panneaux de l`exposition - Tulle Culture

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1939-1945
LA
MANUFACTURE
D’ARMES DE TULLE
PENDANT LA SECONDE GUERRE MONDIALE
Vue de la Manufacture d’Armes de Tulle en 1903 (Collection APAT)
Depuis le XVIIe siècle, l’activité de l’industrie d’armement s’est développée hors les murs de la cité médiévale tulliste, dans des ateliers
d’arquebusiers situés dans les faubourgs ou dans des moulins le long des cours d’eau, Corrèze, Montane, Solane et Céronne. C’est ainsi
que, en 1690, suivant une tradition de travail du métal reconnue depuis longtemps déjà sur le territoire, un atelier de fabrication de canons
de fusils s’installe dans les moulins de Souilhac et de Fès. Sa reconnaissance en tant que Manufacture Royale en 1777, puis l’obtention du
statut de Manufacture d’Etat en 1886 participent à l’essor de cette usine qui rythme dès lors la vie de la cité tulliste au son de sa sirène.
Durant la seconde guerre mondiale, la présence de cette industrie à Tulle et la nécessité impérieuse de son contrôle constituent un enjeu
fondamental pour l’occupant allemand.
De la période 1939-1945, la mémoire a retenu les évènements dramatiques vécus par la population de Tulle les 7, 8 et 9 juin 1944, occultant
la vie et l’action résistante de l’établissement. Tout au long du conflit, l’histoire de la MAT est, en effet, étroitement liée aux évènements
politiques nationaux et internationaux, subissant les conséquences de la guerre, de la défaite et de l’occupation allemande.
La France entre en guerre le 4 septembre 1939, mais dès 1937, dans un contexte européen marqué par les tensions politiques et la montée
des fascismes, la MAT se mobilise et se prépare à l’effort de guerre. Entre 1940 et 1942, la production militaire se développe, puis décline
après l’armistice dans un contexte de reconversion vers des productions civiles réalisées sous un « discret » contrôle allemand.
L’envahissement de la zone libre le 11 novembre 1942, entraîne une évolution de la situation de l’entreprise qui passe dès le début de
l’année 1943 sous domination allemande. La Manufacture devient alors pour l’Etat Français un outil de la collaboration économique avec
l’Allemagne.
C’est dans ce contexte que s’organisent au sein de l’usine des résistances aux formes multiples, individuelles ou collectives, actives ou
passives, faisant de la MAT un foyer de la Résistance locale. Jusqu’à la Libération, la répression sévit tant dans l’enceinte de l’usine qu’à
l’extérieur.
A partir de l’étude des fonds d’archives de la Manufacture, aujourd’hui conservés par l’association des Amis du Patrimoine de l’Armement
de Tulle, des Archives Municipales et de ceux provenant de l’ancien musée associatif de la Résistance et de la Déportation, complétée
par des témoignages, cette exposition propose de mettre en lumière l’histoire de l’entreprise et la vie des ouvriers depuis la période
précédant la déclaration de guerre jusqu’à la Libération. L’exposition rassemble documents d’archives et objets, témoins des actions des
hommes et des évènements qui s’y sont déroulés.
Réalisation Maugein imprimeurs - RCS B 825 680 119
A travers cette exposition, c’est une page méconnue de l’histoire de cet établissement, de ses hommes et de ses femmes, qui vous est
présentée.
01
1937-1939 : la Manufacture
d’Armes de Tulle (MAT), un
établissement préparé à la guerre
La France entre en guerre le 4 septembre 1939, mais dès 1937 des protocoles relatifs au renforcement
en personnel des établissements constructeurs d’armement sont mis en place par la Direction des
Etudes et Fabrications d’Armement (DEFA) en vue d’une éventuelle mobilisation.
A la suite de la montée du nazisme et de la crainte croissante d’une guerre en Europe, les gouvernements du
Front Populaire puis du radical Daladier relancent l’industrie militaire française et la préparent à un possible
conflit.
L’équipe de direction de la Manufacture avant la guerre (1934). Nombre d’entre eux vont être des
acteurs majeurs de cette période (©Ville de Tulle)
Dès 1937, la Manufacture d’armes s’organise et renforce son personnel
Le recrutement et l’organisation de personnel de renforcement nécessaire aux établissements constructeurs de
la XIIIe région militaire sont étudiés dès 1937 par la DEFA. Selon l’état des besoins en main-d’œuvre demandé
cette année-la, 10 usines seraient mobilisées en cas de guerre dont la Manufacture d’Armes de Tulle. Le 26
février 1937, Charles Brion alors directeur de la MAT, transmet les besoins en personnel en cas de mobilisation
au général de la XIIIe région : l’usine qui emploie alors 1260 ouvriers travaillant 44 heures par semaine en
nécessiterait 4380.
Dès le vote de la loi du 11 juillet 1938 sur l’organisation de la nation en temps de guerre, les propositions se
multiplient sur le type de main d’œuvre à intégrer à la Manufacture (chômeurs, soldats,etc.), tandis que la
direction avertit du besoin absolu de spécialistes. Parallèlement, des exercices de préparation à la mobilisation
ont lieu à Tulle le 25 avril 1939
Alors que les tensions politiques et militaires s’accroissent en Europe, le Ministère de l’Armement, en charge
de l’économie de guerre est créé en septembre 1939. Les ateliers en service sont progressivement aménagés
de façon à permettre l’emploi d’une partie du personnel de renforcement dès son arrivée.
Plan de la Manufacture d’Armes de Tulle à
la veille de la Seconde Guerre Mondiale.
(©Ville de Tulle)
La défense, une préoccupation de la MAT
La Direction de la défense passive est créée par décret le 29 juillet 1938 pour protéger les populations civiles
en période de guerre. Face à la menace d’un bombardement, les questions de défense active (mise en place
de 8 mitrailleuses, etc.) et passive (tranchées abris, etc.) de la MAT sont également développées : information
et sensibilisation des ouvriers, distribution de masques à gaz, organisation des secours, consignes aux veilleurs
de nuit contre les incendies, exercices d’évacuation. Elles restent cependant limitées par manque de matériel
de défense contre les avions (DCA), de véritables moyens de camouflage des lumières et de mise à l’abri du
personnel en cas d’attaque.
Des notices de défense passive en cas de bombardements
sont distribuées à la Manufacture (1938-1939). Dès 1939,
des masques à gaz sont distribués à tous les ouvriers par
l’infirmière, Mme Barrat. (©Ville de Tulle)
En juin 1939, l’organisation d’un exercice de défense passive est
relayée dans le Courrier du Centre. (Almanach de la Manufacture
d’Armes de Tulle 1777-1977, GIAT Industrie)
02
1939-1940 : la Manufacture d’Armes
de Tulle entre en guerre,
mobilisation et constructions
Le 3 septembre 1939, la France et le Royaume-Uni déclarent la guerre à l’Allemagne. La mobilisation
est générale et concerne plus de 4 millions de Français qui rejoignent les centres mobilisateurs.
Dans le même temps, dans le cadre de l’effort de guerre, le Ministère de l’Armement tente de
s’organiser pour assurer le fonctionnement des usines françaises.
Le 1er septembre 1939, les maires des communes françaises
sont avertis de l’imminence de la déclaration de guerre à
l’Allemagne. Jacques de Chammard, maire de Tulle, informe
la population que l’ordre de mobilisation débute le 2
septembre à partir de minuit.
(©Ville de Tulle)
La mobilisation industrielle s’engage dès septembre 1939, mais en raison du départ au front d’une partie de
la main-d’œuvre et d’un équipement industriel vieillissant, la production n’atteint pas les objectifs attendus.
Afin de relancer l’activité, Raoul Dautry, Ministre de l’Armement, décide de faire appliquer aux usines françaises
de nouvelles techniques de gestion, d’employer des femmes, des chômeurs, des travailleurs des colonies et
de faire revenir du front 600 000 spécialistes.
Les spécialistes, tels les dresseurs de canons, sont
indispensables au fonctionnement de la MAT.
(Collection APAT)
La mobilisation au cœur de la MAT
Au cours des premières semaines du conflit, la MAT n’est pas épargnée par les réquisitions d’hommes dont
l’absence perturbe l’organisation des services. Néanmoins, les effets des mesures engagées par le ministère
Dautry se ressentent dès le mois de novembre 1939 et les effectifs se montent, en avril 1940, à 4761 ouvriers dont
770 personnels de renforcement et 1112 femmes. Des mesures sont prises pour éviter que ces établissements
soient démunis de spécialistes indispensables à la mise en place d’une fabrication en temps de guerre. Certains
voient leur mise en appel différée à 45 jours pour diriger et former des équipes d’ouvriers de renforcement.
D’autres, les affectés spéciaux, sont rappelés du front et des dépôts pour 30 jours ou plus.
De nombreuses entreprises tullistes (Trarieux et Rogard, Pinardel, Lemaire, Veyres-Périé,etc.), prestataires
importants de la MAT, bénéficient du statut d’affecté spécial pour leurs employés et matériels. Face à la
méfiance des autorités militaires de la XIIIe région, notée le 22 avril 1940, le nouveau directeur Germain Pic se
justifie par l’importance de ces entreprises dans les constructions engagées à la MAT.
L’apport de main d’œuvre féminine
pallie les départs au front des
ouvriers mobilisés. Deux femmes de
dos travaillent sur les chaînes de
production. (Collection APAT)
Un important programme de constructions militaires et civiles
Commencé en 1937, le programme de construction est étendu entre 1939 et 1940 pour adapter l’outil de
production de la MAT. Plusieurs grands travaux sont lancés dont la reconstruction et l’aménagement du
bâtiment 1, l’agrandissement de l’atelier central, la construction d’une gaine de tir de 200 m, ou encore celle de
l’atelier annexe à partir de novembre 1939, route de Cosnac à Brive, destiné aux chaines de canons 20HS404.
Pour régler la question du logement des ouvriers, le Ministère de l’Armement s’oriente vers la construction de
maisons individuelles. Dès 1940, 200 maisons sont construites par la municipalité à proximité du stade, dans
la prairie Mignaudet, à Roussolles et au Cloutiéroux. Parallèlement à ce programme, des réquisitions de terrains
permettent l’édification par la MAT, à partir du mois de mai, d’une cité ouvrière à Virevialle à Tulle et d’un camp
aux Chapélies à Brive.
Vue générale de la MAT depuis la côte de
Poissac en avril 1939. Au premier plan, la
reconstruction du bâtiment 1.
(Collection APAT)
03
1939-1940 : produire pour soutenir
l’effort de guerre
De 1939 à 1940, dans le cadre de l’effort de guerre, le fonctionnement de la MAT connaît des
évolutions sensibles marquées par l’augmentation des effectifs, des machines-outils et de la
production d’armement.
Si l’ennemi principal du soldat français au front est le désœuvrement lors de la « drôle de guerre » (septembre
1939 - avril 1940), à l’arrière, la solidarité est totale. L’objectif du plan du Grand Quartier Général pour l’industrie
de l’armement est clair : atteindre en 1941 une supériorité matérielle suffisante pour permettre à l’armée française
de passer à l’offensive.
Affiche « Souscrivez aux bons d’armement » (1939). Le
ministère de l’Armement lance un appel à la population
française afin de soutenir son industrie de guerre. Le but
est de permettre à l’armée française de rattraper son retard
par rapport à l’armée allemande puissamment équipée.
(©Ville de Tulle)
L’établissement renouvelle son parc de machines-outils
En août 1939, à l’image des différents ateliers français de productions, l’activité insuffisante de la MAT est le
résultat d’une trop grande quantité de machines vétustes : la moitié d’entre-elles ont plus de 25 ans. Suivant la
politique d’amélioration de l’appareil productif français, le parc des machines-outils de la MAT s’accroît entre
août 1939 et juin 1940. Au début du conflit, l’établissement est doté de 4010 machines pour atteindre un total
de 4881 en juin 1940.
Fraiseuse Bariquand (1889), collection Musée des Armes,
2007.1.72. Ces machines ont équipé les ateliers de la MAT
dès 1886 pour la production du fusil Lebel. Nombre d’entre
elles sont encore utilisées au début du second conflit
mondial. (©Ville de Tulle)
La MAT développe ses productions
A la suite des initiatives du ministère Dautry, la production d’armes et d’accessoires augmente sensiblement jusqu’en
juin 1940. La MAT est chargée, à ce titre, de produire plusieurs types et pièces d’armes : canon de fusil modèle
1936, fusil R 35, fusil mitrailleur FM 24-29, mitrailleuses de 7,5 mm modèle 1931 et 1934, canons automatique
d’aviation de 30 mm, de 25 mm à cadence accélérée, anti-char 20/16 mm ou encore canon 20 mm HS 404.
Les productions de matériel pour le fusil mitrailleur
24-29 de septembre 1939 à mai 1940. (©Ville de Tulle)
D’autres types de productions complètent le cahier de commandes : des outillages (forets, alésoirs), des
fausses balles. Au-delà des activités de productions, la MAT est également chargée de la remise en état de
pièces d’armes, notamment pour la réparation de mitrailleuses Lewis et Hotchkiss.
Surpris par la guerre éclair (Blitzkrieg) menée par l’armée allemande, à partir du 10 mai 1940 lors
de la Bataille de France, l’armée anglaise et des unités françaises battent en retraite à proximité de
Dunkerque. Après quelques semaines de combat, les alliés sont submergés. Le 4 juin, Dunkerque
est prise par l’armée allemande. Le 14 juin 1940, Paris est déclarée ville ouverte.
Portrait de Raoul Dautry en 1928. Ancien directeur
des chemins de fer de l’Etat, il est ministre de
l’armement du 20 septembre 1939 au 16 juin 1940,
au sein des gouvernements Daladier et Reynaud.
Le 20 avril 1940, il se déplace à Tulle pour visiter la
Manufacture d’Armes. (©Ville de Tulle)
04
1940-1942 : la défaite française
et la collaboration industrielle
Le nouveau gouvernement Pétain demande la cessation des combats le 17 juin 1940 et l’armistice est
signé le 22 juin à Rethondes. En zone occupée, le rythme est désormais imposé par les Allemands:
reprise des fabrications et mises en garde contre les premières manifestations de résistance.
En zone libre, le gouvernement de Vichy s’applique à faire respecter les clauses de l’armistice.
Dès la défaite, l’appareil productif d’armement français passe sous le contrôle de la commission allemande
d’armistice. La fabrication de nouveaux matériels de guerre en territoire non occupé doit cesser.
Les établissements sont placés sous la tutelle du ministère de la Production Industrielle de René Belin et la DEFA
devient le Service des Usines Mécaniques de l’Etat (UME) dirigé par le général Brochard.
Le 24 octobre 1940, lors de l’entrevue de Montoire,
Pétain engage personnellement et officiellement le
régime de Vichy dans la collaboration avec le IIIe Reich.
(©Droits réservés)
Les conséquences de l’armistice
A la MAT, l’arrêt immédiat de toutes les fabrications entraîne le licenciement du personnel mobilisé. Les effectifs
chutent, passant de 4516 employés en juin 1940 à 1619 en juillet, et les femmes disparaissent pratiquement de
l’établissement. La plupart des travailleurs militaires sont rendus à leurs compagnies le 30 juin 1940. En 1942,
les ouvriers de l’annexe de Brive, désormais fermée, sont affectés à Tulle.
Malgré la chute des effectifs, l’apprentissage reste un maillon essentiel de la nouvelle politique de Vichy.
Dès septembre 1940, l’Ecole de Formation Professionnelle Normale (EFPN) de la MAT devient l’une des 20
écoles rattachées aux établissements de l’armement.
La signature de l’armistice met un terme provisoire aux travaux lancés à la MAT. L’activité est pourtant relancée
dès l’automne : aménagement d’un camp d’ouvrier à Uzerche, achèvement des baraquements de Virevialle et
de la gaine de tir fin 1942, constructions (poste de transformation, etc.) et reconstructions.
Puteaux
Levallois
Rueil-Malmaison
Issy les Moulineaux
Vincennes
Châtillon
Le Havre
Caen
Paris
Rennes
Le Mans
Besançon
Bourges
Châtellerault
Vichy
Roanne
Tulle
Lyon
Saint-Priest
Saint-Etienne Irigny
Brive
Valence
Toulouse
Carte des établissements constructeurs
en France au lendemain de l’armistice.
(©Ville de Tulle)
Nîmes
Tarbes
Etat des Etablissements constructeurs en
fonctionnement à l’armistice en 1940
Manufactures
Ateliers de construction
Ateliers de fabrication
Atelier de pyrotechnie
Cartoucherie
Ligne de démarcation (jusqu’en novembre
1942)
Vers la collaboration industrielle
A la MAT, les mois suivant l’armistice sont marqués par une baisse sensible de l’activité et par la reconversion
vers des productions privées ou civiles : visserie, brouettes, pièces pour gazogènes Panhard, pour machines
agricoles, pour moteurs d’aviation Gnome et Rhône, etc.
Photographie de l’équipe de
direction de la Manufacture en
mai 1942. Parmi eux, au premier
plan, François Delamaire à la droite
du directeur Montlaur au centre.
(Collection APAT)
Le passage à la guerre totale en 1942 est un tournant dans la politique allemande marquée par l’exploitation
des ressources matérielles et humaines des territoires occupés. A la MAT, des fabrications sous licence des
commissions allemandes sont lancées : pièces de mitrailleuses, canon mitrailleur de 25 mm à cadence accélérée
et canon 20 mm HS 404. Cependant, l’armée d’occupation choisit de ne pas faire fabriquer des armes entières
dans un même établissement afin d’éviter les vols. Cette situation rend difficile la vérification des pièces et
facilite les actions de sabotage.
La Manufacture d’Armes de Tulle,
vue de la côte de Poissac.
(©Droits réservés)
05
1942-1943 : la Manufacture
sous tutelle allemande
Fin 1942, toutes les Usines Mécaniques de l’Etat sont logées à la même enseigne. Les établissements
sont pourvus d’une direction allemande qui s’ajoute à la direction française. Les fabrications
sont poursuivies dans un premier temps sans ingérence allemande, mais la situation s’inverse
progressivement.
Le débarquement allié du 8 novembre 1942 en Afrique du Nord précipite l’envahissement de la zone libre
par l’armée allemande, bouleversant profondément la société française. A Tulle, un détachement allemand
arrive et réquisitionne immeubles et hôtels.
Une direction à deux têtes
La MAT est rapidement dépouillée de ses matériaux non-ferreux (laiton, cuivre, plomb) en 1942, et dès janvier
1943, ses outillages et sa machinerie sont considérés comme prises de guerre. 229 machines-outils sont alors
envoyées en Allemagne. A partir de 1943, les Allemands imposent un contrôle sur les productions, installant
à la tête de chaque usine une équipe de techniciens coiffant la direction française, conservée pour gérer
l’administration civile de l’établissement. En février 1943, l’usine passe sous la tutelle de la firme allemande
Deutsche Waffen und Munitionsfabriken (DWM) qui nomme le colonel Brenner, directeur. Dès lors, la MAT
participe à la production industrielle de l’occupant.
Rapport réalisé à la demande de la municipalité de
Tulle sur les moyens de défense de la MAT en 1942.
(©Ville de Tulle)
Travailler pour l’industrie militaire allemande
Si dans un premier temps, en mai 1943, une commission spéciale de la Luftwaffe a pour mission de réduire
la main d’œuvre, le lancement d’importantes commandes d’armement français (canons HS404, de 75mm,
25 mm contre avion) et allemand (fusil K3 et mitrailleuse MG 131), nécessite une augmentation du nombre
d’ouvriers qui atteint 3458 ouvriers en juin 1944 dont 765 du chantier de jeunesse.
Obtenir une production de qualité devient difficile tandis que l’absentéisme s’accroît à l’usine. Aussi, la direction
allemande envisage de faire subir aux effectifs une augmentation des horaires de travail et de s’appuyer sur la
qualité de l’atelier d’apprentissage.
Plan de la Manufacture d’Armes
de Tulle en 1943. (Collection APAT)
La MAT change de régime de fonctionnement
Au 1er novembre 1943, la MAT désormais dirigée par le directeur français Fernand Magdalena, en remplacement
de Jean Bertrand, cesse de fonctionner comme établissement relevant du service des Usines Mécaniques de
l’Etat. La loi du 13 août 1943 en fait une régie autonome gérée par un conseil d’administration. L’engagement
de fonds est alors facilité pour permettre l’augmentation des salaires et l’encouragement de la production.
Tout au long de cette période, la présence allemande dans les murs de l’établissement semble inciter une
partie de la direction française à jouer un double jeu constant. Elle stimule la production, réprime les abus les
plus repérables sans obtenir un vrai démarrage de la production mais couvre les actes de sabotages.
Portrait
de
l’ingénieur
militaire en chef de 2e
classe Fernand Magdalena
ancien de la Manufacture
d’Armes de Châtellerault,
désigné directeur de la MAT
par arrêté ministériel du 18
octobre 1943. Il est à la tête
de la direction française
de l’établissement du 1er
novembre 1943 au 31 juillet
1944. (Collection APAT)
06
1943-1944 : collaboration
économique et gestion
de la main-d’œuvre
L’une des formes concrètes de la collaboration économique est l’apport d’une main-d’œuvre massive
à l’Allemagne. A travers le Travail volontaire pour l’Allemagne, la Relève, puis le Service du Travail
Obligatoire, la MAT en devient tour à tour victime puis bénéficiaire.
Dès le début de l’Occupation, l’Allemagne manque d’ouvriers pour remplacer les dix-huit millions d’Allemands
appelés sous les drapeaux. Fritz Sauckel, plénipotentiaire général pour l’emploi de la main-d’œuvre, est chargé
à partir de mars 1942 de trouver des solutions pour assurer le fonctionnement de l’industrie militaire du Reich.
Les échecs du travail volontaire en Allemagne et de la Relève
A partir d’août 1940, l’Allemagne mise sur le recrutement de volontaires français. Il leur est promis les mêmes
avantages qu’aux ouvriers allemands ainsi qu’une prime d’éloignement, mais les candidats sont peu nombreux.
En juin 1942, Sauckel demande au gouvernement Laval de transférer 250 000 travailleurs supplémentaires en
Allemagne. Les autorités françaises et allemandes s’accordent alors sur le principe d’un échange d’un prisonnier
de guerre contre trois ouvriers : la Relève est instaurée en juin 1942. Devant l’échec du système, Vichy instaure
le 4 septembre 1942 une relève par réquisition concernant les hommes entre 18 et 50 ans et les femmes
célibataires de 21 à 35 ans. A la MAT, cette mesure est accueillie avec hostilité, mais finalement peu d’ouvriers
français sont envoyés en Allemagne : 13 dont 11 spécialistes pour la MAT.
Le 19 décembre 1942, Laval est
reçu par Hitler en présence de
Göring, Ribbentrop, Abetz et
Ciano. Le président du Conseil
n’obtient ni une diminution
des frais d’occupation ni une
atténuation des exigences de
Sauckel en main-d’œuvre pour
l’Allemagne. (©Ville de Tulle)
Tract de propagande du Service de la main-d’œuvre
française en Allemagne, dirigé par Gaston Bruneton
à partir du 6 avril 1942. Les ouvriers français sont
encouragés à partir travailler volontairement dans
les usines allemandes. (©Ville de Tulle)
La Manufacture victime puis bénéficiaire du Service du Travail Obligatoire (STO)
Pour répondre aux exigences allemandes, Pierre Laval, président du Conseil, remplace la Relève par le Service
du Travail Obligatoire dès février 1943 : des jeunes gens âgés de 20 à 22 ans sont requis et transférés vers
l’Allemagne. La fuite d’un grand nombre de réfractaires, dont certains vers le Maquis, marque une rupture
dans la gestion allemande de la main-d’œuvre française. Un rapport des Renseignement Généraux du 27 août
1943 signale que la presque totalité du personnel de la MAT prend le Maquis à l’issue de la visite médicale
d’aptitude physique.
Avis de mutation à la Manufacture d’Armes de
Tulle d’Aimé CAILLOUX, résidant du Cher dans le
cadre du Service du Travail Obligatoire en date du
24 novembre 1943. Il choisit d’être réfractaire. Le
9 juin 1944, 15 requis font partie des suppliciés.
(©Ville de Tulle)
Face à l’échec du STO, Vichy présente une nouvelle stratégie d’économie de guerre à l’Allemagne. Le « Programme
Bichelonne » propose de développer davantage l’industrie française au profit de l’occupant et préfigure la
signature, en septembre 1943, des accords entre Albert Speer, ministre des Armements de la production de
guerre du Troisième Reich et Jean Léopold Bichelonne, Secrétaire d’Etat à la Production Industrielle. Désormais,
les usines travaillant au moins à 80% pour l’Allemagne sont classées « Schutzbetriebe » (usines protégées),
exemptant leur personnel du STO. De juin 1943 à août 1944, de nombreux requis de France et de l’étranger
alimentent les effectifs de la MAT dans le cadre des mesures du STO. Ces établissements obtiennent également
l’autorisation de recruter parmi les réfractaires. A Tulle, de nombreux défaillants en profitent pour faire leur retour
à l’usine sans être inquiétés, encourageant les actions de Résistance à l’intérieur de la Manufacture.
Carte des départements et pays de naissance des 841 requis du STO affectés à la MAT
d’août 1943 à mars 1944. (©Ville de Tulle)
07
L’activité syndicale mise à mal
au sein de la MAT
De 1939 à 1945, le syndicalisme à la MAT est caractérisé par l’existence d’une frontière ténue et
poreuse entre organismes officiels et clandestins, entre adhésion à la politique de l’Etat français et
lutte revendicatrice traditionnelle doublée d’un engagement contre Vichy et l’occupant.
Le syndicalisme est maintenu tout au long du conflit, mais est mis à mal par la loi du 16 août 1940 qui prévoit
la dissolution des groupements professionnels et crée des comités d’organisation chargés de contrôler la
production.
Exclusions et redéfinition du rôle des syndicats
En 1939, à la suite de la signature du pacte germano-soviétique, le bureau confédéral de la CGT décide
d’exclure les communistes. A la MAT, cette décision est impopulaire mais la menace de dissolution lui impose
d’approuver les décisions de la Fédération. Par décret du 9 novembre 1940, la Confédération Française des
Travailleurs Chrétiens (CFTC), la Confédération Générale du Travail (CGT) et la Confédération des Syndicats
Professionnels Français (CSPF) sont dissoutes.
Une volonté d’apaisement du gouvernement
Le gouvernement veut éviter de développer le mécontentement et maintenir l’atmosphère de collaboration
sociale.
Le 24 mars 1941, le Préfet Musso rassure le directeur Pic : la loi du 16 août ne dissout que les groupements
généraux rassemblant, à l’échelle nationale, les organisations ouvrières ou patronales. Les syndicats doivent
maintenir leur activité sur le seul terrain professionnel, excluant toute activité politique. Quatre organisations
restent donc encore actives à la MAT :
- Syndicat du personnel de maîtrise (secrétaire Rabes)
- Syndicat des employés civils (secrétaire Lespitaou)
- Syndicat général du personnel civil de la MAT (ex-CGT, secrétaire Lagarde)
- Syndicat de défense ouvrière (secrétaire Baptiste Rabes)
Portrait de l’ingénieur militaire en chef de 1ere classe Germain Pic,
directeur de la MAT dès les premiers jours du conflit. Le 1er octobre
1939, il succède à Charles Brion. Il quitte l’établissement le 14
octobre 1941. (Collection APAT)
La Vie Ouvrière, 7 septembre
1940. L’information syndicale est
diffusée aux ouvriers pendant la
durée du conflit. (©Ville de Tulle)
Bien que la MAT soit absente du programme de sa visite en Corrèze des 7 et 8 juillet 1942, le Maréchal Pétain
reçoit en préfecture une délégation de l’Union Départementale des Syndicats Ouvriers afin d’aborder les
questions liées à la Charte du Travail et aux augmentations de salaire.
Le Maréchal Pétain à la gare de Tulle, lors de sa
visite en Corrèze les 7 et 8 juillet 1942. La visite a
lieu dans un contexte marqué par les réactions des
ouvriers au discours radiophonique de Pierre Laval
du 22 juin 1942, exhortant les français à travailler
pour l’industrie de guerre allemande. Le maréchal
Pétain arrive à Tulle en provenance d’Ussel, dans
la soirée du mardi 7. Les images des actualités de
l’époque présentent son accueil sous l’ovation de
la population tulliste rassemblée en masse.
(©Ville de Tulle)
Un syndicat qui se reconstruit : la CGT
Le 17 avril 1943, le syndicat CGT se reconstitue dans la clandestinité, selon les accords dits du Perreux, et
subsiste illégalement tout en étant accepté de tous et reçu partout.
A la Libération, l’urgence pousse le syndicat CGT de la MAT, réorganisé autour des résistants et des communistes,
à reprendre en main l’activité. Dès août 1944, un comité technique composé de techniciens, d’agents de
maîtrise et d’ouvriers seconde la direction.
Tract de la CGT clandestine (1944).
La contre-propagande se développe
durant le conflit. A l’été 1944, à la suite
des drames de Tulle et d’Oradour, l’Union
Départementale de la CGT clandestine
cherche à mobiliser les ouvriers contre le
régime de Vichy. (©Ville de Tulle)
Après le 8 mai 1945, la lutte pour assurer une prospérité à la production industrielle est menée de
façon conjointe par les directions et les syndicats. Les comités mixtes sont généralisés après 1946 dans
l’industrie de l’armement sur l’initiative du nouveau ministre de l’Armement, Charles Tillon.
08
Un cas de résistance de masse :
les grandes grèves et manifestations
de 1942 et 1943
La MAT est reconnue comme un réservoir de militants forgés dans les combats de la classe ouvrière.
Entre 1942 et 1943, elle participe avec d’autres usines tullistes à plusieurs grèves et manifestations
marquantes par leur ampleur.
Le 4 octobre 1941, la Charte du travail promulguée par le régime de Vichy déclare la grève illégale dans son article
5. Cette loi, rédigée par le ministre de l’Economie René Belin, n’empêche pourtant pas plusieurs mouvements
de se développer. D’abord centrés autour de la libération de militants et de l’amélioration des conditions de
travail, ces mouvements prennent en France une forme peu à peu politique à partir de juillet 1941.
Des grèves pour protester contre la politique de Vichy
Après une première manifestation le 21 septembre 1942, c’est le 28 octobre qu’est lancée une grande grève
contre la Relève à laquelle participent des milliers d’ouvriers de la MAT, de l’usine à draps, des accordéons
Maugein, de jouets Garnier, de la Marque et de nombreuses autres entreprises locales. Cette première grande
grève permet à chacun de prendre conscience qu’il est possible de s’opposer à la politique collaborationniste
menée par le gouvernement de Vichy.
Usine de la Marque (1937). Les grèves et les
manifestations organisées sous l’Occupation
sont l’occasion pour les ouvriers de toutes
les usines tullistes, dont les établissements
Edgar Brandt, sis dans l’usine de la Marque,
de marquer leur solidarité contre la politique
collaborationniste du gouvernement de
Vichy. (Collection J.C. Crozat)
Journal des Forces Unies de la Jeunesse pour la
manifestation du 14 juillet 1943. Par le biais de la
B.B.C., Londres invite les Français à manifester pour
protester contre le régime de Vichy et marquer
leur attachement aux valeurs de la France de 1789.
(©Ville de Tulle)
Des manifestations et des grèves pour marquer son patriotisme
Le 14 juillet 1943, à l’initiative de tous les grands mouvements de la Résistance, a lieu la plus forte contestation
au régime depuis son avènement. A Tulle le cortège, qui se dirige vers l’avenue de la Bastille, est composé de
200 personnes portant la cocarde, symbole de leur patriotisme et de leur opposition à la collaboration. Le
climat de contestation prégnant dans la ville favorise le recrutement et l’organisation des actions futures de la
Résistance, même si une partie de la population n’approuve pas ces actions qui causent des désagréments au
quotidien (coupures d’électricité, peur de représailles, etc.).
A l’occasion de l’anniversaire de la bataille de Valmy, le 20 septembre 1943, un mot d’ordre de grève patriotique
et revendicative est lancé dans les usines. Des tracts sont distribués, tandis que le drapeau rouge est dressé à la
Manufacture dans la nuit. La grève est déclenchée à l’usine de la Marque et les mille ouvriers occupent l’usine.
Le matin du 21, c’est au tour des 3000 ouvriers de la MAT de se mettre en grève, au chant de l’Internationale.
Parallèlement, les ouvriers des autres entreprises de la ville cessent le travail à leur tour.
Message téléphoné de la gendarmerie à
propos des grèves des 20 et 21 septembre
1943. (©Ville de Tulle)
Face au refus de la direction française de la MAT de les accueillir, une délégation syndicale des entreprises
présente ses revendications à la préfecture, aux autorités françaises et allemandes : 30% d’augmentation des
salaires, meilleur ravitaillement, libération de certains prisonniers, cessation des réquisitions, etc. Elles sont
examinées par la direction de la MAT dans un premier temps, mais les discussions sont rompues sous la
menace des automitrailleuses allemandes. Le travail doit reprendre le lendemain. Cependant, les revendications
professionnelles en grande partie satisfaites et l’absence de sanctions, à l’exception de quelques arrestations
dont celle du syndicaliste résistant Alfred Parel libéré en 1944, sonnent comme une victoire.
Tract de la CGT clandestine (1943). Le
syndicat appelle au développement
de l’action revendicative et des
mouvements de grève. (©Ville de Tulle)
09
Être légal à la MAT
Recenser le personnel de la MAT ayant contribué de près ou de loin à ralentir la production et à
soutenir la Résistance est une tâche difficile. Plusieurs ouvriers s’inscrivent dans la Résistance. Certains
prennent le Maquis. D’autres restent chez eux et gardent leur vie professionnelle, contribuant par
des actions, violentes ou non, à l’action résistante : ce sont les légaux.
Les mouvements sont nombreux et les sensibilités différentes. Dès juin 1941, le Parti Communiste Français
clandestin met en place une organisation intérieure de lutte armée : les Francs-Tireurs et Partisans Français.
En 1942, l’Armée secrète naît de la volonté de Jean Moulin d’unifier les trois mouvements de la zone sud :
Combat, Libération et Franc-Tireur. Ces deux principaux mouvements fusionnent en décembre 1943, sur ordre
du général de Gaulle, avec l’Organisation de Résistance de l’Armée (O.R.A) pour former les Forces Françaises
de l’Intérieur. Intégrée à ces mouvements, l’action des légaux se révèle déterminante.
Les actions des légaux : un double jeu
A la MAT, la 4e compagnie FTP dispose d’un détachement de légaux commandée par André « Marius » Vergne,
tandis que ceux de l’AS sont sous la responsabilité du contremaître Henri Vignal.
Les informations des légaux permettent à la Résistance de connaître les lieux et de réaliser des actions commandos
efficaces. Par exemple, durant la nuit de Noël 1943, des membres de l’AS, bien renseignés par le LieutenantColonel Léonard Hounau responsable de la Sécurité de l’établissement et commandant du Corps Franc de
Tulle, immobilisent la garde de la MAT avant de repartir avec de nombreuses armes. Des informations sur les
convois d’armes entre le site de Tulle et le site d’essais de Gravanches près de Clermont-Ferrand sont également
transmises au Maquis, notamment FTP.
Photographie de François Delamaire, membre de la direction
de la MAT depuis 1930. En octobre 1942, il disparaît de la MAT.
Accusé le 18 janvier 1943, lors d’une réunion des préfets à Vichy,
d’être le chef des gaullistes et l’instigateur de la Résistance à la
MAT, il est relevé de ses fonctions et rejoint Londres le 21 mars
1943, puis Alger en septembre 1943. Il est finalement nommé
directeur de la MAT le 1er janvier 1945. (Collection APAT)
Ce double jeu de certains ouvriers peut se révéler risqué car les dénonciations restent nombreuses. Durant la
période, plusieurs employés et responsables de la MAT font l’objet d’arrestations pour des raisons politiques
ou parce qu’ils sont suspectés d’appartenir à la Résistance. Pour beaucoup d’entre eux, un séjour de quelques
mois loin de Tulle permet de revenir « blanchi », grâce à des complicités extérieures et une direction fermant
les yeux sur les accusations de résistance quand elle manque de spécialistes.
Ordre de mobilisation des FTP légaux (1944). Le 7 juin 1944, les FTP de HauteCorrèze (Sous-secteur A) appellent à la mobilisation des légaux. A la MAT, les
légaux se mobilisent dès le 20 mai, à la suite de l’appel de l’Etat-Major F.T.P.
(©Ville de Tulle)
Fausse carte d’identité de la MAT de Martial Gilbert Bugeac
(Désiré Pierre). Exemple de faux papier sorti de la MAT.
Gilbert Bugeac, adjoint de Martial Brigouleix chef de l’A.S.
de Corrèze, organise le centre d’opération de parachutage
et d’atterrissage de la Corrèze (COPA), Compagnon de la
Libération. (Collection G.Loupias-Bugeac)
Le Bureau de la Résistance Ouvrière (B.R.O) :
Le B.R.O. est une organisation liée au mouvement résistant Combat de Tulle, composé de résistants de l’Armée
Secrète, des Francs-Tireurs et Partisans des usines de la Gibrande, de la Marque et de la MAT. Menée à partir
de 1942 par Jean Laporte, puis par sa femme Gabrielle à partir de février 1944, tous deux employés à la MAT,
l’organisation dépasse le cadre des mouvements de Résistance. Il se définit comme « l’organisateur de l’échec
complet de la Relève et du STO à Tulle, Service social et Agent de recrutement de toutes les organisations
armées ». Son but est de soustraire au STO les défaillants, en les plaçant dans des fermes ou de leur trouver
des refuges au moment de la constitution des premiers camps de résistants. Il participe activement au soutien
matériel de tous les mouvements : organisation de collectes, distribution de tracts, de médicaments, sabotages,
aide aux prisonniers et à leurs familles, confection de faux papiers…
A la Libération, le BRO soumet à la commission d’épuration, après étude des dossiers, ses préconisations
quant aux sanctions et promotions concernant le personnel de la MAT.
Portrait de Jean Laporte, technicien à
la MAT, responsable du Bureau de la
Résistance Ouvrière jusqu’en février
1944. Menacé d’arrestation, il s’enfuit
le 29 février 1944 en direction d’Alger.
L’organisation du B.R.O. est alors gérée
jusqu’à la Libération par sa femme
Gabrielle. (©Ville de Tulle)
Pierrette Barrat, entrée à la MAT le 2
octobre 1939 comme infirmière, participe
avec les Docteurs Reix, puis Pouget à
soutenir le Maquis. Elle utilise à plusieurs
reprises le landau de son fils pour sortir
de l’établissement du matériel médical,
notamment des pansements et des
médicaments. (Collection P.Barrat)
10
Ralentir la production :
les sabotages, une arme au service
de la Résistance
A partir de 1943, la Manufacture est l’objet d’une lutte psychologique entre d’un côté les Allemands,
pressés de fabriquer leurs armements, et de l’autre les hommes de la Résistance, dont l’objectif est
de limiter, voire d’arrêter cette production, au sein de l’établissement ou en dehors.
Le terme de sabotage a été systématiquement employé par la propagande de Vichy et les Allemands pour
attiser la peur des Français, en grande partie encore attentistes ou favorables au maréchal Pétain. Paradoxalement,
les Résistants revendiquent ce terme comme emblématique du caractère clandestin d’une guérilla menée par
des combattants invisibles et insaisissables.
La « Résistance sourde » : l’efficacité du sabotage industriel
Particulièrement organisée à la MAT, la pratique systématique du sabotage industriel installe un climat de
méfiance entre les autorités allemandes et le personnel. Preuve de son importance, les 20 et 21 juin 1944 les
autorités allemandes menacent de fusiller 25% de l’effectif si les coupables de sabotages ne sont pas dénoncés.
La réalité du sabotage est difficile à percevoir, mais tous les témoins le présentent comme très important et les
rapports des officiers allemands du front de l’Est signalent régulièrement la mauvaise qualité du matériel.
Yves Cayre, dans son ouvrage Histoire de la Manufacture d’Armes de Tulle de 1690 à 1970, estime que la
majorité des pièces de fusil sorties mensuellement à Tulle entre octobre 1943 et mai 1944 est inutilisable. Dans
les ateliers, le sabotage est multiforme : les accidents (casse d’outils, panne des fours, etc.), la disparition
de matériel, mais surtout l’imprécision, clé du sabotage industriel (quelques centièmes en trop ou en moins
rendent une pièce inutilisable). La complicité d’une partie de l’encadrement, d’ailleurs peu nombreux, est
indispensable.
Le sabotage industriel au sein de la
manufacture a été particulièrement visible
lors des combats d’Egletons du 10-15 août
1944. De nombreuses bombes larguées
n’explosent pas. La mairie d’Egletons, n’a
malheureusement pas été épargnée.
(©Ville de Tulle)
Les actes de sabotage de la Résistance à l’extérieur de la MAT
Le 13 juillet 1943, des représentants de l’AS et des FTP décident de miner le portique des Roches qui alimente la
MAT en énergie électrique. L’explosion a lieu le lendemain. Dès lors, les coupures sont de plus en plus nombreuses.
Cependant, malgré ces sabotages systématiques, la crainte que l’aviation alliée ne bombarde un jour Tulle est
de plus en plus forte, menaçant la population civile. Pour l’éviter, la Résistance engage une série de sabotages
ouverts. Le 7 janvier 1944, sur les informations et plans fournis par des légaux, la 5e compagnie FTP détruit les
turboalternateurs de la centrale thermique. Le même jour, les pylônes de la ligne entre le barrage de Marèges et
Tulle sautent. La MAT est alors reliée au réseau général de distribution d’électricité, coupé à son tour le 23 février
lors de la destruction du transformateur des postes de Virevialle et Cueille par la 4e compagnie FTP commandée
par Marcel « Lily » Peuch. Les sabotages se poursuivent en ciblant l’usine de Bar (pylônes et siphon détruits).
Centrale thermique de Souilhac (1960). Les
turboalternateurs sont détruits le 7 janvier
1944 par la Résistance. (©Ville de Tulle)
Le transformateur de Virevialle qui alimentait la
manufacture d’armes de Tulle est détruit le 23
février 1944. (©Ville de Tulle)
L’usine Montupet d’Ussel à la suite d’une
explosion. L’un des premiers actes de sabotage
fut le dynamitage de la centrale électrique de
l’usine Montupet à Ussel les 19-20 juin 1942.
Cette fonderie appartenait au groupe Gnome et
Rhône, alors le plus important fabricant français
de moteurs d’avions, dont le directeur général
s’était déclaré prêt en août 1940 à coopérer
avec les Allemands. (©Ville de Tulle)
Le 1er juin 1944, le sabotage des lignes à haute tension lance le début de l’insurrection à Tulle et la
mobilisation générale des légaux FTP de la MAT qui rejoignent le Maquis.
11
La résistance civile
Tout au long du conflit, la tension est entretenue par la misère souvent extrême, l’alternance de
phases de travail intense, avec des semaines de 72h, et de moments d’atonie. Ce climat participe au
développement, à la MAT, de mouvements de contestation non violente dits de résistance « civile ».
Au sein de la population civile, le choc de la défaite, de l’Occupation et la constitution d’un pouvoir dictatorial
ont provoqué, la formation de deux sociétés enchevêtrées l’une dans l’autre. Une officielle et légale, et l’autre
rebelle et souterraine. Un éventail de comportements définit les contours de cette société réfractaire : écoute
de la BBC, lecture de la presse clandestine, participation ponctuelle à des actes de résistance, etc.
Une « apathie de résistance »
En France, le général de Gaulle appelle plusieurs fois les Français à la résistance civile. L’une de ses formes,
le travail au ralenti, se développe à la MAT tout au long du conflit transformant peu à peu l’état d’esprit du
personnel. La défaite, l’invasion allemande et les obligations imposées par la Relève, le Service du Travail
Obligatoire, les réquisitions et les salaires bas démoralisent les ouvriers et la population. A partir de 1943,
nombre d’ouvriers évoluent vers une sorte d’ « apathie de résistance » : fonctionnement au ralenti, peu d’ardeur
au travail et multiplications des arrêts maladie.
Cultiver l’esprit de rébellion
Dans le cadre de la contre-propagande, la presse clandestine joue plusieurs rôles fondamentaux pour la
Résistance : informer, réveiller le sentiment patriotique, recruter... La diffusion de cette presse, comme la
distribution régulière de cigarettes, jetées aux ouvriers par-dessus les grilles de l’usine, encouragent la résistance
dite passive. Même si ces actions sont rares, elles marquent durablement l’esprit des ouvriers.
La contre-propagande résistante se manifeste
par la diffusion de la presse clandestine au
sein de l’établissement, malgré les risques
d’arrestation encourus par ses lecteurs. Journal
Combat, septembre 1943 et France d’Abord,
mars 1944. (©Ville de Tulle)
Alimenter le Maquis
Les livraisons d’armes et de matériels constituent un enjeu majeur pour la Résistance française : elles
conditionnent sa capacité à exécuter ses missions et stimulent le moral des troupes. Parallèlement aux
parachutages qui se développent dès 1943 en Corrèze, le Maquis doit être alimenté. Des collectes
sont alors organisées au sein de l’usine pour le financer. Même si elles sont risquées pour les collecteurs
des ateliers, elles bénéficient du soutien de nombreux ouvriers qui n’hésitent pas à donner 25 francs
chaque mois et reversent régulièrement les primes offertes par les autorités allemandes dans le but de
les corrompre.
Malgré le climat de suspicion qui règne au sein de l’établissement, tout un réseau de Résistance et de
double jeu se met en place à la MAT.
Poste radio TSF électricité G.M.B, collection
Musée des Armes, 2011.1.8.
La radio est le principal moyen
d’information pendant la seconde guerre
mondiale. Le succès des appels à exprimer
symboliquement le refus de l’occupant
relayés par les organisations de résistance
intérieure (comme le 14 juillet 1942 en
zone sud) démontre que la radio est un
instrument de combat pour la France Libre
et les Alliés, tout comme la diffusion de
messages personnels visant à envoyer
des informations stratégiques codés aux
résistants intérieurs via des émissions
telles « les Français parlent aux Français ».
Ces émissions attirent une proportion de
personnes de plus en plus nombreuses,
qui se regroupent autour de la TSF, malgré
les confiscations et les peines encourues,
soutenant le courage et l’espérance de la
population. (©Ville de Tulle)
12
Persécutions et exactions
à l’été 1944
Au cours de l’été 1944, la Manufacture est le théâtre de la lutte entre la Résistance et l’armée allemande.
La population de Tulle doit alors faire face à la barbarie d’éléments de la 2e division Das Reich, chargée
lors de sa traversée du territoire vers le front normand « d’aider à la lutte contre le terrorisme et de
combattre les bandes », puis aux exactions commises par la Gestapo et la Milice française.
La perspective du débarquement allié et l’intensification des combats du Maquis, au printemps 1944, incitent
certains mouvements résistants à se préparer à la mobilisation tandis que la répression allemande se radicalise.
7 juin : l’attaque de la MAT par la Résistance
Après l’appel de l’état-major FTPF le 20 mai, 220 légaux de Tulle dont ceux de la MAT rejoignent le Maquis et
lancent l’insurrection. Le 7 juin, la ville est quadrillée par les FTP. A la Manufacture, une partie du 95e régiment
de sécurité de l’armée allemande est établie et résiste aux assauts. Les combats font rage toute la journée,
pendant laquelle les Allemands fusillent 18 gardes voies dont 5 ouvriers de la MAT. Le lendemain, la ville de
Tulle est partiellement libérée de l’occupant mais un contingent allemand reste retranché dans la Manufacture.
En début de soirée, des colonnes blindées de la division SS Das Reich arrivent à Tulle en provenance de
Brive, et prennent contact avec la garnison isolée.
Stèle des gardes voies, quartier de la gare à Tulle.
Dans la journée du 7 juin, les Allemands fusillent 18
gardes voies dont 5 ouvriers de la MAT : Raymond Barry,
Roger Bayle, Benoît Rivière, le requis Henri Lajoux et
le retraité Jean Salesse. (©Ville de Tulle)
Ecole Normale de jeune fille, le 8 juin 1944.
Siège d’une garnison allemande, elle est
attaquée par le 2e bataillon F.T.P.F. qui
neutralise les forces allemandes présentes.
(©Ville de Tulle)
9 juin : la MAT, théâtre du drame
Le vendredi 9 juin, dès 6h du matin, les soldats SS raflent 3000 hommes de la ville conduits vers la place de
Souilhac face à la Manufacture sous le prétexte de vérification d’identité. Un tri est opéré dans l’enceinte
de l’usine et 120 hommes sont désignés. Parmi eux, 99 sont exécutés par pendaison aux balcons des rues
environnantes dont 39 employés de la MAT. Les corps sont inhumés dans la décharge communale de Cueille
par deux équipes des Chantiers de Jeunesse. Les autres détenus sont parqués dans le bâtiment 27 de la MAT.
311 sont conduits à Limoges et 149 déportés en Allemagne. 101 n’en reviendront pas.
Dessin des pendaisons de Tulle. (©Ville de Tulle)
21 juin : un nouveau tri
Le 20 juin, des éléments d’une division blindée SS dite « Tête de mort » arrivent à Tulle. A 22h, des haut-parleurs
parcourent la ville afin de réunir tous les hommes de 18 à 45 ans à la MAT. Le lendemain, une autre division
blindée allemande encercle Tulle où des pièces d’artillerie sont positionnées. Selon le Préfet Trouillé, 4000
hommes sont rassemblés dans le bâtiment 1 et un tri s’effectue pour procéder à l’exécution de 250 personnes
dont 150 nouvelles pendaisons. A la suite de l’intervention du préfet et du directeur de l’Usine de la Marque,
Henri Vogel, presque tous les hommes sont relâchés. Internés par la suite au sein du Palais de Justice, 70 d’entre
eux dont 6 de la MAT, sont envoyés en Allemagne le 24 juin, avec des contrats de travailleurs libres.
Tortures dans le laboratoire de chimie
Durant, les jours qui suivent les événements du 9 juin, les familles des prisonniers se massent devant les grilles
de la Manufacture. Grâce à l’action de la Croix Rouge et de l’infirmière de la MAT, Mme Barrat, colis et messages
sont transmis aux détenus sous la surveillance des autorités allemandes. Du 11 juin au 31 juillet, des prisonniers,
prétendus résistants retenus dans le laboratoire de chimie, subissent de nombreux actes de tortures de la part
de la Milice française.
Ces événements, symboles de la barbarie nazie, ont marqué durablement l’histoire de la MAT et de la ville.
Au mois d’octobre 1944, à la demande de la
municipalité de Tulle, des ouvriers de la MAT
sont mis à disposition pour le transfert des
corps des suppliciés du 9 juin en vue de leur
inhumation au cimetière du Puy Saint-Clair
(1944). (©Ville de Tulle)
Stèle de la Manufacture
d’Armes de Tulle.
(©Ville de Tulle)
13
Juin 1944 : la Manufacture
transférée à Epernay
Le 11 juin 1944, le directeur français Magdalena annonce aux ouvriers réunis dans le bâtiment 50,
la décision du Rustungkommando de déménager la MAT à Epernay. Face à la menace de nouvelles
représailles, le service des Usines Mécaniques de l’Etat ne peut intervenir.
Le point culminant des accords Speer-Bichelonne est atteint en mars 1944. 60% des commandes allemandes
gérées en France de juin 1940 à juin 1944 sont assurées, incitant Hitler en juillet, à maintenir la production le
plus longtemps possible.
Le transfert à Epernay
Face à la chute brutale de la production, le directeur Brenner est convoqué à Berlin. Le déménagement à
Epernay est acté. A partir du 12 juin, 1100 machines-outils sont démontées et chargées dans les trains par le
personnel. Les 4 et 10 juillet, deux convois composés chacun de 200 hommes et de machines quittent la gare
de Tulle. Alors que le premier atteint Epernay sans encombre, le second, harcelé par la Résistance, change de
nombreuses fois d’itinéraire mais arrive finalement le 28 juillet.
Ordre de mission pour Epernay
de François Martinie. (©Ville de Tulle)
Trajet du deuxième convoi d’armes et de
personnels de Tulle à Epernay du 10 au 28
juillet 1944. Les sabotages des voies par la
Résistance et les bombardements des gares
de triages et dépôts par l’aviation alliée, vont
bouleverser son itinéraire. (©Ville de Tulle)
Deux convois stoppés par la résistance à Brive
Les 3e et 4e convois, partis les 20 et 25 juillet, ne dépassent pas la gare de Brive. Le 3e, composé de 37 wagons,
transporte du matériel et des vivres. Alerté par les cheminots légaux de Brive, le poste de commandement de
Clergoux programme l’enlèvement du train le 8 août. Une attaque de diversion à Malemort et la coupure des
communications par le groupe du lieutenant René Ladrière permettent le succès de l’opération. Le train est
déchargé en gare d’Ussac et les ouvriers sont libérés.
L’équipe menée par le lieutenant René
Ladrière ayant réussi le sabotage du 3e convoi
en direction d’Epernay. (©Ville de Tulle)
L’installation à Epernay et la Libération
Dès leur arrivée à Epernay, les 825 machines sont transférées dans les caves à champagne Mercier. Les difficultés
se multiplient : transbordement des machines, conditions de travail difficiles dans les caves, effectifs amputés
et sabotages. Après trois semaines, l’ensemble des machines est rouillé et malgré les tentatives de réparation,
les ateliers ne sont jamais reconstitués.
La direction française doit justifier ces nombreuses difficultés, notamment des baisses d’effectifs de plus d’un
tiers. Pour donner le change face aux autorités allemandes, des réunions sont provoquées et des notes de
service diffusées, une façon d’avertir le personnel d’agir avec plus de discrétion. Selon Yves Cayre, le directeur
Magdalena se charge personnellement de défendre le personnel tulliste, tandis que le directeur allemand
Brenner fait relâcher 11 ouvriers arrêtés par la Gestapo.
Au cours du mois d’août 1944, les alertes aériennes se multiplient jusqu’à la libération d’Epernay le 28 août.
Si quelques ouvriers rentrent par leurs propres moyens, leur retour en Corrèze s’étale du 26 septembre au 15
octobre.
Panorama des caves de Champagne Mercier. La
voie de chemin de fer longe l’établissement.
(Collection privée)
Machines de la MAT entreposées et alignées
dans le cellier des établissements de champagne
Mercier à Epernay en 1944. (Collection privée)
14
La MAT à la Libération
A la Libération, la direction est nommée par l’Etat dans la plupart des usines en accord avec les
responsables de la Résistance. Le service des UME redevient la DEFA en octobre 1944. A Tulle,
l’ingénieur en chef François Delamaire, directeur depuis le 1er janvier 1945 à l’issue de la mission
de direction accomplie depuis l’été 1944 par le Colonel Monteil, réorganise la Manufacture.
Au printemps 1944, les bombardements stratégiques des Alliés sur le réseau ferroviaire ainsi que les actes de
sabotage de la Résistance désorganisent la production industrielle en France. Les débarquements de l’été,
poussent l’Allemagne à abandonner sa politique d’exploitation industrielle et à privilégier à nouveau le pillage
et la destruction des usines d’armement jusqu’à la Libération.
Dès 1943, un plan de reprise des fabrications avait été rédigé
Bien avant la Libération, la relance des manufactures et fabrications d’armement est planifiée. François Delamaire,
ancien ingénieur en chef de la MAT et résistant fidèle à de Gaulle rejoint Alger en septembre 1943. Il y établit
avec l’ancien directeur Montlaur et l’ingénieur Seyte un projet de remise en marche des trois manufactures de
Saint-Etienne, Châtellerault et Tulle. Ils constituent ensemble l’embryon de l’administration de l’armement du
gouvernement provisoire d’Afrique du Nord.
Photographie de l’Ingénieur Général Georges
Montlaur. Il dirige la manufacture du 15 octobre
1941 au 31 mai 1942. A partir de septembre
1943, il participe avec François Delamaire et
l’ingénieur Seyte, à préparer, depuis Alger,
la reconstruction de l’appareil industriel
d’armement français. (Collection APAT)
La ville libérée, les ateliers sont remis en fonction
A la libération de Tulle, le 16 août 1944, la plupart des bâtiments de la MAT sont intacts mais vides. La première
étape est de relancer l’appareil de production en réintégrant les 100 machines stockées en gare de Tulle.
Dès novembre 1944, les machines d’Epernay puis celles envoyées en Allemagne sont peu à peu rapatriées.
Malgré la destruction par le Maquis d’une partie des infrastructures énergétiques, l’atelier central se réorganise à
partir d’un outillage fourni en partie par Châtellerault. Pour les 1410 ouvriers, rejoints par les rapatriés d’Epernay
et les anciens Maquisards, le retour à la Manufacture prend du temps.
Le 13 octobre 1944, dans l’attente d’une forte
reprise de l’activité de la MAT, le directeur
Pierre Monteil propose d’affecter à la ville
les ouvriers journaliers non-professionnels de
l’établissement récemment rentrés d’Epernay.
(©Ville de Tulle)
Evolution des effectifs de la MAT
de 1939 à 1945.
1
2
3
4
5
Mobilisation
Mise en place des mesures Dautry
Armistice du 22 juin 1940
Tutelle allemande sur la MAT
Mise en place du STO puis
du Programme Bichelonne
6 Déménagement à Epernay
7 Reprise de l’activité industrielle
(©Ville de Tulle)
Un nouveau départ pour la MAT
La récupération progressive du matériel permet de répondre aux premières commandes reçues et de lancer
des études sur des armes allemandes saisies. A partir de 1945, l’Atelier central, équipé de nouvelles machines
est en mesure de confectionner tous les outillages permettant d’assurer les fabrications.
Petit à petit, l’établissement renaît et une nouvelle page de l’histoire de la Manufacture s’ouvre avec, en
perspective, le démarrage des études du futur pistolet mitrailleur MAT 49.
Reprise de l’activité à la MAT
à la Libération. (Collection APAT)
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