ISBN 978-92-2-223083-9 OIT Célébration du 60e anniversaire de la convention no 98 : le droit d'organisation et de négociation collective au XXIe siècle www.ilo.org/workers Organisation internationale du Travail Célébration du 60e anniversaire de la convention no 98 : le droit d'organisation et de négociation collective au XXIe siècle tive c e l l o c ion t a i c o g né d l’avenir e la pour l’a venir Célébration du 60e anniversaire de la convention no 98 Le droit d’organisation et de négociation collective au XXIe siècle Bureau international du Travail Copyright © Organisation internationale du Travail 2010 Première édition 2010 Les publications du Bureau international du Travail jouissent de la protection du droit d'auteur en vertu du protocole n° 2, annexe à la Convention universelle pour la protection du droit d'auteur. Toutefois, de courts passages pourront être reproduits sans autorisation, à la condition que leur source soit dûment mentionnée. Toute demande d'autorisation de reproduction ou de traduction devra être envoyée à l'adresse suivante: Publications du BIT (Droits et licences), Bureau international du Travail, CH-1211 Genève 22, Suisse, ou par courriel: [email protected]. Ces demandes seront toujours les bienvenues. Bibliothèques, institutions et autres utilisateurs enregistrés auprès d'un organisme de gestion des droits de reproduction ne peuvent faire des copies qu'en accord avec les conditions et droits qui leurs ont été octroyés. Visitez le site www.ifrro.org afin de trouver l'organisme responsable de la gestion des droits de reproduction dans votre pays. Célébration du 60e anniversaire de la convention no 98 : le droit d’organisation et de négociation collective au XXIe siècle ISBN 978-92-2-223083-9 (print) ISBN 978-92-2-223084-6 (web pdf) Données de catalogage du BIT Célébration du 60e anniversaire de la convention no 98 : le droit d'organisation et de négociation collective au XXIe siècle / Bureau international du Travail. - Genève: BIT, 2009 1 v. ISBN: 9789222230839 (print); 9789222230846 (web pdf) Bureau international du Travail liberté syndicale / droits syndicaux / négociation collective / convention de l'OIT / application / commentaire 04.02.2 Egalement disponible en anglais: Celebration of the 60th Anniversary of Convention No. 98 : the right to organize and collective bargaining in the 21st century, ISBN 978-92-2-123151-6 (print), 978-92-2-123152-3 (web pdf), Genève, 2010; en espagnol: Celebración del 60a aniversario del Convenio núm. 98 : el derecho de sindicación y de negociación colectiva en el siglo XXI (ISBN 978-92-2-323083-8 (print); 978-92-2-323084-5 (web pdf), Genève, 2010. Les désignations utilisées dans les publications du BIT, qui sont conformes à la pratique des Nations Unies, et la présentation des données qui y figurent n'impliquent de la part du Bureau international du Travail aucune prise de position quant au statut juridique de tel ou tel pays, zone ou territoire, ou de ses autorités, ni quant au tracé de ses frontières. Les articles, études et autres textes signés n'engagent que leurs auteurs et leur publication ne signifie pas que le Bureau international du Travail souscrit aux opinions qui y sont exprimées. La mention ou la non-mention de telle ou telle entreprise ou de tel ou tel produit ou procédé commercial n'implique de la part du Bureau international du Travail aucune appréciation favorable ou défavorable. Les publications et les produits éléctroniques du Bureau international du Travail peuvent être obtenus dans les principales librairies ou auprès des bureaux locaux du BIT. On peut aussi se les procurer directement, de même qu'un catalogue ou une liste des nouvelles publications, à l'adresse suivante: Publications du BIT, Bureau international du Travail, CH-1211 Genève 22, Suisse, ou par courriel: [email protected]. Visitez notre site Web: www.ilo.org/publns. Imprimé en Italie Célébration du 60e anniversaire de la convention no 98 : le droit d’organisation et de négociation collective au XXIe siècle Table des matières Avant-propos .....................................................................2 Dan Cunniah .....................................................................4 Sir Roy Trotman .................................................................7 Juan Somavia ...................................................................10 Conclusions et Plan d’action ...............................................16 Liste des instruments de l’OIT .............................................23 Annexes .........................................................................25 Document de travail.....................................................25 Programme ...............................................................55 Liste des participants ..................................................56 Bureau international du Travail - ACTRAV Avant-propos Représentants syndicaux, universitaires, employeurs et fonctionnaires du BIT se sont retrouvés à Genève du 12 au 15 octobre pour assister au Symposium célébrant le 60ème anniversaire de la Convention 98 sur " le droit à la syndicalisation et à la négociation collective au 21ème siècle. " L'évènement était le dernier d'une série de symposiums biannuels organisés sous les auspices du Bureau des activités pour les travailleurs (ACTRAV). De nombreux amis, qui n'ont pu être présents, ont demandé à l'ACTRAV d'en publier le procès-verbal. Si nous ne sommes pas en mesure de rendre compte des débats dans le détail, nous pensons que cette brochure, assortie d'un CD-ROM (contenant des présentations PowerPoint, le texte intégral des normes, le recueil sur la liberté syndicale, et de nombreux autres documents utiles), ira dans le sens du but recherché par le Symposium : faire de cette célébration un chainon de plus dans la défense des droits du travailleur à l'heure où l'économie se mondialise. Toute la documentation disponible peut être consultée sur le site web de l'ACTRAV : www.ilo.org/workers. Le sous-titre que nous avons choisi pour le Symposium "L'avenir de la négociation collective - Une négociation collective pour l'avenir " suggère une double lecture. Nous voulions que s'engage une discussion sérieuse sur la meilleure manière de perpétuer la négociation collective, mais aussi que l'on reconnaisse que ce droit fondamental du salarié est une composante essentielle du devenir démocratique et de la stabilité de toute société. En organisant la réunion, nous avons opté pour un dénominateur commun au travers de 3 questions : n Quel type de changement mon organisation doit-elle opérer pour renforcer notre capacité à négocier collectivement ? n En quoi les syndicats doivent-ils modifier leur action collective dans les secteurs où l'effort individuel n'est pas suffisant ? n Quelle action demander au BIT pour soutenir ce droit fondamental du travailleur ? 2 Célébration du 60e anniversaire de la convention no 98 : le droit d’organisation et de négociation collective au XXIe siècle Quatre jours de débats intenses ont suivi, avec des moments graves et hors du programme officiel, comme la cérémonie, célébrée dès la première journée, à la mémoire de Janek Kucziewicz. Le document principal, qui synthétise les discussions et suggère la voie à suivre, a été abondamment commenté par les participants avant de prendre sa forme définitive. Nous pensons qu'il constitue un programme de travail important pour l'ACTRAV, mais nous voulons croire qu'il inspirera aussi l'action syndicale au plan national et international. Même si l'essentiel de la réflexion autour de ce Symposium est venu des collègues de l'ACTRAV - au Siège et sur le terrain - avec le concours du Secrétariat du groupe des travailleurs, nous nous félicitons de la collaboration qui s'est instaurée entre divers départements et unités du BIT. Nombre d'amis nous ont aidés avant et pendant le Symposium ; la liste définitive des participants et de nos soutiens matériels se limite à ceux qui ont le plus contribué à l'évènement. Mais ils sont aussi nombreux ceux qui ont partagé l'idée de ces assises et qui y ont participé. Permettez-moi de remercier en particulier Bernard Gernigon pour avoir préparé le document de référence, le professeur Mario Ackerman, qui a conduit la discussion sur les instruments de l'OIT et les amis employeurs, qui nous ont permis, de manière concrète et efficace, de confronter nos discussions à la réalité. Anna Biondi Directeur adjoint du Bureau des Activités pour les Travailleurs (ACTRAV). 3 Bureau international du Travail - ACTRAV Dan Cunniah Directeur du Bureau des Activités pour les Travailleurs (ACTRAV) Je suis heureux, au nom du Bureau des activités pour les travailleurs, de vous souhaiter la bienvenue à ce Symposium, marquant les 60 ans de la Convention 98 sur le droit à la syndicalisation et à la négociation collective. L'an dernier, nous avons célébré le 60ème anniversaire de la Convention 87 sur la liberté syndicale. Si une année sépare l'adoption de ces textes, on a pris coutume de citer immanquablement l'un et l'autre, tant ils sont complémentaires. Les deux Conventions figurent dans la Déclaration sur les principes et droits fondamentaux au travail, adoptée par l'OIT en 1998 ; elles donnent aux travailleurs leurs droits les plus fondamentaux, celui de se constituer en syndicat ou de rejoindre l'organisation de leur choix, de promouvoir et de défendre leurs intérêts économiques et sociaux. L'ACTRAV n'aurait pas laissé échapper pareille occasion sans souligner leur importance. La Déclaration sur la justice sociale, adoptée l'an dernier, rappelle que « la liberté syndicale et la reconnaissance effective du droit à la négociation collective sont d'une particulière importance pour espérer atteindre les quatre objectifs stratégiques de l'OIT ». Ce symposium se propose d'examiner les récentes évolutions de la négociation collective dans le contexte de la crise économique mondiale. Au cours des années qui l'ont précédée, la négociation collective avait déjà perdu de sa vigueur à la suite de certains changements intervenus dans la relation directe entre employeurs et salariés. Cette dernière décennie, le monde du travail a connu d'importantes mutations et l'on a vu fleurir, sous diverses formes, l'emploi atypique, précaire ou sans protection, avec les conséquences induites pour la négociation collective. De par le monde, le travail prenait un caractère plus diversifié, et la taille moyenne des entreprises se trouvait réduite du fait de restructurations. Dans sa forme traditionnelle, la négociation collective était mise à mal par la situation même des organisations syndicales, dont la base s'amenuisait en même temps que leur pouvoir. Dans certains pays et là où elle était d'usage, cette négociation devenait plus difficile, voire plus décentralisée, quand elle ne prenait pas, l'allure pure et simple d'une séance de concessions. Le lien entre productivité, profits et salaires perdait, du même coup, de sa consistance. Dans d'autres pays, la négociation collective n'avait pas encore connu un début d'application. La libéralisation du commerce, les dérégulations et les privatisations, souvent associées à la mondialisation économique, ont réduit de manière significative la marge de manœuvre des gouvernements, et donné plus d'autonomie aux entreprises. De la même façon, la mobilité du capital a aiguisé la concurrence entre pays : c'est à qui relèverait au mieux la qualité 4 Célébration du 60e anniversaire de la convention no 98 : le droit d’organisation et de négociation collective au XXIe siècle de sa main d'œuvre et encouragerait le plus l'investissement, une compétition aux retombées négatives pour la négociation collective traditionnelle. La financiarisation, les fusions-acquisitions, les délocalisations et la gestion des chaînes de production ont aussi pesé dans ce sens. Ces dernières années, le droit à la syndicalisation et à la négociation collective a été ballotté sous l'effet d'une triple réalité: des rangs syndicaux clairsemés, une individualisation plus marquée des relations de travail et la quête anxieuse d'une meilleure compétitivité et d'une plus grande flexibilité face à la mondialisation. Dans ces circonstances, il est impératif de renforcer la capacité des syndicats pour les mettre à même n de se saisir à bras le corps de ces défis, n de faire valoir le droit à s'organiser et à négocier collectivement (et, dans le même temps, d'imposer le respect des autres principes et droits fondamentaux), n de se doter d'une véritable plateforme dans la perspective d'une mondialisation croissante de l'économie et de l'avènement du travail décent pour tous. Ce symposium se propose : 1. d'examiner les récentes tendances et évolutions de la négociation collective et du dispositif de protection du droit à la syndicalisation. 2. d'évoquer les liens existant entre la négociation collective et les objectifs socio-économiques du travail décent. 3. de définir les politiques et stratégies à même de renforcer les capacités des syndicats à organiser et à négocier collectivement. 4. d'identifier les voies et moyens permettant d'obtenir le respect universel du droit à la syndicalisation et à la négociation collective. Le 8 octobre dernier, compte tenu des dernières ratifications, les Conventions 87 et 98 avaient respectivement reçu l'aval de 150 et 160 pays sur un total de183 états membres. On constate, au travers de ces chiffres, que le nombre de ratifications est élevé et qu'il va croissant. Mais s'il y a eu d'incontestables progrès, force est de constater que ces deux textes n'ont pas été aussi largement ratifiés que certaines Conventions fondamentales, comme celles sur le travail forcé et la discrimination, ou encore que la Convention sur les pires formes du travail des enfants. A titre indicatif, les cinq pays suivants, membres du G20, n'ont ratifié ni la 87 ni la 98 : n Chine, n Inde, 5 Bureau international du Travail - ACTRAV n Etats-Unis, n Corée, n Arabie saoudite. Et ils n'ont encore pris aucune mesure significative dans ce sens. Pourtant, à en juger par l'importance que le G20 a accordé aux normes internationales du travail, édictées par l'OIT, on attendrait, en toute logique, de la part des pays membres qu'ils ratifient et appliquent au moins les huit Conventions fondamentales de l'Organisation. Vous aurez relevé que l'on s'apprête à vous distribuer une documentation sur la négociation collective. Je voudrais attirer votre attention sur deux publications : la première est le deuxième numéro du nouveau Journal international de recherche syndicale, récemment lancé par l'ACTRAV, et entièrement consacré à la négociation collective. La seconde est la reproduction d'un article fort intéressant, publié il y a 70 ans - juste après la grande dépression - dans la Revue internationale du travail sous le titre « Etendre les accords collectifs pour couvrir l'ensemble du secteur commercial et industriel ». Je remercie Frank Hoffer et Kevin Skerrett d'avoir déterré ce document: il nous rappelle avec force et nous prévient très justement que poursuivre la politique de dérégulation et de marché libre de l'ère néolibérale ne peut que nous replonger dans une course vers l'abîme, risquée et imprévisible. A coup sûr, ce symposium aura à cœur d'analyser les tendances récentes et les divers dispositifs réglementant la négociation collective. Des études de cas seront présentées sur la manière dont certains syndicats ont trouvé solution en imaginant de nouvelles formes de négociation. Seront également évoqués les efforts faits pour promouvoir le droit à cette négociation et les conditions de son déroulement et les pressions exercées pour réformer le cadre règlementaire qui gouverne le système financier international. Je voudrais, sans tarder, saisir l'occasion de remercier Bernard Gernigon, qui a rédigé le document de référence, ainsi que Anna Biondi et l'équipe de l'ACTRAV pour leur contribution à l'excellente organisation logistique et administrative du symposium. Merci de votre attention. 6 Célébration du 60e anniversaire de la convention no 98 : le droit d’organisation et de négociation collective au XXIe siècle Sir Roy Trotman Vice-président travailleur du Conseil d'Administration du BIT Permettez-moi d'abord de saluer la présence de l'Ambassadeur Somavia à ce symposium sur la négociation collective, un dossier d'une particulière importance pour le Groupe des Travailleurs. Nous pensons que faire valoir la négociation collective doit être au cœur du programme politique du BIT et de ses activités, dans l'essence même de son action et de ses recherches. La majorité des états membres (87%, soit 160 pays) ont ratifié la Convention 98, mais son application est encore loin d'être parfaite, à en juger par les nombreux cas soumis aux organes de contrôle de l'Organisation. Il y a encore trop de gouvernements et d'employeurs qui ne respectent pas ce droit essentiel. Des 8 Conventions fondamentales, celles qui portent les numéros 87 et 98 sont les moins ratifiées. Il est de fait que cette ratification tarde à venir dans certains des pays les plus peuplés, ce qui explique que près de la moitié de la population active de la planète n'est pas couverte par la Convention 98. On imagine dès lors le défi qui se pose à nous. La négociation collective n'a pas seulement trait aux salaires et aux conditions de travail ; elle est, fondamentalement, l'expression du respect et de la dignité au sein de l'entreprise et dans la société en général. Quand on use du pouvoir économique pour dominer l'homme, on supprime toute liberté. C'est pourquoi un marché livré à lui-même est incompatible avec une société libre Le pouvoir du capital privé se doit d'être limité par une réglementation des pouvoirs publics et un dispositif de protection des hommes et des femmes au travail. Sans leur propre organisation et sans voix collective, les travailleurs sont à la merci de ce capital. Faire valoir son appartenance citoyenne en société et dans l'entreprise n'est pas possible sans la jouissance de droits collectifs, y compris le droit de grève. Le droit à la négociation collective a été arraché de haute lutte et il faut sans-cesse se battre pour le faire reconnaître au quotidien. Qu'il s'agisse de l'Europe, de l'Afrique, de l'Asie ou des Amériques, de grands ou de petits pays, ce droit ne nous a jamais été offert comme un cadeau de Noel. Il n'existe que grâce à l'action des travailleurs eux-mêmes ; l'exercer suppose en effet un combat permanent, parce qu'il a été reconnu et défendu face à cette double et puissante motivation des forces privées du marché: la logique du profit maximum et le goût du pouvoir. La négociation collective n'est pas incompatible avec le profit et la croissance économique. Des années de recherches, menées au BIT, ont montré que les entreprises et les sociétés peuvent croître et prospérer au travers de relations professionnelles empreintes de maturité. Nombre de 7 Bureau international du Travail - ACTRAV firmes observent avec succès certaines pratiques témoignant à l'évidence du bien-fondé du dialogue social et de la négociation collective. Celle-ci a l'avantage de fixer des règles du jeu équitables, ce qui est toujours préférable à l'absence totale de règles. Elle protège le travailleur des abus de l'autorité économique et favorise les performances et le progrès social. Les 30 dernières années ont vu la négociation collective évoluer, pour l'essentiel, dans deux sens contraires : un combat mené avec succès par la classe ouvrière pour étendre le droit à la négociation collective et un effort, tout aussi réussi, déployé par le capital pour réduire, dans leur substance et leur portée, les accords de négociation collective et l'arsenal juridique protégeant le travailleur. Au moment même où, en Sibérie, en Afrique du sud et en Corée, des salariés se mettaient en grève et étaient même jetés en prison pour défendre leurs droits fondamentaux et la démocratie, les tenants du capital lançaient une contre-attaque en règle pour annuler les avantages obtenus par le mouvement ouvrier. Il était question de réformer les lois du travail pour réduire la protection légale, ou, quand cela n'était pas possible, de les contourner. De fait, on compte de moins en moins de salariés couverts par une législation ad hoc, voire un accord de négociation collective. Le travail précaire et informel est en hausse. La financiarisation, la sous-traitance, les conditions d'embauche, l'emploi précaire et la délocalisation sont généralement les armes utilisées pour priver les travailleurs de leurs droits et, en particulier, celui de négocier collectivement. C'est pourquoi, toute discussion sur cette négociation est indissolublement liée à celle sur la relation de travail. Sans la reconnaissance formelle de cette relation, tout espoir de s'organiser et de négocier collectivement reste vain. La Recommandation sur la relation d'emploi (no 198) se doit donc d'être formellement mise en application La dérégulation financière a donné au capital un caractère plus global et a accru sa puissance. Le libéralisme commercial a facilité la délocalisation de la production et son installation dans des zones et pays à faible présence syndicale. Cela aussi pose problème pour la négociation collective. La forte progression du chômage a aiguisé les craintes du salarié d'adhérer à un syndicat. Une étude a montré que de nombreux travailleurs sont fortement tentés par une telle adhésion, mais qu'ils refusent de franchir le pas face à l'hostilité du patronat. Certains secteurs continuent d'éprouver des difficultés particulières : dans le public, où persistent les freins mis à la négociation collective, mais aussi dans l'agriculture, les zones franches d'exportation et l'économie informelle. Le refus opposé à la négociation collective n'a pas seulement une consonance économique : nombreux sont les patrons qui vouent une 8 Célébration du 60e anniversaire de la convention no 98 : le droit d’organisation et de négociation collective au XXIe siècle véritable haine aux syndicats et à la négociation collective, sans que cela relève de froides et rationnelles considérations économiques. Ils ont tout simplement besoin d'assumer un contrôle sans partage sur leur entreprise et leur personnel. Pour le dire simplement, ils veulent être le BOSS et refusent tout accord collectif ou toute présence syndicale, qui limiterait leur pouvoir sur les salariés. Si l'on veut que le principe de la négociation collective soit effectivement reconnu, il nous faut créer un environnement qui s'y prête et obtenir des gouvernements qu'ils le favorisent et l'étendent. Faute de quoi, l'on se trouvera face à un paradoxe : ce droit sera théoriquement étendu à de plus en plus de salariés, mais de moins en moins d'entre eux en profiteront. Le combat du mouvement syndical américain pour la loi sur le libre choix de l'emploi est, à ce propos, un excellent exemple. Les syndicats ont bien senti que l'exercice de la négociation collective était sur le déclin et tiré la sonnette d'alarme. Mais nous n'avons pas trouvé la recette magique pour inverser le cours des choses, et nous ne l'avons pas trouvée parce qu'elle n'existe pas. Il n'y a pas de solution passe-partout aux défis auxquels nous sommes confrontés. Pourtant, nombre d'initiatives sont encourageantes : citons, entre autres, les campagnes transfrontalières, les accords-cadres internationaux, la syndicalisation des femmes dans l'économie informelle, les nouvelles alliances sociales, les mouvements en faveur de salaires minimum garantis et de la sécurité sociale, et la relance du débat sur la régulation des marchés financiers. Partager ces expériences et échanger les connaissances sont justement l'objet de ce symposium. On verra ce que les syndicats peuvent faire ensemble, mais aussi ce que l'on peut attendre de l'OIT, de cette Organisation, qui est bien plus la nôtre que tout autre organe des Nations-Unies. La Déclaration sur la justice sociale et le Pacte global pour l'emploi sont de puissants instruments à même d'influencer le débat général. Nous sommes heureux d'accueillir parmi nous l'Ambassadeur Somavia pour discuter de ce que l'on doit et peut faire. Ecoutons-le exprimer ses vues sur un point essentiel : comment donner réalité au TRAVAIL DECENT dans ce climat conflictuel, qui voit le vœu de justice sociale se heurter à un environnement obsédé par sa course au profit maximum 9 Bureau international du Travail - ACTRAV Juan Somavia Directeur Général du BIT MM les délégués Chers collègues Il m'est agréable de vous souhaiter un bon après-midi et de vous dire mon plaisir d'être parmi vous. Permettez-moi, d'emblée, d'avoir une pensée pour notre ami Janek. Trois bouleaux ont été plantés aujourd'hui à sa mémoire, et nous gardons le sentiment de sa présence parmi nous. Mes remerciements vont à Dan Cunniah, Anna Biondi et à toute l'équipe qui a mis sur pied cette importante rencontre. Je voudrais aussi dire merci à George Dragnich, Directeur exécutif du secteur Dialogue social, et à tous les autres collègues qui ont contribué à l'évènement L'an dernier, nous avons célébré le 60ème anniversaire de la Convention 87 sur la liberté syndicale. Les Conventions 87 et 98 et les principes et droits qui s'y rattachent sont la pierre angulaire de l'OIT. Elles sont l'expression de sa spécificité et de sa force. Cette célébration prend aujourd'hui une signification toute particulière : le monde vit en effet un moment bien spécial de son histoire, de par la nature même de la crise qu'il traverse. Le bien-fondé de ces droits est à présent largement reconnu, et c'est ce qu'il faut retenir, même s'il se pose encore des problèmes d'application. Au nombre des éléments-clés sur lesquels se fondent l'économie internationale et une juste mondialisation, le Sommet mondial sur le développement social a retenu sept Conventions fondamentales de l'OIT (plus tard huit avec la Convention 182), parmi lesquelles celles sur la liberté syndicale et la négociation collective. J'ai moi-même participé à la préparation de ce sommet et je me souviens du nombre de questions posées sur les raisons mêmes qui justifiaient le choix de ces textes. De fait, ils portent en eux le droit de chacun à s'organiser et à revendiquer une juste part des richesses qu'il contribue à créer. Et on les retrouve dans la Déclaration de l'OIT de 1998 sur les principes et droits fondamentaux au travail, que tous les membres de l'Organisation se sont engagés à respecter. Sans-doute est-il opportun, en relation avec ce sommet, d'en rappeler le principal message, à savoir que la croissance économique doit se refléter 10 Célébration du 60e anniversaire de la convention no 98 : le droit d’organisation et de négociation collective au XXIe siècle dans le progrès social. La crise économique et financière montre à quel point les règles du jeu, dans l'équation justice sociale/ mondialisation équitable, ne cessent de changer Est-il besoin de souligner que, dans ce contexte, notre Déclaration de 2008 sur la justice sociale pour une mondialisation équitable, prend un relief particulier. Ce symposium est l'occasion de se pencher sur les voies à suivre pour favoriser le progrès social et sur le rôle de la liberté syndicale et de la négociation collective. Chers amis L'histoire de l'OIT s'identifie à celle du combat social. Nous avons été associés aux luttes menées à la fin du 19ème siècle ; des luttes qui ne sont guère différentes de celles d'aujourd'hui. Jamais, nous n'avons perdu de vue les convictions qui nous animent depuis 90 ans. A savoir que : n Les valeurs du marché ne sont pas des valeurs sociales n Les marchés sont au service de l'homme n Les concepts d'équité, de solidarité et de justice doivent guider l'action politique et sont les fondements d'une société " humaine " n Les institutions qui confortent la confiance et favorisent le dialogue sont le plus valable des investissements n La pauvreté, en quelque lieu que ce soit, menace partout la prospérité. A se tourner vers le passé, on réalise que la création de l'OIT en 1919 a représenté une incroyable percée, un réel progrès. Dans les années 70 et 80, il nous a fallu défendre nos valeurs face au modèle néo-classique, qui prévalait alors. Nous luttions pour notre survie. La Conférence internationale du Travail gardait un œil vigilant sur les questions fondamentales liées à ces valeurs. Nous nous battions pour quelque chose qui n'entrait pas dans le mode de pensée ambiant. Et c'est dans ce climat que nous avons conçu l'Agenda du travail décent, définissant la mission historique de l'OIT à l'heure de la mondialisation. . Aujourd'hui, pour avoir cru en nos valeurs, on nous écoute. Pour en venir à notre action, il nous incombe de la mener dans plusieurs directions : veiller à la gestion et à l'inspection du travail, suivre l'évolution de nos mécanismes de contrôle et nous doter de tous les moyens pour défendre le droit des travailleurs à s'organiser. Nous nous sommes toujours efforcés, dans notre approche, de mettre l'économie réelle au centre de toute politique de développement durable. Le concept de travail décent - Agenda compris - entend être à la source 11 Bureau international du Travail - ACTRAV d'un développement équilibré, couvrant à la fois droits, dialogue et protection, ainsi que les volets emploi, entreprises et égalité des genres. De ce point de vue, il apparait clairement que le modèle actuel de mondialisation va droit au mur: il fait fi de l'éthique, grippe les moteurs d'une croissance durable et privilégie le capital au détriment du travail. Les représentants des travailleurs et des employeurs et d'autres membres de la Commission mondiale sur la dimension sociale de la mondialisation avaient déjà lancé, en 2004, pareille mise en garde. A l'époque, la Commission avait prévenu que la voie prise par la mondialisation était moralement inacceptable et politiquement insoutenable. Certains ont trouvé ce jugement à tout le moins excessif, estimant que s'exprimait là une vue purement idéologique du problème. Il n'a pas fallu moins de quatre ans pour que la réalité s'impose. La Déclaration de 2008 sur la justice sociale pour une mondialisation équitable reflète un large consensus sur la nécessité d'imprimer au mouvement une forte dimension sociale, si l'on souhaite le voir donner les meilleurs et plus justes résultats. Quand la crise a éclaté, nous étions prêts à y faire face : les membres du Conseil d'administration sont intervenus dans une déclaration en novembre 2008, et nous avons mis sur la table le Pacte global de l'emploi en juin 2009. Tout le monde appelle de ses vœux -sans toujours le dire clairement l'Agenda du travail décent. Malgré cela, soyons sûrs que des voix vont s'élever pour proposer des solutions à la crise, puisées dans de vieilles recettes politiques, qui nous ont justement précipités dans ces difficultés. Alors, soyons prêts à proposer des solutions de rechange. Répondre par l'avènement du travail décent L'Agenda du travail décent se présente comme un des moyens de sortir d'une crise, qui, par son ampleur, a ébranlé le monde. Du même coup, celui-ci a pris conscience de la nécessité d'une action urgente pour favoriser une reprise, qui trouverait inspiration dans cet Agenda. On a dit que le BIT avait eu tort d'avoir vu juste trop tôt. Nous finirons par le penser. Le Pacte global de l'emploi porte une série de propositions politiques concertées qui, appliquées systématiquement, pourraient permettre une relance simultanée de l'économie et de l'emploi. L'approche retenue favoriserait l'investissement productif, l'entreprise innovante et durable, une classe ouvrière mieux armée, un niveau-plancher de protection sociale et la pratique du dialogue. Le Pacte ne se présente pas - et c'est l'un de ses 12 Célébration du 60e anniversaire de la convention no 98 : le droit d’organisation et de négociation collective au XXIe siècle principaux traits - comme un remède unique à tous les maux : Il tire sa légitimité du soutien des employeurs et des travailleurs et offre un éventail de voies à suivre que chaque pays est libre d'adapter à sa propre situation. Il part d'une double prémisse : assurer de pair le développement économique, social et environnemental et préfigurer une croissance de meilleure qualité en liant plus étroitement l'essor social et environnemental. Dans l'élaboration du Pacte, le tripartisme a œuvré pour façonner la réponse de l'économie réelle à la crise engendrée par l'économie financière. Le Pacte global de l'emploi a reçu l'aval du Conseil économique et social de l'ONU, du G8 et du G20, et, plus récemment, le soutien renouvelé des ministres du travail de l'Union africaine, de l'OECO et de l'OEA. Le BIT est sollicité pour prêter son assistance à l'oeuvre de redressement dans sa dimension "social et travail". Les dirigeants du G20 ont décidé de mettre la qualité de l'emploi au coeur de la relance et, à l'échelle mondiale, les syndicats l'ont dit clairement et à haute voix au Sommet de Pittsburgh. Le leadership du mouvement syndical s'est en effet mobilisé et a pris contact avec plusieurs responsables pour qu'ils plaident cette cause devant le sommet. Laissez-moi citer ce passage de la déclaration du G20: " Nous convenons que les défis actuels ne sauraient être un prétexte pour ignorer ou traiter avec désinvolture les normes du travail, internationalement reconnues. Pour nous assurer que la croissance mondiale bénéficie au plus grand nombre, nous devrons mettre en oeuvre des politiques conformes aux principes et droits fondamentaux au travail, prônés par l'OIT. " Le G20 s'est également engagé à lancer des plans de redressement qui " soutiennent le travail décent, contribuent à préserver l'emploi et à l'accroître, assistent les chômeurs et protègent ceux qui risquent de se retrouver à la rue. " Aujourd'hui, à en croire certains indicateurs, la balance pencherait pour une reprise de l'économie, mais hommes et femmes qui travaillent ont de sérieuses craintes pour leur emploi, leur sécurité, leur avenir. Le Pacte global de l'emploi est là pour tenter d'apaiser ces craintes. Et les propositions politiques qu'il avance, appliquées de manière systématique, pourraient assurer de pair le redressement économique et la relance de l'emploi, et, partant, de conforter le sentiment de sécurité. Le monde attend des réponses globales et coordonnées, et il ne suffit plus d'énoncer des politiques du marché du travail. Aucune mesure progressive sur les salaires et la protection sociale ne donnera le résultat souhaité, si, dans le même temps, on ne réforme pas les politiques financière, fiscale, commerciale et de développement. 13 Bureau international du Travail - ACTRAV Il faut nous attaquer aux déséquilibres structurels, qui sont source d'injustice. n Favoriser l'emploi dans la croissance - Nous devons augmenter le rythme de l'emploi dans la croissance. Dans des conditions de crise, l'investissement public sert mieux l'emploi que d'éventuels dégrèvements fiscaux. Créer des services publics et des infrastructures de qualité est crucial pour réduire les inégalités, bâtir une société diversifiée et donner certaines opportunités aux plus démunis. Une question reste à trancher : comment faire fonctionner un marché pour servir ces objectifs. n Améliorer le ratio productivité/ salaires - Sans-doute importera-t-il d'accroître de manière significative la part des salaires dans le PNB, une part qui n'a cessé de se contracter dans la majorité des pays au cours des 30 dernières années. Il faut déjà se prémunir contre une spirale déflationniste et retenir une stratégie de redressement (tirée par les salaires), qui favoriserait un mode de consommation durable et inverserait la tendance actuelle (renforcement des inégalités). Une redistribution faussée annihile toute capacité de consommer. Réaliser un meilleur équilibre n'est pas seulement - par esprit de justice - une fin en soi ; c'est aussi un facteur économique stabilisant. Il faudra enfin affronter les effets pervers de l'emploi précaire, auquel on recourt pour bafouer les droits du travail et les accords sur la négociation collective. Serons-nous à même de résoudre le problème d'un jour à l'autre ? Non. Mais prenons la décision d'œuvrer dans cette voie. n Servir l'économie réelle. Nous avons besoin de règles, de politiques publiques et surtout d'acteurs financiers soucieux d'éthique pour servir l'économie réelle. A considérer la situation aux Etats-Unis, on relève que près de 40 p.c. des profits étaient concentrés dans le secteur financier. Avec quelles implications ? Il était loisible de penser que l'on trouverait pareil niveau de profit dans l'économie réelle. Mais le secteur financier a sa propre logique et opère sur un tempo différent de celui de l'économie réelle. Et les attentes entretenues ont accentué la pression sur les salaires et accru la demande d'une plus grande flexibilité du marché du travail. Aussi relève-t-on avec intérêt l'évolution sanctionnée par le sommet de Pittsburgh : la déclaration du G20 parle d'un marché du travail diversifié et non plus d'un marché flexible. La nuance est importante. La crise a mis en relief le rôle crucial de la sécurité sociale, qui s'érige en rempart de protection face à un chômage galopant et des revenus qui s'effondrent. Un régime général de sécurité sociale a, d'instinct un effet stabilisant pour la population et l'économie. En cas de crise économique, il permet de maintenir le niveau des revenus et, partant, de la consommation globale, et aide tout un chacun à mieux s'adapter à des bouleversements. 14 Célébration du 60e anniversaire de la convention no 98 : le droit d’organisation et de négociation collective au XXIe siècle C'est précisément ce que les gouvernements ont, de leur propre chef, décidé de faire. Dans les pays sans régime général, le moment est venu d'aller au-delà de l'idée d'un simple filet de sécurité et d'instaurer, avec le soutien international, un niveau-plancher de protection, qui arracherait des millions de personnes à la pauvreté et leur offrirait certaines opportunités. On pense, par exemple, à un revenu de base, des soins médicaux et une insertion dans le système éducatif, allant de pair avec l'organisation et les droits au travail et la possibilité de faire valoir et de défendre ses intérêts. Dans ce contexte de crise, il est essentiel que les principes et droits touchant à la liberté syndicale et à la négociation collective soient promus et défendus et non pas déconsidérés. L'expérience a montré que la négociation collective a souvent été à l'avant-garde des accords passés sur la sécurité sociale et qu'elle a pavé la voie à une couverture sociale, légale et universelle. Les syndicats ont, quant à eux, un rôle important à jouer pour faire accepter l'idée d'une protection sociale minimum Conclusion Le BIT était prêt et sa voix est à présent entendue. Nous devons continuer à nous battre pour une mondialisation équitable. L'histoire de l'Organisation est une alternance de luttes et de dialogues, qui se croisent et se mêlent de manière permanente. Mettre en question le modèle qui prévaut aujourd'hui nous donne la latitude de replacer l'ensemble dans une série de règles, qui se veulent être un point d'équilibre entre le rôle de l'état, l'intérêt commun de la société et les besoins des populations. Nous croyons aux solutions nées du dialogue. Nous croyons à la négociation collective. Certains signes de redressement économique incitent à penser qu'il y aura inévitablement déphasage entre croissance, emploi et redressement. De fait, il n'y a là rien d'inévitable et cette manière de voir est politiquement insoutenable. Nous devons nous assurer que la croissance et l'emploi vont de pair. Si l'on ne déploie pas un effort suffisant pour favoriser l'embauche, on pourra s'attendre à une forte réaction sociale, exacerbée par un sentiment d'injustice. Par-delà la crise, nous devons opter pour une approche équilibrée et juste. L'exercice des droits à la liberté syndicale et à la négociation collective conforte et transforme : sa réelle portée va au-delà des travailleurs et des employeurs, au-delà même de l'OIT. 15 Bureau international du Travail - ACTRAV Conclusions et Plan d’action Historique La Constitution de l'OIT " fait solennellement obligation à l'organisation internationale du Travail d'inciter toutes les nations du monde à faire reconnaitre sans réserve le droit à la négociation collective. " La Déclaration sur la justice sociale pour une mondialisation équitable insiste sur " le respect, la promotion et l'application des principes et droits fondamentaux au travail, d'autant plus importants qu'ils sont une condition nécessaire à la pleine réalisation de tous les objectifs stratégiques, et relève n que la liberté syndicale et la reconnaissance effective du droit à la négociation collective sont d'une particulière importance pour espérer réaliser les quatre objectifs stratégiques (travail décent), et n que la violation des principes et droits fondamentaux au travail ne saurait être invoquée pour des motifs de légitime concurrence, pas plus que l'on ne pourra user des normes du travail à des fins de protectionnisme commercial ". La Déclaration sur les principes et droits fondamentaux au travail stipule que " tous les membres, même ceux qui n'ont pas ratifié la Convention ad hoc, ont l'obligation, de par leur adhésion même à l'Organisation, de respecter, promouvoir et appliquer, de bonne foi et dans l'esprit de la Constitution, les principes attachés aux droits fondamentaux, qui font l'objet de ces Conventions, nommément : (a) la liberté d'association et la reconnaissance effective du droit à la négociation collective. " La Déclaration tripartite sur les principes intéressant les entreprises multinationales et la politique sociale (Déclaration sur les EMN) précise que " lors des négociations, menées de bonne foi, avec les représentants ouvriers sur les conditions de travail ou face à des salariés défendant leur droit à s'organiser, les multinationales ne doivent, en aucun cas, brandir la menace de délocaliser tout ou partie d'une unité de production pour influencer, de manière déloyale, le cours des discussions ou faire obstacle à l'exercice de ce droit.". Aux termes de cette Déclaration, " Ils ne peuvent pas plus prétendre transférer du personnel de sociétés affiliées à l'étranger, dans le seul but de peser sur le' déroulement de la négociation avec les salariés ou de faire obstacle à l'exercice du droit à la syndicalisation (…). Les multinationales se doivent de fournir aux délégués du personnel toutes les informations nécessaires à une négociation sérieuse et - si cela est conforme à la législation et aux coutumes locales - de leur communiquer les données leur permettant de se faire une idée claire et juste des performances de la société, et, quand c'est le cas, de l'entreprise dans son ensemble. " 16 Célébration du 60e anniversaire de la convention no 98 : le droit d’organisation et de négociation collective au XXIe siècle Le Pacte global pour l'emploi affirme que " le respect des principes et droits fondamentaux au travail est essentiel à la dignité humaine. Il l'est également pour assurer redressement et développement. Aussi est-il nécessaire que l'on respecte de manière scrupuleuse la liberté syndicale, le droit de s'organiser et celui de négocier collectivement, et que l'on définisse des mécanismes propres à favoriser un dialogue social productif, en période de tension sociale accrue, dans les économies formelle et informelle. " Tenant compte du fait que l'OIT a, entre autres attributions, celle de faire valoir l'importance de la négociation collective, le Symposium a centré le débat sur la meilleure façon d'aider l'Organisation à remplir son mandat constitutionnel et sur le rôle imparti aux syndicats dans la défense et le renforcement d'un droit aussi important pour la classe ouvrière. En adhérant à l'OIT, tous ses membres ont entériné ce principe : les relations professionnelles doivent se fonder - pour donner de bons résultats économiques et sociaux - sur la confiance et le respect mutuels, dont le premier ingrédient est la négociation collective. Mais ces relations sont complexes, car elles traduisent à la fois des intérêts communs et conflictuels. Au-delà de leur consonance proprement économique (quand on parle d'efficacité et de production):, elles recèlent une forte dose de rivalité (quand il est question de pouvoir, de dignité et de respect). Cette complexité en fait un thème permanent de débats et de mouvements. A n'en point douter, gérer le changement est l'une des grandes vertus de la négociation collective. Celle-ci aide à définir des règles de jeu équitables, évitant à la partie de prendre l'allure d'une foire d'empoigne, et met le travailleur à l'abri de tout abus de pouvoir. Prôner la négociation collective n'a pas pour seule motivation d'éveiller les consciences, c'est aussi une façon de concevoir des institutions et des règles efficaces: les gouvernements ont donc un rôle-clé à jouer pour offrir aux partenaires sociaux un climat propice à cette négociation. Les participants au Symposium ont, de ce fait, décidé d'agir par le canal de leurs organisations respectives, de leur expression internationale commune, de l'ACTRAV et du BIT dans son ensemble pour conforter leur action dans les domaines suivants 1. Le droit à la négociation collective a. Le plein respect du droit à s'organiser et à négocier collectivement y compris le droit de grève et de protection contre la discrimination antisyndicale - est la condition préalable à l'instauration d'un climat démocratique dans l'entreprise et dans la société. b. La liberté syndicale et la négociation collective ont été reconnues comme des droits par la Déclaration sur la justice sociale (2008). 17 Bureau international du Travail - ACTRAV Elles sont aussi la condition préalable à la réalisation des 4 objectifs stratégiques de l'Agenda du travail décent. c. La capacité des syndicats à négocier collectivement est un élément déterminant pour améliorer les conditions de travail et résoudre les conflits. Elle favorise également la justice sociale, le travail décent, le développement économique et la stabilité de nos sociétés. d. Doivent aller de pair la ratification et la mise en application des Conventions ad hoc de l'OIT (87, 98, 94, 144, 135, 151, 154, 158) et la promotion des Recommandations, qui les accompagnent et qui renforcent la représentation ouvrière et la négociation collective. e. Le plein respect et l'application des droits du travailleur exigent une structure efficace de gestion, de contrôle et d'arbitrage (administration, inspection et justice du travail), f. Des syndicats forts, représentatifs, indépendants et démocratiques et des organisations patronales respectueuses de la négociation collective, sont à même de concevoir des mécanismes efficaces de relations professionnelles et d'imposer un caractère tripartite aux politiques et aux structures mises en place.; g. Le libre accès des syndicats à toutes les données économiques et financières est un gage important de bonne foi dans toute négociation. h. Droits égaux et non-discrimination (Conventions. 100, 111, 97, 143) sont des dispositions importantes pour assurer à tous des conditions de travail équitables et éviter la dilution du principe de la négociation collective. 2. Les arguments économiques en faveur de la négociation collective a. La négociation collective est, au niveau national, sectoriel et interprofessionnel, l'élément-clé d'une stratégie d'ensemble pour réduire les inégalités, augmenter le niveau des salaires et améliorer les conditions de vie et de travail. b. Le Pacte global pour l'emploi souligne bien que la négociation collective est essentielle pour répondre, de manière juste et efficace, à la crise actuelle. c. Etendre la portée de la négociation est d'une première importance pour espérer - au plan salarial - sortir de la crise. Fixer statutairement ou négocier la rémunération minimum entre, pour une grosse part, dans cette démarche. d. 18 Célébration du 60e anniversaire de la convention no 98 : le droit d’organisation et de négociation collective au XXIe siècle Des services publics de qualité et un système général de sécurité sociale -assorti d'une protection-plancher viennent en complément de la négociation collective et sont d'autant mieux assurés que les syndicats sont puissants e. Les marchés publics peuvent être l'occasion de promouvoir le travail décent, le respect des droits fondamentaux de l'homme et les normes internationales du travail, et de conforter la négociation collective, pour obtenir, à tout le moins, le maintien des rémunérations et conditions de travail existantes. f. Le système financier est là pour servir les travailleurs et l'économie réelle. On devrait inciter les institutions financières, multilatérales et internationales notamment, à faire référence aux normes de l'OIT dans leurs pratiques de crédit. 3 L'emploi précaire et l'économie informelle a. Si de plus en plus de pays garantissent "de jure" les principaux droits du travail, de moins en moins de travailleurs peuvent en jouir, du fait même de la progression du travail précaire et de l'emploi informel. b. La dégradation des relations du travail a pour premier effet d'empêcher les travailleurs d'exercer leurs droits et explique sans-doute la difficulté à étendre la portée de la négociation collective. La Résolution 198 montre la voie à suivre pour s'assurer qu'aucun salarié n'est privé de ses droits. c. L'emploi précaire ne répond à aucune nécessité économique. On y recourt pour déposséder l'ouvrier de ses droits, entraver la négociation collective et affaiblir les syndicats d. Introduire les accords collectifs là où l'emploi est précaire est impératif si l'on veut y améliorer les conditions de travail et bâtir un mouvement syndical fort et ouvert à tous. e. Les syndicats se doivent de fixer l'action à entreprendre pour aplanir les difficultés juridiques et les obstacles pratiques, qui, pour les salariés du secteur informel, sont autant de freins - sinon d'interdits - à l'exercice de leur droit à la liberté syndicale et à la négociation collective. 4 Les relations professionnelles internationales a. La mondialisation commande d'internationaliser la négociation collective et les relations professionnelles. Les Accords-cadres internationaux et mondiaux sont d'utiles instruments pour imprimer aux relations professionnelles un caractère universel. Ils s'inscrivent 19 Bureau international du Travail - ACTRAV aussi dans une stratégie d'ensemble, propre à donner une plus large place au mouvement de syndicalisation et à la négociation au niveau national. b. Pour y parvenir, les syndicats sont tenus de renforcer la solidarité internationale et de susciter, entre autres, un fort courant de soutien. c. Les Codes de conduite n'ont guère réussi à favoriser la liberté syndicale et la négociation collective. d. Les modèles de négociation collective internationale n'ont de réelle valeur que s'il y a interaction entre la négociation mondiale et celle engagée au plan national ou sectoriel. 5 L'action syndicale a. Affronter valablement les défis politiques dépend de la force de mobilisation et d'organisation des syndicats. b. La ratification des Conventions est essentiellement fonction du lobbying des syndicats au niveau national, soutenu par une action internationale. c. Les syndicats se doivent de faire plein usage des Conventions et Recommandations pour trouver solution aux conflits nationaux et assurer un meilleur suivi des recommandations faites par les organes de contrôle du BIT. d. Il importe d'imaginer de nouvelles approches en matière d'organisation et de négociation collective pour garder le contact avec les salariés précaires et ceux de l'économie informelle et les protéger. e. La négociation collective sectorielle et centralisée devra être renforcée si l'on veut en amplifier la portée et l'impact et assurer une redistribution plus équitable des biens et des revenus. f. Les multinationales, qui contrôlent les principales chaînes de production, doivent être soumises, au plan national et international, à une certaine forme de contrôle syndical, avec le concours des structures nationales et sectorielles. Les syndicats pourraient user à cette fin de divers instruments : accords-cadres mondiaux, programmes dédiés et actions de solidarité internationale. g. Relever les défis de la mondialisation et promouvoir la liberté syndicale et la négociation collective supposent aussi d'agir en d'autres domaines, comme le commerce, les investissements et les marchés publics internationaux. h. 20 Célébration du 60e anniversaire de la convention no 98 : le droit d’organisation et de négociation collective au XXIe siècle La liberté syndicale et la négociation collective sont toutes deux une arme pour faire valoir l'égalité des droits et la non-discrimination. 6. L'intervention du BIT Favoriser l'avènement de la négociation collective suppose du BIT qu'il soit un centre d'excellence sur la question et qu'il aide ses composantes à trouver solution aux problèmes évoqués ci-dessus. Pour ce faire, il aura à mener à bien ce qui suit: n Promouvoir activement la ratification et la mise en application des Conventions ad hoc de l'OIT (87, 98, 94, 135, 144, 151,154, 158) et des Recommandations (143, 159, 163, 193, 198), en tenant compte des avis des organes de contrôle de l'Organisation; n Encourager, sous ses diverses formes, la négociation collective afin d'augmenter la part des salaires dans le produit national brut et de réduire les inégalités en ce domaine. n Fournir des données complètes sur les tendances salariales, la densité dans les rangs syndicaux, la portée de la négociation collective (au niveau national et sectoriel), les divers processus engagés, les résultats obtenus et les institutions.. n Diffuser régulièrement une publication, qui traiterait des évolutions de la négociation collective et aborderait des thèmes divers, comme l'efficacité de la dynamique économique, la répartition équitable des revenus, l'égalité, la non-discrimination, le développement de la spécialisation professionnelle, la santé et la sécurité, les relations de travail et l'analyse financière des sociétés. n Prêter une assistance technique et faire bénéficier de son savoir sur la meilleure façon de stimuler l'environnement, afin d'élargir, dans sa forme et sa substance, la négociation collective.; n Redoubler d'effort auprès des multinationales pour qu'elles respectent les droits du travail et la négociation collective sur l'ensemble de leurs chaînes de production. La Déclaration commune BIT/EMN comporte d'utiles indications sur ce point. Des synergies pourraient être trouvées avec le Guide d'orientation de l'OCDE et les points de contact nationaux, et l'on devra se pencher sur la définition d'un nouveau mode de suivi de cette Déclaration. n Suggérer des orientations qui aideraient à concevoir et à fixer des grilles de salaires et des conditions de travail équitables. n Réfléchir à de nouvelles normes internationales qui traiteraient de questions comme l'élargissement de la protection juridique et de la négociation collective (salaires compris) aux travailleurs en situation précaire ou occupant des emplois atypiques. 21 Bureau international du Travail - ACTRAV n Donner une priorité à la coopération technique du BIT et à ses programmes de formation pour renforcer les capacités syndicales dans la négociation collective et favoriser la ratification et la mise en application des normes internationales du travail. n Resserrer la collaboration entre l'ACTRAV Genève et son centre de Turin, afin de mieux traduire l'importante contribution de cette réunion dans une série de mesures et instruments normatifs, à disséminer dans le monde pour servir la cause d'une stratégie globale, répondant, en particulier, aux besoins du mouvement ouvrier. Genève, 15 octobre 2009 22 Célébration du 60e anniversaire de la convention no 98 : le droit d’organisation et de négociation collective au XXIe siècle Liste d'instruments de l'OIT pertinents dans le contexte de la crise Un certain nombre d'instruments de l'OIT a été reconnu par le Conseil d'administration du BIT (de mars 2009) comme étant pertinents dans le contexte de la crise. Le groupe Travailleur et ACTRAV considèrent que la ratification et l'application des normes ci-après ainsi que la promotion des autres instruments sont conformes aux buts du symposium : C. 29 Le travail forcé, 1930 C. 87 La liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 C. 98 Le droit d'organisation et de négociation collective, 1949 C. 100 L'Egalité de rémunération, 1951 C. 105 L'Abolition du travail forcé, 1957 C. 111 La discrimination (emploi et profession), 1958 C. 138 L'Age minimum, 1973 C. 182 Les pires formes de travail des enfants, 1999 C. 122 La politique de l'emploi, 1964 C. 81 L'Inspection du travail, 1947 C. 129 L'Inspection du travail (agriculture), 1969 C. 144 Les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976 C. 94 Les clauses de travail (contrats publics), 1949 C. 95 La protection du salaire, 1949 C. 97 Les travailleurs migrants (révisée), 1949 C. 102 La sécurité sociale (norme minimum), 1952 C. 131 La fixation des salaires minima, 1970 C. 135 Les représentants des travailleurs, 1971 C. 143 Les travailleurs migrants (dispositions complémentaires), 1975 C. 151 Les relations de travail dans la fonction publique, 1978 C. 154 La négociation collective, 1981 C. 155 La sécurité et la santé des travailleurs, 1981 C. 158 Le licenciement, 1982 23 Bureau international du Travail - ACTRAV C. 173 La protection des créances des travailleurs en cas d'insolvabilité de leur employeur, 1992 C. 183 La protection de la maternité, 2000 R. 113 La consultation aux échelons industriel et national, 1960 R. 193 La promotion des coopératives, 2002 R. 195 La mise en valeur des ressources humaines, 2004 R. 198 La relation de travail, 2006 Déclaration de principes tripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale, 1977 (Déclaration MNE) Déclaration de l'OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail et son suivi, 1998 (Déclaration de 1998) Déclaration de l'OIT sur la justice sociale pour une mondialisation équitable, 2008 (Déclaration sur la justice sociale) Pacte mondial pour l'emploi, 2009. 24 ANNEXES - Document de travail 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51 52 53 54 ANNEXES Programme 55 ANNEXES Liste des participants 56 Name Organization e-mail 1. AGBENOU Mr Komlan CSTT- Togo [email protected] 2. ABBASSI Mr Hassine UGTT - Tunisie [email protected] 3. ASAMOAH Mr Kofi TUC - Ghana [email protected] 4. BÄHLER Ms Sara USS-UNIA Suisse [email protected] 5. BARONCINI Ms. Jacqueline IUF - Suisse [email protected] 6. BAUEROVA Mrs Jaroslava CMKOS République tchèque [email protected] 7. BENEDICT Mr Stephen ITUC - Belgique [email protected] 8. BUKETOV Mr Kirill IUF - Suisse [email protected] 9. BURROW Ms Sharan ACTU - Australie [email protected] 10. BUSSER Ms Esther ITUC-GO Suisse [email protected] 11. CASTELLANO LEGUIZAMON PIT-CNT Uruguay [email protected] 12. CATTERSON Mr Jim ICEM - Suisse [email protected] 13. CIBRARIO Ms Daria IUF - Suisse [email protected] 14. CONSALES CARVAJAL Sr Jorge CUT - Chili [email protected] 15. COTTON Mr Stephen ITF Royaume-Uni [email protected] 16. DANNO Mr Hisashige JTUC-Rengo Japon [email protected] 17. DAU Ms Denise Motta CUT- Brésil [email protected] 18. DEBRULLE Ms Andrée ACV-CSC Belgium [email protected] 19. DIALLO Mr Abdoulaye Lelouma OUSA-OATUU France [email protected] 20. DJEMAM Mr Hacene CISA-ICATU Syrie [email protected] ANNEXES Name Organization e-mail 21. EDSTRÖM Mr Ulf LO-Suède [email protected] 22. FRANZ Mrs Silvia ÖGB - Autriche [email protected] 23. GALON Mr Stephan FGTB - Belgium [email protected] 24. GLASSNER Ms Vera ETUI - Belgium [email protected] 25. GONZALEZ Ms Raquel ITUC-GO Suisse [email protected] 26. HOLDCROFT Ms Jenny IMF - Suisse [email protected] 27. JENNINGS Mr Philip J. UNI - Suisse [email protected] 28. JIANG Mr Guangping ACFTU - Chine [email protected] 29. KIM Mr Tae-Hyun KCTU - Corée du Sud [email protected] 30. KING Ms. Chidi PSI - France [email protected] 31. KNEBELER Mr Christophe LCGB Luxembourg [email protected] 32. KRISHNAMURTHY Mr Karthikeyan NTUC Singapour [email protected] 33. LACORTE Mr Vincenzo CGIL - Italie [email protected] 34. MALKAWI Mr Bilal ITF - Jordanie [email protected] 35. MARIANI Mr Fernando UIL - Italie [email protected] 36. MATHUR Mr Mukesh HMS - Inde [email protected] 37. MILLER Prof. Doug ITGLWF Royaume-Uni [email protected] 38. MONE Mr Andrea CISL - Italie [email protected] 39. NAKAJIMA Mr Shigeru JTUC-Rengo Japon [email protected] 40. NGUYEN VAN Mr Ngang VGCL - Vietnam [email protected] 41. NORMAN SCOTT Sr Winston Alfonso CTRN Costa Rica [email protected] 42. ODOUL ASOREY Ms Isabel CGT-FO - France [email protected] 43. ORSATTI Mr Alvaro ITUC-TUCA Brésil [email protected] 57 ANNEXES 58 Name Organization e-mail 44. OTAEGUI JAUREGUI Sra Amaia CC.OO. Espagne [email protected] 45. OVIEDO DE LA TORRE Ms. Osiris WFTU - Suisse [email protected] 46. PHEE Mr Jung Sun ICEM - Suisse [email protected] 47. POLITO Ms Véronique USS-UNIA Suisse [email protected] 48. ROBERT Mr Jacques USS-UNIA Suisse [email protected] 49. ROSSMAN Mr Peter IUF - Suisse [email protected] 50. SANI Mr Abdullah KSBSI Indonesie [email protected] 51. SCHÄRER Ms Corinne USS-UNIA Suisse [email protected] 52. SCHETAGNE Mr Sylvain CLC-CTC Canada [email protected] 53. SENE Mr Abdoulaye UNSAS Sénégal [email protected] 54. STERKEL Dr. Gabriele DGB - VERDI Allemagne [email protected] 55. STRELA Ms Galina FNPR Fédération de Russie [email protected] 56. SUMARYONO Mr Eko SBNIP Indonesie [email protected] 57. TATE Ms Alison ACTU - Australie [email protected] 58. THAUMATURGO CORTIZO Sr Antonio María UGT - Brésil [email protected] 59. TROTMAN Sir Roy BWU - Barbade [email protected] 60. UGBOAJA Mr Emmanuel NLC - Nigerie [email protected] 61. VO VAN Mr Nhat VGCL - Vietnam [email protected] 62. WALDORFF Mr Peter PSI - France [email protected] 63. WANG Mr Tianming ACFTU - Chine [email protected] ANNEXES Name Organization e-mail 64. WELTERS Mr Marc DGB - Allemagne [email protected] 65. ZANG Sr Diego Sebastian CGT - Argentine [email protected] 59