Dans les années 80, le traitement anti

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Les médicaments des Neurosciences : Epilepsies
Dr Luc Valton, Service de Neurologie, Hôpital Rangueil.
Dans les années 80, le traitement anti-épileptique reposait sur 4 molécules principales : le
phénobarbital, la phénytoine, la carbamazépine et le valproate de sodium. Par rapport aux 2
premiers, la carbamazépine et le valproate de sodium sont globalement aussi efficaces et
mieux tolérés en particuliers sur les plans neuro-cognitif et cutanéo-muqueux. De maniement
relativement aisé, leur formulation à libération prolongée est devenue le traitement de
référence, des épilepsies dites généralisées pour le valproate de sodium et des épilepsies
partielles non idiopathiques pour la carbamazépine.
Le traitement des épilepsies a été profondément renouvelé au cours des 20 dernières années ;
de nombreuses nouvelles molécules ont été commercialisées depuis 1991, par ordre
chronologique : vigabatrin, felbamate, gabapentine, lamotrigine, tiagabine, topiramate,
oxcarbazépine, levetiracetam, prégabalin, zonisamide, lacosamide, eliscarbazépine. Et
d’autres molécules sont en cours d’évaluation et sortiront prochainement sur le marché. Si ces
nouvelles molécules n'ont pas transformé le niveau d'éfficacité du traitement antiépileptique,
ils ont en revanche apporté un gain significatif en terme de tolérance. Et ben que leur place
soit encore en cours d’évaluation, des indications spécifiques ont été établies ou sont sur le
point de l'être.
Le choix du traitement de première intention dépend, en premier lieu, du syndrome
épileptique. Mais nous cherchons maintenant à proposer une démarche thérapeutique
individualisée, qui tienne compte, non seulement du syndrome épileptique, mais également
des propriétés des molécules (mode d’action, spectre d’efficacité, mode d’élimination,
iatrogénie, mais aussi effets bénéfiques associés) et des caractéristiques des patients (l’âge, le
sexe, l’étiologie, l’association à d’autres traitements et la présence de comorbidités), pour
obtenir un rapport efficacité/tolérance optimal. C'est ainsi que de nouvelles indications ont été
établies, comme l'utilisation de la lamotrigine chez les jeunes femmes, le choix de la
lamotrigine ou de la gabapentine pour les épilepsies du sujet âgé, de l'oxcarbazépine dans les
épilepsies partielles, de la lamotrigine, de la gabapentine ou du levetiracetam pour les
épilepsies vasculaires...
Le choix, les effets bénéfiques et, potentiellement négatifs de la molécule sont clairement
expliqués au patient et à son entourage pour favoriser une bonne compliance. Pour réduire le
risque d’effets indésirables, on propose de débuter avec une posologie faible, et d’augmenter
très progressivement jusqu’à un premier palier thérapeutique. La survenue de certains effets
indésirables (érythrodermie, agranulocytose, hépatite sévère…) peut nécessiter l’arrêt
immédiat du traitement, mais les effets indésirables sont souvent modérés, ou rapidement
améliorés par une réduction de la posologie. Parfois la mauvaise tolérance peut conduire à un
changement thérapeutique. L’efficacité est satisfaisante dans environ 60% des cas.
L’échec d’une première monothérapie bien menée (bonne observance, absence de facteurs
favorisants tels que troubles du sommeil, consommation d’alcool ou de médicaments
épileptogènes…), conduit à proposer une deuxième monothérapie dont le mode d’action est
différent de la première. Cela augmente d’environ 15 % le nombre de patients équilibrés.
En cas d’échec de 2 monothérapies bien conduites, on envisage soit une troisième
monothérapie, soit le passage à une bi thérapie. Les chances de succès sont moindres et le
risque d’être confronté à une réelle pharmacorésistance est important.
Malgré l’apparition des nouveaux traitements, 30% des patients restent imparfaitement
équilibrés. La pharmacorésistance, correspond à la persistance des crises épileptiques malgré
un traitement bien conduit pendant au moins 2 ans, avec l’essai d’au moins 2 molécules AE.
Un bilan est nécessaire pour vérifier que les crises persistantes sont bien de nature épileptique
(les manifestations conversives sont le diagnostic différentiel le plus fréquent), que le
traitement est bien pris, à dose suffisante, et qu’il est adapté au syndrome épileptique.
L’épilepsie est alors souvent sévère, les crises sont fréquentes, et le retentissement sur la vie
du sujet est majeur. Ainsi toute suspicion de pharmacorésistance justifie la demande rapide
d’un avis spécialisé. La prise en charge doit être globale, médicale et sociale. Il pourra être
judicieux de faire une demande de prise en charge à 100%, une reconnaissance du statut de
travailleur handicapé, ou d’envisager des adaptations du milieu de vie. Sur le plan médical il
faut faire une réévaluation complète du syndrome épileptique, par un bilan anatomo- électroclinique complet, dont l’enregistrement videoEEG des crises est souvent l’étape essentielle.
On évaluera toutes les possibilités thérapeutiques envisageables.
La principale solution alternative, en cas d’épilepsie partielle repose sur la chirurgie de
l’épilepsie qui consiste en l’exérèse de la zone épileptogène. L’intervention est proposée au
terme d’une démarche individualisée, comprenant la réalisation d’explorations longues et
coûteuses certes, mais dont le bénéfice est maintenant clairement démontré en terme
d’efficacité sur les crises, mais aussi d’amélioration de la qualité de vie, de réduction de la
morbidité et de la mortalité, et même de coût pour la société. Le bénéfice global de la
chirurgie est d’autant plus important que ce traitement a été envisagé tôt dans l’évolution. Le
bilan permet également de considérer plus rapidement d’autres solutions thérapeutiques
comme l’utilisation de certaines molécules réservées à des syndromes épileptiques sévères, la
pose d’un stimulateur vagal, ou la diète cétogène.
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