
LCR FORMATION 72 
Il y a dix ans, place Tian'anmen ~ Une révolution massacrée 
Dans la nuit du 3 au 4 juin 1989, l'armée chinoise se livre à une véritable tuerie et détruit les barricades élevées par les 
étudiants pékinois. C'est le point final d'un mouvement de sept semaines, qui accusa la dictature stalinienne du PCC et la 
libéralisation de l'économie qu'il avait instaurée. 
"Deng Xiaoping, Li Peng, Yang Shangkun, Qiao Shi, Chen Yun, vous êtes de véritables ordures, vous êtes les ennemis publics 
des Chinois et de tous les peuples épris de démocratie, de paix et de justice Combien de jours des autocrates et des fléaux 
publics comme vous vont encore sévir? N'ayez crainte, le peuple ne vous absoudra pas de vos crimes! Un milliard cent millions 
de Chinois, en Chine et hors de Chine ne vous pardonneront pas!" 
Dans la nuit du 3 au 4 juin 1989, la 27e compagnie de l'Armée populaire de libération pénétrait dans Pékin comme une armée 
étrangère. En masse, la population  tenta de bloquer son avancée en dressant des barricades. Les tanks et les véhicules 
blindés écrasèrent sur leur passage les barricades et les hommes et les femmes qui s'opposaient à eux, mitraillant dans tous 
les sens. Après avoir perpétré un massacre sur les principaux boulevards de la capitale où des dizaines de milliers de Pékinois 
s'étaient  massés,  l'armée  convergea  dans  la  nuit  vers  la  place  Tian'anmen,  où  des  manifestants,  ainsi  que  des  milliers 
d'étudiants, dont de nombreux grévistes de la faim, étaient rassemblés. Là encore les tanks et les mitraillages firent un carnage, 
alors que le cortège des étudiants tentait de quitter la place. 
Cette boucherie fut l'épilogue sanglant d'une lutte populaire qui pendant près de deux mois, autour des étudiants de l'Université 
de Beida, tenta de combattre la corruption et la dictature des bureaucrates du PCC. 
Inégalités et corruption 
L'importance de ce mouvement dans l'histoire de la Chine n'est pas seulement due à l'écho médiatique qu'il reçut dans le 
monde entier. Le printemps de Pékin de 1989 fut un mouvement profond qui ébranla la population urbaine des principales villes 
du pays. De plus, il fut initié et conduit en dehors du PCC et de ses luttes de fraction, à la différence d'autres mouvements 
antérieurs ou de la période de la Révolution culturelle. 
Deng Xiaoping avait mis en pratique, depuis 1978, une ligne pragmatique qui visait à rompre avec la période maoïste, en 
ouvrant  la  Chine  aux  investisseurs  étrangers  et  notamment  japonais,  à  stimuler  l'initiative  privée  dans  les campagnes,  à 
introduire des critères de productivité dans les usines. La politique de réforme avait dix ans en 1989. Elle avait généré une 
réelle  croissance  économique,  mais  un  accroissement  considérable  des  inégalités,  produit  de  nouveaux  riches  dans  les 
campagnes, mais jeté 200 millions de paysans sans terre ou ruinés aux abords des villes. L'introduction d'une économie mixte, 
décentralisée, avait augmenté le niveau de vie moyen, mais entraîné une anarchie de la production et de la distribution, et 
élargi, notamment dans le Parti et l'armée, une couche de privilégiés, véritable mafia détenant le pouvoir économique. Les 
ouvriers industriels, couche qui avait  longtemps bénéficié de  l'assurance d'un travail  et de  revenus, "le  bol de riz en fer", 
voyaient fondre leur pouvoir d'achat avec une inflation accélérée par la libération des prix de nombre de biens de première 
nécessité; situation d'autant plus insupportable à la vue des bénéficiaires de la corruption qui n'avait jamais connu une telle 
ampleur. 
Pendant  plusieurs années,  cette  crise économique, sociale  et  politique se refléta  comme  d'habitude  dans les  batailles  de 
cliques au sein du Parti. Mais à côté montait un mécontentement populaire qui avait pour base l'aggravation des conditions de 
vie, mais aussi le rejet de la caste des corrompus, du Parti dans son ensemble et l'exigence de réels droits démocratiques. 
Dans le Parti, seul lieu d'expression de courants politiques, la bureaucratie se séparait autour de Deng Xiaoping (principal 
dirigeant de fait du régime), en plusieurs courants, tous, mis à part un petit courant nostalgique du maoïsme, partisans de la 
libéralisation de l'économie. Hu Yaobang, secrétaire du parti destitué en 1987 était partisan d'une démocratisation de la vie 
politique parallèlement avec l'extension de l'économie libérale de marché. Zhao Ziyang qui lui avait succédé y préférait un 
système politique autoritaire, mais plus efficace que la lourde bureaucratie du Parti. 
Sept semaines d'ébranlement 
Le déclenchement du mouvement démocratique fut provoqué par la mort de Hu Yaobang, le 15 avril, terrassé par une crise 
cardiaque. Dans les jours qui suivent, le Monument aux héros du peuple, place Tian'anmen est submergé de fleurs et de 
poèmes dénonçant la corruption. Puis tracts et dazibaos se multiplient. Des manifestations populaires rassemblent toujours plus 
de personnes. Le 20 avril la police charge. Même s'ils évitent de s'en prendre directement au Parti, pétitions et mots d'ordres 
exigent clairement la démocratie et la fin de la corruption. 
Très  vite,  ayant  tiré  le  bilan  de  mouvements  antérieurs,  les  étudiants  créèrent  leurs  propres  organisations,  notamment 
l'Association autonome des étudiants de Pékin. 
Le 26 avril, Le Quotidien du peuple donne clairement la réponse du pouvoir au mouvement naissant : "Il faut lutter résolument 
contre le désordre". Le sort du mouvement est scellé. Le 27, c'est par une immense manifestation que la population répond, 
infligeant une claque à Deng Xiaoping, auteur des idées essentielles de l'éditorial et au Premier ministre Li Peng. Deux jours 
plus tard, Gorbatchev arrive en visite officielle et ne peut accéder au centre de la ville. Le 17, deux millions de manifestants 
envahissent les rues pour marquer leur soutien aux étudiants. Le même jour, le bureau politique décide de mettre fin par la 
force au mouvement. Le 20 mai, la loi martiale est proclamée.