Transport turbulent et auto-organisation dans les plasmas

TURBULENCE ET CONFINEMENT
Pour réaliser la fusion thermo-
nucléaire contrôlée et en ex-
traire de l’énergie, un plasma
de deutérium et tritium doit être
chauffé à une température d’une
centaine de millions de degrés. De
plus, pour atteindre l’ignition, le
plasma doit être maintenu à une den-
sité suffisamment élevée pendant un
temps de confinement suffisamment
long (critère de Lawson).
Le confinement du plasma à
l’aide d’un champ magnétique
intense représente l’une des voies
possibles pour réaliser la fusion
contrôlée. Parmi les différentes géo-
métries du champ magnétique étu-
diées, le tokamak (machine de forme
torique) constitue la configuration la
plus prometteuse (encadré 1). On
distingue trois régions dans le
plasma de tokamak (figure 1) : le
cœur du plasma, siège des réactions
de fusion ; la région dite « de gra-
dient », caractérisée par des gra-
dients importants de densité et de
température ; et la région dite « de
bord », où les gradients sont réduits
par une turbulence forte.
Du fait de la courbure des lignes
de champ magnétique, la source de
chaleur au centre du plasma confiné
et les gradients qui en résultent
engendrent des instabilités dont le
mécanisme est analogue à la thermo-
convection dans des systèmes tour-
nants. Les particules chargées ressen-
tent une force due à la courbure du
champ magnétique. Cette force est
dirigée vers l’extérieur du tore (figure
1). La température est plus élevée au
centre du tore ainsi que la densité, du
fait du confinement magnétique. Il
existe donc inévitablement une zone
située sur le bord extérieur de la
machine torique où la situation est
analogue à celle d’un fluide lourd se
trouvant au-dessus d’un fluide léger
dans le champ gravitationnel de la
terre (instabilité de type Rayleigh-
Taylor, figure 2), la force due à la
courbure jouant le rôle de la pesan-
teur.
24
Mieux comprendre par la simulation numérique
Transport turbulent
et auto-organisation dans
les plasmas de tokamak
Dans un tokamak, machine conçue pour réaliser la fusion thermonucléaire contrôlée, le
plasma est confiné par un fort champ magnétique. Il est le siège de fluctuations turbulentes
qui nuisent à son confinement. Les observations expérimentales et les simulations
numériques révèlent que le transport de l’énergie et des particules associé à ces
fluctuations turbulentes est intermittent et non diffusif. Quels sont les mécanismes qui
régissent le transport intermittent dans les plasmas magnétisés ? Cette question est
abordée ici grâce à des modèles analogues à la thermo-convection dans les fluides. Ces
modèles débouchent sur une meilleure prédiction et un meilleur contrôle de la qualité du
confinement dans les machines à fusion.
Laboratoire de physique des interactions
ioniques et moléculaires, Équipe dynamique
des systèmes complexes, UMR 6633 CNRS –
université de Provence, Centre de St. Jérôme,
Case 321, 13397 Marseille cedex 20.
Association Euratom – CEA sur la Fusion,
CEA Cadarache, 13108 St-Paul-lez-Durance.
r
ϕθ
R
p
r
B
instabilités
courbure
magnétique à r
ligne de champ
ligne de champ
magnétique à rq=2
q=3
cœur bord
gradients
source de chaleur
turbulence au bord
Figure 1 - Géométrie d’un tokamak. Les positions radiales rq=2et rq=3correspondent aux surfaces
magnétiques sur lesquelles les lignes de champ font respectivement 1/2et 1/3de tour dans la direction
poloïdale (angle θ) pour un tour dans la direction toroïdale (angle ϕ). p(r)désigne la pression en fonc-
tion du petit rayon r.
Les équations décrivant cette
instabilité sont formellement équiva-
lentes aux équations décrivant une
thermo-convection bi-dimension-
nelle (convection de Rayleigh-
Bénard). Lensemble des résultats
obtenus pour la convection de Ray-
leigh-Bénard sapplique donc à ce
modèle, en particulier lexistence
d’événements de transport transi-
toires à grande échelle pour cer-
taines valeurs des paramètres (les
conditions aux limites jouent aussi
un rôle important). Ces transitoires
peuvent prendre la forme de
«plumes » ou de «bulles ».
Les instabilités induisent des fluc-
tuations turbulentes de densité et de
température qui peuvent, dans la
région du bord du plasma, atteindre
des amplitudes relatives avoisinant
50 %. Ces fluctuations sont néfastes
puisquelles augmentent considéra-
blement le transport de matière et de
chaleur du cœur vers le bord du
plasma, diminuant les gradients et
réduisant ainsi le temps de confine-
ment. En effet, ce transport turbulent
peut dépasser de plusieurs ordres de
grandeur le transport dû aux colli-
sions.
Bien que le problème du confine-
ment et de la turbulence dans les
tokamaks soit très complexe du fait
de la géométrie, des différentes com-
posantes du plasma, de la structure
du champ magnétique, etc., des
modèles ont été développés durant
cette dernière décennie qui reprodui-
sent correctement les observations
expérimentales. Lobjectif de ces
modèles de transport est daider au
dimensionnement de futurs réacteurs
à fusion thermonucléaire.
AUTO-ORGANISATION DU PLASMA :
TOURBILLONS ET FLUX ZONAUX
Dans l’étude du confinement et
du transport turbulent dans les toka-
maks, la région du bord du plasma
est particulièrement importante car
elle est le siège dune turbulence
forte. Les simulations présentées
dans la suite ont été effectuées dans
cette région, mais dautres simula-
tions effectuées dans la région plus
interne (dans laquelle des gradients
de température jouent un rôle impor-
tant) révèlent des effets similaires.
Linstabilité engendre une crois-
sance exponentielle des fluctuations
initiales jusqu’à ce que le système
atteigne un état statistiquement sta-
tionnaire par l’échange d’énergie
entre les différents modes instables
et stables. Cet échange est gouverné
par des processus non linéaires.
L’état stationnaire est caractérisé par
lexistence de structures organisées
ou cohérentes (tourbillons) qui
engendrent un transport turbulent
supérieur au transport dû aux colli-
sions entre particules chargées.
25
Mieux comprendre par la simulation numérique
g
instablestable
Figure 2 - Un fluide lourd (en bleu foncé) se
trouvant au-dessus d’un fluide léger (en bleu
clair) et soumis à la gravitation gest instable
(instabilité de Rayleigh-Taylor).
Encadré 1
GÉOMÉTRIE D’UN TOKAMAK ET VITESSES DE DÉRIVE
Dans un tokamak, un plasma d’hydrogène ou deutérium est
confiné dans une enceinte métallique torique. Des bobines
externes induisent un champ magnétique dirigé le long de la
grande circonférence (direction toroïdale). Un courant est
induit dans la même direction via l’effet transformateur. En
effet, le plasma constitue la bobine secondaire d’un
transformateur dont les bobines primaires sont placées à
l’extérieur du tore. Le courant toroïdal a deux effets : 1. il
chauffe le plasma d’hydrogène ou deutérium via l’effet Joule
une fois le plasma créé par un claquage ; 2. il induit une
composante supplémentaire du champ magnétique, dirigée le
long de la petite circonférence (direction poloïdale, figure 1).
Les lignes de champ magnétique décrivent ainsi des hélices
s’enroulant sur des surfaces toriques emboîtées
(surfaces magnétiques). Le taux d’enroulement des lignes est
caractérisé par un paramètre 1/q(r)qui dépend du petit
rayon rdu tore. La variation du taux d’enroulement en
fonction de rimplique que le champ magnétique est cisaillé
dans la direction radiale.
Les particules chargées du plasma exécutent un mouvement de
giration autour des lignes de champ magnétique. Elles sont de
plus accélérées le long des lignes de champ par la tension qui
engendre le courant toroïdal. Ainsi, les particules sont
confinées sur les surfaces magnétiques. Néanmoins, elles peu-
vent être déconfinées et quitter ces surfaces à la suite de colli-
sions ou de dérives perpendiculaires. Ces dérives sont engen-
drées par l’inhomogénéité de la pression (dérive dite
« diamagnétique ») et par des champs électriques locaux
engendrés par la turbulence. La vitesse de dérive
diamagnétique vest de signe opposé pour les électrons et les
ions. Le courant associé diminue le champ magnétique de
confinement. La vitesse de dérive électrique (ou dérive ExB)
vEa le même signe pour les deux espèces. Dans une
description magnétohydrodynamique (MHD) du plasma, on
utilise la vitesse du centre des masses du fluide, donnée par
l’expression
v=mivi+meve
mi+me
ou miet me,viet vesont respectivement la masse et la vitesse
des ions et des électrons. Le rapport de masses me/miétant
faible, la vitesse vcorrespond approximativement à la vitesse
des ions (vvi).
Comme le transport turbulent
dégrade le confinement, la réduction
et le contrôle de la turbulence sont
des enjeux majeurs pour le fonction-
nement dun réacteur. Dans ce
contexte, un rôle déterminant est
joué par des écoulements cisaillés du
plasma dans la direction poloïdale
(le long de la petite circonférence),
ou flux zonaux. Ces écoulements ont
tendance à déchirer les tourbillons
(figure 3). Les flux zonaux sont
auto-produits par la turbulence
puisque les fluctuations de vitesse
engendrent ces écoulements par des
couplages non linéaires. Il sagit là
dun mécanisme dauto-régulation
de la turbulence. Les flux zonaux
apparaissent dans la turbulence asso-
ciée à des systèmes tournants et sont
aussi observés en turbulence hydro-
dynamique (atmosphérique). Le jet-
stream en représente un exemple
(encadré 2).
Lexistence de flux zonaux est
révélée par des simulations 3D de la
turbulence magnétohydrodynami-
que au bord dun plasma de toka-
mak. La figure 4 montre des profils
de la vitesse magnétohydrodyna-
mique poloïdale (encadré 1). Ces
profils sont calculés en moyennant
spatialement la vitesse sur les sur-
faces magnétiques (angles θet ϕ).
On observe lexistence de quatre
zones dans le domaine radial dans
lesquelles la direction de l’écoule-
ment moyen (en dautres termes, le
signe de la vitesse) est différente. Il
sagit là dune rotation cisaillée du
plasma. Superposé à l’écoulement
moyen d’équilibre (figure 4a), on
observe des fluctuations temporelles
(figure 4b). Ces fluctuations régulent
les événements de transport à grande
échelle que nous allons maintenant
décrire.
TRANSPORT INTERMITTENT
La théorie du transport turbulent
de température, de densité ou de
pression dans les plasmas magnéti-
sés suppose demblée lexistence
dun coefficient de diffusion
D=λ2
cc,où λcet τcsont respec-
tivement une longueur de corrélation
et un temps de corrélation typiques
des fluctuations turbulentes analy-
sées. Cette description locale du
transport implique lexistence de
deux échelles spatiales différentes :
une échelle λccaractérisant les fluc-
tuations et une échelle Lassociée à
un profil moyen (longueur de gra-
dient). Néanmoins, la description du
transport turbulent par un processus
de diffusion est remise en question
par des expériences qui mettent en
évidence un caractère non diffusif du
transport. En effet, de récentes
observations dans les tokamaks
montrent que certaines impuretés
(atomes arrachés à la paroi) arrivent
26
Figure 4 - Profil radial de la vitesse de l’écoulement moyen poloïdale vθ(r,t)[moyenne sur les surfaces
magnétiques v(r,t)θ,ϕ =vθ(r,t)ˆ
θ]. a) La moyenne temporelle de ce profil. b) Sa dynamique. Les
quantités sont représentées en unités normalisées. L’unité de temps correspond à un temps caractéristique
de l’instabilité de l’ordre de la micro-seconde. Le rapport entre l’échelle spatiale caractéristique (per-
pendiculaire aux lignes de champ magnétique) de l’ordre du millimètre et ce temps détermine l’unité de
vitesse de l’ordre d’un kilomètre par seconde.
direction radiale
direction poloïdale
tourbillon turbulent
écoulement moyen cisaillé
Figure 3 - Illustration du déchirement des tourbillons turbulents par un écoulement moyen cisaillé.
(a)
(b)
27
Mieux comprendre par la simulation numérique
à pénétrer dans le cœur du plasma en
un temps beaucoup plus bref que le
temps de diffusion. Les simulations
numériques, fondées sur la descrip-
tion magnétohydrodynamique du
plasma (encadré 2), sont en accord
avec ce phénomène car elles révèlent
la présence de bouffées de pression
se propageant de manière balistique
dans la direction radiale. Il est
important de noter que, dans ces
simulations, lhypothèse dune sépa-
ration d’échelle entre les fluctua-
tions et le profil a été abandonnée et
la rétroaction des fluctuations sur le
profil est prise en compte dune
manière cohérente. Ainsi, l’évolu-
tion temporelle du profil radial de
pression est décrite par une équation
de transport,
tp(r,t)=−
rturb(r,t)
+
rχcoll(r)
rp(r,t)+S(r). (1)
Dans le côté droit de l’équation (1)
figurent le flux turbulent de pression
turb (gouverné par les fluctuations
turbulentes), le flux collisionnel
(caractérisé par un coefficient de dif-
fusion χcoll décrivant le transport
diffusif associé aux collisions entre
particules chargées) et une source S
(modélisant le flux de chaleur ou
de particules venant du cœur du
plasma). Cest par le terme
turb =˜p˜vrque l’équation de
transport est couplée aux systèmes
3D d’équations aux dérivées par-
tielles qui régissent la dynamique
des fluctuations turbulentes de pres-
sion ˜pet de vitesse ˜v.
On observe des bouffées de faible
pression se propageant de lextérieur
vers le centre du plasma ainsi que des
bouffées de forte pression allant dans
le sens inverse (figure 5). Ces bouf-
fées augmentent le transport de
matière et de chaleur et apparaissent
de manière intermittente. Elles sont
particulièrement néfastes pour le
confinement du plasma car elles
court-circuitent la région de faible
pression située au bord du tokamak et
la zone de haute pression localisée
dans le «cœur du plasma » (figure 6).
La propagation de bouffées est liée
à lapparition de cellules de convec-
tion radialement allongées, localisées
dans la direction poloïdale (figure 6).
Ces tourbillons sont analogue à leffet
thermo-convectif discuté plus haut.
Au bord des cellules allongées, la
vitesse radiale est élevée dans une
région radialement étendue. Ainsi,
elles représentent un «canal » pour la
propagation des bouffées. Du fait de
la grande conductivité électrique le
long des lignes de champ magné-
tique, les cellules suivent ces lignes
de champ dans la direction toroïdale.
En supprimant artificiellement
dans le code numérique le terme qui
couple les fluctuations de vitesse à
l’écoulement moyen, on peut mettre
en évidence linfluence des flux
zonaux sur la dynamique des bouf-
fées. En comparant des simulations
sans et avec flux zonaux, on constate
une différence dans la fréquence
dapparition et lamplitude des bouf-
fées intermittentes : la fréquence est
plus importante mais les amplitudes
sont plus faibles en présence des flux
zonaux. Des analyses détaillées révè-
lent le mécanisme suivant pour
lauto-régulation du transport par les
flux zonaux : la croissance dune
bouffée est limitée par un flux zonal
engendré au même endroit avec un
certain décalage temporel. Ainsi, la
structure de vitesse associée à la
bouffée est déchirée par le cisaille-
ment associé au flux zonal et natteint
pas lamplitude maximale quelle
aurait en labsence de flux zonaux.
BARRIÈRES DE TRANSPORT
Il existe des régimes de fonction-
nement du tokamak caractérisés par
lapparition dune zone au voisinage
de laquelle la turbulence est réduite
par un fort cisaillement de l’écoule-
ment d’équilibre (en dautres termes :
un flux zonal stationnaire). Dans cette
région, le transport est réduit au trans-
port diffusif dû aux collisions. En fait,
en moyennant l’équation (1) sur le
temps et en intégrant sur la direction
radiale, l’équilibre des flux moyens
s’écrit
¯
turb(r)χcoll(r)
r¯p(r)=
r
rmin
S(r)dr(2)
Figure 5 - Flux radial turbulent de pression
(unités normalisées) en fonction du petit rayon
et du temps. Les maxima en forme de droites
inclinées correspondent aux bouffées de faible
ou forte pression se propageant dans la direc-
tion radiale.
Figure 6 - Pression (unités normalisées) à un
temps donné dans un plan poloïdal (même repré-
sentation que dans la figure 1). a) L’anneau repré-
sente le bord du plasma, le cœur n’est pas simulé.
Au milieu à droite de cet anneau, on observe une
bouffée froide qui entre du bord jusqu’au cœur.
b) Un agrandissement de cette bouffée.
(a)
(b)
q=2 q=2.5 q=3
50
100
150
radius
time averaged pressure
Figure 7 - Profil de pression, moyenné en temps,
pour un écoulement d’équilibre fortement cisaillé
autour de q=2.5. Par comparaison, en poin-
tillé, le profil pour le cas présenté figure 5.
avec ¯
turb =0et (∂ ¯p)/(∂r)=0à
r=rmin. Comme la source est loca-
lisée et constante dans le temps,
l’équation (2) montre que la somme
des deux flux (turbulent + collision-
nel) est constante. En imposant un
écoulement d’équilibre avec un fort
cisaillement local, on arrive à réduire
localement le transport turbulent. En
supposant une diffusivité collision-
nelle constante, la réduction du flux
turbulent doit être compensée par
une augmentation de la valeur abso-
lue du gradient de pression. Ainsi,
un fort gradient de pression est créé
qui constitue une barrière de trans-
port (figure 7). Ces régimes sont
aussi observés dans des expériences.
Ils apparaissent spontanément pour
des puissances de chauffage au-
dessus dun seuil critique. Ce type de
transition peut être aussi produit avec
des moyens extérieurs, tels que des
sondes émissives induisant un champ
électrique au bord du tokamak. Ce
dernier engendre, via la dérive élec-
28
Encadré 2 TURBULENCE PLASMA
ET TURBULENCE HYDRODYNAMIQUE
La turbulence dans un plasma magnétisé offre de nombreuses
analogies avec une turbulence hydrodynamique. Dans le cas
hydrodynamique standard, le champ de vitesse vest la solu-
tion de l’équation de Navier-Stokes
ρ(t+v·∇
)v=−p+ρν2v,
pdésigne la pression et ρla densité de masse et chaque
élément de fluide est soumis aux forces de pression et de
viscosité (résultant des mécanismes de collisions entre
particules). Dans le cas bidimensionnel incompressible
(∇·v=0), la vitesse est décrite par un potentiel de vitesse φ
tel que v=
z×∇φ.
Dans le cas où la densité de masse est uniforme, on obtient à
partir de l’équation de Navier-Stokes une équation sur la
vorticité =∇
2φqui est une quantité caractérisant
l’intensité des tourbillons dans l’écoulement (=
z·∇×v),
(t+
z×∇φ)2φ=ν4φ. (1)
Regardons maintenant le plasma d’électrons et d’ions. Les
protons sont supposés froids, les électrons ont une
température Teq uniforme. A l’équilibre, électrons et protons
ont la même densité neq, caractérisée par un gradient
perpendiculaire au champ magnétique (plasma confiné). La
dynamique du champ de vitesse de chaque espèce de charge
es, masse mset densité nsest gouvernée par l’équilibre des
forces, décrite par une équation de Navier-Stokes généralisée
nsms(t+vs·∇
)vs=
−∇ ps+nses(E+vs×B)+nsmsν2vs,
où les termes représentent dans l’ordre : l’inertie, la force de
pression, la force de Laplace et une viscosité ν. Le couplage
entre les espèces chargées est assuré par le champ électrique
autocohérent E=−φ, où le potentiel électrostatique φest
équivalent (à un facteur de normalisation près) au potentiel
de vitesse de la dérive électrique vE=(E×B)/B2
=B/B×∇φ. Si l’on suppose les électrons très mobiles le
long du champ magnétique, la projection le long du champ
magnétique de cet équilibre des forces impose une réponse
adiabatique de la densité électronique
neneq
neq =e
Teq φ.
En principe, la cohérence est assurée par l’équation de
Poisson. En fait, l’échelle des fluctuations étant usuellement
plus grande que l’échelle d’écrantage de Debye, le plasma est
localement quasi neutre. La combinaison des réponses en den-
sité ionique et électronique et la condition de quasi-
électroneutralité conduisent à une équation qui décrit la
dynamique non linéaire des fluctuations de potentiel,
(t+
z×∇φ)φρ2
s2φ=−v·∇φνρ2
s4φ, (2)
v=− B
neqeiB2×∇neq Teqest la vitesse diamagné-
tique électronique. La dynamique est réduite au plan
transverse aux lignes de champ magnétique en supposant que
toutes les fluctuations le long des lignes du champ sont
rapidement atténuées du fait de la faible résistivité électrique
dans cette direction. L’équation (2) est très utilisée en
turbulence plasma (équation de Hasegawa-Mima). Le
potentiel électrique joue ici un rôle analogue à celui du
potentiel de vitesse dans l’équation de Navier-Stokes. Dans la
limite des petites longueurs d’onde, et en l’absence de gra-
dient de densité d’équilibre, l’équation d’Hasegawa-Mima
s’identifie à l’équation de vorticité hydrodynamique (1).
La relation de dispersion linéaire de l’équation d’Hasegawa-
Mima est celle des ondes de dérive (ondes générées par le
mouvement de dérive électrique et diamagnétique des
particules ; figure). Il existe une analogie entre plasma
magnétisé et fluide tournant, la force de Coriolis jouant un
rôle comparable à celui de la force de Laplace
(tableau). De ce fait, l’équation d’Hasegawa-Mima, sous le
nom d’équation de Charney, décrit également la dynamique
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