Ainsi, il aura donc fallu plus de 50 ans pour passer de la première description clinique de la
maladie à la découverte du gène…
En 1976 naît David, votre fils. Le diagnostic pour lui ne se fait pas immédiatement comme
c’est le cas le plus souvent. D’une part parce que cette maladie est rare, et rarement décrite
et donc rarement connue des praticiens, qu’ils soient kinésithérapeutes, généralistes, ou
radiologues. D’autre part parce que les multiples symptômes de cette maladie
n’apparaissent pas forcément ensemble au cours des 2 à 4 premières années de la vie ce
qui rend ainsi son diagnostic encore plus difficile.
On imagine la détresse des parents face à de tels diagnostics, détresse encore plus
augmentée par le peu de spécialistes français voire francophones.
Spécialiste de la Rome antique au CNRS, votre profession vous permet peut-être
d’échanger plus facilement avec les chercheurs du monde entier : vous rencontrez ainsi
Richard Gatti qui vous suggère de fonder une association de parents à l’image de celles
existantes aux Etats-Unis ou en Angleterre.
Cette association, l’APRAT ou Association pour la Recherche sur l’Ataxie Telengiectasie voit
le jour en 1996 et regroupe aujourd’hui des dizaines de familles. Et c’est alors sans relâche
que, avec notamment Mme Lucette Tardieu, vous vous investissez corps et âme dans cette
association en aidant les familles et en organisant des rencontres régulières entre
scientifiques et parents. Vous aidez également directement la recherche puisque l’APRAT a
financé plusieurs bourses de chercheurs travaillant sur AT.
Vous n’hésitez pas à contacter ministères, directions de recherche et financeurs. Là encore,
sans relâche. Mais, cet investissement « corps et âme » est tel que vous n’hésitez pas non
plus, à chaque fois que l’argent manque, à sacrifier certains de vos propres biens pour que
cette association vive. Evidemment, en parallèle, on l’imagine bien, vous consacrez la même
énergie, probablement encore plu, pour votre fils, … qui est l’un des rares patients AT, peut-
être le seul à avoir passé avec succès son DEA d’histoire de l’art.
La création de l’APRAT vous fait rentrer dans un monde nouveau, celui des associations de
parents d’enfants atteints de maladies dites orphelines où chaque enfant, chaque parent
peut devenir un sujet d’étude. C’est la difficile question de la gestion des relations avec les
praticiens hospitaliers et les chercheurs, à la fois professionnels mais aussi souvent amis et
soutiens moraux. C’est également le monde des espoirs quelquefois déçus, où chaque
maladie génétique apparaissant de plus en plus complexe, chaque essai thérapeutique
apparaissant de plus en plus long repoussent d’ autant l’issue d’un traitement efficace.