Questions pour un champion en anesthésie 149
suggérant l’emploi de l’HNF et des HBPM, à doses préventives ou curatives
chez les patients à risque thrombotique intermédiaire ou élevé. Aucune recom-
mandation n’était faite dans le cadre particulier des patients porteurs de valves
mécaniques [12]. L’héparine non fractionnée est proposée sous administration
continue avec les contraintes inhérentes à son utilisation : hospitalisation,
monitorage régulier du TCA. Elle peut également être injectée par voie sous-
cutanée à raison de 400 UI.kg-1
.j-1 en 2 ou 3 injections. Cette dernière modalité,
satisfaisante sur le plan cinétique est difficile à réaliser sur le plan pratique
chez des malades à domicile. L’emploi des HBPM en place de l’HNF a fait
son chemin et des études récentes permettent de faire le point sur ce sujet.
L’étude REGIMEN comparant HNF et HBPM dans un essai observationnel
multicentrique a montré l’absence de différence entre ces 2 médicaments
pour ce qui est de l’incidence de saignement majeur (1 %) et d’événement
thrombotique (3,8 %). Cependant, les HBPM étaient moins souvent proposées
pour la chirurgie majeure ou en cas d’anesthésie générale dans cette étude [13].
Un autre registre prospectif incluant 650 patients à risque artériel élevé [14] a
montré que l’emploi de daltéparine en relais pré et postopératoire était associé
à un faible risque hémorragique et thrombotique. Deux études prospectives ont
été menées avec les HBPM ; la première [15] avec la daltéparine, la seconde
avec l’enoxaparine [16]. La première montre la faisabilité du relais, la seconde
que des études complémentaires sont nécessaires pour la chirurgie majeure ;
en effet, des saignements plus importants ont été rapportés, comparés à la
chirurgie mineure ou aux gestes invasifs. La synthèse des études publiées [6]
a révélé une incidence globale de 2,68 % d’évènements hémorragiques
graves et de 1,04 % d’évènements thrombotiques pour un nombre total de
1 642 patients chez qui le relais pré et postopératoire a fait appel à des HBPM.
Chez les patients porteurs de valves mécaniques, l’incidence globale des
saignements majeurs serait de 2,8 % ; celle des thromboses de 0,4 % en se
référant à 749 patients issus de 5 études [17].
CONCLUSION
L’arrêt préopératoire des AVK n’est pas indispensable pour tous les actes
réalisés en chirurgie ou en dehors du bloc opératoire. Si cet arrêt est nécessaire
avant l’intervention, il n’est pas indispensable de relayer les AVK dans tous les
cas. En cas de relais, les HBPM sont de plus en plus souvent proposées, mais
restent à évaluer à grande échelle. D’autres possibilités sont également explorées
telles l’absence d’arrêt préopératoire associé à l’administration d’une petite dose
de vitamine K la veille de l’opération pour corriger rapidement l’INR.
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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