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diabétiques après 10 ans d’évolution de la maladie.
Si on fait une pancréatectomie gauche, ce risque
s’élève à 70-80 %. C’est un argument fort pour éviter
dans la mesure du possible la réalisation d’une
pancréatectomie gauche. Si elle est nécessaire, il
faut qu’elle soit la moins étendue possible. En effet,
un des facteurs qui conditionne le développement
d’un diabète après pancréatectomie gauche est
l’étendue de cette pancréatectomie : par exemple le
risque est plus faible après pancréatectomie caudale
qu’après pancréatectomie gauche avec section du
pancréas devant la veine porte (pancréatectomie
corporéo-caudale).
Pour ce qui est de la duodénopancréatectomie cépha-
lique, cette intervention ne semble pas majorer le
risque de diabète lié à l’évolution de la maladie. Cela
s’explique par le fait que les îlots de Langerhans sont
préférentiellement localisés dans le corps et la queue
du pancréas plutôt que dans la tête. Par exemple,
dans certaines séries de duodénopancréatectomie
céphalique pour tumeur, la conservation d’un court
moignon caudal (environ 5 cm) a permis, chez
plusieurs malades, de conserver pendant plusieurs
années une glycémie normale.
Il faut essayer de retarder au maximum ce risque de
diabète et assurer une surveillance bisannuelle.
PANCRÉASCOPIE : LADÉRIVATION WIRSUNGO-JÉJUNALE PROTÈGE-
T-ELLE DU RISQUE DE DIABÈTE INDUIT PAR LA PC ?
PRA SAUVANET :Un des débats actuels en chirurgie de
la pancréatite chronique est le suivant : selon deux
études, la décompression du canal de Wirsung
exercerait un effet bénéfique sur la détérioration de
la fonction endocrine dans la PC. Cependant, leur
niveau de preuve n’est pas excellent. La première,
randomisée, date d’il y a une dizaine d’année et a été
réalisée sur un très faible nombre de malades dans
chaque bras. Elle montrait que le diabète apparais-
sait un peu plus tard après dérivation qu’en l’absence
de dérivation. Cependant cette étude n’a pas fait
l’objet d’un suivi à plus long terme pour déterminer
le devenir à distance des patients.
Le second travail, réalisé à Beaujon en 2000, montre
que les malades ayant eu une dérivation du canal de
Wirsung avaient pendant quelques années un risque
de diabète plus faible que les patients non opérés,
mais après 10 ans de recul, le risque de diabète rede-
venait le même. Cela suggère que cette méthode ne
permet au mieux que de reculer l’apparition du dia-
bète. Un troisième travail (2004), rétrospectif et por-
tant encore sur de faibles effectifs, a également révélé
un plus faible risque de diabète après dérivation
qu’en l’absence d’intervention.
PANCRÉASCOPIE : IL EST CLASSIQUE DE DIRE QUE LA PANCRÉA-
TITE AIGUËSE TRADUIT PAR UNE RESTITUTION AD INTEGRUM DES
FONCTIONS PANCRÉATIQUES, QU'EN EST IL APRÈSNÉCROSECTOMIE
PLUS OU MOINS ÉTENDUE ?
PRA. SAUVANET : Ce n’est pas le cas après chirurgie pour
pancréatite nécrosante. Le diabète apparaît comme
pour la pancréatectomie pour PC, soit précocement,
soit à distance de la survenue de la pancréatite aiguë.
De plus, ce diabète, lorsqu’il survient, est définitif.
Ce n’est donc pas un problème de dysfonctionnement
transitoire lié à la survenue de la pancréatite aiguë.
Dans certaines séries, la prévalence du diabète peut
atteindre 30 %.
Après nécrosectomie, on note également l’apparition
d’un diabète, mais avec une incidence moindre.
Cependant, il est à noter que les chiffres d’incidence
que l’on a, proviennent surtout d’études chez des
malades issus de séries chirurgicales, avec nécrose
étendue, ce qui biaise les chiffres. En effet, l’incidence
de la survenue du diabète doit être exagérée car la
survenue du diabète est étudiée principalement chez
des patients avec une atteinte parenchymateuse allant
de 70 à 80 % de la glande. Toutes ces études sont
méthodologiquement assez mauvaises.
En revanche, ce qui est intéressant, c’est le parallèle
avec la chirurgie d’exérèse : il faut tout faire dans le
cadre de la PA pour ne pas faire de pancréatectomie.
On savait déjà qu’une pancréatectomie n’améliorait
pas les résultats précoces. Les résultats à distance en
termes de diabète constituent un argument de plus
pour ne pas en faire. Lorsqu’on fait une nécro-
sectomie, même si on a l’impression de laisser peu de
pancréas viable, il y a quand même moins de diabète
à distance qu’après pancréatectomie.
PANCRÉASCOPIE : LES INTERVENTIONS DE RÉSECTION PANCRÉATIQUE
SUR PANCRÉAS RESTANT SAIN S'ACCOMPAGNENT-ELLES D'UN RISQUE
D'INSUFFISANCE PANCRÉATIQUE EXOCRINE (IPE) POST-OPÉRATOIRE ?
PRA. SAUVANET :Après pancréatectomie gauche,
énucléation, ou pancréatectomie médiane sur pancréas
Chez un patient avec une symptomatologie
douloureuse qui nécessite un geste chirurgical, la
tendance est de privilégier la dérivation, si le
malade n’est pas déjà diabétique.