée chez la femme en préménopause. Dans l’étude rapportée par Gnant et al., étude randomisée ouverte de phase III, la DMO a été étudiée chez 404 patientes en préménopause [36,37]. Les patientes recevaient du tamoxifène et de la goséréline avec ou sans acide zolédronique (4 mg tous les six mois) ou de l’anastrozole et de la goséréline avec ou sans acide zolédronique. À trois ans, il existe une perte osseuse significativement plus importante dans le groupe anastrozole et goséréline (–13,6 % au niveau lombaire) par rapport au groupe tamoxifène et goséréline (–9 % au niveau lombaire). Deux ans après l’arrêt de l’hormonothérapie adjuvante, une récupération partielle de la perte osseuse est observée [36]. Retentissement osseux des hormonothérapies combinées Perte osseuse plus importante avec l’association goséréline + anastrozole versus goséréline + tamoxifène (niveau 1, grade A) Clodronate L’effet du clodronate oral a été évalué chez 148 femmes en préménopause, traitées par six cycles de chimiothérapie [65]. Ces patientes ont été randomisées en un groupe recevant 1 600 mg p.o. de clodronate par jour et en un groupe témoin. La DMO a été mesurée initialement puis à un et deux ans. Une perte osseuse lombaire et fémorale rapide est notée chez les patientes ayant une aménorrhée après la chimiothérapie. À deux ans, la perte est de 9,5 % au niveau lombaire et de 4,6 % au col fémoral dans le groupe sans clodronate, alors qu’avec le clodronate la perte est moins importante (–5,9 et –0,4 % à ces deux sites). Les résultats de cette étude, après trois ans de traitement (obtenus chez 73 femmes), confirment que le clodronate réduit la perte osseuse lombaire (–3 % par rapport à –7,4 % dans le groupe témoin), sans différence significative au niveau fémoral [71]. À cinq ans, deux ans après la fin du traitement par BP, la différence est encore présente au rachis lombaire (–5,8 versus –9,7 %). Une évaluation a également été effectuée, après un suivi de dix ans, chez des patientes en préménopause traitées par chimiothérapie et ménopausées, recevant tamoxifène ou torémifène [64], montrant avec ce suivi à long terme une diminution d’apparition d’une ostéoporose lombaire dans le groupe traité. Le clodronate a également été utilisé en perfusion (sept cycles de 1 500 mg), dans l’étude de Vehmanen et al. [72], chez 45 femmes en préménopause recevant une chimiothérapie adjuvante. Il n’a pas été retrouvé de différence significative de la DMO lombaire, à six mois et à un an, entre le groupe traité et le groupe témoin dans cette étude. Pamidronate L’effet du pamidronate (60 mg i.v. tous les trois mois) a été évalué versus placebo chez 40 femmes non ménopausées traitées par chimiothérapie [34]. Deux tiers des patientes dans chaque groupe ont également reçu du tamoxifène à la fin de la chimiothérapie. La moitié des patientes sont devenues aménorrhéiques (11 patientes dans chaque groupe). À un an sont notées globalement une augmentation de la DMO lombaire de 1,9 % dans le groupe traité et une diminution de 3,2 % dans le groupe placebo (p = 0002). À la hanche, il existe une diminution de DMO de 0,3 % dans le groupe traité et de 2,8 % dans le groupe placebo (p = 0,08). Les différences aux niveaux lombaire et fémoral sont significatives dans le groupe ayant une aménorrhée et ne sont pas significatives dans le groupe sans aménorrhée. Efficacité des traitements sur la perte osseuse en préménopause Risédronate Certains bisphosphonates (BP) administrés avec la chimiothérapie adjuvante freinent significativement la perte osseuse induite ou l’annulent. Delmas et al. avaient montré un effet bénéfique du risédronate pour prévenir la perte osseuse chez les femmes ayant une ménopause induite par la chimio- thérapie [25]. Cette étude porte sur un faible nombre de patientes et utilise un schéma d’administration du risédronate non classique avec huit cycles de 30 mg/j de risédronate ou placebo tous les jours pendant deux semaines puis dix semaines sans traitement. Il n’a cependant pas été montré de prévention de la perte osseuse par le risédronate (prescrit comme au cours de l’ostéoporose postménopausique à la dose de 35 mg/sem) dans l’étude de Hines et al., récemment publiée [48]. Cette étude, contrôlée en double insu versus placebo, a été menée chez 216 patientes en préménopause recevant une chimiothérapie adjuvante (anthracyclines, taxanes, cyclophosphamide). Un contrôle de la DMO a été effectué chez 170 patientes à un an. Il n’a pas été retrouvé de différence en ce qui concerne la perte osseuse lombaire entre les deux groupes (perte osseuse de 4,3 % dans le groupe risédronate et de 5,4 % dans le groupe placebo ; p = 0,18). La perte osseuse à la hanche totale et au col fémoral était également comparable dans les deux groupes. Acide zolédronique Une étude randomisée multicentrique, en double insu, a comparé l’effet d’une injection de 4 mg d’acide zolédronique tous les trois mois versus un placebo pendant un an, chez 101 patientes en préménopause (âge moyen 42 ans) recevant une chimiothérapie pour cancer du sein [47]. Les patientes recevant un placebo ont eu une diminution significative de la DMO lombaire à 6 et 12 mois (respectivement de 2,4 et 4,1 %) ; la DMO à la hanche totale a diminué de 0,8 % à six mois et de 2,6 % à 12 mois. La DMO est, par contre, restée stable chez les patientes recevant l’acide zolédronique. Dans l’étude de Gnant et al., étude randomisée ouverte de phase III, la DMO a été étudiée chez 404 patientes en préménopause [36]. Les patientes recevaient du tamoxifène et de la goséréline avec ou sans acide zolédronique (4 mg tous les six mois) ou de l’anastrozole et de la goséréline avec ou sans acide zolédronique. À trois ans, il existe une perte osseuse significativement plus importante dans le groupe anastrozole et goséréline par rapport au groupe tamoxifène et goséréline. La DMO est stable chez les patientes recevant l’acide zolédronique et est augmentée à cinq ans, deux ans après l’arrêt du traitement. Cancer du sein chez la femme ménopausée Efficacité des traitements sur la perte osseuse en préménopause Le clodronate (1 600 mg/j p.o.) diminue la perte osseuse de la chimiothérapie (niveau 2, grade B) Le pamidronate (60 mg i.v. tous les trois mois pendant un an) prévient la perte osseuse de la chimiothérapie (niveau 2, grade B) Le risédronate (35 mg par semaine) n’empêche pas la perte osseuse de la chimiothérapie à un an (niveau 1, grade A) L’acide zolédronique (4 mg tous les trois mois) prévient la perte osseuse de la chimiothérapie à un an (niveau 2, grade B) L’acide zolédronique (4 mg tous les six mois) prévient la perte osseuse lors des traitements par goséréline + anastrozole et goséréline + tamoxifène (niveau 1, grade A) L’étude de Love et al., effectuée chez 140 patientes recevant ou non du tamoxifène pendant deux ans, a montré un gain de masse osseuse au rachis lombaire de 0,6 % par an, significatif par rapport à la perte osseuse sous placebo de 1 % par an [55]. Par contre, il y a une discrète perte osseuse au radius dans les deux groupes. D’autres études prospectives, portant sur un petit nombre de sujets, concluent de même au maintien ou à l’augmentation de la masse osseuse lombaire et fémorale [33,74,76]. L’existence d’une réduction des fractures avec le tamoxifène prescrit en adjuvant n’est cependant pas démontrée. Dans une étude cas-témoin danoise, le risque de fractures chez les femmes ayant été traitées par du tamoxifène ou un inhibiteur de l’aromatase a été étudié [73]. Il y avait 64 548 patientes ayant eu une fracture et 193 641 témoins ; alors que les inhibiteurs de l’aromatase sont associés à une augmentation du risque fracturaire, l’utilisation de tamoxifène n’est pas associée à une modification du risque de fractures. Une autre étude cas-témoin canadienne [21], également publiée récemment, conclut à une réduction de la survenue de fractures seulement chez les patientes en cours de traitement par tamoxifène, mais non en cas de traitement plus ancien. Retentissement osseux du tamoxifène chez la femme ménopausée Maintien ou augmentation modérée de la DMO chez la femme ménopausée (niveau 2, grade B) Diminution de l’incidence des fractures chez les patientes en cours de traitement ? (niveau 4, grade C) Retentissement osseux du tamoxifène chez la femme ménopausée Retentissement osseux des inhibiteurs de l’aromatase L’étude de prévention de Powles et al., randomisée en double insu, menée chez 179 patientes, qui a montré une perte osseuse chez les femmes en préménopause, retrouve chez les femmes ménopausées une augmentation moyenne annuelle de DMO de 1,17 % au rachis (p < 0,005), de 1,71 % à la hanche (p < 0,001) et une baisse non significative avec le placebo [61]. Anastrozole Effet sur les fractures L’étude ATAC, étude multicentrique randomisée, a évalué l’efficacité de l’anastrozole chez 9 366 patientes ménopausées ayant un cancer du sein : 3 125 patientes RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 737 738 ONCOLOG IE ont reçu l’anastrozole seul, 3 116 patientes le tamoxifène et 3 125 patientes l’association de ces deux molécules. L’analyse de la tolérance était également un objectif principal de cette étude. Les premiers résultats, publiés avec une médiane de suivi de 33,3 mois [2], ont montré une augmentation du nombre de fractures dans le groupe de patientes traitées par anastrozole : 183 patientes sur 3 092 (5,9 %) avec anastrozole et 115 patientes sur 3 094 (3,7 %) avec tamoxifène (p < 0,0001). Cette augmentation de fractures par rapport au tamoxifène a été confirmée lors des résultats à plus long terme de l’étude ATAC. Le nombre de fractures était, en effet, de 219 sur 3 092 (7,1 %) avec l’anastrozole et de 137 sur 3 094 (4,4 %) avec le tamoxifène (p < 0,001) après une médiane de suivi de 47 mois [3], et de 340 sur 3 092 (11 %) avec l’anastrozole versus 237 sur 3 094 (7,7 %) avec le tamoxifène (p < 0,0001) après une médiane de suivi de 68 mois [6]. Il existe une augmentation significative du nombre de fractures vertébrales : 45 sur 3 092 (1,5 %) avec anastrozole et 27 sur 3 094 (0,9 %) avec tamoxifène (p = 0,03), alors que le nombre de fractures de la hanche et du poignet ne sont pas augmentées. Il faut noter qu’il n’y a, cependant, pas eu de recherche systématique de fractures vertébrales par des radiographies de rachis, et que cette étude a été effectuée non pas contre un placebo, mais contre du tamoxifène. Le taux annuel de fractures reste constant pendant la durée du traitement de cinq ans ; l’augmentation du risque de fractures avec l’anastrozole n’apparaı̂t pas la sixième année [4]. Cela est confirmé par les résultats publiés avec une médiane de suivi de 100 mois, ne montrant pas d’augmentation du taux de fractures chez les patientes ayant reçu l’anastrozole après les cinq ans de traitement [5]. Les données de deux études prospectives multicentriques, randomisées ouvertes, ayant les mêmes critères d’inclusion (études ABCSG et ARNO 95), montrent également un taux de fractures plus important avec l’anastrozole. Dans ces études, après deux ou trois ans de tamoxifène, les patientes recevaient l’anastrozole ou poursuivaient le tamoxifène pendant trois ou deux ans supplémentaires [49]. Le nombre de fractures est de 34 sur 1 602 (2 %) avec anastrozole et 16 sur 1 597 (1 %) avec tamoxifène (p = 0,015). Il est moins important que dans l’étude ATAC, peut-être est-ce lié au traitement préalable par tamoxifène. Effets sur la DMO Un sous-protocole de l’étude ATAC (étude randomisée double insu multicentrique) a permis d’analyser, de façon prospective, les modifications de la DMO lombaire et à la hanche totale à un, deux et cinq ans, et des marqueurs du remodelage osseux chez 167 patientes recevant anastrozole, tamoxifène et chez 39 femmes témoins ; les patientes ostéoporotiques étaient exclues [27,28]. Avec l’anastrozole, il existe une perte significative de DMO lombaire et fémorale à un an (2,3 et 1,5 % respectivement) et à deux ans (4 et 3,9 %). Avec le tamoxifène est notée une augmentation significative de DMO à un an (1,4 et 0,9 % respectivement) et à deux ans (2,1 et 1,2 %), alors qu’il n’existe que des modifications minimes à deux ans pour le groupe témoin. Les modifications de la DMO à cinq ans sont les suivantes : – anastrozole (n = 57) : –6,08 % lombaire et –7,24 % à la hanche ; – tamoxifène (n = 51) : +2,77 % lombaire et +0,74 % à la hanche ; – témoins (n = 30) : +1,35 % lombaire et –2,81 % à la hanche. Un traitement pendant cinq ans par anastrozole est donc associé à une perte osseuse au rachis lombaire et à la hanche totale. Il existe, cependant, un ralentissement de la perte osseuse au rachis lombaire entre les années 2 et 5 par rapport à la perte osseuse observée les deux premières années. Il faut noter qu’aucune des patientes ayant une DMO normale initialement (T-score > –1) et ayant reçu anastrozole (n = 32) ou tamoxifène (n = 32) n’est devenue ostéoporotique (T-score < –2,5) à cinq ans ; aucune patiente avec un T-score initial supérieur à –1,5 n’a eu un T-score inférieur à –2,5 lors du traitement. Un plus grand nombre de patientes recevant l’anastrozole sont devenues ostéopéniques (n = 14 ; 17 %) par rapport à celles recevant le tamoxifène (n = 3 ; 3 %). Cinq patientes ostéopéniques initialement sont devenues ostéoporotiques : quatre avec anastrozole (5 %) et une avec tamoxifène (1 %). Les résultats de la DMO à six et sept ans dans cette étude, soit deux ans après l’arrêt du traitement, sont disponibles chez 24 patientes du groupe anastrozole et 29 patientes du groupe tamoxifène et ont été publiés actuellement sous forme d’abstract [19]. L’augmentation de la perte osseuse observée pendant la durée de traitement de cinq ans ne se poursuit pas à l’arrêt du traitement. Une récupération partielle de la perte osseuse lombaire et l’absence de perte osseuse supplémentaire à la hanche sont observées pendant ce suivi entre cinq et sept ans. Il existe une perte de l’effet protecteur du tamoxifène à l’arrêt du traitement, entraı̂nant une perte osseuse modérée, notamment à la hanche. Cela est cohérent avec la réduction du taux annuel de fractures observées à l’arrêt du traitement dans le groupe anastrozole [5]. Dans une autre étude prospective ouverte de cohorte menée chez 118 patientes traitées par anastrozole, les patientes non ostéoporotiques n’étaient pas traitées et ont été comparées avec un groupe témoin de 114 femmes en bonne santé. Les patientes ostéoporotiques (n = 15) ont reçu un traitement par risédronate hebdomadaire [20]. À un an, il existe une diminution de la DMO au rachis (–3,3 ± 0,4 %) et à la hanche (–2,8 ± 0,4 %), dans le groupe anastrozole non traité, significativement plus importante que les témoins. Dans le groupe ostéoporotique traité, à un an, il existe une prévention de la perte osseuse à la hanche et une augmentation significative au rachis lombaire. Les facteurs prédictifs de perte osseuse étaient en analyse multivariée : une réponse antiestrogénique marquée (taux indétectable d’estradiol à un an ou diminution > 50 %) ; une ménopause récente. Marqueurs du remodelage osseux Il existe une augmentation du remodelage osseux avec l’anastrozole. Dans le sous-protocole de l’étude ATAC [28], il existe une augmentation des marqueurs du remodelage osseux avec l’anastrozole. À un an, cette augmentation est de : +26 % pour CTX, +15 % pour NTX, +18 % pour PINP, +20 % pour PAO. Avec le tamoxifène est, par contre, notée une diminution des marqueurs : –56 % pour CTX, –52 % pour NTX, –42 % pour DPD, –72 % pour PINP, –16 % pour PAO. Les modifications sont plus faibles dans le groupe témoin : –22 % pour CTX, –13 % pour NTX, –9 % pour DPD, +2 % pour PAO. Dans l’étude de Confavreux et al. est notée une augmentation à un an de l’ostéocalcine de 36,6 et de 34,2 % du CTX [20]. Retentissement osseux de l’anastrozole Incidence plus élevée des fractures avec anastrozole par rapport au tamoxifène (études ATAC, ABCSG/ARNO) [niveau 2, grade B] Perte osseuse au rachis lombaire et à la hanche (sous protocole ATAC) plus importante les deux premières années (niveau 1, grade A) Aucune des patientes ayant une DMO initiale normale (T-score > –1) n’a présenté d’ostéoporose (T-score < –2,5) [niveau 1, grade A] Augmentation des marqueurs du remodelage osseux (niveau 1, grade A) Létrozole Les premiers résultats rapportés par Goss et al. ont montré une tendance à une augmentation du nombre de nouveaux cas d’ostéoporose diagnostiqués chez les femmes recevant le létrozole par rapport au placebo [40]. Après une médiane de suivi de 30 mois [41] a été mise en évidence une augmentation du nombre de nouveaux cas d’ostéoporose rapportés par les femmes recevant le létrozole (209 sur 2 572, soit 8,1 %) par rapport au placebo (155 sur 2 577, soit 6,0 %) [p = 0,003]. Il n’y avait pas de différence significative du nombre de fractures cliniques dans les deux groupes de patientes. Il faut noter un arrêt prématuré de l’étude en raison de l’augmentation de la survie sans rechute par rapport au placebo. La définition de l’ostéoporose est mal précisée, et il s’agit de diagnostics rapportés par les patientes ; les fractures cliniques sous-estiment probablement les fractures vertébrales. L’étude BIG 1-98 est une étude randomisée double insu comparant pendant cinq ans : létrozole, tamoxifène, létrozole, puis tamoxifène et tamoxifène, puis létrozole [7]. La tolérance était un objectif secondaire de l’étude. Après une médiane de suivi de 25,8 mois était notée une augmentation du nombre de fractures cliniques avec le létrozole (225 sur 3 975, soit 5,7 %) par rapport au tamoxifène (159 sur 3 988, soit 4,0 %) [p < 0,001]. L’analyse des 4 932 femmes ayant eu cinq ans d’un traitement continu par létrozole ou tamoxifène, dans l’étude BIG 1-98 [17], confirme l’augmentation du nombre de fractures dans le groupe létrozole. Comme pour l’anastrozole, il faut souligner que cette étude a été effectuée contre le tamoxifène, et que l’absence de radiographies de rachis peut sous-estimer les fractures vertébrales. Effets sur la DMO Un sous-protocole de l’étude MA-17 a permis d’évaluer l’évolution de la DMO lombaire et fémorale chez 226 patientes (122 ayant reçu du létrozole et 104 du placebo) ayant une DMO initiale avec un T-score supérieur à –2 [59]. À 24 mois, il existe avec le létrozole une diminution de la DMO fémorale (–3,6 versus –0,71 % avec le placebo ; p = 0,044) et de la DMO lombaire (–5,35 versus –0,70 % avec le placebo ; p = 0,008). Effet sur les fractures L’efficacité du létrozole a été évaluée au cours de l’étude MA17, étude randomisée double insu contre placebo, menée chez des patientes recevant après cinq ans de tamoxifène soit létrozole (2 575 patientes), soit placebo (2 582 patientes). La tolérance était un objectif secondaire de l’étude, et les données de tolérance concernent les 4 299 premières femmes incluses dans l’étude. Marqueurs du remodelage osseux Dans cette même étude constituant un sous-groupe de l’étude MA-17 [59] a été effectuée une mesure des marqueurs de formation osseuse (PAO) et de résorption (CTX sérique et uNTX) à 6,12 et 24 mois. Dans le groupe létrozole est notée une augmentation du NTX à six mois (p = 0,054), 12 mois (p < 0,001) et 24 mois (p = 0,016). RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 739 ONCOLOG IE 740 Retentissement osseux du létrozole Augmentation du nombre de nouveaux cas d’ostéoporose rapportés par les patientes recevant le létrozole par rapport au placebo (étude MA-17) [niveau 2, grade B] Augmentation du nombre de fractures cliniques avec le létrozole par rapport au tamoxifène (étude BIG 1-98) [niveau 2, grade B] Perte osseuse au rachis lombaire et à la hanche chez les patientes recevant le létrozole par rapport au placebo (sousprotocole MA-17) [niveau 1, grade A] Augmentation de la résorption osseuse (sous protocole MA17) [niveau 1, grade A] Exemestane Effet sur les fractures Dans l’étude IES (Intergroup Exemestane Study), randomisée double insu, après deux ou trois ans de tamoxifène, les patientes ont reçu soit deux ou trois ans d’exemestane ou bien ont poursuivi la prise de tamoxifène jusqu’à cinq ans. La tolérance était un objectif secondaire de l’étude. Après une médiane de suivi de 30,6 mois [22] est rapportée une augmentation de l’ostéoporose dans le groupe exemestane par rapport au tamoxifène (p = 0,05). Il existe également une tendance à une augmentation des fractures dans le groupe exemestane. Cette augmentation de l’ostéoporose est confirmée dans les données rapportées, avec une médiane de suivi de 55,7 mois et une exposition moyenne à l’exemestane de 30 mois, avec 169 patientes ostéoporotiques sur 2 320 (7,3 %) par rapport au tamoxifène (128 patientes sur 2 338, soit 5,5 %) [p = 0,01] [23]. Le nombre de fractures est plus élevé dans le groupe exemestane (100 patientes sur 2 320, soit 4,3 %) par rapport au tamoxifène (73 patientes sur 2 338, soit 3,1 %) [p = 0,03]. L’analyse de la tolérance sous et après traitement retrouve l’augmentation de l’ostéoporose et des fractures dans le groupe traité par exemestane avec une augmentation significative de fractures vertébrales. Comme pour les autres inhibiteurs de l’aromatase, il faut souligner l’absence de définition précise de l’ostéoporose dans le recueil des données, les fractures cliniques pouvant sous-estimer les fractures vertébrales. Dans cette étude, les patientes étaient exclues en cas de signes cliniques d’ostéoporose sévère. Effets sur la DMO Un sous-protocole de l’étude IES a précisé les effets osseux dans un sous-groupe de 206 patientes (101 ayant reçu l’exemestane et 105 du tamoxifène) ayant une DMO initiale avec un T-score supérieur à –2,5 DS [18]. Avec le tamoxifène, il n’y avait pas de modification significative de la DMO à 6, 12 et 24 mois. Avec l’exemestane a été mise en évidence une diminution rapide, les six premiers mois de la DMO, de 0,051 g/cm2 (2,7 % ; p < 0,0001) au rachis lombaire et de 0,025 g/ cm2 (1,4 % ; p < 0,0001) à la hanche totale ; cette baisse de DMO se poursuit entre 6 et 12 mois et entre 12 et 24 mois avec l’exemestane, moins rapide cependant avec une perte de seulement 1 % (p = 0,002) et 0,8 % (p = 0,003) la deuxième année aux niveaux lombaire et fémoral. Aucune des patientes ayant une DMO normale initialement (T-score > –1) et ayant reçu de l’exemestane ou du tamoxifène n’est devenue ostéoporotique (T-score < –2,5) à 24 mois. À noter, dans ce sous-groupe, l’absence de différence significative de l’incidence des fractures par fragilité osseuse à 24 mois : trois dans le groupe exemestane (3 %) et trois dans le groupe tamoxifène (2,8 %). Dans une étude randomisée italienne [38], menée après deux ou trois ans de tamoxifène, 36 patientes ont poursuivi ce même traitement, et 34 patientes ont reçu de l’exemestane, la durée totale du traitement hormonal étant de cinq ans. Les patientes avaient une DMO initiale avec un T-score supérieur à –2,5 DS et n’avaient pas eu de fracture les six mois précédents. Avec le tamoxifène, il n’a pas été noté de modification significative de la DMO ; avec l’exemestane est retrouvée une diminution progressive de la DMO lombaire, significative dès 12 mois entre les deux groupes. Au col fémoral, il existe une diminution avec une différence significative entre les deux groupes à 18 et 24 mois. À la hanche totale, la différence est significative à 18 et 24 mois entre les deux groupes. Au corps entier, il existe une tendance à diminution dans le groupe exemestane. La mesure de la DMO lombaire et fémorale a également été effectuée dans une étude norvégienne randomisée double insu, effectuée chez 147 patientes recevant de l’exemestane ou du placebo pendant deux ans [54] ; ces patientes avaient une DMO initiale correspondant à un Z-score supérieur à –2 DS. Il existe une augmentation de la perte osseuse annuelle plus importante avec l’exemestane au col fémoral : 2,72 % par an versus 1,48 % par an avec le placebo (p = 0,024) ; au niveau lombaire, la perte osseuse annuelle est également plus importante, mais non significative avec exemestane : 2,17 % par an versus 1,84 % par an avec le placebo ; il faut, cependant, noter que la perte osseuse est plus élevée dans le groupe placebo que celle attendue à ce site. Aucune patiente ayant une DMO initiale normale n’a présenté une ostéoporose. Avec l’exemestane, six patientes sur 28 (21 %) ayant une ostéopénie lombaire initiale et trois patientes sur 27 (11 %) ayant une ostéopénie fémorale sont devenues ostéoporotiques. Avec le placebo, cinq patientes sur 27 (18 %) ayant une ostéopénie lombaire initiale et cinq patientes sur 36 (14 %) ayant une ostéopénie fémorale sont devenues ostéoporotiques. À noter dans cette étude, la survenue de quatre fractures dans le groupe aromasine et cinq dans le groupe placebo. Le suivi de ces patientes un an après les deux ans de traitement par exemestane ou par placebo a été rapporté par Geisler et al. [35]. Un an après la fin du traitement, il existe une amélioration de la DMO lombaire des patientes ayant reçu l’exemestane, et la perte osseuse fémorale est stable. À 36 mois, il n’y a pas de différence significative au niveau lombaire et au col fémoral entre les deux groupes. Les résultats de deux autres études récentes menées aux États-Unis et en Allemagne dans le cadre de l’essai TEAM (The Tamoxifen Exemestane Adjuvant Multicentre), essai prospectif ouvert, randomisé et multicentrique, viennent d’être publiés. Une diminution significative de la DMO a été notée entre le groupe de patientes ayant reçu le tamoxifène (n = 89) ou l’exemestane (n = 78) aux niveaux lombaire et fémoral à 12 mois, avec un ralentissement de la perte osseuse à 24 mois, dans l’étude rapportée par Jones et al. [51]. Dans l’étude allemande, le tamoxifène entraı̂ne une augmentation de la DMO lombaire de 0,5 % à six mois par rapport aux valeurs initiales, se maintenant à un an ; les patientes recevant l’exemestane ont eu une diminution de la DMO lombaire de 2,6 % à un an et une perte supplémentaire de 0,2 % à un an ; la perte osseuse est donc moindre entre six mois et un an [44]. Retentissement osseux de l’exemestane Augmentation des cas d’ostéoporose chez les patientes recevant l’exemestane par rapport au tamoxifène (étude IES) [niveau 2, grade B] Augmentation du nombre de fractures cliniques avec l’exemestane par rapport au tamoxifène (étude IES) [niveau 2, grade B] Perte osseuse au rachis lombaire et à la hanche chez les patientes recevant l’exemestane par rapport au tamoxifène (sous-protocole de l’étude IES ; essai TEAM) [niveau 1, grade A]Perte osseuse à la hanche chez les patientes recevant l’exemestane par rapport au placebo (NS au rachis lombaire) [54] (niveau 1, grade A) Aucune patiente ayant une DMO initiale normale (T-score > –1) n’a présenté d’ostéoporose (T-score <– 2,5) à 24 mois (niveau 1, grade A) Augmentation des marqueurs du remodelage osseux (niveau 1, grade A) Comparaison des inhibiteurs de l’aromatase Il n’y a pas de comparaison directe pour les fractures ou la DMO. Une étude randomisée simple insu contre placebo a analysé l’évolution des marqueurs du remodelage osseux [39], avec les trois inhibiteurs de l’aromatase et du placebo, chez 84 femmes ménopausées en bonne santé, prescrits 24 semaines. Marqueurs du remodelage osseux Ont été mesurés à 2, 4, 8, 12, 16, 20, 24 et 36 semaines les marqueurs de formation (PAO, PINP) et de résorption (CTX sérique, uCTX, uNTX). Dans le sous-protocole de l’étude IES [18], les marqueurs du remodelage osseux, de résorption (uNTX, désoxypyridinoline et CTX sérique) et de formation (PAO, ostéocalcine, PICP) ont été mesurés à 3, 6, 9, 12 et 24 mois. À 24 semaines, il existe une augmentation du CTX avec l’exemestane et le létrozole environ deux fois plus importante que pour l’anastrozole ou le placebo et une augmentation significative du PINP à 24 semaines seulement dans le groupe exemestane. Avec le tamoxifène, il n’a pas été mis en évidence de modifications significatives des marqueurs de formation et de résorption ; avec l’exemestane, il existe une augmentation du turnover osseux. Les marqueurs de résorption sont plus élevés à 12 mois et les marqueurs de formation entre 18 et 24 mois. Dans l’étude randomisée ouverte, comparant l’effet des trois inhibiteurs de l’aromatase sur les marqueurs du remodelage osseux (PAO, PINP, CTXsérique), menée chez 90 femmes en bonne santé avec DMO normale rapportée par McCloskey et al., il existe une augmentation des marqueurs avec les trois, sans différence significative à 24 semaines [57]. Dans l’étude italienne [38], il n’a pas été retrouvé de modification significative du CTX ou de PAO avec le tamoxifène ; avec l’exemestane, une augmentation du CTX est déjà présente à trois mois (30,2 % ; p < 0,05) avec un maximum à 12 mois (105,2 % ; p < 0,001) ; il existe une augmentation de PAO de 31,5 % à 12 mois (p < 0,01) et 25,4 % à 24 mois (p < 0,05). La différence entre les deux groupes est significative pour CTX après trois mois et pour PAO à partir de neuf mois. Lonning et al. retrouvent aussi une augmentation significative du CTX et du NTX, du PAO, du PINP et de l’ostéocalcine [54]. Dans l’essai TEAM, rapporté par Hadji et al. [45], l’exemestane augmente les marqueurs de formation osseuse (PAO, PINP, ostéocalcine) et de résorption osseuse (CTX), alors qu’ils diminuent avec le tamoxifène. Au total Il existe une augmentation de la fréquence de l’ostéoporose chez les patientes ménopausées recevant un inhibiteur de l’aromatase (niveau 1, grade A). Il n’existe pas de comparaison directe entre les différents inhibiteurs de l’aromatase sur la tolérance osseuse. Les modalités de recueil des événements fracturaires sont mal précisées, et l’incidence des fractures vertébrales est certainement sous-évaluée. Les différentes données dont nous disposons incitent donc à identifier les patientes à haut risque d’ostéoporose et à les prendre en charge. RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 741 742 Prise en charge en cas de traitement par inhibiteur de l’aromatase ONCOLOG IE Conduite à tenir Chez une patiente traitée par inhibiteur de l’aromatase, il est important : – de rechercher l’ensemble des facteurs de risque d’ostéoporose qu’elle peut présenter ; – de réaliser un examen ostéodensitométrique ; – d’effectuer un bilan biologique en cas de DMO basse. La découverte d’une DMO basse n’est en effet pas synonyme d’ostéoporose ; elle peut s’observer en cas d’autres pathologies osseuses déminéralisantes telles qu’ostéomalacie, hyperparathyroı̈die, myélome multiple, métastases osseuses. Un bilan biologique minimum doit être effectué pour éliminer, avec les données cliniques et éventuellement d’imagerie, une étiologie autre qu’une ostéoporose. Il comporte : numération formule sanguine, vitesse de sédimentation, calcémie, phosphorémie, phosphatases alcalines, créatinine, électrophorèse des protides, calciurie et créatinurie dès 24 heures. Peuvent être effectuées également un TSH et une parathormonémie. Le dosage de 25-hydroxyvitamine D doit être effectué à la recherche d’une insuffisance ou d’une carence en vitamine D ; – de corriger les éventuelles carences en calcium et en vitamine D. Les mesures hygiénodiététiques sont toujours nécessaires, et cette étape est indispensable avant la prise d’un BP. Ces carences sont fréquentes et peuvent être à l’origine d’une hyperparathyroı̈die secondaire. Il faudra donc évaluer les apports alimentaires en calcium [31] et faire un dosage de 25-hydroxyvitamine D ; un taux plasmatique de vitamine D de 75 nmoles/l (30 ng/ml) est retenu comme valeur souhaitable [24]. L’administration de vitamine D peut se faire par l’utilisation de vitamine D2 ou surtout de vitamine D3 soit en apports quotidiens (environ 800 UI/j), soit en apports intermittents (par exemple 100 000 UI tous les trois mois) et est à adapter en fonction du taux initial et du contrôle du dosage de 25-hydroxyvitamine D ; – de discuter un traitement par BP en fonction du risque individuel. Efficacité des BP sur la prévention de la perte osseuse secondaire à un inhibiteur de l’aromatase Risédronate Les résultats de l’étude SABRE (Study of Anastrozole with the Bisphosphonate RisedronatE) n’ont, dans l’immédiat, été publiés que sous forme d’abstract [29]. L’effet de 35 mg/sem de risédronate a été évalué à un an chez des patientes ayant un traitement par anastrozole. Les patientes ayant un risque élevé avec un T-score inférieur à –2 au rachis ou à la hanche ont reçu du risédronate ; celles ayant un risque modéré (T-score < –1 et ≥ –2 au rachis ou à la hanche) ont reçu du risédronate ou du placebo ; et en cas de risque faible (T-score ≥ –1 au rachis et à la hanche) était donné un placebo. Les résultats sont en faveur d’une prévention d’une diminution de la DMO et d’une augmentation du turnover osseux par le risédronate chez ces patientes recevant l’anastrozole. Dans une étude randomisée double insu contre placebo de 12 mois, avec 12 mois d’extension [42], 87 femmes ménopausées après la chimiothérapie ont reçu du risédronate 35 mg/sem ou du placebo pendant deux ans. Dans le groupe placebo, six patientes recevaient un inhibiteur de l’aromatase, et 38 n’avaient pas d’inhibiteur de l’aromastase (mais 25 avaient du tamoxifène) ; dans le groupe risédronate, cinq patientes recevaient un inhibiteur de l’aromatase, et 38 n’avaient pas d’inhibiteur de l’aromatase (mais 22 recevaient du tamoxifène). On retrouve 34 femmes avec risédronate et 38 femmes avec placebo ayant terminé l’étude à deux ans. Une perte de DMO est notée dans le groupe placebo, sauf au rachis ; une diminution de la DMO lombaire et fémorale est retrouvée avec placebo et d’inhibiteurs de l’aromatase ; il n’y a pas de modification de la DMO à la hanche, et il y a une diminution de la DMO lombaire avec le risédronate et d’inhibiteurs de l’aromatase ; enfin, une augmentation à la hanche totale est notée avec le risédronate sans inhibiteur de l’aromatase. Il est cependant difficile de conclure, vu le faible nombre de patientes et le caractère non homogène des groupes, puisqu’un grand nombre de patientes avaient non pas un inhibiteur de l’aromastase, mais du tamoxifène. Ibandronate Une étude a été effectuée chez 131 patientes ménopausées traitées par anastrozole. Les 50 patientes ayant une ostéopénie ont reçu de l’ibandronate 150 mg p.o. par mois ou un placebo [53]. Après deux ans de traitement, il existe un gain de masse osseuse avec l’ibandronate et une perte osseuse avec le placebo. La différence est significative aux deux sites lombaire et fémoral. Acide zolédronique Deux essais, Z-FAST (étude nord-américaine) et ZOFAST (étude internationale), ont évalué la prévention de la perte osseuse chez les femmes ménopausées ayant un cancer du sein et recevant du létrozole avec l’acide zolédronique (4 mg tous les six mois pendant cinq ans). Les patientes incluses dans l’étude avaient une DMO avec un T-score supérieur à –2 et recevaient soit l’acide zolédronique d’emblée ou secondairement en cas de T-score inférieur à –2 ou de survenue de fracture clinique. Les résultats de l’étude Z-FAST, à un an, portent sur 602 patientes [10]. L’acide zolédronique, prescrit d’emblée, évite la perte osseuse. À un an, il existe une diminution de la DMO significative dans le groupe ayant un traitement différé par rapport au groupe recevant le traitement de première intention. Dans le groupe traité avec délai, plus de patientes ayant une ostéopénie ont progressé vers une ostéoporose par rapport à celles du groupe traité (12 patientes versus une patiente). Il n’a pas été retrouvé de différence en termes de fractures entre les deux groupes à un an. Il faut souligner que dans cette étude, un grand nombre de patientes ont une masse osseuse initiale normale (72 % de patientes ayant un T-score > –1) ; ainsi, seules 27,9 % des patientes du groupe traité d’emblée et 28,2 % du groupe traité avec délai ont une ostéopénie mineure ou modérée, les autres patientes ayant une DMO normale. Les résultats de l’étude ZO-FAST menée chez 1 065 patientes traitées par létrozole et recevant de l’acide zolédronique immédiatement ou de façon retardée, avec les mêmes critères d’inclusion, ont été également rapportés à un an [13]. Dans cette étude, on note également que 30,5 et 31,1 % seulement des groupes traités, respectivement, d’emblée ou de façon retardée ont initialement une ostéopénie modérée (T-score entre –1 et –2) ; les autres patientes ont une DMO normale. À un an, la DMO lombaire est 5,7 % plus élevée dans le groupe traité d’emblée par rapport au groupe traité secondairement ; la DMO à la hanche totale est 3,6 % plus élevée dans le groupe traité d’emblée par rapport au groupe traité secondairement Les résultats à un an de ces deux études Z-FAST (nordaméricaine) et ZO-FAST (internationale) ont été poolés [9]. Sur les 1 667 patientes, 30 % seulement ont initialement une ostéopénie modérée (DMO entre –1 et –2 ), et 70 % des patientes ont une DMO normale. À un an, la DMO lombaire est 5,2 % plus élevée dans le groupe traité d’emblée par rapport au groupe traité secondairement, et la DMO à la hanche totale est 3,5 % plus élevée. Le taux de fractures est similaire. Un plus petit nombre de patientes ont eu une rechute de leur maladie dans le groupe traité d’emblée ; cette notion importante sera à confirmer avec un plus long recul, afin de voir si ces résultats concernant la survie sans rechute sont significatifs. Effet du dénosumab sur la perte osseuse secondaire à un inhibiteur de l’aromatase L’effet du dénosumab a été évalué au cours d’une étude randomisée en double insu contre placebo chez 252 patientes, 127 patientes étant traitées par dénosumab (60 mg tous les six mois) et 125 patientes recevant un placebo [30]. Étaient incluses les patientes ayant un T-score entre –1 et –2,5. Il existe une augmentation significative de la DMO lombaire à un et deux, de 5,5 et 7,6 %, respectivement, par rapport au placebo (p < 0,0001). Une augmentation de la DMO a également été notée à la hanche totale, au col fémoral, au corps entier et à l’extrémité inférieure du radius. Une diminution des marqueurs du remodelage osseux est retrouvée. Efficacité des BP et du dénosumab sur la perte osseuse secondaire à un inhibiteur de l’aromatase Risédronate : expertise en cours Ibandronate (150 mg/mois) : augmentation de la DMO lombaire et fémorale à deux ans (niveau 2, grade B) Acide zolédronique (4 mg tous les six mois) : DMO lombaire et fémorale plus élevée avec l’acide zolédronique prescrit d’emblée par rapport à la prescription retardée (niveau 1, grade A) Dénosumab (60 mg tous les six mois) : augmentation significative de la DMO à un et deux ans (niveau 1, grade A) Efficacité des traitements sur les fractures Il existe actuellement peu de données concernant l’efficacité antifracturaire de ces traitements chez les patientes recevant un inhibiteur de l’aromatase. Au cours des études Z-FAST/ZO-FAST, à un an, le taux de fractures est similaire. Rappelons, cependant, qu’un grand nombre de patientes recevant ce traitement avait une DMO initiale normale. Indication d’un traitement par BP La décision d’un traitement est proposée en fonction de la densitométrie, mais aussi de l’âge, de l’existence de fractures par fragilité osseuse et des facteurs de risque de fracture associés. En 2006, l’Afssaps a actualisé les recommandations concernant le traitement de l’ostéoporose postménopausique [1]. En cas d’antécédent de fracture chez une femme ménopausée, un traitement est recommandé si le T-score est inférieur à –2,5. S’il existe une ostéopénie, un traitement n’est pas systématique, sauf en cas de fracture du col fémoral ou de fracture vertébrale ; il est discuté en cas de facteurs de risque associés. En l’absence de fracture chez une femme ménopausée, un traitement est discuté si le T-score est inférieur ou égal à –3 ou à –2,5 avec la présence d’autres facteurs de risque. En cas d’ostéopénie, il n’est pas recommandé mais peut être discuté si le T-score est inférieur à –2, en présence d’autres facteurs de risque de fracture. Des propositions de prise en charge des patientes recevant un inhibiteur de l’aromatase ont été faites dans quelques études. RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 743 ONCOLOG IE 744 Reid et al. rapportent la position d’un groupe d’experts anglais [62] et proposent un traitement par BP en cas de T-score inférieur à –2 ou d’antécédent de fracture vertébrale ; cette attitude est également proposée si la patiente est âgée de plus de 75 ans et a un ou plusieurs facteurs de risque cliniques. Si le T-score est compris entre –1 et –2, la DMO est remesurée à 24 mois, et un traitement est proposé en cas de perte annuelle de DMO supérieure à 4 % au rachis lombaire ou à la hanche ou de DMO alors inférieure à –2. Des recommandations belges préconisent un traitement par BP en cas de T-score inférieur à –2,5 ou de fracture par fragilité, et chez les patientes ostéopéniques en fonction de la sévérité de l’ostéopénie et de la présence d’autres facteurs de risque [8]. Pour Hadji et al., un traitement par BP est indiqué en cas de T-score inférieur à –2 [43]. Si le T-score est supérieur ou égal à –2 et qu’il n’existe pas d’autre facteur de risque, une mesure de DMO sera refaite un à deux ans plus tard, et si la perte annuelle de DMO est supérieure ou égale à 5 %, un traitement par BP doit être discuté. Un traitement par BP sera également discuté en cas de présence de deux de ces facteurs de risque : un T-score inférieur à –1,5, un âge supérieur à 65 ans, un IMC bas (< 20 kg/m2), un antécédent familial de fracture de la hanche, un antécédent personnel de fracture par fragilité après l’âge de 50 ans, une corticothérapie orale pendant plus de six mois, un tabagisme actif ou passé. Indication d’un traitement par BP en cas de traitement par un inhibiteur de l’aromatase (Tableau 1) – Si antécédent de fracture par fragilité osseuse – Si DMO basse (T-score < –2,5) – Si ostéopénie : à discuter en fonction de la sévérité de l’ostéopénie et de la présence d’autres facteurs de risque Accord d’experts Quand refaire une mesure de DMO ? Les données des études concernant les inhibiteurs de l’aromastase montrent l’absence de survenue d’une ostéoporose en cas de DMO initiale normale. Une ostéodensitométrie pourrait donc être réalisée seulement à la fin du traitement à cinq ans. En cas d’ostéopénie (T-score entre –1 et –2,5) et en l’absence de traitement, une mesure de la DMO pourrait être refaite à un ou deux ans. Pour Reid et al., si le T-score est compris entre –1 et –2, la mesure de la DMO est refaite à 24 mois, et pour Hadji et al., tous les ans ou les deux ans [43,62]. En cas de traitement par BP (car ostéoporose ou ostéopénie et présence de facteurs de risque), un contrôle de la DMO pourrait être effectué à la fin d’un traitement par BP, soit entre trois à cinq ans de traitement. Tableau 1. Propositions de prise en charge des patientes recevant un inhibiteur de l’aromastase Patientes commençant un traitement par inhibiteur de l’aromatase Mesure de la DMO DMO ≤-2,5 T-score ou ATCD de fracture par fragilité osseuse - Mesures hygiéno-diététiques - BP en l’absence de contreindication - Mesure de DMO à la fin du traitement par BP (et à discuter éventuellement à 24 mois en fonction des facteurs de risque DMO entre –1 et – 2,5 T-score - Mesures hygiéno-diététiques - BP à discuter en fonction de la sévérité de l’ostéopénie et des autres facteurs de risque dont : l’âge, les antécédents de fracture du col chez les parents, une acticothérapie actuelle ou passée, IMC ? 19 kg/m2 - Mesure de DMO à 1 ou 2 ans si pas de traitement DMO normale - Mesures hygiéno-diététiques - Mesure de DMO à 5 ans Reid et al. et Hadji et al. conseillent une mesure de DMO chez les femmes recevant un inhibiteur de l’aromatase et traitées par BP tous les 24 mois [43,62]. Quand refaire une mesure de DMO ? (Tableau 1) – Si DMO initiale normale : à cinq ans, à la fin du traitement par inhibiteur de l’aromatase – Si ostéopénie et pas de traitement par BP : à un ou deux ans – Si traitement par BP : à la fin du traitement par BP ou peut être discutée à 24 mois en fonction des facteurs de risque présentés Accord d’experts Conclusion Les femmes traitées pour un cancer du sein ont un risque accru d’ostéoporose. Une ménopause précoce secondaire à une chimiothérapie et la prise d’un inhibiteur de l’aromatase sont ainsi des circonstances pouvant favoriser la survenue d’une ostéoporose. Il est important d’évaluer ce risque et d’effectuer une prise en charge de ces patientes. Références 1. Afssaps (2006) Traitement médicamenteux de l’ostéoporose postménopausique. Recommandations de l’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé. Actualisation. Disponible sur : www.afssaps.sante.fr 2. 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Saltel Diagnostiquer la dépression dans le cancer du sein Introduction La dépression touche un certain nombre de femmes atteintes de cancer du sein au fil du parcours de soin. Fréquemment sous-évaluée, elle est de ce fait soustraitée. Les raisons en sont multiples, qu’il s’agisse d’une sous-estimation des symptômes dépressifs par le clinicien, d’une banalisation de leur présence dans le contexte du cancer, d’une intrication de symptômes dépressifs avec ceux qui sont liés au cancer et à ses traitements, ou encore d’une difficulté pour le clinicien à explorer les symptômes émotionnels [24,51,94] (niveau de preuve 4). Outre le fait qu’il s’agisse alors d’une souffrance psychique non prise en compte, alors qu’elle peut s’avérer d’intensité majeure, cette situation a des conséquences potentielles graves, du fait de son impact sur la morbidité et la mortalité, par le biais de différents mécanismes [14,72,144] : – une détérioration de la qualité de vie ; – une plus grande sensibilité à la douleur ; – des troubles de l’observance au traitement [28], voire un refus de traitement ; – des difficultés à communiquer avec les soignants et avec les proches ; – un risque de suicide. Elle entraı̂ne par ailleurs un surcoût médicoéconomique dont on commence à appréhender le poids [23 Carlson 2004. Les conséquences potentielles lourdes de l’épisode dépressif représentent donc une justification suffisante pour que ce diag- nostic soit recherché chaque fois que l’on sera en présence de symptômes ou de situations d’alerte pouvant faire évoquer ce diagnostic (niveau de preuve 3). Prévalence Prévalence de la dépression L’association entre cancer et dépression a été observée de façon répétée dans bon nombre d’études menées dans différents pays. La prévalence de la dépression dépend de la définition retenue ainsi que des outils diagnostiques auxquels on se réfère. De fait, les chiffres que l’on trouve dans la littérature sont parfois peu contributifs, proposant des taux de prévalence, allant de 1 à 40 % d’une étude à l’autre [72,93,94]. Massie rapporte une prévalence de symptômes dépressifs de 0 à 58 %, mais de 0 à 38 % pour la dépression majeure [93]. La difficulté à déterminer ce taux doit être mise en lien avec deux points principaux. D’une part, de nombreuses études évaluent la prévalence d’entités cliniques mixtes comportant diverses manifestations psychopathologiques de nature dépressive, dont il n’est pas toujours aisé d’extraire les données concernant l’épisode dépressif majeur (EDM) exclusivement. Cela est d’autant plus vrai qu’il existe une forte comorbidité entre dépression et anxiété [72,93]. D’autre part, les méthodes d’évaluation diagnostique sont diverses selon que l’on recourt ou non à un réel outil diagnostique, et lorsque c’est le cas selon le choix d’outil qui est effectué : système DSM, III, IV ou IV-R (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders) ou à l’ICD10 (Classification internationale des maladies de l’Organisation mondiale de la santé), autre questionnaire RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 747 ONCOLOG IE 748 d’hétéro-, voire d’autoévaluation de la dépression. Une première étude, qui fait date, mais qui est toujours citée, a été menée en 1983 sur 215 patients hospitalisés ou ambulatoires recrutés dans trois centres américains par Derogatis et Morrow [40] et a identifié une prévalence de 8 % de troubles affectifs majeurs (EDM et troubles dysthymiques), alors que la prévalence des troubles de l’adaptation avec humeur dépressive ou humeur anxiodépressive mixte s’élève à 32,1 %. Par la suite, des données similaires ont été rapportées dans des études ultérieures, telle l’étude belge menée par Razavi et Delvaux [122] sur un groupe sélectionné au hasard de patients présentant des diagnostics carcinologiques divers. Dans la cohorte d’Europe du Sud, de Grassi et al., 9 à 14 % des patients sont concernés par un trouble dépressif [62]. Les taux de prévalence varient selon la manière dont sont considérés les symptômes somatiques et peuvent s’élever jusqu’à des taux de 13 à 26 % dans le contexte de la phase palliative [25,61]. Concernant plus spécifiquement le cancer du sein, l’étude de Dausch et al. porte sur 207 femmes ayant reçu un diagnostic récent de cancer du sein et retrouve une prévalence de 18 % de troubles anxieux ou dépressifs selon le DSM IV [38]. L’étude de Coyne et al., portant sur 113 patientes en cours de traitement, identifie un taux de prévalence de 9 % (IC 95 % : [5–16 %]) à l’aide d’un entretien psychiatrique structuré (SCID) [34]. L’étude australienne de Kissane et al., portant sur 303 patientes atteintes de cancer du sein à un stade précoce et 200 patientes atteintes de cancer du sein métastatique évaluées à l’aide d’un SCID, retrouve un taux de 8 % (stade avancé) à 11 % (stade précoce)] [80]. Globalement, ces études tendent à montrer que 8 à 9 % des patientes atteintes de cancer du sein relèvent d’un diagnostic de dépression majeure au sens du DSM-IV-R (alors que la prévalence des symptômes s’élève à 25–30 % lorsque l’on étudie les troubles de l’adaptation dans leur ensemble) [118]. Hegel et al. par exemple identifient 11 % de patientes présentant une dépression majeure au sein de 41 % de femmes en détresse significative au moment du diagnostic de cancer (niveau de preuve 4). Ce taux s’élève dans les phases avancées du cancer (16 % selon l’étude de Grabsch et al. [61], niveau de preuve 4). Il s’élève aussi en présence d’un certain nombre de facteurs de risque qui sont décrits au paragraphe suivant. Les taux de prévalence varient également selon le moment de la prise en charge : ainsi, la prévalence serait de 11 % au moment du diagnostic de cancer du sein [66] ; de 16 % au moment du traitement curatif ; de 8,6 % des femmes à trois mois de la chirurgie pour un cancer du sein de découverte récente [79] ; de 16 % pour les patientes sous chimiothérapie [129]. On manque, en revanche, d’études longitudinales qui permettraient d’obtenir un profil plus précis de l’évolution de ces troubles dépressifs au fil de la prise en charge du cancer. Par ailleurs, on dispose de moins d’études permettant d’appréhender la dépression chez les femmes en rémission d’un cancer du sein. L’étude observationnelle de Burgess et al. [19], portant sur 170 femmes atteintes de cancer du sein localisé suivies pendant cinq ans, identifie un taux de prévalence annuelle de troubles anxiodépressifs, diagnostiques portés à l’aide du SCIC, entretien diagnostique structuré se référant à la classification DSM – de 50 % pendant la première année, qui diminuent à 25 % les années suivantes, pour aboutir à 15 % au bout de cinq ans. Le pic de prévalence est de 33 % au moment du diagnostic et s’abaisse à 15 % à un an. On peut retenir globalement une prévalence des symptômes dépressifs et anxieux chez les patientes atteintes de cancer du sein de 30 à 50 % (niveau de preuve 3). Cette prévalence est décroissante au fil du temps ; cependant, les chiffres restent donc élevés en période de rémission et à distance des soins du cancer. Ainsi, les taux d’anxiété, de dépression ou de trouble anxiodépressif sont deux fois supérieurs chez ces femmes dans la première année suivant le diagnostic, comparés à ceux observés en population générale féminine ; pour rejoindre les taux en population générale par la suite. Prévalence du suicide Malgré les fluctuations trouvées dans la littérature du fait de problèmes méthodologiques et de définition, on peut estimer que le risque de suicide en oncologie est de 1,95 à 2,8 fois plus élevé que dans la population générale [68,98] (niveau de preuve 2). Le désir de mourir est présent chez 17 % des patients en phase avancée d’un cancer. La demande du patient d’accélérer son décès est fréquemment associée à un état dépressif, de désespoir, un moindre soutien social, un état physique très détérioré et un recours moindre à la spiritualité [24]. Le risque suicidaire doit toujours être évalué devant un tableau de dépression. Le fait d’interroger le patient sur la présence d’idéations suicidaires n’est pas considéré comme un facteur favorisant le passage à l’acte et doit être encouragé auprès des professionnels. Un certain nombre de facteurs de risque de suicide sont aujourd’hui identifiés [16,120] (niveau de preuve 2) : Facteurs biologiques – Temps : première année après le diagnostic [68] ; avec un surrisque pour les deux sexes dans les trois premiers mois, puis seulement pour les femmes entre 3 et 12 mois [164] ; – site : tête et cou, poumon, gastro-intestinal, SNC [98] ; – stade : avancé ; – symptômes : douleur, fatigue. Éléments psychopathologiques actuels Dépression, désespoir, delirium Autres facteurs – Sexe masculin [68] ; avec un risque relatif de 1,7 chez l’homme contre 1,4 chez la femme par comparaison avec la population générale danoise [164] ; – antécédents familiaux de suicide et/ou de maladie psychiatrique ; ou secondaire aux traitements instaurés, ou à l’évolution du cancer. Une fois statué le moment de l’apparition du trouble dépressif par rapport au cancer et à ses thérapeutiques, on peut distinguer les facteurs de risque personnels et individuels, les facteurs sociaux, les facteurs liés à la maladie cancéreuse ou aux traitements, ou à une autre cause médicale. – antécédents personnels de tentative de suicide ; – trouble psychiatrique préexistant (abus de substance, trouble de la personnalité) ; – perte récente (deuil par exemple). Une seule étude américaine [137] s’est intéressée au risque suicidaire de femmes en longue rémission d’un cancer du sein et n’a pas retrouvé de différence significative par rapport à la population générale. La localisation mammaire ne représente donc pas particulièrement un site à risque accru de suicide : mais les autres facteurs de risque potentiels restent valables, et il importe de les avoir en mémoire dans la prise en charge des patientes. La dépression est fréquente mais reste sous-diagnostiquée dans le cancer du sein. La prévalence des symptômes dépressifs et anxieux chez les patientes atteintes de cancer du sein est de 30 à 50 % (niveau de preuve 3). La prévalence de l’EDM selon les critères du DSMIV-TR est plus faible, avec des fluctuations de taux observé qui dépendent de la population étudiée (hétérogénéité) et de la méthodologie utilisée (critères diagnostiques, prise en compte des facteurs somatiques, outils utilisés) : – tous cancers confondus : 5–6 % ; – cancer du sein : 6–9 % (ambulatoire), 25–50 % si stade avancé ou patiente hospitalisée (niveau de preuve 4). Le risque suicidaire est accru chez les patients atteints de cancer par comparaison à la population générale (RR : 1,9 à 2,8) [niveau de preuve 2], mais la localisation mammaire n’apparaı̂t pas comme facteur de risque en elle-même. Facteurs de risque En pratique clinique au quotidien, l’oncologue sera vigilant sur les facteurs de risque prédictifs du développement de troubles dépressifs chez les patientes atteintes d’un cancer du sein. Le dépistage de ces facteurs de risque peut permettre la mise en place d’une prise en charge précoce et éviter le développement de troubles psychosociaux majeurs altérant la qualité de vie des patientes [61] (niveau de preuve 2, grade B). L’étude des facteurs de risque de dépression doit tenir compte de la temporalité de survenue des troubles de l’humeur eu égard à la maladie somatique : préexistante, contemporaine à la survenue du cancer du sein Facteurs de risque personnels et individuels Ils sont dominés par le jeune âge au moment du diagnostic (15–54 ans) [32,120,160] et une histoire personnelle marquée par des événements de vie récents négatifs ou stressants (deuil, pertes successives) durant la période précédant le diagnostic ou concomitante à celui-ci (niveau de preuve 3, grade C). L’existence d’épisodes psychopathologiques antérieurs personnels (dépression, tentative d’autolyse, toxicomanie, alcoolisme) ou familiaux (dépression, tentative d’autolyse, suicide) sont un facteur de risque d’apparition de troubles dépressifs chez les femmes ayant terminé un traitement de cancer du sein par radio ou chimiothérapie [24,32] et de mauvaise adaptation aux situations de récidive de cancer du sein [110] (niveau de preuve 4, grade C). Certains traits de personnalité peuvent prédisposer à la survenue d’états dépressifs chez les patientes atteints de cancer du sein : tendance à ne pas exprimer ses émotions, tendance à considérer les événements de la vie comme incontrôlables et inévitables, faible estime de soi et faiblesse du soutien émotionnel [101,162], tendance au pessimisme (niveau de preuve 4, grade C). Facteurs de risque sociaux Un statut marital précaire (seule, divorcée, séparée, veuve) [139] (accord d’experts), un isolement social et un niveau socioéconomique bas [36] (niveau de preuve 3, grade C), l’appartenance à une minorité ethnique avec faible revenu [47] (niveau de preuve 2, grade B), un manque de ressources sur le plan des relations interpersonnelles [78] (niveau de preuve 4, grade C) sont des facteurs de vulnérabilité dépressive. Facteurs de risque biologiques liés à la maladie cancéreuse ou à ses traitements Le type de cancer et le stade de la maladie ne sont pas en eux-mêmes des facteurs de risque ; cependant, le type et le stade au moment du diagnostic (stade avancé du cancer du sein ou métastatique, plutôt que local ou locorégional) sont un facteur de risque (consensus d’experts). Les phases critiques de réaction dépressive et d’effondrement dépressif sont l’annonce du diagnostic, les périodes de rémission (persistance du doute par rapport à la rechute ou la récidive), l’annonce de la récidive ou de l’aggravation (métastases), l’entrée en phase palliative (accord d’experts). RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 749 750 ONCOLOG IE Il est à remarquer que les périodes de rémission peuvent être un moment d’accalmie physique laissant l’opportunité à des symptômes dépressifs d’émerger en raison d’une diminution des mécanismes de défense du patient jusqu’alors fortement mobilisés par l’épreuve de la maladie. La présence de symptômes physiques non contrôlés (nausées, vomissements, fatigue, altération de l’état général) [16] ou d’un lymphœdème [21] (niveau de preuve 4, grade C) ou l’existence d’un autre handicap associé (paralysie, stomie, trachéostome, incapacité physique) [138] sont d’autres facteurs de risque (niveau de preuve 4, grade C). De façon plus spécifique, la présence de douleurs physiques non contrôlées ou de métastases est un facteur de risque prédictif majeur de survenue d’un épisode dépressif (2 à 4 fois plus de risque) [26,148] (niveau de preuve 2, grade B) et cela, indépendamment de l’âge [58] (niveau de preuve 4, grade C). La douleur chronique chez les patients favorise le développement d’un syndrome dépressif et inversement, la présence d’une dépression majore l’expérience de la douleur et donc abaisse le seuil de tolérance à la douleur [24] (accord d’experts). C’est ainsi en lien avec la dépendance et l’altération de l’état physique que la prévalence des symptômes dépressifs augmente à des phases évoluées de la maladie cancéreuse [17] (niveau de preuve 4, grade C). La douleur, la fatigue et la dépression sont des facteurs prédicteurs de détresse psychologique dans 68 à 72 % des cas [134] (niveau de preuve 4, grade C). Facteurs de risque liés à une autre cause médicale Les anomalies neurologiques (tumeur cérébrale primaire ou métastases cérébrales), endocriniennes (hyper- ou hypothyroı̈die, insuffisance surrénalienne), métaboliques (troubles ioniques : Na+, K+, Ca2+ ; déficit en vitamines B12, folates) peuvent entraı̂ner une dépression [15,24] (niveau de preuve 4, grade C). Les risques dépressifs chez les femmes traitées à un stade précoce du cancer du sein [9] (niveau de preuve 1, grade A) ou à distance des traitements (cinq ans) [19] (niveau de preuve 2, grade B) apparaissent plus liés à des facteurs personnels de vulnérabilité qu’aux variables liées au cancer ou à ses thérapeutiques. Le dépistage de la dépression chez les femmes atteintes de cancer du sein passe en premier lieu par l’évaluation des facteurs de risque de survenue des troubles dépressifs. Cette démarche préventive s’intègre dans le cadre d’une globalité de la prise en charge de la dépression parmi ce type de populations. La prévalence de la dépression dans le cancer du sein augmente en fonction des facteurs de risque prédictifs retrouvés lors de l’anamnèse (niveau de preuve 3, grade C) Le dépistage et la prise en charge précoces des facteurs de risque de dépression dans le cancer du sein peuvent permettre de prévenir l’apparition ultérieure des troubles dépressifs (niveau de preuve 2, grade B) Les facteurs de risque de dépression dans le cancer du sein sont essentiellement : – la douleur (niveau de preuve 2, grade B) ; Facteurs de risque liés aux traitements Certains traitements sont associés à un risque de dépression accru : – les patientes en cours de traitement par chimiothérapie (vinblastine, procarbazine), immunothérapie (IFN, IL-2) ou radiothérapie intracérébrale sont plus à risque de développer un syndrome dépressif [24] (accord d’experts) ; – l’utilisation de corticostéroı̈des au long cours est également un facteur de risque de dépression [12] (niveau de preuve 2, grade B). Beaucoup d’études restent contradictoires concernant l’effet dépressogène du tamoxifène. À ce jour, cela n’est pas démontré dans l’étude de cohorte rétrospective de Lee et al. [85] (niveau de preuve 2, grade B). Le type de chirurgie utilisée chez les patientes qu’il soit radical (mastectomie totale) ou partiel (tumorectomie) n’est pas prédictif d’une augmentation de survenue d’épisodes dépressifs à 3 et 12 mois en postopératoire (21 % si mastectomie totale versus 19 %, si mastectomie partielle dans l’étude de Fallowfield et al. [50,85] (niveau de preuve 2, grade B). La fin des traitements curatifs ou la fin des traitements et la période de rémission sont des périodes à risque de survenue d’épisodes dépressifs chez les patientes atteintes de cancer du sein (consensus d’experts). – le jeune âge et un statut marital précaire (seule, divorcée, séparée, veuve) [niveau de preuve 3, grade C] ; – l’isolement social (niveau de preuve 4, grade C) ; – les antécédents psychiatriques de dépression personnels ou familiaux (niveau de preuve 4, grade C). Le dépistage et la prise en charge précoces des facteurs de risque de dépression dans le cancer du sein peuvent permettre de prévenir l’apparition ultérieure des troubles dépressifs (niveau de preuve 2, grade B). Cette démarche préventive doit faire partie de la prise en charge globale (accord d’experts). La chirurgie radicale mammaire (mastectomie totale) n’est pas plus un facteur de risque prédictif de dépression que la chirurgie conservatrice (niveau de preuve 2 ; grade B). Les périodes à plus haut risque sont la première année, après le diagnostic, lors de la rémission, la récidive, en fin de vie (accord d’experts). Comment faire le diagnostic de dépression ? Quels symptômes ? La prévalence de la dépression est inférieure à celle des troubles psychopathologiques en général dans le contexte du cancer, qui selon la définition et la modalité diagnostique retenues peuvent concerner 25 à 40 % des femmes atteintes de cancer du sein. L’objectif est ici d’identifier les éléments clés qui permettent au cancérologue de repérer un trouble psychopathologique de nature dépressive et d’orienter, le cas échéant, vers le spécialiste de façon adéquate. Certains symptômes, tels que les pleurs, sont facilement repérés par les cliniciens et les équipes soignantes : pour autant, ils ne peuvent et ne doivent pas être considérés comme des signes évocateurs de dépression dans la mesure où il s’agit de symptômes très peu spécifiques (consensus d’experts). À l’inverse, d’autres symptômes, plus caractéristiques de dépression, doivent être recherchés activement, car ils représentent d’excellents signaux d’alerte en faveur de ce diagnostic. Parmi eux, deux signes sont à retenir car centraux dans la définition de la dépression, l’humeur dépressive et la perte d’intérêt et/ou de plaisir [93] (niveau de preuve 4). Les signes évocateurs de dépression associent des symptômes relevant de différents registres : Humeur – Humeur dépressive +++ ; Ces manifestations somatiques accompagnent souvent les signes psychiques. Elles doivent être différenciées des symptômes physiques liés à l’affection cancéreuse ou au traitement comme la fatigue, anorexie et/ou la perte de poids, les troubles cognitifs ou du sommeil, la baisse de la libido ; même si cette différenciation est parfois extrêmement difficile à établir. Une étude récente menée par Reuter et al. a montré que les symptômes cognitifs sont moins prévalents chez les patients atteints de cancer que les symptômes somatiques et émotionnels, et que la perte des intérêts est le facteur le plus discriminant chez les patients avec ou sans diagnostic d’un trouble affectif comorbide [126]. De plus, la baisse d’énergie et la fatigue ont montré aussi une certaine valeur discriminante, en dépit d’un possible chevauchement avec le cancer et le traitement du cancer. La dépression doit représenter un diagnostic d’élimination, ne pouvant être porté qu’après avoir écarté les différentes causes physiques ou iatrogéniques pouvant générer des symptômes d’allure dépressive (exemple : asthénie sous opiacés, anorexie dans le contexte de cancers digestifs, etc.). Le diagnostic doit être syndromique et non pas se limiter à une approche symptomatique pure [34]. – perte de l’intérêt et du plaisir (anhédonie) +++ ; – sentiments d’impuissance ; – désespoir ; – sentiment d’inutilité ; – culpabilité excessive ou inappropriée ; – mauvaise estime de soi. Volonté – Aboulie avec ralentissement moteur (parfois agitation) ; – apathie. Symptômes cognitifs – Diminution de la capacité à penser et à se concentrer ; – détérioration de la mémoire ; – pensées récurrentes autour de la mort (idéation suicidaire). Symptômes végétatifs et somatiques – Anorexie et perte de poids (parfois augmentation de l’appétit et prise de poids) ; – troubles sexuels (perte de libido) ; – fatigue et perte d’énergie ; – troubles du sommeil (insomnie ou hypersomnie) ; – autres symptômes somatiques (douleurs, troubles gastro-intestinaux, céphalées, tensions musculaires, etc.). Quel cheminement diagnostique à partir d’un certain nombre de symptômes « portes d’entrée » ? Un certain nombre d’états psychopathologiques de nature dépressive peuvent être observés chez la femme atteinte de cancer du sein, et il s’agit de différencier la tristesse « normale » de troubles adaptatifs à prédominance dépressive ou d’un EDM caractérisé. Le diagnostic d’une maladie somatique grave telle que le cancer, ainsi que les traitements associés constituent une source de détresse pour le patient. La question des pertes multiples qui y sont associées (perte de l’état de bonne santé, de l’intégrité corporelle, du statut social) ponctue le parcours de la maladie et s’accompagne de la survenue fréquente de moments dépressifs physiologiques. Les modalités adaptatives du patient sont très diverses et peuvent fluctuer selon le moment du parcours de soins. Cependant, si la tristesse et les réactions de chagrin constituent des réactions normales face aux crises causées par le cancer, telles qu’elles sont décrites par la majorité des patients, il importe de faire la distinction entre un état de tristesse d’allure « normale », et un trouble dépressif caractérisé. Le degré de sévérité est variable depuis les « troubles de l’adaptation », jusqu’à des syndromes mixtes, tels les syndromes anxiodépressifs, ou encore jusqu’à la dépression majeure, ou « EDM » qui constitue la forme la plus grave des troubles dépressifs. Il en résulte que, du fait de la grande variété de ces manifestations psychopathologiques qui se présentent sous la forme d’un continuum entre adaptation normale et trouble psychopathologique structuré, et dans le but d’identifier correctement les besoins des patients et la RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 751 752 ONCOLOG IE nécessité éventuelle d’interventions thérapeutiques, les professionnels de santé doivent être capables de faire la part entre des difficultés témoignant d’une adaptation normale et des troubles dépressifs plus sérieux, qui relèveront d’une prise en charge spécifique. Jones a proposé pour modéliser l’installation des troubles anxieux ou dépressifs ce schéma. Sur celui-ci, on peut voir comme exemple une séquence type avec le passage par des formes subsyndromiques [76]. Pour ce faire, et malgré leur caractère imparfait du fait de l’origine souvent mixte (somatique et psychique) des symptômes rapportés, on doit se référer aux définitions données par le manuel de classification des maladies mentales DSM-IV-R [3] (encart ci-après) ou encore les critères de la CIM-10 (Classification internationale des maladies mentales) [163], les critères du DSM-IV apparaissant les plus adéquats et les plus diffusés. Le diagnostic d’EDM sera porté à partir du moment où est identifiée la présence d’au moins de cinq des symptômes mentionnés dans l’encart (encart ci-après), dont l’humeur dépressive et la perte d’intérêt ou de plaisir, qui doivent avoir été présents pendant une même période d’une durée de deux semaines, et avoir représenté un changement par rapport au fonctionnement antérieur. – fatigue ou perte d’énergie presque tous les jours ; – sentiment de dévalorisation ou de culpabilité excessive ou inappropriée (qui peut être délirante) presque tous les jours (pas seulement se faire grief ou se sentir coupable d’être malade) ; – diminution de l’aptitude à penser ou à se concentrer ou indécision presque tous les jours (signalée par le sujet ou observée par les autres) ; – pensées de mort récurrentes (pas seulement une peur de mourir), idées suicidaires récurrentes sans plan précis ou tentative de suicide ou plan précis pour se suicider ; – les symptômes ne répondent pas aux critères de l’épisode mixte ; – les symptômes induisent une souffrance cliniquement significative ou une altération du fonctionnement social, professionnel ou dans d’autres domaines importants ; – les symptômes ne sont pas imputables aux effets physiologiques directs d’une substance (par exemple, une substance donnant lieu à un abus, un médicament) ou d’une affection médicale générale (par exemple, hypothyroı̈die) ; L’EDM se manifeste avec ou sans caractéristiques psychotiques, et la présence de caractéristiques psychotiques est un signe de gravité. Le diagnostic d’EDM doit être différencié d’autres troubles dépressifs qui ne présentent pas le caractère constitué de l’EDM. Il peut s’agir de troubles de l’adaptation à tonalité dépressive ou mixte, anxieuse et dépressive. – les symptômes ne sont pas mieux expliqués par un deuil, c’est-à-dire après la mort d’un être cher, les symptômes persistent pendant plus de deux mois ou s’accompagnent d’une altération marquée du fonctionnement, de préoccupations morbides de dévalorisation, d’idées suicidaires, de symptômes psychotiques ou d’un ralentissement psychomoteur. Critères DSM-IV-R de l’EDM Comment différencier en contexte somatique les symptômes psychologiques des symptômes somatiques ? – Au moins cinq des symptômes suivants doivent avoir été présents pendant une même période d’une durée de deux semaines et avoir représenté un changement par rapport au fonctionnement antérieur ; au moins un des symptômes est soit une humeur dépressive, soit une perte d’intérêt ou de plaisir. NB : ne pas inclure de symptômes qui sont manifestement imputables à une affection médicale générale, à des idées délirantes ou à des hallucinations non congruentes à l’humeur. – Humeur dépressive, présente pratiquement toute la journée presque tous les jours, signalée par le sujet ou observée par les autres ; – diminution marquée de l’intérêt ou du plaisir pour toutes ou presque toutes les activités pratiquement toute la journée, presque tous les jours (signalé par le sujet ou observée par les autres) ; – perte ou gain de poids significatif en l’absence de régime, ou diminution ou augmentation de l’appétit presque tous les jours ; – insomnie ou hypersomnie presque tous les jours ; – agitation ou ralentissement psychomoteur presque tous les jours (constaté par les autres) ; Plusieurs approches sont décrites en cancérologie : – inclusive où tous les symptômes sont pris en compte qu’ils puissent être attribués ou non au cancer ; – exclusive où les symptômes somatiques sont systématiquement exclus des critères diagnostiques ; – substitutive où ces mêmes symptômes somatiques sont substitués par d’autres symptômes affectifs [48] ; – alternative avec modification des critères diagnostiques : les critères usuels sont explicités et d’autres symptômes affectifs sont proposés. Dans les approches exclusives et substitutives, on se centre uniquement sur les items émotionnels et cognitifs. Ainsi, les éléments suivants doivent être recherchés et feront l’objet d’une attention particulière : humeur dépressive, anhédonie (perte d’intérêt, de plaisir), sentiments d’impuissance et de désespoir (helplessness–hopelessness), perte de l’estime de soi, sentiments d’inutilité, d’indignité, de culpabilité, idées suicidaires [93] (niveau 4b), désir de mort. Toutefois, en pratique clinique, l’approche inclusive reste la plus recommandée, pour éviter de sous-estimer le diagnostic de cancer. Ces éléments seront utiles au professionnel non expert pour repérer un trouble dépressif et orienter vers un expert psycho-oncologue. En revanche, ils ne sont en général pas suffisants pour prescrire. Suspecter le diagnostic devant les symptômes suivants : – anhédonie ; – sentiment d’impuissance et de désespoir ; – idées suicidaires ; – culpabilité ; – refus ou mauvaise observance au traitement ; – ou signes plus fréquents et moins spécifiques : pleurs, irritabilité, trouble du sommeil, fatigue, anorexie. Prendre en compte les symptômes associés : – Fatigue, douleur, nausées, bouffées de chaleur. Une politique de dépistage est-elle utile et laquelle ? On doit distinguer la notion de dépistage individuel du dépistage de masse. Le chapitre ci-dessous évoque les principes d’organisation du dépistage de la dépression au niveau d’une institution. Devant la fréquence mais aussi devant l’hétérogénéité des manifestations psychopathologiques observées en cancérologie, une politique de dépistage est prônée par de très nombreux auteurs. À partir de l’identification d’un état de détresse, son objectif est de faire la sélection des patients qui présentent une détresse significative (repéré en fonction d’un seuil à l’outil de dépistage utilisé) pour adresser ceux qui relèvent de l’expertise psycho-oncologique vers les spécialistes des unités de psycho-oncologie : psychologues, psychiatres ou infirmiers compétents en psychiatrie [138,161]. Un certain nombre d’outils ont été testés en pratique clinique, avec des résultats indiquant des niveaux satisfaisants de sensibilité et de spécificité. Aucun outil de dépistage ne permet de faire le diagnostic positif d’EDM, qui ne pourra être porté que par l’expert dans le cadre d’un entretien clinique structuré, de type SCID (Structured Clinical Interview for DSM Disorders). Certains outils sont spécifiquement destinés à évaluer les symptômes dépressifs : – Brief Symptom Inventory-18 (BSI-18) ; – Depression Subscale [165] ; – Zung Depression Inventory [116] ; – Beck Depression Inventory [88] ; – CESD Center for Epidemiological Studies in Depression Scale [159] ; – Hamilton Rating Scale for Depression. D’autres sont non spécifiques et évaluent plus globalement la détresse émotionnelle : – la HADS (Hospital Anxiety Depression Scale), échelle d’anxiodépression en milieu hospitalier est la plus utilisée en cancérologie [20,88,103,113,142]. Elle est transposable à plusieurs sites tumoraux, facile à administrer et peut facilement être utilisée en pratique clinique associée au thermomètre de détresse émotionnelle (distress thermometer), afin d’analyser plus en détails certains aspects de l’humeur de patients qui présentent des symptômes de souffrance psychique [73] ; – le thermomètre de détresse est une échelle visuelle analogique permettant d’évaluer l’état de détresse du patient sur une échelle allant de 0 à 10, reprenant le principe de dépistage de la douleur physique en milieu somatique. Adapté en français, le seuil de 3 a été identifié comme le seuil de détresse significative permettant le meilleur compromis entre sensibilité et spécificité [43]. Il existe de nombreuses discussions concernant la valeur prédictive de ces différents outils, les seuils à retenir, la manière de les utiliser dans une procédure de dépistage systématique, le moment, etc. [8,72,161]. Un certain nombre de travaux ont cherché à identifier la combinaison d’outils de dépistage la plus favorable [2] ou encore le meilleur moment pour y recourir [8]. Une récente étude de Mitchell reprenant 38 études qui ont utilisé diverses méthodes de dépistage de la détresse (dont 19 au moyen du thermomètre de détresse), portant sur près de 6 500 patients, a montré la fréquence des faux-positifs [99] (niveau de preuve 2). C’est pourquoi, le recours à un outil d’autoévaluation de la détresse représenterait avant tout un moyen efficace d’éliminer les non-cas et de se concentrer sur les patients présentant une détresse significative. En revanche, la réalisation de ce dépistage de manière isolée, sans possibilité d’approfondissement de l’évaluation psychopathologique et selon la clinique, d’orientation en vue d’une prise en charge spécialisée n’est pas efficace [51]. La littérature récente portant sur l’efficacité de la démarche de dépistage en oncologie montre que les outils simples de dépistage ont l’intérêt principal d’éliminer les non-cas. En pratique, il est recommandé d’organiser dans les lieux de soins cancérologiques des politiques de dépistage en plusieurs étapes, dont le recours à l’outil de dépistage d’un état de détresse significatif ne représente que le premier pas [18,51] (niveau de preuve 4). Le recours à un outil d’autoévaluation de la détresse, telle l’échelle de détresse psychologique, adaptation du thermomètre de détresse des anglo-saxons [43,69] représenterait un moyen efficace d’éliminer les non-cas et de se concentrer sur les patients présentant une détresse significative. RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 753 754 ONCOLOG IE Le patient a tendance à minimiser ses symptômes dépressifs, et le clinicien a tendance à ne pas les repérer ou à les considérer comme symptômes anxieux (accord d’experts). Cela soutient le principe d’une politique de dépistage systématique de la dépression (accord d’experts). Les modalités du dépistage organisé de la dépression doivent être adaptées aux ressources présentes dans l’institution (recours à des questionnaires ; présence de psychiatre et/ou psychologue, psychooncologue). Un certain nombre d’outils de dépistage de la dépression sont utilisés en cancérologie et permettent de repérer les patients : HADS, BDI, DTS, ZUNG. Ce dépistage devra être complété si besoin par un entretien spécialisé. Le traitement des patientes déprimées atteintes de cancer du sein est-il efficace ? Dépression et prise en charge globale Reconnaı̂tre le diagnostic et évaluer l’ensemble des symptômes La discussion du diagnostic constitue le premier pan de la prise en charge de la dépression. Une base fondamentale du traitement de la dépression est l’attitude thérapeutique du soignant, permettant au patient dépressif de mieux comprendre la nature de ses symptômes. La possibilité de communication et de rencontrer une résonance chez l’interlocuteur est une première expérience capitale et bénéfique pour le dépressif, qui fait souvent déjà l’expérience de l’isolement lié à la honte, à la culpabilité (isolement tant par rapport aux proches que par rapport au suivi médical) [102]. La prise en charge de la dépression doit s’intégrer dans une dimension globale, tant en ce qui concerne l’état psychologique que l’état somatique associé. Ainsi, il faut tenir compte des problèmes associés à la personnalité du patient (comment a-t-il élaboré sa maladie, comment vit-il avec elle ?), de son contexte social du moment (sur quelles ressources psychosociales peut-il compter dans sa famille et son milieu professionnel ?) et de ses comorbidités (douleur, fatigue, nausées, troubles sexuels) [67]. Les problèmes doivent être envisagés de la manière la plus ouverte et objective possible. Il est utile d’explorer systématiquement la survenue et surtout la récurrence d’idées suicidaires [120]. Il paraı̂t donc indispensable de prendre en charge l’ensemble des symptômes. On ne peut pas traiter la dépression chez un patient douloureux non pris en charge [87]. De plus, il semble que réduire la prise en charge de la dépression à la prise d’un médicament est un réel écueil. La dépression s’inscrit dans un processus évolutif d’adaptation permanente, et la prise en charge pharmacologique ne représente qu’une partie de la stratégie biopsychosociale à mettre en place. Il est nécessaire et bénéfique d’impliquer le patient à tous les temps de cette prise en charge [141]. Une fois le diagnostic posé, il est capital de ne pas oublier l’étape la plus importante : l’information et l’éducation du patient. Mais l’ensemble de cette information ne va pas pouvoir être délivré en un temps, un lieu et par une seule personne. Le plus souvent, ce diagnostic sera posé par le médecin traitant, l’oncologue référent, et c’est l’ensemble des intervenants médicaux (dont le psychiatre de liaison) et paramédicaux (psychologues, infirmières à domicile, et autres) qui vont se relayer pour répondre aux interrogations des patients. Comme pour la douleur, la prise en charge de la dépression, doit s’inscrire dans un projet de soin global et dans ce contexte la notion de pluridisciplinarité prend toute sa dimension [59]. Un dialogue autour des attentes respectives de la patiente et du médecin Il est important de ne pas négliger la spécificité de la pathologie dépressive en cancérologie, ses facteurs de risque, et l’objectif principal de sa prise en charge qui est : l’amélioration de la qualité de vie. Avant de décliner les possibilités thérapeutiques, il semble nécessaire de préciser les contraintes et attentes du patient et de son médecin dans la prise en charge de la dépression. La relation thérapeutique s’initie au cours d’un colloque singulier, et au cours des différentes rencontres avec le patient, il est important de garder à l’esprit ses attentes et de lui expliquer les modalités de la prise en charge. Par exemple, lors de la mise en place d’un traitement antidépresseur, l’attente première du patient sera de pouvoir bénéficier de l’effet antidépresseur, alors que pour les soignants, ce sera de disposer d’un traitement présentant le minimum de toxicité. Mais l’objectif principal de la prise en charge de la dépression reste, aussi bien pour l’équipe soignante que pour le patient, l’optimisation du traitement du cancer. Du fait de ce décalage entre attentes du patient et attentes du médecin, il semble fondamental que le dialogue patient–médecin tienne compte de ces écarts et permette de les clarifier. La qualité du dialogue à cet égard sera essentielle pour orienter la patiente si nécessaire vers un psychologue ou un psychiatre. Clusters « dépression/autres symptômes » La grande variabilité clinique possible impose une évaluation rigoureuse des cibles potentielles du traitement. En effet, les thérapeutiques doivent autant que possible agir sur l’ensemble des symptômes présentés par le patient : on traite un patient qui ressent des symptômes dépressifs dans un contexte spécifique. Le terme cluster fait référence à la notion d’ensemble, de paquet, de groupe ou de compartiment. Il correspond également à un agrégat spatiotemporel de symptômes. La tendance actuelle consiste à identifier et traiter non pas chaque symptôme de façon indépendante (exemple : dépression, douleur, fatigue) mais des clusters type dépression–douleur–fatigue [96] ou dépression–nausées–bouffées de chaleur [64,97] (niveau de preuve 4, grade C). Il n’existe pas d’étude examinant des modalités de prise en charge combinée de ces clusters [55]. Dans ces contextes de comorbidités, une collaboration pluridisciplinaire (collaborative care) permet une prise en charge plus efficiente de ces symptômes [152] (niveau de preuve 2, grade B). Les différentes cibles du traitement peuvent être les suivantes : – symptômes dépressifs [51,53] : La prise en charge de la dépression en cancérologie peut ainsi faire appel à différents traitements, médicamenteux ou non. Traitements médicamenteux – Antidépresseurs : choix en fonction des comorbidités présentes et du profil des effets indésirables ; – benzodiazépines et apparentés ; – psychostimulants. Traitements non médicamenteux – Éducation/counselling ; humeur, fonctions cognitives ; – psychothérapie ; appétit, sommeil, sexualité. – soutien ; – Idées suicidaires [1] ; – autres symptômes associés : douleur, fatigue, nausées, syndrome climatérique [77,83,105,116] ; – qualité de vie ; – observance : explication du traitement, des effets indésirables, des adaptations secondaires [28,42] ; – capacités d’adaptation [119] ; – partenaire, entourage (avec comportement des proches oscillant entre le harcèlement impatient et le ménagement excessif) ; – système immunitaire et neuroendocrinien [144]. Augmenter la survie ne représente pas une cible de la prise en charge de la dépression. Déterminer sur quel cluster de symptômes on cherche à agir permet d’orienter le traitement, par les choix des différentes molécules utilisées comme par l’orientation psychothérapeutique ou les prises en charge complémentaires associées. Aucun algorithme d’aide à la prescription des oncologues n’a fait ses preuves, mais la personnalisation de la prescription selon le type de symptomatologie présentée par le patient est apparue possible [116]. Dans tous les cas, une bonne collaboration oncologue–psychiatre–psychologue doit être structurée dans cette double prise en compte des difficultés diagnostiques et du caractère bénéfique d’une association psychothérapie–traitement pharmacologique. Une des spécificités de la dépression en oncologie est la grande fréquence des comorbidités, et il est, de ce fait, important de garder à l’esprit lors du choix de l’antidépresseur, que l’objectif est de traiter un patient et non un symptôme. Cette possibilité d’utiliser un antidépresseur pour agir sur un cluster de symptômes ne doit pas conduire à la prescription d’antidépresseurs pour d’autres symptômes (excepté la douleur neuropathique) comme la fatigue, les difficultés d’adaptation. En effet, une étude conduite par Stockler et al. avait montré l’inefficacité de tels traitements en l’absence d’un état dépressif majeur [150]. – psychodynamique ; – cognitivocomportementale ; – électroconvulsivothérapie/stimulation magnétique transcrânienne répétée : à réserver aux formes résistantes et aux contre-indications absolues des autres traitements. Il est également important de donner des recommandations d’hygiène de vie ; en effet, une consommation régulière et importante d’alcool est un facteur de risque de la dépression, ainsi que l’absence d’activité physique régulière. N’oublions pas la place de la prévention qui doit s’inscrire elle aussi dans la prise en charge de la pathologie cancéreuse. Il est nécessaire et bénéfique d’impliquer le patient à tous les temps de la prise en charge de la dépression [141] (niveau de preuve 4, grade C). Une base fondamentale du traitement de la dépression est l’attitude thérapeutique du soignant, permettant au patient dépressif de mieux comprendre la nature de ses symptômes (accord d’experts). Il est nécessaire d’explorer systématiquement les symptômes associés et en particulier la douleur. La prise en charge de la dépression doit s’inscrire dans un projet de soin global, et dans ce contexte la notion de pluridisciplinarité prend toute sa dimension [59] (accord d’experts). Efficacité des traitements médicamenteux Les recommandations suivantes s’appliquent au traitement des EDM constitués. Ils ne concernent ni les troubles bipolaires, ni la dysthymie, ni les simples épisodes de tristesse passagère dont l’intensité ne suffit pas à porter le diagnostic d’EDM. Par ailleurs, le paragraphe suivant portant sur les traitements médicamenteux concerne uniquement les traitements antidépresseurs et psychostimulants. RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 755 756 ONCOLOG IE Quelle efficacité sur les symptômes dépressifs ? La prescription d’antidépresseurs est courante en cancérologie, notamment en ce qui concerne la classe des inhibiteurs de la recapture de la sérotonine. L’efficacité de ces molécules pour le traitement des épisodes dépressifs majeurs peut être considérée comme établie [46], même si une polémique récente autour des essais négatifs non publiés a insisté sur l’importance de l’effet placebo dans le traitement de ces affections, et l’importance de réaliser les études chez des patients dont le diagnostic d’épisode dépressif est avéré. Le rationnel scientifique spécifique à l’oncologie en est cependant faible. En 2004, la revue de Fisch dénombrait depuis le début des années 1970 seulement 14 études de traitement de la dépression impliquant 1 541 patients, ce qui revient dans l’ensemble à de petits effectifs et des puissances statistiques faibles [53]. Aujourd’hui, on relève en cancérologie 20 études, mais aucune n’a atteint un meilleur niveau de preuve, et peu concernent des patients réellement déprimés, ce qui limite les conclusions que l’on peut en tirer [51]. Cinq études randomisées seulement concernent des patients réellement déprimés : trois contre placebo [31,107,158] et deux comparant deux antidépresseurs entre eux [70, 117]. Deux de ces études concernaient des patientes atteintes de cancer du sein. Dans la première étude [158], l’efficacité de la mianserine était évaluée chez 55 patientes atteintes de cancer du sein et présentant un niveau de symptômes dépressifs pathologiques à l’échelle HDRS. L’efficacité, évaluée en nombre de répondeurs sur cette échelle non spécifique des patients atteints de maladie somatique, était supérieure dans le groupe traité par comparaison au groupe placebo mais de façon faiblement significative (niveau de preuve 2, grade B). Dans la seconde [107] aucune différence significative n’a été mise en évidence entre les groupes traités par desipramine, paroxetine ou placebo ; mais cette étude a fait l’objet de nombre de critiques méthodologiques (taux de sortie d’étude majeur, évaluation par voie postale, etc.) (niveau de preuve 4). La majorité des études évaluent l’impact des antidépresseurs sur une symptomatologie physique ou psychologique plus large, ce qui reflète en partie la difficulté à faire le diagnostic de la dépression en cancérologie et le poids des symptômes physiques de celle-ci. Ainsi, six études ont été réalisées chez des patients sélectionnés sur un niveau de détresse significatif [54,104,121] ; ou un autre symptôme (fatigue) [54,104], ou symptomatologie globale [150]. Les résultats de ces études, s’ils restent limités en termes de puissance statistique, confortent globalement l’efficacité antidépressive des molécules étudiées en mettant en évidence une amélioration des scores des échelles de dépression ou de qualité de vie significativement plus importante dans le groupe traité que dans le groupe placebo (niveau de preuve 2, grade B). Aucune de ces études ne concerne cependant spécifiquement les patientes atteintes de cancer du sein. Cinq études ouvertes confortent cette idée de l’impact potentiel sur d’autres symptômes que les symptômes émotionnels. Ces études concernent soit des patients réellement déprimés [63] (reboxetine), soit des patients ayant une symptomatologie émotionnelle mixte anxieuse et dépressive Theobald et al. [155] (mianserin) ; Theobald et al. [156] (citalopram) ; Torta et al. [157] (sertraline) ; Moss et al. [105] (bupropion) et ont montré selon les molécules un effet sur la dépression, mais également sur le sommeil, l’anxiété, la douleur, les nausées (niveau de preuve 3, grade C). Enfin, trois études ont été réalisées selon un modèle préventif, dont une étude chez des patients recevant de l’interféron, connu pour ses effets dépressogènes [106]. L’une des deux autres concerne des patientes sous chimiothérapie atteintes de cancer du sein et traitées systématiquement par paroxetine [130]. Cette étude monocentrique a évalué l’impact de cette prescription sur les symptômes dépressifs et la fatigue et montre une amélioration significative du score de symptômes dépressifs à la CES-D significativement supérieure au placebo, mais n’a pas permis de mettre en évidence de modification significative de la fatigue (niveau de preuve 2, grade B). Les traitements antidépresseurs sont potentiellement efficaces en cancérologie (niveau de preuve 2, grade B). La réponse symptomatique peut être évaluée sur d’autres paramètres que les symptômes dépressifs. Les antidépresseurs doivent être prescrits après une démarche d’identification soigneuse de la symptomatologie dépressive. Une administration préventive des antidépresseurs n’est pas plus justifiée en cancérologie qu’en pratique courante ; l’existence de facteurs prédictifs doit inciter par contre à une surveillance renforcée (accord d’experts). Iln’existepas nonplusd’élémentdepreuveenfaveur d’une prescription devant un seul symptôme somatique comme la fatigue (niveau de preuve 2, grade B). D’autres études sont nécessaires pour arriver à un niveau de preuve suffisant et devront concerner de plus grands groupes, avec une évaluation large de la symptomatologie évaluant les symptômes psychologiques, mais aussi fonctionnels et l’état cognitif. Une évaluation d’impact pourrait également inclure l’état des proches et l’adhésion aux traitements du cancer [51]. La meilleure compréhension du rationnel de la pathogenèse de la dépression en cancérologie imposerait également d’assortir ce type d’études d’une évaluation de la fonction immunitaire. Tolérance et risques des traitements antidépresseurs en cancérologie Taux d’arrêt Lorsque les études publiées rapportent le suivi des effets indésirables des traitements, en particulier dans les études versus placebo, ces taux restent identiques statistiquement des effets indésirables sous placebo [158]. Les taux d’arrêt dans les études en insu sont le plus souvent entre 15 et 30 %, et supérieurs dans le groupe placebo (arrêt pour inefficacité) (niveau de preuve 2, grade B). Effets indésirables La tolérance des antidépresseurs est variable selon les molécules considérées. Celle des antidépresseurs tricycliques est souvent médiocre, avec des effets indésirables qui en ont limité peu à peu la prescription notamment chez ces patients (hypotension orthostatique, prise de poids, sédation, troubles du rythme cardiaque, confusion, épilepsie, surdosages potentiellement mortels). La toxicité des inhibiteurs de la recapture de la sérotonine est plus banale et souvent limitée à des troubles spontanément résolutifs (céphalées, troubles gastro-intestinaux, troubles sexuels, etc.). Une augmentation de l’anxiété est également possible avec toutes les molécules. Des élévations tensionnelles ont été signalées avec la venlafaxine et la duloxetine. La mirtazapine et la mianserine sont fréquemment responsables de prise de poids et de somnolence, ces deux effets pouvant être mal acceptés par des patientes en fin de traitement déjà exposées à une prise de poids par d’autres mécanismes (accord d’experts). Syndrome sérotoninergique Le risque de syndrome sérotoninergique est également fréquemment cité. Il s’agit d’une stimulation sérotoninergique excessive qui se traduit par une incapacité à rester en repos, une hyperréflexie, des tremblements, des myoclonies, un dysfonctionnement du système nerveux autonome, et à l’extrême des crises comitiales, coma, décès. Ces effets sont non liés à un effet idiopathique, mais à une interaction entre molécules de même mécanisme, ou à un surdosage [13]. Il est extrêmement difficile d’en préciser la fréquence, les formes mineures n’étant probablement ni reconnues ni encore moins signalées [13]. Risque suicidaire sous antidépresseurs Ce risque est difficile à évaluer puisque l’existence d’idées suicidaires fait partie des symptômes dépressifs, et donc des raisons pour lesquelles est prescrit un traitement dont l’efficacité est par ailleurs retardée d’au moins plusieurs jours. La revue de Möller [100] conclut à un risque mineur, qui diminue de plus au-delà de l’âge de 30 ans (niveau de preuve 2, grade B). En pratique, il n’existe pas de limitation de prescription chez les patients présentant des idées suicidaires ; mais ceux-ci doivent toujours faire l’objet d’une attention renforcée, notamment durant les premiers jours du traitement. Les prescriptions médicamenteuses doivent le cas échéant être de courte durée, et fréquemment réévaluées. Le risque de passage à l’acte suicidaire (cf. infra) est l’un des motifs principaux d’hospitalisation des patients déprimés, quelle que soit leur prise en charge médicamenteuse. En tout état de cause, on préférera une molécule peu stimulante (IRS pur) que l’on ne prescrira que pour une durée brève (une semaine). Cancérogenèse Plusieurs études ont été consacrées à une hypothétique cancérogenèse induite par les antidépresseurs soit en cancérologie générale par un effet génotoxique [153], soit en cancérologie du sein par un effet stimulant de ces molécules sur la sécrétion de prolactine [22,29,57]. La revue de littérature de Coogan [30] inclut 12 études cas-témoins et six études de cohortes et associe divers types de recueil d’information (entretiens auprès des patients et bases de données médicales). Elle conclut à l’absence de lien épidémiologique entre prescription d’antidépresseurs tant de type SSRI que tricycliques et induction de cancers, les doutes sur certains sous-types de médicaments ou certains sous-groupes de patientes n’ayant pas été répliqués sur les plus grandes études (niveau de preuve 2). Une vigilance est cependant suggérée lors de l’utilisation prolongée (plus de dix ans) de SSRI, le recul de mise sur le marché n’ayant pas encore permis d’étudier ce risque au long cours (niveau de preuve 1, grade A). Réalisation de la prescription initiale Il n’est pas indispensable que la prescription initiale soit réalisée par un psychiatre, notamment, si on tient compte de l’absence de psychiatres en nombre suffisant pour assurer la prise en charge de l’ensemble des patients déprimés, et des réticences de certains d’entre eux à consulter un spécialiste de santé mentale (accord d’experts). Certains auteurs considèrent que cette prescription initiale par un psychiatre serait néanmoins utile pour améliorer le diagnostic et inscrire la prescription dans une alliance thérapeutique éventuellement assortie d’une mobilisation psychothérapeutique plutôt que l’ajout d’une simple prescription acceptée sur un mode passif [114]. On peut également recommander, s’il est possible, l’avis psychiatrique d’emblée pour les patients présentant une schizophrénie, un trouble uniou bipolaire de l’humeur (maladie maniacodépressive), un trouble grave de la personnalité, des idées suicidaires (accord d’experts). Comment accompagner le traitement ? L’information sur le diagnostic de dépression, la nature du médicament antidépresseur prescrit, la survenue de possibles effets indésirables est capitale afin d’éviter un arrêt prématuré ou une mauvaise observance. On préviendra également le patient du délai d’action sur l’humeur dépressive de 15 jours à trois semaines, mais de l’effet anxiolytique et favorable sur le sommeil susceptible de survenir dès les premiers jours. Enfin, on l’informera de la durée minimale du traitement de six mois (accord d’experts). La précocité de l’effet anxiolytique et hypnotique des IRS survient suffisamment rapidement pour qu’une RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 757 ONCOLOG IE 758 prescription associée d’anxiolytique ou d’hypnotique ne soit pas systématique (le cas échéant, il faudra la limiter aux premiers jours de traitement si nécessaire) [accord d’experts]. Il est important que le patient soit revu entre une et deux semaines après cette première consultation, pour s’assurer de la bonne tolérance et de la bonne observance. En cas de non-efficacité après trois semaines de traitement à dose thérapeutique : – s’assurer de la bonne observance du traitement ; – majorer la posologie de l’antidépresseur en s’assurant de la bonne tolérance et de l’absence d’effets indésirables ; – si après deux à trois semaines supplémentaires le traitement demeure inefficace changer de classe (accord d’experts). L’arrêt du traitement sera décidé en accord avec le patient après une durée minimale de six mois, si on peut considérer la rémission psychologique comme complète et si possible à l’écart d’une période de stress majeur. La simple persistance d’une tristesse adaptée dans une situation de difficultés médicales stables ne doit pas faire prolonger indéfiniment un traitement, qui a pour but de traiter la dépression et non d’empêcher une réaction émotionnelle simple. L’arrêt sera progressif sur quelques jours pour éviter les syndromes de sevrage possibles, qui surviennent immédiatement à l’arrêt et ne doivent pas être confondus avec une rechute dépressive, de survenue plus tardive (plutôt quelques semaines ou quelques mois). [70, 107,117] (niveau de preuve 4, grade C). En première intention, il n’y a pas lieu d’associer deux antidépresseurs. Le choix d’un antidépresseur est conditionné par des facteurs individuels et liés au patient : les effets indésirables du médicament, la tolérance (qui inclut les effets indésirables potentiels avec d’autres médicaments reçus ou prévisibles), la réponse à un traitement antérieur, et les préférences du patient [128]. On peut proposer les repères suivants (d’après Vidal 2007). Insuffisance rénale ou hépatique On considère qu’il n’y a pas de contre-indication aux antidépresseurs en cas d’insuffisance rénale ou hépatique modérée, mais qu’un début de traitement à demidose est recommandé. En cas d’insuffisance hépatique sévère, la prescription de tianeptine (stablon) et d’ixel (minalcipran) reste possible. Risque cardiaque Les tricycliques sont à éviter, qui peuvent donner des troubles de la conduction. S’ils sont indispensables, l’avis spécialisé et l’ECG sont nécessaires. En cas de trouble cardiaque sévère, on choisira de préférence la mianserine. Les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine sont également utilisables, sachant que de rares modifications du rythme cardiaque ont été décrites avec ces derniers mais sans trouble de la conduction. Quand proposer une hospitalisation ? Celle-ci peut être justifiée dans les situations suivantes (accord d’experts) : – risque suicidaire ; – refus de soins, si s’installe une dépression sévère de type mélancolique, éventuellement délirante ; Adénome prostatique Les tricycliques sont contre-indiqués. Le minalcipran et la mirtazapine doivent être utilisés avec prudence. Les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine sont autorisés, mais des troubles de la miction ont été signalés. – agitation ou anxiété extrême ; – trouble psychotique. L’hospitalisation est d’autant plus nécessaire qu’il existe une carence de soins et de surveillance extrahospitalière (isolement ou indifférence sociale et familiale). En attendant l’évaluation psychiatrique, on organisera une surveillance renforcée du patient en informant, autant que la déontologie le permet, la famille. Une présence renforcée auprès du patient est en effet un élément important de prévention du risque de passage à l’acte. Glaucome à angle fermé Les tricycliques sont contre-indiqués. Éviter certains inhibiteurs de la recapture de la sérotonine comme la paroxetine, la venlafaxine, le Cymbalta qui peuvent majorer les troubles. Prescription sans danger de mianserine. Hyponatrémie (patient dénutri, hypovolémique, etc.) Si celle-ci n’est pas possible, une hospitalisation sous contrainte peut être justifiée. On sera très vigilant en cas de prescription d’inhibiteurs de la recapture de la sérotonine, sachant que la fréquence des hyponatrémies augmente avec l’âge du patient et les coprescriptions médicamenteuses. Quel produit choisir ? Risque hémorragique Il n’existe pas d’élément en faveur de la supériorité d’efficacité d’un antidépresseur par rapport à un autre Indépendamment des problèmes d’interactions médicamenteuses entre certains antidépresseurs et les anticoagulants oraux, des syndromes hémorragiques ont été décrits sous inhibiteurs de la recapture de la sérotonine. Le plus souvent banaux (ecchymoses), ils peuvent être sévères. Leur mécanisme est mal connu et intéresserait la voie plaquettaire. Ils peuvent donc se voir en l’absence d’anomalies des paramètres biologiques de la coagulation. Comitialité (épilepsie connue, métastases cérébrales, sans traitement anticomitial) Aujourd’hui, l’antidépresseur de première intention en cancérologie est un ISRS (inhibiteur spécifique de la recapture de la sérotonine) [accord d’experts]. S’ils sont correctement prescrits, les antidépresseurs en cancérologie sont bien tolérés (accord d’experts). Les antidépresseurs n’augmentent pas le risque de cancer du sein (niveau de preuve A, grade 1). Le choix de la molécule se base sur la prise en compte du profil d’action et de tolérance (effets indésirables) [accord d’experts]. L’abaissement du seuil épileptogène est décrit avec l’ensemble des antidépresseurs, sauf la tianeptine, que l’on choisira en première intention dans ce cas. Cependant, ce risque est peu important cliniquement, surtout si le patient est sous traitement anticomitial (se méfier dans ce cas des interactions éventuelles, cf. infra). Ce choix intègre également le risque d’interactions médicamenteuses en fonction des traitements associés et des comorbidités : risque cardiaque, hyponatrémie, anticoagulants, comitialité, glaucome, etc. (accord d’experts). Syndrome parkinsonien Afssaps 2008 : pas de prescription de fluoxetine ou paroxetine si tamoxifène. L’aggravation d’un syndrome parkinsonien préexistant est possible avec tous les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (surtout avec la paroxetine), même s’il s’agit d’un effet rare. L’apparition de symptômes extrapyramidaux est également possible, même en l’absence de pathologie antérieure. Troubles du sommeil importants Préférer un produit sédatif : mianserine, mirtazapine. Risque de prise de poids (possible avec tous les antidépresseurs) Préférer la fluoxétine. Difficultés avec la voie orale Certains produits existent sous forme buvable (ex. : paroxetine, fluoxétine, citalopram) ou intraveineuse (certains tricycliques, citalopram). Risques d’interactions médicamenteuses Les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine sont des substrats du Cyt p450 et peuvent s’accumuler chez les métaboliseurs lents ou en cas d’inhibition de celui-ci. Les IRS sont aussi des inhibiteurs du Cytp 450, de façon variable suivant les molécules (sur des isoenzymes différents). Le risque d’interaction est donc présent. Il est dû autant à l’accumulation du substrat qu’à son inefficacité s’il est sous forme de prodrogue inactive. L’important est de connaı̂tre la possibilité d’interaction et d’être vigilant. Chez les patientes atteintes de cancer du sein, une interaction doit être connue : celle existant entre le tamoxifène et les molécules potentiellement inhibitrices du CYP2D6. En raison d’un risque de diminution des taux de tamoxifène et de son métabolite l’endotoxifene, la paroxétine et la fluoxetine sont ainsi contre-indiquées (recommandations de l’Afssaps 2008). L’hospitalisation peut se discuter, en cas de vulnérabilité somatique ou de risque suicidaire essentiellement, ou encore si la dépression comporte des caractéristiques psychotiques (accord d’experts). Cas particulier : utilisation des psychostimulants amphétaminiques L’utilisation des psychostimulants comme antidépresseur reste controversée [82,135]. Pourtant, certains auteurs [7] (niveau de preuve 3, grade C) suggèrent que les patients âgés apathiques présentant un état de retrait et les sujets souffrant de dépression secondaire à une maladie organique représentent deux indications privilégiées pour une prescription d’amphétamines (niveau de preuve 3, grade C). Les psychostimulants de type amphétamine, représentés par le méthylphénidate, pourraient ainsi représenter une alternative à la prescription des antidépresseurs soit de manière isolée, soit en association pour le traitement des troubles de l’humeur des patients présentant une affection organique en général et néoplasique à un stade évolué en particulier [71,132] (niveau de preuve 3, grade C), [143] (niveau de preuve 2, grade B). Leur délai d’action rapide (estimé entre 24 à 72 heures) et leur faible fréquence de survenue d’effets indésirables liée à leur prescription représentent des propriétés intéressantes dans la prise en charge pharmacologique des troubles de l’humeur des patients cancéreux, notamment par rapport au délai d’action classique de deux à trois semaines des antidépresseurs tricycliques ou sérotoninergiques. Les posologies usuelles sont comprises entre 10 à 20 mg/j en débutant par de faibles posologies comprises entre 5 à 10 mg/j à huit heures du matin, puis en répartissant les doses le matin et le midi. Dans le domaine de la cancérologie, des études pilotes quoique portant sur de petits échantillons et quelques études randomisées concernant l’utilisation plus particulièrement du méthylphénidate [71] (niveau de preuve 2, grade B), [111] (niveau de preuve 4, grade C), RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 759 ONCOLOG IE 760 commencent à apporter la preuve de son innocuité, de son intérêt et de son efficacité chez les patients atteints de cancer [143] (niveau de preuve 2, grade B), en particulier sur les symptômes associés tels que la fatigue [65] (niveau de preuve 2, grade B). Le méthylphénidate pourrait aussi être utilisé dans les dépressions observées dans les phases terminales de la maladie cancéreuse [90] (niveau de preuve 4, grade C). Cet auteur obtient une réponse thérapeutique, au sein de son échantillon de 26 patients, dans 46 % des cas, avec une réponse significative dans 7 % des cas parmi ceux qui décèdent dans les six semaines suivant l’introduction de ce traitement (niveau de preuve 4, grade C). Ainsi, les amphétamines apparaissent être un traitement de seconde intention dans la prise en charge pharmacologique des troubles de l’humeur au sein de cette population. Ces molécules pourraient constituer une alternative en cas de résistance ou d’intolérance au traitement antidépresseur classique (tricyclique et/ou SSRI) [125]. Pour certains auteurs [92], plus de 80 % des patients dépressifs ayant un cancer répondraient favorablement au méthylphénidate avec moins de 20 % de survenue d’effets indésirables (niveau de preuve 2, grade B). Le méthylphénidate s’avère également une stratégie pharmacologique de recours chez un patient partiellement répondeur à un seul antidépresseur. En effet, l’adjonction du méthylphénidate à un antidépresseur déjà introduit, va potentialiser et booster l’effet antidépressif de l’antidépresseur comme les ISRS [151] (niveau de preuve 4, grade C). L’association méthylphénidate/antidépresseur a été utilisée avec succès en couplant au méthylphénidate, un ISRS [151] (niveau de preuve 4, grade C). Les amphétamines et leurs dérivés inhibent le métabolisme hépatique des antidépresseurs tricycliques en agissant au niveau de l’hydroxylation des microsomes hépatiques. Cela a pour conséquence d’augmenter les taux plasmatiques de l’antidépresseur et parfois de potentialiser son activité. Il importe donc d’ajuster les doses de l’antidépresseur tricyclique et d’utiliser le plus souvent de faibles doses (25 à 50 mg par jour). Une étude rapporte l’utilisation de cette association chez dix personnes âgées (cinq hommes, cinq femmes) présentant un état dépressif majeur résistant aux tricycliques seuls. Sept d’entre eux ont vu leur état thymique s’améliorer significativement [108] (niveau de preuve 4, grade C). Certains auteurs [115] (accord d’experts) recommandent d’ajouter un tricyclique quelques jours après le début d’un traitement par amphétamines dans le contexte de douleurs cancéreuses associées à une dépression. Cela permettrait de prolonger et de potentialiser l’efficacité du psychostimulant. L’utilisation en première intention des antidépresseurs ISRS ayant supplanté les tricycliques, une étude récente en double insu confirme l’action potentialisatrice du méthylphénidate sur la réponse antidépressive d’un sérotoninergique tel que le citalopram, plus particulièrement chez les personnes âgées présentant souvent une résistance au seul traitement antidépresseur [84] (niveau de preuve 2, grade B). Mentionnons un autre psychostimulant non amphétaminique, le modafinil, utilisé dans certaines maladies neurologiques telles que la narcolepsie qui pourrait à l’avenir « concurrencer » le méthylphénidate avec des indications similaires de prescription pour une meilleure tolérance. Des études randomisées doivent encore être réalisées pour valider son utilisation. In fine, au regard des échantillons de faible amplitude, il est, à l’heure actuelle, encore difficile de tirer des conclusions définitives sur l’intérêt de l’utilisation du méthylphénidate. Tout au plus, les études tendraient à montrer le bien-fondé de leur prescription pour gérer certains symptômes comme la fatigue, la somnolence induite par les opiacés, l’humeur dépressive, et ce, dans certaines situations spécifiques telles que les cancers en phase avancée ou en phase terminale. Leur possible impact sur l’amélioration de la qualité de vie de ces patients pourrait augmenter l’arsenal thérapeutique de la médecine palliative [90]. En France, ces molécules restent cependant d’utilisation complexe avec une délivrance très réglementée (prescription initiale par un psychiatre ou un neurologue), car en 2009, elles n’ont toujours pas reçu l’AMM pour être prescrites comme antidépresseur. La prescription de psychostimulants (méthylphénidate, modafinil) reste aujourd’hui hors AMM dans la dépression, et doit être assumée par un spécialiste. Les psychostimulants seraient un traitement de seconde intention dans la prise en charge pharmacologique des troubles de l’humeur chez les patientes atteintes d’un cancer du sein (niveau de preuve 2, grade B). Les amphétamines telles que le méthylphénidate représentent un traitement de recours dans la prise en charge pharmacologique des troubles de l’humeur chez les patientes atteints de cancer en phase avancée, surtout si la fatigue y est associée (niveau de preuve 2, grade B). Ces molécules peuvent constituer une alternative à l’emploi des antidépresseurs pour traiter la dépression en phase terminale (niveau de preuve 4, grade C). Psychothérapies Une évaluation difficile En psycho-oncologie et en pathologie mammaire, tout comme en psychiatrie et en psychologie médicale, la question de l’évaluation des psychothérapies et des interventions psychosociales reste un sujet délicat. La disparité des entités diagnostiques étudiées, des approches et des objectifs thérapeutiques, la formation et l’expérience des thérapeutes et la multiplicité des échelles d’évaluation, ainsi que la diversité des moments étudiés au fil du parcours de soins, complexifient l’analyse et relativisent des résultats [11,81,149]. Rares sont les essais cliniques randomisés bien conduits et reproductibles. L’évaluation des prises en charge psychothérapeutiques dépend par ailleurs de la pathologie présentée par les patients traités (détresse émotionnelle, symptômes ou syndromes dépressifs, anxieux ou mixtes, etc.). La prise en charge des épisodes dépressifs majeurs par la seule psychothérapie n’étant pas recommandée, aucun essai publié chez des patientes atteintes de cancer du sein ne concerne spécifiquement des patientes présentant un EDM. Les résultats ci-après, études ou méta-analyses, impliquent des patientes prises en charge pour des états psychologiques très divers, allant de la proposition systématique à la sélection sur un niveau de détresse émotionnelle élevé. Les revues de littérature concluent donc prudemment sur les effets des interventions psychosociales, en termes d’ajustement émotionnel, de peur et d’anxiété, de dépression, de déni ou de répression des affects, etc. [11,131]. Si le bilan de ces études est globalement positif [6,33,74,91,112], il est cependant pondéré par l’analyse de différents problèmes méthodologiques qui en amenuisent les conclusions : fréquence des petits échantillons ; absence d’informations sur le contenu précis des thérapies ou sur la formation du thérapeute ; absence de description des procédures d’échantillonnage, recours à des outils d’évaluation standardisés et spécifiques de la dépression dans le contexte du cancer. De nombreuses pistes sont proposées en vue d’améliorer la qualité des études dans ce domaine de recherche [74,75]. Approches psychothérapiques individuelles pour des patientes atteintes d’un cancer du sein L’évaluation des thérapies individuelles est, d’une manière générale, rarement réalisée, tant il est vrai que les items pertinents sont difficiles à sélectionner, rendant la méthodologie trop hasardeuse. L’acte psychothérapique reste singulier, difficilement reproductible à l’identique, de par la formation et l’expérience du thérapeute, d’une part, l’alliance thérapeutique (transfert), qui s’établit avec le patient d’autre part. Les seules études que l’on pourrait signaler concernent des thérapies cognitivocomportementales : cellesci sont plus facilement reproductibles, car elles reposent sur des techniques standardisées , directement applicables et évaluables avec des outils simples et validés [72,112]. Trois méta-analyses ont été consacrées à l’évaluation de l’efficacité des thérapies cognitivocomportementales dans le traitement des symptômes dépressifs, chez des femmes atteintes de cancer du sein : – celles de Meyer et Mark [95] et Devine et Westlake [41] (niveau de preuve 2) ; – celle de Savard et al., ciblée sur des femmes atteintes d’un cancer du sein métastasé (trois sessions de thérapie cogniticocomportementale administrée à trois semaines d’intervalle suivant la fin du traitement [136] (niveau 3). D’autres méta-analyses se sont focalisées sur d’autres objectifs que la dépression : – celle de Rehse et al. en 2003, menée sur 37 études contrôlées, montre l’amélioration de la qualité de vie de patients atteints de cancer, suite à leur participation à une prise en charge thérapeutique de type cognitivocomportementale [124]. Fait intéressant, c’est la durée de cette thérapie (supérieure à 12 semaines) qui apparaı̂t avoir été la variable modératrice la plus importante ; – la méta-analyse de Tatrow et al., en 2006, évalue la détresse et la douleur chez des femmes atteintes d’un cancer du sein et traitées par des techniques de thérapies cognitivocomportementales [154]. Les principaux résultats mentionnent que 62 à 69 % des patients atteintes ayant suivi, en groupe, des techniques de TCC auraient moins de détresse et moins de douleur que celles des groupes témoins ; que les techniques individuelles seraient plus efficaces que celles de groupe pour la détresse mais pas pour la douleur et que, enfin, la gravité du cancer n’influencerait pas les résultats (niveau de preuve 2). Soulignons le fait que ces travaux sont majoritairement le reflet de l’expérience des pays anglo-saxons, telle la méta-analyse de Meyer qui recense 45 études randomisées dont seules deux ont été menées en Europe. L’efficacité des interventions de groupe en culture française reste donc incertaine. En France par ailleurs, les thérapies cognitivocomportementales sont bien moins développées que dans les pays anglo-saxons ; les psychothérapeutes, notamment en psycho-oncologie, se réfèrent plus fréquemment à une approche plus psychodynamique, phénoménologique et/ou psychanalytique beaucoup moins facilement quantifiable, mais pas forcément moins efficace. Approches psychothérapiques groupales pour des patientes atteintes d’un cancer du sein L’intérêt majeur des groupes de malades réside dans la facilitation à établir des liens, pour rompre l’isolement et échanger des informations et des expériences. Le cadre et le fonctionnement des groupes psychothérapeutiques sont très variables : – leurs objectifs principaux peuvent différer : évaluation de la survie, de la qualité de vie ; diminution de la détresse émotionnelle ; – leurs références théoriques sont diverses : thérapies comportementales ou cognitives ; approche existentielle et phénoménologique, psychanalyse ; – l’évaluation des groupes psychothérapiques est donc, comme celle des prises en charge individuelles, liée au type de technique utilisé ; elle dépend par ailleurs de la psychopathologie présentée par les patients traités (détresse émotionnelle, symptômes ou syndromes dépressifs, etc.) ainsi que des cibles choisies pour l’évaluation (paramètres psychologiques ou médicaux). RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 761 762 ONCOLOG IE Un impact sur la survie ? À la fin des années 1980, une étude randomisée [145] avait montré un doublement de la survie (36,6 mois/ 18,9 mois) chez des femmes atteintes d’un cancer du sein métastatique ayant participé, pendant un an, à un groupe hebdomadaire de type existentiel, soutien et expression des émotions. Ces résultats avaient eu un grand retentissement, malgré des biais méthodologiques soulignés plus tard [56], notamment au niveau du bras contrôle et du suivi des abandons. Cunningham et al. [35] avaient ensuite alimenté la controverse avec les résultats d’un essai randomisé, qui ne confirmaient pas ceux de Spiegel et al. Par la suite, trois réplications rigoureuses de l’étude de Spiegel et al. menées au Canada par Goodwin et al. [60], en Australie, par Kissane et al. [81] et aux États-Unis par Spiegel et al. [147] n’ont pas confirmé cette espérance en termes de survie, amenant chacune de ces études à se recentrer sur des évaluations autour de l’anxiété, de la dépression, de la détresse émotionnelle et de la qualité de vie (niveau de preuve 2). Bien que de petite taille, un essai récent [5] semblerait rouvrir cette controverse en montrant un effet très significatif sur l’allongement de la survie de la participation de patientes à une prise en charge psychothérapeutique dès le début du traitement de leur cancer. Mais cette prise en charge dite psychothérapeutique incluait un important volet éducationnel, et l’analyse ne permet pas néanmoins de conclure à quelle composante de la prise en charge est lié cet impact médical. Impact sur l’état psychologique Une revue de littérature [140] (niveau de preuve 3), bien qu’analysant en parallèle prises en charge individuelles et collectives, avait permis de souligner des effets plus favorables sur l’anxiété que sur la dépression ; effets néanmoins amenuisés si l’on ne retenait que des essais randomisés de bonne qualité, avec des effectifs supérieurs à 40 patients. L’étude de Goodwin et al. [60] montre, avec une évaluation par le Profile of Mood States (POMS), une diminution significative des perturbations générales de l’humeur, dont la tension–anxiété et la dépression–découragement, chez les femmes ayant participé, pendant un an, au groupe hebdomadaire type soutien expression des émotions (niveau de preuve 2). Kissane et al. [81] ont démontré, dans leur étude randomisée saluée comme de très bon niveau par Coyne et al. [33], que les femmes après six mois de participation au groupe thérapeutique se trouvaient significativement améliorées en termes de dépression (regroupant différentes entités : dépression majeure, dysthymie, troubles mixtes anxieux et dépressifs) comparativement aux groupes témoins ; le suivi ultérieur à 12, 18 et 24 mois ne montrerait pas de différences significatives, mais tout de même le maintien de la tendance (niveau de preuve 2). Pour Goodwin et al. [60] et pour Blake Mortimer et al. [10], les malades initialement les plus déprimées seraient celles qui profiteraient le plus des effets thérapeutiques du groupe (niveau de preuve 2). La tendance actuelle consisterait ainsi à recentrer la proposition d’actions psychothérapeutiques sur des patients sélectionnés sur un niveau de détresse significative. Quelle prise en charge pour quelles patientes ? Une réflexion et des études ont été engagées depuis une vingtaine d’années pour définir le type de groupe (psychoéducationnel, reposant sur une approche cognitive et/ou comportementale ou bien soutien–expression des émotions, d’allure existentielle), sa durée, en fonction de la population de malades à qui il s’adresserait de manière optimum. Si la participation à un groupe vise à partager des expériences focalisées sur le cancer et ses traitements et à se confronter à l’altérité (la différence de site tumoral n’est pas un obstacle, au contraire !), la clinique quotidienne nous montre que les malades en cours d’un traitement adjuvant ou en rémission n’ont pas les mêmes attentes et préoccupations que des patientes porteuses de métastases. Les premières, souvent plus en quête d’informations médicales et pratiques (effets indésirables des traitements, reconstruction mammaire, reprise du travail, etc.), redoutent et supportent difficilement d’être confrontées à des personnes en situation de récidive, comme cela peut arriver fortuitement dans la vie courante ou à l’hôpital ; les secondes, très assidues, peuvent aborder au sein du groupe des questions existentielles, parfois sur un mode assez cru, qui pourraient se révéler insupportables à des personnes étrangères à la situation et/ou tenant à maintenir un certain degré de déni ou de relégation. Après les études princeps de Spiegel et al. [145] et Fawzy et al. [52] et dans les années 1980, puis de Cunningham et al. [35] dans les années 1990, un consensus, rappelé au SOMPS 1997 [133], s’établissait pour proposer des séances d’information et de communication au stade initial de la maladie et au début des traitements, et réserver les groupes de soutien et d’expression aux malades en évolution métastatique (accord d’experts). Une revue critique de la littérature de Edelman et al. [44] tentera de comparer l’efficacité relative de chacune de ces deux approches auprès de différentes populations de malades atteints de cancers. Elle conclura à une supériorité relative des interventions psychoéducationnelles, en termes d’objectifs psychologiques mesurables, et elle concèdera un bénéfice supérieur apporté par les groupes de soutien et d’expression pour certaines catégories de malades, telles les patientes atteintes de cancer du sein métastatique (niveau de preuve 3). L’effet paraı̂t également dépendre du moment auquel ces psychothérapies sont proposées : un essai randomisé multicentrique [27], conclura à l’inefficacité d’un programme de 12 semaines, sur un mode soutien et expression des émotions, pour faire diminuer la détresse psychologique de femmes récemment prises en charge pour un cancer du sein non métastatique ; même les patientes repérées comme les plus en détresse n’apparaissaient pas avoir été améliorées. Se posait alors la question du mode d’intervention à ce stade initial de la maladie, où il y aurait peut-être plus une attente d’information et de pragmatisme que de véritables préoccupations existentielles ? Une seconde explication pourrait être liée à la brièveté de l’intervention, incompatible avec ce type d’approche existentielle ? Enfin, il faudrait s’interroger sur l’expérience de thérapeutes de niveau différent. recherche clinique efficace, on peut comprendre à quel point la mise en place et la tenue de groupes de patients reste difficile dans une pratique de routine, à l’hôpital ou à l’extérieur ; la fréquentation des malades est directement liée au crédit et au soutien qu’apportent les médecins oncologues au dispositif [89] (niveau de preuve 4). Quelles limites pour l’évaluation ? Concernant l’indication à un groupe, il est préférable de surseoir à l’intégration dans un groupe d’une patiente présentant une anxiété généralisée et se montrant alors trop vulnérable sur le plan émotionnel (perméabilité à la problématique des autres, sur un mode d’identification labile). Un soutien psycho-oncologique individuel devrait alors être proposé (accord d’experts). Cunningham et al. [35] poseront la question de la limite des essais randomisés, reposant sur des évaluations psychométriques standardisées, qui ne permettent pas d’expliquer les effets subtils et les bénéfices de ce qu’il nomme « Thérapies psychologiques adjuvantes », de niveaux différents, pour chacun des individus et pour certains sous-groupes. Ils proposeront d’adjoindre des études de cas, pour analyser les mécanismes en profondeur et sortir de l’impasse de ces résultats contradictoires. Edmonds et al. [45] avaient déjà fait remarquer que l’évolution et la maturation psychologique de malades participant à des groupes au long cours se révélaient plus accessibles à l’autoappréciation des sujets euxmêmes et au regard des thérapeutes que sensibles aux échelles psychométriques comme le POMS ; cela, au contraire des changements rapidement, observables et mesurables, dans le cadre d’interventions brèves, de type cognitivocomportemental. La plupart des grandes études citées ont soulevé des difficultés de participation : écart entre le potentiel et les inclusions réelles, manque d’assiduité, abandon. La randomisation d’une étude démarrée à Caen avait due être cassée, faute d’intégration en nombre suffisant, se trouvant transformée en un groupe prospectif qui se tiendra pendant 28 mois. L’évaluation des 15 participantes, tous les trois mois, selon les critères de l’ICD-10 avait permis d’écarter la crainte d’un effet anxiogène et déprimant, durable et caractéristique, imputable à la participation à ce groupe confronté à l’aggravation et à la disparition de certains de ses membres. Au contraire, l’évolution du groupe avait permis d’appliquer le processus de detoxify dying, littéralement « détoxifier la mort » tel que décrit par Spiegel et al. [146], travail d’élaboration psychologique autour de sa propre finitude, même si cela s’accompagnait parfois de réactions de détresse émotionnelle (tristesse, colère). Par ailleurs, la majorité des participants concerne une population de femmes atteintes d’un cancer du sein, ce, même dans des groupes qui ne leur sont pas spécifiquement dévolus. Enfin, si l’on considère que pour de telles études cliniques, les malades sont incités par leur oncologue, relancés, suivis par un service de Quelles recommandations en pratique clinique ? À l’instar de ce qui s’était déjà trouvé spécifié dans les grandes études, il apparaı̂t important de distinguer des groupes ouverts à des malades à un stade initial de la maladie ou en rémission et des groupes de patient(e)s en situation plus critique (accord d’experts). Peu d’études ont évalué les psychothérapies individuelles Certaines psychothérapies ont pu montrer un impact sur la qualité de vie, l’anxiété et la dépression (niveau de preuve 2), mais pas sur la survie. Les approches cognitivocomportementales sont les plus faciles à étudier, du fait de leur méthodologie structurée ; leur efficacité est démontrée. Les patientes repérées comme les plus déprimées en seraient les plus grandes bénéficiaires (accord d’experts). Des études complémentaires sont nécessaires afin de mieux valider les indications et les techniques. La formation et l’expérience du clinicien constituent des variables certes difficiles à maı̂triser, mais déterminantes pour la mise en place et la garantie du cadre thérapeutique. Les groupes psychoéducationnels et/ou d’inspiration cognitivocomportementale s’adresseraient plutôt aux patients en attente d’informations et d’échanges (accord d’experts). Les groupes de soutien et d’expression émotionnelle conviendraient plus aux malades en quête de partage de leurs préoccupations existentielles, notamment en situation métastatique (accord d’experts). Il existe un écart entre l’intérêt pour une participation à un groupe de malades, une intégration effective et une participation régulière. Les indications et le soutien des oncologues à l’égard de la démarche de participation à un groupe apparaissent essentiels (accord d’experts). L’entretien préliminaire avec un psycho-oncologue garantit la qualité de l’indication, tant pour le malade que pour la cohésion du groupe (accord d’experts). RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 763 ONCOLOG IE 764 Si les patientes montrant des signes de dépression sévère ne sont pas demandeuses et ne trouvent sans doute pas l’énergie pour se déplacer et supporter la rencontre, celles présentant une dépression moyenne ou légère, des troubles mixtes anxieux et dépressifs, des troubles de l’adaptation, ou bien encore un manque de soutien psychosocial, trouvent souvent dans un groupe un étayage affectif qui leur est bénéfique (accord d’experts). Pour préserver la cohésion du groupe, certaines personnalités pathologiques, notamment de type égocentrique, manipulatrice et/ou paranoı̈aque, devraient être écartées et plutôt être orientées vers des prises en charges adaptées (accord d’experts). Ces indications et contre-indications soulignent l’importance et motivent l’entretien préliminaire obligatoire avec le psycho-oncologue, psychiatre ou psychologue clinicien, responsable du groupe (accord d’experts). Quand et comment orienter ? Introduction La qualité du relais vers le psychiatre et/ou le psychologue organisé par l’oncologue est clairement déterminante pour la suite de la prise en charge [37]. Une proposition indiquée au mauvais moment ou inadéquate dans sa formulation peut s’avérer être un frein dans la prise en charge. Au contraire, une proposition adaptée à la relation avec la patiente constitue une dynamique favorable pour l’ensemble de la prise en charge, renforce l’expression de la patiente, son adhésion aux traitements, comme sa participation aux décisions thérapeutiques. La pertinence du relais vers le psychologue ou le psychiatre tient à la combinaison de multiples facteurs relevant du moment choisi, du climat général de l’entretien, de la manière d’aborder le sujet et de l’écoute mutuelle instaurée comme de la qualité de la relation de confiance, ainsi que de l’adéquation de l’information délivrée. Une orientation judicieuse favorise un accès plus aisé au soutien psychologique parfois difficile et une meilleure acceptation de la problématique dépressive. Les nombreuses réticences, l’ignorance à propos de la dépression et des effets du soutien psychologique, ainsi que les nombreuses croyances ne suffisent pas toujours à ce que les patientes convaincues d’avoir besoin de soutien engagent une démarche en ce sens. L’orientation vers une prise en charge psychologique ou psychiatrique concerne les patientes pour lesquelles une dépression est suspectée ou diagnostiquée, comme celles qui présentent des facteurs de risque. Il faut cependant rappeler que l’indication des psychothérapies excède la problématique de la dépression. Ainsi, l’orientation vers un soutien psychologique doit systématiquement être proposée aux patientes en situation de détresse psychologique, et les demandes spontanées méritent toujours d’être prises en compte. Quand orienter ? Plusieurs types de situations peuvent déterminer l’orientation vers un psychologue ou un psychiatre ; celle-ci dépend, quoiqu’il en soit, en premier, des ressources disponibles : – simple demande de la patiente (plutôt un psychologue) ; – facteurs de risque de dépression ou de détresse psychologique (cf. supra) plutôt un psychologue ; – en cas de dépression avérée, le premier traitement antidépresseur peut être prescrit par un psychiatre s’il en est un, ou un autre médecin ; il y a lieu d’associer au traitement antidépresseur un travail de soutien psychologique qui peut être assuré selon les cas par le psychiatre ou le psychologue ; – résistance à un premier traitement antidépresseur, on orientera vers le psychiatre ; – risque suicidaire avéré ou de délire, un avis psychiatrique sera nécessaire (mais il s’agit d’une situation d’urgence : cette nécessité d’avis psychiatrique ne doit pas faire retarder la prise en charge) ; – existence de clusters : fatigue, douleur, bouffées de chaleur. Là encore, on orientera vers un psychiatre. Bien que l’engagement du patient soit nécessaire à une prise en charge psychologique, il faut savoir proposer une telle intervention en dehors d’une demande spontanée de la patiente, lorsqu’elle apparaı̂t nécessaire (recommandations nationales pour la mise en œuvre du dispositif d’annonce du cancer dans les établissements de santé). Le bon moment pour orienter dépend tout autant du besoin de la patiente (ressenti par elle et/ou estimé par l’environnement) que de sa capacité à intégrer et accepter la proposition de soutien psychologique ainsi que de sa motivation à engager la démarche. Ainsi, lorsque l’ensemble de ces facteurs ne coı̈ncide pas, il est nécessaire de concevoir et proposer cette orientation par étapes, au fur et à mesure du suivi, avec tact. La manière de faire sera essentielle pour l’acceptation de la démarche. Comment aborder l’orientation vers le « psy » ? – Une orientation claire de l’oncologue, qui définira ses propres limites comme l’intérêt du soutien psychologique, aidera considérablement la patiente et protègera l’oncologue d’affects envahissants [89] ; La formation des cliniciens à la psycho-oncologie et aux sciences humaines de manière plus large, est recommandée afin de leur permettre d’orienter en fonction des éléments propres à chaque relation spécifique [4,123]. On peut définir plusieurs étapes pour une bonne orientation. Il faudra cependant évaluer selon la relation avec la patiente et sa capacité à aborder le sujet, la possibilité de traiter l’ensemble des étapes en une fois, et l’intérêt de délivrer tout ou partie des informations disponibles. Les peurs et résistances peuvent en effet nécessiter d’aborder le sujet en plusieurs fois ; – il s’agit toujours d’initier le dialogue et d’aborder les questions psychologiques en invitant la patiente à dire comment elle se sent en ce moment, (NHMRC Psychosocial Clinical Practice Guidelines) avec des questions simples du style : « comment vous sentezvous en ce moment, émotionnellement ? » – il est important de relever dans le discours de la patiente les aspects qui indiquent sa souffrance et de les aborder clairement. Il est préférable de parler de notion de souffrance avant même d’évoquer la notion de dépression, de soutien psychologique, ou de psychologue/psychiatre, afin de ne pas effrayer (accord d’experts). La patiente peut ainsi entendre la sensibilité du médecin au regard de ses difficultés et se sentir comprise, ce qui est favorable au processus d’acceptation de la proposition et accroı̂t le lien de confiance avec le praticien. – puis, il y a lieu d’approfondir et de permettre à la patiente de s’exprimer plus précisément au sujet de ses symptômes afin que le médecin reconnaisse ses difficultés et qu’elle puisse les reconnaı̂tre aussi. Une simple invitation de ce type est appropriée : « Pouvez-vous m’en dire un peu plus sur les perturbations/difficultés que vous ressentez ? ». – à cette phase du dialogue, il y a lieu de dire à la patiente qu’elle peut souffrir de dépression, ou d’évoquer le risque dépressif ainsi que l’utilité d’un dépistage précis. On peut le signifier ainsi : « Je pense que vous souffrez peut-être d’une dépression, et je souhaiterais demander l’avis d’un spécialiste ». Une telle formulation a l’avantage de positionner le rôle du psychologue ou du psychiatre, de cadrer le rôle du cancérologue et d’avancer en complémentarité. – cet énoncé doit être suivi d’une information sur la dépression et du recueil des réactions de la patiente. Selon la dynamique de l’entretien, l’ordre entre ces deux points variera. Cette information sur la dépression est essentielle. Guidée par la dynamique relationnelle, elle aide la patiente à prendre ses décisions [39]. Plusieurs niveaux d’information sont possibles à donner : – il est légitime d’être triste dans le contexte d’une maladie grave. La dépression n’est cependant pas une simple tristesse, un état d’âme ou un «léger cafard », mais bien une maladie ; – la dépression est caractérisée par des perturbations multiples de l’humeur qui se manifestent de façon quasi constante et entraı̂ne une gêne permanente physique et morale aux effets conséquents et invalidants ; – cette maladie ne provient pas d’un facteur unique mais résulte d’un ensemble de mécanismes de différente nature et imparfaitement connus. Ils sont d’ordre biologiques, psychologiques et environnementaux. Il existe des éléments déclencheurs de la dépression, et des facteurs de risque ; – la dépression se traite par le biais d’une prise de médicaments et/ou d’un soutien psychologique ; – le recours aux soins est indispensable ; la volonté seule ne suffit pas pour agir sur cette maladie ; – les raisons d’un recours au soutien médicamenteux et psychologique peuvent être les suivantes : trouver de la compréhension face à sa souffrance, réduire les symptômes et leurs conséquences, améliorer l’image de soi perturbée par le cancer du sein, retrouver du sens à ce qui est vécu et s’engager dans de nouveaux projets, prévenir la réapparition des symptômes ; – le soutien psychologique ne peut être efficace si la patiente ne désire pas l’entreprendre, – il est souvent important de proposer un soutien psychologique aux proches de la patiente [127] ; – les réactions de la patiente à l’énoncé du diagnostic ou de suspicion de dépression, comme de la nécessité de dépistage et/ou de traitement, doivent être abordées ; Il s’agit de proposer à la patiente de dire sa réaction, notamment les craintes qu’elle ressent. Une écoute attentive permettra de connaı̂tre sa perception, de réajuster le niveau d’information à tenir si nécessaire, et d’identifier les réticences avec lesquelles il faudra avancer. – il est fondamental que les oncologues resituent la prise en compte de la dépression dans son contexte. Ils peuvent indiquer que le dépistage et la prise en compte de la dépression font partie de la prise en charge globale de la personne atteinte d’une maladie cancéreuse et visent une meilleure qualité de vie. Ils peuvent également s’appuyer sur une éventuelle perturbation de l’image corporelle : une dépression peut alourdir considérablement la possibilité de restaurer cette image. Il est par ailleurs judicieux qu’ils énoncent clairement leurs limites de compétence en matière d’accompagnement de la personne atteinte de dépression et disent en quoi. – enfin, il s’agit d’aborder plus précisément l’orientation vers les professionnels existants et disponibles, ce qui varie selon les lieux de pratique. Il y a lieu de préciser l’orientation vers un psychiatre et/ou un psychologue. S’il n’y a pas de psychiatre dans la structure de soin, un psychologue clinicien peut aider à la phase de diagnostic. Il s’agit d’indiquer des lieux de consultation et/ou des noms. Ces données aident les patientes à franchir un pas parfois difficile. RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 765 ONCOLOG IE 766 Il est intéressant de donner des indications sur les différentes orientations psychothérapeutiques, si cela est possible, ce qui aide les patientes à se préparer à la démarche. Cependant, quelles que soient les méthodes d’intervention, le soutien psychologique est avant tout fondé sur une relation interpersonnelle. L’efficacité de la démarche relève pour une grande part de la qualité de cette relation dont la méthode est un support, comme de la compétence du thérapeute. Il est judicieux de discuter des a priori de la patiente par rapport aux psy : concernant la folie, la durée, le coût, les peurs de dépendance Il s’agit ensuite de réajuster les informations [37]. Il est important de délivrer, si possible, une brochure d’information sur le soutien psychologique et/ou sur la dépression. Situations spécifiques – Si la patiente a conscience de son état dépressif : la laisser en parler ; l’inciter à dire la manière dont elle gère sa souffrance (« et comment faites-vous ? ») ; pointer les limites de cette gestion en constatant un niveau de souffrance élevé malgré les éventuelles actions entreprises ; indiquer en quoi les compétences en psychooncologie sont adaptées à ce manque, complémentaires et intégrées dans la globalité de la prise en charge. Préciser les limites de l’action de l’oncologue en ce sens ; informer à propos de la dépression ; présenter la proposition de prise en charge à la patiente (si cela n’est pas venu spontanément dans la discussion), et voir ce qu’elle en pense ; traiter des a priori par rapport aux psy si nécessaire. – Si la patiente n’a pas conscience de son état dépressif : inciter à parler des difficultés rencontrées. On peut aider à cela avec une question du style : « y a-t-il des choses difficiles pour vous en ce moment ? Le sommeil est-il bon ?... » (en orientant vers la prise en compte des aspects somatiques) ; constater des signes de souffrance sur la base de son discours et/ou de son comportement. Dire qu’ils peuvent indiquer un état dépressif, et laisser la patiente réagir à cette annonce ; informer sur la dépression et les risques dépressifs liés au cancer du sein ; expliquer les risques de non-traitement de ces symptômes et l’intérêt du traitement ; discuter des a priori sur les psychologues et les psychiatres. – S’il existe une résistance à la proposition de soutien psychologique : dire que l’on comprend les hésitations ; ne pas presser et proposer d’en reparler ; identifier les raisons des résistances pour les respecter et mieux orienter le dialogue ultérieur ; insister sur les limites au soutien psychologique de l’oncologue ; évoquer la possibilité de rencontre ponctuelle du psy qui « n’engage à rien » et la liberté de choix du patient (sauf si HDT nécessaire) ; veiller à conserver un espace de dialogue où l’on s’intéresse aux souffrances de la patiente. – S’il existe un refus du soutien psychologique : dire que l’on comprend que ce soutien ne soit pas souhaité, même si l’on pense que cela pourrait être aidant ; assurer que l’on va faire au mieux dans la prise en charge ; Psychologue ou psychiatre ? Demande de la patiente (psychologue) Dépression avérée (psychiatre et/ou psychologue) Résistance à un premier antidépresseur, risque suicidaire avéré ou délire (psychiatre) Association syndromique (cluster) : fatigue, douleur, bouffées de chaleur (psychiatre) Nécessité que coı̈ncident : – les besoins de la patiente ; – sa capacité à accepter la proposition de prise en charge ; – sa motivation à engager la démarche. Quand ces facteurs ne coı̈ncident pas : – réaliser une proposition par étapes, au fur et à mesure du suivi ; – évaluer la capacité de la patiente à aborder le sujet ; – demander à la patiente comment elle se sent ; – évoquer la notion de souffrance psychique avant de parler de dépression et/ou de psychologue ou de psychiatre ; – évoquer la suspicion de dépression : intérêt du dépistage et de la rencontre avec le psychologue ou le psychiatre ; – expliquer au patient ce qu’est la dépression, informer sur sa prise en charge, les limites de compétences des oncologues et l’intérêt de la collaboration ; – démystifier le « psy » et indiquer l’intérêt de la prise en charge psycho-oncologique ; – s’assurer de l’accord du patient. Tristesse, douleur morale et/ou absence de plaisir Presque chaque jour et presque toute la journée et depuis au moins 15 jours Pas tous les jours ou pas toute la journée ou moins de 15 jours Moins de 3 autres symptômes 3 autres symptômes ou plus Pas de diagnostic d'épisode dépressif majeur Diagnostic d'épisode dépressif majeur Pas de facteur de gravité Surveillance Pas de problèmes médicaux Comorbidité somatique rénale/hépatique Citaopram 20 mg/j Paroxetine 20 mg/j Escitalopram 10 mg/j Facteur de gravité Avis spécialisé Choix de la molécule et adaptation posologique Echec 3 semaines Efficacité Echec 1 - Vérifier l'observance 2 - Augmenter la dose signaler malgré tout les limites existant pour les soignants dans leur aide et dans leur efficacité ; besoin d’aide dans ce cas pour assumer leur sentiment d’impuissance et de culpabilité. identifier les raisons du refus pour les respecter et en reparler si possible ; Comment faire le diagnostic d’ EDM et prescrire le premier traitement : schéma simplifié. indiquer la possibilité de consultations ponctuelles avec les psy sans vouloir convaincre absolument ; proposer de reparler au moins de la situation psychologique, de la souffrance, détresse Penser à l’intérêt des autres soutiens utiles de la personne relatifs au domaine des soins de support (bénévoles, Espaces Rencontre Information ) ; penser tout particulièrement à l’utilité du soutien psychologique pour les soignants dans ce cas de figure, d’autant plus qu’ils ont le sentiment que la situation de la patiente est difficile et ingérable pour eux. 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Zarca Introduction La prise en compte de la sexualité de personnes malades traitées pour leur cancer, et de leurs partenaires, est trop fréquemment méconnue, voire ignorée par de nombreux professionnels de santé. Néanmoins, ces dernières années, ce sujet, qui importe beaucoup aux personnes malades et à leurs partenaires, fait l’objet de publications, d’études et de travaux scientifiques, de rencontres et échanges entre professionnels notamment francophones. Bien que de nombreux congrès, colloques ou symposia aient eu lieu, il y a peu d’études avec niveau élevé de preuves pour étudier la validité de ce qui est qui est avancé. Ces manifestations témoignent de la prise de conscience croissante de cet enjeu de société et des réflexions menées sur les moyens à mettre en œuvre pour répondre aux besoins des personnes malades et de leurs partenaires (cf. Dossier « Sexualité et cancer 2005) [3]. Pour pouvoir évaluer l’interférence du cancer du sein sur la sexualité, il faut : – d’une part, pouvoir comparer celle-ci, avec celle de la femme saine, qui n’a plus de sécrétion estrogénique, par exemple la femme ménopausée qui ne prend pas de traitement hormonal substitutif. Quand il s’agit d’une femme en préménopause, il est souvent nécessaire d’avoir une contraception. Outre le fait que les hormones sont contre-indiquées, il n’y a pas de réel consensus pratique pour les modalités de la surveillance oncologique. Les contraceptions suggérées sont les stérilets non hormonaux et les spermicides RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 771 ONCOLOG IE 772 (éventuellement associés aux préservatifs, si l’on veut renforcer leur efficacité). En cas de métrorragies, un bilan avec une échographie pelvienne s’impose. Rappelons-nous que dans ce climat oncologique où les aménorrhées surviennent plus fréquemment, on ne parlera de ménopause qu’après deux ans d’aménorrhée ; – d’autre part, évaluer les rares études qui ont été faites. Il faut qu’elles soient effectuées sur des échantillons suffisamment larges avec l’utilisation de questionnaires validés et standardisés avec comparaison à une population de référence de femmes saines. L’évaluation en question Dans la majorité des enquêtes qui sont faites sur la sexualité, on évalue la fréquence des rapports sexuels. Néanmoins, il n’y a pas que la maladie qui intervient sur la diminution de fréquence. D’autres facteurs existent, telles que des difficultés d’érection du partenaire. Pour évaluer la sexualité féminine dans des études, il est recommandé aujourd’hui d’utiliser des questionnaires standardisés pour prendre en compte la satisfaction sexuelle globale, comprenant la fréquence des rapports sexuels, l’excitabilité sexuelle, la lubrification, l’orgasme, etc. On tient compte par ailleurs des déterminants de la sexualité féminine comme l’âge, l’état physique, psychique, gynécologique et hormonal, la perception de l’image corporelle, l’éducation, l’état de santé du conjoint, les facteurs socioculturels, etc. En préambule, il faut mentionner que les facteurs prédictifs d’une sexualité satisfaisante après cancer du sein sont : – une bonne perception de l’attractivité sexuelle ; – l’absence de sécheresse vaginale ; – l’absence de problèmes sexuels préexistants et quelle qu’en soit la cause [11]. Les traitements du cancer du sein, chirurgie, chimiothérapie et hormonothérapie, radiothérapie sont susceptibles d’altérer la qualité de vie et la sexualité des patientes à court [12] et/ou à long terme [1] avec des nuances suivant les traitements (niveau de preuve 3). Chirurgie Les études sur la qualité de vie et la sexualité en rapport avec le type de chirurgie sont contradictoires, mais les rares études prospectives sur le sujet montrent que les patientes ayant subi une mastectomie ont une plus mauvaise image de leur corps et des scores de fonctionnement sexuel plus faibles que les patientes avec une tumorectomie, et ce, quel que soit l’âge, y compris après 70 ans [4]. Cependant, les effets négatifs de la mastectomie ont tendance à s’estomper avec le temps [6] (niveau de preuve 3). La recommandation est de privilégier les traitements chirurgicaux conservateurs lorsqu’ils sont possibles. Chimiothérapie Les patientes ayant reçu une chimiothérapie dans le cadre de leur traitement du cancer du sein ont globalement à court et à long terme une baisse de désir sexuel trois fois plus important que les femmes n’ayant pas eu de chimiothérapie ainsi qu’une diminution de la fréquence des rapports et une plus grande difficulté à atteindre l’orgasme [1,6,15] (niveau de preuve 3). La seule variable retrouvée dans toutes les études concernant sexualité et cancer du sein avec chimiothérapie est « la sécheresse vaginale ». Celle-ci est le principal facteur prédictif d’une sexualité satisfaisante, elle entraı̂ne une diminution de fréquence des rapports sexuels ainsi que des dyspareunies [1] (niveau de preuve 3). Les recommandations sont d’informer les patientes de cet effet délétère et de conseiller des traitements locaux de type lubrifiant. Ganz et al. ont montré qu’un programme d’accompagnement des patientes sur la sécheresse vaginale avec informations et conseils sur l’utilisation des lubrifiants vaginaux améliore significativement la satisfaction sexuelle [5]. Traitements hormonaux Les effets indésirables des traitements hormonaux interagissent avec la sexualité. Les plus gênants sont les troubles vasomoteurs, la sécheresse vaginale, les dyspareunies, la baisse de la libido et les myalgies. Les anti-aromatases et le tamoxifène n’ont pas les mêmes retentissements sur la sexualité. L’étude ATAC (arimidex versus TAM) montre une différence significative sur la sécheresse vaginale (18,5 versus 9,1 %), sur la diminution de la libido (34 versus 26 %) et les dyspareunies (17,3 versus 8,1 %) [2]. L’étude STAR montre qu’à 60 mois, la fonction sexuelle est meilleure dans la population TAM de façon significative, mais la population TAM présente plus de bouffées de chaleur et de métrorragies (significatif) [8]. Enfin, une dernière étude multicentrique randomisée en double insu sur 1 614 patientes comparant exemestane et tamoxifène montre, à 1 an, que l’exemestane donne un peu moins de bouffées de chaleur (peu significatif) et moins de leucorrhées (très significatif), mais beaucoup plus de sècheresse vaginale (très significatif) ainsi que des douleurs musculaires et osseuses (significatif) [7] (niveau de preuve 1). Au total, les études des inhibiteurs de l’aromatase versus tamoxifène vont toutes dans le même sens : – les inhibiteurs de l’aromatase provoquent des myalgies et une sécheresse vaginale majeure entraı̂nant des dyspareunies ; – le tamoxifène entraı̂ne des leucorrhées et des bouffées de chaleur, mais la satisfaction sexuelle globale est toujours meilleure sous tamoxifène. La sécheresse vaginale étant le principal facteur prédictif d’une bonne sexualité post cancer du sein, il semble judicieux de mettre en balance les effets indésirables des différents traitements hormonaux suivant le stade du cancer et l’âge de la patiente, et surtout d’en discuter avec elle, toutes les femmes n’accordant pas la même place à la sexualité. Prise en charge thérapeutique des difficultés sexuelles Il faudrait pouvoir aider la femme pour que le rapport sexuel devienne d’abord moins désagréable pour elle. Outre le fait que l’effet placebo est très important dans le trouble fonctionnel qui accompagne toute difficulté sexuelle (20 ou 40 %), se surajoute l’effet pharmacologique Le soutien médicamenteux a surtout pour but : – de réduire l’anxiété et l’appréhension de la patiente (et éventuellement de son [sa] partenaire) avant le rapport sexuel qu’elle vit comme une épreuve (après la maladie, une longue période d’abstinence ) ; – de diminuer l’inhibition, et le manque de confiance en elle ; – de faciliter autant que faire se peut le confort sexuel des deux partenaires. Quels sont les traitements possibles ? Sécheresse vaginale La sécheresse vaginale est améliorée chez une femme ayant eu un cancer du sein par des lubrifiants immédiats ou de longue durée (Monasens, Monagyn, Replens, Sensilube, Ky, etc.) qui sont non hormonaux, donc sans influence sur la maladie. Il n’y a aucune étude sur l’impact des estrogènes locaux dans cette population, ceux-ci restant contreindiqués bien que l’on n’ait pas de preuve scientifique de leur effet délétère. Une étude sur 30 patientes [14] existe sur le passage systémique des estrogènes locaux (en l’occurrence le promestriène en ovule). Lors de cette étude en double insu non randomisée, des ovules ou un placebo ont été administrés pendant 40 jours et des dosages plasmatiques de FSH, LH, E1 et E2 ont été mesurés à deux reprises en début et fin de traitement soit quatre fois. Les résultats ne montrent aucune différence significative dans les variations hormonales avant et après traitement. Le promestriène pourrait donc être une alternative, mais les études de grande envergure manquent (niveau de preuve 3 ou 4). Quant aux phyto-estrogènes par voie vaginale, leur utilisation ne peut être plus argumentée par manque d’études de bon niveau de preuve ; l’Afssaps ayant recommandé par ailleurs une vigilance accrue lors de l’utilisation de ces produits per os pour les bouffées de chaleur Les recommandations sont la nécessité d’une mise en place d’études permettant de connaı̂tre l’impact sur la maladie cancéreuse des œstrogènes locaux et leurs passages systémiques. L’amélioration de la sexualité en post cancer du sein serait grandement facilitée si ceuxci pouvaient être prescrits. Par ailleurs, une autre piste d’exploration serait l’utilisation du sildénafil, produit non hormonal, pour améliorer la lubrification du fait de la vasodilatation vulvovaginale chez les patientes ayant des troubles du plaisir du fait de la sécheresse vaginale. Bouffées de chaleur – L’abufène est le seul produit non hormonal dont l’AMM indique le traitement des bouffées de chaleur, ce traitement n’étant pas contre-indiqué en cas de cancer du sein ; – les phyto-estrogènes sont employés en cas de ménopause, mais même dans ce cas, l’Afssaps recommande une grande vigilance quant aux risques estrogéniques. En cas de cancer du sein, il semble prudent et logique de ne pas en prescrire ; – les IRS diminuent en moyenne de 50 à 60 % les bouffées de chaleur (niveau de preuve 1) au prix de quelques effets indésirables (études avec la venlafaxine, la paroxétine ou la luoxétine randomisées double insu contre placebo). L’étude sur le citalopram et le tamoxifène ne montre pas d’effet délétère de cette association [9]. À noter que l’induction enzymatique des IRS pourrait diminuer en théorie l’efficacité du tamoxifène sauf peut être avec la venlafaxine ; – il existe quelques études avec l’acupuncture et l’hypnose (études randomisées, mais caractère aveugle très difficile à appliquer ) cliniquement des médecins homéopathes disent utiliser des traitements, mais aucune étude ne mentionne ces expériences ; – à noter une étude pilote publiée dans le Lancet en 2008 sur le bloc du ganglion stellaire stellate ganglion block sous scanner avec des résultats intéressant sur une population ayant eu un cancer du sein [10] ; – Femal (Serelys® en France), un remède extrait du pollen, produit une réduction de 60 à 70 % les bouffées de chaleur dans une étude randomisée [13] en double insu contre placebo, mais sur un petit effectif (64 patientes) et avec des résultats à trois mois (niveau de preuve 3). Ce médicament apparaı̂t prometteur et sans effets indésirables lorsque les estrogènes sont contreindiqués ; – l’arrêt de l’étude LIBERATE ne permet pas de proposer la tibolone. Peut-être que la mise en place de nouvelles études nous permettra d’avoir des recommandations plus fiables et plus précises afin de pouvoir aider la patiente et son (sa) partenaire à vivre une sexualité la plus épanouie possible pendant et après la maladie. RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 773 774 ONCOLOG IE Recommandations – Il est nécessaire de prendre en compte la sexualité dans les algorithmes décisionnels et tenir compte des effets indésirables des traitements sur la sexualité (libido, bouffées de chaleur et trophicité vaginale) ; – actuellement, la sécheresse vaginale ne peut être traitée de façon fiable que par des lubrifiants. Cependant, les traitements les plus efficaces contre les bouffées de chaleur et la sécheresse vaginale sont les estrogènes par voie générale. Cela justifie l’initiation d’études permettant de connaı̂tre le passage systémique des estrogènes locaux et d’études précisant l’intérêt du sildénafil ; – quelques pistes thérapeutiques existent contre les bouffées de chaleur ; – au vu de la différence d’effets indésirables sur la sexualité du tamoxifène et des antiaromatases, il est recommandé de discuter avec la patiente autour de ces effets indésirables et de l’impliquer, si elle le souhaite, dans la prise de décision la plus adaptée à sa situation. Références 1. Broeckel JA, Thors CL, Jacobsen PB, et al. (2002) Sexual functioning in long-term breast cancer survivors treated with adjuvant chemotherapy. Breast Cancer Res Treat 75(3): 241-8 2. Cella D, Fallowfield L, Barker P, et al. (2006) Quality of life of post menopausal women in the ATAC (Arimidex, Tamoxifene, Alone or in Combination) trial after completion of 5 years adjuvant treatment for early breast cancer. Breast Cancer Research and Treatment 100(3): 273-84 3. 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On a également pu mettre en évidence que la maladie est souvent plus agressive chez les patientes préménopausées avec un taux de rechute plus élevé [5]. Les nouvelles stratégies diagnostiques et thérapeutiques associées aux nouvelles molécules ont démontré une grande efficacité chez ces patientes avec diminution de la mortalité de 20 à 30 % [1,5]. Malheureusement, certains traitements réputés efficaces présentent des effets indésirables qui peuvent altérer, voire supprimer la fertilité chez certaines patientes. Par ailleurs, de nombreuses études ont établi que la grossesse survenant après un cancer du sein n’augmentait pas le risque de récidive et ne péjorait pas le pronostic [10]. Lorsque le diagnostic de cancer du sein est annoncé, l’attention est souvent portée exclusivement sur l’objectif oncologique de la curabilité du cancer, les traitements qui seront appliqués et les différents problèmes de toxicité à court ou à moyen terme qu’ils engendrent. La patiente choquée par le diagnostic, ainsi que le médecin soucieux de l’action thérapeutique légitimement prioritaire éludent parfois la question de la fertilité chez les patientes jeunes et en âge de procréer. Depuis quelques années déjà, plusieurs groupes multidisciplinaires (oncologues médicaux, gynécologues, spécialistes de la PMA, psychiatres, radiothérapeutes) ont étudié cette problématique et ont apporté des solutions diverses dans les procédures de préservation de la fertilité [7,9,14,15,18]. Des directives et recommandations ont été publiées et font déjà référence. Une des grandes difficultés rencontrées est sans doute la relative urgenced’application deces procédures « au quotidien ». La clé de voûte de la réussite de la préservation de la fertilité chez ces patientes est le réseau multidisciplinaire institué, rapide et facile à activer dans des protocoles stricts et bien rodés. % des patientes affectées < 45 ans 43 % 23 % 13 % Préservation de la fertilité après cancer du sein : pour quelles patientes ? Pour les spécialistes qui suivent ces patientes avec un cancer invasif et dans le cadre de la fertilité, deux questions se posent. Quel est le nombre de patientes affectées par une pathologie tumorale maligne et en âge de procréer, notamment de moins de 40 ans ? Quelles sont les patientes intéressées par des mesures de préservation de la fertilité ? Les cancers les plus fréquents chez la femme avant 40 ans sont le cancer du sein, les mélanomes, les cancers du col de l’utérus, les lymphomes non hodgkiniens et les leucémies [8]. Selon ces auteurs, aux États-Unis et au Royaume-Uni, 4 % des cancers du sein surviendraient avant l’âge de 40 ans. L’Observatoire national français signale 5,3 % des cancers du sein dans la tranche d’âge de 30–39 ans et 0,3 % avant 30 ans [3]. En Suisse, 6 % des patientes avec cancer du sein ont moins de 40 ans, et moins de 2 % ont moins de 30 ans [20]. Quant au nombre exact de patientes susceptibles d’être intéressées par des mesures de préservation de la fertilité, peu d’études répondent à cette question. Selon des évaluations indirectes et divers avis d’experts, on estime à 30–40 % des patientes de moins de 40 ans qui seraient intéressées par des mesures de préservation de la fertilité, donc 2–3 % du collectif total des patientes avec cancer du sein. Ce nombre est beaucoup plus élevé (13–18 %) si on y inclut les patientes de 40 à 45 ans (niveau de preuve 3) (Fig. 1). Déclin de la fertilité lié à l’âge Le nombre d’ovocytes diminue rapidement avec l’âge. À la naissance, les ovaires contiennent 1–2 millions Col de l'utérus Sein Leucémie 10 % 8% Ovaire Utérus Fig. 1. Pourcentage de patientes de moins de 45 ans avec cancer d’ovocytes. Leur nombre est de 300 000–500 000 à la puberté, de 25 000 à 37 ans et de 1 000 en moyenne à 50 ans [2,6] (Fig. 2). Cette chute du nombre des ovocytes est bien sûr un facteur très important, mais il n’est pas le seul en cause dans la diminution de la fertilité. En effet, de multiples autres facteurs de risque, également liés à l’âge, peuvent être impliqués dans la diminution de la fertilité : les fibromes utérins, les pathologies tubaires, l’endométriose, les interventions chirurgicales diverses sur les ovaires, le tabagisme, une anamnèse familiale de ménopause précoce et des traitements médicamenteux tels que les chimiothérapies [2,19]. Après un traitement de chimiothérapie, le risque d’aménorrhée définitive varie selon le schéma thérapeutique et selon l’âge de la patiente. Classiquement, la littérature rapporte les associations thérapeutiques à haut risque d’aménorrhée définitive chez les patientes de plus de 40 ans (CMF, CEF, CAF, etc.). Ces mêmes traitements présentent un risque intermédiaire d’aménorrhée si la patiente à moins de 40 ans et un faible risque pour une patiente de moins de 30 ans [17] (Fig. 3). Comme molécule isolée, on sait que la vincristine, le méthotrexate et le fluoro-uracile présentent un très faible risque d’aménorrhée chimio-induite (niveau de preuve 3). 106 Déplétion lente 105 Number of folliculaire 25,000 104 Déplétion rapide 103 102 0 10 20 30 Age (years) Fig. 2. Atrésie folliculaire par rapport à l’âge 40 50 RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 775 776 Risque d'aménorrhée Elevé (> 80 %) ONCOLOG IE Intermédiaire (20-80 %) Bas (< 20 %) Age Schéma de chimiothérapie > 40 ans CMF, CEF, CAF (6 cycles) 30-39 ans > 40 ans CMF, CEF, CAF (6 cycles) AC (4 cycles) < 30 ans < 40 ans CMF, CEF, CAF (6 cycles) AC (4 cycles) Incertain Consultation multidisciplinaire spécialisée : option de préservation de la fertilité ART/Cryo-conservation/ Vitification de zygote et/ou d'ovocyte Taxanes, Trastuzumab Adjuvant aromatase inhibitors for early breast cancer after chemotherapy-induced amenorrhea: caution and suggested guidelines. Smith IE, Dowsett M, Yap YS, et al. J Clin Oncol 2006; 24:2444-7 Fig. 3. Risque d’aménorrhée définitive chimio-induite Chirurgie Stratégie thérapeutique Chimiothérapie Radiothérapie Fig. 5. Les patientes qui présentent un cancer du sein doivent recevoir une information complète dès le premier relais médical spécialisé, qui comprend le diagnostic, le traitement et ses effets indésirables, dont notamment les risques d’aménorrhée définitive et donc d’infertilité secondaire. Cette démarche initiale permettra de dépister rapidement les patientes intéressées par des mesures de préservation de la fertilité dans le cadre de leur traitement oncologique et, le cas échéant, d’activer les protocoles mis en place. Les différentes mesures de préservation de la fertilité doivent être appliquées de principe avant les traitements médicamenteux (chimiothérapie et hormonothérapie). Le temps est une des principales contraintes qui est d’autant plus importante si la décision thérapeutique oncologique prévoit une chimiothérapie néoadjuvante (Figs. 4–6). En effet, si la chimiothérapie est programmée après l’intervention chirurgicale, l’intervalle de temps permet plus facilement de synchroniser une ovulation et d’effectuer les prélèvements projetés (accord d’experts). Mesures de préservation de la fertilité Les nouveaux développements des techniques de cryopréservation ont modifié considérablement la manière d’aborder ce problème jusqu’ici insoluble de Mode d’application des mesures de préservation de la fertilité si chirurgie première Consultation multidisciplinaire spécialisée : option de préservation de la fertilité ART/Cryo-conservation/ Vitification de zygote et/ou d'ovocyte Chirurgie Chimiothérapie Radiothérapie Fig. 6. Mode d’application des mesures de préservation de la fertilité si chimiothérapie première la préservation de la fertilité à la suite d’insuffisance ovarienne chimio-induite. Il a fallu d’abord maı̂triser la fécondation in vitro avec stimulation ovarienne, puis les techniques de cryopréservation et de vitrification. Actuellement, nous disposons principalement de trois options : – la cryopréservation d’embryon ; – la cryopréservation d’ovocytes ; 1. Diagnostic 2. Mesures d'urgence 3. Traitements – la cryopréservation d’ovaire (Fig. 7) (niveau de preuve 2). Diagnostic : Cancer du sein Consultation multidisciplinaire spécialisée : option de préservation de la fertilité Cryo-conservation embryon, ovocyte ou ovaire Chirurgie Chimiothérapie Hormonothérapie Radiothérapie Fig. 4. Décisions thérapeutiques oncologiques et mesures de préservation de la fertilité Cryopréservation embryonnaire La cryopréservation embryonnaire est actuellement considérée comme la méthode de choix dans les mesures de préservation de la fertilité. En effet, la technique de stimulation ovarienne et de FIV est actuellement bien maı̂trisée et peut être effectuée en deux semaines, depuis le premier jour des menstruations. Ce délai permet de planifier le traitement oncologique sans retard nuisible. Chez les patientes qui présentent une tumeur hormonosensible, la Intervention Definition Comment Consideration Embryo cryopreservation (S) Harvesting eggs vitro fertilisation and freezing of embryos for later implantation The most established technique for fertility preservation in women •Requires 10-14 days of ovarian simulation from the beginning of menstrual cycle •Outpatient surgical procedure •Requires partner or donor sperm Oocyte cryopreservation (I) Harvesting and freezing of unfertilized eggs Small cases eries and cases reports: as of 2005, 120 deliveries reported, approximately 2% live births per thawed oocyte (3-4 times lower than standart IVF) •Requires 10-14 days of ovarian simulation from the beginning of menstrual cycle Ovarian cryopreservation and transplantation Freezing of ovarian tissue and reimplantation after cancer treatment Cases reports: as of 2005, two live birth reportes •Not suitable when risk of ovarian involvement is high •Outpatient surgical procedure Fig. 7. Recommandations sur la préservation de la fertilité chez les patients atteints de cancer de l’American Society of Clinical Oncology, 2006 stimulation ovarienne peut être faite en association avec le létrozole ou le tamoxifène [13]. Dès que la FIV est effectuée, on procède à la congélation. Après une période initiale durant laquelle la congélation lente programmée était la seule méthode accessible, la technique de vitrification des embryons, ovocytes et biopsies ovariennes représente un progrès important dans la qualité de la cryopréservation. La cryopréservation embryonnaire nécessite bien entendu la présence d’un partenaire connu ou d’un don de sperme. Du point de vue éthique et juridique, cette contrainte soulève un certain nombre de problèmes potentiels (à qui appartient l’embryon congelé, que se passe-t-il en cas de séparation du couple, etc. ?). Ces décisions sont plus difficiles à prendre pour les patientes, car les délais de réflexion sont relativement courts, et dans un contexte particulier de la maladie tumorale. Globalement, le taux de grossesse est de 25 à 30 % [12]. Mais ces taux varient selon la cohorte d’âge des patientes et selon les centres de prise en charge (niveau de preuve 3). Cryopréservation d’ovocytes La technique de stimulation des ovaires est évidemment identique à celle utilisée pour la FIV, mais ici c’est l’ovocyte seul, non fécondé, qui est cryopréservé. Cette situation s’applique principalement aux patientes qui n’ont pas de partenaire ou qui ne désirent pas impliquer leur partenaire actuel. Certaines patientes préfèrent la cryopréservation d’ovocytes à celle d’embryons pour des motifs religieux, éthiques, ou personnels [9]. Cependant, diverses études ont démontré que l’ovocyte congelé présente un risque plus élevé de détérioration lors de la procédure de congélation, quelle que soit la méthode employée [12]. Le taux de grossesse observé est globalement plus faible (20–25 %) que chez les patientes qui ont bénéficié d’une cryopréservation embryonnaire classique (niveau de preuve 3). Cryopréservation de tissu ovarien La cryopréservation de tissu ovarien et implantation ultérieure reste une méthode en investigation et pose encore beaucoup de problèmes. L’avantage principal est la facilité de prélèvement qui ne requiert aucun délai et se fait par simple laparoscopie. Elle ne nécessite pas de stimulation ovarienne ni la présence d’un donneur de sperme. Les follicules primordiaux tolèrent bien la congélation. Par contre, lors de la réimplantation, la phase d’ischémie initiale et transitoire entraı̂ne la perte de plus 25 % des follicules primordiaux [11,16]. De nombreuses investigations sont actuellement en cours pour améliorer les conditions de transplantations. La littérature a relevé quelques succès avec naissance d’un enfant vivant [4] (niveau de preuve 3). Conclusions Le cancer du sein est un des cancers les plus fréquents chez la patiente en âge de procréer. Il nécessite fréquemment des traitements adjuvants tels que des chimiothérapies qui peuvent affecter la fertilité. Ce risque est directement lié à l’âge de la patiente. Le spécialiste qui prendra en charge la patiente doit évoquer précocement ce risque thérapeutique. Cette approche est d’autant plus importante que les progrès des techniques de PMA et de la cryopréservation d’embryon permettent d’obtenir des grossesses dans plus de 30 % des cas. L’application de ces mesures de préservation de la fertilité doit se faire dans le cadre d’un réseau multidisciplinaire. Il est important de s’assurer que la priorité oncologique soit respectée, et que les mesures de préservation de la fertilité ne désavantagent ni la santé de la mère ni celle de l’éventuel enfant à naı̂tre. RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 777 778 ONCOLOG IE Recommandations – Les patientes en âge de procréer, et chez lesquelles un diagnostic de cancer du sein est posé, doivent rapidement être informées du risque d’insuffisance ovarienne chimio-induite et donc des problèmes de potentiels de la fertilité. Mais la priorité demeure le traitement du cancer (grade B) ; – les patientes intéressées par des mesures de la préservation de la fertilité seront prises en charge rapidement par une équipe multidisciplinaire (spécialiste de la MPA, oncologue médical, sénologue, psychologue) bien rodée non seulement dans les compétences, mais également dans le respect des délais du plan thérapeutique (grade C) ; – des protocoles de stimulation ovarienne peuvent être activés rapidement tant pour les tumeurs non hormonodépendantes (grade B) que pour les tumeurs hormonodépendantes (grade C). Références 1. Aebi S (2005) Special issues related to the adjuvant therapy in very young women. Breast 14: 594-9 2. ACOG, age-related fertility decline, Committee opinion, 2008 August; no 413 3. Cutuli B (2006) Modalité de découverte du cancer du sein en France (2001–2004). Lettre du sénologue 32: 9-15 4. Donnez J, Dolmans MM, Demylle D, et al. 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Toussaint Définition – « La dyspnée est une expérience subjective d’inconfort respiratoire. Cette expérience est le résultat de différentes composantes : facteurs physiologique, psychologique, social et environnemental » (définition de l’American Thoracic Society) [3,30] ; – il n’existe pas de corrélation réelle entre l’intensité de la dyspnée et les anomalies objectives de la fonction pulmonaire, représentée par les éléments cliniques : mesure du peak flow, saturation en O2, capacité vitale, spirométrie [12,13,20]. Dans une étude, 60 % des patients dyspnéiques ont une saturation en O2 supérieure à 90 % [19,20] : – la dyspnée a des répercussions sur la vie quotidienne pour de nombreux patients (marche, travail, retentissement psychologique) [40,43]. Elle a aussi souvent un fort impact sur la famille et les soignants ; – c’est un symptôme difficile à prendre en charge : – difficulté pour le patient à le décrire ; – difficulté pour les soignants à évaluer sa gravité. L’écart entre la dyspnée ressentie et la dyspnée évaluée par des proches ou des soignants extérieurs est plus grand que pour la douleur [43] ; – difficulté pour les soignants à le traiter. C’est un symptôme sous-traité [40]. Un contrôle satisfaisant symptomatique de la dyspnée est moins fréquent que pour la douleur [12]. Tableau 1. Échelle de EORTC, spécifique pour dyspnée : LC 13 du QLQC 30 de l’ORTC Auteur Année Lieu Méthode d’évaluation de la dyspnée Nombre de patients Prévalence de la dyspnée (%) Reuben et Mor [39] 1986 Hospices et services de soins conventionnels Échelle verbale à 5 items (de non à horrible) 1 754 Heyse-Moore et al. [27] 1991 Échelle numérique de 0 à 6 292 Grond et al. [25] 1994 Service douleur Symptômes présents/ absents 1 635, dont 155 cancers du sein Desbiens et al. [16] 1997 Centre de cancérologie 1 556 Bruera et al. [10] Dudgeon et al. [19] 2000 Clinique de traitement de la douleur et des symptômes Centre de cancérologie Échelle verbale à 4 items (non–légère– modérée–sévère) EVA de 0 à 10 49 % de l’ensemble des patients 70 % durant les six dernières semaines de vie 45,3 % des patients qui survivent plus de 56 jours 78 % des patients le dernier jour de vie 24 % de l’ensemble des patients 28 % des patientes atteintes d’un cancer du sein 48 % Vainio et al. [45] 2001 1996 7 centres de soins palliatifs EVA de 0 à 10 EVA Prévalence Selon les études en cancérologie (Tableau 1), 21 à 79 % des patients présentent une dyspnée [12,16,19,25,27,39, 45]. Ces études montrent une importante variation car : – la population étudiée est hétérogène : type et stade de cancer ; – hétérogénéité des outils d’évaluation. Prévalence de la dyspnée chez les patientes atteintes d’un cancer du sein : peu d’études sont retrouvées. L’incidence la plus élevée se trouve dans le cancer du poumon, elle est non négligeable dans le cancer du sein. En effet, ilexiste une différence significative de l’incidence de la dyspnée selon le site primitif (p < 0,0001), cela ne préjugeant en rien de l’intensité de la dyspnée [45]. Dans une étude de Dudgeon et al., 923 patients cancéreux ont été inclus, dont 297 étaient porteurs d’un cancer du sein. Cinquante et un pour cent de ces patientes étaient dyspnéiques (échelle visuelle analogique [EVA] ≥ 3/10) [19]. Grond et al. [25] ont effectué une étude portant sur 1 635 patients en phase avancée, dont 155 étaient porteurs d’un cancer du sein. Vingt-huit pour cent de ces patientes étaient dyspnéiques. 135 patients en phase avancée 923, dont 927 cancers du sein 1 640, dont 186 cancers du sein 55 % (EVA ≥ 3) 49 % de l’ensemble des patients 51 % des patientes atteintes d’un cancer du sein 20 % de l’ensemble des patients 24 % des patientes atteintes d’un cancer du sein (46 % dans du poumon) La dyspnée est un facteur de mauvais pronostic. Elle est plus fréquente dans les phases terminales [27,39]. L’European Association for Palliative Care (EAPC) a identifié des facteurs significatifs de mauvais pronostic en phase avancée de cancer : la dyspnée, ainsi que l’anorexie cachexie, et les troubles cognitifs sont les trois symptômes cliniques significatifs, indépendants de mauvais pronostic [32] (recommandations de grade B). Facteurs associés Anxiété Dans plusieurs études [1,10,20,29], l’intensité de la dyspnée est corrélée à l’intensité de l’anxiété. Il s’agit d’une corrélation statistiquement significative : p = 0,003 dans l’étude de Dudgeon et al., p = 0,001 dans une autre étude de Dudgeon et al. [10,20]. Cette corrélation est difficile à interpréter, l’anxiété pouvant contribuer à la dyspnée mais pouvant aussi en être la conséquence [10]. Fatigue Il n’existe pas de corrélation évidente [1,10,20,29]. RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 779 780 Évaluation ONCOLOG IE L’évaluation de la dyspnée est celle d’un symptôme et non pas de la fonction respiratoire. Elle fait appel à des échelles d’autoévaluation. L’évaluation est importante car : – la dyspnée est souvent sous-estimée par le corps médical ; – la dyspnée perturbe la qualité de vie chez de nombreux patients ; – une détection précoce permet une prise en charge précoce. Évaluation unidimensionnelle C’est l’évaluation de l’intensité ressentie. Outils Dyspnea Numeric Scale (DNS) Elle est cotée de 0 à 10, c’est une EVA. Elle est utilisée par de nombreux auteurs [10,23,31]. Cette échelle a été testée chez des patients avec un PS inférieur ou égal à 3. Elle permet un suivi dans le temps et de juger de l’efficacité des thérapeutiques. Le seuil de la dyspnée est à 3/10. Il a été défini par rapport à des groupes témoins de patients pour lesquels la dyspnée ne représentait pas un problème clinique [1,10]. sein, qui est responsable d’environ un tiers des pleurésies métastatiques [26,33]. Environ la moitié des patientes atteintes de cancer du sein présentent au cours de leur évolution un épanchement pleural [38]. Dans la majorité des cas, ces épanchements pleuraux sont symptomatiques, seulement 25 % restent peu ou pas symptomatiques. Le symptôme est une dyspnée dans 96 % de cas, une douleur dans 56 % et une toux dans 44 % [36]. Selon une série [21] de 105 patientes atteintes d’un cancer du sein avec un épanchement pleural métastatique, le délai moyen entre le diagnostic de cancer du sein et l’apparition de l’épanchement est de 41,5 mois (0 à 256 mois). La survie moyenne à partir de la découverte d’un épanchement pleural est selon trois études respectivement de six mois [38], 15,7 mois [21] et 17 mois. Un nombre important de patientes vont donc vivre longtemps avec leur épanchement pleural. La meilleure prise en charge possible de celui-ci est donc fondamentale pour maintenir leur qualité de vie : – atteinte parenchymateuse pulmonaire ; – lymphangite carcinomateuse ; – obstruction bronchique ou trachéale (intrinsèque ou extrinsèque) ; – atteinte pariétale ; – épanchement péricardique ; – fractures costales. En rapport indirect avec la tumeur Verbal Rating Scale for dyspnea C’est une échelle verbale qui propose comme item : aucune, légère, modérée, sévère [6]. C’est une échelle parfois plus facile à appréhender pour certains patients que le DNS [18]. Sa sensibilité par rapport à l’efficacité des traitements n’a pas été évaluée. Évaluation multidimensionnelle C’est une évaluation plus complète s’intéressant au retentissement sur la qualité de vie. Cancer Dyspnea Scale (CDS) Selon Tanaka et al. [42], elle comporte 12 items s’intéressant aux facteurs suivants : – Cachexie ; – anémie ; – pneumopathie ; – embolie pulmonaire ; – hépatomégalie ; – ascite, météorisme abdominal. Liée au traitement – Pneumopathie, ex. : radiothérapie ; – épanchement pleural, ex. : taxotère ; – cardiopathie, ex. : anthracyclines ; – physique : marche, activités de la vie quotidienne, travail (5 items) ; – embolie pulmonaire, ex. : certaines hormonothérapies. – psychologique : humeur, joie de vivre, anxiété (4 items) ; Indépendantes du cancer – d’inconfort (3 items). Cette échelle est validée chez le patient cancéreux [42], et réalisable en deux minutes environ. Étiologie En rapport direct avec la tumeur – Épanchement pleural métastatique : c’est une cause très fréquente de la dyspnée dans le cancer du – BPCO, insuffisance cardiaque ; – obésité ; – etc. Les mécanismes sont le plus souvent multiples. Il faut souligner le rôle important des muscles respiratoires : rôle de la malnutrition responsable d’une fatigabilité de ces muscles [10]. Ce phénomène pourrait expliquer la dyspnée chez des patients pour qui aucune autre cause de dyspnée n’est retrouvée. Une étude de Reuben et al. [39] rapporte que la cachexie est la seule cause retrouvée de dyspnée dans 24 % des cas. Mesures générales Conduite à tenir pour le diagnostic – installation du patient : prendre son temps, position semi-assise, lit médicalisé ; Évaluer l’intensité de la dyspnée et le vécu du patient – Les mots pour décrire : « respiration courte, manque d’air, oppression, etc. » ; – intensité et répercussions sur la qualité de vie : la dyspnée intervient-elle pour des efforts importants (monter les escaliers, porter des charges), pour des actes quotidiens minimes (toilettes, déplacement lit–fauteuil) ou dépendance totale (alitement permanent) ? Les outils d’évaluation (cf. chap. 4) trouvent ici leur place. Examen clinique – Mesure de la fréquence respiratoire : cette mesure est souvent négligée, mais pourtant d’une importance capitale dans le suivi des thérapeutiques, notamment des morphiniques. La fréquence respiratoire peut aussi constituer un moyen de détection de la dyspnée ; – cyanose, sueurs, tirage ; – tachycardie. Examens paracliniques Les moyens doivent être adaptés à la situation du patient ; deux facteurs à prendre en compte : – l’espérance de vie du patient, son état clinique ; – l’objectif de l’examen paraclinique : celui-ci permettra-t-il une action thérapeutique ? Examens en première intention Il s’agit de la mesure de la saturation en oxygène, de la radiographie pulmonaire et de la numération formule sanguine. Examens à discuter Ils concernent le scanner thoracique, la fibroscopie bronchique, la gazométrie artérielle et l’échographie cardiaque. Traitement Lorsque c’est possible, la cause de la dyspnée doit être identifiée et traitée. Nous n’aborderons pas les traitements spécifiques du cancer, nous développerons par contre des techniques indiquées lors de certaines étiologies (épanchement pleural, obstruction bronchique). Toujours applicables, elles demandent la participation de toute l’équipe soignante et de la famille : – pièce aérée ; – ambiance calme, présence rassurante, explications. Traitements particuliers de certaines causes étiologiques Épanchement pleural métastatique Moyens thérapeutiques Ponctions pleurales itératives. Une ponction pleurale évacuatrice permet dans la majorité des cas une amélioration rapide de la dyspnée. Elle est donc indiquée en première intention, en urgence. Cette amélioration est transitoire. En effet, l’épanchement va récidiver dans 98 à 100 % des cas dans les 30 jours. De plus, des ponctions répétées favorisent la formation d’adhérences qui vont conduire à un cloisonnement de l’épanchement ; rapidement, elles ne permettront donc plus d’améliorer la dyspnée. Elles peuvent être également responsables d’autres complications iatrogènes (pneumothorax, infection, hémorragie). Talcalge pleural par thoracoscopie chirurgicale vidéo assistée (TCVA). Il se fait sous anesthésie générale. Cette technique permet si nécessaire la réalisation de biopsies pleurales de bonne qualité, à visée diagnostique ou permettant d’orienter le traitement (statut hormonal, HER2). Il permet un contrôle de la cavité pleurale, d’évaluer l’extension de la maladie, de détruire d’éventuelles brides, de vider la totalité du liquide pleural, de répartir le talc de façon homogène dans l’ensemble de la cavité pleurale sous contrôle de la vue, de placer les drains également sous contrôle de la vue. Ce geste nécessite en moyenne une hospitalisation de sept jours [21,26,36]. Les taux de mortalité à 30 jours rapportés dans la littérature sont très variables (3 à 24 %) et dépendent très probablement de la sélection des malades. Les séries comportant une majorité de cancer du sein ont les meilleures survies. Les taux de mortalité peropératoire sont très faibles (< 0,5 %). Les taux de complications postopératoires sont autour de 2 % [26,36]. Les complications les plus fréquentes sont la fièvre et la douleur. Les détresses respiratoires (SDRA) sont rares (8 %) mais graves (1 % de mortalité). Les taux de succès rapportés dans la littérature varient de 88 à 97 % [26,36]. Une série de 71 patientes atteintes de cancer du sein rapporte un taux de réussite de 89 % avec un suivi moyen de 22 mois. Cette série ne rapporte aucun décès peropératoire, ni aucune complication perou périopératoire [26,36]. Talcage pleural par drainage percutané simple. Ce geste est réalisé sous anesthésie locale au lit du malade. Les taux de réussite publiés varient de 72 à 94 %. RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 781 ONCOLOG IE 782 Le temps moyen d’hospitalisation est de sept jours. Le taux de complications pulmonaires est un peu inférieur. – amélioration significative de la dyspnée après cette évacuation ; Une étude de Dresler et al. [17] a comparé ces deux techniques de talcage. Quatre cent quatre-vingt-deux patients ont été inclus dont environ 25 % sont des cancers du sein. Les complications pulmonaires semblent un peu moins fréquentes dans le bras drainage simple. Les taux de réussite semblent un peu moins bons dans ce bras que dans le talcage par TCVA, en particulier pour les cancers du sein et du poumon. La durée d’hospitalisation moyenne est identique. Cette technique est moins coûteuse. – absence d’autres causes de dyspnée, en particulier absence de lymphangite (TDM thorax) ou d’obstruction bronchique (fibroscopie bronchique) ; ® Cathéter pleural tunnellisé (PLeurX ). Ce geste est réalisé sous anesthésie locale, dans une salle de bloc. Il utilise un matériel spécifique PleurX®. L’évacuation du liquide se fait ensuite régulièrement à domicile par le patient lui-même ou une infirmière. Deux études importantes ont été publiées. Une première de Warren et al. [47] concerne 202 patients dont la moitié sont des cancers du sein. Les complications infectieuses sont rares (3,8 %) et, dans la majorité des cas, localisés au point d’insertion. Le cathéter s’est bouché dans 4,8 % des cas, mais plus rarement parmi les cancers du sein. Le cathéter a pu être retiré chez 69 % des patientes atteints de cancer du sein. Une récidive de l’épanchement est survenue chez 3,8 % des patients ; il n’a pas nécessité de geste de drainage dans la majorité des cas. Une seconde étude de Tremblay et al. [44] concerne 223 patients dont 20 % de cancer du sein. Dans cette étude, on retrouve une disparition complète de la dyspnée chez 53,3 % des patientes atteintes de cancer du sein. Cathéter à chambre implantable (CCIP). Cette technique n’est rapportée, à ce jour, que par une seule équipe [15]. Leur expérience porte sur le suivi prospectif de 26 patientes dont 22 sont porteuses d’un cancer du sein. La pose était effectuée sous sédation. Le cathéter est introduit par le troisième ou cinquième espace intercostal sur la ligne axillaire moyenne, sous contrôle d’un amplificateur de brillance. La chambre est placée au niveau de la ligne axillaire moyenne, en regard des 10e, 11e ou 12e côtes. Les ponctions pleurales évacuatrices étaient ensuite réalisées à l’hôpital par un médecin ou une infirmière en fonction de l’évolution de la dyspnée. Tous les patients (96 %) ont eu une amélioration partielle ou totale de leur dyspnée. Il n’a été observé aucune complication au décours immédiat de la pose, aucune hospitalisation en rapport avec une complication, aucun dysfonctionnement à type d’obstruction définitive. Les auteurs concluent donc que l’utilisation du CCIP pourrait être une alternative thérapeutique intéressante dans la prise en charge ambulatoire des pleurésies métastatiques. Indications – survie estimée supérieure à six mois ; pas de contre-indication à une anesthésie générale ; – nécessité de biopsies. Talcage pleural par drainage simple : – réexpansion complète du poumon après évacuation de l’épanchement par drainage ; – amélioration significative de la dyspnée après cette évacuation ; – absence d’autres causes de dyspnée, en particulier absence de lymphangite (TDM du thorax) ou d’obstruction bronchique (fibroscopie bronchique) ; – survie estimée supérieure à trois mois. Cathéter pleural tunnellisé (PleurX®) : – absence de réexpansion du poumon après drainage ; – espérance de vie estimée inférieure à trois mois. CCIP. Trop peu de données à ce jour. Obstruction bronchique C’est une cause rare de dyspnée, mais dont le diagnostic doit être fait, car il peut permettre une prise en charge spécifique efficace. De plus, il s’agit souvent de dyspnée aiguë dont la prise en charge est donc urgente. En fonction de la cause de l’obstruction bronchique (tumeur bourgeonnante endoluminale, compression extrinsèque ou lésion mixte), plusieurs techniques d’endoscopie interventionnelle peuvent être utilisées. Les lésions bourgeonnantes peuvent être traitées par résection laser assistée ou de plus en plus souvent maintenant par thermocoagulation à haute fréquence. Les compressions extrinsèques sont les indications privilégiées des prothèses. Les prothèses utilisées doivent être étanches pour limiter le risque de récidive tumorale à travers la prothèse. Elles sont le plus souvent en silicone, parfois métallique couverte. Souvent, la composante endoluminale doit être traitée avant de mettre en place la prothèse. Ces techniques sont réalisées le plus souvent sous bronchoscope rigide sous anesthésie générale. Elles peuvent permettre de passer un cap avant la mise en place d’un traitement de fond (chimiothérapie, radiothérapie). Elles s’adressent à des patients dont l’état général et le pronostic justifient ces techniques lourdes. Traitements symptomatiques médicamenteux Talcage pleural par thoracoscopie chirurgicale vidéo assistée (TCVA) : Oxygénothérapie – réexpansion complète du poumon après évacuation de l’épanchement par drainage ; L’utilisation de l’oxygénothérapie chez les patients atteints de cancer en phase avancée a été très peu Tableau 2. O2 versus air Auteur Année Nombre de patients Traitement Critère d’inclusion Évaluation VAS Résultat Philip et al. 2006 [37] 51 VAS > 30 Au repos Effet nul, pas de différence significative entre air et O2 Bruera et al. 2003 [12] 33 28 cancers du poumon 8 cancers du sein 4 cancers colorectaux 31 cancers du poumon 31 métastases pulmonaires 14 À l’effort (après 6 minutes de marche) Au repos Effet nul, pas de différence significative entre air et O2 Bruera et al. 1993 et Bruera et al. 1993 [7,11] Saturation O2 >90 % HB > 10 Saturation O2 < 90 % Booth et al. 1996 [4] 38 Au repos Effet positif, pas de différence significative entre air et O2 5 cancers du poumon 6 métastases pulmonaires 2 épanchements pleuraux 1 lymphangite 20 cancers pulmonaires 2 mésothéliums 16 autres cancers étudiée : nous retrouvons quatre essais randomisés en double insu (Tableau 2). Ce sont des études où l’oxygène est étudié versus air. Le traitement est instauré pendant une heure à la dose de quatre à cinq litres par minute, puis la dyspnée est évaluée. Pour trois des études, l’évaluation est effectuée au repos et pour l’une d’entre elle, la dyspnée est évaluée à l’effort (après six minutes de marche). Dans deux études, nous ne retrouvons pas d’effet bénéfique significatif, que ce soit avec l’oxygène ou avec l’air. Dans l’étude de Booth et al. [4], nous retrouvons la même efficacité de l’oxygénothérapie et de l’air. L’oxygénothérapie montre un effet bénéfique significatif par rapport à l’air dans l’étude de Bruera et al. [7], qui évalue la dyspnée chez des patients au départ hypoxiques. Nous observons dans toutes ces études que la saturation de l’oxygène augmente avec la supplémentation d’O2, comme nous pouvions nous y attendre. Nous ne notons pas d’effet secondaire notable. Il est difficile de tirer des conclusions de ces quelques études incluant peu de patients. Au total : – En soins palliatifs, l’oxygénothérapie est controversée : restriction des activités du patient ; entrave de la communication ; dépendance psychologique : le patient ne parvient plus à se passer d’oxygène même quelques minutes, risque d’anxiété majeure si problème technique dans le fonctionnement de l’oxygénothérapie ; Amélioration significative de la dyspnée sous O2 Nous préconisons une approche individualisée, au cas par cas, pour la prescription de l’oxygénothérapie (accord d’experts). Pas d’oxygénothérapie systématique. Les effets délétères doivent être pris en compte, en balançant les effets positifs pour chaque individu. Il paraı̂t raisonnable de prescrire de l’oxygène pour les patients dyspnéiques avec une saturation inférieure à 90 % (accord d’experts) et d’évaluer si l’augmentation de la saturation en oxygène s’accompagne d’un soulagement de la dyspnée. Un essai peut être entrepris néanmoins chez les patients avec une saturation normale. Réévaluer la dyspnée et la tolérance de l’oxygène régulièrement. Nous n’avons pas assez de données pour définir un débit, seule la clinique compte. Morphinothérapie Nous retrouvons six études randomisées entre 1993 et 2006 dont quatre en crossover (Tableau 3) [28]. Nous observons donc peu d’études, incluant peu de patients (au total 256). Peu de cancers du sein. Les études par voie orale et parentérale donnent des résultats positifs. Les études par nébulisation ne montrent pas d’efficacité. Le mode d’action de la morphine reste controversé. Plusieurs mécanismes sont avancés : – réduction de la sensibilité à l’hypercapnie ; – diminution du rythme respiratoire, avec diminution d’hyperventilation et diminution d’espace mort ; sécheresse buccale ; – meilleure tolérance à la fatigue musculaire ; risque de combustion ; – réduction de l’anxiété ; coût de l’oxygénothérapie à domicile ; humidificateur bruyant et encombrant à domicile. – amélioration de la fonction cardiaque avec vasodilatation et diminution de la précharge. RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 783 784 ONCOLOG IE Tableau 3. Utilisation de la morphine Auteur Année Type d’interventions Nombre de patients Nature du cancer EVA (0 à 100) Effets secondaires Résultat Bruera et al. 1993 [8] Morphine s.c. versus placebo 10 Cancer poumon, 7 Métastase poumons, 3 Morphine s.c. ! my EVA : 14 Placebo s.c. ! my EVA : 32 Non reportés Filshie et al 1996 [22] Morphine nébulisation versus placebo 79 Cancer poumon ou métastase poumon Non reportés Grimbert et al. 2004 [24] Morphine nébulisation versus placebo Morphine s.c. versus morphine nébulisation 12 Cancer poumon ou métastase poumon Cancer pulmonaire, 7 Métastase pulmonaire, 5 Nébulisation morphine ! variation EVA : 0,84 Nébulisation placebo ! variation EVA 0,64 Pas d’EVA Échelle verbale Amélioration significative de l’EVA (45 minutes après injection) Pas d’amélioration significative (60 minutes après nébulisation) Pas d’amélioration significative Morphine s.c. ! EVA : moyenne à 30 Morphine nébulisation ! EVA moyenne à 20 Sédation Morphine à différents dosages sous-cutané et oral 33 + 25 % de dose du traitement de fond ! EVA : m! à 37 + 50 % de dose du traitement du fond, ! EVA : m ! à 39 Non reportés Bruera et al. 2005 [9] Allard et al. 1999 [2] 12 Cancer poumon, 21 Cancer du sein, 6 Autres, 6 Non reportés Pas d’efficacité significative Pas de différence significative entre sous-cutané et nébulisation Amélioration significative Pas de différence entre les doses Au total : Nous pouvons retenir l’indication des opioı̈des pour le soulagement de la dyspnée (accord d’experts). Les doses sont à adapter par titration, selon la tolérance et l’efficacité. traitement. Pas de modification significative de la saturation en oxygène sous morphine. Les doses initiales recommandées sont les suivantes : Nous retrouvons une seule étude étudiant l’effet d’une benzodiazépine sur la dyspnée en phase avancée de cancer. – patients déjà sous morphine : – dyspnée aiguë : 1/10e de la dose journalière ; – dyspnée permanente : augmentation de 30 % de la dose reçue ; – patients naı̈fs de morphine : – dyspnée aiguë : 5 mg p.o. ou 2,5 mg s.c. ; – dyspnée permanente : 5 mg p.o. toutes les quatre heures ou 2,5 mg s.c. toutes les quatre heures ou 15 mg par 24 heures en i.v. Ces doses sont à réadapter et à augmenter par palier de 30 % selon la tolérance et l’efficacité. La fréquence respiratoire est un élément important de surveillance. Benzodiazépines La benzodiazépine utilisée est du midazolam pour voie sous-cutanée [35]. L’auteur discerne trois groupes qui comprennent chacun 30 patients : – premier groupe : patients sous morphinique seul en continu par voie sous-cutanée. Le midazolam est administré au coup par coup en cas de crise dyspnéique à la dose de 5 mg ; – deuxième groupe : patients sous midazolam en continu par voie sous-cutanée. La morphine est administrée en cas de crise, à la dose de 2,5 mg par voie sous-cutanée ; L’administration de morphine en nébulisation n’a pas fait la preuve de son efficacité (accord d’experts). – troisième groupe : patients sous morphine + midazolam en continu en voie sous-cutanée. En cas de crise, la morphine est administrée en plus par voie sous-cutanée à la dose de 2,5 mg. Nous notons peu d’effets secondaires. Les effets indésirables retrouvés sont ceux couramment liés à la prise de morphiniques (nausées, vomissements, somnolence, constipation, etc.), mais aucun effet indésirable vital n’a pu être mis sur le compte du Il s’agit d’une étude en simple insu, le médecin ayant connaissance du traitement utilisé. Aucun patient ne recevait par ailleurs de l’oxygène ou une corticothérapie. L’évaluation est effectuée par EVA au bout de 24 heures de traitement, puis au bout de 48 heures. Vingt pour cent des patients sont porteurs d’un cancer du sein. Les meilleurs résultats sur le plan de l’efficacité sur la dyspnée ont été obtenus dans le groupe qui recevait l’association en continu de morphine + midazolam, avec un meilleur soulagement de la dyspnée et moins de crises dyspnéiques. Par ailleurs, nous notons plus d’effets secondaires dans le groupe traité par morphine seule en continu et moins d’effets secondaires dans le groupe traité par morphine + midazolam en continu. Au total, la seule étude qui s’intéresse au rôle du midazolam en association avec la morphine montre des effets bénéfiques sur la dyspnée supérieurs au traitement morphinique seul, sans augmentation de la somnolence. Nous savons que l’intensité de la dyspnée est corrélée avec le degré d’anxiété. Il est donc logique de préconiser particulièrement chez les patients anxieux, un traitement par benzodiazépine (accord d’experts). Le midazolam semble adapté. La dose efficace s’obtient par titration, en commençant à la dose de 0,25 mg/h par voie sous-cutanée ou en intraveineux (50 % chez les sujets âgés). Aucune autre benzodiazépine, notamment par voie orale, n’a été étudiée dans ce contexte. Corticostéroı̈des Leur rôle semble intéressant lorsqu’il existe un syndrome obstructif. Nous ne retrouvons pas d’étude sur l’efficacité de la corticothérapie par voie systémique sur la dyspnée en phase avancée d’une pathologie cancéreuse. Néanmoins, ce traitement est utilisé en pratique clinique très fréquemment, notamment dans les cas suivants : syndrome cave supérieur, lymphangite carcinomateuse, bronchospasme, œdème laryngé, fibrose pulmonaire. Approches non pharmacologiques Quelques études pilotes [5,14,34] se sont intéressées à différentes méthodes, proposées le plus souvent par des infirmières cliniciennes : exercices de relaxation, contrôle d’exercices respiratoires, support psychosocial. Le but est d’augmenter la tolérance individuelle à une fonction respiratoire restreinte. Les résultats sont globalement encourageants en termes de score de dyspnée, de score de qualité de vie (score OMS). Nous recommandons aux infirmières et équipes soignantes d’engager des démarches dans ce sens. Une étude par acupuncture [46] a été retrouvée, ne montrant pas d’efficacité supérieure au placebo. Cas particulier : détresse respiratoire asphyxique Il s’agit d’une situation aiguë à risque vital immédiat, dans un contexte de phase terminale d’une pathologie cancéreuse. Cette détresse respiratoire est considérée comme un syndrome physique réfractaire, vécu comme insupportable par le patient. La Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP) a émis des recommandations dans ce cas précis [41] « la sédation en phase terminale pour détresse est la recherche par des moyens médicamenteux, d’une diminution de la vigilance pouvant aller jusqu’à la perte de conscience, dans le but de diminuer ou de faire disparaı̂tre la perception d’une situation vécue comme insupportable par le patient, alors que tous les moyens disponibles et adaptés à cette situation ont pu lui être proposés et/ou mis en œuvre sans permettre d’obtenir le soulagement escompté par le patient ». La SFAP propose un protocole de sédation dans ces cas extrêmes. Le médicament retenu est le midazolam, administré par voie veineuse : midazolam à la concentration de 0,5 mg/ml : – injecter 1 ml (0,5 mg) toutes les deux à trois minutes jusqu’à obtention d’un score de 4 à l’échelle de Rudkin ; – noter le nombre de milligrammes nécessaires à l’induction ; – entretenir la sédation en prescrivant une dose horaire égale à 50 % de la dose utile à l’induction, en perfusion intraveineuse continue. Il est capital de poursuivre les mesures d’accompagnement auprès du patient et de ses proches pendant la sédation [41]. Références 1. Ahles TA, Ruckdeschel JC, Blanchard EB (1984) Cancer-related pain. II. Assessment with visual analogue scales. J Psychosom Res 28(2): 121-4 2. Allard P, Lamontagne C, Bernard P, Tremblay C (1999) How effective are supplementary doses of opioids for dyspnea in terminally ill cancer patients? A randomized continuous sequential clinical trial. J Pain Symptom Manag 17(4): 256-65 3. American Thoracic Society. 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Eur J Cardiothorac Surg 33(1): 89-94 Poursuivre ou non la chimiothérapie palliative symptomatique pour les patients atteints de cancer du sein métastatique Coordonnateur du groupe de travail : C. Bouleuc Groupe de travail : C. Bouleuc, G. Chvetzoff, C. Ciais, M. Magnet, J. Otto, P. Poulain, S. Toussaint Introduction thérapie en fin de vie en fonction de la culture des pays plus que des pathologies : Le cancer du sein métastatique est une des maladies les plus chimiosensibles, pour laquelle les traitements spécifiques permettent d’obtenir une longue survie. En revanche, la poursuite d’une chimiothérapie qui n’est plus efficace entraı̂ne plusieurs conséquences négatives : – aux États-Unis, un taux de prescription de chimiothérapie est de 43 % au cours du dernier mois de vie et de 20 % au cours des 15 derniers jours chez des patients atteints de cancer du poumon [37] ; – le patient peut subir inutilement des effets secondaires délétères, ce qui va à l’encontre du principe éthique de non-malfaisance ; – au Portugal, sur tous types de cancers, on retrouve 37 % de patients recevant une chimiothérapie au cours du dernier mois de vie, et 21 % dans les 15 derniers jours [6] ; – le désir de protection bienveillante qui motive la non-révélation de l’échec du traitement peut avoir pour corollaire l’isolement relationnel du patient, qui constate que la situation médicale s’aggrave sans explication médicale appropriée ; – pour les soignants, l’administration de traitements inefficaces et toxiques est source d’un sentiment d’échec et de culpabilité ; – l’absence de communication autour de la gravité du pronostic et de la chimiorésistance est un frein important à la mise en place d’un projet de soins palliatifs et d’un accompagnement de qualité (le projet de soins reste focalisé sur une notion de guérison entretenue par la chimiothérapie) ; – pour la société, ces traitements inutiles engendrent un surcoût, et il est montré que l’absence d’intégration du pronostic sombre est l’élément qui détermine le plus la demande de soins intensifs inappropriés pour les patients suivis en cancérologie en phase avancée [46]. La définition de la chimiothérapie palliative n’est pas univoque : pour la majorité des oncologues, c’est une chimiothérapie administrée à un patient en phase palliative, donc au stade métastatique (voire localement avancé) dès la première ligne ; pour d’autres, il s’agit plutôt d’une chimiothérapie dont le but est l’amélioration des symptômes et de la qualité de vie, sans augmentation de la survie. Le but de ces recommandations est de mieux définir le bénéfice de la « chimiothérapie palliative symptomatique », soit au-delà de la troisième ligne de traitement spécifique, d’analyser les difficultés que rencontrent les médecins pour communiquer sur le pronostic et de proposer la mise en place d’un consensus décisionnel sur la poursuite ou non de la chimiothérapie palliative symptomatique. Fréquence de la chimiothérapie en fin de vie Plusieurs études récentes montrent des disparités importantes dans la fréquence du recours à la chimio- – en Finlande, on retrouve une prescription de chimiothérapie chez 20 % des patientes atteintes de cancer du sein métastatique au cours de leur dernier mois de vie [2] ; – en Corée, seulement 5,7 % des patients ont été traités dans les 15 jours précédents leur décès [28] ; – au Canada, 4,6 % de patients atteints de cancer du poumon ont été traités dans les 15 jours précédant leur décès [4]. Toutes ces études ont une méthodologie comparable et concernent des cohortes de patients décédés, chez lesquelles, on analyse les traitements spécifiques reçus dans les mois qui ont précédé le décès. En dehors des décès toxiques liés aux traitements et leurs conséquences, la cause du décès est l’évolution tumorale, signifiant l’inefficacité de la chimiothérapie dont l’indication devient alors rétrospectivement questionnable. Cette chimiorésistance est-elle prévisible ? Évaluation de l’impact clinique de la chimiothérapie palliative symptomatique (à partir de la troisième ligne) Impact sur la survie Les résultats des traitements spécifiques semblent avoir nettement augmenté ces dernières années. Dans une étude française sur 343 patients traités entre 1987 et 1993, et 381 traités entre 1994 et 2000, la médiane de survie est de 23 et 29 mois respectivement, avec un taux de survie à trois ans de 27 et 44 % [1]. Cette augmentation de la survie n’est constatée que pour les tumeurs ayant des récepteurs hormonaux positifs. Elle peut s’expliquer par le développement de nouveaux médicaments de chimiothérapie (taxanes, vinorelbine, gemcitabine, capécitabine), d’hormonothérapie (antiaromatases) ou de thérapeutiques ciblées (trastuzumab). Les progrès constatés dans les traitements de RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 787 ONCOLOG IE 788 support peuvent également y contribuer (bisphosphonates, facteurs de croissance hématopoı̈étiques, nouveaux antibiotiques, antalgiques et antiémétiques, etc.). L’apparition de nouveaux traitements spécifiques efficaces constitue le rationnel scientifique pour l’augmentation progressive du nombre moyen de lignes de chimiothérapie reçues par les patients. Mais peu d’études étudient l’impact d’un traitement spécifique effectué au-delà de la troisième ligne, ni même l’ordre successif optimal des diverses chimiothérapies possibles, et il n’existe pas de recommandations sur les traitements spécifiques par la suite. Une étude française rétrospective, qui analyse une cohorte de 934 patientes atteintes de cancer du sein métastatique, montre que la probabilité et la durée de réponse à la chimiothérapie diminuent progressivement avec le numéro de la ligne (Tableau 1) [15], et que seulement cinq patientes sur les 934 de la cohorte répondront à une chimiothérapie en cinquième ligne. Dans ce cas, la question de la durée effectivement gagnée et de la qualité de vie associée, et par conséquent de la signification pour le patient de ce « gain », doit être posée. Il n’y a pas d’étude randomisée dans le cancer du sein métastatique qui compare une chimiothérapie audelà de la troisième ligne avec les meilleurs soins palliatifs. Cela empêche donc de définir clairement l’impact de ces traitements sur la survie. De tels essais cliniques seraient éthiquement difficiles à mettre en place. Les soins de support sont mis en place en même temps que la chimiothérapie palliative dans le but d’améliorer la qualité de vie ; par conséquent, la compliance à cette chimiothérapie, lorsqu’elle est jugée utile pour le patient, devrait être améliorée aussi. Des essais randomisés existent comparant différentes chimiothérapies chez des patientes prétraitées. On admet généralement par extrapolation, qu’une chimiothérapie démontrée supérieure à une autre en matière de survie, le serait aussi, comparée à l’absence de chimiothérapie, compte tenu du taux très faible de décès toxiques réellement répertoriés. En deuxième et en troisième lignes, il existe des essais qui démontrent une augmentation de la survie en faveur de la vinorelbine [27] et du docétaxel [38]. Le bénéfice en termes de survie des chimiothérapies au-delà de la troisième ligne est probablement minime ou nul [8]. Tableau 1. Résultat sur une étude rétrospective selon Dufresne A. et al. [6] Sur 934 patientes Nombre de patientes RO en % DCM en mois 1re ligne 2e ligne 3e ligne 4e ligne 5e ligne 772 505 283 127 55 57 42 28 12 9 9,3 5,9 4,63 4,1 0,23 Nb : nombre ; RO : réponse objective ; DCM : durée de contrôle de la maladie. Liens entre le taux de réponse à la chimiothérapie, la réduction des symptômes et la qualité de vie liée à la santé La qualité de vie liée à la santé est un concept multidimensionnel, subjectif et dynamique dans le temps, qui prend en compte le bien-être physique, psychologique, social ainsi que les capacités fonctionnelles et les symptômes de la maladie [45]. L’évaluation initiale de la qualité de vie est un facteur pronostique puissant dans le cancer du sein métastatique, indépendant, en particulier de l’état général et de la réponse au traitement, ainsi qu’un facteur prédictif de la réponse à la chimiothérapie [13,16,31]. L’évaluation de la qualité de vie au cours du traitement est particulièrement importante dans les situations où le bénéfice attendu de la chimiothérapie est nul [17], car elle permet d’analyser la balance entre l’amélioration des symptômes liée à la régression tumorale et les effets secondaires de la chimiothérapie. Encore faut-il que les échelles de qualité de vie utilisées permettent une exploration adaptée aux patients qui ne guériront pas. Les liens entre l’obtention d’une réponse antitumorale et l’amélioration de la qualité de vie sont maintenant bien établis dans les phases initiales, c’est-à-dire lors des premières lignes de traitement [9,12,40,36]. L’amélioration de la qualité de vie est parfois plus fréquente que la réponse à la chimiothérapie [19,35]. Ce résultat pourrait, pour certains, s’expliquer par une amélioration subjective liée à l’effet « placebo » de la chimiothérapie ou à l’application des soins de support associés. Il peut aussi se comprendre comme un changement de référentiel du patient, directement sous la dépendance d’interventions externes comme la survenue d’un événement majeur de vie, qui fait que les évaluations ultérieures de la qualité de vie ne sont pas basées sur le même niveau, et donc ne sont plus comparables entre elles. Ce phénomène est décrit sous le terme anglo-saxon de response shift [42]. L’évaluation de la qualité de vie n’est pas seulement utile dans les essais cliniques ayant pour but d’analyser les effets de la chimiothérapie palliative. L’utilisation d’un questionnaire QLQC-30 par le médecin en consultation entraı̂ne en soi un bénéfice direct pour le patient [44] et permet parfois aux médecins de découvrir des symptômes ou des difficultés psychosociales qu’ils n’explorent pas systématiquement [14]. Les échelles de qualité de vie ne sont pas adaptées à un patient en situation palliative, et à ce point d’évolution du cancer. Qui peut aujourd’hui affirmer que les échelles de qualité de vie, présentées à un patient palliatif donné, sont bien adaptées à sa situation et seront le reflet réel de ce qu’il considère à cet instant même comme représentatif de sa propre qualité de vie ? Facteurs prédictifs de réponse à la chimiothérapie, facteurs pronostiques palliatifs Les facteurs pronostiques palliatifs retrouvés dans une méta-analyse sur des patients en soins palliatifs (en majorité atteints de cancers avancés) sont les suivants : – l’estimation par le clinicien de l’espérance de vie ; – des symptômes cliniques à type de syndrome anorexie–cachexie ; – dyspnée et troubles cognitifs ; – des facteurs biologiques à type de polynucléose, lymphopénie et augmentation de la CRP [26,32]. Antérieurement, Maltoni et al. ont établi un score pronostique sur 34 points en fonction de l’estimation clinique de la survie, l’indice de Karnofsky, le taux de globules blancs et de lymphocytes [33]. L’application de ce score sur une cohorte de 100 patients atteints de cancers d’origine multiple dont la médiane de survie est de 12 semaines permet de définir une probabilité de survie à un mois de 97, 59 et 25 % respectivement pour les patients ayant un score A, B et C [21]. Plus récemment, une équipe française a permis de construire un score pronostique reposant sur l’indice de Karnofsky, le nombre de sites métastatiques, le taux sérique d’albumine et de LDH. Sur 177 patients atteints de cancers métastatiques avec une espérance de vie inférieure à six mois mais non agoniques (médiane de survie de 58 jours), le score permet de différencier trois groupes : – un groupe avec une survie toujours inférieure à deux mois ; – un groupe avec un taux de survie de 25 % à quatre mois ; – un groupe avec un taux de survie de 80 % à quatre mois [5]. Si l’on demande aux oncologues d’estimer la survie des patients, on observe d’une manière générale que ces derniers surestiment le pronostic des patients en phase avancée, de l’ordre de 30 à 50 % [11,20]. Décision et annonce de l’arrêt de la chimiothérapie Difficultés des oncologues Si la décision de l’arrêt de la chimiothérapie est médicale, parler de fin de vie et de soins palliatifs n’est pas aisé pour les oncologues, en particulier lorsque les patients souhaitent continuer les traitements même agressifs de chimiothérapie [39], mais aussi en raison de leurs difficultés ressenties pour la mise en place de projets de soins palliatifs. Sur 895 médecins membre de l’ESMO, 88,4 % pensent que les oncologues doivent coordonner le projet de soins en fin de vie de leurs patients, mais seulement 42 % se sentent formés pour le faire [10], et moins de 35 % collaborent avec une équipe de soins palliatifs ou de psychologues. En grande partie liée à un manque de formation, cette difficulté de communication peut aussi avoir une origine culturelle. Dans une étude interrogeant 228 oncologues, plus de 60 % des oncologues canadiens pensent que leurs patients veulent être informés du stade terminal pour seulement 26 % des Européens et 18 % des Sud-Américains [7]. Contenu de l’information lors des consultations en phase palliative Les oncologues énoncent fréquemment le pronostic en termes de non-curabilité de la maladie, mais ils évitent des informations pronostiques plus détaillées et l’utilisation de délais ou de statistiques et préfèrent s’exprimer par des métaphores décrivant l’impact émotionnel sur le patient [22]. Ici, se pose donc le principe même d’une information éclairée et des conditions éthiques la permettant. Les informations médicales données lors de consultations ayant pour but de discuter une chimiothérapie palliative concernent surtout l’évolution de la maladie et son incurabilité, mais peu l’arrêt possible de la chimiothérapie et l’existence d’une alternative [30,18], alors que les informations pronostiques sont vagues ou absentes [3,43]. Dans une étude où 16 cas cliniques de patients en différentes situations palliatives sont présentés à 697 oncologues devant se déterminer sur le choix d’un traitement spécifique ou non, l’âge du patient, son désir de poursuivre la chimiothérapie et l’espérance de survie sont les principaux paramètres déterminant le choix thérapeutique [29]. Besoins d’information des patients en phase métastatique initiale Dans une étude australienne sur 126 patients atteints de cancers métastatiques divers dont le diagnostic a été porté dans les six mois, on constate que 80 % des patients souhaitent une information sur la survie si elle est à cinq ans, mais que seulement 60 % souhaitent cette information si la survie est limitée à un an. Cette différence peut être représentative de l’ambivalence des patients : ils souhaitent vraiment connaı̂tre leur situation pronostique, mais de façon bien légitime, ils préfèrent le savoir si ce sont de bonnes nouvelles. Dans cette même étude, 35 % des patients demandent qu’on leur parle de soins palliatifs et de mort au moment du diagnostic, 25 % après que l’on ait vérifié qu’ils souhaitaient vraiment en parler au préalable, et 10 % que le problème ne soit jamais évoqué [23]. Cette grande variabilité des demandes d’information souligne que des compétences spécifiques sont à acquérir pour que les oncologues communiquent de manière adaptée individuellement avec chaque patient. Les mêmes auteurs australiens montrent que plus de 90 % des patients souhaitent que lors de l’annonce du pronostic, l’oncologue ait une attitude réaliste, laissant des questions ouvertes, reconnaissant le patient comme un individu, expliquant la situation médicale, vérifiant qu’il a bien compris, clarifiant ce qui peut être fait ou non. Ils souhaitent aussi qu’il résume ce qu’il dit, et qu’il leur annonce en premier les informations pronostiques les concernant [24]. RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 789 790 ONCOLOG IE Besoins d’information pronostique en phase palliative avancée De nombreuses études montrent que les patients, plus que le public général ou les soignants, souhaitent recevoir une chimiothérapie palliative, même si celleci s’avère très toxique et même si la probabilité d’obtenir un bénéfice clinique est mince, y compris s’il ne s’agit que d’une amélioration de la qualité de vie sans augmentation de la survie [34]. Si elle répond très souvent à une demande d’espoir du patient, la prescription d’une chimiothérapie palliative sans discussion préalable crée un décalage éthiquement questionnable entre ce que l’oncologue et le patient en attendront respectivement. Si les patients ne sont pas informés au préalable et de façon progressive du caractère incurable de la maladie, des objectifs palliatifs de la chimiothérapie, de l’épuisement progressif de l’efficacité des traitements et de l’installation concomitante d’une chimiorésistance globale, l’annonce de l’arrêt des traitements sera incohérente sur un plan rationnel et sidérante sur le plan émotionnel [45]. Recommandations sur l’information pronostique et les modalités de décision de la poursuite ou non de la chimiothérapie palliative symptomatique Toutes ces recommandations sont des accords d’experts Recommandations pour l’information pronostique L’information pas à pas, progressive et adaptée aux capacités d’intégration psychique du patient doit être la base de toute stratégie de communication entre le médecin et son patient. Une stratégie de communication par connivence de ce type a été décrite par Helft [25] dont les principes sont résumés dans le Tableau 2. Recommandations sur les modalités de la prise de décision de la poursuite ou non de la chimiothérapie palliative symptomatique Staff médical (le plus souvent RCP [réunions de concertations pluridisciplinaires] par spécialités d’organe) Le staff médical réuni le plus souvent en RCP analysera les possibilités de poursuite de traitements de chimiothérapies selon la situation médicale. La première étape est une analyse scientifique qui s’appuie sur les référentiels de bon usage du médicament (référence INCa, recommandations des sociétés savantes). C’est la dimension scientifique et technique de la décision et trois alternatives peuvent être discutées : – traitement spécifique avec trois niveaux possibles : le médicament proposé a une AMM, concernant la maladie traitée, situation de prescription temporaire ou situation thérapeutique d’exception ; – inclusion du patient dans un essai clinique ; – proposition de soins palliatifs exclusifs. Réunion en staff de service ± équipe de soins de support L’analyse du besoin et du désir de poursuivre la chimiothérapie du patient comprend l’évaluation par les différents professionnels chacun dans leur domaine de compétence de : – l’intégration progressive par le patient de sa situation médicale et de la compréhension de sa maladie, et de son pronostic ; – les symptômes actuels, les risques évolutifs ; – le pronostic incurable et de l’espérance de vie ; Tableau 2. La stratégie de connivence selon Helft [25] Chronologie Au fil du temps dans un climat de confiance Au rythme du patient Les symptômes émergent, le pronostic se précise Accompagnement jusqu’au bout Contenu Place à l’incertitude honnête en respectant l’espoir du patient Éviter les informations statistiques Procéder par petites touches successives, sous-entendus et communication non verbale Anticipation d’événements négatifs probables, prévision d’événements positifs peu probables – la situation psychologique (état émotionnel, troubles anxiodépressifs), et de la communication avec les proches ; – la situation sociofamiliale (rôle familial, profession), et spirituelle (croyance religieuse, priorités de vie). L’intervention de différents professionnels auprès du patient (professionnels de l’équipe d’oncologie, professionnels des équipes de soins de support) dont celle de soins palliatifs, dans le cadre d’une démarche participative avec restitution narrative des professionnels concernés en réunion de synthèse est souhaitable pour une bonne pratique en raison des éclairages multiples qu’elles apportent sur le patient. Consultation médicale d’annonce Dans une deuxième étape, la décision finale de poursuite ou d’arrêt de la chimiothérapie sera prise en consultation dans le colloque singulier entre le médecin référent et le malade. Le médecin informe non seulement sur les bénéfices possibles ou attendus et les effets secondaires du traitement proposé pour obtenir son consentement réellement éclairé, mais il présente aussi les différentes alternatives thérapeutiques et aide le patient à se prononcer en faveur de l’option choisie. Aides décisionnelles et informationnelles – Lorsque les effets secondaires d’une chimiothérapie palliative symptomatique sont importants avec forte altération de la qualité de vie, celle-ci doit être arrêtée ; – lorsque les patients présentent un cancer métastatique avancé, chimiorésistant et d’évolution lentement progressive, l’arrêt de la chimiothérapie inutile doit être proposé, même pour les patients qui ne sont pas en fin de vie ; – la justification de l’arrêt doit être basée sur la chimiorésistance (et non en fonction de l’état général qui laisse croire que l’on ne tente plus rien, alors qu’il existe encore des médicaments actifs) : rappeler que l’arrêt de la chimiothérapie précédente va entraı̂ner l’amélioration de la qualité de vie par suppression de la toxicité ; affirmer clairement qu’une éventuelle chimiothérapie n’aurait aucun effet positif, mais probablement certains effets secondaires ; ajouter que l’arrêt d’une chimiothérapie inefficace ne va pas provoquer l’accélération de l’évolution de la maladie ; – lorsqu’un patient est à nouveau en état physique de recevoir une ligne de chimiothérapie, la décision de la faire dépend fortement des informations pronostiques données ; toutes les alternatives thérapeutiques doivent être présentées ; – si la chimiothérapie palliative apporte un bénéfice psychologique par l’espoir qu’elle donne, une alternative de prise en charge palliative sans chimiothérapie peut-elle aussi avoir le même impact ? La possibilité d’une stabilisation spontanée du cancer ou d’une évolution lentement progressive, pour une durée limitée mais indéterminée, dans un cadre médical organisé avec un contrôle optimal des symptômes et un accompagnement, constitue une réalité acceptable pour certains patients ; – la pause momentanée de la chimiothérapie représente parfois un compromis satisfaisant. Mais pour les patients qui restent dans une attitude agressive face à leur maladie, le délai d’attente d’une récupération physique autorisant la reprise du traitement sera parfois source d’une grande détresse psychique. La reprise d’un traitement auparavant agressif peut être à l’origine d’une iatrogénie mortelle ; – le besoin d’espoir doit être respecté. Certains patients ne peuvent envisager de rester sans traitement spécifique, pour autant, une chimiothérapie probablement inefficace peut-elle être poursuivie, tout en adaptant la posologie afin d’éviter un risque de toxicité ? – La plupart des patients surestiment leur temps de survie ; cela traduit un besoin vital d’espoir inhérent à la nature de l’être humain ; – participer à une recherche médicale peut être à l’origine d’un nouveau sens à sa vie et accepter une inclusion dans un essai clinique est pour certains parfois source d’espoir ; – l’arrêt des traitements spécifiques doit faire place à un véritable projet d’accompagnement et de soins palliatifs, incluant une prise en charge optimale des symptômes, des besoins psychosociaux et spirituels. Conclusion L’évaluation clinique de la chimiothérapie palliative symptomatique au-delà de la troisième ligne dans le cancer du sein métastatique est pauvre dans la littérature médicale. L’effet sur la survie globale est probablement dérisoire, mais l’obtention d’une réponse objective peut aider l’amélioration des symptômes et de la qualité de vie. Des facteurs pronostiques palliatifs fiables et des échelles d’évaluation de la qualité de vie adaptées manquent. Les difficultés d’annonce de l’arrêt de la chimiothérapie ont plusieurs origines. Les cancérologues se disent concernés par le projet de soin en fin de vie de leurs patients mais n’ont pas été suffisamment formés pour établir seuls un projet de soins palliatifs. Les informations données en consultation sur les buts réels d’une chimiothérapie palliative sont insuffisantes. Une information claire et loyale dans un climat de confiance doit être simplement exprimée aux patients dès la phase initiale de leur maladie métastatique. Au fil du temps, une information honnête, laissant place à l’espoir, utilisant la communication implicite et non verbale, est l’objectif à atteindre, tout en s’adaptant au cheminement de chacun. Si la décision d’arrêter les chimiothérapies reste médicale, elle est prise dans le colloque singulier entre RECOMMANDATIONS / RECOMMENDATIONS 791 ONCOLOG IE 792 le médecin et son patient, après une réflexion faite en multidisciplinarité. Au-delà de la troisième ligne, il faut mettre en place les conditions d’un dialogue avec le patient et ses proches sur la situation médicale actuelle, le pronostic, les objectifs de la chimiothérapie et l’alternative thérapeutique de soins palliatifs isolés. Les décisions médicales ayant une part importante de subjectivité doivent idéalement se partager, en particulier avec les soignants prenant en charge le patient dont les équipes de soins palliatifs. La décision d’arrêt de chimiothérapie est l’une des tâches les plus difficiles pour un oncologue dans sa pratique quotidienne. La qualité des échanges, l’information, la concertation en collégialité vis-à-vis du patient et de ses proches sont les garants d’une prise en charge éthique qui prime sur toute autre considération quelle que soit la décision prise. 14. 15. 16. 17. 18. 19. 20. Références 1. Andre F, Slimane K, Bachelot T, et al. (2004) Breast cancer with synchronous metastases: trends in survival during a 14-year period. J Clin Oncol 22(16): 3302-8 2. Asola R, Huhtala H, Holli K (2006) Intensity of diagnostic and treatment activities during the end of life of patients with advanced breast cancer. Breast Cancer Res Treat 100: 77-82 3. Audrey S, Abel J, Blazeby JM, et al. (2008) What oncologists tell patients about survival benefits of palliative chemotherapy and implications for informed consent: qualitative study. BMJ 337: a868 4. 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