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Chapitre III
Absorption
Distribution
Métabolisme
Elimination
du
Médicament
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Absorption, distribution, métabolisme et élimination d’un médicament
La pharmacologie étudie les interactions entre le médicament et les tissus du corps
humain. Elle comprend deux volets : la pharmacocinétique d’une part, et la pharmacodynamie
d’autre part qui étudie le mécanisme d’action.
La pharmacocinétique étudie le devenir du médicament dans l’organisme au cours du
temps. Elle comprend donc l’étude de l’absorption, de la distribution, du métabolisme, de
l’élimination des médicaments dans l’organisme (concept ADME).
Avant d’aborder ces phénomènes, il est important de considérer quelques mécanismes
par lesquels les principes actifs doivent traverser les membranes cellulaires pour atteindre leur
cible. Les propriétés physico-chimiques des molécules et des membranes influencent ce
transfert.
1 Absorption
Administré par voie orale, le médicament solide devra se déliter (= se disperser), puis
le principe actif devra se dissoudre dans le fluide gastrique. Ce n’est que sous forme soluble
que le principe actif pourra franchir la membrane (paroi de l’estomac, de l’intestin, membrane
cellulaire…). La solubilité aqueuse du principe actif favorisera sa résorption. Déposé sur la
peau, le principe actif devra franchir la peau avant d’être résorbé.
Au niveau gastro-intestinal, la première barrière qui se présentera sera la membrane
luminale des cellules gastriques ou entériques. Les cellules humaines possèdent une
membrane plasmique qui est la barrière principale que rencontre le médicament. Celle-ci est
composée d’une bicouche lipidique caractérisée par des chaînes hydrocarbonées orientées à
l’intérieur formant une phase hydrophobe continue et de têtes hydrophiles orientées vers
l’extérieur. Le mouvement des molécules lipidiques individuelles dans la bicouche assure sa
fluidité à la membrane, sa flexibilité, sa haute résistance électrique, et une imperméabilité
relative aux molécules hautement polaires. Les protéines membranaires enfoncées dans la
bicouche servent de récepteurs pour les différents signaux électriques et chimiques. Elles
fournissent des cibles sélectives pour l’action du principe actif. La membrane cellulaire est
pratiquement imperméable. Les principes actifs seront donc résorbés…
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…par diffusion passive :
Pour traverser la membrane cellulaire par diffusion passive, le principe actif doit
posséder des caractéristiques physico-chimiques favorables au franchissement de la
membrane. Ces caractéristiques sont entre autre le poids moléculaire, sa solubilité en milieu
aqueux, son ionisation, et sa lipophilie.
Un poids moléculaire inférieur à 500 Da est un critère favorable au franchissement des
membranes. Les molécules plus volumineuses ne franchiront que très difficilement, voire pas
du tout les membranes.
Plus la solubilité du principe actif sera élevée, plus grande sera sa capacité à franchir
les membranes
La lipophilie d’un principe actif est sa capacité à se dissoudre préférentiellement dans
une phase « grasse ». Le caractère lipophile d’un principe actif est caractérisé par la présence
de groupement CH3-, -CH2-, =CH-, noyaux aromatiques. Au contraire, le caractère hydrophile
d’un principe actif caractérise sa propension à se dissoudre dans un milieu aqueux. Les
groupements hydrophiles sont les groupements OH, -COOH, >C=O,… et les groupements
ionisés de type COO- ou encore NH3+ par exemple. Un principe actif est caractérisé par sa
balance lipophile/hydrophile est exprimé par son coefficient de partage (P) qui exprime le
rapport entre la quantité de principe actif dissout, à l’équilibre, dans la phase grasse constituée
de n-octanol et l’eau, éventuellement tamponnée. Plus ce rapport sera élevé, plus la molécule
sera lipophile. Pour avoir de bonnes chances de franchir les membranes cellulaires, le log P
doit être compris entre 1 et 5
Enfin, puisque l’ionisation est défavorable à la lipophilie, elle s’opposera au passage
des membranes par diffusion passive qui représente le mécanisme le plus fréquent de
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résorption des médicaments. L’ionisation du médicament sera étroitement liée au pH du
milieu environnant. Dans l’estomac, le pH est fortement acide (pH = 1), au niveau du
duodénum, est plutôt légèrement alcalin (pH = 8), tandis qu’au niveau sanguin et
extracellulaire il est neutre (pH = 7.4). La distribution transmembranaire d’un principe actif
ionisable est ainsi terminée par sa constante d’acidité (pKa) et par le gradient de pH
transmembranaire. Prenons le cas de l’aspirine dont le pKa de la fonction carboxylique est de
3.5. En milieu gastrique (pH 1), elle est non ionisée et donc bien résorbée, tandis qu’au
niveau du duodénum (pH 7.4), après vidange gastrique, elle est totalement non-ionisée et très
mal résorbée. Après avoir franchi la muqueuse gastrique, elle se retrouve au niveau du
liquide extracellulaire (pH 7.4) où elle est ionisée et n’a aucune tendance à franchir la
membrane en sens opposé.
D’autres facteurs vont également favoriser la résorption passive telle que la surface
membranaire exposée.
par transport actif.
La diffusion passive est un processus de transport impliquant un transporteur
spécifique qui opère selon le gradient de concentration, et ce sans dépense d’énergie. Ainsi,
lorsque des molécules (ionisées, peu lipophiles,…) ne peuvent traverser la membrane, leur
transfert peut être effectué par ce processus de diffusion active. Dans ce cas, une protéine de
transport membranaire va reconnaitre spécifiquement le principe actif comme étant
structurellement proche de son substrat endogène, le prendre en charge et lui faire traverser la
membrane. C’est le cas de la L-dopa (Aldomet®), un anti-Parkinsonien, dont la lipophilie est
médiocre. Par analogie de structure avec certains acides aminés aromatiques, il est pris en
charge par le même transporteur. C’est également vrai pour le fluorouracile (Fluroblastine®,
Estomac
pH 1,5
Espace extracellulaire
Plasma
pH 7.4
HA A- + H+
A- + H+HA
pKa = 4
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Fluracedyl®), un anti-cancéreux, dont la structure est proche de l’uracile, base purique
intervenant dans la synthèse de l’ARN. Ce processus spécifique semble jouer un rôle mineur
dans le transport du médicament.
Dans certains cas, le transport se fait contre le gradient de concentration. Dans ce cas,
l’énergie est fournie par l’hydrolyse de l’ATP (ATP ADP + Pi + 8 kcal.mol-1). Ce mode
de transport peut expliquer l’excrétion rénale et biliaire de nombreux médicaments.
1.1 Administration entérale (ou orale)
L’administration orale est le mode d’administration le plus commun d’un médicament.
Le site d’absorption peut être : buccal (sub-lingual), gastrique ou intestinal. Ce mode
d’administration est en outre plus sûr, le plus rapide et le plus économique. Néanmoins, il
présente certains désavantages. Il demande la coopération du patient. Certains médicaments
en raison de leurs propriétés physico-chimiques ne peuvent être administrés par ce mode.
D’autres médicaments sont détruits par les enzymes digestives au pH faible de l’estomac
(insuline par exemple) ou encore présentent des irrégularités dans l’absorption ou propulsion
en présence de nourriture ou autres médicaments. Le mauvais goût ou la mauvaise odeur d’un
médicament doivent être masqués lorsque cette voie est utilisée.
Une fois le médicament administré, l’absorption de ce dernier à partir du tractus
gastro-intestinal est régie par plusieurs facteurs dont la surface absorbante, le flux sanguin,
l’état physique du médicament et sa concentration au site d’adsorption.
Lorsque le médicament est dispersé (pour une forme solide), puis dissous, le principe
actif peut être absorbé. Son absorption sera favorisée lorsqu’il est sous sa forme non ionisée
et/ou sous une forme lipophile.
En théorie, un principe actif de type ‘acide faible’ sera bien absorbé au niveau de
l’estomac le pH est de 1 car il sera non-ionisé. Au contraire, une ‘base faible’ sera bien
absorbée au niveau du duodénum ou de la partie haute de l’intestin où le pH varie de 8 à 7.
L’estomac, qui est constitué d’une membrane épaisse avec une surface petite et une
haute résistance électrique, a pour fonction première la digestion. Et donc dans des conditions
normales, la vidange gastrique est rapide et le rôle de l’estomac dans l’absorption du
médicament est modeste. Par contre, la surface de l’intestin grêle (= épithélium) est fine avec
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