COMMENTAIRES D3- D4/MECANISME Une éruption volcanique

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COMMENTAIRES
D3- D4/MECANISME
Une éruption volcanique peut avoir de nombreux effets sur l'atmosphère et la
météorologie. Il faut ici distinguer les effets troposphériques en général limités
géographiquement et temporellement, des effets stratosphériques qui peuvent
concerner le globe terrestre et durer des mois, seuls ces effets peuvent entraîner
un « hiver volcanique ». Les matières - gaz et poussières - éjectées à haute altitude
par les éruptions les plus puissantes se répartissent assez rapidement sur une
grande surface terrestre, en raison des courants aériens. Certains des gaz
volcaniques réagissent alors avec l'air et forment des aérosols perturbant la
transmission du rayonnement solaire. C'est notamment le cas du dioxyde de
souffre qui forme des gouttelettes d'acide sulfurique en réagissant avec l'eau de
l'atmosphère. L'opacité de la haute atmosphère est accrue : moins de
rayonnement solaire parvient au sol, dans le cas des éruptions les plus
importantes le climat peut ainsi être refroidi sur de vastes zones. Toutefois ce
refroidissement n'est pas le seul effet des aérosols : si à basse altitude la
température baisse, dans la stratosphère les aérosols déclenchent au contraire,
par effet de serre, une élévation des températures. Les aérosols volcaniques ont
donc un effet dynamique sur le climat et agissent non seulement en refroidissant
la basse atmosphère mais aussi en perturbant les courants de la haute
atmosphère. Ces effets sont cependant limités dans le temps : les aérosols
retombent en quelques mois. Les plus puissantes éruptions peuvent cependant
occasionner la présence d'aérosols sur une durée de 1 à 3 ans. Une éruption
volcanique agit donc sur le climat en fonction de la violence de l'éruption, de la
composition des éjectats, mais aussi de la position du volcan. Un volcan situé dans
la zone équatoriale disperse plus largement et plus rapidement ses aérosols dans
l'atmosphère et a donc plus facilement un effet global sur l'atmosphère. Enfin
l'effet de l'éruption dépend aussi de la date d'éruption dans l'année ainsi que de
l'état du système climatique au moment de l'éruption (par exemple la vigueur de
l'ENSO).
D5 EFFFETS SUR LE VIVANT
Les causes d'un phénomène dit de goulot d'étranglement sur les populations du
vivant, c’est-à-dire une chute brutale des populations d'espèces suivie
immédiatement par une période de grande divergence génétique parmi les
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survivants — peuvent être attribuées aux hivers volcaniques les plus importants,
comme celui du Toba. Selon l'anthropologiste Stanley Ambrose, de tels
évènements diminuent l'importance de populations à des niveaux suffisamment
bas pour que des évolutions puissent survenir plus vite sur de petites populations
d'individus et produire une rapide « différenciation de population ».
D7/ CAS TEMBORA
Les perturbations climatiques inhabituelles de 1816 eurent le plus grand effet sur
le nord-est américain, la Nouvelle-Angleterre, les provinces maritimes du Canada,
Terre-Neuve et l'Europe du Nord. Habituellement, la fin du printemps et l'été au
Nord-Est des États-Unis sont relativement doux : les températures quotidiennes
moyennes sont d'environ 20--25 °C et les températures minimales descendent
rarement au-dessous de 5 °C. La neige d'été est extrêmement rare, bien qu'en mai
des rafales de neige puissent se produire quelquefois.
En mai 1816, pourtant, le gel détruisit la plupart des récoltes qui avaient été
plantées et en juin deux grands blizzards dans l'Est du Canada et en NouvelleAngleterre entraînèrent de nombreux morts. C'est presque un pied de neige, soit
trente centimètres, qui fut observé dans la ville de Québec au début de juin. En
juillet et août, on vit de la glace sur les lacs et les rivières aussi loin vers le sud
qu'en Pennsylvanie. Des différences rapides et extrêmes de température étaient
habituelles ; des températures normales ou proches de la normale en été, allant
jusqu'à 35 °C, pouvaient tomber au-dessous de zéro en quelques heures. Même si
les fermiers au Sud de la Nouvelle-Angleterre réussirent tout de même à amener
quelques récoltes à maturité, le prix du maïs et des autres céréales monta de
façon effrayante. L'avoine, par exemple, passa à 92 ¢ le boisseau contre 12 ¢
l'année précédente. L'économie basée sur les chevaux allait être profondément
affectée par la pénurie d'avoine.
À la suite de cette série d'éruptions volcaniques, les récoltes dans les régions
citées plus haut avaient souffert pendant plusieurs années ; le coup de grâce fut
porté en 1815 avec l'éruption du Tambora. En Amérique, beaucoup d'historiens
parlent de l'« Année sans été » comme d'une motivation essentielle pour le
mouvement vers l'Ouest et le peuplement rapide de ce qui est maintenant l'Ouest
et le centre de l'État de New York et du Middle-West américain. En Nouvelle2
Angleterre un grand nombre d'habitants furent victimes de cette année et ce sont
des dizaines de milliers de fermiers qui partirent pour le Middle-West
septentrional (qui constituait alors les Territoires du Nord-Ouest), où ils espéraient
trouver un sol plus riche et de meilleures conditions de croissance pour la
végétation.
L'Europe, qui ne s'était pas encore rétablie suite aux guerres napoléoniennes,
connut une crise alimentaire. Des émeutes de subsistance éclatèrent en GrandeBretagne et en France, et les magasins de grains furent pillés. La violence fut la
pire en Suisse, pays privé d'accès à la mer, où la famine força le gouvernement à
déclarer l'état d'urgence. Des tempêtes d'une rare violence, une pluviosité
anormale avec débordement des grands fleuves d'Europe (y compris le Rhin) sont
attribuées à l'événement, comme l'était le gel survenu en août 1816. Un
documentaire de la BBC réalisé en Suisse estimait que les taux de mortalité en
1816 étaient cette année-là deux fois supérieurs à la moyenne avec au total deux
cent mille morts.
L'éruption du Tambora donna aussi en Hongrie un exemple de neige marron.
L'Italie connut quelque chose d'analogue, avec de la neige rouge qui tomba tout
au long de l'année. On croit que la cause en était la cendre volcanique contenue
dans l'atmosphère.
En Chine, les températures exceptionnellement basses de l'été et des trombes
d'eau furent désastreuses pour la production de riz dans la province du Yunnan au
Sud-Ouest, avec comme résultat une famine générale. Fort Shuangcheng,
aujourd'hui dans la province de Heilongjiang, signala que des champs avaient été
ravagés par le gel et qu'en conséquence les conscrits désertaient. Des chutes de
neige en été se produisirent en différents endroits dans les provinces de Jiangxi et
d'Anhui, toutes les deux dans le Sud du pays. À Formose, pourtant sous un climat
tropical, on vit de la neige à Hsinchu et à Miaoli, et du gel à Changhua.
Plus anecdotiquement, il est souvent rappelé que c'est durant les longues journées
froides et pluvieuses de cet été que Mary Shelley conçut l'idée de son roman
Frankenstein.
Un exemple : la misère à Heiligenstein
Sur le mur d'une maison à Heiligenstein, en Alsace, on peut lire : En l'année 1817
cette chaumière a été construite ; cette année-là on payait 120 francs pour une
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mesure de froment, 24 francs pour un sac de pommes de terre, 100 francs pour un
Ohmen (50 litres) de vin. Jacob Stiedel. Léonard Nebinger (né en 1794), qui fut
maire de Heiligenstein (Bas-Rhin), raconte de façon saisissante dans ses mémoires
cette année épouvantable2 :
1817 fut une année d'une invraisemblable cherté. Le quart de blé valait 150 francs.
Il y eut peu de vin et il était aigre. Huit jours avant les vendanges la neige tomba
jusqu'à la hauteur d'une moitié de chaussure, si bien qu'en grand nombre les ceps
se brisèrent et que de nombreux arbres sur le ban de la commune et dans la forêt
rompirent sous la neige. Cette année-là on ne put travailler le sol des vignes tant il
avait plu. Dans ce trimestre de disette un ohm de Klevener de 1811 valait 80
francs, un quarteau de blé 150 francs, un sac de pommes de terre 24 francs, une
mesure de haricots de 15 à 16 sous. Les paysans sur le marché n'arrivaient plus à
savoir ce qu'ils devaient demander, si bien que plus d'une fois, quand ils avaient
exagéré, les gens renversaient ce qu'ils avaient sur leur étalage et les pauvres, qui
se tenaient derrière eux le leur volaient, imités souvent par les gradés allemands
qui étaient encore dans la région3. Les pauvres allaient en forêt, dans les coupes,
cueillaient des herbes, les faisaient cuire, les hachaient comme du chou et les
mangeaient. Mais tout ce qu'on arrivait à manger cette année-là ne nourrissait
pas, si bien que les gens avaient encore faim une heure après. Bien des gens
périrent d'inanition dans les environs de Strasbourg et l'on trouva deux enfants
morts dans un champ de trèfles où ils avaient mangé de jeunes pousses.
D8 ETNA/SANTORIN
Etna : une des plus anciennes descriptions d’un hiver volcanique se trouve dans
les Vies de Plutarque : « Il y eut aussi l’obscurcissement de la lumière du soleil :
toute cette année-là, en effet, son disque resta pâle ; il n’avait aucun rayonnement
à son lever et ne produisait qu’une chaleur faible et languissante, l’air demeurait
ténébreux et lourd parce que la chaleur qui le traversait était trop faible, et les
fruits à demi-mûrs, se gâtaient et pourrissaient avant d’être parvenus à terme, à
cause de la fraîcheur de l’atmosphère. Marqua, avec le passage d’une comète,
l’imagination des contemporains. Conséquences climatiques de cette éruption et
effets sur les sociétés antiques très peu connus.
Santorin : on sait par ailleurs depuis peu que l'éruption fut plus puissante que ce
que l'on pensait auparavant. Ses conséquences sur les sociétés antiques restent du
domaine de la spéculation.
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