
4REVUE DE LA BANQUE DU CANADA •ÉTÉ 2001
privé tournent habituellement à leur plein potentiel,
ce qui limite leur capacité d’ajuster l’offre à court
terme. Et si elles veulent accroître l’offre, il leur faut
généralement faire de l’exploration et mettre en valeur
de nouvelles réserves pétrolières et, parfois, construire
de nouvelles infrastructures afin de pouvoir acheminer
le pétrole vers les marchés.
Certains pays exportateurs de pétrole, la plupart
membres de l’OPEP, ont manifesté une volonté
d’abaisser leur production à un niveau se situant en-
deçà de leur plein potentiel en vue d’influencer les
prix (Anderson, 2000). En fait, l’OPEP a déclaré qu’elle
souhaite voir les prix se stabiliser2. D’ailleurs, la série
d’ajustements apportés aux niveaux de production
par les membres de l’OPEP ces trois dernières années
avait pour objet d’amener le cours mondial du pétrole
dans une fourchette plus stable et légèrement plus
élevée. Cependant, le prix du pétrole est très sensible
aux fluctuations de l’offre et de la demande, et le
caractère imprévisible des variations de l’offre et de
la demande a rendu ses objectifs en matière de
fourchette de prix très difficiles à réaliser pour l’OPEP.
De plus, les changements structurels que subit le
marché pétrolier depuis le milieu des années 1980 ont
accentué la volatilité des prix (Lynch, 2001). Ainsi, les
marges de capacité inutilisées dans tous les pans du
secteur pétrolier (production, livraison, raffinage et
distribution) se sont sensiblement rétrécies depuis ce
temps. Le ratio stocks/ventes dans l’industrie
américaine du raffinage a aussi diminué de façon
notable ces dernières années, ce qui s’explique par
l’utilisation accrue des méthodes de gestion des stocks
de type juste-à-temps.
L’offre et la demande de pétrole sont manifestement
beaucoup plus sensibles aux changements persistants
du prix réel du pétrole en longue période qu’à court
terme3. Par exemple, les grands chocs pétroliers des
années 1970 et du début des années 1980 ont contribué
à une réduction globale de l’intensité énergétique
au Canada et dans d’autres pays industriels au cours
des vingt dernières années. Ils ont amené les consom-
mateurs à substituer d’autres types de carburants aux
produits pétroliers (encadré 1) et stimulé la mise en
valeur des réserves de pétrole dans les pays hors
2. Voir, à ce sujet, un récent discours du président de la conférence de l’OPEP
(Khelil, 2001).
3. Les études empiriques transversales, comme celles de Griffin et Gregory
(1976) et de Pindyck (1979), laissent entendre que l’indice d’élasticité-prix à
long terme de la demande de produits énergétiques (en valeur absolue) est de
près de 1.
OPEP. Cette nouvelle donne a fait augmenter consi-
dérablement la part de la production mondiale
occupée par les pays hors OPEP autres que les États-
Unis (Tableau 1).
Le marché nord-américain du gaz
naturel
En Amérique du Nord, les marchés du gaz naturel ne
dépassent pas les limites du continent, principalement
en raison des coûts élevés de transport de ce produit
vers les utilisateurs finals4. Les prix du gaz naturel,
tout comme ceux du brut, y sont également l’objet
d’une grande variabilité, reflétant en cela la faible
réaction de l’offre et de la demande aux modifications
du cours du produit de base. Le peu de sensibilité de
la demande à ces modifications s’explique en partie
par les délais réglementaires à respecter en ce qui a
trait à l’ajustement des prix de détail et par le nombre
un peu plus élevé de contrats à long terme avec les
utilisateurs finals de gaz naturel qu’avec les utilisateurs
de produits pétroliers. Quant à la faible élasticité-prix
à court terme de l’offre, elle tient surtout au long
décalage entre la production de la ressource (souvent
située dans des régions éloignées) et sa livraison au
marché. Pour le gaz naturel aussi, l’élasticité-prix à
long terme de l’offre et de la demande est plus élevée
que l’élasticité à court terme.
Au fil des années, l’utilisation du gaz naturel a
augmenté par rapport à la consommation d’autres
4. Il est possible que les marchés nord-américains du gaz naturel soient tou-
chés à long terme par la suite des événements dans le reste du monde si la
dépendance des États-Unis à l’égard des importations de gaz naturel liquéfié
s’accentue.
Tableau 1
Part de la production pétrolière mondiale
Pays / Part (en pourcentage)
Région 1973 1981 1990 1999 (p)
OPEP
Canada
États-Unis
Autres, hors OPEP
54,5 40,1 38,3 42,1
2,8 2,3 2,6 2,9
16,5 15,3 12,2 9,0
25,7 42,3 47,0 46,0
Source : gouvernement des États-Unis (Energy Information Administration)
p = données préliminaires