Investir-Le Journal des Finances N°2240 10 DÉCEMBRE 2016
Bévénement
Une tendance favorable à Paris
Alors que le marché parisien est passé dans le vert, le 7 décembre, pour la première fois de l’année 2016,
nous avons sondé huit gérants parisiens.
Rien ne garantissait que la Bourse française finisse
l’année 2016 dans le vert ; c’est désormais bien
engagé. En fait, Paris n’est pas resté en marge des
grands marchés internationaux, qui sont globale-
ment bien orientés depuis l’élection de Donald Trump.
Afin d’anticiper les mouvements futurs, nous avons inter-
rogé huit gérants d’actions et de fonds flexibles connus de la
place. Il se dégage un consensus sur la poursuite de la hausse.
Parallèlement, l’appréciation de la cote devrait être mieux
répartie et profiter plus à l’ensemble des secteurs. Après les
values , notamment les financières, les valeurs de croissance
pourraient aussi être de la fête, ces prochains mois.
Malgré tout, il ne faut pas perdre de vue les positions des
banques centrales, l’évolution de Wall Street et, enfin, les fluc-
tuations du billet vert. Tous ces indicateurs, et bien d’autres
aussi, concernant notamment la situation économique et poli-
tique en Europe seront à prendre en compte.
J.-L. M.
Pensez-vous que le marché français va continuer à monter ?
Le marché européen est désormais dans une bonne fenêtre de tir.
Des seuils qu’il n’avait pas réussi à franchir viennent de l’être. Par
ailleurs, les indices de confiance tant des consommateurs que des entre-
prises sont bien meilleurs, ce qui tend à confirmer qu’une croissance des
bénéfices de 10 % l’année prochaine devient une perspective réelle. Enfin,
la bonne tenue du dollar est un élément important de
soutien au marché. En conclusion, non seulement le
marché devrait poursuivre son ascension mais, en
plus, de façon plus homogène, avec une participation
plus large des nombreuses valeurs.
Quels secteurs privilégiez-vous ?
Au-delà des secteurs qui ont déjà profité d’une embel-
lie, les values en général et les financières en particulier,
d’autres secteurs tels que les services informati-
ques devraient émerger. Par ailleurs, la thémati-
que industrielle combinée à une meilleure santé de
l’économie devrait réapparaître.
MARC FAVARD
Directeur général
de Promepar AM
Pensez-vous que le marché français va continuer à
monter ?
Le phénomène de rotation sectorielle qui tire les
marchés est global. Amorcé par le plan de relance chi-
nois, il avait commencé dans le monde émergent à la fin
du premier trimestre, puis il s’est élargi après le vote en
faveur du Brexit, pour s’intensifier avec l’élection de
Donald Trump, du fait de programmes de relance qui
se cumulent. L’Europe, dont le marché français, devrait
se joindre au mouvement, d’autant que la BCE demeure
en soutien, mais elle a pris du retard ;
par conséquent, elle offre encore du
potentiel.
Quels secteurs privilégiez-vous ?
Les financières, à condition qu’elles
soient suffisamment capitalisées et
les entreprises de BTP quand
elles ont une dimension
européenne.
Pensez-vous que le marché français va continuer à monter ?
Dans l’état actuel de la psychologie des investisseurs, on peut anticiper un rally de fin d’année. Aucune
échéance électorale ne viendra perturber cette fin d’année. Les données macroéconomiques démontrent
toujours que la croissance mondiale est supérieure à 3 %, que la zone euro est à + 1,5 % au moins et que
les coûts de financement sont toujours bas. La rotation entre obligations et actions, qui a véritablement
commencé à partir de l’élection de Donald Trump, peut donc se poursuivre pendant quelques semaines.
Quels secteurs privilégiez-vous ?
Nous privilégions les secteurs qui ont été délaissés depuis quatre ans, ceux que l’on dit « value » ou
décotés. Les valeurs pétrolières et les valeurs bancaires font partie de notre sélection actuelle.
D’autre part, des secteurs tels que l’automobile ou les télécoms peuvent aussi entrer dans les allo-
cations.
IGOR DE MAACK
Gérant et porte-parole
chez DNCA Investments
Pensez-vous que le marché français va continuer à monter ?
Pendant trente-six semaines d’affilée, jusqu’au mois d’octobre, nous avons eu
une décollecte sur les fonds européens. Il y avait toujours une raison fonda-
mentale (telle que le Brexit, par exemple) pour ne pas investir sur cette zone.
Nous sommes dans un marché bien mieux orienté (depuis l’élection de
Trump !), malgré une défiance nouvelle envers la Bourse
parisienne, comme en témoigne l’écart de taux qui s’est
accru entre la France et l’Allemagne. Les Anglo-
Saxons sont sensibles au risque « Le Pen ». Nous
pensons néanmoins que le rally devrait se poursuivre.
Quels secteurs privilégiez-vous ?
La rotation sectorielle semble avoir été très brutale
depuis l’élection de Trump. En fait, elle avait
démarré quelques semaines auparavant, sur
les banques notamment. Cette tendance
devrait se poursuivre sur le value, dont le retard
sur une perspective de long terme reste impor-
tant par rapport aux valeurs de croissance.
MARC CRAQUELIN
Directeur de la gestion
d’actifs de La Financière
de l’Echiquier
Pensez-vous que le marché français va continuer à monter ?
Le mouvement d’appréciation devrait se poursuivre, mais il n’en
demeure pas moins qu’il faut être prudent, en étant très attentif au
discours des banques centrales. Il est légitime de se poser la ques-
tion d’une hausse des marchés dans un environnement de tension
durable des taux d’intérêt. Par ailleurs, le marché
américain – dont la zone d’influence est très
étendue – est devenu cher. Donc, hausse pro-
bable, mais avec des aléas.
Quels secteurs privilégiez-vous ?
La rotation sectorielle, très forte, a fait la part
belle aux secteurs financier et cyclique, au détri-
ment des valeurs de croissance. Ainsi, nous
sommes revenus à des prix d’achat sur ces
dernières. Le temps est venu de se position-
ner à nouveau sur ces titres, et plus parti-
culièrement sur les situations spéciales.
Le marché français va-t-il continuer à monter ?
Je m’attends à une année 2017 relativement difficile, car, alors
même qu’une phase de remontée des taux d’intérêt s’amorce, les
places financières sont chères. Les espérances de rendement des valo-
risations actuelles sont faibles. Historiquement, sur cinq ans, on n’a
jamais gagné d’argent dans une configuration similaire. Pour le long
terme, il n’y a donc pas de raison d’être très
investi aujourd’hui. Les risques pris sont mal
rémunérés, d’autant que j’ai du mal à croire
qu’une politique protectionniste aux Etats-
Unis soit favorable à la croissance économique
mondiale.
Quelle est votre allocation actuelle ?
Le fonds a une exposition nette aux actions
réduite à 20 % aujourd’hui. Il est ainsi outillé
pour faire face à une phase de correction. Je
n’ai pas modifié ce pourcentage ces der-
niers mois.
THOMAS FRIEDBERGER
Gérant de Tikehau Income
Cross Assets
Le marché français va-t-il continuer à monter ?
La hausse actuelle des places financières s’explique en partie par des
raisons de flux. Des arbitrages ont lieu en provenance des marchés
obligataires au profit des actions de la hausse des taux d’intérêt, qui rend
ces dernières plus attrayantes, d’autant qu’elles offrent des rendements
souvent supérieurs. Ce mouvement pourrait se poursuivre à court ou
moyen terme, comme l’indique la résistance étonnante des marchés aux
nouvelles a priori défavorables. Dès qu’une baisse
s’amorce, des acheteurs reviennent.
Quelle est votre allocation actuelle ?
Je n’ai pas modifié mon allocation d’actifs car l’exposi-
tion aux actions est le résultat de notre modèle
quantitatif fondé sur la valorisation des marchés. Il
fonctionne très bien à long terme. Aujourd’hui, les
valorisations sont élevées, voire très élevées aux
Etats-Unis, et notre exposition actions n’est donc
que de 37 %, ce qui est historiquement faible et
traduit notre approche contrariante dans un
contexte d’optimisme effréné des investisseurs
et d’endettement record des Etats.
«
Le marché français va-t-il
continuer à monter ?
Je le pense, mais de manière beau-
coup plus chahutée. En effet, nous
avons fait la partie la plus facile de
la hausse, car ce sont les investis-
seurs à la tête de liquidités plétho-
riques qui ont acheté. Maintenant,
nous entrons dans une phase basée
sur les fondamentaux. Elle devrait
cependant être favorable aux actions,
car l’économie mondiale se porte
plutôt bien et les bénéfices repartent
à la hausse. Nous allons donc assis-
ter à un arbitrage des obligations
en faveur des actions, surtout
de la part des fonds souverains
qui en détiennent trop peu.
Quelle est votre allocation
actuelle ?
Je viens de ramener
de 55 %, maximum
historique, à 42 %,
pourcentage qui
reste élevé, la pro-
portion des actions,
en prenant des bénéfi-
ces sur la partie la plus
agressive : les
actions européen-
nes et, en particulier,
les banques...»
VINCENT CHAILLEY,
Gérant de H2O
Multistratégies
JULIEN LEPAGE
Cogérant de Sextant
Grand Large
PHILIPPE ANDRIEU
Directeur de Raymond
James Euro Equities
DIDIER SAINT-GEORGES
Membre du comité d’investissement
de Carmignac Gestion