La corruption :
alternative au
retrait financier
de Pékin ?…
… ou réponse à
la course aux
taux de croissance
élevés ?
Le phénomène
devenu collectif
est de plus en
plus visible,…
… attise le
mécontentement
des ruraux qui
le font savoir,…
… creuse les
inégalités
sociales,…
… et pénalise la
qualité de la
croissance.
provinces. Les resserrements de budget a amené les dirigeants locaux à
chercher de nouvelles sources de financement en empruntant implicitement les
chemins de la corruption.
D’autre part, cette autonomie financière accrue des provinces
chinoises s’est accompagnée d’une dépendance non moins forte vis-à-vis des
taux de croissance. Elle explique sans doute pour une bonne part pourquoi le
monde politique et les milieux d’affaires locaux sont devenus si imbriqués
faisant de la corruption rampante un acteur clé de l’activité économique locale.
Les bons résultats de la fin d’année en matière de croissance économique
constituent avant tout, un véritable sésame pour grimper dans l’échelle du
Parti. Les cadres, quelle que soit leur position dans la hiérarchie, sont prêts à
tout pour l’acquérir.
Annexement, la course à l’accumulation engagée entre les provinces a
laissé peu de place aux systèmes redistributifs, aux préoccupations
environnementales ou à l’efficacité énergétique, sujets pourtant au cœur du
programme qui sera présenté par Hu Jintao lors du Congrès National du Parti
en mars 2006. Il sera intéressant de suivre dans quelle mesure les directives
fixées dans le programme 2006-2010 seront appliquées par les autorités
locales.
En attendant, le slogan « Il est glorieux de s’enrichir » de 1992 se
solde treize ans plus tard par une distribution de la richesse des plus inégales.
La corruption rampante n’y est pas étrangère. Malgré tous les efforts déployés
par Hu Jintao depuis 2002, le jeu économique apparaît durablement biaisé aux
dépens d’une fraction toujours plus large de la population chinoise. Dans les
années 80, la corruption restait encore relativement marginale car individuelle.
Depuis le milieu des années 90, elle concerne des collectivités entières ce qui
amplifie à la fois le phénomène et sa visibilité.
En dépit du filtre de la censure, les exemples de corruption affluent et
sont abondamment commentés sur Internet et dans la presse écrite - Le
Quotidien du Peuple, organe de presse officiel incontournable, s’en fait même
parfois l’écho, c’est dire ! La stratégie de contournement des autorités
centrales qui revient à attiser le souffle du nationalisme n’y peut rien. La
capacité à produire de la croissance qui était devenue le nouvel étendard
brandit par Pékin non plus. Pour un nombre grandissant de Chinois qui n’ont
plus confiance dans les autorités locales, cela ne suffit pas. Un paysan dont les
terres viennent d’être spoliées pour y construire une usine ou pour les besoins
des spéculateurs immobiliers, cherche avant tout à essayer de faire valoir un
droit qu’il considère légitime. La croissance vient désormais après.
L’amalgame entre inégalités sociales et corruption dans l’esprit des
paysans et des citadins chinois est amplifiée par le sentiment que les cadres
locaux du Parti corrompus bénéficient de la plus grande impunité, autrement
dit, de l’appui de leurs supérieurs provinciaux voire même de Pékin. Ils n’ont
sans doute pas tort. En juin 2004, un rapport officiel notait que 41 ministères
avaient détourné au bas mot 170 millions de dollars en 2003 pour spéculer
dans l’immobilier et offrir des logements à leurs employés. Dans les zones
rurales, tout un arsenal de droits d’utilisation, payants bien entendu, ont fleuri
un peu partout sur le concept du péage - vous utilisez, vous payez - dans la
plus parfaite illégalité - les paysans se sont vu imposé des impôts agricoles de
toute sorte, des taxes pour la réparation des bâtiments scolaires, d’autres pour
les travaux d’irrigation… Les autorités centrales avaient pourtant affirmé en