L3 - 2016/2017 - TD6 Mercredi 19 octobre Mathématiques discrètes Utilisation de la Formule de Burnside Exercice 1. On note ϕ la fonction d’Euler. Soit n un entier naturel > 1. On note d(n) le nombre d’entiers naturels diviseurs de n. 1. Soit m un entier naturel compris entre 1 et n. Soit Hm l’ensemble des éléments de Z/nZ dont l’ordre est un diviseur de m, c’est-à-dire l’ensemble des éléments x de Z/nZ tels que mx = x + x + · · · + x = 0. Démontrer : | {z } m (a) Hm est un sous-groupe de Z/nZ. Soit Hm = {x ∈ Z/nZ ; mx = x + x + · · · + x = 0}. | {z } m Démontrons que Hm est un sous-groupe de Z/nZ : ∀p ∈ N, p0 = 0, donc 0 ∈ Hm Soient x, y ∈ Hm . m(x − y) = x − y + x − y + · · · + x − y = x + x + · · · + x −(y + y + · · · + y ) = 0. {z } | | {z } | {z } m m m Donc x − y ∈ Hm . (b) Hm est un sous-groupe cyclique de Z/nZ de cardinal pgcd(m, n). Soit a ∈ Z relevant x ∈ Z/nZ. Alors x ∈ Hm ⇔ ma ∈ nZ ⇔ a ∈ n/pgcd(m, n)Z (en utilisant le lemme de Gauss). Donc Hm est le sous-groupe cyclique engendré par la classe de n/pgcd(m, n) dans Z/nZ. de plus, pour tout entier naturel d, dn/pgcd(m, n) ∈ nZ ⇔ pgcd(m, n)|d, donc la classe de n/pgcd(m, n) dans Z/nZ exactement d’ordre pgcd(m, n). Et donc Hm est d’ordre pgcd(m, n). (c) L’ensemble des sous-groupes de Z/nZ est exactement l’ensemble des sous-groupes Hd pour d ∈ N, d diviseur de n. Pour d diviseur de n, Hd est un sous-groupe d’ordre d = pgcd(d, n). Soit H un sous-groupe d’ordre d. Alors H ⊂ Hd par le théorème de Lagrange. or d = |H| = |Hd | donc H = Hd , d’où l’unicité. 2. On considère l’application suivante : ψ : (Z/nZ)∗ × Z/nZ (m, x) → Z/nZ → mx (a) Justifier que le groupe (Z/nZ)∗ opère ainsi sur Z/nZ. ∀x ∈ Z/nZ, ψ(1)(x) = 1x = x, donc ψ(1) est l’identité de Z/nZ. ∀m1 , m2 dans (Z/nZ)∗ , m1 m2 = m1 m2 (tout est dans le sous-entendu de la notation!) donc ψ(m1 m2 ) = ψ(m1 ) ◦ ψ(m2 ). J. Dubut, A. Lick, C. Picaronny 1 E.N.S. de Cachan L3 - 2016/2017 - TD6 Mercredi 19 octobre Mathématiques discrètes (b) Démontrer l’égalité : X pgcd(m − 1, n) = ϕ(n)d(n). m ∈ {1, ...., n} pgcd(m, n) = 1 On démontre qu’il y a d(n) orbites : Soient x et y dans Z/nZ. x et y sont dans une même orbite sous l’action de (Z/nZ)∗ si et seulement si < x >=< y > (∃m ∈ N/y = mx ⇒ y ∈< x >). L’orbite de x est l’ensemble des générateurs du sous-groupe < x >. Il y a donc autant d’orbites que de sous-groupes cycliques de Z/nZ, soit d(n) (question 1(c)). Rappelons la formule (qui n’est pas) de Burnside : Si G est un groupe fini qui opère sur un ensemble fini X, le nombre d’orbites, soit k, est donné par : 1 X k= |Fix(g)|. |G| g∈G Ici, G = (Z/nZ)∗ , d’ordre ϕ(n) et k = d(n). Si g = m ∈ (Z/nZ)∗ , Fix(g) = {x ∈ Z/nZ, mx = x} = {x ∈ Z/nZ, (m − 1)x = 0} = Hm−1 . (Z/nZ)∗ est en bijection avec l’ensemble des entiers m ∈ {1, ...., n} tels que pgcd(m, n) = 1, et pour un tel m, |Fix(m)| = |Hm−1 | = pgcd(m − 1, n) par (1) d’où : d(n) = 1 ϕ(n) X pgcd(m − 1, n). m ∈ {1, ...., n} pgcd(m, n) = 1 Exercice 2. Soit p un nombre premier. On note (1, ..., p) le p-cycle (la permutation du groupe symétrique qui envoie 1 sur 2, 2 vers 3,..., p − 1 sur p et p sur 1). On note G le groupe engendré par (1, ..., p). Soit Σ un alphabet fini. 1. Démontrer que G est un groupe d’ordre p. La permutation τ = (1, ..., p) est un élément d’ordre p donc il engendre un groupe d’ordre p. Si on veut démontrer que l’ordre de τ est exactement p, on peut remarquer que τ (i) est congru à i + 1 modulo p, donc τ j (i) est congru à i + j modulo p ; Ainsi τ j = Id si et seulement si, ∀i, τ j (i) = i, donc si et seulement si j est un multiple de p. 2. Quels sont les ordres des éléments de G ? Comme p est un nombre premier, par le théorème de Lagrange, les éléments de G sont d’ordre 1 ou p. Pour chaque ordre d, on précisera combien d’éléments de G sont d’ordre d. Seul l’élément neutre est d’ordre 1, donc il y a p − 1 éléments d’ordre p. 3. On fait opérer G sur Σp , l’ensemble des mots de longueur p écrits avec des lettres de Σ de la façon suivante : G × Σp → Σp (τ, a1 a2 · · · ap ) → τ.(a1 a2 · · · ap ) = aτ −1 (1) aτ −1 (2) · · · aτ −1 (p) J. Dubut, A. Lick, C. Picaronny 2 E.N.S. de Cachan L3 - 2016/2017 - TD6 Mercredi 19 octobre Mathématiques discrètes (a) Démontrer qu’il s’agit bien d’une opération de groupe. Soient σ et ρ deux permutations. Soit a1 a2 · · · ap ∈ Σp . Alors σ.(τ.(a1 a2 · · · ap ) = σ.(aτ −1 (1) aτ −1 (2) · · · aτ −1 (p) ) = σ.(b1 b2 ....bp ) avec bi = aτ −1 (i) , ∀i = bσ−1 (1) bσ−1 (2) · · · bσ−1 (p) = aτ −1 (σ−1 (1) aτ −1 (σ−1 (2) · · · aτ −1 (σ−1 (p) = a(στ )−1 (1) a(στ )−1 (2) · · · a(στ )−1 (p) puisque (στ )−1 = τ −1 σ −1 (b) Déterminer le fixateur de (1, ..., p). En déduire le fixateur de (1, ..., p)i , pour tout entier i premier avec p. Notons Fix((1, ..., p)) le fixateur de (1, ..., p). a1 a2 · · · ap ∈ Fix((1, ..., p)) si (1, ..., p).a1 a2 · · · ap = a1 a2 · · · ap . Or, (1, ..., p).a1 a2 · · · ap = a2 a3 · · · ap a1 . Donc a1 a2 · · · ap ∈ Fix((1, ..., p)) si et seulement si a1 = a2 , a2 = a3 , ..., ap = a1 . Donc le fixateur de (1, ..., p) est l’ensemble des mots ap , a ∈ Σ. Un mot dans le fixateur de (1, ..., p) est dans le fixateur de (1, ..., p)i , pour tout entier i. Si i est premier avec p, il existe des entiers a et b tels que ap + bi = 1 donc (1, ...., p) = ((1, ..., p)p )a ((1, ..., p)i )b = ((1, ..., p)|i )b , donc un mot dans le fixateur e (1, ..., p)i est dans le fixateur de (1, ..., p). Donc pour i premier avec p, Fix((1, ..., p)) = Fix((1, ..., p))i . (c) En utilisant la formule de Burnside, démontrer que le nombre d’orbites r de cette opération est : 1 r = (|Σ|p + (p − 1)|Σ|). p On écrit la formule de Burnside: r= 1 X Fix(g)|. |G| g∈G L’identité fixe tout élément de Σp , les autres éléments de G sont les (1, ..., p)i pour i ∈ {1, ..., p− 1} et ont comme fixateur l’ensemble des mots ap , a ∈ Σ, de cardinal |Σ|. Et G est d’ordre p, donc la formule de Burnside s’écrit dans ce cas précis : r= 1 (|Σ|p + (p − 1)|Σ|). p (d) Quel théorème d’arithmétique peut-on retrouver ainsi ? Comme le nombre d’orbites est un entier naturel, on en déduit que p divise l’entier |Σ|p + (p − 1)|Σ| = (|Σ|p−1 + (p − 1))|Σ|. Lorsque l’alphabet Σ est de cardinal premier avec p, |Σ| est inversible modulo p et p − 1 ≡ −1 modulo p, donc |Σ|p−1 ≡ 1, modulo p. En considérant pour tout entier naturel n premier avec p, un alphabet de cardinal n, on retrouve le petit théorème de Fermat. Exercice 3. Soit n un entier naturel ≥ 1 et on note [1..n] l’ensemble {1, ..., n}. On considère l’ensemble En des graphes dont l’ensemble des sommets est [1..n]. Un tel graphe G est représenté par une application J. Dubut, A. Lick, C. Picaronny 3 E.N.S. de Cachan L3 - 2016/2017 - TD6 Mercredi 19 octobre Mathématiques discrètes δG : [1..n] → P([1..n]) où δG (i) est l’ensemble dans [1..n] \ {i} des sommets de G reliés à i par une arête. Comme le graphe est non orienté, on a l’équivalence : ∀i, j ∈ [1..n], i 6= j, i ∈ δG (j) ⇔ j ∈ δG (j). Soit σ une permutation de [1..n] ( σ ∈ S\ ). Si G est un graphe dans En , G = ([1..n], δG ), On note σ.G le graphe ([1..n], σ.δG ) où σ.δσ.G est définie par : ∀i ∈ [1..n], δσ.G (σ(i)) = {σ(j), j ∈ δG (i)}. On vérifierait (c’est juste fastidieux!) qu’on a bien ainsi défini une opération du groupe Sn sur l’ensemble En . 1. On suppose dans cette question n = 3. Dessiner les différents graphes à trois sommets à isomorphisme près (il y en a 4). Il y en a quatre, 0, 1, 2 ou 3 arêtes. 2. On se propose de faire le calcul pour n = 4 en utilisant la formule de Burnside. Pour cela on passe en revue les éléments du groupe symétrique S4 et détermine pour chacun le cardinal du fixateur. (a) Soit τ la transposition (1, 2). Démontrer que le graphe G est dans Fix(τ ) si et seulement si δG (1) ∩ {3, 4} = δG (2) ∩ {3, 4}. En déduire que Fix(τ ) est de cardinal 24 . Soit i ∈ {3, 4}. Alors i est fixe par σ donc i ∈ δG (1) si et seulement si i ∈ δG (2). il n’y a pas d’autre condition. Il y a 4 possibilités pour les arêtes reliant le sommet 1 à un sommet 3, 4 et cela fixe les arêtes reliant le sommet 2 à un sommet 3, 4. Il y a ensuite 2 possibilités entre 3 et 4 (une arête ou non) et 2 possibilités entre 1 et 2 (une arête ou non). Donc 24 en tout. (b) Soit σ le 3-cycle (1, 2, 3). i. Soit G un graphe dans Fix(σ). Démontrer que si on efface les arêtes d’extrémité 4 dans G, il y a exactement deux graphes possibles. La présence de l’arête entre 1 et 2 impose celle entre 2 et 3 et celle entre 3 et 1, donc le graphe est complet. De même l’arête entre 1 et 3 impose le graphe complet. Donc le graphe restreint aux sommets 1, 2, 3 est vide ou complet. ii. En déduire qu’il y a exactement 4 graphes dans Fix(σ). On choisit le graphe restreint aux sommets 1, 2, 3 (deux choix) et l’existence d’au moins une arête vers 4 (il y aura alors les 3) ou non (deux choix). (c) Soit µ le produit de deux transpositions disjointes (1, 2)(3, 4). Décrire les différentes possibilités pour l’ensemble des arêtes ayant une extrémité dans {1, 2} et une dans {3, 4}. En déduire que Fix(µ) est de cardinal 23 . De même on choisit la présence de l’arête entre 1 et 2 ou non (2 choix), la présence de l’arête entre 3 et 4 ou non (2 choix), la présence de l’arête entre 1 et 3 ou non (2 choix), la présence de l’arête entre 1 et 4 ou non (2 choix). Il y en a 24 en tout. (d) Soit ρ le cycle (1, 2, 3, 4). Calculer le cardinal Fix(ρ). On pourra démontrer qu’un graphe G dans Fix(ρ) est totalement déterminé par δG (1). Si on choisit la présence de l’arête entre 1 et 2 , alors on a les arêtes entre 2 et 3, entre 3 et 4 et entre 4 et 1. Il reste le choix entre l’arête entre 1 et 3 (graphe complet) ou non. Si on choisit la non présence de l’arête entre 1 et 2 on a aucune des arêtes entre 2 et 3, entre 3 et 4 et entre 4 et 1. Il reste le choix entre l’arête entre 1 et 3 (avec celle entre 2 et 4) ou aucune arête. J. Dubut, A. Lick, C. Picaronny 4 E.N.S. de Cachan L3 - 2016/2017 - TD6 Mercredi 19 octobre Mathématiques discrètes (e) Conclure. On applique le formule de Burnside : 1 |G| P g∈G Fix(g)| = 1 24 (Fix(Id) 4 2 + Fix(transposition) + 2 4 1 Fix(3-cycle) +3!Fix(4-cycle) 3Fix(produit + de 2 transpositions disjointes)) 4 4 1 3+2+1 4 + 2 +2 4 + 3!4 + 324 ) = 24 (2 2 = 1 11 Séries génératrices Exercice 4 - Les nombres de Catalan. Pour n ∈ N, On appelle Cn le nombre de parenthésages corrects avecn parenthèses, (on place n parenthèses ouvrantes et n fermantes de manière à n’avoir jamais plus de parenthèses fermantes qu’ouvrantes, un parenthèse fermante doit fermer. Par exemple, (()()) convient mais pas ())(().) 1. Déterminer C0 , C1 , C2 . C0 = 1,C1 = 1, () et C2 = 2, ()() et (()). 2. Démontrer la relation de récurrence : ∀n ∈ N, Cn+1 = n X Ci Cn−1 . i=0 On partitionne selon le nombre de parenthèses qui ferment la première : ( (...) ) (...) |{z} |{z} i() Soit S(X) = P n n−i() Cn X n la série formelle associée. 1. Démontrer : XS 2P − SP + 1 = 0. Pde l’équation P que S nest solution n n S(X) = n Cn X = 1 + X n Cn+1 X = 1 + X n ( i=0 Ci Cn−1 )X n = 1 + XS 2 . 2. Résoudre cette équation p dans Q[[X]]. ∆ = 1 − 4X. La série (1 − 4X) est une racine carrée de ∆ dans Q[[X]]. On a deux solutions dans le corps de fractions de Q[[X]] : 1± Dont une seule dans Q[[X]] : S(X) = 1− p (1 − 4X) 2X √ (1−4X) . 2X 3. En déduire que ∀n ∈ N, Cn = J. Dubut, A. Lick, C. Picaronny 5 1 n+1 2n n . E.N.S. de Cachan L3 - 2016/2017 - TD6 Mercredi 19 octobre p Mathématiques discrètes = (1 − 4X)1/2 n P 1 1 ( 2 − 1) · · · ( 21 − n + 1) (−4x) = n 2 n! P = − n 1.3....(2n−3) 4n xn 2n n! P (2n−2)! = 4n xn n 2n−1 (n−1)!2n n! P 2n − 2 = 2 n n1 xn (1 − 4X) n−1 On en déduit : S= X n 1 n+1 2n n xn . Exercice 5. Soit Σ un alphabet fini. Pour toute partie L de Σ∗ et pour tout entier naturel n, on note Ln l’ensemble des mots de L de longueur n et aL n le cardinal de Ln . On introduit la série : X S L (X) = n aL nX . n∈N ∗ 1. Justifier que S Σ (X) = 1 (1−|Σ|X) . ∗ SΣ = X |Σ|n X n = n∈N X (|Σ|X)n = n∈N 1 . (1 − |Σ|X) 2. Etant donnés L1 et L2 dans Σ∗ , exprimer en fonction de S L1 (X) et S L2 (X) les deux séries S L1 tL2 (X) et S L1 L2 (X). L2 1 Si L1 et L2 sont des langages disjoints, alors pour tout entier naturel n, anL1 tL2 = aL n + an , donc S L1 tL2 (X) = S L1 (X) + S L2 (X). Un mot de longueur m1 concaténé avec un mot de longueur m2 est un mot de longueur m1 + m2 , donc n X 1 L2 1 L2 ∀n ∈ N, aL = aL n k an−k . k=0 Il s’agit d’un produit de Cauchy et on en déduit : S L1 L2 (X) = S L1 (X)S L2 (X). 3. En supposant que L ne contient pas l’élément neutre, démontrer que : ∗ S L (X) = lim n→∞ J. Dubut, A. Lick, C. Picaronny n X (S L )k = 0 6 1 . (1 − S L (X) E.N.S. de Cachan L3 - 2016/2017 - TD6 Mercredi 19 octobre Mathématiques discrètes Si L ne contient pas l’élément neutre, alors les langages L, L2 ,...,Ln sont disjoints deux à deux et on déduit des questions 1 et 2 que : S L∪L2 ∪···∪Ln = n X (S L )k . 1 Or : + ∀n ∈ N∗ , S L ≡ S L∪L J. Dubut, A. Lick, C. Picaronny 7 2 ∪···∪Ln [X n ] E.N.S. de Cachan