Cytosquelette

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Cytosquelette
I.
II.
III.
IV.
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Organisation générale
Microtubules
Microfilaments
Filaments intermédiaires
I. Organisation générale
Contrairement à l'impression de rigidité évoquée par le terme de
squelette, les trois structures qui composent le cytosquelette sont des
édifices moléculaires en perpétuel renouvellement avec un comportement très dynamique et une grande plasticité structurale. Le cytosquelette est constitué de trois types de structures : les microtubules
(MT), les microfilaments (MF) et les filaments intermédiaires (FI).
II. Microtubules
A. Tubuline et microtubules
La sous-unité élémentaire des MT est un dimère de α et de β-tubuline
où chaque monomère présente un site de liaison nucléotidique. Le site
de la sous-unité α est bloqué sous forme GTP. L'état nucléotidique global du dimère ne dépend que du site de β qui peut lier le GTP ou le GDP
et est qualifié d'échangeable. La β-tubuline est aussi une GTPase. Sous
forme GTP, le dimère de tubuline est rectiligne tandis que sous forme
GDP, elle présente une légère angulation.
La structure théorique formée par l'enchaînement de dimères ab-ab-ab…
est appelée protofilament. La juxtaposition latérale de 13 protofilaments
selon un arrangement cylindrique de 25 nm de diamètre forme un MT.
L'extrémité des MT qui expose des α-tubulines est appelée extrémité
moins (−) ; celle qui expose des β-tubulines est l'extrémité plus (+). Les
extrémités (+) et (−) des MT présentent des propriétés différentes.
L'extrémité (+) change de conformation selon l'état du polymère.
Un MT en phase de croissance incorpore la tubuline-GTP sous la
forme d'un feuillet dont les bords se rapprochent pour fermer le MT.
L'incorporation de nouvelles sous-unités stimule l'activité GTPase des
dimères incorporés récemment (la tubuline est sa propre GAP). Un MT
en phase de croissance présente donc au bout (+) une coiffe de tubuline-GTP tandis que le reste du polymère est essentiellement sous forme
GDP. Cette coiffe empêche le désassemblage spontané d'un MT. Si elle
est perdue, les protofilaments deviennent libres de se courber vers l'extérieur du cylindre et de se dissocier en sous-unités de GDP-tubuline
libres (fig. 6.1A).
UE2- La cellule et les tissus
© 2012, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
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Structure générale de la cellule
Fig. 6.1
Microtubules.
A. Assemblage et désassemblage des microtubules.
B. Organisation du centrosome et nucléation des microtubules.
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Cytosquelette
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B. Centrosome, nucléation et élongation
des microtubules, notion de concentration critique
Dans la cellule, les MT croissent à partir de centres organisateurs, le
plus connu étant le centrosome. C'est une structure proche du noyau
qui comprend deux centrioles perpendiculaires et un matériel protéique
péricentriolaire amorphe. Un centriole est formé de neuf triplets de MT
assemblés en un supercylindre. Chaque triplet comprend un MT complet (tubule A) et deux tubules incomplets (B et C) qui lui sont accolés
longitudinalement. Des liens protéiques unissent latéralement les neuf
triplets pour former le supercylindre centriolaire. Dans le matériel péricentriolaire, la cellule concentre des complexes de γ-tubuline organisés
en anneaux ouverts (un tour avec un décalage de trois sous-unités) qui
servent de matrice pour nucléer (= initier l'assemblage) de nouveaux
MT. Le bout (−) des MT est au contact de la γ-tubuline, son extrémité
(+) est donc orientée vers la périphérie cellulaire (fig. 6.1B).
La phase de nucléation est suivie d'une phase de croissance ou d'élongation. In vitro, la vitesse d'élongation de MT nucléés sur un centrosome est fonction de la disponibilité de la tubuline-GTP soluble
(fig. 6.2A gauche).
Remarque
À concentrations très élevées (> 20 μM), une nucléation spontanée donne
naissance à des MT indépendants du centrosome.
À la concentration critique, la vitesse d'assemblage nette s'annule. À
des concentrations inférieures, elle devient négative : la dilution favorise
le désassemblage des MT. Des tracés semblables peuvent être obtenus
pour les extrémités (+) et (−) (fig. 6.2A droite). La concentration critique
du bout (+) est plus faible que celle du bout (−). Dans une cellule, la
tubuline est à une concentration de 5 à 10 μM soit entre les concentrations critiques des bouts (+) et (−). Ceci implique que l'extrémité (−) de
tout MT non lié au centrosome dépolymérise, alors que son extrémité
(+) peut croître.
C. Modalités de la dynamique microtubulaire
1. Instabilité dynamique
Le comportement des MT caractéristique de leur bout (+) est l'instabilité dynamique (fig. 6.2B haut). Elle consiste en une alternance de
phases de polymérisation et de dépolymérisation qui opèrent indépendamment pour chaque MT. L'historique de longueur d'un MT au
cours du temps permet de visualiser ces phases, de situer les transitions (catastrophes vers le désassemblage et sauvetages vers la croissance). Dans la cellule, un MT nouvellement nucléé croît sans accident
jusqu'à la périphérie cellulaire où il peut entrer en instabilité dynamique pendant quelques centaines de secondes et finit par se désassembler complètement. Ceci permet aux MT d'explorer le cytoplasme
en le parcourant depuis leur site de nucléation jusqu'à la périphérie
cellulaire sous la MP.
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Structure générale de la cellule
Fig. 6.2
Propriétés des extrémités et modalités de la dynamique microtubulaire.
A. Rôle de la concentration en tubuline sur l'assemblage des microtubules et notion de concentration
critique.
B. Modalités de la dynamique microtubulaire.
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Cytosquelette
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Remarque
Cette exploration s'effectue sans déplacement de tubuline vers la périphérie
ou vers le centre de la cellule (voir ci-dessous).
2. Treadmilling
La génération d'une nouvelle extrémité (−) libre (par détachement du
centrosome ou par coupure interne d'un MT) conduit au comportement de treadmilling qui propage un MT vers la périphérie cellulaire
(fig. 6.2B bas). De nouvelles sous-unités de tubuline incorporées au
bout (+) à un instant t0 vont se trouver dans le corps du MT à t1 et libérées par dépolymérisation du bout (−) à t3. Parallèlement, le MT progresse vers la périphérie cellulaire sans déplacement net des sous-unités
de tubuline dans le cytoplasme. Elles sont juste passées transitoirement
par un état polymère. Le terme treadmilling s'applique aux MT mais
caractérise aussi le comportement de certaines protéines régulatrices de
la dynamique associées au bout (+) des MT en croissance.
D. Protéines se liant aux microtubules
La dynamique des MT résulte des propriétés intrinsèques de la tubuline. Dans la cellule cependant, ce comportement est amplifié et régulé
par de nombreuses protéines associées aux MT. Parmi ces microtubuleassociated proteins (MAPs), on distingue des MAPs structurales qui
copolymérisent avec la tubuline, des protéines qui se lient transitoirement au bout (+), les plus-end tracking proteins (+TIPs) et des moteurs
moléculaires capables de se déplacer le long des MT.
1. MAPs et +TIPs
Les MAPs structurales liées à la surface du MT stabilisent le polymère. Ces
protéines comme MAP1, MAP2, MAP4 ou tau présentent un domaine
d'interaction avec la tubuline et un domaine qui se projette perpendiculairement à la surface des MT et qui prévient leur rapprochement trop
important. La cellule module la liaison des MAPs à la surface des MT par
phosphorylation (inhibitrice) et déphosphorylation (fig. 6.3A). Si la phosphorylation est excessive comme avec tau dans la maladie d'Alzheimer,
une déstabilisation délétère des MT peut se produire.
Les +TIPs sont des protéines qui font pour la plupart du treadmilling à l'extrémité des MT et régulent leur comportement dynamique.
Certaines opèrent pendant la croissance, d'autres pendant la dépolymérisation. Certaines +TIPs sont des régulateurs de la dynamique qui
peuvent stimuler la croissance (EB1), d'autres peuvent aider à stabiliser
les MT ou à capturer leur extrémité en croissance en périphérie cellulaire ; certaines favorisent les catastrophes et stimulent la dépolymérisation tandis que d'autres sont des facteurs de sauvetage (CLIP-170).
2. Moteurs moléculaires
Les moteurs moléculaires transforment l'énergie issue de l'hydrolyse de
l'ATP en mouvement pour assurer un déplacement orienté vers le bout
(−) ou le bout (+) des MT (voir fig. 6.3A). Les moteurs transportent
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Structure générale de la cellule
Fig. 6.3
MAPs et moteurs moléculaires impliqués dans les fonctions du réseau de MT interphasique et dans
l’organisation du fuseau mitotique.
A. MAPs et moteurs moléculaires.
B. Organisation du fuseau mitotique et des microtubules astraux, dynamique microtubulaire en mitose.
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Cytosquelette
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diverses cargaisons comme des vésicules membranaires, des organites
entiers, des MT préassemblés ou des complexes protéiques ou d'ARNm.
Les moteurs qui se déplacent vers l'extrémité (−) appartiennent à la
famille des dynéines. Ceux qui se déplacent vers le bout (+) sont des
kinésines. Tels des nano-bipèdes, ces moteurs alternent des déplacements de pas constants de 8 nm (kinésines) ou variables de 8 à 32 nm
(dynéines) de leurs têtes motrices à la surface des MT. La capacité de
marcher sur un MT sans se décrocher après un ou deux pas est appelée processivité du moteur. Il existe deux grands types de dynéines : la
forme cytoplasmique possède deux têtes motrices, tandis que la forme
ciliaire ou flagellaire en possède trois. Les têtes motrices sont situées à
l'extrémité des chaînes lourdes. Celles-ci s'assemblent avec des chaînes
intermédiaires, des chaînes légères et un complexe de dynactine qui
constitue un appui supplémentaire sur le MT et accroît la processivité.
Les kinésines constituent un vaste ensemble moléculaire : il en existe
plus d'une quarantaine chez l'homme. Certaines assurent du transport
moléculaire ou vésiculaire, d'autres sont impliquées dans le transport de
MT, l'assemblage du fuseau mitotique, la liaison des chromosomes aux
MT ou encore la dépolymérisation des MT.
E. Dynamique microtubulaire in vivo
1. Pendant l'interphase
Les MT présentent une dynamique fondée sur les propriétés intrinsèques
de la tubuline. Dans la cellule en interphase, cette dynamique est fortement amplifiée par intervention simultanée de facteurs stabilisant les MT
et/ou stimulant leur croissance (MAPs et certaines + TIPs comme EB1 ou
CLIP-170) et de facteurs déstabilisants qui stimulent la dépolymérisation
comme la mitotic centromere associated kinesin (MCAK).
2. Pendant la mitose
La cellule met en place le fuseau mitotique, une structure bipolaire de
MT maintenus entre les centrosomes dupliqués. Chaque centrosome
nuclée aussi un aster de MT polaires qui permet le positionnement du
fuseau. Les chromosomes dupliqués peuvent nucléer des MT au voisinage du centromère par un complexe protéique appelé kinétochore qui
comprend des moteurs de type dynéine et des kinésines spécialisées
(CENP-E) accrochant ces MT latéralement au voisinage du bout (+).
Du côté (−), les MT du fuseau forment un faisceau très dense à proximité des pôles. Ils sont liés latéralement par des dynéines réunies par
la protéine NuMA (nuclear matrix antigen). Dans la partie centrale du
fuseau, les MT sont antiparallèles. Ils sont aussi liés latéralement par des
kinésines spécialisés (kinésines-5) qui présentent quatre têtes motrices
(deux sur un MT et deux autres sur un MT antiparallèle) et qui maintiennent l'écartement des pôles du fuseau.
En mitose, la dynamique des MT s'accélère de 4 à 10 fois par rapport à
l'interphase avec plus de catastrophes et moins de sauvetages. Avec les
moteurs kinétochoriens qui peuvent tirer et pousser les chromosomes, cette
dynamique favorise leur positionnement sur la région équatoriale du fuseau.
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Structure générale de la cellule
Des kinésines non kinétochoriennes appelées chromokinésines redressent
aussi les chromosomes pour les aligner sur l'équateur grâce à d'autres MT
polaires. L'alignement équatorial des chromosomes est essentiel pour franchir le point de contrôle mitotique, enclencher l'anaphase et achever la division cellulaire. Un treadmilling accéléré des MT du fuseau (le flux polaire de
tubuline) maintient l'alignement pendant le contrôle. Ici cependant les MT
sont immobiles car ils sont maintenus latéralement au voisinage des pôles
(fig. 6.3B). Une fois le point de contrôle franchi, les chromatides dupliquées
se séparent tout en restant attachées aux MT kinétochoriens par la kinésine
CENP-E. Leur migration vers les pôles résulte essentiellement de la dépolymérisation rapide du bout (+) des MT kinétochoriens.
F. Agents antimitotiques
La dynamique des MT est une cible majeure en thérapeutique antitumorale. Les molécules utilisées sont des poisons de la tubuline dont
les prototypes sont le Taxol (stabilisateur de MT) et la colchicine ou
les alcaloïdes de la pervenche (vinblastine, vincristine…) qui déstabilisent les MT en empêchant l'incorporation de la tubuline soluble dans
les MT sans affecter leur dépolymérisation. Ces effets sont observés à
des concentrations proches de celles de la tubuline cellulaire (micromolaires), mais aux concentrations thérapeutiques (submicromolaires),
toutes ces molécules stabilisent les MT en bloquant instabilité dynamique et treadmilling. La cellule est donc incapable d'aligner convenablement et de maintenir les chromosomes sur la plaque équatoriale en
métaphase, ne peut franchir le point de contrôle mitotique et déclenche
alors un programme de mort apoptotique.
G. Cils et flagelles
Ce sont des structures généralement motiles, qui sous-tendent des extensions de la MP et qui sont liées à des centrioles sous-membranaires appelés
corpuscules basaux. La partie qui émerge de la cellule est appelée axonème.
Celui-ci est organisé autour d'une paire de MT centraux (dans les cils motiles
et les flagelles mais qui est absente des cils primaires). Ces MT sont liés latéralement par des ponts protéiques et entourés d'un manchon. Le doublet
central est relié à neuf doublets de MT périphériques dont l'organisation rappelle celle des centrioles : un tubule cylindrique (tubule A) et un tubule accolé
ouvert (tubule B). Ces doublets de MT sont liés au manchon central par des
fibres protéiques radiales et possèdent à leur surface des dynéines ciliaires qui
les font glisser les uns sur les autres. L'attachement de ces doublets entre eux
à la base de l'axonème empêche tout glissement des doublets vers l'intérieur
de la cellule. Les forces de glissement engendrées dans l'axonème imposent
alors une courbure aux cils ou aux flagelles, permettant ainsi leur battement.
III. Microfilaments
De nombreuses notions qui s'appliquent au comportement des microfilaments (MF) comme le treadmilling ou la notion de concentration
critique ont déjà été décrites dans la partie sur les MT. Elles ne sont pas
reprises dans cette partie.
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A. Actine et son cycle d'assemblage
L'actine est une ATPase qui s'assemble pour former les MF. L'actine
soluble qui est dite globulaire (ou actine G) lie l'ADP. L'actine polymérisée (filamentaire ou actine F) le fait sous forme liée à l'ATP. À l'image de
ce qui a déjà été décrit avec les MT, l'incorporation de nouvelles sousunités d'actine ATP à un MF stimule l'activité ATPase de l'actine déjà
incorporée. L'assemblage de l'actine conduit à la formation de polymères à deux protofilaments qui s'enroulent l'un autour de l'autre pour
former une structure de 6 nm de diamètre. L'extrémité (−) d'un MF est
dite pointue. Si elle est libre, elle libère de l'actine-ADP. L'extrémité (+)
est l'extrémité barbue. Si elle n'est pas bloquée par des protéines de
coiffe, elle recrute les monomères d'actine-ATP (fig. 6.4A).
B. Protéines associées à l'actine, organisation
des microfilaments
Diverses protéines interagissent avec l'actine pour contrôler son assemblage ou pour organiser les MF. Deux protéines principales sont impliquées dans le contrôle d'assemblage. La β-tymosine se lie à l'actine et
la bloque sous forme ADP empêchant échange nucléotidique et nucléation spontanée. L'échange ADP/ATP nécessite la profiline qui se lie
temporairement au complexe actine-β-thymosine. En présence d'une
extrémité (+) libre, l'interaction avec les protéines partenaires est rompue et l'actine ATP s'incorpore dans le nouveau filament.
Les MF peuvent être organisés en une grande variété de superstructures en fonction de la nature des protéines associées. Cette diversité
permet à la cellule de contrôler sa morphologie à une échelle globale
ou locale. Les MF peuvent être organisés en gel anisotrope réticulé
par des protéines de pontage comme l'α-actinine ou les filamines.
Les MF peuvent présenter une organisation parallèle ou arborescente
maintenue par des protéines comme la villine, la fimbrine, la fascine
ou la protéine ARP2/3 (ARP = actin-related protein). La plasticité des
MF et leur organisation en superstructures différentes permettent à la
cellule de créer :
• des câbles (appellés fibres de tension) constitués de nombreux MF
associés qui s'ancrent au niveau des points d'adhérence focale, qui
sont les régions spécialisées de la MP où la cellule établit des liens avec
la matrice extracellulaire ;
• des replis dynamiques formant des vagues à la surface de la MP ;
• des protrusions cellulaires impliquées dans la migration et orientées
vers le front de migration, les lamellipodes ;
• des extensions membranaires très fines, les filopodes ;
• des structures plus spécialisées comme les microvillosités membranaires.
C. Clivage, coiffage et transformations gel–sol
L'élongation des MF peut être limitée par blocage du bout (+)
par des protéines de coiffe comme CapG, CapZ ou la gelsoline.
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Structure générale de la cellule
Fig. 6.4
Dynamique et organisation des microflaments.
A. Cycle d'assemblage-désassemblage des microfilaments.
B. Transition gel-sol.
C. Régulation de l'assemblage des microfilaments.
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La fonction de ces protéines est contrôlée par le calcium ou par
des inositol-phosphates. Contrairement à CapG et CapZ, la gelsoline peut aussi cliver des MF. Le clivage est combiné au coiffage ,
ainsi la gelsoline reste fixée à la nouvelle extrémité (+) générée
par le clivage (fig. 6.4B). Ce mécanisme de clivage–coiffage permet à la gelsoline d'accroître la fluidité d'un gel de MF pontés (voir
plus haut). Le cytoplasme peut ainsi passer d'un état « gel » à un
état « sol » pour soluble important pour l'émission de protrusions
membranaires.
D. Nucléation dendritique et migration cellulaire
L'organisation des MF dans les lamellipodes au cours de la migration
cellulaire repose sur un modèle arborescent appelé nucléation dendritique. Après activation par un stimulus extracellulaire, la protéine
ARP2/3 se fixe sur des MF existants et nuclée des MF orientés à
70° par rapport aux précédents. Cet assemblage constitue un réseau
avec de nombreuses extrémités (+) orientées vers la MP où les MF
peuvent exercer une action mécanique. Le réseau dendritique de MF
est dynamique : il s'allonge vers la périphérie pour pousser la MP
puis les MF sont coiffés ce qui limite leur élongation. Parallèlement,
le clivage des MF dans leurs parties les plus anciennes par la protéine
ADF/Cofiline accélère la dépolymérisation du réseau à l'arrière. Cette
dynamique du réseau dendritique en direction du front de migration
exerce une poussée mécanique sur la MP et permet la progression du
lamellipode (fig. 6.5A).
E. Régulation par les protéines G
L'organisation des MF d'actine dans la cellule dépend de la nature des
protéines associées, mais elle est aussi contrôlée par trois protéines G
régulatrices : Rho, Rac et Cdc42. L'activation de ces protéines G sous
forme GTP stimule pour Rho la formation des fibres de tension, pour
Rac la formation des lamellipodes et pour Cdc42 la formation des filopodes (fig. 6.4C).
F. Liaison microfilaments–membrane plasmique :
l'exemple des microvillosités
Le maintien d'une morphologie cellulaire différenciée implique souvent l'interaction des MF avec la MP comme avec les jonctions adhérentes ou les microvillosités. Ces dernières qui accroissent la surface
d'échange avec le milieu extracellulaire sont sous-tendues par des
MF accrochés à la MP et liés latéralement entre eux. La liaison à la
MP nécessite des protéines ERM (Ezrine–Radixine–Moesine). Ces
protéines présentent une conformation inactive repliée, mais elles
s'ouvrent après phosphorylation pour lier des MF au domaine cytoplasmique de protéines membranaires. Cette liaison combinée avec
le pontage latéral de MF voisins par la villine et la fimbrine permet la
création de microvillosités (fig. 6.5B).
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Structure générale de la cellule
Fig. 6.5
Organisation des MF sous la membrane plasmique.
A. Polymérisation dendritique de l'actine.
B. Protéines ERM et formation des microvillosités.
G. Myosine II musculaire
La famille des myosines comprend de nombreux moteurs se déplaçant
vers le bout (+) des MF d'actine. La myosine musculaire (myosine II)
est organisée sous forme de polymères (les filaments épais) desquels
émergent les paires de têtes motrices qui marchent sur les filaments fins
d'actine pour assurer la contraction. La myosine peut se trouver dans
quatre états nucléotidiques : sans nucléotide, liée à l'ATP, à l'ADP-Pi
ou à l'ADP. La myosine-ATP est peu affine pour l'actine (n) d'un MF.
L'hydrolyse de l'ATP ouvre alors la conformation d'une tête motrice
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Cytosquelette
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pour l'aligner avec l'actine voisine (n + 1). La libération du Pi accroît
l'affinité myosine–actine et la libération d'ADP permet le retour à la
conformation initiale, ce qui permet la traction du MF. La liaison d'une
nouvelle molécule d'ATP permet de répéter ce cycle.
IV. Filaments intermédiaires
A. Organisation moléculaire
Contrairement aux MT et aux MF, les FI sont formés de protéines différentes selon le type cellulaire. L'organisation des FI repose cependant
toujours sur le même principe : une(des) protéine(s) s'assemble(nt) en
dimères avec des régions terminales globulaires et une région centrale
hélicoïdale. Deux dimères s'assemblent tête-bêche en un tétramère
avec un décalage longitudinal. La polymérisation linéaire de ces tétramères forme des fibres qui se groupent par huit pour constituer un FI de
10 nm de diamètre. L'arrangement des fibres en torons (comme dans
un câble) donne aux FI une grande résistance mécanique.
B. Classification des filaments intermédiaires
et différenciation cellulaire
Les plus importants types de protéines de FI sont les suivantes :
• les cytokératines de type I (acide) et II (basique) exprimées dans les
cellules épithéliales s'assemblent pour former des hétéropolymères. La
diversité de ces kératines (une dizaine de chaque type) permet l'assemblage de couples différents selon le type cellulaire ;
• les protéines de type III qui forment des homopolymères sont exprimées dans des cellules mésenchymateuses : les fibroblastes et les
cellules dédifférenciées comme des cellules tumorales expriment la
vimentine, les cellules musculaires expriment la desmine ;
• le type IV contient les protéines de FI (NF-H, NF-L et NF-M) qui copolymérisent dans les neurones pour former les neurofilaments ;
• le type V est particulier car il contient les trois lamines nucléaires qui
sont ubiquitaires. Elles s'assemblent pour constituer la trame de soutien de l'enveloppe nucléaire.
C. Dynamique des filaments intermédiaires
Les FI n'échangent pas de sous-unités aux extrémités des polymères.
Leur dynamique comprise très tardivement opère par échange latéral
de sous-unités, coupures et raboutage de FI. L'échange des sous-unités
est contrôlé par phosphorylation–déphosphorylation.
D. Fonctions mécaniques
Grâce à leur solidité, les FI assurent un rôle mécanique majeur : dans
les épithélia, ils constituent un réseau de câbles parallèles ancrés à des
jonctions membranaires établies entre cellules adjacentes (les desmosomes) ainsi qu'entre les cellules et la matrice extracellulaire (hémidesmosomes). Ils assurent ainsi la cohésion du tissu et sa résistance
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Structure générale de la cellule
mécanique au déchirement. Dans les neurones, les FI présentent des
projections latérales des protéines NF-L et NF-M. Cette organisation
empêche les FI de s'approcher trop près les uns des autres et participe
au contrôle du diamètre axonal, lui-même essentiel pour assurer une
vitesse de conduction nerveuse suffisante.
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