
des nations” (Bémidbar 23, 9) ou bien encore “Ce peuple qui se lèvera comme 
un lion  et  écrasera  les provinces  de  Moav”  (Bémidbar 23,  24)  et tant  d’autres 
similaires, cette haine camouée derrière les compliments. Et bien sûr ‘Amalek 
dans le désert, qui, dès le don de la Torah, décernera la dimension particulière 
de ce peuple au point de vouloir l’exterminer. Cependant, il est vrai que depuis 
ces trois cas chroniques, nous n’entendons plus parler d’antisémitisme jusqu’au 
début du deuxième Temple, justement avec l’affaire Aman. Il y a deux raisons 
à cela. La première est que l’antisémitisme n’est possible que dans un contact 
direct entre Israël et les nations, autrement dit, lorsque nous sommes en exil. La 
seconde est que cette hostilité des nations ne se réveille que lorsque nous nous 
distinguons en tant que Juifs par nos actes, notre comportement et notre identité 
spécique. Or, durant toute la période du Premier Temple, nous nous sommes 
adonnés à l’idolâtrie, aux incestes, à l’assassinat, dans la meilleure tradition des 
peuples dépravés de l’époque. Alors pourquoi s’en prendraient-ils à nous alors 
que nous réussissions ‘brillamment’ à nous comporter comme eux?
Justement,  le  fait  que  Pharaon  et  Bil’am  relèvent  du  plus  pur  antisémitisme 
prouve  que  ce  phénomène  est  bien  antérieur  à  ce  que  croient  les  historiens. 
Simplement, durant certaines périodes, l’antisémitisme se résorbe pour diverses 
raisons.  Notre  peuple n’avait  jamais  compris cela,  et  pendant longtemps,  il  a 
même  refusé  de  le  comprendre.  Seule  l’apparition  de  Aman,  sur  la  scène  de 
l’histoire,  va  provoquer un  bouleversement intellectuel  dans  la conscience  de 
notre peuple au point que celui-ci nira par accepter la Torah de bon gré, tel que 
le précisent nos Sages dans le traité de Shabbat.
L’avènement de Pourim
L’essence de ce bouleversement se précise par le biais d’une question que nos 
sages, dont l’expérience en antisémitisme virulent n’était que trop riche, se sont 
posé concernant Mordékhaï. Comment se fait-il que celui-ci ait mis en danger 
tout le peuple juif en refusant de se prosterner devant Aman? Rabbi Abraham 
Ibn Ezra répond à la question en nous précisant qu’en tant que proche du roi, 
quitter son poste lui aurait coûté la vie. Rabbi Moshé Laskar, répond quant à lui, 
sur la base du traité de Sanhédrin (61b), que Aman s’était présenté en tant que 
divinité et, de surcroît, portait des idoles sur son poitrail. Se prosterner devant 
lui devenait idolâtrie. Permettez-moi de dire que je suis personnellement surpris 
par la question. Tous nos Sages étaient des personnes de grande envergure et 
nous  leur  devons  un  respect  illimité.  Mais  ici,  nous  éprouvons  une  certaine 
difculté à comprendre leur question. Pourquoi ? Justement parce que c’est très 
exactement ce qui s’est passé: pour la première fois dans son histoire on décèle 
cette phénoménologie étrange selon laquelle il suft qu’un seul juif commette