facto la condamnation du médecin à indemnisation. Encore faut-il que la perte de la
faculté qu'aurait eue le patient, s'il eût été informé, de refuser l'intervention lui ait causé
un préjudice certain (Cour de Cassation, 7 octobre 1998 : arrêt Rozec).
L'information des malades ne va pas de soi. Elle est exposée à de nombreuses difficultés
et se heurte à de nombreux écueils. Le cadre restreint de ce commentaire ne permet pas
d'en faire le recensement ni de développer les conseils visant à les résoudre ou à les
éviter. On se contentera de renvoyer le lecteur à un petit ouvrage pratique dont c'est
précisément l'objet.595 ) (voir note 2).
4- Diagnostic ou pronostic graves
À ce devoir d'information du patient il est une exception traditionnelle- formulée à
l'article 42 de la précédente édition du code et reprise dans cet article 35-, à la suite de
l'énoncé du principe : c'est celle qui autorise, pour des raisons légitimes et dans son
intérêt, à tenir un malade dans l'ignorance d'un diagnostic ou d'un pronostic graves.
Le médecin souhaite informer complètement son patient. Mais, dans certains cas, le
médecin peut juger que la révélation d’un diagnostic aurait un effet dévastateur ou que
celle d’un pronostic très grave serait dangereuse et malfaisante. Le médecin ne doit pas
semer le désespoir. Non seulement les médecins, mais aussi les familles des malades,
ont compris ce principe. Cependant l’évolution des mentalités et un meilleur abord
psychologique des malades ont beaucoup restreint aujourd’hui le champ du « silence
charitable ». Il ne se résout alors à cacher la vérité, de préférence temporairement, que
pour des raisons tenant au malade – et non, par exemple à cause de la demande d’un
proche – qu’il pèse en conscience. Dans cette appréciation entrent en ligne de compte le
degré de certitude du médecin, la personnalité du malade, le risque de détresse ou de
désespoir.
Ce principe est cependant soumis à une importante restriction, si le patient expose des
tiers à un risque de contamination. Cette précision, inspirée du cas du sida, mais qui vaut
pour d'autres affections transmissibles ou anomalie génétique grave révélée par l’examen
des caractéristiques génétiques d’une personne (voir note 3) s'impose en raison de la
responsabilité du patient comme des intérêts de santé publique. Quel que soit en effet le
traumatisme qui peut résulter d'une telle révélation, on ne saurait la cacher au patient,
en le laissant exposer ses proches ou ses relations à une regrettable contamination, qu'il
pourrait être le premier à se reprocher. Dès lors il est indispensable, et dans les meilleurs
délais, de l'informer de son caractère contaminant et de ses conséquences, notamment
quant aux précautions à prendre vis-à-vis de son entourage. Cela pourra nécessiter
plusieurs entretiens.
Les progrès de la médecine font que certains diagnostics jadis désespérants ne sont plus
aujourd'hui synonymes d'incurabilité. Il n'est plus question de taire, par exemple, un
diagnostic de tuberculose.
Dans certains pays, il est habituel d'annoncer sans trop de précautions un diagnostic de
cancer. Nombreux sont les exemples dans lesquels ce verdict a été brutalement annoncé
; quelquefois même il l'a été à tort, l'évolution ayant fait rectifier plus tard le diagnostic.
C'est une façon de faire qui dans notre pays est imprudente. Mais, il est vrai que de plus
en plus, à la faveur des espoirs qu'autorise le progrès, certains diagnostics, de cancer par
exemple, peuvent et doivent être dits au malade, parce que la conséquence n'est plus
l'incurabilité constante et que le malade a besoin de cette information pour s'adapter à la
réalité et se soumettre sans retard au traitement utile.
5- Pronostic fatal
Lorsque le pronostic est fatal et que la vie est menacée à brève échéance, le patient peut
aussi avoir besoin de le savoir, parce qu'il est le premier concerné ou qu'il a des
dispositions à prendre en vue de sa probable disparition. D'une façon générale
l'authenticité de la communication est un élément important de la confiance.
Mais il y a la façon de dire, qui compte beaucoup. Ou de laisser deviner. Le cœur comme
la raison et l'expérience dictent comment il faut s'y prendre, pour rendre service sans
désespérer, pour rester proche de la vérité sans abandonner.