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Faculté de Psychologie
et des Sciences de l’Education
Service des Prof. Pourtois et Desmet
Place du Parc, 18
7000
Mons
tél. 065 373110
Une méthodologie de l’évaluation
de l’état de danger
(Dans le cadre du Décret de la Communauté Française de Belgique
relatif à l’Aide à la Jeunesse, mars 1991)
RAPPORT DE RECHERCHE
Directeurs de recherche : Prof. J.-P. Pourtois et H. Desmet
Chercheur : V. Braconnier
Collaborateurs scientifiques : B. Humbeeck, Prof. B. Terrisse
1. OBJET ET MẺTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
1.1 Objet de la recherche
L’objectif poursuivi dans le présent travail de recherche-action-participante consiste à
construire, en collaboration avec les professionnels du secteur de l’Aide à la Jeunesse, un
cadre conceptuel d’interprétation susceptible de favoriser la mise en place d’instruments
d’investigation adaptés à la fois aux praxis des travailleurs sociaux attachés aux Services
d’Aide et de Protection, ainsi qu’aux réalités vécues par les familles qui font l’objet de ces
suivis.
La problématique de l’évaluation opérationnelle de l’état de danger vécu par l’enfant1 au
sein de sa famille confronte d’emblée le chercheur à un triple enjeu épistémologique :
-
un enjeu juridique ;
-
un enjeu praxéologique ;
-
un enjeu éthique.
(1) L’enjeu juridique
Le contexte d’évaluation de l’état de danger dont il est question dans le présent rapport
s’inscrit dans le cadre du Décret du 4 mars 1991 de la Communauté Française de Belgique
visant notamment à garantir le droit à l’aide spécialisée pour « tout enfant dont la santé ou la
sécurité est en danger ou dont les conditions d’éducation sont compromises par son
comportement, celui de sa famille ou de ses familiers » (art.2.2).
Le Décret s’applique
également « aux jeunes en difficulté ainsi qu’aux personnes qui éprouvent de graves
difficultés dans l’exécution de leurs obligations parentales » (art.2.1).
L’objectif fixé par le cadre légal suppose ainsi, dans un premier temps, de se donner les
moyens de diagnostiquer l’état de danger, d’évaluer la qualité des conditions éducatives et
d’envisager le contexte d’obligation parentale dans lequel ils se manifestent.
Le Décret prévoit en outre que l’aide apportée au jeune doit tendre à lui permettre de se
développer dans des conditions d’égalité de chances, en vue de son accession à une vie
conforme à la dignité humaine (art. 3). Il pose également que les mesures et les décisions
1
Nous employons les termes « enfant » ou « jeune » selon les contextes, mais ceux-ci revoient à la même notion
juridique de « mineur ».
2
prises par le Conseiller ou par le Directeur de l’Aide à la Jeunesse envisagent prioritairement
à favoriser l’épanouissement du jeune dans son milieu familial de vie (art.9).
Définie dans un tel cadre légal, la procédure d’évaluation doit donc nécessairement
contenir une dimension téléologique et proposer, une fois posé le diagnostic, des stratégies de
régulation qui y sont adaptées. La démarche d’évaluation formative qui sous-tend ce
processus doit, en outre, être prioritairement réalisée au sein même de la famille explicitement
considérée comme le lieu privilégié d’épanouissement de l’enfant..
L’ensemble du Décret entend également favoriser la déjudiciarisation et la
désinstitutionnalisation de l’aide à l’enfance et à sa famille. Dans un tel paradigme, les
notions d’aide acceptée et d’aide négociée autour desquelles s’articule l’action des S.A.J.
(Services d’Aide à la Jeunesse) sont considérées comme autant de préalables aux mécanismes
d’aide contrainte qui peuvent être stimulés dans le contexte des S.P.J. (Services de Protection
Judiciaire). Cette manière de procéder suppose d’associer d’emblée la famille à l’ensemble
des évaluations qui la concernent.
Ci-après sera développé le cadre conceptuel à partir duquel sont envisagées les réalités du
vécu familial et les outils d’évaluation qui y sont associés. Ceux-ci prennent en compte le
contexte juridique particulier qui, à travers le Décret du 4 mars 1991 relatif à l’Aide à la
Jeunesse, donne à la démarche diagnostique sa nécessaire dimension d’évaluation formative.
C’est pour cette raison, notamment, que seront privilégiés les instruments dynamiques qui
prennent en compte l’évolution des familles dans le temps au détriment des outils statiques
qui permettent une évaluation sommative, mais ne prennent pas en considération la dimension
temporelle et fixent l’évaluation du vécu familial dans un moment donné. C’est aussi pour
répondre aux exigences du Décret que sera adapté le cadre conceptuel en privilégiant,
notamment, les notions de conscience pédagogique, de réflexivité individuelle et de
trajectoire, à travers lesquelles chaque membre du groupe familial est amené à participer au
travail d’évaluation qui le concerne.
En privilégiant la mise en œuvre des procédures de concertation dans le domaine de l’aide
à l’enfance, l’intervenant social est inévitablement amené à adapter ses pratiques en tenant
compte à la fois de la profonde complexités des situations et de leur caractère idiosyncratique.
(2) L’enjeu praxéologique
De nombreux auteurs (Darguenave, Garnier, 2003 ; Castel, 1995 ; Bilodeau, 2005)
dénoncent la « crise » de sens qui, d’une manière générale, affecte le travail social,
notamment lorsqu’il met en jeu des procédures d’évaluation. Cette «crise » paraît notamment
3
liée à l’hétérogénéité des savoirs auxquels le travailleur social doit se référer pour rendre
compte d’une situation vécue par un sujet et/ou sa famille en tenant compte de l’ensemble des
dimensions qui en fondent la complexité. Cette difficulté se manifeste notamment chaque fois
qu’il est amené à réduire cette hétérogénéité épistémologique pour rendre compte d’une
identité individuelle, rapporter une situation particulière ou mettre en évidence la singularité
d’une réalité observée.
Les savoirs généraux, hétérogènes et pluriréférentiels acquis au cours de la formation du
travailleur social tendent ainsi à fonder un corpus de connaissance individuel qui ne lui
permet pas toujours de rendre compte des situations idiosyncratiques auxquelles il est
confronté dans sa pratique professionnelle et de communiquer efficacement à ce propos. C’est
particulièrement vrai dans le domaine de l’Aide à la Jeunesse. La fonction des délégués
(S.A.J, S.P.J) consiste en effet, dans un premier temps, essentiellement, à coordonner
l’observation rigoureuse du fonctionnement familial, à vérifier son effet sur l’enfant et à
rassembler les données de façon à en rendre compte au Conseiller - S.A.J.- ou au Directeur S.P.J.- qui procèderont à leur examen approfondi. L’observation et la transmission des
informations constituent donc deux aspects fondamentaux de la mission du travailleur social
en protection de l’enfance dont les implications sur le devenir des enfants et de leurs familles
apparaissent particulièrement lourdes de sens.
Pour cette raison, la présente recherche-action-participante a rapidement permis de mettre
en évidence l’urgence pour les délégués de disposer d’un référentiel commun à partir duquel
il devient possible d’identifier la situation de danger vécue par l’enfant au sein de sa famille et
d’en rapporter les différentes composantes. Les instruments d’investigation qui seront
transmis dans le présent rapport doivent donc être envisagés en fonction de ce cadre
conceptuel commun qui permet à la fois d’organiser une observation rigoureuse et d’en
faciliter la communication entre les différents intervenants. L’outil référentiel, accompagné
d’un glossaire, vise ainsi à faciliter une prise en considération syncrétique des phénomènes
observés, une compréhension synthétique des données recueillies et une analyse approfondie
du fonctionnement familial
qui soit suffisamment sensible à la complexité des réalités
vécues. A cet endroit, cet instrument pragmatique et heuristique a été conçu comme un outil à
la fois pluridisciplinaire et pluriréférentiel. Il permet ainsi d’envisager chaque perspective
théorique comme un point de vue différent, mais non contradictoire, à partir duquel le
phénomène peut être observé. Il favorise aussi l’intégration de l’ensemble des données
recueillies dans un champ sémantique au sein duquel le point de vue de chaque professionnel
garde sa spécificité tout en s’intégrant dans un langage commun…
4
Les implications praxéologiques de ce paradigme éclectique apparaissent ainsi d’une
importance fondamentale. En outre, elles se font également sentir au niveau éthique.
(3) L’enjeu éthique
Faute d’un référentiel commun, les repères théoriques souvent implicites qui balisent le
point de vue des différents travailleurs sociaux impliqués dans la situation ne reposent,
comme il a été précédemment expliqué, ni sur les mêmes définitions de l’objet d’étude, ni sur
les mêmes fondements théoriques. L’argumentation spécifique, la méthode d’investigation
propre à chaque champ disciplinaire étayent alors le point de vue subjectif à partir duquel
chacun peut être amené à envisager le phénomène maltraitant.
La définition, l’observation, l’analyse et la compréhension des faits de maltraitance
touchent, en effet, généralement, des affects personnels par rapport auxquels il reste difficile
de prendre des distances. La subjectivité de l’observateur devient alors un refuge émotionnel
dont les implications sur le traitement de l’information recueillie se font sentir avec d’autant
plus d’acuité qu’elles s’appuient sur un schéma d’interprétation réducteur et/ou incohérent.
Dans un contexte au sein duquel les critères de l’état de danger ne sont pas définis
explicitement, la méthodologie qui guide leur évaluation se base essentiellement sur les
compétences, l’expérience, la personnalité, (éventuellement l’idéologie) de chacun des
intervenants ainsi que sur la pratique et les procédures internes à chaque service. Ainsi
envisagé, le processus d’évaluation apparaît contaminé à la fois par la subjectivité des
observateurs et le contexte institutionnel spécifique dans lequel ils sont amenés à recevoir et à
transmettre ces informations. La procédure d’évaluation montre ainsi non seulement une
importante perméabilité aux contenus émotionnels, mais impose également un traitement
différencié des informations d’un service à l’autre. Cette hétérogénéité dans le recueil,
l’analyse et le traitement des données explique sans doute pourquoi un nombre important de
parents - mais aussi d’intervenants - considèrent, d’après les observations réalisées au cours
de cette recherche-action-participante, les décisions prises par les S.A.J. et S.P.J. comme
partiellement arbitraires et basées sur des critères essentiellement subjectifs.
Notre recherche a, par ailleurs, également mis en évidence le malaise ressenti par certains
professionnels des S.A.J. et des S.P.J. concernant ce travail d’évaluation. Ils expliquent,
notamment, l’aspect anxiogène de leur fonction en relevant l’impact de leur subjectivité
personnelle dans le processus de prise de décisions qui concerne le devenir de jeunes et de
familles en souffrance. Ils mettent également en évidence les difficultés qu’ils éprouvent à
5
transmettre avec précision et objectivité le contenu de leurs observations… Ce double
mécanisme induit à la fois des difficultés de collaboration avec les différents services qui
fondent l’écosystème de la famille et une importante perte d’énergie utilisée pour réduire les
troubles communicationnels et favoriser une intercompréhension suffisante entre les différents
intervenants.
L’objectivation de l’observation suppose, dans un tel contexte, que le cadre conceptuel
d’interprétation soit à la fois suffisamment large pour intégrer le point de vue théorique de
chacun, suffisamment cohérent pour donner sens aux différentes perspectives et suffisamment
précis pour rendre compte d’une situation complexe sans la réduire à un schème
d’interprétation univoque.
Dans un domaine comme celui de la maltraitance, l’urgence de connaître ne s’est sans
doute jamais fait sentir avec une telle acuité. Les conséquences d’une observation partielle,
morcelée ou fragmentaire de la réalité vécue au sein des familles peuvent être
particulièrement lourdes de conséquences pour le devenir de ceux qui en font l’objet. Il est,
en outre, indispensable que les professionnels impliqués dans l’observation et le traitement de
ces situations puissent prendre des distances par rapport à leurs émotions, sans pour autant
renoncer à leur point de vue sur la situation qu’ils sont amenés à interpréter. Il convient dès
lors de leur proposer un cadre conceptuel suffisamment nuancé pour les amener à préciser
leurs observations, leur fournir des instruments d’investigation qui leur permettent
d’objectiver leurs interprétations et leur donner les moyens d’intégrer les informations
recueillies dans un schéma d’analyse qui prend en compte l’ensemble des composantes de la
réalité observée et résiste à toute tentation de réductionnisme.
1.2 Méthodologie
La méthodologie de la recherche-action-participante qui guide le présent travail a prévu,
dans un premier temps, de fixer clairement les objectifs poursuivis en tenant compte d’un
cahier des charges qui en détermine explicitement les différentes composantes.
Cette étude a été confiée au Service des Professeurs Pourtois et Desmet, à l’Université de
Mons-Hainaut, en vue de :
-
mobiliser le secteur et les différents intervenants autour d un projet commun ;
-
harmoniser et objectiver les pratiques et la méthodologie des différents S.A.J. et
S.P.J. ;
-
développer un langage commun entre les services publics et privés ;
6
-
donner une image plus claire de la philosophie et des pratiques du secteur de l’aide à
la jeunesse ;
-
développer la concertation entre les différents acteurs du secteur de l’aide sociale en
proposant des formations communes au niveau des différents arrondissements ;
-
développer l’utilité de la recherche scientifique en initiant un projet en lien direct
avec l’action et les préoccupations du secteur.
La dynamique de la recherche-action-participante suppose également d’associer
pleinement au processus heuristique les personnes sur lesquelles il porte. Pour cette raison,
nous nous sommes attachés, pendant l’ensemble du processus, à confronter les résultats de
nos investigations aux réalités vécues par les différents acteurs de terrain. Dans cette optique,
les chercheurs se sont ainsi rendus dans l’ensemble des services des S.A.J. et des S.P.J. de la
Communauté Française afin, non seulement de relever les problématiques récurrentes, mais
également de tenir compte des difficultés spécifiques vécues dans chacun des contextes
particuliers. La recherche-action-participante a ainsi impliqué l’ensemble des acteurs sociaux
concernés par la problématique de l’évaluation de l’état de danger vécu par l’enfant au sein de
sa famille en à savoir :
-
les Conseillers et les Directeurs de l’Aide à la Jeunesse ;
-
les délégués et les délégués en chef des S.A.J. – S.P.J. ;
-
les délégués des sections de Prévention Générale ;
-
l’inspection pédagogique, le service S.A.J. – S.P.J., le service des Méthodes ;
-
l’Observatoire de l’Enfance, de la Jeunesse et de l’Aide à la Jeunesse ;
-
des représentants des C.A.A.J. (Conseils d’Arrondissement de l’Aide à la Jeunesse) ;
-
des représentants des services privés agréés et des cinq organismes privés agréés de
formation ;
C’est aussi ce souci de stimuler l’implication participante qui a conduit à l’ouverture, tout
au long du processus de recherche, d’un forum interactif à partir duquel il était possible, sur le
site du C.E.R.I.S. (Centre de Recherche et d’Innovation en Sociopédagogie familiale et
scolaire), d’échanger à propos des outils proposés.
D’autre part, la recherche-action-participante poursuit comme but premier l’activation du
groupe impliqué en vue de son développement. Elle vise aussi à créer de la connaissance utile
aux autres, autrement dit, à trouver des solutions, des moyens disséminables (De Landsheere,
1982). Pour cette raison, la présente recherche-action-participante s’est, durant l’ensemble du
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processus, enrichie d’un dispositif de formation au sein duquel la diffusion des instruments
rendait également possible l’interaction à leur propos.
La procédure de validation des instruments suppose ainsi de soumettre les données
recueillies à une technique de triangulation des sources et des méthodes. Cette manière de
procéder conduit le chercheur à vérifier de manière continue s’il y a bien accord entre son
langage et ses propres valeurs d’une part, et le langage et les valeurs de l’acteur, d’autre part.
Cet aspect concerne la validité de signifiance (Pourtois & Desmet, 1988). Cette démarche
heuristique a justifié la présence constante du chercheur sur le terrain et son souci permanent
d’y valider les observations réalisées.
La triangulation des observations suppose, quant à elle, d’engager plus d’un observateur
pour valider les informations. La procédure à travers laquelle les collaborateurs scientifiques
ont été associés à l’ensemble du processus a permis ainsi d’accroître la validité interne de la
recherche, c’est-à-dire d’assurer l’indépendance des observations et des interprétations par
rapport à des variations accidentelles - le temps, l’expérience et la personnalité du chercheur,
les conditions de collecte des données, etc.- (Pourtois & Desmet, 1988). La description
précise et détaillée des procédures employées pour récolter et interpréter les données et la
rédaction d’un lexique des termes utilisés doivent également être compris dans ce souci
d’accroître la constance interne de la recherche.
En outre , lors de l’interprétation des données, les chercheurs se sont, dans le cadre du
présent travail, attachés à procéder à la consultation de plusieurs spécialistes en participant,
notamment, à des congrès internationaux au cours desquels les résultats de le recherche ont pu
être discutés à différentes étapes de la procédure - Congrès de Las Palmas 2005, Lyon 2006,
etc. - et en soumettant régulièrement les données aux comités de lecture de revues
internationales – Empan, Revue internationale de pédagogie, etc.). Ils ont aussi soumis les
résultats de leurs analyses aux acteurs qui ont participé aux évènements en vue d’une
corroboration (validité phénoménologique ou validité de signifiance des interprétations). Le
travail de contrôle du comité de suivi, la présentation de la recherche dans le cadre du groupe
AGORA ( groupe de réflexion dont font partie des militants de ATD Quart-Monde et de LST
- Luttes Solidarités Travail -, ainsi que des représentants de l’Aide à la Jeunesse) et les
nombreux échanges interactifs organisés dans le cadre de conférences-débats avec des
groupements professionnels
concernés par l’aide à l’enfance – AFAPMS (Association
Francophone des Agents Psycho-Médico-Sociaux), Cité de l’enfance, etc.) doivent être
envisagés dans ce sens.
8
Enfin, le chercheur est resté constamment vigilant quant à la cohérence interne de ses
déductions
en s’attachant notamment à confronter ses interprétations avec le matériel
référentiel de base, c’est-à-dire aux études et aux recherches récentes qui ont permis
l’élaboration des premières hypothèses ainsi qu’à des théories reconnues et bien définies
(validité référentielle).
L’ensemble des précautions méthodologiques développées ci-avant visent donc à donner
au dispositif de recherche-action-participante suffisamment de crédibilité heuristique et de
constance épistémologique interne pour permettre le transfert des données observées dans le
champ praxéologique qui leur donne sens. Cette démarche associant de manière constante les
chercheurs et les acteurs de terrain nous a semblé parfaitement adaptée à l’objet de la
recherche concernée. Dans ce domaine, en effet, l’urgence de connaître ne s’est sans doute
jamais fait sentir avec une telle acuité dans la pratique quotidienne des intervenants.
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2. ẺTAT DES CONNAISSANCES THẺORIQUES
2.1 L’évaluation dans le cadre de l’Aide à la Jeunesse
Le champ d’investigation de la présente recherche étant celui de l’évaluation, il convient,
de prime abord, d’en définir la portée.
En fait, le terme « évaluation » véhicule deux conceptions différentes généralement peu
dissociées. La distinction établie par Hannecart et Blairon (2000) entre le « contrôle » et
l’ « évaluation » en éclaire le sens.
Selon ces auteurs, le contrôle s’opère à partir de normes définies antérieurement à
l’application de celui-ci. Il utilise des instruments standardisés, indépendants de la situation
singulière et des personnes impliquées. La programmation temporelle des contrôles est
connue des différents protagonistes. Enfin, la relation de contrôle est inégale : il s’agit d’une
relation de pouvoir.
Concrètement, la mission de contrôle est une prérogative dominante du S.P.J. Par
exemple,
un directeur, en fonction des attendus d’un jugement, dressera une liste de
directives précises, observables, vérifiables, telles que la fréquentation régulière de la crèche,
de 8h30 à 17h pour un enfant, la mise en place d’un suivi psychologique pour un autre, le
concours d’une aide familiale trois fois par semaine, le suivi psychologique du père etc. Des
réunions programmées permettront la vérification du respect de ces mesures.
Par contre, l’évaluation vise à recueillir une pluralité de points de vue, dans le but de
donner un sens aux observations. Elle cherche à étudier la singularité de chaque situation, à
nulle autre semblable, à partir d’un jugement de synthèse fait sur un ensemble d’informations.
L’évaluation est donc une opération collégiale au cours de laquelle usagers et
intervenants se trouvent dans une position égalitaire et se considèrent comme des ressources
réciproques. D’autre part, la temporalité de l’évaluation n’est pas programmée : c’est lorsque
le besoin s’en fait sentir auprès de l’un des protagonistes qu’elle doit être organisée.
À la différence des réunions de contrôle, les réunions d’évaluation visent à construire
ensemble une nouvelle signification à la situation, à aider le système familial, à s’orienter vers
de nouvelles valeurs. Le pouvoir de définition de la situation est donc collégialement partagé.
Par exemple, suite à de la maltraitance de la part de sa mère, il a été décidé de placer un
enfant chez ses grands-parents maternels. La déléguée du S.P.J. et le service de placement
familial constatent que la situation personnelle et familiale de la mère s’est stabilisée et que
ses relations avec son fils sont positives. Le souhait de la mère de reprendre son fils implique
une prise de position du S.P.J. Une réunion est donc programmée chez le directeur de celui-ci.
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Toutes les personnes concernées y assistent : la mère et son nouveau conjoint, le père de
l’enfant, les grands-parents maternels et paternels, l’avocat de l’enfant, le service de
placement, la déléguée du S.P.J. Le but de la réunion est de faire le point sur la situation et de
lui donner une nouvelle orientation. A l’issue de celle-ci, le directeur du S.P.J. décide d’axer
le travail social sur un retour progressif, mais rapide, de l’enfant chez sa mère.
L’objectif de la présente recherche n’est pas de construire un outil diagnostic qui
risquerait d’instrumentaliser le jeune et sa famille, mais plutôt d’élaborer une méthode de
compréhension des situations de danger, chaque fois différentes, en vue d’aider à la prise de
décision et, ultérieurement, à l’élaboration d’un programme d’aide adapté au jeune et à sa
famille. Cette méthodologie concerne donc autant les moments d’évaluation que les moments
de contrôle des mesures, ceux-ci étant intrinsèquement liés.
Si le contrôle se situe dans une relation hiérarchique par laquelle s’effectue la vérification
des décisions, l’évaluation s’inscrit dans une volonté égalitaire. Cependant, la justification de
l’un et l’autre résulte de la définition d’un état de difficulté ou de danger.
2.2 Définition des concepts
(1) Le danger
La difficulté d’évaluer le danger réside dans le fait que la conséquence néfaste de celui-ci
est incertaine. Il s’agit, en effet, d’un risque, qui est une notion statistique. Le danger - par
exemple, des parents qui s’absentent régulièrement en laissant leurs enfants en bas âge seuls peut provoquer une situation à risque - par exemple, le fait que les enfants veuillent se mettre
à cuisiner -, la situation à risque peut déboucher sur un risque réel - par exemple, mettre le
feu, se blesser avec un couteau ... La réalisation de ce risque est l’accident (ou préjudice). Il
s’agit donc d’imaginer un événement qui n’aura peut-être jamais lieu. De fait, une personne
n’est pas nécessairement consciente qu’elle prend un risque. Pourtant, la prévision du risque
est fondamentale, puisque c’est elle qui peut empêcher l’accident (ou préjudice).
Alors que la prévention consiste à réduire la probabilité d’occurrence du risque, la
protection consiste à diminuer la gravité de ses conséquences. Après réduction, subsiste, quoi
qu’on fasse, un risque résiduel. Le risque « zéro » n’existe pas.
Dans la littérature scientifique traitant du sujet, la plupart des auteurs (Alföldi, 1999 ;
Angelino, 1997 ; Gabel, Durning, 2002) distinguent l’ « enfant maltraité», l’ « enfant en
risque » et l’ « enfant hors de danger », à partir des rapports successifs (1995, 2005) de
l’ODASS (Observatoires Départementaux de l’Action Sanitaire et Sociale).
11
L’ « enfant maltraité » est celui qui est victime de violences physiques, de cruauté
mentale, d’abus sexuels, de négligences lourdes ayant des conséquences graves sur son
développement physique et psychologique.
L’ « enfant en risque » est celui qui connaît des conditions d’existence qui risquent de
mettre en danger sa santé, sa sécurité, sa moralité, son éducation, son entretien, mais qui n’est
pas pour autant maltraité.
L’ « enfant hors de danger » est celui qui connaît des conditions d’existence qui ne font
peser aucune menace de dommage sur sa santé, sa sécurité, son éducation ou son entretien.
Dans le secteur de l’Aide à la Jeunesse, au sens large, l’objet de l’évaluation médicopsycho-sociale porte sur la gravité du danger menaçant l’enfant et sur les moyens d’en
changer le processus. La notion de situation de danger est précisée par l’art. 38 du paragraphe
2 du Décret du 4 mars 1991 de la Communauté Française de Belgique : « L’intégrité physique
ou psychique est considérée comme gravement compromise, soit lorsque l’enfant adopte de
manière habituelle ou répétée des comportements qui la compromettent réellement ou
directement, soit lorsque l’enfant est victime de négligences graves, de mauvais traitements,
d’abus d’autorité ou d’abus sexuels le menaçant directement et réellement ». Il est aussi fait
mention de l’état de difficulté des jeunes ainsi que des personnes, dans l’exécution de leurs
obligations parentales, à l’article 2.1 du même décret.
Aussi bien dans la situation de danger que de difficulté, le risque existe, mais son degré de
probabilité est différent, de par la nature de la situation dangereuse, sa répétition et son
intensité. (cf. figure 1)
Degré de probabilité
Accident
Préjudice
Difficulté
Danger
Remarque : cette figure ne traduit pas la situation, ni la répétition, ni l’intensité
Figure 1 : Degré de probabilité du risque et du danger
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(2) L’évaluation du danger
Le modèle d’évaluation de la situation de danger que nous proposons repose
intrinsèquement sur trois approches : orthogénique, maïeutique et humaniste.
La première façon d’envisager l’évaluation des situations de difficulté ou de danger
suppose de repérer les indicateurs de risque susceptibles de traduire des dysfonctionnements
familiaux. L’objectif de cette approche consiste à isoler « ce qui se passe mal » dans la famille
et, plus particulièrement, ce qui nuit à la construction identitaire harmonieuse de l’enfant, en
regard de ses droits fondamentaux. Nous qualifions cette perspective d’orthogénique dans la
mesure où elle vise ensuite à changer les dysfonctionnements de la famille.
La deuxième modalité évaluative consiste à identifier les indicateurs de protection au sein
de la famille, en particulier, les compétences parentales, ainsi que les aptitudes et les capacités
des autres membres de la famille et des autres acteurs présents dans l’écosystème du jeune.
Cette approche envisage de s’interroger sur les ressources de la famille et du milieu. Il s’agit
d’une perspective maïeutique, puisque ce type d’intervention, articulée autour des
compétences de la famille et des autres acteurs, considère que la solution se trouve à
l’intérieur du système qu’elle prétend changer. La famille est donc reconnue comme experte
du changement et le rôle de l’intervenant est d’en être le facilitateur.
Enfin, dans la troisième approche, nous envisageons de considérer les effets des deux
modalités précédentes sur le développement de l’enfant ; celui-ci étant vu non pas comme la
victime passive du comportement qu’il subit, mais comme l’acteur riche de ressources dans
les processus qu’il vit.
La démarche évaluative centrée sur le développement de l’enfant impose d’identifier de
manière précise les facteurs biologiques, affectifs, cognitifs, sociaux et conatifs qui favorisent
cette dynamique. Il s’agit de mettre en place une évaluation susceptible à la fois de rendre
compte de l’évolution psychosociale de l’enfant et, aussi, de remettre régulièrement en
question le suivi des familles par la recherche de nouvelles originalités.
Concrètement, les indicateurs de risque, de protection et de développement émanent de la
conjonction d’une triple articulation (Lecointe, 1997).
13
Référence
valorisation
Source aveugle
des normes
Indicateurs
de danger,
de protection,
de changement
dévalorisation
Référé
Référentiel
Mesure, comparaison, sens
Figure 2 : schéma de la triple articulation de l’évaluation
(adaptation du schéma de Lecointe, 1997)
Il s’agit de mettre en relation un référé (ce qui est constaté ou appréhendé de façon
immédiate, ce qui fait l’objet d’une investigation ou encore d’une mesure) avec un référentiel
(ce qui joue le rôle de norme, ce qui doit être, ce qui est le modèle, l’objectif poursuivi, etc.)
en tenant compte de la référence (le système de valeurs qui conditionne le recueil des données
à l’origine de l’information).
Si nous ne tenons compte que du sommet du triangle, l’évaluation fonctionnera à
l’implicite, c’est-à-dire que son déroulement sera sous-tendu par des critères qui ne seront pas
expliqués et par des jugements de valeur non exprimés (Barbier, 1985). Par exemple, des
stéréotypes de « bons » parents qui doivent avoir de l’autorité seront utilisés.
En revanche, la circulation entre ces trois pôles repérés et explicités comme tels crée des
espaces et des moments de mise à l’épreuve des déterminismes. Les dispositifs qui font
circuler l’évaluation entre plusieurs évaluations, entre plusieurs évaluateurs, entre évaluateurs
et évalués produisent un acte socialement organisé dont le processus peut être observé et le
référentiel largement expliqué. Cette réflexion approfondie et collective aboutit à l’évaluation
instituée, forme la plus élaborée qui permet d’objectiver davantage les prises de décision et
donc d’amoindrir ce que Tomkiewicz (1997) appelle « la violence décisionnelle ».
Autrement dit, évaluer la situation de danger consiste à utiliser de manière souple,
dynamique et impérative les trois pôles de l’évaluation : les faits observés, les composantes
relationnelles ainsi que les savoirs.
14
-
Le référé (les faits observés)
L’évaluation, dans le Secteur de l’Aide à la Jeunesse, interroge en permanence la véracité
des faits. Il faut parler de vraisemblance plutôt que de vérité, car il s’agit d’approcher la
réalité la moins improbable. L’appréciation d’une problématique humaine n’est pas une
science exacte, parce que la subjectivité des personnes concernées (cf. les références) est une
composante de l’évaluation, dans des proportions variables. Il suffit de penser aux situations
de maltraitance psychologique. Ainsi, lorsqu’une mère dépressive accable son fils de
reproches au point que celui-ci se sente responsable des idéations suicidaires de sa mère, il est
particulièrement difficile d’apporter un ensemble de faits vérifiables.
Un descriptif des faits n’est pas une simple transcription d’une série de réalités. Le risque
d’erreur d’appréciation est constant. L’évaluation des faits se situe dans un continuum entre
des faits suspectés et des faits avérés. La notion de probabilité permet de nuancer les
affirmations péremptoires et contribue à réduire la marge d’erreur. De plus, elle laisse une
place au doute qui peut permettre une ouverture vers les capacités de changement.
La corroboration amène aussi des faits susceptibles de renforcer le degré de
vraisemblance. Il est, en effet, intéressant de faire converger les faits entre eux afin de nourrir
la réflexion évaluative.
L’interrogation de base est donc la suivante : les faits existent-ils ou ont-ils existé ? Les
faits désignent les comportements, les gestes, les paroles, les attitudes manifestés par les
parents, la famille élargie, l’environnement ou l’enfant lui-même. Il peut également s’agir
d’omissions, comme dans des situations de négligence ou, encore, des observations de l’état
de l’enfant (rapport médical constatant une blessure, une anémie…). Les faits sont examinés
selon leur nature, leur gravité, leur chronicité et leur fréquence.
L’approche est phénoménologique dans la mesure où elle met l’accent sur l’expérience
vécue, sur le sens que prend la réalité pour les individus dans le cadre de leurs expériences
vécues singulièrement. Dans ce contexte, les événements et les faits empiriques sont saisis
directement, sans hypothèses préétablies, sans sélection préalable des variables influentes.
-
La référence
Lecointe (2004) appelle « référence » le système de valeurs qui est au cœur de la mise en
relation entre les faits (référé) et la norme (référentiel) dans la mesure où il ne s’agit pas d’une
15
simple comparaison, mais d’une opération « interpersonnelle et sociale, hiérarchique et
institutionnelle d’énoncés » (p. 129).
Le système de valeurs constitue en quelque sorte la valeur attendue, plus ou moins
consciemment, par les évaluateurs et les décideurs. Il émane de contenus implicites, c’est-àdire non énoncés, qui appartiennent à des domaines variés. Nous pensons ici aux référents
familialistes, idéologiques, socio-culturels, expérientiels ou encore institutionnels.
Par exemple, un évaluateur peut être, consciemment ou inconsciemment, influencé par sa
propre représentation d’une famille stéréotypée. Il peut ainsi être amené à toujours apprécier
les différentes situations selon ses propres normes familiales, fondées sur l’épanouissement,
la responsabilité, le travail, l’équilibre de la vie affective, le refuge, la protection, etc.
La référence est présente dans le référé dans le sens où le relevé des faits et sa
transcription colorés de jugements de valeur, trouvent ou créent de la valeur attendue ou niée
là où elle n’existe pas forcément.
Elle est également présente dans le référentiel étant donné que les critères, présentés
comme neutres, incontestables et pérennes, sont, en réalité, un « construit social relatif et
culturel qui comporte autant d’implicite que d’imaginaire, que d’explicite et d’universel
rationnel » (Lecointe, 2004, p. 129)
- Le référentiel
Il est constitué par les normes, les critères de référence. Il n’y a pas d’évaluation possible
sans normes. Elles constituent l’élément de comparaison. Que les critères soient ou non
énoncés, les normes réfèrent le réel à des valeurs fondées sur des modes de pensée dominants.
Dans l’évaluation qui nous préoccupe, la norme est centrée sur les dysfonctionnements, c’està-dire les dangers menaçant l’enfant. Ce sont ces dangers qui justifient la mission des
intervenants du secteur de l’Aide à la Jeunesse. Même si le bien-être de l’enfant est une visée
essentielle de l’intervention, il ne constitue pas la norme principale.
Le référentiel est un outil et non une fin en soi. Ne fut-ce que par la singularité des
situations d’intervention, il doit être utilisé avec l’esprit critique inhérent à toute démarche
clinique, constamment placée dans un processus à la fois évolutif et dynamique. Les normes
ne constituent jamais des jugements figés empreints de déterminisme dans la mesure où elles
servent également à la mise en place du changement.
16
(3) Le modèle écosystémique
Le social ne vient pas à la rencontre du sujet, mais c’est dans le social et par le social qu’il
se structure. Dans cette perspective, comprendre le développement d’un enfant, c’est analyser
les milieux de vie dans lesquels il grandit, c’est examiner les rapports que l’enfant entretient
avec son environnement et les personnes qui le constituent, c’est aussi affirmer que l’enfant
« se construit à partir des expériences vécues dans différents milieux de vie » (ZaoucheGaudron, 2002, p. 19).
La plupart des recherches (Pourtois, 2000 ; Palacio-Quintin, Bouchard, Terrisse 2004)
démontrent l’efficacité d’un programme reposant sur le fait de tenir compte des divers besoins
psychologiques et sociaux de la famille. Les interventions doivent s’adresser non seulement
aux mères, mais aussi aux pères et conjoints qui vivent avec l’enfant et considérer l’ensemble
de la fratrie. En fait, elles doivent tenir compte de l’ensemble des interrelations dans la
famille. D’où l’idée d’une approche globale et multidimensionnelle (Palacio-Quintin E. et al.,
1995).
A la fin des années septante, Bronfenbrenner (1979) élabore sa théorie écologique du
développement humain qui considère que tout comportement humain fait partie d’une série de
systèmes imbriqués les uns dans les autres dont nous devons absolument tenir compte si nous
voulons apprécier toute la complexité réelle de l’expérience humaine. Plus tard, des auteurs
comme Garbarino (1980, 1987, 1990) et Belsky (1990) ont développé et adapté ce modèle au
domaine de la maltraitance (figure 3).
Leurs travaux ont ainsi montré que les conduites négligentes et abusives des parents
envers leur (s) enfant (s) doivent être considérées à l’intérieur du contexte global de la famille
et de l’environnement dans lequel elles s’insèrent. La modification des conduites parentales
inadéquates doit tenir compte des processus d’équilibration de la famille, de chacun de ses
membres et du réseau social de la famille.
Plus une organisation familiale favorise la satisfaction réciproque des besoins et le partage
des ressources (physiques, psychologiques et sociales) entre les membres, plus ces derniers
pourront faire face aux stresseurs quotidiens (comme de faibles ressources financières,
logement inadéquat, etc.). Les familles négligentes et abusives sont particulièrement
surchargées par le stress quotidien en raison de la quantité de stresseurs auxquels elles sont
exposées, mais également parce que leur type d’organisation familiale ne permet pas la
satisfaction réciproque des besoins, ni une flexibilité face aux changements. De plus, le
répertoire limité d’émotions et de comportements, ainsi que la façon de percevoir
17
l’environnement de chacun des membres, se greffent à ces difficultés (Terrisse & Roberts,
1996).
L’analyse écosystémique des conduites parentales inadéquates permet de relativiser la
responsabilité du parent (notamment de la mère) en tentant de cerner la contribution des
autres membres de la famille et du réseau social dans l’apparition et le maintien de la situation
de négligence et d’abus. L’approche écosystémique permet également d’explorer les
ressources présentes à l’intérieur de la famille et de son réseau (ex. : relation adéquate de la
mère avec une de ses sœurs, conduites appropriées du père dans certaines situations de
contrôle comportemental de l’enfant, etc.).
D’autre part, il est important que cette approche tienne également compte des
caractéristiques des individus impliqués dans le phénomène, c’est-à-dire dans la dimension
intrapsychique.
L’intervention écosystémique doit donc permettre simultanément des rééquilibrations sur
les plans des aspects individuels (habiletés parentales, contrôle des impulsions, empathie,
estime de soi, etc.), de l’organisation familiale (cohésion, adaptabilité, frontières claires, etc.)
et de l’organisation du réseau social (densité des liens, qualité et réciprocité du soutien social,
insertion sociale et sur le marché du travail, etc.
18
Macrosystème
===================================================================
===================================================================
Exosystème
Mésosystème
Chronosystème
Microsystème
ONTOSYSTEME
Figure 3 : Représentation simplifiée du modèle de Belsky
Centré sur l’enfant, ce modèle est composé de sphères systémiques définies comme un
ensemble de structures imbriquées les unes aux autres et dont le cœur est la personne en
développement.
Le premier niveau, l’ontosystème, est celui de l’enfant. Il comprend l’ensemble de ses
caractéristiques.
Le second, le microsystème, définit les interactions entre l’enfant et son environnement
immédiat (ses partenaires : père et mère, fratrie, famille élargie…)
Le troisième, le mésosystème, est constitué de deux ou plusieurs microsystèmes pouvant
s’articuler entre eux (par exemple, l’école et la famille).
Le quatrième, l’exosystème, est formé des institutions, des services, des milieux de travail
qui ne concernent pas directement l’enfant (par exemple, le milieu professionnel des parents),
mais qui peuvent cependant avoir des effets sur celui-ci.
Le cinquième, le macrosystème représente enfin le niveau le plus distant de l’enfant. Il
intègre les systèmes politiques, économiques, sociaux et culturels et a une incidence sur toutes
les autres sphères systémiques (par exemple, les politiques en matière d’éducation, de santé,
etc.).
19
Le chronosystème renvoie à toutes ces phases de maturation auxquelles l’enfant, mais
aussi chacun des membres de la famille, doit faire face. Ces moments concernent autant les
événements de vie (deuils, séparations, divorce, pertes d’emploi, déménagements…) que les
stades de développement comme, par exemples, l’entrée à l’école maternelle, l’adolescence…
Le développement de l’enfant est donc intimement lié à l’espace social qui l’environne.
Plus précisément, « les situations éducatives, émotionnelles et relationnelles des enfants
obligent à prendre en compte un ensemble d’éléments qui concernent l’enfant (son unicité,
son développement…), ses parents (leurs compétences, leurs besoins, leur situation socioéconomique…), l’environnement et les réseaux sociaux primaires, la culture d’origine, les
modalités de réponse institutionnelle locale (partenariat) » (Klein, 2003, p. 124). Le modèle
écosystémique de parentage (Terrisse, 1996) permet de rendre compte de ces différentes
dimensions. (figure 4)
Les professionnels du Secteur de l’Aide à la Jeunesse (Observatoires de l’Enfance, de la
Jeunesse et de l’Aide à la Jeunesse, 2006) insistent sur la nécessité de se centrer sur les
besoins de l’enfant. « Pour chaque situation, il faut se poser la question du bien-être de
l’enfant et de son devenir d’adulte. Chaque mandant doit s’interroger sur la question de savoir
en quoi consiste une parentalité adéquate. Il s’agit d’évaluer les capacités du parent en
fonction des besoins de l’enfant, besoins qui vont varier au fil des étapes de son
développement. » (p. 40).
20
Relation entre
conjoints
Méso, Exo
Macro-systèmes
Réseau social,
garderie, école,
services
Trajectoire
des parents
Microsystème
Antécédents
familiaux
des parents
Personnalité
des parents
Valeurs, attitudes,
sentiments de compétences, attributions
Statut socioéconomique,
var. ethnoculturelles
Méso, Exo
Macro-systèmes
Méso, Exo
Macro-systèmes
Comportement
éducatif
parental
Caractéristiques
de l’enfant
Adaptation et
développement
de l’enfant
Travail
professionnel
Fratrie
Famille élargie
Méso, Exo
Macro-systèmes
Figure 4 : Le modèle écosystémique de Parentage (Terrisse, 1996)
21
(4) Les besoins de l’enfant et la bientraitance
Répondre aux besoins de l’enfant ne veut pas dire lui éviter toutes les frustrations. Il ne
s’agit pas d’envisager l’autre versant qui conduit à une autre forme de maltraitance. Celle-ci
réside dans l’assouvissement de tous les besoins qui conduit rapidement au culte de
l’ « enfant-roi ». Il faut, en effet, distinguer les frustrations qui sont inévitables, voire
nécessaires, qui aident l’enfant à se construire solidement, et celles desquelles il faut l’en
préserver, car elles ne peuvent que l’abîmer (Mazet, 2003). La difficulté consiste en effet de
devoir sans cesse survivre aux différentes successions d’étapes faites de maturations. Sans
ruptures avec ce qui nous attache, impossible de créer de nouveaux liens. Ce processus
d’évolution perpétuelle est lié à la capacité que possède tout être humain à s’accomplir, à
« s’actualiser » (Rogers, 1972). Cependant, l’environnement joue un rôle important dans ce
processus de maturation dans la mesure où il se montre capable ou non d’en faciliter
l’émergence.
Dès les premiers moments de la vie, la souffrance fait son apparition. Elle est plus ou
moins lourde selon chaque individu, même si ce qui touche à la douleur n’est jamais
mesurable : « Il n’y a pas de souffrance plus grande que celle que chacun vit » (Guénard,
1999).
Lorsque le seuil de tolérance à la frustration est dépassé et que l’enfant ne peut s’y
adapter, on peut parler de blessures. Ces blessures-là sont vides de sens même si, malgré tout,
elles peuvent entraîner des mécanismes de résilience. On les rencontre dans des contextes de
« facteurs de risque ». Ces contextes vont même jusqu’à provoquer chez l’enfant, dans
certains cas, des pathologies plus ou moins profondes. Ces atteintes existentielles sont vécues
de manière si intense qu’elles débordent les capacités du Moi qui les reçoit et se trouve dans
l’incapacité de s’y adapter. Il peut s’agir de véritables effractions psychiques touchant aux
fondations de l’être, véritables remises en question de l’identité de celui qui les vit.
Il existe toutefois des conduites beaucoup plus discrètes telles que regards, paroles, gestes
à répétition qui, au cours de la vie quotidienne, ont des répercussions tout aussi dévastatrices à
long terme. Seul un signe extérieur, sous la forme d’un symptôme, pourra rendre cette douleur
communicable. D’invisible, elle deviendra palpable chez cet enfant qui ne dormira plus, ne
mangera plus, pleurera sans arrêt ou s’effondrera à l’école.
22
Ces situations de frustration mal négociées ou ingérables face à ses besoins, l’enfant en
sera d’autant plus blessé qu’elles auront été constantes. Les mécanismes de négligence et de
maltraitance en sont les corollaires.
Tous les besoins de l’enfant sont importants et à prendre en considération. Il en est
cependant deux fondateurs des autres : sa sécurité et son bien-être physique.
Pourtois et Desmet (2004) présentent un inventaire structuré des besoins qui s’avèrent
fondamentaux pour le développement humain et notamment pour l’adaptation de l’enfant à
ses différents milieux de vie (figure 4).
Cet
inventaire
se
concrétise
dans
le
paradigme
des
« douze
besoins
psychopédagogiques », structuré en quatre dimensions, chacune comportant trois besoins
spécifiques de l’enfant qui requièrent la mise en place d’attitudes spécifiques chez les
éducateurs. Par « besoins », Pourtois et Desmet (2004) entendent des « nécessités vitales
présentes en tout être humain », quelle que soit sa culture. Ils appellent « besoins
psychopédagogiques » la nécessité d’un apport éducationnel précis en vue de faciliter la
réalisation d’un aspect du développement (p. 60).
Figure 5 : Le modèle des 12 besoins (Pourtois-Desmet, 2004)
23
La première dimension, celle des besoins affectifs, correspond au besoin d’affiliation de
toute personne humaine dès les premiers moments de sa vie. Ce besoin est lui-même soustendu par trois besoins complémentaires : les besoins d’attachement, d’acceptation et
d’investissement. Théorisée par la psychanalyse, l’éthologie et la psychosociologie, la
problématique de l’attachement, initiée avant la naissance, est associée paradoxalement au
détachement : être relié et être autonome sont en effet étroitement liés, tout au long de la vie.
Corrélatif à ce besoin, celui d’être accepté par l’entourage, permet, entre autres, de nouer une
alliance parentale. Cette notion renvoie également au concept d’identification : les parents
proposent à leurs enfants des modèles d’identification qui vont être incorporés si les
transactions parents-enfants sont empreintes d’acceptation. La construction de l’identité d’un
individu se fonde également sur l’investissement de son entourage à son égard, sur un projet
des parents pour leur enfant, qui se mue peu à peu en un projet de l’enfant par lui-même pour
lui-même.
La deuxième dimension est celle qui correspond aux besoins cognitifs, reposant sur les
besoins de réussite, de certitude et de cohérence. Emanant de la force de l’entourage, ceux-ci
sont traduits par les trois besoins de stimulation, d’expérimentation et de renforcement. Selon
les comportementalistes, l’avidité de connaître ne peut s’acquérir et s’entretenir qu’à partir de
la stimulation qui vient de l’extérieur. Le besoin d’expérimenter est reconnu comme étant à la
base de tous les apprentissages et de l’édification même de l’intelligence. Tout apprentissage
n’est vraiment confirmé que lorsqu’il reçoit un renforcement. Des behavioristes aux
psychanalystes, de nombreux théoriciens reconnaissent que la nature du renforcement, positif
ou négatif, ainsi que son processus ou ses fonctions, sont à la base d’une insertion efficace
d’un moi différencié dans son environnement.
La troisième dimension est celle des besoins sociaux, sous-tendue par trois besoins
psychopédagogiques. D’abord, le besoin d’apprendre à communiquer qui renvoie aux
langages, aux systèmes d’interaction entre parents, adultes et enfants, entre pairs, fortement
tributaire des styles éducatifs. Ensuite, le besoin de considération, lié au « regard de l’autre »,
qui confirme à la fois une bonne socialisation et la conscience de sa propre valeur personnelle
et qui s’avère indispensable à la construction de l’estime de soi. Enfin, le besoin de structures,
de limites, d’interdits, pour organiser le temps, l’espace et le sens, besoin particulièrement mis
en évidence par la psychanalyse et les théories systémiques. Cette structuration est
indispensable à l’enfant pour construire son identité et « calibrer » ses attitudes, c’est-à-dire
l’ensemble de ses désirs et de ses réactions face à l’environnement.
24
La quatrième dimension, étroitement liée aux trois premières, concerne le besoin
d’idéologie, qui renvoie au champ des valeurs. Elle correspond au sens du bien, du vrai et du
beau. Le bien et le bon sont les valeurs fondamentales qui sous-tendent l’attitude morale de la
personne. Ces valeurs s’acquièrent par une éducation qui énonce et différencie intelligemment
le bien du mal, dans un rapport égalitaire intersubjectif. Le vrai s’oppose à l’erreur, à
l’illusion et au mensonge. Il nécessite l’apprentissage du discernement, non seulement sur le
plan cognitif, mais également dans les registres affectif et social. Le sens du beau est formé
par une démarche éducative discrète et respectueuse, dans différentes sphères culturelles. Il
suscite joie des sens et curiosité intellectuelle. (Jaspard, (1998), cité dans Marquet et
Bonmariage, 1998).
Chacune des quatre dimensions contribue à la construction de l’identité de toute personne
humaine et à sa reconnaissance comme sujet. C’est pourquoi toutes sont considérées comme
vitales. Elles sont inséparables et doivent s’articuler les unes avec les autres dans la réalité
concrète de la personne et au fil de son histoire. En résumé, pour Pourtois et Desmet (2004),
l’identité de chaque être humain se structure sur la base d’une affiliation en réponse à sa quête
de liens (axe affectif), d’un accomplissement en réponse à sa quête de sens (axe cognitif),
d’une autonomie en réponse à sa quête de pouvoir (axe social) et d’une idéologie, en réponse
à sa quête de valeurs (axe des valeurs).
Il y a un état de danger potentiel pour l’enfant lorsque la famille et le milieu de vie
donnent des réponses inadéquates à ces besoins, en premier lieu, aux besoins primaires de
sécurité et de bien-être physique. À la situation de bientraitance peuvent donc se substituer
des situations de négligence, de maltraitance et de danger.
(5) Les facteurs de risque et les facteurs de protection
Selon Garmezy (1985, cité par Terrisse, 2002), les facteurs de risque peuvent se définir
comme « des facteurs dont la présence accroît la possibilité qu’un enfant ait des difficultés
d’adaptation et d’apprentissage si on le compare avec un enfant d’une population "tout
venant " » A l’inverse, les facteurs de protection sont définis par ce même auteur, comme des
« caractéristiques des individus et de l’environnement susceptibles de contrer ou de limiter les
facteurs de risque. » (p.37). C’est donc lorsque
l’enfant est confronté à des conditions
défavorables que le relevé des facteurs de protection prend tout son sens.
Les facteurs de risque et de protection concernent à la fois l’individu et son écosystème,
plus précisément, les interactions entre les différents niveaux définis précédemment. Ainsi, un
enfant présentant un regard langagier et moteur (facteurs de risque), peut être particulièrement
25
stimulé par une mère monoparentale (facteur de risque) ayant peu de revenus financiers
(facteur de risque), mais ayant un bon niveau de scolarité (facteur de protection) et très
disponible (facteur de protection), assistée par un réseau de soutien à la parentalité (facteur de
protection).
Certains auteurs (Rutter, 1985, Werner & Smith, 1989) mettent en évidence l’existence
d’un effet de cumul tant des facteurs de risque que des facteurs de protection. Les recherches
de Rutter (1985, cité par Terrisse, 2002), par exemple, montrent que la présence simultanée
de deux facteurs de risque multiplie par quatre la possibilité qu’il y ait des difficultés
d’adaptation socio-affective chez un enfant.
Cependant, déterminer l’état de danger ne consiste pas à additionner des facteurs de risque
en vue de concevoir une probabilité élevée de passage à l’acte. La problématique des enfants
en difficulté ou en danger, plus complexe, requiert que l’interaction qui existe entre les
éléments soit prise en compte et, surtout, la singularité de la situation envisagée dans toutes
ses dimensions.
Le point de départ de l’évaluation consiste à relever les faits observés. Ces faits sont
confrontés aux facteurs de risque et aux facteurs de protection en vue à la fois de les
sélectionner et de leur donner un premier sens. Les facteurs sont des éléments variables qui,
théoriquement, sont à l’origine de la maltraitance ou de la bientraitance. Ils n’ont pas de sens
en soi, dans la mesure où ils revêtent une signification uniquement dans une situation
particulière et dans un écosystème défini. Ils ont été cernés par un ensemble de recherches
dans ce domaine. Ils sont de deux ordres : soit proximaux, soit distaux.
Les facteurs proximaux influent directement sur le danger, tandis que les facteurs distaux
ont une influence indirecte. Par exemple, une étude (Reynold, Wallace et al., 2001) a montré
que les jeunes qui ont grandi dans un foyer où il existait de la violence entre conjoints
présentaient un taux de mésadaptation élevé. Il s’agit, dans ce cas, d’un facteur influençant
directement la santé psychologique d’un enfant, quelle que soit la situation particulière traitée.
Par contre, la situation socio-économique précaire des familles n’a pas de lien de causalité
direct avec la maltraitance. Les facteurs proximaux peuvent donc être considérés comme
ayant des liens de causalité avec la maltraitance, alors que les facteurs distaux peuvent, dans
certaines situations seulement, être considérés comme des facteurs de risque ou de danger.
Discutés entre toutes les personnes concernées, c’est-à-dire l’enfant, ses parents, sa
famille élargie, les intervenants sociaux, le directeur, le conseiller, le magistrat, l’avocat etc.,
faits et facteurs prendront la coloration particulière propre à la situation. Seront ainsi isolés
des indicateurs de danger et de protection qui aideront à la prise de décision ainsi qu’au
26
programme d’aide ultérieur. L’évaluation dans le temps verra s’ajouter les indicateurs de la
possible résilience de l’enfant, fruits de la confrontation dynamique entre les facteurs de
danger et les facteurs de protection.
3
RECUEIL DES DONNẺES
3.1 Les attentes des intervenants
Les professionnels des S.A.J. et S.P.J., rencontrés à deux reprises, ont exprimé, de
manière à la fois consensuelle et déterminée, un certain nombre d’attentes dont les principales
peuvent être résumées de la manière suivante :
-
la nécessité de développer un langage commun, fédérateur d’une aide cohérente
apportée aux jeunes et à leur famille ;
-
l’élaboration d’une méthodologie de l’évaluation, c’est-à-dire des cadres et des
points de repères partagés, plutôt que des grilles « risquant d’instrumentaliser les
personnes concernées » ;
-
la mise en évidence de l’aspect dynamique de l’évaluation, dans la mesure où la
finalité de l’aide n’est pas d’approcher le degré zéro de l’état de danger, mais de
mettre la famille en projet, dans le temps, en étayant ses compétences ;
-
le respect d’une approche multidimensionnelle de l’évaluation en tenant compte,
notamment, de la singularité de chaque situation, de l’intuition de l’intervenant, des
caractéristiques relationnelles…
-
la garantie de conserver un espace pour l’originalité, l’expérience, les compétences
propres à chaque intervenant et à chaque équipe.
3.2 Le recueil de données pertinentes
La technique du focus groupe a été utilisée lors des différentes réunions de travail
organisées dans les S.A.J. et S.P.J., ainsi que lors des journées de travail avec plus de 300
représentants des services mandatés, des A.M.O. (Aide en Milieu Ouvert), des services de
formation agréés, des inspections, mais aussi des S.A.J. et S.P.J. Cette méthode a permis de
recueillir des données grâce à l’animation non directive des groupes, tout en balisant les
échanges par des cadres réflexifs préétablis.
27
En fonction de l’évolution de la recherche, deux types de supports thématiques ont été
utilisés. Le premier a consisté en un tableau conceptuel élaboré à partir de la littérature
scientifique et de l’observation des pratiques. Ce cadre théorique, proposé lors des premières
rencontres dans les S.A.J. et S.P.J., avait pour but de susciter la richesse des échanges. Il a
également permis de gagner du temps, dans la mesure où la problématique est éminemment
complexe. Le second support à l’animation des focus groupes a consisté en la présentation du
tableau conceptuel finalisé (voir figure 7) suivie par l’organisation de la réflexion autour de
quatre thèmes : les caractéristiques de la relation, les facteurs de danger, les facteurs de
protection, les facteurs de développement et de résilience.
Le tableau suivant (figure 6) présente une liste non exhaustive des données pertinentes
recueillies à l’issue des synthèses réalisées par les participants, à la fin de chacune des
journées. Les données issues des premières rencontres dans les S.A.J. et S.P.J. ont été
ajoutées.
Pour des raisons pratiques, les termes repris ne sont pas contextualisés. Pour de plus
amples informations, nous renvoyons le lecteur aux trois rapports d’activités qui rendent
compte du déroulement de la recherche.
28
L’évaluation
Utiliser un langage commun ; développer un langage compréhensible ; optimiser la
collaboration entre services ; favoriser la participation de la famille dans l’évaluation ; avoir
du temps, un espace de rencontre adéquat ; l’expérience professionnelle ; la formation ; avoir
un maximum d’avis ; s’appuyer sur des informations concrètes ; maîtriser des références
théoriques ; la confiance et l’estime réciproques ; le recul par rapport à ses propres
représentations; implication de la famille ; des outils simples, adaptés aux besoins des
professionnels ; des outils utilisés comme supports et non des « grilles enfermantes »; une
définition claire de l’état de danger ; se dégager de la charge émotive ; fixer des échéances ;
tenir compte de la qualité des échanges ; avoir un regard pluridisciplinaire; établir un lien
entre les faits objectivables et le contexte; tenir compte de la notion de temps enfant-jeuneparents-institution-administration. Etc.
Les caractéristiques de la relation
Importance de se créer un espace tiers (équipe, co-intervenant, superviseur…) pour travailler
sa subjectivité ; concept de répétition de symptômes ; rivalités paradoxales (la famille attend
des réponses à tout et, parfois, espèrent l’échec pour reprendre le pouvoir) ; importance de
définir le rôle de chacun ; responsabilisation des parents ; dédramatisation de la situation ;
importance de la parole donnée à l’enfant, au jeune ; scander le temps, comme outil de
changement ; potentialiser la crise comme ressource mobilisatrice ; auto-critique de
l’intervenant ; laisser une place à l’informel ; remettre la hiérarchie au sein de la famille ;
stratégies centrées sur la recherche de solutions ; important de dépasser l’événementiel et
d’entrer dans l’analyse ; l’intervenant parfois assimilé au contrôleur social ; difficulté de la
relation avec des jeunes « états limites » ; se centrer sur les besoins de l’enfant sans oublier
ceux des parents ; hermétisme de la famille ; tenir compte du contexte ; prendre le temps
pour laisser émerger des acteurs ; évaluation de l’empathie et de l’accueil ; reconnaissance du
parcours déjà effectué, des ressources ; lecture des rapports aux familles ; les questions sont
parfois aussi importantes que les réponses ; importance de se différencier de ses propres
représentations ; importance d’entrer dans la singularité de la situation, en ne comparant pas
à des situations similaires ; conscience de l’influence des médias et de la politique ;
résistances dues à la peur d’un jugement et au non-respect de leur « vision du monde » ;
incompréhension langagière ; utiliser la reformulation ; faire intervenir ou créer des groupes
de paroles, des groupes d’entraide ; reconnaître les limites chacun. Etc.
Les facteurs de danger
Relation fusionnelle ; laxisme ; idéalisation de l’enfant ; enfant-roi ; déni de la réalité ; excès
de nourriture ; enfant ignoré, nié ; réseau social trop présent ; enfant victime ou acteur ;
enfant non investi ; confusion des rôles ; maturité des parents, de l’enfant, du jeune ; débilité,
faiblesse mentale ; capacité à demander de l’aide ; respect des frontières ; influence des
médias ; besoins primaires ; aspects psychiatriques ; aliénation parentale ; conflits de
29
loyauté ; délégation aux intervenants ; banalisation de la sexualité ; sadisme (tendresse
associée à des gestes violents) ; banalisation des écarts par rapport à la loi ; enfant-cible ; être
frère ou sœur d’un enfant handicapé ou décédé ; manque d’intérêt pour les résultats
scolaires ; violence institutionnelle (durée importante entre le signalement et la prise en
charge) ; suradaptation ; parents submergés par leur propre souffrance ; surprotection ;
infantilisation ; dette permanente ; absence d’anticipation ; les secrets, les non-dits ;
méconnaissance des besoins ; lourdeur administrative; trop ou trop peu d’intervenants,
absence de rapport au réel ; notion d’enfant imaginaire et de parent imaginaire ; l’absence de
moyens d’agir pour les intervenants. Etc.
Les facteurs de protection, de développement et de résilience
Estime de soi ; adaptabilité aux changements ; capacité à accepter de l’aide, capacité à
partager ses émotions, à verbaliser en terme de « je », à résoudre les problèmes ; présence
régulière d’une personne soutenante ; la spontanéité ; l’intelligence ; la bonne santé ; la
capacité à se projeter dans l’avenir, à créer un projet ; la gestion de la solitude ; la capacité
d’organisation ; la stabilité du couple ; les limites disciplinaires ; logement sécurisant ;
capacité à s’exprimer, à argumenter ; respect des règles ; l’autonomie scolaire ; capacité
d’utiliser une personne ressource ; savoir situer son rôle dans la famille ; parents qui
respectent leurs engagements ; cohérence des positions éducatives entre parents ; capacité à
prendre du plaisir, au bien-être ; liens affectifs durables ; flexibilité psychosociale ; gestion
des frustrations ; capacité de dire « non » ; curiosité ; la connaissance de ses besoins ;
capacité à avoir des rêves ; capacité à gérer les conflits ; qualité du lien ; enfants aimés de la
même manière ; manière dont l’enfant, le jeune, la famille communique son amour ;
ouverture vers l’extérieur ; expression visible des sentiments ; le respect et la
reconnaissance ; la confiance ; solidarité de la fratrie (dans la famille, à l’école, dans
l’institution) ; accès au réseau culturel ; avoir des valeurs humaines ; des moments ritualisés ;
création de moments privilégiés avec l’enfant, le jeune ; valorisation du potentiel de chacun ;
donner une réponse à l’expression de l’enfant ; tenir une position d’adulte responsable ;
présence d’un modèle pour l’enfant, le jeune ; savoir donner du sens à ses actions. Etc.
Figure 6 : Synthèse des données recueillies
30
4. UNE MẺTHODOLOGIE DE L’ẺVALUATION DE L’ẺTAT DE DANGER
4.1 Une évaluation syncrétique et dynamique
Le tableau conceptuel que nous proposons (figure 7) a pour but d’aider à la
visualisation de la dynamique mise en mouvement par le recueil des faits, la relation entre
l’intervenant et les personnes concernées, ainsi que le recours au référentiel théorique. En
aucun cas, ce tableau ne peut être utilisé de manière linéaire et exclusive. Il permet d’ouvrir
un espace d’observation, d’analyse et de compréhension de la dynamique familiale, en
référence à l’évaluation de l’état de danger. Il a pour but de mieux appréhender chaque
problématique familiale, dans sa singularité.
Chaque concept est considéré comme un modélisateur, dans la mesure où il permet de
rendre compte d’un ensemble de situations et d’approches ayant une signification commune.
Son objet est d’aider à rendre compte d’une même réalité, tout en étant conscient de la
nuance subjective qui peut lui être sous-jacente. Il n’est certainement pas pertinent, dans un
domaine aussi complexe que celui de l’Aide à la Jeunesse, de vouloir purifier à outrance les
concepts envisagés, nous leur retirerions leur véritable dimension humaine. Le cadre
conceptuel et l’orientation méthodologique visent à objectiver des pratiques et non à aboutir à
une objectivité impossible qui serait, de toute manière, dommageable à une relation humaine
de qualité.
Par ailleurs, les manières d’observer et de comprendre la réalité des familles, élaborées
lors des réunions de travail avec les différents intervenants du secteur, ont été sélectionnées,
définies, outillées, en fonction de leur pertinence, dans le cadre de l’évaluation de l’état de
danger. Son élaboration en est syncrétique dans la mesure où les différents concepts ont été
puisés dans des champs théoriques multivariés, tels ceux de la sociologie, de la psychologie,
de l’éthologie, de la neurobiologie, de la psychanalyse…
Une lacune importante reste cependant à combler : entendre directement les familles
concernées. C’est, en effet, par l’échange des savoirs que ce tableau sera réellement construit
en adéquation avec le vécu des familles.
31
4.2 Tableau conceptuel
Cadre théorique de l’évaluation de l’état de danger
Intervenant - Enfant - Parents
Famille relat. syst. + spatio-temp.
PASSE
PRESENT
Poids du
passé
Facteurs de
difficulté / danger
Facteurs de
protection
- bientraitance
AVENIR
Capacités de
changement
Facteurs de
difficulté / danger /
crise
+ niveau d’urgence
Facteurs de
difficulté /
danger
Facteurs de
protection
Facteurs de
protection
- bientraitance
SUJET
SUJET
ECOSYSTEME
PLASTICITE
-REFLEXIVITE
INDIVIDUELLE
-REFLEXIVITE
SOCIALE
ECOSYSTEME
CONSCIENCE
PEDAGOGIQUE
CONSCIENCE
PEDAGOGIQUE
BESOINS
- Enfant
- Parents
- Famille
RESILIENCE
CONSCIENCE
PEDAGOGIQUE
PARENTALITE
PRISE DE
CONSCIENCE
DES BESOINS
Théorie des
besoins
HABITUS
QUOTIDIEN
QUOTIDIENNETE
PROTENSION
RETENTION
ECOSYSTEME
RESILIENCE
RESILIENCE
FACTEURS DE
DEVELOPPEMENT
SUJET
FACTEURS DE
DEVELOPPEMENT
FACTEURS DE
DEVELOPPEMENT
TRAJECTOIRE
(histoire)
- bientraitance
PERSPECTIVES
PRETENTION
+ STRATEGIES DE
DEFENSE
DROITS ET DEVOIRS
DES JEUNES
RAPPORT A LA LOI
Figure 7 : tableau conceptuel de l’évaluation
32
4.3 Approche dynamique du tableau conceptuel
Envisager une explication du tableau conceptuel sous son aspect dynamique revêt
nécessairement une part d’arbitraire. En effet, par où commencer ? Tous les éléments sont en
interaction et ne revêtent en aucune manière un degré d’importance les uns par rapport aux
autres : la plasticité des personnes concernées est aussi importante que leur conscience
pédagogique, ou encore l’interpellation des habitus.
Nous avons cependant isolé des champs sémantiques, dont nous avons marqué la
dynamique par des flèches. Ainsi, nous pouvons distinguer plusieurs groupements : les
caractéristiques de la
relation, le questionnement par rapport au passé, au présent et à
l’avenir, et enfin la mise en œuvre des capacités de changement.
(1) Les caractéristiques de la relation
Le premier entretien à chacune des étapes de la prise en charge est très important. Il se
déroule soit avec l’enfant, les parents seuls ou avec l’enfant, ou encore avec les familiers (ex.
le compagnon de la maman).
Toutes les rencontres entre les principaux intéressés et les intervenants sont importantes.
Toutefois, l’évaluation de l’état de danger se fait davantage à certains moments de la prise en
charge. Au niveau du S.A.J.2, ils se situent d’abord au moment de la réception de la demande :
lors de la permanence, à l’issue des demandes d’intervention des professionnels, lors des
signalements du Parquet. Ensuite, lors de l’élaboration du programme d’aide, préparé avec le
délégué du S.A.J., négocié avec le Conseiller et finalisé dans un accord entre le Conseiller et
les intéressés. A ce niveau, la collaboration des personnes sera sollicitée et devra être
effective.
S’il s’agit d’un état de danger actuel avéré ou encore, si la situation n’évolue pas
favorablement (danger toujours présent, ou s’intensifiant, parents et/ou enfants non
collaborants), le Parquet sera avisé. Dans ce cas, le Conseiller, dans une information
circonstanciée et étayée, proposera au Parquet de saisir le Juge de la Jeunesse afin qu’il agisse
pour protéger le jeune. Les Magistrats du Parquet « réévalueront » donc l’état de danger en
fonction des faits (procès verbaux) et du rapport émanant du S.A.J.
Si l’aide doit résulter de la contrainte, le Juge
de la Jeunesse dressera une série
d’ordonnances qui, ajoutées à l’ensemble du dossier, permettront au Directeur du S.P.J. de
2
Pour des explications supplémentaires, nous renvoyons le lecteur à la publication du S.A.J. de Bruxelles
«Questions de principes », 2004, Ministère de la Communauté française
33
qualifier à nouveau l’état de danger, ainsi que le signifier aux intéressés. Une évaluation
intermédiaire sera faite après six mois d’intervention, ensuite 12 mois, à l’issue desquels le
Directeur proposera au Juge, sur base d’une nouvelle évaluation, de clôturer le dossier, ou de
prolonger l’aide.
Le délégué, l’intervenant, le Conseiller, le Magistrat du Parquet, le Juge de la Jeunesse, le
Directeur font
partie d’un système relationnel défini par leur rôle respectif. Leur
professionnalisme est sollicité en même temps que leur histoire personnelle, leur ressenti et
leur intuition. Dans la mise en place de la relation, chaque personne met également en jeu ses
propres besoins, ce qui risque parfois de devenir une dérive. Par ailleurs, l’ « intuition » de
chacun est importante et nous devons en tenir compte dans la conception de la méthodologie
de l’évaluation, objet de la recherche.
D’autre part, pour la famille concernée par l’aide, l’environnement (réseaux d’amis, de
collègues de travail...) et la famille élargie (grands-parents, oncles, tantes...) entrent d’emblée
dans le système, que ce soit d’une manière verbalisée ou non.
Il ne s’agit pas, lors des entretiens, de faire une anamnèse détaillée de la famille, dans le
sens de reconstituer le passé, par une « vérification » objective. Cela concerne plutôt la
trajectoire biographique des intéressés, avec un rendu subjectif : « Dites-moi ce que vous
avez vécu... ». A chacune des étapes précédemment décrites, l’entretien se situe selon le mode
de la négociation (par exemple lors de la formalisation chez le Conseiller, pour acter sur les
modalités du programme d’aide préparé par le délégué pendant la phase d’investigation) ou
selon le mode de la médiation (le ressenti par rapport aux événements vécus, avec l’objectif
de cerner en quoi la famille peut aider au développement du jeune). A cela s’ajoute le
discernement en ce qui concerne l’enfant mis en danger, ou qui se met en danger par ses
comportements notamment.
A partir de la parole, il s’agit donc d’entrer dans l’espace, le contexte qui amène l’état de
danger actuel et réel (Art. 2.2). Il peut également s’agir d’une « difficulté » passagère (Art.
2.1). Sans l’analyse du contexte dans lequel la personne se dit ou est en danger, on ne sait pas
vraiment évaluer ce danger.
Comme nous l’avons montré précédemment, toutes les personnes engagées dans la
relation sont soumises à l’interpellation de leurs représentations, de leurs valeurs. D’autre
part, des stratégies de défense plus ou moins prégnantes peuvent bloquer la relation, lui
donner une orientation peu bénéfique. Cependant, dans tous les cas, ces stratégies employées,
tant des intervenants que des membres de la famille concernée, apportent une signification au
ressenti des uns et des autres, par rapport à la singularité de la situation. Ils constituent donc
34
un élément important de la compréhension de la difficulté ou du danger, de leur
conscientisation, ainsi que dans le processus de changement.
(2) Le questionnement par rapport au présent, au passé et à l’avenir
a. Par rapport au présent
L’analyse des faits et la compréhension du patrimoine individuel des habitudes donnent
une première évaluation de l’état de danger. Autrement dit, la compréhension de la manière
dont les parents, l’enfant, la famille élargie vivent leur quotidien et leur quotidienneté permet
au travailleur social d’appréhender les caractéristiques familiales, parentales, de l’enfant ainsi
que les caractéristiques liées aux interactions avec l’enfant.
Par quotidienneté, nous entendons tous les actes qui paraissent insignifiants, que la
personne réalise sans en prendre vraiment conscience, qu’elle accomplit par routine. Par
contre, le quotidien renvoie aux actions, comportements, à tout ce qui est vécu au jour le jour,
aux instantanés de la journée (ex. : « Ma fille m’a beaucoup fait rire, quand elle est rentrée de
l’école »). Le quotidien est significatif, on peut l’appréhender, dans la mesure où, en quelque
sorte, il s’inscrit dans la mémoire événementielle.
Par contre, en vivant essentiellement dans la quotidienneté, les parents et/ou le jeune se
coupent de la réalité, ce qui peut particulièrement angoisser le travailleur social3.
Les facteurs de risque, au niveau de l’interpellation du présent, émanent donc des faits qui
sont rapportés et du degré de conscience des personnes par rapport à leur vécu dans leur
quotidien et leur quotidienneté.
b. Par rapport au passé
La compréhension de l’histoire du parent, du jeune, de la famille, par sa trajectoire, donne
un éclairage supplémentaire à l’évaluation des facteurs de risque. Concrètement, un passé
empreint de violence familiale peut avoir des conséquences sur la relation construite par le
parent avec son enfant. A cela peut s’ajouter ce que nous appelons la « rétention », c’est-àdire une certaine forme de résistance au changement due à la puissance des scripts.
3
Après la mort de son enfant dans des circonstances de maltraitance, une mère déclare : « A midi, Aïsha s’est
arrêtée de respirer. Je l’ai un peu secouée et elle a recommencé à respirer. Je lui ai donné un biberon et elle
s’est endormie. L’après-midi, nous avons regardé des films. Nous ne nous sommes pas tracassés » in La
Dernière Heure - Les Sports, 19/06/04, p. 15
35
c. Par rapport à l’avenir
Envisager l’avenir, c’est construire un projet avec les parents, l’enfant, la famille en se
basant sur leurs facteurs de protection. C’est tout ce que les intéressés peuvent apporter pour
lutter contre les facteurs de risque décelés dans le présent et le passé. Ces facteurs de
protection résultent essentiellement de la conscience pédagogique des parents, c’est-à-dire de
l’ensemble des idées, des connaissances, des sentiments, des sensibilités sur lesquels se base
le parent pour donner un sens aux comportements de son enfant et pour ses propres actions.
De cette prise de conscience pourra émerger la verbalisation des besoins de l’enfant et du
parent. Le concept de besoin a l’avantage de permettre, dans la continuité de la conscience
pédagogique, d’aborder les problématiques -rappelons-les- de négligence, d’abus physique,
psychologique et d’abus sexuel, dans sa résonance subjective. Il s’agit en fait d’une analyse
objective qui tient compte de la subjectivité de chaque acteur dans la relation de violence, par
exemple.
Les critères psychopédagogiques du paradigme des douze besoins permettent, quant à
eux, de relever la pertinence des pratiques éducatives intrafamiliales et d’en mesurer l’impact
sur l’épanouissement de l’enfant. Une relation éducative suffisamment sensible à l’ensemble
des besoins de l’enfant constitue, en effet, un puissant facteur de protection.
D’autre part, l’analyse des besoins de l’enfant, sous l’angle écosystémique (par exemple,
il peut apparaître que les grands-parents jouent un rôle important dans la problématique des
besoins d’attachement de l’enfant), permettra d’approfondir les modalités de l’aide et mieux
orienter la famille vers ses ressources « naturelles » ou encore vers les intervenants sociaux de
première ligne et spécialisés.
(3) La mise en œuvre des capacités de changement
Comme nous l’avons expliqué précédemment, la relation systémique engagée lors des
entretiens s’inscrit dans la dimension du temps, avec comme corollaire d’amener l’enfant et
ses parents, voire son environnement et sa famille élargie, dans un processus de changement.
Les rapports au futur ou au passé sont très clairement distingués par Husserl, comme
l’explique Bourdieu (1994, p.155): « le rapport au futur que l’on peut appeler projet, et qui
pose le futur en tant que futur, c’est-à-dire en tant que possible constitué comme tel, donc
comme pouvant arriver ou ne pas arriver, s’oppose au rapport au futur qu’il appelle
36
protension ou anticipation préperceptive, rapport à un futur qui n’en est pas un, à un futur qui
est un quasi présent. Bien que je ne voie pas les faces cachées du cube, elles sont quasi
présentes, elles sont « apprésentées » dans un rapport de croyance qui est celui que nous
accordons à une chose perçue. Elles ne sont pas visées dans un projet, comme également
possibles ou impossibles, elles sont là, avec la modalité doxique de ce qui est directement
perçu. En fait, ces anticipations préperceptives, sortes d’inductions pratiques fondées sur
l’expérience antérieure, ne sont pas données à un sujet pur, une conscience transcendantale
universelle. Elles sont le fait de l’habitus comme sens du jeu. Avoir le sens du jeu, c’est avoir
le jeu dans la peau ; c’est maîtriser à l’état pratique l’avenir du jeu ; c’est avoir le sens de
l’histoire du jeu. Alors que le mauvais joueur est toujours à contretemps, toujours trop tôt ou
trop tard, le bon joueur est celui qui anticipe, qui va au devant du jeu. Pourquoi peut-il
devancer le cours du jeu ? Parce qu’il a les tendances immanentes du jeu dans le corps, à l’état
incorporé : il fait corps avec le jeu ».
Ce lien entre les habitus et la protension interpelle toute la problématique du poids des
déterminants agissants et les capacités de changement. Alors que la « rétention » renvoie à la
dimension des regrets, voire des remords (par exemple : « J’aurais voulu être ingénieur »), la
protension engage la « prétention » (par ex. :« Travaille bien à l’école, pour avoir un beau
métier »). La dynamique entre ces deux « pôles » implique de rassembler des traces, des
scripts qui vont s’articuler en schèmes. Autrement dit, des traces du passé (scripts) vont
progressivement prendre du sens, pour se construire dans une sorte de raisonnement
constructif.
D’autre part, la prise de conscience de l’habitus (par ex. : « Mon père faisait toujours
comme ça. ») est également susceptible d’engager le changement.
Il faut préciser que l’habitus n’est pas un problème en soi, lorsqu’il s’agit d’un marquage
culturel ou de classe (ex. un père qui ne s’occupe pas de l’éducation de ses enfants, parce que,
dans sa culture, c’est réservé à la femme) et lorsqu’il est admis par les partenaires. Cela peut
éventuellement perturber le travailleur social. Par contre, des habitudes peuvent être nocives
pour l’enfant (ex. : une mère, fatiguée, qui ne reçoit pas d’aide de son mari (habitus) et qui
laisse ses enfants en bas âge seuls à la maison). Dans ce cas, les habitus vont être interpellés.
Dans l’exemple cité, il peut y avoir absence d’anticipation : la mère se situe dans la
quotidienneté et ne pense pas aux conséquences de ses actes (les jeunes enfants sans
surveillance risquent de quitter la maison, de se blesser...).
La conscience réflexive permet de donner du sens à la quotidienneté. Le parent peut
prendre lui-même conscience de ses habitudes (réflexivité individuelle), mais l’environnement
37
social peut jouer également un rôle dans cette réflexion (réflexivité sociale, par exemple,
lorsque le médecin fait prendre conscience à une maman que cela ne se fait pas de donner des
« chips » à tous les repas).
La plasticité de l’individu se situe à un niveau « supérieur » des capacités de changement
dans la mesure où la personne sait rencontrer et intégrer la remise en question de soi. Cette
plasticité identifiée permet au travailleur social d’être davantage rassuré quant à la prise en
charge de l’avenir et à la réévaluation des facteurs de risque.
Dans la vision écosystémique des facteurs de risque, comme nous l’avons précédemment
expliqué, nous considérons les caractéristiques familiales, parentales, de l’enfant et celles
inhérentes aux interactions avec l’enfant. Ces facteurs sont expliqués au niveau du passé sous
l’angle de la trajectoire historique de la famille et du phénomène de rétension, plus ou moins
consciemment contaminée par les habitus.
Les facteurs de risque conscientisés lors des entretiens, dans le présent de la situation, sont
évalués en corrélation avec ceux du passé, imprégnés par la trajectoire historique de la
famille et occultés par le poids de la rétension.
La dynamique du changement engage l’avenir par une recherche des facteurs de
protection. Il s’agit de faire émerger ce « futur qui n’en est pas un », ce « quasi présent »,
mais qui est préparation du futur dans le présent des activités quotidiennes (protension).
On ne peut qu’insister sur la dynamique qui doit être opérationnalisée entre les facteurs de
risque ou de danger et les facteurs de protection. En d’autres termes, on ne peut pas évaluer
les facteurs de risque ou de danger sans se pencher attentivement sur les ressources de
l’enfant, de sa famille, de l’environnement, facteurs de protection.
4.4 Approche syncrétique du tableau conceptuel
Cette approche renvoie à la définition des concepts du tableau. A ce propos, nous
renvoyons le lecteur au glossaire, repris dans les annexes.
38
5. APPROCHE PRATIQUE
Le tableau récapitulatif qui suit constitue un cadre de travail construit en fonction des
différentes dimensions que revêt l’évaluation de l’état de danger. Son utilisation doit
certainement être repensée au sein de chaque équipe, afin de lui donner tout son sens et sa
cohérence.
Nous nous contentons uniquement de citer les concepts y afférant, ceux-ci ayant été
largement explicités précédemment. Ils sont, par ailleurs, repris dans le glossaire qui suit.
39
Description de la situation
(indicateurs de difficulté et de danger,
indicateurs de protection, indicateurs de
changement)
Les faits
Les caractéristiques de la relation d’aide
Les facteurs de difficulté et de danger
Les facteurs de protection
Les facteurs de changement
Figure 8 Tableau récapitulatif de la méthodologie de l’évaluation
40
Les faits
- leur nature (paroles, gestes, comportements,
attitudes, manquements…)
- le degré d’implication des personnes (acteur,
sujet, investigateur, observateur…),
- leur gravité, chronicité, fréquence
- leur contexte
- l’arrière-plan qui se dégage, l’atmosphère
- le degré de probabilité : faits avérés,
rumeurs…
- crédibilité du témoignage
- etc.
Les facteurs de protection
Les caractéristiques de la relation d’aide
Les facteurs de difficulté et de danger
- représentations, valeurs…
- expression des émotions, des sentiments
- stratégies de défense
- évocation des besoins
- sentiment d’être compris
- construction d’un partenariat
- construction d’une relation dans le respect et
la transparence
- gestion du temps
- choix du lieu, conditions matérielles de
l’entretien
- etc.
- observation des besoins
- observation de l’écosystème
- trajectoire de l’enfant, des parents, de la
famille…
- conscience pédagogique
- habiletés éducatives
- parentalité
- Habitus, habitudes, quotidien, quotidienneté
- droits et devoirs des jeunes
- rapport à la loi
- etc.
Les facteurs de changement
Indicateurs de difficulté et de danger
- observation des besoins
- plasticité
Indicateurs de protection
- observation de l’écosystème
- réflexivité individuelle et sociale
- trajectoire de l’enfant, des parents, de la
- conscience pédagogique
Indicateurs de changement
famille…
- prise de conscience des besoins
- conscience pédagogique
- rétention, protension, prétention
- habiletés éducatives
- capacités de développement
- parentalité
- résilience
- bientraitance
- etc.
- habitus, habitudes, quotidien, quotidienneté
- droits et devoirs des jeunes
- rapport à la loi
- etc.
Figure 9 : tableau récapitulatif de la méthodologie de l’évaluation (les concepts)
41
6. DES OUTILS "FACILITATEURS"
Les outils proposés en annexes (9.2 et 9.3) ont pour seule ambition d’aider à l’observation, à
l’analyse et à la compréhension des situations de difficulté et de danger. Rappelons qu’ils doivent
uniquement être utilisés dans le cadre global de la méthodologie de l’évaluation explicitée
précédemment.
L’inventaire des facteurs de risque ainsi que les deux tableaux cliniques des indicateurs de
situations de danger et de protection ont été élaborés à partir du recueil de données auprès des
intervenants, lors des différentes rencontres. Les items issus de la littérature ont été ajoutés. Ces
outils doivent être validés, notamment par une étude de contenu.
Comme il a été montré précédemment (voir figure 2), les indicateurs sont issus de la
triangulation entre les faits observés, les caractéristiques de la relation et le référentiel théorique.
Ils concernent la singularité de la situation familiale et sont donc observables et vérifiables à des
degrés différents, dans le temps. Ils établissent des liens de corrélation entre les différents
niveaux d’observation. Par contre, les facteurs, généralisables à l’ensemble de la population,
présentent des liens de causalités entre les faits et l’état de difficulté ou de danger. Les facteurs et
les indicateurs peuvent être reliés soit à l’individu (l’enfant, le père, la mère), soit à son
écosystème, plus précisément aux interactions entre les différents niveaux de cet écosystème, en
continuel changement.
42
7. CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
La recherche-action-formation dont il est rendu compte, initiée par le Service des Méthodes,
de la Recherche et de la Formation de l’Aide à la Jeunesse, subsidiée par le Ministère de la Santé,
de l’Enfance et de l’Aide à la Jeunesse, avait pour but principal d’interroger les pratiques de
l’évaluation des situations de difficulté et de danger, afin de dégager un langage commun
susceptible d’objectiver le processus mis en mouvement, sans nuire à la dimension humaine du
travail social.
Les nombreux intervenants qui ont participé à cette recherche ont insisté sur la nécessité de
baser l’évaluation des situations de difficulté et de danger sur une véritable mise en sens
collégiale, comprenant également les bénéficiaires. Cette évaluation émane de la confrontation
dynamique entre les faits, les caractéristiques de la relation d’aide et les repères théoriques.
Dans cette optique, le terme « état de danger », signifié dans le Décret de la Communauté
Française relatif à l’Aide à la Jeunesse (mars 1991), renvoie davantage au concept de
« situation », dans le sens où les problématiques rencontrées, observées et analysées dans leur
aspect singulier sont en perpétuelle mouvance.
Redonner le pouvoir aux familles, basé sur leurs capacités, leurs compétences, mais aussi
leurs limites, sans les juger, telle est finalement la portée d’une évaluation instituée. Celle-ci
requiert un cadre, une méthode étudiée et partagée, une réflexion collective et approfondie, sans
nier l’apport intuitif. Son processus peut être observé, ses critères largement expliqués et compris
par toutes les personnes concernées.
La méthodologie de l’évaluation doit certainement être pensée au sein de chaque équipe, afin
de lui donner tout le sens que requiert le travail social dans sa dimension humaine. Il ne s’agit en
aucune manière d’ « enfermer » les familles dans des normes mais, au contraire, de comprendre
les situations de difficulté ou de danger vécues par l’enfant, tout en isolant les ressources des
familles, afin de les mettre en mouvement, par une valorisation de leur pouvoir de changement.
La complexité de cette approche nécessite une formation approfondie, afin d’en approcher
toute la richesse.
43
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44
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9. ANNEXES
9.1 Glossaire relatif à l’évaluation de l’état de danger
Définition
… Pour en savoir plus
Sens opérationnel
Exemple
Références bibliographiques
BESOIN
CONSCIENCE PEDAGOGIQUE
DIMENSION SPATIALE
DIMENSION TEMPORELLE
ECOSYSTEME
ENFANT
FACTEURS DE DEVELOPPEMENT
FACTEURS DE RESILIENCE
FACTEURS DE RISQUE / DE PRESAGE
FAMILLE
HABITUDE
HABITUS
INTERVENANT
JEUNE
PARENTALITE
PLASTICITE
QUOTIDIEN/QUOTIDIENNETE
REFLEXIVITE INDIVIDUELLE/SOCIALE
RETENTION/PROTENTION
STRATEGIES DE DEFENSE
SUJET
TRAJECTOIRE
54
Besoins
Définition :
A chaque étape de son développement, l’enfant éprouve des besoins auxquels la famille et
l’environnement doivent répondre, au risque que l’enfant se construise avec des carences ou des
difficultés plus ou moins importantes. Les parents éprouvent également des besoins parallèlement
à ces différentes phases de développement.
…Pour en savoir plus :
La notion de « besoins » renvoie aux « nécessités » dont il doit être tenu compte pour
permettre à l’enfant de se développer harmonieusement, tout en se construisant une identité
solide. Le paradigme (modèle) des douze besoins (Pourtois, Desmet, 2004) envisage quatre
dimensions essentielles : les dimensions affective (affiliation : besoins d’attachement,
d’acceptation et d’investissement), cognitive (accomplissement : besoins de stimulation,
d’expérience, de renforcement), sociale (autonomie : besoins de communication, de
considération, de structure) et idéologique (valeurs : beau, bien-bon, vrai).
Sens opérationnel :
Parce qu’ils sous-tendent les conduites, les comportements et les attitudes du sujet, les
besoins psychosociaux de l’individu sont envisagés comme autant d’arguments à son
développement et à son épanouissement. Peu marquée sur le plan de l’ancrage théorique, la
notion de besoin permet en réalité de rassembler l’ensemble des perspectives théoriques autour
d’un « concept générique ouvert » susceptible d’articuler les différents points de vue. Il constitue
à ce titre un « concept syncrétique » qui permet d’envisager dans une même perspective les
conceptions psychanalytiques, comportementalistes, neurophysiologiques et éthologiques
Exemple :
Une gifle est-elle maltraitante ? Sur quel critère repose l’évaluation de l’éventuelle toxicité
de cette « pratique éducative » ? Les différences culturelles ? La fréquence ? L’intensité ? La
régularité ? Ces critères « objectifs » posent généralement problème dans la mesure où ils
résistent difficilement à un examen critique. Où fixer les limites ? Comment interpréter les
données ?
Notre paradigme nous permet d’évaluer le comportement à partir du sens subjectif qu’il prend
pour ses différents acteurs. Dans ce registre, une gifle peut être envisagée comme une forme de
maltraitance dès qu’elle met en péril l’enfant dans l’expression ou l’accomplissement de ses
besoins psychosociaux essentiels. Ainsi, lorsqu’elle signifie « je ne t’aime pas » (besoin
d’attachement), « je n’attache aucune importance à ce que tu es » (besoin d’acceptation), « je ne
me préoccupe pas de ce que tu deviens » (besoin d’investissement), la gifle peut être interprétée
comme un obstacle au développement affectif de l’enfant.
55
De la même façon, lorsque le comportement punitif est incohérent (besoin de renforcement),
condamne l’enfant dans chacune de ses expériences (besoin d’expérience) ou le freine à la
moindre velléité expérimentale (besoin de stimulation), il peut être assimilé à une pratique
nuisible au processus d’accomplissement cognitif dans lequel l’enfant doit nécessairement
s’engager pour réaliser son développement.
Dans le même ordre d’idée, lorsque la gifle signifie l’impossibilité d’échanger (besoin de
communication), qu’elle manifeste un déficit dans la prise en compte du développement
identitaire de l’enfant comme pourrait le suggérer une gifle donnée à une adolescente devant ses
copines ou une fessée administrée à un enfant plus âgé (besoin de considération) ou qu’elle ne
s’inscrit pas dans un cadre structuré ou structurant (besoin de limites), elle empêche alors l’enfant
de s’épanouir socialement.
Références bibliographiques :
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UMH.
Questionnaire relatif aux besoins : version pour les enfants, édition du C.E.R.I.S. Mons :
UMH.
56
Conscience pédagogique
Définition :
La conscience pédagogique désigne l’aptitude du sujet à percevoir et connaître le système de
référence sur lequel il s’appuie pour prendre des initiatives, agir et raisonner dès qu’il émet un
comportement éducatif.
…Pour en savoir plus :
La conscience pédagogique concerne l’ensemble des idées, des connaissances, des
sentiments, des sensibilités sur lesquels se base le parent pour donner du sens aux comportements
de son enfant et ses propres actions (Baartman, 1996). Les « sensibilités » renvoient à l’intuition,
à la connaissance des besoins, des émotions et des expériences de l’enfant.
Il est important de préciser que la conscientisation, c’est-à-dire l’acte de faire accéder à la
conscience, met en mouvement, d’une part, la subjectivité du sujet, son expérience et sa pensée,
et, d’autre part, son rapport à autrui et à la société (P. Freire, 1982). Le processus de
conscientisation suppose ainsi à la fois un cheminement individuel du sujet par rapport à sa
propre histoire et une démarche d’éveil par rapport aux réalités socioculturelles qui exercent une
influence sur ses comportements et ses attitudes. A travers le travail de conscientisation
pédagogique, les individus deviennent ainsi progressivement mieux capables de maîtriser leur
devenir et de s’affirmer en tant que sujets conscients de leur histoire et de la réalité sociale dans
laquelle elle se déroule.
Sens opérationnel :
La conscience pédagogique révèle à la fois l’aptitude du parent à attribuer lucidement un sens
aux comportements éducatifs qu’il émet et la capacité de concevoir sciemment la réponse que
l’enfant lui donne. La conscience pédagogique suppose de rendre explicite les modèles théoriques
implicites du parent, d’en révéler les paradigmes explicatifs sous-jacents et de mettre à jour les
conceptions éducatives qui en fondent la substance de façon à soumettre l’ensemble des attitudes
et des comportements éducatifs à des processus conscients.
La conscience pédagogique est donc ce fondement essentiel par lequel l’éducation devient un
acte réfléchi, intelligent et socialement transmissible. C’est par ce biais que le travail éducatif
prend des distances avec l’activité instinctive, impulsive ou mécanique qui en réduit la
signification. C’est comme cela aussi qu’elle devient une construction psychosociale complexe.
57
Exemple :
Monsieur X. ne supporte pas que sa petite fille de quatre ans suce son pouce. Ainsi, chaque
fois qu’il surprend l’enfant dans l’habitude qu’il juge nocive, il lui pince sévèrement le bras
espérant par là éteindre le comportement. La nuit, pour éviter qu’elle ne se livre pendant son
sommeil à la succion de son pouce, Mr. X attache en outre le bras droit de son enfant au barreau
du lit.
Lorsque l’intervenant social soulève avec le parent le problème que pourrait poser une telle
attitude éducative, l’intervenant met en réalité dans le même temps à jour une procédure
pédagogique sous-tendue par des préceptes implicites. Mr. X. s’emporte alors en expliquant,
d’une part, qu’il ne voit pas en quoi les procédures éducatives mises en œuvre posent question et,
d’autre part, concède qu’il ne conçoit pas d’autres techniques de contrôle plus efficaces.
La double argumentation de Monsieur X. illustre comment une conscience pédagogique
insuffisante freine en définitive les probabilités de plasticité comportementale parentale. Dans un
premier temps, peu conscient de la technique pédagogique qu’il met en œuvre, il ne peut la
concevoir comme problématique. Dans un second temps, une fois que la procédure devient
explicite, il se réfugie derrière le schéma comportementaliste réducteur qui sous-tend sa
démarche éducative pour en justifier le sens.
La conscience pédagogique suppose ainsi dans un premier temps de rendre explicite les
théories pédagogiques sous-jacentes aux comportements et aux attitudes éducatives des parents.
Il s’agira ensuite, à partir de ce travail de conscientisation, de vérifier comment la lucidité
pédagogique peut en définitive laisser place à un changement de perspective, une remise en cause
des schèmes comportementaux et/ou un questionnement des conceptions théoriques et des
représentations qui guident les pratiques.
Ainsi, pour ce qui concerne la situation de Mr. X, l’intervention visera d’abord la révélation
du paradigme qui justifie la mise en œuvre des comportements considérés comme
problématiques. Ensuite, au-delà de l’expression, l’objectif de l’intervenant consistera à vérifier
dans quelle mesure la conscience pédagogique ainsi stimulée se montre perméable à des schémas
pédagogiques alternatifs, sans doute, pour le cas qui nous occupe, davantage sensibles au vécu de
l’enfant.
Le travail de conscientisation devra à cet endroit tenir compte à la fois du cheminement
individuel de Mr. X par rapport à sa propre histoire et de l’aptitude du sujet à prendre des
distances par rapport aux réalités socioculturelles qui exercent une influence sur ses
comportements et ses attitudes.
Références bibliographiques:
-
BAARTMAN, H. (1996). Opvoeden kan zeer doen. Over oorzaken van
kindermishandeling, hulpverlening en preventie (Raising children can hurt. About causes
of child maltreatment, treatment and prevention). Utrecht
-
GABEL, M. § DURNING, P. (sous la dir. de) (2002). Evaluation des maltraitances,
rigueur et prudence. Paris : Fleurus.
58
Dimension spatiale
Définition:
Dans la dimension spatiale interviennent à la fois l’espace matériel et la relation qui unit les
personnes en présence. Cette relation prend une « teinte » différente selon la qualité symbolique
de cet espace : les personnes se comportent souvent de manière différente selon qu’elles se
trouvent dans un bureau de l’administration ou chez elles.
… Pour en savoir plus :
La notion d’espace désigne, du point de vue des sciences sociales, tout territoire qui articule
un espace physique et un pouvoir politique (au sens large du terme). Ainsi entendu, le concept
mêle à la donnée physique que suppose l’idée de territoire une opération symbolique qui la
désigne, la circonscrit et par laquelle un « pouvoir » s’institue.
La dimension spatiale des réalités familiales permet ainsi de mettre en évidence à la fois
l’espace interpsychique qui régule la forme et la nature des interactions qui y ont lieu et le
territoire physique dans lequel elles s’articulent.
Sens opérationnel :
La description de la dimension spatiale des réalités familiales suppose de tenir compte de
leurs aspects territoriaux dans une double perspective :
1) le milieu de vie de la famille, de l’enfant, du jeune, tel qu’il est décrit par les personnes
concernées et tel qu’il est observé par l’intervenant ;
2) le lieu où se déroulent les entretiens : soit dans un bureau du service, soit dans le logement
familial ou tout autre lieu.
La prise en considération de la cette dimension spatiale permet de rendre compte de la qualité
et de la quantité des interactions familiales en même temps qu’elle circonscrit leur modalités de
régulation. Elle rapporte également les caractéristiques physiques des lieux dans lesquels ces
interactions se déroulent.
Exemple :
Lorsqu’elle s’attache à la compréhension du phénomène de maltraitance intrafamiliale,
l’approche éthologique (science des comportements) met l’accent sur la fonction écologique des
conduites agressives à l’intérieur des familles. Celle-ci tient essentiellement compte de la
répartition équilibrée des personnes et des objets dans l’espace disponible. Dans ce paradigme, la
violence domestique apparaît en étroite corrélation avec la faible taille du territoire occupé par le
groupe familial. Cette relation s’explique par le fait que, notamment dans les couches sociales
moins favorisées, les familles disposent de moins d’espace, d’une mobilité spatiale moins grande
59
et que leurs membres ont moins d’occasions de fuite lorsqu’ils sont tendus, lorsqu’ils sont mal à
l’aise ou lorsqu’ils s’ennuient.
Dans cette optique, nos travaux (CERIS, 1992) montrent que plus de 60 % des logements où
vivent les enfants ayant fait l’objet d’un signalement de maltraitance (S.A.J./S.P.J.) peuvent être
considérés, suivant les normes européennes, comme des foyers surpeuplés ou insalubres.
Dimension temporelle
Définition :
La dimension temporelle renvoie à la durée de l’intervention et de la mise en place du
changement. Elle diffère selon les personnes concernées qui perçoivent la durée selon leurs
propres capacités de compréhension, de remise en question et d’action.
… Pour en savoir plus :
La notion de temps désigne l’unité de mesure qui définit la durée de tous les processus,
événements et transformations qui composent la réalité du monde physique et du monde
socioculturel. Ainsi entendu, le concept mêle à la donnée physique que suppose l’idée de temps
solaire l’aspect psychosocial que sous-tend la notion d’historicité. Cette double temporalité
permet au sujet de se situer dans son environnement humain, et de se concevoir dans un rapport
passé, présent et futur, au sein de la société qui est la sienne.
La dimension temporelle des réalités familiales met ainsi en évidence la manière dont
l’environnement psychosocial structure le temps des familles, définit les modalités selon
lesquelles chacun de ses membres s’inscrit dans un rapport ancien, actuel et anticipé aux
événements et permet d’envisager le groupe familial dans sa double relation à la quotidienneté et
à l’historicité.
Sens opérationnel :
La description de la dimension temporelle des réalités familiales suppose de l’envisager dans une
double perspective :
1) l’histoire singulière de la famille, de l’enfant et du jeune qui s’inscrit dans un passé, un
présent et un avenir ;
2) le temps du changement de chacun des membres de la famille concerné par le projet
d’aide. Sa durée ne coïncide pas nécessairement avec celle que l’intervenant a proposée,
voire imposée à la famille. De même, elle peut être différente de celle considérée par la
gestion administrative de la prise en charge. Doivent également être considérées toutes les
pressions extérieures (émanant d’autres personnes non impliquées dans le système :
famille élargie, opinion publique…) exercées sur les intervenants.
60
Exemple :
Les récits de vie reflètent généralement les parcours individuels sous forme de trajectoires
envisageant chaque sujet dans son rapport au passé, de bilans situant la personne dans son état
présent et de projets le situant dans ses perspectives d’avenir. Le sens des actions qui fondent le
récit s’inscrit ainsi dans une référence simultanée au passé (souvenirs, rétention), au présent
(vécu) et au futur (anticipation, protention).
Ainsi envisagé, le récit de vie définit un « horizon temporel » (Halbwachs, 1996) entendu
comme l’ensemble des facteurs (événements, perceptions, normes) qui président à la
contextualisation temporelle de chaque acteur social. Condensant par le récit l’ensemble des
points de repère concernant les expériences socio-temporelles vécues (Nuttin, 1996), le sujet qui
s’engage dans la narration de soi ou qui raconte ce qui est important pour lui-même, détermine
ainsi un lieu de rencontre entre la reconstitution du passé et l’anticipation de l’avenir en même
temps qu’il définit le champ dans lequel se réalisent ses différentes conceptions du temps.
L’analyse des récits de vie lorsqu’elle conduit de cette façon à dégager des « horizons
temporels » permet d’envisager la manière dont le sujet se positionne en tant qu’acteur de son
parcours individuel ou, au contraire, se considère comme le produit de son histoire. La prise en
compte de la dimension temporelle permet ainsi de vérifier à la fois le poids des déterminismes
perçus par les sujets eux-mêmes, tout en identifiant la force d’acteurs qu’ils s’attribuent
néanmoins dans leur parcours de vie.
Le récit de vie permet ainsi de vérifier comment l’individu s’inscrit dans un cycle de vie qui
le contraint à la répétition (l’héritage du passé qui pèse sur le présent) ou se définit comme agent
de son historicité (l’anticipation de l’avenir détermine la manière de vivre le présent). Cycle de
vie et historicité constituent sans doute à cet endroit les deux temporalités fondamentales de
l’homme contemporain.
Références bibliographiques :
-
HALBWACHS, M. (1996). « La mémoire collective du temps ». In Cahiers
internationaux de sociologie. Vol. 101, 45-65. Paris : PUF.
-
NUTTIN, J. (1996). Théorie de la motivation humaine. Coll. Psychologie d’aujourd’hui.
Paris : PUF.
61
Ecosystème
Définition :
Selon le point de vue écosystémique, le comportement d’une personne doit être étudié en
tenant compte de l’influence réciproque des multiples systèmes qui composent son
environnement écologique et des caractéristiques de l’individu lui-même.
…Pour en savoir plus :
Pour Bronfenbrenner (1979), initiateur du concept d’écosystème, tout comportement humain
fait partie d’une série de systèmes imbriqués les uns dans les autres…
Le paradigme écosystémique prend en considération l’ensemble des facteurs qui dépassent la
seule volonté individuelle pour atteindre toutes les sphères de la vie collective, depuis la plus
proche de l’individu (sa famille, sa trajectoire, son histoire) jusqu’à la plus éloignée (principes
idéologiques qui sous-tendent la politique sociale et économique de l’Etat).
L’écologie expérimentale du développement humain constitue ainsi un moyen d’analyser les
multiples influences que l’individu subit lorsqu’il émet un comportement ou manifeste une
attitude. En resituant le sujet dans son écosystème, l’observateur est amené à se préoccuper des
relations qu’entretient sa famille avec les groupes et les institutions composant son
environnement social, à analyser leurs interactions et à en comprendre les influences.
En ce qui concerne l’intervention, l’approche écologique propose d’agir sur plusieurs niveaux
à la fois afin de réduire l’impact des facteurs de risque et de promouvoir l’action des facteurs de
protection.
Le microsystème est relatif au milieu immédiat au sein duquel les acteurs s’engagent dans des
activités particulières ou dans des rôles particuliers pour un laps de temps défini.
Le mésosystème est relatif aux interrelations entre les milieux essentiels qui contiennent
l’enfant à un moment précis de son existence : les interrelations entre la famille, l’école, le
groupe d’âge, etc. ; il s’agit en fait d’un système de microsystèmes.
L’exosystème est relatif aux structures sociales concrètes qui exercent une influence sur le
mésosystème, déterminent ou délimitent ce qui s’y passent : il s’agit de grandes institutions de la
société, telles que celles qui gèrent la distribution des biens et des services, les « mass médias »,
etc. ou encore, les classes sociales en tant que facteurs d’influence.
Le macrosystème est relatif aux structures d’éducation à l’échelle nationale culturelle. On y
trouve les institutions, les systèmes juridiques, éducatifs et politiques ; ces derniers sont examinés
en tant que producteurs d’une idéologie qui fournit explicitement et implicitement un sens et une
motivation aux organismes particuliers, aux interrelations et aux rôles observés aux niveaux
inférieurs de l’écosystème.
62
Représentation schématique
Macrosystème
=====================================================================
=================================================================
Exosystème
Mésosystème
Chronosystème
Microsystème
ONTOSYSTEME
63
Sens opérationnel :
Des auteurs, comme Garbarino (1980, 1987, 1990) et Belsky (1990), ont appliqué le modèle de
Bronfenbrenner (1979) au domaine de la maltraitance et ont montré que la modification des
conduites parentales inadéquates doit tenir compte des processus d’équilibration de la famille, de
chacun de ses membres et du réseau social de la famille. L’écosystème comporte six couches
systémiques.
-
l’ontosystème : Il comprend l’ensemble des caractéristiques, des états, des compétences,
des habiletés, des vulnérabilités ou des déficits innés ou acquis d’un d’individu.
Autrement dit, cela concerne l’observation de l’enfant, du jeune, du parent en tant que
résultat d’interrelations. La relation parents-enfant est envisagée sous l’angle de
l’influence des conduites de chacun des parents sur l’enfant et vice versa.
-
le microsystème : Il concerne les différents systèmes et les différentes personnes
assidûment fréquentés par l’enfant. Il représente à la fois son milieu de vie immédiat (le
voisinage immédiat, l’école) et les personnes avec qui il a des relations directes (les
membres de la famille nucléaire et de la famille étendue, les amis, les voisins, etc.).
-
le mésosystème : Il comprend les interrelations entre les microsystèmes. Observer le
mésosystème revient à tenter de comprendre la nature des liens (conflictuels, réciproques,
antagonistes…) qui ont pu s’établir entre les différents systèmes fréquentés par l’enfant et
les impacts de ces interactions sur son environnement. Par exemple, des relations
conflictuelles entre l’école et les parents (deux microsystèmes avec qui l’enfant a des
relations directes) peuvent avoir une influence néfaste sur la conduite de l’enfant en classe
(Evequoz, 1984).
-
l’exosystème : Il englobe l’ensemble des environnements avec lesquels l’enfant n’a pas
d’interactions directes, mais dont les perturbations peuvent néanmoins l’affecter.
L’exosystème d’un enfant peut inclure les endroits où travaillent ses parents, leur réseau
social, leurs difficultés financières… Par exemple, bien que l’enfant ne soit pas concerné
par les conditions de travail de ses parents, il peut néanmoins en subir les contrecoups.
-
le macrosystème : Il constitue l’ensemble des croyances, des valeurs, des idéologies
partagées par une communauté. Elles constituent en quelque sorte le cadre de référence
culturelle ou sous-culturelle qui dicte les règles de conduite des individus, les relations
entre les personnes, les attitudes, les droits et les devoirs des parents à l’égard des enfants,
les pratiques parentales, etc. Par exemple, la place accordée aux enfants dans la famille, la
manière d’éduquer un enfant, les pratiques disciplinaires… sont en bonne partie le reflet
des valeurs et des croyances partagées par le sous-groupe culturel auquel appartient la
famille.
64
-
le chronosystème : Il englobe le système du temps et des événements. Il comprend la
chronologie des événements vécus par les individus ou les familles, les tâches
développementales auxquelles ils sont confrontés et l’influence de ces changements et des
continuités sur leur développement respectif. Cela réfère aux périodes de transition (la
naissance d’un enfant, l’entrée à l’école, le moment de l’adolescence…), mais aussi des
événements stressants ou de remise en question (séparation, deuil, accident…).
Exemple :
Extrait d’un rapport :
« Marie est âgée de 6 ans. Elle est entrée à l’école il y a quelques mois. Elle est en échec
dans l’apprentissage de la lecture, elle pleure souvent, s’isole. Régulièrement, elle apparaît
négligée : vêtements sales et peu adaptés, pas d’hygiène corporelle. Son enseignante la décrit
comme une enfant dispersée qui perturbe la classe et ne veut rien apprendre. Marie est la cadette
de sa famille (informations concernant l’ontosystème).
Interpellée par l’institutrice, la maman de Marie minimise les problèmes (information
concernant le microsystème).
Chloé, son aînée de deux ans, a fréquenté la même école. C’est une élève exemplaire en tous
points.
La maman de Marie attend un troisième enfant. Elle et son mari espèrent un garçon. Cette
troisième grossesse est éprouvante. Madame est fatiguée et angoissée, car les médecins craignent
des poussées d’hypertension artérielle qui pourraient s’avérer dangereuses pour le bébé et pour
elle-même.
Le papa de Marie est cadre moyen dans une petite entreprise très performante (informations
concernant le microsystème de Marie). On exige beaucoup de lui ; on lui a récemment confié
de nouvelles responsabilités qui le passionnent et l’inquiètent tout à la fois. Il reconnaît rentrer
tard, souvent avec du travail dans la tête (informations concernant l’exosystème de Marie).
Il y a quelques mois, les parents de Madame ont pris leur retraite ; ils sont partis s’installer à
la campagne à quelque deux cents kilomètres (informations concernant le microsystème de
Marie). Madame est heureuse pour eux, mais ils lui manquent parfois. Quand elle est fatiguée,
le soir, elle regrette le temps où sa mère, qui habitait alors à quelques rues, passait chercher les
filles à l’école ou bien les gardait le temps d’une sortie en tête à tête avec son mari (information
concernant le mésosystème de Marie).
Suite au départ de ses parents, elle est venue s’installer dans la maison familiale avec sa
famille. Ils ne connaissent personne dans ce nouveau quartier. (informations concernant le
microsystème de Marie). »
65
Références bibliographiques :
- BRONFENBRENNER, U. (1979). The ecology of human development, experiments by nature
and design. Cambridge: Harvard University Press.
- BELSKY, J. (1980). Child Maltraitment: An Ecological Integration. American Psycholgist, 35,
4, 320-335
- GARBARI, J. (1981). An ecological approach to child maltreatment. In : L.H. Pelton (Ed.), The
social context of child abuse and neglect. New York: Human Sciences Press. 28-267.
- EVEQUOZ, G. (1984). Le contexte scolaire et ses otages, vers une approche systémiques des
difficultés scolaires. Paris : ESF.
66
Facteurs de développement
Définition :
Les facteurs de développement renvoient à ce processus d’évolution perpétuelle lié à la capacité
que possède tout être vivant à « s’actualiser » (C. Rogers, 1983), à s’accomplir, mais aussi grâce
au rôle de l’environnement qui se montrera capable ou non de lui en faciliter l’émergence. (M.
Mazet, 2003)
… Pour en savoir plus :
Les facteurs de développement rassemblent l’ensemble des données endogènes ou exogènes qui,
de façon distale ou proximale, exercent une influence sur la croissance physique ou l’évolution
psychosociale du sujet.
Développement physiologique
Pour comprendre le mécanisme de croissance biologique, il faut appréhender l’ensemble des
changements qui se manifestent dans la durée d’une vie.
Trois catégories fondamentales de changement survenant avec l’âge sont généralement
identifiées :
-
-
-
les changements dus à des influences biologiques. La notion d’horloge biologique
désigne la séquence fondamentale des changements biologiques qui se produisent
avec l’âge ;
les changements dus à des expériences communes. La notion d’horloge sociale définit
la suite d’expériences culturelles communes, survenant généralement au même âge.
Cette « horloge sociale » façonne la vie de la plupart des individus selon des
processus communs de changement (Helson, Mitchell et Moanne, 1984).
Les changements dus à des influences internes. Ces changements communs résultent
de la façon dont l’individu réagit psychologiquement à la pression des horloges
biologique et sociales.
Le développement est également façonné par des expériences moins universelles. Chaque
culture possède en effet ses propres attentes, ses propres normes et ses propres modèles de
développement relatifs à l’âge. En outre, les changements individuels apparaissent également
affectés par les expériences personnelles de chacun.
Le développement biophysiologique dépend ainsi de facteurs internes (génétique) et de
facteurs externes (apprentissage, comportements alimentaires). La notion de période sensible
désignant la période du développement au cours de laquelle un type de stimulation est
particulièrement efficace monte clairement l’interdépendance des facteurs internes et externes
dans le processus de maturation physiologique.
67
Développement psychosocial
Retenir comme variable centrale le développement psychosocial de l’enfant suppose de
déterminer quelles variables interviennent dans le processus de maturation affective, cognitive et
sociale de l’enfant. Il s’agit également d’identifier les mécanismes par lesquels se réalise leur
influence. Certaines variables sont relativement éloignées de l’explication causale : ce sont les
variables distales (par exemple, le milieu social). D’autres sont plus proches de l’explication
causale : ce sont les variables proximales (par exemple, les comportements éducatifs parentaux).
En discriminant les facteurs de protection (cf. supra) qui ont un rapport significatif avec la
qualité du développement de l’enfant, il devient possible de disposer d’autant de repères pour
l’éducation de l’enfant.
Exemple :
Pierre, comme de nombreux petits enfants, est devenu l’enfant-roi de la famille. Chaque nuit,
il se rend dans la chambre de ses parents en prétextant qu’il s’ennuie. Ses parents entretiennent
cette attitude en se levant chaque nuit pour répondre à son désir. Epuisés, ils se demandent
comment réagir.
La fermeté, qui pouvait paraître évidente dans une telle situation, n’a pu intervenir
spontanément de leur part. Pourtant, c’est grâce à cet apprentissage que l’enfant va apprendre à
grandir, à affronter ses frustrations, à passer de son rêve de toute-puissance à la réalité, à accepter
les limites que celle-ci impose. Ainsi, quand l’enfant a atteint trois ou quatre ans et acquis la
parole, il a besoin par ailleurs que ces limites lui soient mises en mots.
« Laisser faire ce qu’il veut à un enfant qui n’a pas encore développé sa volonté, c’est trahir le
sens de la liberté. Car la liberté est, au contraire, une expérience de développement de la
personnalité, atteint par l’effort et l’expérience personnelle. » (M. Montessori, 2003)
Références bibliographiques :
- ROGERS, C. (1983). Le développement de la personne. Paris : Dunod.
- MAZET, M. (2003). L’enfant qui a mal. Paris : Desclee De Brouwer.
- HELSON, R., MITCHELL, V. & MOANE, G. (1984). Personality and patterns of adherence
and nonadherence to the social clock. Journal of Personality and Social Psychology, 46. 10791096.
- MONTESSORI, M. (2003). Eduquer le potentiel humain. Paris : Desclée De Brower.
68
Facteurs de protection
Définition :
La notion de facteur de protection désigne tout élément qui favorise l’action de mettre à l’abri
d’un danger.
… Pour en savoir plus :
Les facteurs de protection, aussi appelés facteurs de privilège, désignent l’ensemble des
données comportementales ou attitudinales observées chez le parent qui sont en corrélation
positive avec le développement de l’enfant.
Lorsqu’il s’applique au rôle parental, ce concept fait référence aux comportements, aux
attitudes parentales qui protègent l’enfant des agressions physiques et psychologiques qui
proviennent de l’environnement ou du sujet lui-même. A ce propos, les facteurs de protection
étayent généralement une attitude globale d’attention bienveillante envers l’enfant et son
développement en même temps qu’une prise de conscience suffisante de ses besoins
psychosociaux essentiels et de l’évolution de leur expression.
Les facteurs de protection regroupent à cet endroit l’ensemble des comportements et des
attitudes qui facilitent ou stimulent la prise de conscience par le parent des besoins de son enfant,
de ses propres besoins et du lien qui peut être fait entre les uns et les autres.
Exemple :
L’aptitude parentale à reconnaître les émotions de l’enfant et à en favoriser l’expression
socialisée constitue indiscutablement un facteur de protection susceptible à la fois de favoriser
l’adaptation de l’enfant à son environnement et de limiter le risque de blessures qui résulte de la
confrontation de l’enfant à la réalité qui le contient. Ainsi, une attitude qui ne dénie pas l’émotion
ressentie par l’enfant, mais lui permet d’en dépasser la manifestation somatique à travers
l’expression verbale ou symbolique – dessin, musique, etc. - constitue un réel argument de
protection. Chaque fois que le parent émet un comportement qui permet à l’enfant de « dire
pourquoi il est triste », « exprimer les raisons de sa colère », « expliquer les motifs de ses peurs »
ou « faire part de son dégoût », il contribue ainsi, non seulement à rendre les marqueurs
somatiques inutiles - et donc à terme à les éteindre-, mais aussi à reconnaître à son enfant le droit
d’éprouver des émotions personnelles.
La fusion émotionnelle entre le parent et son enfant freine en outre l’aptitude de l’enfant à
identifier ses propres émotions et menace à ce titre le processus d’individuation. « Je suis triste,
c’est pour cela qu’il pleure. », « Son père me dégoûte, d’ailleurs l’enfant refuse de le voir. »,
« Les phobies du petit m’angoissent. », « Je ne suis heureuse que quand il est content. » etc.
C’est le même mécanisme que nous identifions à travers le concept de « collusion
transgénérationnelle ». Ce phénomène désigne un processus par lequel les besoins de l’adulte et
de l’enfant sont fusionnés dans une même dynamique au point de ne plus pouvoir être
différenciés par le parent. Cet état de confusion rappelle un ensemble de situations dans
lesquelles le parent éprouve les pires difficultés à envisager son enfant comme un sujet éprouvant
69
des besoins propres. L’incapacité de se différencier ne permet plus à l’enfant de se poser comme
sujet dans la relation. Annulé dans l’expression de ses besoins, l’enfant devient porteur de
l’accomplissement des besoins du parent. « Ce que ma fille ressent, c’est moi qui le ressens. Ce
dont elle a besoin, c’est comme si c’était moi qui en ressentais le besoin. Je ne voulais plus vivre,
c’est pour cela que j’ai voulu la tuer… ». Cette phrase issue d’un entretien réalisé avec une mère
qui avait tenté d’étrangler sa petite fille de trois ans avec un câble de télédistribution illustre
clairement l’effet parfois dévastateur de ce type de fonctionnement confusionnel.
Sans toucher à de telles extrémités, des phrases confusionnelles du style « J’ai froid, mets ton
pull… », émaillent le quotidien de nombreuses familles pour entretenir une forme de collusion
entre ce que l’adulte ressent et ce que l’enfant est censé éprouver… Lorsqu’elle porte sur des
comportements isolés et ne reflètent pas une attitude générale, l’amalgame porte peu à
conséquence. Par contre, lorsqu’elles se répètent et traduisent une insensibilité permanente du
parent aux besoins de son enfant, elles menacent l’enfant dans son développement psychosocial.
C’est pour cette raison que nous considérons qu’une relation éducative suffisamment sensible
à l’ensemble des besoins de l’enfant constitue un puissant facteur de privilège d’une éducation
réussie. Dans le même ordre d’idée, comme nous l’avons rappelé dans le premier point, le fait
que l’enfant dispose au sein de sa famille d’un temps d’écoute qui lui permet d’exprimer le
contenu de ses émotions constitue également un indice de bientraitance. Une prise en
considération suffisante des besoins de l’enfant et une prise en compte attentive de ses émotions
constituent donc des facteurs de protection qu’il convient de relever lorsqu’il s’agit d’évaluer les
probabilités d’épanouissement de l’enfant au sein de sa famille.
Références bibliographiques :
- GABEL, M., JESU, F. & MANCIAUX, M. (sous la dir. de) (2000). Bientraitances. Mieux
traiter familles et professionnels. Paris : Fleurus.
- DESMET H. & POURTOIS J.-P. (sous la dir. de) (2005). Culture et bientraitance. Bruxelles :
De Boeck Université.
70
Facteurs de résilience
Définition :
Il existe de nombreuses définitions de la résilience, mais dans l’ensemble, ce terme est utilisé
pour définir trois phénomènes différents :
- se développer de manière positive malgré l’expérience d’un environnement à haut risque ;
- avoir des compétences soutenues face à des situations de stress aigu ou chronique ;
- guérir d’un traumatisme.
… Pour en savoir plus :
Il s’agit d’un ensemble de processus sociaux et intrapsychiques qui s’activent à travers le temps
et en fonction des différents attributs de l’enfant, de la famille et des environnements sociaux et
culturels (Fonagy et al, 1994). La résilience est un développement normal sous des conditions
difficiles.
Exemple :
« Le jeune Kévin, âgé de trois ans est hospitalisé au département d’un C.H.U. de province
pour fracture des deux os de l’avant-bras droit que les parents attribuent à une chute dans
l’escalier. Mais l’attention est attirée par le mauvais état de l’enfant, par sa tristesse et par des
cicatrices de brûlure au niveau du siège. Un signalement est fait et l’enfant est rendu à sa famille
avec une mesure d’assistance éducative.
Dix ans plus tard, à l’occasion d’une enquête systématique de suivi des enfants hospitalisés
antérieurement pour sévices, une visite à domicile par la psychologue enquêteuse et l’interne du
service permet de constater une situation normale. L’enfant s’est bien développé, il est en bonne
santé, sa scolarité est satisfaisante et l’examen clinique est sans particularités. Mais surtout, la
psychologue est frappée par le caractère extraverti de Kévin, son dynamisme, sa joie de vivre. La
mère, qui a accepté cette visite non sans réticence, raconte cependant, sans se faire prier, ce qui
s’est passé depuis l’hospitalisation. Ulcérée par la mesure judiciaire, elle-même victime de
violence de la part de son conjoint, elle a décidé de le quitter. Obligée alors de reprendre son
travail, elle a alors confié Kévin à ses parents résidant à proximité. Et l’enfant a noué avec son
grand-père une relation affective très forte. En graves difficultés scolaires au début du cycle
élémentaire, il a bénéficié d’un soutien scolaire par un jeune bénévole d’une association avec
lequel il s’est trouvé en confiance : il a fait de rapides progrès. Son père ne s’est plus manifesté et
Kévin a trouvé, dans son grand-père, un substitut paternel. Le bilan psychologique approfondi
semble rassurant. L’enfant parle de son passé douloureux avec beaucoup d’objectivité et sans
ressentiment. La mère, tout en rappelant les mauvais traitements dont elle-même et son enfant ont
souffert pendant des années, affirme que ce passé douloureux, s’il n’est pas oublié, n’empoisonne
plus leur existence et que tout va bien désormais. » (cité dans Manciaux M., 2001)
On retrouve, dans ce récit, deux éléments essentiels fréquemment rencontrés dans la vie des
enfants maltraités résilients : le lien fort à une personne aimante et la capacité à parler du passé
avec lucidité.
71
Références bibliographiques :
- CYRULNIK, B. et al. (1999). Ces enfants qui tiennent le coup. Revigny S/Omain : Hommes et
Perspectives.
- FONAGY et al. (1994). The theory and practice of resilience. J. Child Psychiatry, 35 (2), pp.
231-257.
- FORTIN, L. & BIGRAS, M. (2000). La résilience des enfants : facteurs de risque, de protection
et modèles théoriques. Pratiques psychologiques, 1, 49-63.
- LECOMTE, J. (2004). Guérir de son enfance. Paris : Odile Jacob.
- MANCIAUX, M. (sous la dir. de) (2001). La résilience. Résister et se construire. Genève :
CMS.
Facteurs de risque / de danger
Définition :
Eléments dont l’accumulation et l’interaction ont une probabilité plus ou moins importante de
menacer l’intégrité physique et psychique de l’enfant, du jeune et donc de perturber son
développement harmonieux.
…Pour en savoir plus :
Eléments appartenant à l’enfant, au jeune ou provenant de son environnement, susceptibles de
provoquer un traumatisme ou toute autre atteinte à son intégrité physique ou psychique ou encore
à son développement. L’importance des facteurs est déterminée par la gravité de leurs
conséquences ainsi que par leurs effets dus à leur aspect cumulable et interactionnel. Il ne faut
cependant pas se focaliser sur l’identification des facteurs de risque, mais plutôt s’intéresser aux
mécanismes de risque.
Sens opérationnel :
Depuis les années 70, se sont intensifiées les recherches en psychologie concernant les
éléments susceptibles d’influencer le développement des enfants et des adolescents vers des
situations d’inadaptation et de psychopathologie.
Au départ, les études traitaient principalement de l’épidémiologie de problèmes de santé
mentale, tels que la dépression et la schizophrénie (Garmezy, 1974). Les chercheurs se sont
ensuite intéressés à différents types de risque encouru dans des domaines aussi variés que la
maltraitance (Cicchetti et Lynch, 1989), la délinquance (Loeber et Dishion, 1983), l’abus de
72
drogues (Rhodes et Jason, 1990), le retard de développement cognitif (Palacio-Quintin, 1995).
Enfin, des recherches ont été menées sur les conditions environnementales (telles que la
pauvreté, l’isolement social) et les caractéristiques familiales (Garbarino et Sherman, 1980,
Palacio-Quintin, 2000).
On a ainsi élaboré un certain nombre de listes de facteurs de risque dans les différents
domaines.
Les chercheurs ont alors constaté que certains facteurs ciblés jadis comme des causes de
l’apparition de certaines difficultés chez l’enfant s’accompagnent souvent d’autres facteurs de
risque. Par exemple, des études récentes sur l’effet chez les enfants et les adolescents de l’abus
pré et postnatal d’alcool et de drogue par les parents montrent la présence associée de nombreux
autres facteurs contextuels. Les enfants de ces parents, par voie de conséquence, sont soumis à
davantage de facteurs de risque que d’autres enfants de milieu socio-économique bas, par
exemple.
Ces résultats entraînent donc un passage du modèle de l’effet principal à la considération de
risques multiples. En d’autres termes, le risque s’accroît avec l’augmentation du nombre de
facteurs de risque auxquels l’enfant est exposé plutôt que selon le type de facteurs de risque.
Il convient également de tenir compte de l’effet engendré par l’interaction entre les différents
éléments. En effet, deux facteurs interagissant sont susceptibles d’avoir plus d’impact que
l’addition de plusieurs éléments isolés.
D’autre part, les recherches récentes s’attardent davantage sur le rôle des facteurs de
protection pouvant faire contrepoids aux facteurs de risque et développer de la résilience. Dans ce
contexte, il paraît dès lors indispensable de se centrer sur l’étude de la relation entre le cumul des
facteurs de risque, leur interaction, et la présence ou non de facteurs de protection.
Exemples :
De nombreuses études, publiées notamment dans la célèbre revue américaine « Child abuse and
Neglect » relatent l’existence de corrélations entre différents facteurs de risque cumulés.
Exemples :
- Il y a un lien indirect entre les effets de la pauvreté et les punitions corporelles lorsqu’il y a
dépression maternelle et conflits au niveau du couple. (Eamon M. K., 06/01).
- Le stress perçu par le parent comme étant lié à des problèmes financiers, au logement et aux
relations dans la période de l’immédiat postpartum est associée de manière accrue à l’abus
physique potentiel à 7 mois. (Cadzow et al., 09/99).
- Les jeunes qui grandissent dans un foyer où il y a de la violence conjugale démontrent un taux
de mésadaptation élevé. On a noté que la violence paternelle apporte un risque d’angoisse, de
désordre du comportement et de crimes contre la propriété d’autrui, tandis que la violence initiée
par la mère occasionne davantage de problèmes d’abus et de dépendance à l’alcool. (Fergusson
D.M. & Horwood J., 05/98)
Références bibliographiques :
- CICCHETTI, D. & CARLSSON, V. (Eds.) (1989). Child Maltreatment: Theory and Research
on the Causes and Consequences of Child Abuse and Neglect. Cambridge: Cambridge University
Press
73
- GARMEZY, N. (1974). Children at risk: The search for antecedents of schizophrenia:
Conceptual models and research methods. Schizophrenia Bulletin, 8, 14-90.
- GARBARINO, J. & SHERMAN, D. (1980). High-risk neighborhoods and high-risk families:
the human ecology and child maltreatment, Child Developpement, 51, 188-198
- LOEBER, R. & DISHION T. J. (1983). Early predictors of male delinquency: A review.
Psychological Bulletin, no 94, 68-99.
- RHODES, J.E. & JASON, L.A. (1990). A social stress model of substance abuse. Journal of
Consulting and Clinical Psychology, nº 58, 395-401.
- PALACIO-QUINTIN E. (1995). Les différences de développement cognitif entre enfants de
milieux socio-économiques différents et les facteurs associés à ce phénomène. In J. Lautrey (Ed.),
Universel et différentiel en psychologie, (pp. 307-325). Paris : PUF.
- PALACIO-QUINTIN E. & CODERRE R. (2004). Les facteurs de risque et leur effet cumulatif
sur le développement social de l’enfant. La revue internationale de l’éducation familiale, 8 (1), 922.
Habitus
Définition :
L’habitus, c’est ce qui nous pousse à nous comporter ainsi que nous nous comportons. Le
moteur de notre comportement comprend principalement une sorte de sédiment de toute notre
histoire, un sédiment dans lequel résideraient des dispositions nous dirigeant vers telle ou telle
pensée, tel ou tel acte. Si nous sommes notre histoire en train d’agir, nous sommes aussi, en
même temps en train d’entrer dans notre histoire. Bourdieu a appelé « habitus » ce lieu
hypothétique auquel on pourrait symboliquement attribuer l’explication du comportement. Le
mot « habitus » sert à désigner l’ensemble complexe de processus par lequel nous sommes à la
fois agis et en train d’agir.
… Pour en savoir plus :
Système de dispositions à agir, percevoir, sentir et penser d’une certaine façon, intériorisées
par les individus au cours de leur histoire (Bourdieu, 1979). Autrement dit, cette théorie vise à
rendre compte du « conditionnement » de l’individu par des règles de conduite, des normes de
comportement, des façons de s’exprimer, de ressentir, de penser … propres à un milieu social
(mais aussi à des environnements diversifiés comme la famille, l’école, la télévision…) et que
l’individu incorpore profondément en lui. Toutefois, de nombreux sociologues insistent
aujourd’hui sur la capacité réflexive de l’individu sur les sources de ses conduites.
74
Sens opérationnel :
Puisque l’enjeu premier de la relation entre l’intervenant et la famille est le bien-être de
l’enfant, l’intervention peut être considérée, avant tout, comme la rencontre entre deux individus
qui ont intériorisé et sont porteurs d’une culture qui leur a appris ce qu’est un enfant qui va bien
et un enfant qui va mal, ce qui est important ou non pour cet enfant, ce qu’il faut faire ou ne pas
faire avec lui… Dans l’interaction, sont mises en scène les représentations et les valeurs de
chacun. Ce cadre de référence est le résultat de nos choix multiples et de nos appartenances qui
participent à la construction de notre identité. Nos appartenances sont d’origine multiple :
nationale, régionale, religieuse, sexuelle, professionnelle, institutionnelle, de statut social, etc.
Exemple :
Dans ses romans largement autobiographiques, Annie Ernaux (La place, 1984) porte un
regard descriptif sur son passé, après avoir accompli l’ambition sociale de ses parents : devenir
professeur de lettres.
Désormais, elle se tourne vers son ancien monde avec les yeux de l’autre : « … ces façons de
vivre étaient à nous, un bonheur même, mais aussi les barrières humiliantes de notre condition
(…) à la fois bonheur et humiliation ».
Tout au long de ses récits intimes, elle met ainsi en évidence les habitus de classe qui ont été
les siens durant son enfance et son adolescence, tous ces codes, ces normes, les principes et les
valeurs qui régissaient les comportements familiaux, mais qui n’avaient pas été pensés ni
formulés comme tels « Ici, rien ne se pense, tout s’accomplit ». Les manières de table, les soins
du corps, les gestes masculins et féminins (« sentir ses bas et sa culotte, le soir », « cracher dans
ses mains avant de saisir la pelle »), les formules de politesse. Il y a aussi les rythmes sociaux des
jours de la semaine (lundi, jour des restes, mardi, de la lessive…) et des âges de la vie (« avoir ses
règles et le droit de porter des bas »), et des valeurs morales dominantes : le courage, la santé, la
dureté au mal, la politesse avec les autres et la rudesse entre soi, et la valeur suprême, l’idéal à
atteindre : « être comme tout le monde », ne pas se faire remarquer. « Il ne faut pas péter plus
haut qu’on l’a ». Le respect de toutes ces normes représentait un enjeu vital puisqu’il en allait de
la survie du système.
Références bibliographiques :
-
BOURDIEU, P. (1979). La distinction, critique sociale du jugement. Paris : Les
Editions de Minuit.
-
BOURDIEU, P. (1980). Le sens pratique. Paris : Les Editions de Minuit.
-
ONE (2003). Travailler le social. Regards méthodologiques. Revue trimestrielle de
l’ONE. Gembloux : Cardijn Publication. 2003, 34-35.
-
ERNAUX, A.(1984). La place. Paris : Gallimard.
75
Parentalité
Définition :
« La parentalité désigne, d'une façon très large, la fonction d'être parent, en y incluant à la fois
des responsabilités juridiques telles que la loi les définit, des responsabilités morales telles que la
socioculture les impose, et des responsabilités éducatives.» (Barreyere et al., 1995)
… Pour en savoir plus :
Il s’agit d’un processus psychique évolutif et un codage social faisant accéder un homme
et/ou une femme à un ensemble de fonctions parentales, indépendamment de la façon dont ils les
mettront en œuvre dans une configuration familiale (C. Sellenet, 2002). La parentalité implique
des responsabilités à la fois juridiques, morales et éducatives.
Sens opérationnel :
Parmi les nombreux essais de définition de la parentalité (Delecourt, 2003 ; O’Connor, 2002 ;
Martin, 2003 ; Fine, 2001 ; Cichelli, 2003 ; Le Gall, 2003 ; Sellenet, 2002), l’approche de Houzel
(1999) nous semble apporter un apport pratique fondamental dans l’observation des difficultés
familiales. Celui-ci propose une projection de la parentalité à partir de trois axes : l’axe de
l’exercice de la parentalité, l’axe de l’expérience subjective, l’axe de la pratique de la parentalité.
Sur l’axe de l’exercice de la parentalité, se situent « les droits et devoirs dont est dépositaire
tout parent à la naissance d'un enfant et qui l'investissent d'une obligation de choix, de
surveillance et de protection quant à l'éducation et à la santé de son enfant. Les
dysfonctionnements interviennent soit par excès (rigidité dans des exigences qui sont
disproportionnées par rapport à l'âge de l'enfant), soit par défaut (difficultés à assumer l'autorité,
incitations à des comportements asociaux, discontinuité des liens). Cet axe est aussi tout ce qui
structure dans une société donnée, au niveau symbolique, les places parentales et les implique
dans une filiation et une généalogie».
L'axe de l'expérience de la parentalité est « l'axe du ressenti, de l'éprouvé, du vécu, de toute la
dimension psychique subjective, le fait de se sentir ou non parent de cet enfant-là. Cet axe
implique donc l'affectif et l'imaginaire, rend compte des décalages pouvant exister entre le bébé
imaginaire et le bébé réel. Là aussi des excès peuvent se manifester soit en trop (fusion, emprise,
confusion intergénérationnelle…) soit en moins (rejet, déception, sentiment d'être persécuté
l'enfant, maltraitance…)».
L'axe de la pratique de la parentalité comprend les actes concrets de la vie quotidienne.
Autrement dit, c'est la mise en oeuvre des soins parentaux et des interactions : tâches d'ordre
domestique (repas, entretien du linge…), technique (réparations courantes, aménagement des
lieux…) de garde (surveillance, présence auprès de l'enfant…) de soins (nourrir, laver, soigner,
consoler…), d'éducation et de socialisation (acquisition des comportements sociaux, stimulation
dans les apprentissages…). Là encore des écarts dangereux pour l'enfant peuvent se manifester,
76
soit par excès (surprotection, hyperstimulation et forcing au niveau des apprentissages), soit par
défaut (carence dans l’hygiène ou l’alimentation, logement non pensé pour l’enfant, enfant livré à
lui-même, absence de suivi médical, manque de stimulation…
Exemple
Le témoignage suivant met en évidence les trois axes cités précédemment.
« Je le reconnais, c’est méchant ce que je vais dire, mais je ne voulais pas de ma première
fille. Je n’en voulais pas parce que j’étais trop jeune et que cela n’allait déjà pas avec mon père…
et j’ai tout fait pour la faire partir, j’ai donné des coups de poing, rien, elle a tenu. Elle a dû se
dire, je vais lui en faire voir (rires) et elle m’en a fait voir, mais je ne regrette pas. Heureusement
qu’elle est là ! Je l’ai délaissée au début. Quand elle est née, j’étais en dépression, c’est ma mère
qui s’en est occupée, pendant six mois. Après, son père est sorti de prison, on s’est remis
ensemble et cela a recassé… Un an après, j’étais enceinte de Nathalie, et je me suis plus occupée
d’elle que d’Aurélie, mais je ne veux pas qu’elle le ressente comme un rejet, j’essaie de me
rattraper. Quand je vois sa réaction quand je fais des câlins à Nathalie et que je lui dis d’attendre,
cela me fait mal parce que je ne veux pas être comme cela… Je me rattrape, je reste avec elle plus
longtemps, c’est le seul privilège que je peux lui donner et je vois qu’elle s’apaise… Mais il faut
reconnaître qu’il a fallu qu’Aurélie me dise que je faisais plus de câlins à Nathalie, je ne le voyais
pas, je croyais faire pareil. Pour moi, elle était là, je m’en occupais, elle n’était pas
malheureuse… Elle était assez chouchoutée, mais elle pensait que non. Et puis, c’est toujours
quand je suis speedée, quand je ne vais pas bien qu’elle a envie de parler… Elle tombe toujours
au mauvais moment alors, quand je suis énervée, je la repousse. Je sais bien que je ne devrais pas
le faire, je me dis, zut ! J’essaie de lui expliquer que je n’étais pas bien à ce moment-là, mais elle
me demande pourquoi je ne veux pas lui dire, alors elle se bute… »
Cette maman, parfaitement à l’aise sur l’axe de la pratique, sur l’axe des soins, est en
difficulté sur l’axe du ressenti, mais seulement pour l’une de ses filles et non pour les deux. D’où
l’intérêt de toujours différencier les enfants, de voir comment la parentalité s’organise pour
chacun d’eux. La parentalité n’est pas un tout monolithe : elle se joue différemment selon les
âges de la vie, le sexe de l’enfant, sa personnalité…et la conjugalité. Dans ce témoignage, la
conjugalité est autant problématique que la parentalité, elle est la toile de fond qui organise
négativement la parentalité future. (Sellenet, 2002)
Références bibliographiques :
-
ANDESI, (sous la direction de VOSSIER, B.) (2002). La parentalité en questions.
Problématiques et pratiques professionnelles. Issy-les-Moulineaux : ESF éditeur.
-
BARREYERE, J.-Y., BOUQUET, B., CHANTREAU, A., LASSUS, P. (sous la dir.
de) (1995). Dictionnaire critique d'action sociale. Paris : Bayard Editions.
- HOUSEL, D. (sous dir.) (1999). Les enjeux de la parentalité. Paris : Erès.
77
-
DOUMONT, D., RENARD F. (2004). Parentalité : nouveau concept, nouveaux
enjeux ? UCL-RESO. Unité d’Education pour la Santé. Dossier Technique 04-31
-
La parentalité à l’épreuve de la précarité. L’Observatoire, ° 46. (2005) Revue
d’action sociale et médico-sociale.
-
SELLENET, C. (2002). Approche de la parentalité et de la conjugalité violentes. in
ANDESI, (sous la direction de VOSSIER, B.) (2002). La parentalité en questions.
Problématiques et pratiques professionnelles. Issy-les-Moulineaux : ESF éditeur.
Plasticité
Définition :
La plasticité désigne la qualité de ce qui est propre à être modelé. Par extension, cette notion
fait référence à la perméabilité de l’individu aux informations données par l’environnement et à
son aptitude à en tenir compte pour modifier ses comportements, ses attitudes et ses schèmes de
pensée.
…Pour en savoir plus :
La plasticité éducative désigne en réalité la capacité du parent à modifier ses comportements,
ses pensées, au contact d’une réalité différente de celle qui avait été anticipée. La plasticité
suppose à la fois l’aptitude à prendre conscience de la réalité, la capacité d’adapter son
comportement aux modifications qu’elle suppose et la possibilité que le sujet se donne d’en
changer l’interprétation. La plasticité désigne ainsi à la fois la capacité d’adaptation du sujet et
son aptitude à interpréter les données que lui fournit son environnement pour moduler les
schèmes mentaux auxquels il a habituellement recours pour leur donner sens…
Cette faculté suppose, dans le paradigme pédagogique, de soumettre les pratiques éducatives
à une conscience réflexive suffisante pour y associer la notion de changement. L’acte éducatif n’y
est plus considéré une fois pour toute comme une réalité intangible, mais devient, au contraire,
une praxis mouvante qui varie dans le temps (passé-présent-futur, variations éducatives liées à
l’âge de l’enfant, etc.), dans l’espace (les pratiques éducatives qui se manifestent dans un
environnement donné peuvent être modulées lorsque la famille se trouve dans un contexte
différent) et en fonction des circonstances (les pratiques éducatives qui changent lorsque l’enfant
est malade ou traverse une difficulté).
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Sens opérationnel :
Par certaines attitudes, par certains comportements (expression d’émotions, changement du
ton de la voix…), par des mots, etc. la personne concernée montre qu’elle prend conscience du
changement qu’il lui est nécessaire de mettre en place pour adapter ses pratiques éducatives. Elle
se sent « touchée » par ce qui est dit, elle en prend conscience, elle se montre capable de remise
en question. Il s’agit d’une étape importante dans la relation d’aide, puisque la collaboration
s’élabore, prend de la consistance… C’est accepter de se décentrer, de perdre sa « toute
puissance », pour reprendre un autre pouvoir sur soi, en fonction de la réalité perçue
différemment.
Exemple :
La prise en compte de la manière d’envisager les règles dans le contexte éducatif de la famille
permet de mettre en évidence la nécessaire distinction qui doit être établie entre l’absence de
fermeté, l’inconstance et l’incohérence que révéleraient la mouvance des pratiques autoritaires et
la nécessaire plasticité qui permet d’en favoriser l’efficacité.
Un parent qui ne parvient pas à exprimer et à faire respecter des règles explicites, claires et
susceptibles d’être répétées par l’enfant ou qui révèle dans ses pratiques éducatives des attitudes
inconstantes, incohérentes ou contradictoires par rapport à ces différentes règles répond
indiscutablement mal au besoin de structure de l’enfant. Cette incohérence détachée de toute
conscience réflexive n’a effectivement pas grand chose à voir avec l’éducation…
Par contre la plasticité éducative lorsqu’elle se rapporte au respect des règles constitue
indiscutablement un argument favorable à l’expression et à l’accomplissement du besoin de
structure.
En effet, c’est cette plasticité qui permet au parent de comprendre qu’une règle peut varier en
fonction des lieux dans lesquels elles doivent s’appliquer ( ce qui est autorisé à la maison peut ne
pas l’être dans le salon de la grand-mère maternelle, ce qui est permis en famille ne l’est pas
nécessairement à l’école), de l’âge de l’enfant qui en est la cible (les règles se modifient en
fonction des stades développementaux de l’enfant, l’heure du coucher peut varier dans une même
famille selon l’âge de l’enfant, etc.) ou des circonstances ( certaines règles s’assouplissent lorsque
l’enfant est souffrant ou malade, pendant les vacances scolaires, les horaires peuvent être
adaptés, etc.)
79
Quotidien/quotidienneté
Définition :
Le quotidien, c’est ce qui se répète, mais aussi ce que cette répétition permet d’imprévu, de
hasard, de surprise, de vie. Le quotidien est cette mise en forme de l’espace et du temps qui
enveloppent et supportent la présence au monde de chaque être humain (Rouzel, 2004).
La quotidienneté, dans la pensée d’Heidegger, c’est un quotidien élevé au rang de concept,
une dimension qui échappe à toute rentabilité sociale. Elle renvoie sans doute à la part la plus
précieuse de l’être humain, source d’inventivité et de création (Rouzel, 2004). « Qu’est-ce que je
fais là ? » est la grande question de la quotidienneté. Il s’agit de sa présence au monde, le monde
concret, positif, réel, quotidien.
…Pour en savoir plus :
La quotidienneté évoque la somme des insignifiances, des routines et des habitudes qui
constituent la trame de la vie quotidienne. Ainsi définie, elle s’oppose en définitive à
l’événementiel et inscrit les données de l’existence dans une continuité sans heurt et sans rupture
qui lui donne néanmoins sens.
Le quotidien révèle en sourdine l’histoire des familles, tandis que l’événementiel exprime
avec plus ou moins de fracas son évolution. Les deux points de vue permettent d’appréhender la
trajectoire socio-historique du groupe familial comme un processus qui rend compte de son
fonctionnement. La famille n’est plus dans un tel paradigme considérée comme une entité
statique définie une fois pour toute, mais comme une structure dynamique dont la description
nécessairement mouvante suppose de rendre compte à la fois des événements qui la traversent et
de la manière dont le quotidien module le vécu subjectif de chacun de ses membres.
L’accent mis sur la quotidienneté permet d’appréhender la façon dont la famille structure le
vécu des sujets qui la constituent, l’organisent dans un contexte ritualisé et intègrent les
changements dans un cadre routinier qui en métabolisent les principales composantes. Ainsi
envisagé, le quotidien permet que les changements se réalisent sans crise en amenant les
habitudes et les routines à évoluer imperceptiblement.
Exemple :
Que faites-vous chaque matin en vous levant ? Que regardez-vous à la télévision ? Le repas
du soir réunit-il toute la famille ? Et le coucher des enfants, se fait-il à heure fixe ? Ces questions
mettent indiscutablement en jeu la manière dont la famille se révèle à travers le vécu quotidien de
ses différents membres. Les données recueillies à ce propos nous en disent incontestablement
beaucoup, non seulement sur le fonctionnement familial, mais aussi sur la façon dont le groupe
familial se définit une identité commune et donne un sens à sa trajectoire. L’accent mis sur le
banal, le non-événementiel permet d’accroître sensiblement la connaissance que l’observateur
peut se faire d’une famille.
80
La prise en considération de l’événementiel apparaît généralement plus systématique. La
révélation des épisodes de crise - disputes, scènes violentes etc.-, des moments marquant de
l’évolution socio-historique de la famille - mariages, naissances, maladies, décès, etc.- et des
événements significatifs vécus par ses différents membres - réussite, échec scolaire, licenciement,
fausse-couche, etc.- constituent également des indices révélateurs qui éclairent la description qui
peut être faite de la famille ou qu’elle parvient à faire d’elle-même.
L’événementiel et la quotidienneté constituent deux composantes essentielles de
l’appréhension phénoménologique des réalités vécues au sein des familles. Ce n’est, en effet,
qu’en observant l’un à la lumière de l’autre que l’observateur peut espérer parvenir à une
compréhension et une analyse suffisante d’un phénomène observé au sein du groupe familial.
La récolte des données révélées par l’examen de la quotidienneté (habitudes, habitus,
routines) devient dans un tel contexte épistémologique un apport essentiel à la connaissance de la
famille qui viendra enrichir et éclairer les éléments qui constituent la trame de l’anamnèse
réalisée au sein de celle-ci.
Références bibliographiques :
-
ROUZEL, J. (2004). Le quotidien en éducation spécialisée. Paris : Dunod.
-
JAVEAU, CL. (2003). Sociologie de la vie quotidienne. Paris : PUF.
Réflexivité individuelle / réflexivité sociale
Définition :
Dans le carré dialectique de Kaufmann (2001), la réflexivité individuelle concerne l’espace
mental de l’individu, son monde intérieur personnel, néanmoins complètement immergé dans le
social. La réflexivité individuelle fonctionne en tant que marqueur d’identité. D’autre part,
l’individu intériorise des parties de réflexivité sociale provenant, entre autres, de l’évolution des
idées dans une société en constante mutation. Ce sont des éléments auxquels il est
quotidiennement confronté grâce aux rencontres extérieures, aux médias, aux expériences de
vie…
…Pour en savoir plus :
La réflexivité individuelle désigne l’aptitude du sujet pensant à se prendre pour objet de
réflexion. Elle définit l’image que l’individu se donne de lui-même pour se constituer une
identité et l’envisager dans un rapport d’altérité. Dans cette optique, la conscience réflexive ne
renvoie pas le sujet exclusivement à lui-même comme le suppose, par exemple, la connaissance
de soi, mais implique d’envisager le poids que l’expérience sociale fait peser sur la modalité
d’être au monde que l’individu a intériorisée.
81
La réflexivité individuelle permet ainsi à chacun d’interroger la position d’acteur social qu’il
est amené à prendre pour proposer une définition de soi qui y corresponde.
La réflexivité sociale suppose, quant à elle, que l’individu se prenne pour objet de réflexion
en tenant compte de l’évolution de l’écosystème dans lequel il est amené à fonctionner. Cette
modalité de réflexion sur soi engage les influences culturelles, sociales et idéologiques qui pèsent
sur le monde vécu intériorisé de chacun et déterminent le processus identitaire qui le définit.
Exemple :
La révélation d’un fait de maltraitance, son identification par un service (S.A.J. – S.P.J.) ou
une institution (sociale, scolaire ou familiale) engage l’individu qui en est l’auteur à s’interroger
sur lui-même, tout en l’interpellant, notamment, dans sa position d’acteur social. La réflexivité
individuelle désigne à cet endroit l’aptitude de la personne à confronter la connaissance qu’elle a
d’elle-même à l’image qu’elle donne socialement de ce qu’elle prétend être. Ce mécanisme de
réflexion sur soi peut, dans le contexte particulier de la maltraitance, amener le sujet à prendre
conscience des contradictions qui contaminent les processus identitaires dans lesquels il s’est
engagé. C’est notamment le cas chaque fois que l’identité biographique - ce que le sujet pense
être - s’oppose à l’identité relationnelle - l’image que le sujet donne de lui-même - et trahit
l’identité virtuelle - ce que le sujet prétend être. L’inconfort identitaire qui en résulte peut, par le
mécanisme de la conscience réflexive, amener le sujet à proposer lui-même les changements
d’attitude ou les régulations comportementales qui permettront de réduire les discordances entre
les différentes composantes de son identité individuelle.
Dans le même contexte, la réflexivité sociale impose au sujet de tenir compte du « bain »
culturel et idéologique dans lequel il est immergé. La manière dont les médias - presse,
télévision-, l’environnement culturel, le cadre légal et le contexte social abordent le phénomène
de la maltraitance, en révèlent l’aspect inacceptable et en soulignent les différentes composantes
amène ainsi inévitablement la personne qui est identifiée pour un comportement éducatif inadapté
à s’interroger à propos de lui-même. Le cas échéant, cette réflexivité sociale peut alors conduire
le sujet à s’imposer des stratégies de changement qui permettront de réduire la distance entre
l’identité qu’il s’attribue et la manière dont elle est envisagée au sein du système socioculturel qui
le contient.
La réflexivité individuelle et la réflexivité sociale constituent ainsi, lorsqu’elles peuvent être
stimulées, dans le contexte de la maltraitance, de solides arguments de changement dont il y a
lieu de tenir compte à la fois lorsqu’il s’agit d’évaluer le fonctionnement parental d’un sujet et les
stratégies de régulation qui peuvent lui être proposées.
Référence bibliographique :
KAUFMANN, J.-C. (2001). Ego. Pour une sociologie de l’individu. Paris : Nathan.
82
Rétention/protension
Définition :
La protension est la façon dont les personnes préparent le futur dans le présent de leurs
activités quotidiennes (Bourdieu, 1994). En d’autres mots, ce sont des stratégies, des
comportements, des attitudes, des théories implicites, un langage, etc. que toute la famille
véhicule en son sein et qui vont orienter l’avenir, sans qu’il y ait calcul ou intentionnalité de la
part de ses membres.
La rétention retient le « maintenant », alors que la protension l’anticipe.
… Pour en savoir plus :
Selon le philosophe Hüsserl, il faut penser un présent plus large que l’instant, c’est-à-dire un
présent vivant. Ce « maintenant pur » est toujours accompagné d’un souvenir immédiat, la
rétention, et d’une anticipation immédiate, la protension. Ces trois phases rendent notre présent
vivant. La sphère du présent comprend les données intentionnelles médiates (rétention /
protension) et immédiates (maintenant). C’est l’ensemble de ces données qui fait d’elle un
présent authentique. En d’autres mots, la rétention est faite d’histoire et de mémoire, tandis que la
protension est ouverte sur des perspectives d’action.
Exemple :
Le suivi scolaire des enfants renvoie particulièrement à cette triple dimension de l’instant.
La rétention explique ainsi parfois la difficulté que manifeste l’enfant à se mettre au travail, à
éprouver l’activité scolaire dans le présent, indépendamment d’un passé qui lui donne
nécessairement sens… Encombré d’une antériorité, à la fois négativement connotée et
implicitement révélée, alourdi d’un vécu scolaire antérieur - personnel, parental ou
transgénérationnel - qui le condamne à l’avance, l’enfant envisage l’école comme une épreuve et
répugne à s’engager dans un apprentissage qu’il perçoit intuitivement comme dangereux et qu’il
ne parvient plus à associer à la notion de plaisir immédiat.
La protension négative suppose, quant à elle, que l’enfant soit envoyé à l’école sans espoir de
réussite, uniquement « parce qu’il faut ». La scolarité est, dans un tel contexte, envisagé en
fonction d’un présent inconsciemment investi d’un avenir négatif. « Que tu travailles ou pas à
l’école, tu ne réussiras de toute façon pas et tu finiras chômeur comme moi». Sans esprit de
conquête, mutilé du désir de succès, l’élève se soumet passivement à l’obligation d’être à l’école,
mais renonce rapidement à toute forme d’activité. L’inertie traduit alors cette forme de refuge
dans un présent qui n’anticipe rien d’autre que l’échec annoncé.
L’absence de protension se manifeste chaque fois que l’instant présent est ramené à lui-même
et ne se trouve investi d’aucune forme d’avenir. Ce présent, coupé de tout futur, amène également
l’enfant à fréquenter l’école par obligation, sans s’y impliquer en fonction d’un projet parental
porteur ou d’un désir individuel qui le pousse à apprendre. Ce retrait dans un présent dépourvu de
perspective d’avenir amène l’enfant à ne plus donner de sens à l’activité scolaire dès qu’elle ne
83
lui procure pas un plaisir immédiat ou qu’elle lui impose des obligations. « Va à l’école, parce
qu’il faut. A partir de là, que tu travailles ou que tu ne travailles pas, c’est pareil pour moi. De
toute façon, il n’y a pas d’avenir pour toi à l’école». L’absence de protension, quand elle, se
manifeste dans le champ scolaire, met ainsi l’élève en position d’anticiper un vide que l’activité
présente n’est jamais en mesure de combler. Désinvesti, l’enfant s’engage ainsi dans l’activité
d’apprentissage, uniquement pour le plaisir qu’elle lui apporte immédiatement, et renonce
rapidement, dès que celui-ci est différé ou que l’apprentissage impose un cheminement lent ou un
parcours semé d’embûches.
La protension positive suppose, par contre, que l’activité scolaire de l’enfant soit envisagée au
quotidien, dans sa relation avec un futur anticipé positivement. A cet endroit, de nombreux
travaux montrent que les élèves s’investissent davantage dans les apprentissages quand ils
ressentent que ceux-ci sont reliés à des objectifs à moyen terme qui leur seront directement
profitables. Les résultats sont moins probants lorsque les objectifs associés aux apprentissages
sont envisagés à long terme et sans rapport avec la nature de ceux-ci : « Travaille bien à l’école,
pour avoir un beau métier » semble à cet égard moins mobilisateur que « Travaille bien, parce
que les apprentissages que tu vas réaliser vont contribuer à te faire ressentir beaucoup de plaisir».
POURTOIS, J.-P., DESMET, H., LAHAYE, W. (2003). La protension en éducation familiale.
Presse de l’Université de Mons-Hainaut.
84
Stratégies de défense
Définition :
Dans le DSM-IV (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, 1996), les mécanismes de
défense sont définis comme des processus psychologiques automatiques qui protègent l’individu de
l’anxiété ou de la perception de dangers ou de facteurs de stress internes ou externes.
… Pour en savoir plus :
Les mécanismes de défense sont des processus psychiques inconscients visant à réduire ou à annuler
les effets désagréables des dangers réels ou imaginaires, en remaniant les réalités internes et/ou externes
et dont les manifestations – comportements, idées ou affects – peuvent être inconscients ou conscients
(Ionescu et al., 2004).
Sens opérationnel :
L’approche envisagée ici dans le cadre de l’évaluation de l’état de danger ne consiste pas à aborder
l’aspect psychique inconscient des mécanismes de défense, mais plutôt les stratégies défensives mises en
place par les différentes personnes concernées, y compris les intervenants, lors du recueil des faits et la
relation d’aide.
Dans la relation avec une famille, et en particulier lorsque les représentations et les valeurs sont
particulièrement mises à l’épreuve, l’intervenant peut se sentir particulièrement menacé dans son identité
professionnelle : la situation relatée peut lui paraître particulièrement lourde, le comportement de la
personne lui sembler inadéquat ou imprévisible… Il peut alors mettre en place un certain nombre de
stratégies défensives, comme le formalisme qui consistera à se raccrocher aux procédures, aux
règlements, à la loi…
D’autre part, dans la relation, plus la personne est en difficulté, plus elle aborde sa relation avec le
professionnel dans la peur : peur du jugement, peur du contrôle social ou d’être obligée de dévoiler son
intimité, peur d’accepter des projets qui ne sont pas les siens, peur de ne pouvoir ou ne savoir se justifier,
et surtout, peur que l’intégrité familiale soit mise en danger (retrait des enfants). Cette peur est à prendre
en compte. Elle est source de stratégies de défense, comme le conflit, l’agressivité, la soumission, le
silence, le déni, la fuite…
Références bibliographiques :
-
IONESCU, S., JACQUET M.-M. & LHOTE C. (2004). Les mécanismes de défense. Paris :
Nathan Université.
-
GROUPE DE RECHERCHE ACTION - FORMATION. QUART MONDE PARTENAIRE
(2002). Le croisement des pratiques. Quand le Quart Monde et les professionnels se forment
ensemble. Paris : Editions Quart Monde.
Sujet
Définition :
Le concept de sujet désigne, d’un point de vue sémantique, l’être humain soumis à l’observation. Le
sujet s’oppose à l’objet qui définit, lui, une chose concrète et perceptible par les sens. On se contente
donc de percevoir un objet, c’est-à-dire de le saisir par les sens ou l’esprit, alors que, dans le même
temps, on observe un sujet, c’est-à-dire qu’on le considère avec attention, scientifiquement. Cette
précision conceptuelle apparaît fondamentale dans un cadre d’évaluation, dès qu’elle prend l’humain
pour cible. En effet, dans un tel contexte, l’enfant ou l’adulte se pose davantage en sujet d’investigation
qu’en objet d’enquête
Pour en savoir plus…
D’un point de vue grammatical, le sujet définit la fonction qui confère au verbe ses catégories de
genre et de nombre. Si l’on mêle cette acception métaphorique du terme à celle que nous avons précisée
auparavant, l’enfant-sujet deviendrait, par exemple, cet être humain que l’on observe et qui influence
l’action. Au contraire, dans son sens grammatical, l’objet se pose en complément - direct ou indirect - sur
lequel le verbe porte. Métaphoriquement, l’enfant-objet serait donc davantage celui qui est agi, qui subit
l’action - le verbe - sans l’influencer et dont on se contente de percevoir l’existence.
Le sujet est, à cet endroit, considéré comme acteur, alors que l’objet, essentiellement passif, subit
l’événement et se laisse déterminer par lui. C’est pour cette raison que le concept de sujet contribue à
alimenter un cadre conceptuel dans lequel les déterminismes, même s’ils sont agissants, ne contraignent
pas l’individu à s’y soumettre passivement. Le sujet garde une force d’acteur, un pouvoir de résistance
qui lui permet de s’opposer aux schémas de reproduction irrévocable, de décider et de s’octroyer des
espaces de liberté qui lui laissent l’opportunité de se conformer, de décevoir ou d’étonner. C’est, par
ailleurs, dans un tel paradigme qui envisage l’être humain en sujet et ne le réduit pas à sa fonction
d’objet, que les concepts de résilience, de conscience pédagogique, de réflexivité individuelle et sociale
prennent réellement sens..
Exemple :
Le paradigme dans lequel les concepts du présent glossaire sont envisagés propose en réalité une
perspective syncrétique dans laquelle les conceptions actionnalistes et déterministes apparaissent
complémentaires. Il pose effectivement que le sujet est capable de définir lui-même un projet de vie
(perspective actionnaliste) tout en restant néanmoins soumis à un certain nombre d’influences endogènes
ou exogènes qu’il ne maîtrise pas nécessairement (perspective déterministe). L’image du nageur poussé
par le courant sur un endroit de la plage qu’il s’efforce de choisir nous semble le mieux correspondre à
cette position intermédiaire. L’optique déterministe considère en effet, exclusivement, la force du
courant. L’option actionnaliste consacre l’essentiel de son attention à la capacité du nageur. La position
intermédiaire tient effectivement compte des deux paramètres.
86
Trajectoire
Définition :
La trajectoire définit la ligne que décrit un projectile. Appliquée à la notion de famille, la métaphore
empruntée à la physique suppose ainsi à la fois un mouvement dans l’espace et un déplacement dans le
temps. Ce n’est donc qu’à travers cet axe spatio-temporel que la trajectoire familiale prend sens. Cette
double perspective permet notamment d’envisager l’évolution du groupe familial dans le rapport « passé
présent et futur » qui la relie à son histoire.
Pour en savoir plus :
La notion de trajectoire permet de définir la famille dans une perspective à la fois socio-historique et
écosystémique. La famille n’est plus, dans un tel paradigme, considérée comme une entité figée,
monolithique dont les traits sont établis une fois pour toutes et dont les caractéristiques sont considérées
indépendamment du contexte dans lequel elles s’actualisent. Elle est, au contraire, envisagée comme une
réalité mouvante qui se définit davantage par les processus dans lesquels elle inscrit son histoire et les
environnements dans lesquels chacun de ses membres est amené à lui donner du sens.
Dans cette optique, la trajectoire concerne aussi bien l’histoire de chaque enfant, de la fratrie dans
laquelle il grandit et de chacun des parents qui cadre son développement que celle du groupe familial
dans son ensemble. Elle implique non seulement le temps présent, les souvenirs et les perspectives que
chacun élabore pour rendre compte de son vécu et affirmer une identité narrative au sein de sa famille,
mais aussi les non-dits, les secrets transgénérationnels, les objets de rétention par lesquels le passé
parasite l’histoire de la famille et la marque de son empreinte. La notion de trajectoire met de cette
manière en jeu la signification que chacun, au sein de la famille, donne à son propre parcours et à celui
des autres personnes qui la constituent. Dans ce sens, un passé empreint de violence vécue par un
membre de la famille peut, par exemple, avoir des répercussions sur l’ensemble du réseau relationnel
familial et son évolution.
Exemple :
Le relevé des facteurs de risque de maltraitance n’est véritablement opérationnel que s’il prend en
compte la dimension spatio-temporelle dans laquelle s’inscrit la trajectoire familiale. L’attention portée à
l’évolution des différents facteurs de risque permet ainsi de mettre en évidence un indice de prévisibilité
significatif que ne révèle pas la simple collecte des données à un moment précis.
A cet endroit, il est important de concevoir que l’influence d’un facteur de risque se modifie avec le
temps et ne se laisse pas appréhender de la même manière à chaque moment de la trajectoire familiale.
C’est pour cette raison, notamment, qu’il nous est apparu essentiel de relever de manière différenciée les
facteurs de risque qui ont agi sur le fonctionnement familial dans le passé, ceux dont l’influence se
manifestent au présent et ceux qui sont amenés à peser de leur poids sur l’avenir. En vérifiant l’évolution
temporelle des facteurs de risque, il devient possible de mettre en évidence les stratégies de rétention, les
résistances au changement et les indices de protension qui affectent ou enrichissent les attitudes et les
comportements familiaux et, le cas échéant, peuvent leur donner sens...
Dans le même ordre d’idées, l’évolution de l’influence d’un facteur de risque donne
incontestablement une meilleure idée de la situation familiale vécue par l’enfant et permet de mettre plus
efficacement en place des procédures de régulation adaptées.
87
9.2 Proposition d’outils d’observation et de recueil de données
Afin de permettre à chaque professionnel d’enrichir sa compréhension des différentes problématiques
qu’il rencontre, nous proposons un certain nombre d’outils. Présentés sous forme de tableaux, de
schémas, d’inventaires, de grilles, ils ne constituent qu’un regard qui doit être intégré dans l’approche
multidimensionnelle que nous avons explicitée précédemment.
Il revient à chaque professionnel, à chaque équipe, de juger de leur pertinence. Certains outils, non
validés, restent des documents de travail. La liste n’est pas exhaustive.
(1) Les facteurs et indicateurs de difficulté, de danger et de protection
•
Inventaire des facteurs de risque et de danger (Braconnier, Humbeeck, Terrisse (2006). UMH,
CERIS)
•
Tableau clinique des indicateurs de situations de difficulté et de danger (Braconnier, Humbeeck,
Terrisse (2006). UMH, CERIS)
•
Tableau clinique des indicateurs de situations de protection (Braconnier, Humbeeck, Terrisse
(2006). UMH, CERIS)
(2) Outils spécifiques
•
Tableau d’évaluation prospective (Braconnier & Humbeeck (2006). UMH, CERIS)
•
Tableau d’évaluation subjective (Braconnier & Humbeeck (2006). UMH, CERIS)
•
Génogramme
•
Evaluation de la qualité relationnelle au cours de l’entretien d’aide (Braconnier & Humbeeck
(2006). UMH, CERIS)
•
Fiche « conseils » pour mener un entretien d’aide (Séverin & Braconnier (2006). UMH, CERIS)
•
Indicateurs d’une relation de qualité (Groupe AGORA, Aide à la Jeunesse, 2005)
•
Stratégies de défense chez l’intervenant (Publication de l’ONE, 2003)
•
Projet de guide d’entretien avec l’adolescent (SAJ de Dinant, 2005)
•
Grille d’évaluation de l’entrevue (Braconnier & Humbeeck (2006). UMH, CERIS)
•
Modèle écosystémique de parentage (Terrisse, 1996)
88
•
Modèle des douze besoins (Pourtois, Desmet, (2002). PUF)
•
Observation des processus psychopathologiques de l’enfant et de l’adolescent (SAJ, 2005)
•
Formes de négligence (SAJ de Bruxelles)
(3) Références d’outils complémentaires
•
Avis de signalement (Les Centres de Jeunesse de la Montérégie à Longueuil-Québec, 2002)
•
Classification des comportements agressifs (Buss, (1961). The Psychology of aggression. New
York : Wiley)
•
Dimensions du tempérament de l’enfant (Thomas, Chess, (1977), Temperament and
Development. New York: Brinner-Mazel)
•
Echelle de résilience (Lamarre, (2005). Montréal : Centre de psychothérapie stratégique.)
•
Guide d’évaluation des capacités parentales (Centre Jeunesse de Montréal, 2003)
•
Inventaire concernant le bien-être de l’enfant en relation avec l’exercice des responsabilités
parentales (Vézina & Bardet, (1990). Université Laval, Ste-Foy, Québec, Canada)
•
Observation des interactions mère-enfant à risque en maison maternelle (Mouhot, (2001).
Direction de la vie familiale et sociale, Besançon)
•
Grille d’évaluation du réseau de soutien social des parents (Jourdan-Ionescu, Desaulniers,
Palacio-Quintin, (1996). Université du Québec à Trois-Rivières)
•
Test de dépistage de violence parentale (TDVP) (Palacio-Quintin, (2004). Université du Québec à
Trois-Rivières)
•
Mesure de la justification de la violence (MJVE) (Fortin A. (1995). Université de Montréal)
•
Le test de stress parental (ISP) (Abidin R.R. (1983). Odessa FL: Psychological Assessment.)
•
La mesure de santé mentale (SCL-90-R) (Derogatis (1984))
•
Questionnaire d’entrevue d’accueil. (Palacio-Quintin et al, (1996). Université du Québec à TroisRivières)
•
Questionnaire de prévention à l’usage des infirmières sociales. (Hellinckx W. & Grietens H.
(1997) Katholieke Universiteit Leuven)
•
Repères pour l’intervention auprès de bébés à hauts risques et de leur famille. (Lamour M. &
Barroco M. (1998) in LAMOUR, M. & BARRACO, M. (1998). Souffrances autour du berceau.
Paris : Gaëtan Morin Editeur Europe.)
•
Le questionnaire d’auto-évaluation de la compétence éducative parentale (QAECEP) (Terrisse B.
& Trudelle D. (1988) Université du Québec à Montréal)
89
•
Test de dépistage et de compréhension du vécu des enfants maltraités (TDVP) (Palacio-Quintin
(1999). Université du Québec à Trois-Rivières)
•
L’inventaire du potentiel d’abus (CAP) (Milner J.S. (1980) NC: Psytec Corporation.)
•
Le questionnaire sur l’environnement familial (QEF), (Terrisse B., Larose F., Lefebvre M.-L.
(1988) Ste-Anne-des-Lacs, Québec : Les éditions du Ponant)
•
Grille d’observation des conduites parentales, dans le cadre des facteurs de risque de négligence,
(Lalière C. et al. (2004) Centre Universitaire de Pédagogie Curative, Université de Fribourg,
Suisse)
•
La négligence parentale, outils d’évaluation, (I.D.E.F. (Institut pour le Développement de
l’Enfant et de la Famille). Centre Universitaire de Pédagogie Curative. Université de Fribourg,
Suisse)
90
Inventaire des facteurs de risque (de danger) (Braconnier V., Humbeeck B., Terrisse B.) (en cours de validation)
1. Enfant
A. Facteurs prénatals
• Pathologies génétiques
• Pathologies accidentelles survenues
durant la grossesse
B.
Facteurs péri et néo-natals
Accidents neurologiques (anorexie,
etc.)
• Prématurité
•
C. Facteurs postnatals
• Accidents, maladies, intoxications
• Déficiences et handicaps
• Caractéristiques personnelles
(acquises durant le développement
et liées aux interactions avec le
milieu) :
• attachement insécure, retards de
développement (psychomoteur,
cognitif, social, affectif), faible
estime de soi, etc.
2. Famille
A. Milieu physique
• Logement inadéquat
• Déménagements fréquents
• Désorganisation (routines)
• Alimentation insuffisante
B. Histoire personnelle des parents
• Violence et abus
• Familles instables et désorganisées
• Grossesse précoce
C. Caractéristiques socio-économiques et
psychologiques des parents
• Faible scolarisation
• Faibles revenus
• Difficultés professionnelles
• Structure familiale instable, monoparentalité
• Immigration récente, problèmes linguistiques
• Maladies chroniques, déficiences, handicaps
• Toxicomanies
• Délinquance, marginalité
• Isolement social
• Conflits et violences conjugaux
• Sentiment de compétence faible
• Sentiment d’impuissance
• Comportements sexuels déviants
D. Attitudes et pratiques éducatives
• Attitudes et pratiques autoritaires, rigides,
froides, laxistes, indifférentes, humiliantes,
rejetantes
• Communication faible
• Tolérance de comportements marginaux
• Comportements violents
• Suivi scolaire inexistant
• Initiation précoce à la sexualité
3. Milieu de vie
A. Quartier
• Quartier défavorisé
• Habitat isolé
• Pauvreté des équipements et des services
collectifs
• Faiblesse des réseaux associatifs
• Délinquance (gangs), conflits interethniques
B. École
• Concentration d’élèves en difficulté ou à
risque
• Problèmes de comportement, délinquance
• Pauvreté des équipements
• Encadrement insuffisant
• Indifférence, rejet, préjugés des enseignants,
du personnel scolaire
• Instabilité, manque d’expérience des
enseignants
• Faible collaboration avec les familles, la
communauté
• Sentiment d’efficacité collective et
d’appartenance faible
Tableau clinique des indicateurs de situations de danger (Braconnier V., Humbeeck B., Terrisse B.) (en cours de validation)
1- Enfant
Indicateurs de situations de danger
•
•
•
•
•
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•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
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•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
Retard staturo-pondéral
Marques récurrentes de coups, blessures, brûlures
Indices d’abus sexuels (rapport médical)
Surcharge pondérale
Gestes de protection
États maladifs persistants (otites, rhumes, angines, etc…)
Cauchemars, sommeil agité
Somnolence durant la journée
Troubles de l’équilibre
Problèmes psychomoteurs (lancer, attraper, monter, etc.)
Troubles déficitaires de l’attention avec hyperactivité
Inactivité physique
Énurésie persistante, encoprésie
Troubles de la parole, bégaiement
Hygiène défectueuse (mains, oreilles, cou, etc.)
Vêtements sales, non adaptés au contexte
Tremblements, transpiration fréquents
Vols de nourriture
Troubles de l’appétit
Phobies
Verbalisation de maladies imaginaires
Psychosomatisation
Vêtements extravagants*
Automutilation*
Toxicomanie, tabagisme*
Anorexie, boulimie*
Agressivité avec les pairs, les adultes
Impulsivité
Sentiment d’incapacité
Auto-dévalorisation
(1)
(2)
Indicateurs de situations de danger
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
(1)
(2)
Manque de persévérance
Pessimisme
Réactions émotives violentes
Destruction d’objets, vandalisme
Impulsivité
Désobéissance, non respect des règles, des consignes
Provocation, opposition aux adultes
Recherche d’attention
Leadership négatif
Rejet par les pairs
Refus de participation aux activités parascolaires
Activités violentes en groupe
Manque d’autonomie
Immaturité, pensée magique
Externalité
Langage grossier, pauvre, argotique
Compulsivité
Difficultés d’apprentissage, retards scolaires
Absentéisme scolaire
Travaux scolaires non exécutés
Mendicité
Agressions sexuelles d’autres jeunes*
Exhibitionnisme*
Fugues*
Repli dans la musique, les jeux informatiques, etc.*
Appartenance à un gang, une secte*
Trafics et rackets*
Prostitution*
Tendances suicidaires*
92
Tableau clinique des indicateurs de situations de danger
2. Famille
Indicateurs de situations de danger
A. Milieu physique
• Pas de domicile fixe
• Déménagements fréquents
• Logement surpeuplé, exigu
• Absence d’espace personnel pour les enfants
(chambre, coin « travail »)
• Logement insalubre, délabré, taudis
• Mobilier non adapté, sanitaires insuffisants
• Milieu de vie désorganisé (Routines: horaires,
repas, coucher, télévision, etc.)
• Alimentation insuffisante
• Alimentation mal équilibrée
• Absence de suivi médical pour les enfants
B. Histoire personnelle des parents
• Famille instable, désorganisée
• Placements institutionnels
• Maltraitance, violence parentale
• Abus sexuel
• Alcoolisme, toxicomanie
• Maladies mentales, déficiences
• Délinquance, violence conjugale
• Mère adolescente
• Prostitution
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
(1)
(2)
Indicateurs de situations de danger
(1)
(2)
C. Caractéristiques socio-économiques et
psychologiques des parents
• Analphabétisme
père/mère
• Faible scolarisation
(< scolarité obligatoire)
père/mère
• Non emploi récurrent
père/mère
• Séparations, absences
père/mère
• Monoparentalité
père/mère
• Maladies chroniques
père/mère
• Handicaps, déficiences,
problèmes de santé mentale
père/mère
• Délinquance, détention
père/mère
• Toxicomanie, alcoolisme
père/mère
• Immigration récente
père/mère
• Ignorance de la langue du pays
d’accueil
père/mère
• Grossesse précoce
mère
• Absence de réseau de soutien formel
ou informel (Isolement)
famille
• Revenus familiaux
insuffisants (faibles)
famille
93
Tableau clinique des indicateurs de situations de danger
2. Famille (suite)
Indicateurs de situations de danger
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
Conflits conjugaux
Impulsivité
Violence conjugale
Absence de participation à la communauté
(Loisirs, culture, services, associations)
Stress et surmenage
Difficultés professionnelles, insatisfaction
Hostilité envers les institutions, l’école,
la police, etc.
Critères d’attribution externes
Comportements sexuels marginaux
Valorisation de comportements marginaux,
de la force
Absence de projet familial
Sentiment de compétence faible
(1)
famille
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
(2)
Indicateurs de situations de danger
•
•
•
•
•
•
•
•
père/mère
père/mère
père/mère
•
•
D) Attitudes et pratiques éducatives
Mésentente entre les parents
sur les sanctions
• Autoritarisme, rigidité, normativité,
intolérance
• Laxisme, absence de structures,
de règles
• Surprotection
• Indifférence, froideur
• Rejet, hostilité, humiliation
• Sanctions exagérées ou non effectives
• Recours aux sanctions violentes
• Valorisation de la débrouillardise,
des comportements illicites
•
famille
•
Absence d’expression de sentiments
positifs
Communication pauvre, vocabulaire
limité, argotique
Absence d’activités avec les enfants
Stimulation culturelle pauvre
Suivi et encadrement scolaire,
inexistants
Absence d’intérêt pour la scolarisation
Dévalorisation de l’école, des
enseignants
Refus de collaboration avec les intervenants (médicaux, scolaires, sociaux)
Absence de contrôle des sorties, des
fréquentations, de l’argent
Absence de contrôle sur les
activités à la maison (T.V., jeux
informatiques, etc.)
Initiation à des activités sexuelles
(1)
(2)
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
père/mère
94
Tableau clinique des indicateurs de situations de danger
3. Milieu de vie
Indicateurs de situations de danger
A. Quartier
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
Quartier socio-économiquement défavorisé
Quartier à forte concentration multiethnique
Conflits interethniques
Pauvreté des équipements collectifs
Délabrement des immeubles
Faiblesse des réseaux associatifs
Activités violentes, agressions, insécurité
Délinquance (gangs), trafics
Insuffisances de services de proximité
Présence de sectes, de groupes marginaux
Destruction de biens publics et privés
Habitat isolé
Faible implication des différents organismes sociaux
Tolérance des intervenants envers les comportements
marginaux et illicites
(1)
(2)
Indicateurs de situations de danger
(1)
(2)
B. École
• Concentration d’élèves en difficulté
• Problèmes de comportements récurrents
• Activités violentes, drogue, racket
• Agressions sexuelles
• Agressions contre les enseignants
• Pauvreté des équipements (sportifs, laboratoires,
bibliothèques, ateliers)
• Insuffisance d’activités parascolaires
• Encadrement insuffisant
• Leadership des autorités scolaires rigide ou laxiste
• Insuffisance de professionnels de soutien (psy, t.s,
éd., sp. et.)
• Indifférence, peur ou préjugés des enseignants
• Instabilité, manque d’expérience des enseignants
• Manque de disponibilité du personnel scolaire des
enseignants
• Faible collaboration avec les familles
• Faible connaissance du milieu
• Faible sentiment d’appartenance du personnel et
des élèves
• Faible sentiment d’efficacité collective du
personnel
• Manque de concertation avec les autres
organismes
• Image négative de l’école
95
Notes pour l’utilisation du tableau clinique des indicateurs des situations de danger :
-
-
(1) Cette colonne permet de rendre compte de la présence significative de l’indicateur concernant l’enfant, la famille, le père et/ou
la mère. Un simple repère (X) suffit.
(2) Cet espace permet de préciser la fiabilité des sources, à l’aide de lettres.
• A : fait observé directement (par l’intervenant…) ou extrait de rapports professionnels (médecins, psychologues,
policiers…)
• B : fait vérifié par recoupement de diverses sources (parents, voisins, enseignants…)
• C : fait relevant de la rumeur, non vérifié.
Certains indicateurs concernent davantage les adolescents (12 ans et plus) que les enfants. Ils sont signalés par un astérisque.
96
Tableau clinique des indicateurs de situations de protection (Braconnier V., Humbeeck B., Terrisse B.) (en cours de validation)
1. Enfant
Indicateurs de situations de protection
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
Santé sans problème particulier
Sommeil régulier
Appréciation des activités physiques
Bon pouvoir de concentration
Maîtrise sphinctérienne et mictionnelle
Politesse – langage correct
Hygiène personnelle
Habits propres et adaptés au contexte
Adaptation de la nourriture aux besoins
Créativité dans les jeux
Non consommation de tabac et de drogue
Extraversion
Bonne gestion de ses émotions
Absence d’agressivité envers les pairs, les adultes
Bonne maîtrise de son impulsivité
Confiance en soi
Reconnaissance de sa valeur
Persévérance
Optimisme
Capacité à exprimer ses sentiments
(1)
(2)
Indicateurs de situations de protection
•
•
Habileté à demander de l’aide
Respect des objets, de l’environnement, de la propriété
Obéissance, respect des règles et des consignes
•
Aptitude à l’autodiscipline
•
Capacité à refuser ce qui peut nuire
Capacités à coopérer
Flexibilité psychosociale
Leadership positif
Acceptation par les pairs
Participation aux activités parascolaires
Activités valorisantes en groupe
Autonomie bien gérée
Adaptation à la réalité
Internalité
Facilités d’apprentissage, absence de retards scolaires
Capacités de résolution de problèmes
Non absentéisme scolaire
Travail scolaire régulier
Respect de la différence sexuelle, de culture…
Tendance à apprécier la vie
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
(1)
(2)
97
Tableau clinique des indicateurs de situations de protection
2. Famille
Indicateurs de situations de protection
A. Milieu physique
• Propriétaire de son habitation
• Superficie et nombre de pièces adaptés aux membres
de la famille
• Présence d’espace personnel pour les enfants
(chambre, coin « travail »…)
• Logement aéré, propre
• Mobilier adapté, sanitaires suffisants
• Milieu de vie organisé (routines : horaires, repas,
coucher, télévision…)
• Alimentation suffisante
• Alimentation équilibrée
• Suivi médical pour les enfants
(1)
(2)
Indicateurs de situations de protection
père/mère
père/mère
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
père/mère
père/mère
•
•
père/mère
père/mère
(2)
C. Caractéristiques socio-économiques et
psychologiques des parents
•
B. Histoire personnelle des parents
• Famille stable
• Absence de placements institutionnels
père/mère
• Absence de maltraitance et de
violence parentale
• Absence d’alcoolisme, de toxicomanie
• Absence de maladies mentales et
de déficiences
• Absence de conduites délictueuses
(1)
•
•
•
•
•
Parcours scolaire sans problème
père/mère
Emploi régulier
père/mère
Satisfactions professionnelles
père/mère
Couple stable, entente conjugale
père/mère
Absence de maladies chroniques
père/mère
Handicaps, déficiences, problèmes de santé
mentale bien gérés
père/mère
Absence de toxicomanie et
d’alcoolisme
père/mère
Absence d’impulsivité
père/mère
Absence de stress et de surmenage
père/mère
Capacité de composer avec les
exigences de la vie
père/mère
Critère d’attribution interne
père/mère
Sentiment de compétence fort
père/mère
Absence d’hostilité envers les institutions,
l’école, la police…
père/mère
Bonne maîtrise de la langue du pays
d’accueil
père/mère
Présence de réseau de soutien formel
ou informel (amis, famille élargie…)
famille
Revenus familiaux suffisants
famille
Absence de dettes
famille
Présence de projet familial
famille
Sentiment d’appartenance familiale
famille
Participation régulière à la communauté
(loisirs, culture, services, associations) famille
98
Tableau clinique des indicateurs de situations de protection
2. Famille (suite)
Indicateurs de situations de protection
D. Attitudes et pratiques éducatives
• Entente entre les parents concernant les sanctions
• Autorité réfléchie, sanctions adaptées
• Présence de structures, de règles
• Respect transgénérationnel
• Protection des enfants
• Chaleur relationnelle, aptitudes à communiquer
• Attention portée aux besoins de chacun
• Acceptation, respect des différences
• Succès appréciés (scolaires, artistiques, sportifs…)
• Encouragements, « félicitations » fréquents
• Valorisation du courage, du mérite
• Expression de sentiments positifs
• Sens de l’humour
• Attentes et exigences adaptées à l’enfant, au jeune
• Communication fréquente, riche en échanges
(1)
(2)
Indicateurs de situations de protection
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
(1)
(2)
Activités fréquentes avec l’enfant
Stimulation culturelle
Suivi et encadrement scolaire réguliers
Intérêt pour la scolarisation (participation des
parents aux activités scolaires…)
Valorisation de l’école, des enseignants
Collaboration avec les intervenants (médicaux,
scolaires, sociaux)
Contrôle sur les activités à la maison (T.V., jeux
informatiques…)
Milieu de vie organisé (routines : horaires, repas,
coucher, télévision…)
Alimentation suffisante
Alimentation équilibrée
Suivi médical pour les enfants
99
Tableau clinique des indicateurs de situations de protection
3. Milieu de vie
Indicateurs de situations de protection
A. Quartier
•
•
•
•
•
•
•
Présence d’espaces réservés aux enfants et aux
jeunes, adaptés et bien entretenus (plaines de jeux,
terrains de basket…)
Présence de maisons de jeunes, animations de
quartiers…
Implication des services sociaux, de la commune…
Immeubles entretenus, environnement valorisé
Habitation non isolée
Absence de conflits interethniques
Sécurité du quartier
(1)
(2)
Indicateurs de situations de protection
(1)
(2)
B. École
•
•
•
•
•
•
•
•
Absence comportements violents, de drogue, de
racket
Richesse des équipements (sportifs, laboratoires,
bibliothèques, ateliers…)
Activités parascolaires régulières
Encadrement suffisant
Climat disciplinaire
Implication des enseignants, disponibilité
Collaboration avec les familles
Image positive de l’école
Notes pour l’utilisation du tableau clinique des indicateurs de situation de protection :
-
-
(1) Cette colonne permet de rendre compte de la présence significative de l’indicateur concernant l’enfant, la famille, le père et/ou
la mère. Un simple repère (X) suffit.
(2) Cet espace permet de préciser la fiabilité des sources, à l’aide de lettres.
• A : fait observé directement (par l’intervenant…) ou extrait de rapports professionnels (médecins, psychologues,
policiers…)
• B : fait vérifié par recoupement de diverses sources (parents, voisins, enseignants…)
• C : fait relevant de la rumeur, non vérifié.
Certains indicateurs concernent davantage les adolescents (12 ans et plus) que les enfants. Ils sont signalés par un astérisque.
100
Nom :
Evaluation prospective
effectuée par :
Le :
/
/
Origine de l’information :
Par qui ?
PHENOMENE-CIBLE
Degré de validité
Vérité avérée
Au préjudice de :
-
Cause(s):
maltraitance active
défaut de prévoyance
négligence
état de crise familiale
supervision inadéquate
Rumeur
Perspectives d'action :
101
Evaluation subjective de la situation de :
Effectuée par :
Le
/
/
1. « Pesanteurs » socio-historiques (poids du passé)
Très faible
Influence
Très forte
influence
2. Fonctionnement familial actuel
a. Facteurs de risque
Très peu
nombreux
Nombreux
b. Facteurs de protection
Très peu
nombreux
Nombreux
c. Facteurs de résilience de l’enfant
Très peu
nombreux
Nombreux
3. Qualité de la relation « Travailleur social / Famille »
Difficile
Optimale
4. Capacités d’évolution de la famille
Très faible
Très forte
5. Conclusion
Niveau 1 :
Niveau 2 :
Niveau 3 :
Hors de danger
Risque de danger
Difficulté
Etat de danger
Seuil de la difficulté
Seuil du danger
102
EVALUATION DE LA QUALITE RELATIONNELLE
AU COURS DE L’ENTRETIEN D’AIDE
Evaluation par le travailleur psychosocial
1. Registre émotif
J’ai constaté que la personne a manifesté de l’émotion au cours de l’entretien.
/----------------------------------------------------------------------------------------------/
Tout à fait
Pas du tout
J’ai le sentiment que la personne est parvenue au cours de l’entretien à identifier ses émotions.
/----------------------------------------------------------------------------------------------/
Tout à fait
Pas du tout
S’agit-il, selon vous : de colère
de tristesse
de dégoût
de joie
de stupeur
Autres :
0
0
0
0
0
-----------------
J’ai le sentiment que la personne au cours de l’entretien est parvenue à exprimer le contenu de
ses émotions.
/----------------------------------------------------------------------------------------------/
Tout à fait
Pas du tout
103
2. Registre cognitif
J’ai constaté que la personne au cours de l’entretien a évoqué ses propres besoins
psychosociaux
/----------------------------------------------------------------------------------------------/
Tout à fait
Pas du tout
S’agit-il selon vous de besoins affectifs
0
- Attachement
- Acceptation
- Investissement
Cognitifs
0
Stimulation
Expérience
Renforcement
Sociaux
O
O
O
O
O
O
0
Communication
Considération
Structure
O
O
O
J’ai le sentiment d’avoir compris ce que la personne souhaitait me dire à son propre propos au
cours de l’entretien
/----------------------------------------------------------------------------------------------/
Tout à fait
Pas du tout
J’ai le sentiment que la personne s’est sentie comprise au terme de l’entretien
/----------------------------------------------------------------------------------------------/
Tout à fait
Pas du tout
104
Evaluation par le sujet lui-même
1. Registre émotif
J’ai le sentiment d’avoir pu exprimer mes émotions au cours de l’entretien
/----------------------------------------------------------------------------------------------/
Tout à fait
Pas du tout
2. Registre cognitif
J’ai le sentiment d’avoir été compris au cours de l’entretien
/----------------------------------------------------------------------------------------------/
Tout à fait
Pas du tout
105
Le génogramme : convention graphique
Homme
Femme
M : 72
Mariage
(daté)
Personne-cible
de l’évaluation
UL : 61
Union libre
(datée)
7.01.41
Nom et prénom
Naissance et âge
Décès et cause
54
Liaison
Marcel Durand
DC/28.07.95
Infarctus
Divorce
(daté)
D : 78
Fratrie
Séparation
(datée)
S :49
Jumeau
Adoption
(datée)
73
82
Grossesse
IVG (datée)
96
88
Foyer
Familial
1
2
Mort en bas âge
(datée)
Fausse couche
(datée)
3
Succession d’unions
Numérotées dans la chronologie
In F. Alföldi (2005), Evaluer en protection de l’enfance, Paris, Dunod, p.188
Homme
Femme
M : 72
Mariage
(daté)
Personne-cible
de l’évaluation
UL : 61
Union libre
(datée)
7.01.41
Nom et prénom
Naissance et âge
Décès et cause
54
Liaison
Marcel Durand
DC/28.07.95
Infarctus
Divorce
(daté)
D : 78
Fratrie
Séparation
(datée)
S :49
Jumeau
Adoption
(datée)
73
82
Grossesse
IVG (datée)
96
88
Foyer
Familial
1
2
Mort en bas âge
(datée)
Fausse couche
(datée)
3
Succession d’unions
Numérotées dans la chronologie
107
Etablir une relation d’aide au SPJ : fiche « conseils » (Séverin M., Braconnier V.)
1) Climat positif : être détendu, naturel, à
l’écoute, éviter le jargon professionnel, utiliser
des mots positifs.
+ Mimétisme : adopter certains gestes ou mots
des personnes = S’affilier au système familial.
2) Authenticité : (re)connaître nos forces et
faiblesses afin que la personne nous perçoive
comme « vrai », digne de confiance.
3) Respect de la personne : accepter sa
perception des choses sans y adhérer pour
autant.
12) Repérer les tentatives de solutions :
⇒ Qu’a-t-on déjà essayé et qui a échoué ?
Rechercher le(s) point(s) commun(s) de ces
tentatives échouées = Choses à ne pas faire.
13) Recherche d’exceptions : = Moments
où le problème attendu ne survient pas ⇒
Choses à faire plus.
14) Laisser la personne avoir des
projets : ils sont souvent plus inventifs que
ceux du travailleur social et la personne s’y
engagera plus vite.
4) Vision optimiste : postuler qu’un
changement positif est possible, que la
personne a des compétences. Notre confiance
se transmettra implicitement (cf. Effet
Rosenthal).
15) Objectifs clairs et réalistes : les
5) Empathie : pouvoir comprendre le vécu
affectif de la personne tout en gardant un
certain recul ⇒ Besoin de nous défaire
momentanément de nos principes.
16) Objectifs définis en termes positifs et
concrets : se centrer sur ce que l’on va faire
6) Transparence : clarification/explication
des règles du jeu (rôle du SPJ, du Directeur,
du délégué…)
7) Prendre son temps, respecter le
rythme des personnes
8) Privilégier les points forts aux points
faibles : car répéter un comportement positif
est plus facile que stopper un comportement
problème.
9) Recherche active des compétences :
admettre que la personne peut résoudre des
problèmes et en a déjà résolus. L’’aider à
puiser dans ses expériences quotidiennes et à
les transférer à d’autres domaines.
objectifs imprécis prolongent le travail : on ne
sait pas quand on a fini. + Tenir compte de la
situation de la personne et de sa « vision du
monde » (l’objectif doit y être compatible).
plutôt que sur ce que l’on va éviter :
impossible d’évaluer des « noncomportements » (« ne pas… »). Au besoin,
utiliser la « question miracle » pour aider la
personne à expliquer les changements concrets
espérés : « Supposez que, cette nuit, un miracle
se produise, et que le problème qui vous amène
ici ait été résolu. Comment vous en rendrezvous compte au réveil ? »
17) Objectif minimal : rechercher la plus
petite chose significative (toujours décrite en
termes positifs) : les petites réussites
augmentent la confiance en soi et peuvent
avoir de grandes répercussions (cf.
systémique : « effet boule de neige »).
18) Féliciter : même s’il ne s’agit que de
petites réussites, les complimenter ⇒
Confiance en soi.
10) Empowering : redonner du pouvoir à la
personne, lui rendre confiance en ses
capacités⇒ Travailler avec elle et non pour
elle. La personne est actrice.
19) Responsabiliser et non culpabiliser :
11) Position basse : la personne est celle qui
20) Accepter ses limites : la personne peut
ne pas collaborer malgré nos efforts. Il faut
alors la placer devant les conséquences de ses
actes.
connaît le mieux son problème (= expert). Lui
demander de nous aider (à rassurer le TJ…) :
la plupart des gens aiment aider les autres.
la culpabilité écrase, la responsabilité
mobilise : il s’agit de la capacité à répondre
aux difficultés.
108
Les indicateurs d’une relation de qualité
Le premier contact entre une famille et un service de l’aide à la jeunesse, Etat des
réflexions de l’Agora, octobre 2005, Publication du Ministère de la Communauté
française
-
sentiment d’être compris et de comprendre l’autre
-
opportunité de manifester ses émotions et de pouvoir les exprimer par des mots
-
construction de l’entretien dans le sens d’un partenariat (respect du rôle et des
compétences spécifiques de chacun, prise en compte des ressources et des expériences,
souci de recueillir l’adhésion)
-
un temps suffisant (prendre le temps de connaître, se reconnaître, comprendre les
difficultés, dépasser les peurs réciproques)
-
le choix d’un lieu de rencontre adéquat
-
construction de la relation dans le respect et la transparence (s’abstenir de tout
jugement ou condamnation, conviction profonde que tout être humain possède des
compétences et des capacités de changement, souci d’impliquer activement la famille,
énoncer clairement les droits des jeunes et de leur famille)
109
Stratégies de défense chez l’intervenant
ONE (2003). Travailler le social. Regards méthodologiques. Revue trimestrielle de
l’ONE. Gembloux : Cardijn Publication. 2003, 34-35.
-
La projection : le problème est chez l’autre…
-
La rationalisation : je manque d’information, je vais m’informer…
-
La réaffirmation de sa compétence ou de sa position d’expert : je suis un
professionnel, je sais ce qu’il faut faire…
-
L’approche diagnostique : interprétation des données, pathologisation de l’autre
(l’autre a un problème…).
-
Le formalisme : se raccrocher aux procédures, au règlement, à la loi.
-
Le blocage, qui s’accompagne d’un sentiment de souffrance : je ne savais plus quoi
faire, j’étais paralysé…
-
Le retranchement, derrière le rôle que l’on attend de nous, derrière nos missions…
-
La recherche d’alliés pour se renforcer et enfoncer l’autre.
-
L’évitement : ne pas être là, esquiver la rencontre, oublier le rendez-vous…
110
Projet de guide d’entretien avec l’adolescent
SAJ de Dinant
A. La demande initiale
1. Qui demande
2. La position du jeune par rapport à la demande : ce qu’il en dit
3. Que demande-t-il lui-même
B. Variables qui influencent la situation de l’adolescent
(NB : l’utilité de la liste qui suit est de ratisser large, de ne pas passer à côté d’un élément)
♦ Le contexte culturel de la famille
♦ Les valeurs de la famille, les croyances
♦ Le contexte socio-économique, niveau de contrainte
Peut être un analyseur du rapport à l’autre - pouvoir
Notion de contrainte
♦ L’histoire de la famille, tendance à reproduction
♦ L’ouverture de la famille vers l’extérieur
♦ Le rapport à l’argent
♦ La qualité de la relation jeune-famille
En quoi il peut compter
Conflit possible sans mêler les identités
♦ La communication intrafamiliale
♦ Le statut du jeune, son rôle au sien de la famille : établir la
La scolarité du jeune
La relation avec ses pairs, sa socialisation
La structure, l’organisation de son temps
En quoi sait-il se débrouiller à contextualiser
La vie affective et la sexualité, attention aux intrusions inutiles
L’image qu’il a de lui-même, l’image qu’il en donne, effet de contrainte – degré de
contrainte permanente
♦ L’expression de ses sentiments : colère, peur, tristesse, joie, dégoût
♦ Sa santé
♦ Etude des logiques d’appartenance et de fidélité
♦
♦
♦
♦
♦
♦
C. Les indicateurs objectifs de danger ou de difficulté
(NB : c’est la faculté d’écoute et d’intuition qui est la plus importante, il ne faut pas être à la recherche
systématique des symptômes)
♦ L’accumulation des problèmes dans différents domaines et de manière répétée
(en référence avec ci-dessus)
♦ Les symptômes physiques et somatiques (+ durée et fréquence)
♦ Les troubles graves de l’humeur (+ durée et fréquence)
♦ Expression et représentation de difficultés relationnelles graves verbale ou non
verbale
111
♦ Les conduites à risque (+ significations)
• la consommation excessive d’alcool, de stupéfiant
• les passages à l’acte violents
• les actes délictueux
• l’automutilation
• l’ordalie (jouer avec la mort)
• les tentatives de suicide
• la boulimie – l’anorexie
D. Les observations de la déléguée durant l’entretien : observation, perception et
communication
E. Les ressources
1. Du jeune
2. De la famille, de l’entourage
3. Des services
F. La compétence du jeune à accepter la proposition d’aide
La volonté minimum du jeune à accepter une proposition d’aide
Merci de communiquer vos avis et éventuelles corrections
112
Le modèle des douze besoins
(Pourtois-Desmet, L’éducation postmoderne, Paris, PUF, 2004)
113
Le modèle écosystémique de parentage (B. Terrisse, 1996)
Relation entre
conjoints
Méso, Exo
Macro-systèmes
Réseau social,
garderie, école,
services
Trajectoire
des parents
Microsystème
Antécédents
familiaux
des parents
Personnalité
des parents
Valeurs, attitudes,
sentiments de compétences, attributions
Statut socioéconomique,
var. ethnoculturelles
Méso, Exo
Macro-systèmes
Méso, Exo
Macro-systèmes
Comportement
éducatif
parental
Caractéristiques
de l’enfant
Adaptation et
développement
de l’enfant
Travail
professionnel
Fratrie
Famille élargie
Méso, Exo
Macro-systèmes
114
Observation des capacités de l’enfant4
Introduction
Un enfant sain se constitue avec son corps, ses rythmes, et se retrouve dans un processus de
maturation.
Ce processus va être favorisé ou freiné par la qualité de la relation entre lui et ses parents.
Si les besoins de l’enfant ne sont pas reconnus, si ses rythmes se sont pas respectés, des
difficultés d’adaptation vont apparaître ».
La grille va permettre d’observer les fonctions saines et celles en difficultés. Il est important
de reconnaître les fonctions qui posent problème afin de les réajuster au plus vite.
I.
LES FONCTIONS
1. Le sommeil
Le rythme – heures – rituels – qualité du sommeil – le lieu – existence d’un
objet transitionnel – y a-t-il des habitudes prises pour le coucher ?
2. L’alimentation
• la régularité
• comment mange-t-il ? (activement – passivement - proprement)
• l’appétit
• la digestion
• attention à l’anorexie – boulimie
3. La croissance
• développement stature pondéral (poids – taille : courbe O.N.E.). Est-il en
bonne santé ?
• développement psychomoteur
a.
Neuromoteur
construction d’un axe : importance d’être attentif au regard, la tenue, la
marche, le langage (évolution, emploie-t-il le « je », …), la propreté
(depuis quand ? Y a-t-il des rechutes ?)
4
Grille proposée par un SAJ
115
b.
Psychomoteur
• Montre-t-il ses émotions ?
• A-t-il du plaisir ? (ex. : à 3 mois, il sourit)
• Comment va-t-il pouvoir dire « non » ?
• A-t-il des comportements d’offrande ?
c.
Schéma corporel
• Où est la droite, la gauche, le haut, le bas ? Cela ne dépend pas de
l’intelligence, mais s’apprend par le plaisir, l’expérience. Si
l’enfant n’a pas conscience qu’il représente un axe, il ne pourra
intégrer la droite, la gauche, …
d.
Image de soi
Comment se représente-t-il ? (ex. : le dessin du bonhomme).
Importance que l’enfant sente qu’il forme un tout.
4. Le jeu
Au travers le jeu, l’enfant joue à se séparer. Au plus il va jouer, au plus il va
être capable de se séparer, d’être créatif, de rêver.
•
Peut-il jouer seul ? Avec les autres
•
Comment joue-t-il ? A la maison, dans la cour de l’école, … ?
•
Est-il excité, agressif en jouant ?
•
Quel type de jeu va-t-il mettre en place ?
•
A-t-il du plaisir en jouant ?
5. La relation
a. La relation de soi
• Quelle image a-t-il de lui ? (importance du regard de sa mère, va-t-elle le
valoriser ?)
• Comment vit-il son corps ?
• Va-t-il rapidement parler du « je » ?
116
b. La relation aux adultes
• Y a-t-il un lien d’attachement entre parents/enfant ? (importance de la
relation dans le temps et le rythme, importance de la personne qui assure
la continuité des soins)
• Comment repérer s’il y a un lien ?
-
des sourires réciproques
-
douceur du contact
-
solidité du portage, bercement, …
• Quelle est la qualité de la relation d’attachement ?
c. La relation aux autres (fraternels, avec les pairs)
• Quelle est sa place dans la fratrie ?
• Comment se vit-il, agit-il dans les relations ? (parasite, caïd, bouc
émissaire, isolé, …)
d. Les relations aux pairs
• A-t-il des comportements d’offrande ?
• A-t-il des gestes de sollicitation ? (ramener un enfant dans le groupe, …)
• A-t-il des gestes d’apaisement ? (consoler un enfant, défendre un
autre, …)
• A-t-il des comportements de menace ? (se fâcher, être en désaccord, …)
• A-t-il des comportements d’agression ? (sur lui, sur les objets, sur un
autre enfant)
• Est-il un enfant dominant ? Dominé ?
-
dominant agressif (peu suivi, peu initié)
-
dominant leader (provoque l’approche, l’offrande, a des gestes de
lien, d’apaisement, consoler les autres, des défend, les accueille, …)
-
dominé leader
-
dominé craintif
-
dominé agressif (reste à l’écart, est isolé, …)
Au travers de ces fonctions, l’enfant va gérer ses émotions.
117
II.
SES EMOTIONS
1. la peur
2. le plaisir
3. la colère
4. la tristesse
5. le dégoût
Peut-il exprimer ses émotions ?
Comment les exprime-t-il ?
En fonction de la qualité de la relation et donc les soins maternels, l’enfant va
apprendre à gérer ses angoisses (de séparation). Sinon, il va développer des
symptômes (agressivité, inhibition, problèmes psychologiques, troubles
d’apprentissage, …).
118
Formes de négligence
« La négligence parentale est l’omission continuelle ou répétée des soins et des actes
éducatifs permettant de répondre aux divers besoins de l’enfant quant à la santé, l’hygiène, la
protection, l’éducation ou la vie émotionnelle. » définition de l’IDEF
Les manifestations de la négligence peuvent être regroupées en trois catégories (SAJ
Bruxelles)
•
-
La négligence physique et/ou médicale :
négligence alimentaire : insuffisance ou absence de nourriture…
négligence vestimentaire : vêtements inadaptés à la saison, sales, en mauvais état…
négligence médicale : suivi médical non assuré, traitements non effectués…
négligence dans le logement : insalubrité, exiguïté…
• La négligence psycho-affective :
Pour différencier la maltraitance psychologique de la négligence psycho-affective, de
nombreux auteurs utilisent la notion d’intentionnalité.
- manque de chaleur
- manque d’attention
- indifférence affective, distance vis-à-vis de l’enfant.
•
-
La négligence éducative et scolaire :
surveillance défaillante
absence ou insuffisance de stimulations éducatives
irrégularité dans le suivi scolaire
laxisme : fréquentation de lieux et de milieux inadaptés à l’âge de l’enfant et/ou du
jeune…
119
10. TABLE DES MATIERES
1. OBJET ET MẺTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
1.1 Objet de la recherche
page 2
page 2
(1) L’enjeu juridique
page 2
(2) L’enjeu praxéologique
page 4
(3) L’enjeu éthique
page 5
1.2 Méthodologie
2. ETAT DES CONNAISSANCES THẺORIQUES
page 7
page 10
2.1 L’évaluation dans le cadre de l’Aide à la Jeunesse
page 10
2.2 Définition des concepts
page 11
(1) Le danger
page 11
(2) L’évaluation du danger
page 12
(3) Le modèle écosystémique
page 17
(4) Les besoins de l’enfant et la bientraitance
page 22
(5) Les facteurs de risque et de protection
page 25
3. RECUEIL DES DONNẺES
page 27
3.1 Les attentes des intervenants
page 27
3.2 Le recueil des données pertinentes
page 27
4. UNE MẺTHODOLOGIE DE L’ẺVALUATION DE L’ẺTAT DE
DANGER
page 31
4.1 Une évaluation syncrétique et dynamique
page 31
4.2 Tableau conceptuel
page 32
120
4.3 Approche dynamique du tableau conceptuel
page 33
(1) Les caractéristiques de la relation
page 33
(2) Le questionnement par rapport au présent, au passé
et à l’avenir
page 35
a. Par rapport au présent
page 35
b. Par rapport au passé
page 35
c. Par rapport à l’avenir
page 36
(3) La mise en œuvre des capacités de changement
4.4 Approche syncrétique du tableau conceptuel
page 36
page 38
5. APPROCHE PRATIQUE
page 39
6. DES OUTILS « FACILITATEURS »
page 42
7. CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
page 43
8. BIBLIOGRAPHIE
page 44
9. ANNEXES
page 54
9.1 Glossaire relatif à l’évaluation de l’état de danger
page 54
9.2 Proposition d’outils d’observation et de recueil de données
page 88
(1) Les facteurs et indicateurs de difficulté, de danger
et de protection
page 88
(2) Outils spécifiques
page 88
(3) Références d’outils complémentaires
page 89
10. TABLES DES MATIERES
page 121
121
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